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Québec français

Les sons de l'été Roger Chamberland

Le nouveau programme de français au secondaire Number 102, Summer 1996

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Publisher(s) Les Publications Québec français

ISSN 0316-2052 (print) 1923-5119 (digital)

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Cite this review Chamberland, R. (1996). Review of [Les sons de l'été]. Québec français, (102), 92–94.

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Les sons de l'été par Roger Chamberland

De plus en plus, de nouvelles voix tentent de percer à côté de celles des aînés. Même si on pourrait souhaiter un peu plus d'audace des nouvelles recrues, il n'en demeure pas moins qu'un premier album est une étape essentielle qui gHtes f'R devrait donner un nouvel élan.

our cette chronique, j'ai retenu fait justice aux textes. L'album est trois noms de la relève et deux largement acoustique, avec la guitare, P noms bien établis de la chan­ la basse et la batterie auxquelles son avec, en complément, deux artis­ s'ajoutent parfois le trombone, le tes du rock au féminin. saxophone et l'accordéon, et sait largement recourir à des rythmes Le trottoir des anonymes. Rioux différents pour coller à la réalité des Le premier album de Rioux pourrait textes. On peut comparer Rioux à fort probablement être pour vous un Daniel Bélanger. C'est donc dire album coup de cœur comme il l'a été l'excellence de ce premier album pour moi. Le trottoir des anonymes dont la réalisation est remarquable. compte une dizaine de pièces pré­ thématique de ces onze chansons qui sentant le monde intérieur de Rioux, Luce Dufault. Luce Dufault gravitent, à quelques nuances près, auteur des textes et de la musique, Premier album de Luce Dufault, que autour du même thème : l'amour. mises à part les chansons nous a révélé , pour lequel Même après plusieurs auditions, on ne « Courseulles-sur-mer » et « Leïdja » elle a su s'entourer de paroliers et de parvient pas toutefois à accrocher à ce auxquelles a collaboré Louise Fores­ compositeurs reconnus. Qu'on en disque qui manque de personnalité, tier. La ville, comme dans « Le trottoir juge par les noms qui s'y retrouvent : comme si la chanteuse, même entou­ des anonymes », les fausses religions Dan Bigras, Pierre Flynn, Gilbert rée des meilleurs artistes, n'était pas (« Guru »), les relations hommes- Langevin, , Marc Cha­ parvenue à se donner un style. En fait, femmes (« Romanichelle », « Leïdja », bot, Louky Bersianik, Luc Plamondon, la responsabilité doit en être imputée à etc.), l'enfance malheureuse Christian Mistral, Richard Séguin et la direction artistique, qui n'a pas su (« Comme un souffle qui nous Sylvie Massicotte. Peut-on imaginer insuffler une dynamique à ce premier traîne »), la vieillesse (« La maison meilleure distribution ! Surtout quelle disque. grise ») et la guerre (« Courseulles-sur- confiance ces auteurs lui ont-ils signi­ mer ») sont autant de thèmes que fiée ! Mais c'est à l'écoute que nous Histoire sans prénom. Marianne l'auteur a su traiter avec poésie et pouvons le mieux apprécier cet al­ Elle a une voix séduisante, des ryth­ profondeur. Les paroles sont particu­ bum rempli d'atmosphères feutrées mes accrocheurs et des textes qui, lièrement remarquables ; Rioux par­ et empreintes de mélancolie et malgré leur simplicité, disent la joie de vient à traduire avec des images peu d'amours perdues. Cette multiplicité vivre. « Histoire sans prénom », qui a banales la densité d'une émotion, la des collaborateurs et collaboratrices beaucoup joué à la radio, nous a fait grandeur d'un geste et la franchise se perçoit dans le traitement des connaître Marianne, une jeune inter­ d'un sentiment : « Lui parlez de paix/ textes ou de la musique. .Ainsi « Soirs prète au talent prometteur. Les onze Car la guerre a des ailes/Dans le cœur de scotch » et « Tequila » portent la chansons de son premier album tour­ des hommes/Elle se pose sur l'enfant marque de Christian Mistral pour le nent principalement autour de l'amitié qui naît/ Sur les pleurs qui s'emmê­ texte et de Dan Bigras et de Pierre et de l'amour à travers des textes lent/ Et sur les bruits qui tonnent » Flynn pour la musique. Par son inter­ inégaux écrits par plusieurs paroliers. (« Courseulles- sur-mer »), sans comp­ prétation, Luce Dufault se montre à la Le meilleur côtoie le pire, mais la ter sur des compositions musicales et hauteur des textes et de la musique ; sincérité et la justesse de l'interpréta­ une interprétation qui rendent tout à elle sait de plus rendre la couleur tion nous laissent penser que le

