AUTUNOIS

Le Creusot Chalon-sur-Saône

Montceau-les-Mines

BRESSE

Digoin

CHAROLAIS Mâcon

Carte 1. Localisation des 3 sites Agrifaune en Saône-et-Loire.

Daniel SIRUGUE

Photographie 1. Rivière la Seille et Moulin de Romain, commune de Saint-Usuge 71) dans la Bresse - Août 2006

112 Bertrand DURY & Fabienne SALVI PETIT GIBIER

La prise en compte de la faune sauvage par les agriculteurs de Saône-et-Loire dans le cadre d’Agrifaune : l’exemple de la Bresse

Bertrand DURY* & Fabienne SALVI*

Résumé En Saône-et-Loire, comme au niveau national, le réseau Agrifaune fait la promotion d’une agriculture durable qui prône le maintien ou le rétablissement de la biodiversité, des territoires et des milieux. Parmi ses objectifs, Agrifaune veut faciliter la prise en compte de la faune sauvage et du petit gibier pour des agriculteurs performants tout en valorisant les territoires agricoles par la chasse. La Saône-et-Loire est concernée par trois projets. Agrifaune dont le plus important se situe sur la Bresse et plus particulièrement les communes de Montcogny, Montagny-près- et Saint-Usuge. Les objectifs du réseau sont double : • Favoriser la mise en œuvre d’actions communes entre agriculteurs et chasseurs sur le terrain (en terme de sensibilisation, pratiques, de recherche,…) • Constituer un réseau d’exploitations intégrant la prise en compte de la faune sauvage dans les pratiques et faciliter la vulgarisation de ces bonnes pratiques au travers ici d’une opération de développement d’une population naturelle de faisan commun. Une dizaine d’exploitants participent régulièrement aux différentes rencontres depuis la signature de la convention en juillet 2008. Les actions en cours concernent principalement la limitation de l’érosion du linéaire de haie ainsi que la préservation de la biodiversité animale avec notamment la mise en place de mesures innovantes, soucieuses d’une agriculture durable et dynamique.

Mots-clés : faune sauvage, agrifaune, pratiques agricoles.

* Chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire - Service Agronomie Gestion de l’Espace et Environnement 59 rue 19 mars 1962 - BP 522 - 71010 MACON CEDEX - [email protected] - [email protected]

La convention Agrifaune Issu d’une convention nationale passée entre l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS), la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA), la Fédération Nationale des Chasseurs (FNC) et l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture, le réseau Agrifaune montre la volonté des agriculteurs et des chasseurs de travailler ensemble pour favoriser la prise en compte de la biodiversité, de la faune sauvage, ou plus largement de l’environnement, par l’agriculture. En Saône-et-Loire, une convention Agrifaune a été signée en juillet 2008 entre les diffé- rents partenaires (ONFCS, Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles, Fédération Départementale des Chasseurs et Chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire). Au préalable, plusieurs rencontres avaient permis de définir les secteurs d’interventions et déjà de réfléchir au plan d’actions intéressant à mettre en place sur le département. Au sein du plan d’actions, trois orientations ont été retenues sur les entités du dispositif Agrifaune en Saône-et-Loire : • Bocage • Mosaïque des habitats • Reproduction du petit gibier. Trois sites Agrifaune ont été choisis au sein de trois petites régions (carte 1) : • Le Charolais avec trois communes (, Lugny-lès- et ) • L’Autunois avec trois communes (, Monthelon et Tavernay) • La Bresse avec trois communes (Montcogny, Montagny-près-Louhans et Saint-Usuge)

L’objectif du dispositif Agrifaune est de mettre en place des pratiques progressives mais durables pour que les exploitants prennent en compte la biodiversité faunistique présente sur les parcelles agricoles.

Rev. sci. Bourgogne-Nature - 14-2011, 112-115 113 L’exemple de la Bresse Le site Agrifaune retenu en Bresse est également concerné par d’autres enjeux comme : • le contrat de rivière du bassin de la Seille porté par l’Etablissement Public Territorial du Bassin Saône et Doubs (EPTB) ; • la Zone de Protection Spéciale au titre de Natura 2000 (Prairies alluviales et milieux associés de Saône-et-Loire - FR2612006) dont l’EPTB est l’opérateur ; La FDC et la Chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire participent aux différents comités techniques et de pilotage). Après la signature de la convention, tous les exploitants de la zone retenue ont été conviés à une première réunion au début de l’année 2009 afin de présenter le dispositif Agrifaune et de les informer de sa mise en place sur leurs communes. Les réunions se sont poursuivies avec les exploitants intéressés et volontaires pour suivre ce dispositif. Le site en Bresse est celui qui rassemble le plus d’agriculteurs aux différentes ren- contres avec une dizaine de participants. A partir d’une phase de sensibilisation suivant les orientations (bocage, mosaïque des habitats et reproduction du petit gibier), l’objectif de ces rencontres est d’analyser les différentes problématiques et par échange avec les exploitants de trouver des solutions pour pallier aux problèmes mis en évidence. L’idée majeure de la mise en œuvre du dispositif repose sur deux principes : • Arriver rapidement à des actions concrètes sur le terrain pouvant être appliquées loca- lement et prenant en considération les contraintes des exploitants. • Dégager un consensus local et partenarial autour des actions retenues Les premières actions engagées en 2009 sur le site en Bresse

