Histoire Des Gaulois D'orient
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HISTOIRE DES GAULOIS D’ORIENT PAR FÉLIX ROBIOU ÉLÈVE DE L’ÉCOLE NORMALE, AGRÉGÉ D’HISTOIRE, DOCTEUR ES LETTRES PARIS – 1876 AVERTISSEMENT. CHAPITRE PREMIER. — Les Cimmériens CHAPITRE II. — Les Gaulois d’Illyrie CHAPITRE III. — La Macédoine, la Grèce et la Thrace, à l’arrivée des Gaulois CHAPITRE IV. — Invasion de la Macédoine et de la Grèce par les Gaulois CHAPITRE V. — Les Gaulois en Thrace CHAPITRE VI. — L’Asie Mineure au commencement du IIIe siècle. — Arrivée des Gaulois en Asie CHAPITRE VII. — Etablissement des Gaulois en Asie CHAPITRE VIII. — Étendue et topographie de la Galatie CHAPITRE IX. — Les cultes de Phrygie. - La religion des Galates CHAPITRE X. — Le gouvernement des Galates CHAPITRE XI. — Histoire des Galates, depuis leur établissement en Asie jusqu’à l’arrivée des Romains CHAPITRE XII. — La bataille de Magnésie et la paix avec Antiochus. - Campagne de Manlius Vulso contre les Galates CHAPITRE XIII. — Histoire des Galates, depuis la paix avec les Romains jusqu’à la réunion à l’empire CHAPITRE XIV. — La province de Galatie CHAPITRE XV. — Les Galates sous la domination romaine CHAPITRE XVI. — La Galatie sous le Bas-Empire Le sujet de concours proposé par l’Académie était celui-ci : Retracer, d’après les monuments de tout genre, l’histoire des invasions des Gaulois en Orient ; suivre jusqu’aux derniers vestiges qui subsistent de leurs établissements en Asie Mineure, de leur constitution autonome, de leur condition sous l’administration romaine, de leurs alliances avec les divers peuples qui les entouraient ; comparer, pour les mœurs et les usages, les Galates avec les Gaulois de l’Occident. ÉPIGRAPHES. Taillés à coups de hache ou d’épée, les Gaulois ne désespéraient point, tant qu’ils respiraient encore, et conservaient leur courage aussi longtemps que leur vie. (Pausanias, X, XXII.) Aucune énumération chronologique ou généalogique des chefs ou tétrarques galates, non plus que de leurs hauts faits et de leurs institutions, n’a été conservée par eux, durant les trois siècles de leur domination ; entourés de peuples lettrés, ils semblent n’avoir point eu d’écrit qui leur appartint. (Ritter, Asie Mineure, chap. XV.) La Babylonienne Mylitta, comme la Phrygienne Gybèle, s’appelait la Grande Mère, d’après un mythe emprunté au sémitisme. (Movers, Les Phéniciens, t. I, p. 586.) AVERTISSEMENT Si le présent volume est, en général, la reproduction du mémoire que l’Académie des inscriptions a couronné il y a trois ans, je n’ai point négligé néanmoins, avant de l’offrir au public, d’apporter un soin vigilant à la révision de mon travail et à la recherche des documents qui pouvaient y faire disparaître de fâcheuses lacunes. Les obligeantes indications de la Commission elle-même, celles du savant qui présidait l’Académie en 1865, M. Egger, celles du jeune héritier d’un nom glorieux, M. François Lenormant, m’ont surtout été utiles pour compléter mes études sur les Galates. J’ai donc pu, tout en revoyant la forme de ma rédaction, tout en modifiant quelques conclusions de détail, soit sur les courses des Cimmériens, soit sur la topographie de l’Asie Mineure, soit sur l’administration de la Galatie romaine, en acquérant d’ailleurs une connaissance plus complète des travaux de M. Texier, et en remaniant la partie mythologique du mémoire qu’on avait trouvée trop longue, faire usage, dans cette publication, de ressources tout à fait nouvelles pour moi. Je signalerai parmi elles l’ouvrage de Wernsdorf, insuffisant aujourd’hui sans doute, mais bien supérieur, selon moi, aux travaux de son contemporain Pelloutier sur les Celtes, et spécialement sur les Galates ; des mémoires de Fréret et de l’abbé Belley, dans l’ancienne série de l’Académie des inscriptions ; enfin des documents de diverse nature touchant l’expédition de Delphes. CHAPITRE PREMIER. — LES CIMMÉRIENS. Les faits les plus anciens qui nous montrent la race gauloise en rapport avec les peuples orientaux, ce sont les invasions des Cimmériens dans l’Asie Mineure. Le tableau le ces invasions n’a été tracé en détail par aucun historien, a moins de ceux dont les écrits sont parvenus jusqu’à nous ; aussi n’ai-je ici que deux questions à traiter : la fraternité des Cimmériens avec nos ancêtres et la chronologie de ces invasions. Encore, pour la première, devrai-je plutôt l’indiquer que la développer. Elle a été examinée par M. Amédée Thierry dans l’introduction de son Histoire des Gaulois, et je n’aurai guère ici qu’à rappeler ses arguments. Outre le langage de Diodore1, de Strabon2 et de Plutarque3, et, si l’on veut,-la racine du mot Κιµµέριοι, c’est-à-dire le nom de Kimris, que les Gallois se donnent encore à eux-mêmes4, le nom de la Tauride, dont le Bosphore a conservé si longtemps