92 OUÉBEC FRANÇAIS ÉTÉ 1996 NUMÉRO 102 le rock BU féminin prochain album pourrait être celui qui la lancera véritablement. Le rock au féminin vient de s'enrichir de deux nouveaux albums, l'un en France, l'autre au Québec. D'un côté, Guesch Patti et C'est ainsi que j'arrive à toi. Blonde, de l'autre, Nanette Workman et Une à une. Deux disques Cilles Vigneault qui secouent et qui brassent tant par les textes que par la musique. En voilà un qui n'a pas fini de nous Depuis son succès « Etienne », Guesch étonner, même après quarante ans de Patti n'avait pas fait grand bruit avec carrière ! Son plus récent album, C'est ses albums subséquents, mais Blonde ainsi que j'arrive à toi, nous réserve devrait en faire plus. Onze pièces, de bien belles surprises et nous re­ dont huit qu'elle a écrites elle-même, plonge dans l'univers familier de Vi­ les autres étant redevables à Etienne gneault. Le moins que l'on puisse dire, Daho, Lou et Françoise Hardy, sont c'est qu'il a su se renouveler au con­ comme autant d'anecdotes autobio­ tact de Richard Bélanger, le directeur graphiques qui traquent la réalité artistique, et de Bruno Fecteau, avec dans son étrangeté : « Je souffre qui il signe la plupart des musiques. Mais il y a d'autres collaborations tout d'interdits/Sans alibi. Eh là,/Mais aussi significatives sur certaines piè­ on humilie /Ma réalité » (« Ma ces : Geneviève Paris, Bob Cohen, réalité »). Patti signe également Mario Legaré, avec leurs guitares ou toutes les musiques qui démou­ mandolines, et Kate et Anna lent tant elles sont souvent nova­ McGarrigle, dont les voix de choristes trices en délaissant les chemins bat­ sur « Charlie-Jos », une chanson aux tus du rock traditionnel. À sonorités accents country, la rendent tout à fait singulières, paroles singulières : irrésistible. Guesch Patti relève ce double défi De chansons en chansons, nous pour notre plus grand plaisir. découvrons un élément nouveau qui Nanette Workman a connu elle les rend toutes spéciales : utilisation aussi une carrière en dents de scie. du banjo dans « Les outils », rythme Elle a travaillé avec les grands de la country de « Charlie-Jos », ou blues de musique populaire, des Rolling « J'ai mal à la terre » et accompagne­ Stones à Luc Plamondon en pas­ ment à la vielle à roue et mandoline sant par Serge Fiori et elle s'est pour un effet de musique médiévale bâtie une solide réputation dans dans « Au jardin de mon père ». Même si Vigneault reste fidèle aux thèmes le rock, sans toutefois connaître qui lui sont chers, il toujours le succès. Une à colle de plus près aux • Discographie valeurs contemporai­ une assure la continuité tout en mar­ nes comme l'écologie quant la maturité d'une femme qui, dans la cin­ ou la guerre, sans Jim Corcoran, Portraits, quantaine, possède encore une voix de tonnerre renoncer à ces histoi­ Audiogram, ADCD-10091 et sait transporter ses émotions comme d'autres res d'un autre temps Luce Dufault, Luce Dufault, le poids de leurs années. Les douze chansons du qui trouvent encore Arpège musique AMCD-904 disque oscillent entre le rock pur et vibrant, le de la résonance de Marianne, Histoire sans prénom, blues et la ballade amoureuse débarrassé de sa nos jours. Vigneault Sanso SANCD-3400 mièvrerie ou de son idyllisme adolescent. Ses est un artisan de la Guesch Parti, Blonde, trois paroliers, Jacques Veneruso, Erick Benzi et langue et ses textes XIII Bis Records, CDLCD-1844. Gildas aArzel, ont su lui écrire des textes qui lui portent l'empreinte Rioux, Les trottoirs anonymes, vont à merveille et qu'elle sait rendre avec toute de ce travail sur les Disques Double, DOCD-30036 l'intensité voulue. Mieux encore, ces chansons mots et les images. sont souvent écrites au je et traduisent des im­ Fidèle à son écriture Gilles Vigneault, C'est ainsi que je pressions de bonheur, des sentiments de dé­ classique aux pieds viens à toi, Le Nordet GVNC-1822 tresse et des états où l'on sent l'urgence de la bien comptés, il nous Nanette Workman, Une à une, parole. offre un album dont Disques Doubles DOCD-30039. nous aurions tort de nous priver.