Bocage En Saône-et-Loire, le bocage est un sujet assez sensible car les linéaires continuent de disparaître ce qui contribue à créer des discontinuités dans cette trame du milieu. En effet, les linéaires restants ne sont plus forcément connectés entre eux. Une action spéci- fique sur la prise en compte de l’existant a été menée par la sensibilisation des exploitants sur l’impact de certaines pratiques « arrachage de haies, date d’intervention,… ». Il y a actuellement une réflexion sur l’entretien des haies hautes à l’aide d’un lamier proposé par les exploitants avec par exemple la création d’une coopérative d’utilisation de maté- riel agricole (CUMA). Une synergie pourrait être engagée avec les communes avec une mise à disposition du matériel pour l’entretien communal. Mais ce projet nécessitera la mobilisation de financements européens, nationaux et régionaux,…

Mosaïque des habitats Par rapport à l’amélioration de certaines pratiques, une sensibilisation a été entreprise avec un encouragement à la mise en œuvre de solutions alternatives. L’objectif était de faire prendre conscience aux exploitants de la disparition progressive de biodiversité ordinaire des différents milieux et des difficultés rencontrées par la faune sauvage pour trouver la nourriture sur leur territoire. Les exploitants ont proposé, pour tenter de pallier à cette problématique, de laisser des bandes de cultures sur pied après la récolte. L’entretien des bandes enherbées a fait l’objet de discussions sur le choix des différentes espèces les mieux adaptées en fonction des types de sols. Ces discussions ont donné lieu à la rédaction de deux notes sur les jachères « environnement faune sauvage » (FDC 71) et les couverts environnementaux. Des cahiers des charges ont été rédigés pour les bandes de cultures laissées sur pied. Ces mesures ont été proposées à partir du constat suivant : • 75 % de la biodiversité fréquente les milieux agricoles et sylvicoles • les cultures (notamment céréales) sont une source importante de couvert et d’alimentation • les pratiques agricoles qui tendent vers une simplification des milieux par un agrandis- sement des parcelles rend plus difficile pour la faune de couvrir ses besoins • les bandes de cultures offrent un intérêt pour la faune (nourriture, repos, lutte contre la prédation...)

114 Bertrand DURY & Fabienne SALVI Rev. sci. Bourgogne-Nature - 14-2011, 112-115 Quelques contrats ont été signés dés 2009. Ces bandes sont localisées préférentiellement vers éléments fixes du paysage (haies, bois, talus,…) et doivent être issues d’une produc- tion traditionnelle. Avec une largeur minimum de 5 mètres, ces bandes sont conservées jusqu’au 15 janvier minimum de l’année n+1 (date définie avec les exploitants par rapport aux dates d’entretiens déjà existant des jachères « environnement faune sauvage »). Ces contrats sont signés directement entre les exploitants et la FDC 71 et sont rémunérés par indemnisation compensatoire. Pour être compatible avec la Politique Agricole Commune (PAC) la bande pourra être déclarée en culture si elle fait l’objet d’un réensemencement au printemps n+1 en autre utilisation.

Reproduction du petit gibier Une sensibilisation a été menée sur les exigences de la faune sauvage et des dates d’entretien notamment des bandes enherbées et des intercultures afin d’éviter des pratiques à risque. Différentes préconisations, sur la prise en compte de la faune dans la mise en œuvre des intercultures et destruction des couverts, ont été formulées dans un bulletin d’une coopérative diffusé à l’ensemble des exploitants : • Couverts à croissance rapide, hauteur 40-80 cm, faible densité • Destruction naturelle du couvert en hiver par le gel • En cas de broyage, plusieurs préconisations sont recommandées afin de limiter l’impact du broyage -- Diminuer la vitesse de travail -- Équiper les machines d’une barre d’effarouchement -- Relever la hauteur de coupe -- Éviter le travail de nuit. Conclusion Après un an de mise en place du dispositif Agrifaune sur ces communes de Bresse, les constats sont : • Il y a eu un report d’entretien assez important des bandes enherbées • Le nombre de contrats « jachère environnement faune sauvage » est en augmentation alors que la tendance départementale est à la baisse • 1,5 km engagés en bandes de cultures sur pied La FDC 71 conduit, simultanément sur ces 3 communes de Bresse, des actions de développement de populations de petits gibiers (faisan commun et perdrix rouge). Cette opération de développement menée depuis 2006 sur 5 000 ha après une phase d’étude et de sensibilisation préalable a conduit à : • Deux dénombrements des coqs faisans chanteurs organisés en 2007 et 2008 • Premiers lâchers d’oiseaux réalisés durant les étés 2008 et 2009 et un lâcher prévu en 2010 • Une suspension de la chasse pendant ces 3 années Avec une progression sensible du nombre d’oiseaux, le comptage des populations entrepris en 2009 est encourageant.

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