l’épithète de Cimmérien, tandis que Taur, en kimrique comme en gaélique, signifie montagnard et représente ici les habitants du Tchatyr-Dagh, qui s’étend de Sébastopol à Iéni-Kalé ; puis surtout le nom des cavernes que se creusaient ces peuples, sans doute pour se soustraire aux rigueurs d’un hiver de Crimée, et qu’ils désignaient par le mot kimrique d’argel ou argil, sont des indices qui laissent peu de place au doute, si, du moins, on les rapproche les uns des autres5. On pourrait douter toutefois que le souvenir des sacrifices humains, auxquels présidait Iphigénie, soit une preuve bien réelle que les Cimmériens de l’Euxin pratiquassent cette affreuse coutume, existant encore, aux temps les plus historiques, chez les Gaulois d’Occident ; peut-être, sans nier le culte sanglant de la Tauride, peut-on croire que les Grecs avaient choisi arbitrairement une région de ce qu’ils appelaient la Scythie, pour faire rejaillir sur la plus douce figure de la famille des Atrides les fatales horreurs de sa maison. Mais cette réserve sur un détail des preuves ne doit pas nous induire à rejeter l’existence de la race gauloise dans l’Europe orientale, à une époque à la fois ancienne et historique. Les témoignages en deviennent, d’ailleurs, de plus en plus nombreux lorsqu’on approche du siècle qui vit s’opérer l’établissement des Galates. J’aborde donc, sans plus de préambule, la question des dates auxquelles on doit rapporter les invasions des Cimmériens dans l’Asie Mineure. Je dis les invasions, quoique Hérodote, le seul historien qui mentionne ce fait, n’en signale qu’une seule, assez longue, il est vrai. Mais Strabon, dont les textes, sur ce sujet, ont été réunis ou, du moins, indiqués par M. Bach, dans sa savante édition de Callinus, affirme qu’il y en eut plusieurs. Parlant, au troisième chapitre de son premier livre, des migrations de peuples, il assure6 que les Cimmériens, nommés Trérons, ont plusieurs fois dévasté le pays à droite du Pont-Euxin et les 1 Liv. V, ch. XXXII. 2 Voyez le second fragment de Callinus, dans l’édition de Bach (cf. Strabon, VII, II). 3 Vie de Marius, ch. XI. 4 Il est vrai que Fréret (Mémoire sur les Cimmériens, 2e article, Académie des inscriptions et belles-lettres, t XIX, p. 592-593) regarde ce nom comme dérivé du breton kimmar associés, et pris par les Bretons insulaires pour exprimer leur ligue formée contre les envahisseurs saxons. Mais cette hypothèse, fût-elle vraie, laisserait encore au nom des Cimmériens une racine gauloise ; et c’est dans la langue gauloise aussi que Posidonius et Festus cherchaient et croyaient trouver l’étymologie de ce nom, ainsi qu’il résulte des citations de Fréret lui-même, au même en droit (p.591). — M. de Courson m’assure que le nom de Kimri ne se trouve chez les Bretons que vers le XIIe siècle. 5 Histoire des Gaulois, introduction. p. LVI-LVII. 6 Liv. I, c. III, p. 97 du Ier vol. dans l’éd. Tauchnitz ; Leipzig,1899. Etats voisins, tantôt la Paphlagonie, tantôt la Phrygie, où ils réduisirent le roi Midas à se tuer. Il avait dit plus haut1 que les Cimmériens avaient pénétré en Ionie, dès le temps d’Homère ou peu avant lui, et que ce poète connaissait le Bosphore cimmérien, puisqu’il parle de ce peuple. J’avoue que ce raisonnement ne me paraît pas avoir une portée bien grande. Quoi qu’en dise le savant commentateur2, M. Tiersch a eu raison de ne pas voir des souvenirs historiques fort authentiques dans la mention qu’Homère fait des Cimmériens ; elle montre seulement qu’ils habitaient déjà dans la région de l’Euxin ; mais le souvenir d’incursions de ce peuple en Asie Mineure, à des époques diverses, est tout autrement sérieux. Strabon dit que les Trères en ont fait aussi plusieurs, et il les compte au nombre des peuples gaulois, quoiqu’il les distingue des Trérons. Il raconte (ubi supra) que Kob, chef des Trères, fut expulsé de son pays par Madys, roi des Cimmériens, qu’il appelle, un peu plus haut, Madys, l’habitant de la Scythie (τοΰ Σκυθικοΰ). Et, comme ailleurs3 il dit aussi que les Trères, qui ruinèrent Magnésie, étaient des Cimmériens, il résulte clairement du rapprochement de ces divers passages que, selon le plus éminent des géographes anciens, les Trérons et les Trères étaient deux tribus cimmériennes ; que les Cimmériens eux-mêmes appartenaient à la race qui a peuplé la Gaule, et que les Trères ont habité la Scythie, ainsi que d’autres Cimmériens. Mais en résulte-t-il que toutes les dévastations opérées dans l’Asie Mineure par les Cimmériens, Trérons ou Trères, à des époques reculées, soient le fait de hordes parties de la Scythie ? Strabon semble le penser, j’en conviens ; les mots à droite du Pont-Euxin, qu’il emploie en parlant de la Paphlagonie et de la Phrygie, indiquent une invasion venue par la Thrace, ou, du moins, allant de l’ouest à l’est.