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RÉPROUVÉS, MALVATS, IlI KI OIS Portraits. Jim Corcoran ET AUTRES Plusieurs diront : « Encore une rétrospective », en oubliant que GENTILSHOMMES Jim Corcoran est peut-être l'un des chansonniers les plus impor­ tants au Québec. Depuis plus de vingt ans, il a construit une lt*:i'H«n Fs, M u vvr*. m im ois œuvre qui a marqué le paysage de la chanson québécoise. Les quatorze chansons de cet al­ bum permettent de faire le tour du propriétaire, partant de « La tête en gigue » jusqu'à « Zola en vélo » en passant par « Comme Chartrand », « Perdus dans le même décor » et « C'est pour ça que je t'aime ». À la différence des rétrospectives usuelles qui sont des repiquages d'anciens albums que l'on colligé, celle-ci est composée essentiellement de nouvelles interprétations acoustiques. Et, dans ce cas- ci, le terme nouvelle interprétation n'est pas trop fort puisque Corcoran s'est entouré de nouveaux musiciens et a enregistré, quatre jours durant, Rolland Morrissette sur un système à la fine pointe de la technologie. Cette façon de faire nous permet de redécouvrir des chansons aux sonorités inédites grâce Retraité, Rolland Morrissette jase encore. Écoute qui aux jeux de guitares. Ce disque renforce notre appréciation du talent de voudra, rien ne l'empêche de guitariste et d'interprète de Corcoran. Ces versions tranchent parfois de parler. Si d'aventure il peut façon draconienne avec celles que l'on connaissait. Il suffit d'écouter trouver un auditoire et une « Perdus dans le même décor » pour constater à quel point une chanson bonne bouteille de brandy. peut être transformée, voire bonifiée dans la mesure où elle n'a plus à Rolland Morrissette devient porter les marques musicales de son époque. Même après plusieurs intarissable. Il raconte pendant écoutes, je ne suis pas parvenu à me lasser de ces chansons, y redécou­ des heures. Il fait revivre son vrant à tout coup la beauté des textes, la subtilité des arrangements et petit village, les us et coutumes l'excellence de la prestation des musiciens. Il faut souligner encore la de son temps, les hommes qu'il qualité de la réalisation et de la prise de son qui présentent un bel équili­ a connus et côtoyés. Il sait voir bre entre la voix et les instruments. Je ne suis pas certain que ceux qui les choses, cerner les caractères, ont suivi le parcours de Corcoran apprécient à leur juste mesure ces décrire les situations. Il parle longtemps et bien. versions acoustiques. Par contre, il est assuré que ce disque fera les déli­ ces de ceux et de celles qui préfèrent l'ambiance des boîtes à chanson. Pour l'auteur, un réprouvé, c'est une personne mauvais, révoltée, damnée: un malvat, c'est une personne soumise, L'Action nationale hypocrite, qui prépare ses avais Fondée en 1917 coups dans l'ombre: un hurlot, c'est une personne orgueilleuse Revue mensuelle, 35,00$ par an qui fait étalage de ses défauts pour faire peur au monde. • Sociale, économique et indépendantiste • Indépendante des partis politiques • Des faits, des idées et des solutions • 1 600 pages par année GUERIN *=? 4501, rue Droiet • Plus de 200 collaborateurs Montréal (Québec) H2T 2G2 Téléphone: (514) 842-3481 Télécopieur: (514) 842-4923 1259, rue Berri, bur. 320, Montréal • H2L 4C7 1-(514) 845-8533 Télécopie (514) 923-5755

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