Gurre-Lieder
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SAMEDI 25 JUIN – 20H Arnold Schönberg Gurre-Lieder Première partie entracte Deuxième partie Troisième partie Orchestre Philharmonique de Strasbourg Marc Albrecht, direction Czech Philharmonic Choir Brno Petr Fiala, chef de chœur Ricarda Merbeth, Tove Lance Ryan, Waldemar Anna Larsson, la Colombe des bois Barbara Sukowa, la Narratrice juin 25 | Samedi Albert Dohmen, le Paysan Bauer Arnold Bezuyen, le Bouffon Klaus Gurre-Lieder Coproduction Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Salle Pleyel. Ce concert est surtitré. Fin du concert vers 22h15. Arnold Schönberg | Arnold Schönberg Arnold Schönberg (1874-1951) Gurre-Lieder Première partie Prélude orchestral « Nun dämpft die Dämmrung » (Waldemar) « O, wenn des Mondes Strahlen » (Tove) « Roß! Mein Roß! » (Waldemar) « Sterne jubeln, das Meer, es leuchtet » (Tove) « So tanzen die Engel vor Gottes Thron nicht » (Waldemar) « Nun sag ich dir zum ersten Mal » (Tove) « Es ist Mitternachtszeit » (Waldemar) « Du sendest mir einen Liebesblick » (Tove) « Du wunderliche Tove! » (Waldemar) Interlude orchestral « Tauben von Gurre! » (voix de la Colombe des bois) Deuxième partie « Herrgott, weißt du, was du tatest » (Waldemar) Troisième partie « Erwacht, König Waldemars Mannen wert! » (Waldemar) « Deckel des Sarges klappert » (le Paysan) « Gegrüßt, o König » (les Vassaux de Waldemar) « Mit Toves Stimme flüstert der Wald » (Waldemar) « Ein seltsamer Vogel ist so ’n Aal » (le bouffon Klaus) « Du strenger Richter droben » (Waldemar) « Der Hahn erhebt den Kopf zur Kraht » (les Vassaux de Waldemar) La Chasse sauvage du vent d’été « Herr Gänsefuß, Frau Gänsekraut » (Narratrice) « Seht die Sonne » (chœur) 2 SAMEDI 25 juIN Composition : 1900-1903 puis 1910-1911. Création : le 23 février 1913, au Musikverein de Vienne, sous la direction de Franz Schreker. Publication : universal Edition, 1912. Effectif : solistes (Tove, soprano ; Waldemar, ténor ; la Colombe des bois, mezzo-soprano ou alto ; le Paysan, basse ; le Bouffon Klaus, ténor ; la Narratrice) – 3 chœurs d’hommes à 4 voix ; chœur mixte à 8 voix – 8 flûtes (dont 4 piccolos), 5 hautbois (dont 2 cors anglais), 7 clarinettes (dont 2 petites clarinettes et 2 clarinettes basses), 3 bassons, 2 contrebassons – 10 cors (dont 4 tubens wagnériens), 6 trompettes, trompette basse, trombone alto, 4 trombones ténor-basse, trombone basse, trombone contrebasse, tuba contrebasse – percussions (timbales, grosse caisse, cymbales, triangle, jeu de timbres, caisse claire, tambour, xylophone, crécelle, jeu de chaînes, tam-tam) – 4 harpes, célesta – cordes. En 1900, lorsque Schönberg s’attaque à la composition des Gurre-Lieder, il n’a derrière lui que deux pièces de musique de chambre et une douzaine de lieder. Il ne craint pourtant pas d’abandonner bien vite son premier projet, un cycle de neuf lieder pour deux voix accompagné au piano, qui avait été pensé pour un concours de composition, au profit d’une œuvre pour orchestre considérablement élargie – et ceci, alors qu’il n’a jamais composé pour une formation symphonique. Il remplace donc le piano par un orchestre… et quel orchestre ! Des pupitres de vents qui comptent de cinq à huit instrumentistes, quatre harpes et un célesta, un pupitre de percussions étoffé : Strauss lui-même n’ira pas aussi loin dans Salome ou Elektra, ni Mahler avec sa Symphonie « des mille » créée en 1910. Aux deux personnages originels, il ajoute quatre autres solistes ainsi que deux chœurs : un triple chœur d’hommes à quatre voix (les Vassaux de Waldemar) et un chœur mixte à huit parties pour La Chasse sauvage du vent d’été. Ce sont donc en tout près de quatre cents musiciens qui sont nécessaires à ces gigantesques Gurre-Lieder. N’allons pourtant pas penser que l’orchestration est massive sous prétexte que l’orchestre l’est ; comme Berlioz avant lui, comme Strauss ou Mahler, Schönberg varie au fil de la partition les couleurs et textures sonores : splendeur sensuelle du premier prélude, sonorités sinistres de « Es ist Mitternachtszeit », cor anglais à découvert de la mort de Tove, immenses cathédrales sonores du chœur à huit voix… Certains passages de la troisième partie, tout particulièrement, donnent à penser, avec james L. Zychowicz, que « le timbre devient un procédé structurel dans cette œuvre élaborée au moment où le compositeur travaille à sa fameuse Harmonielehre [Traité d’harmonie], dans laquelle il expose sa vision de la composition et notamment l’idée de la Klangfarbenmelodie [mélodie de timbres] ». Gigantesques, les Gurre-Lieder le sont aussi par la durée : presque deux heures. Peu de cantates – car, n’étant pas destinés à la scène théâtrale, c’est à ce genre qu’ils appartiennent – atteignent ces proportions ; l’œuvre de Mahler à laquelle on serait tenté de les comparer, Das klagende Lied, dure presque moitié moins. Le modèle sous-jacent est en fait celui de l’opéra : c’est particulièrement visible dans la dernière partie. En outre, tant dans leur thématique (le texte choisi par Schönberg semble amalgamer Tristan et Isolde et Le Vaisseau fantôme) que dans leur construction sur un réseau de leitmotiv (Berg en dénombrera plus d’une trentaine dans son analyse de 1913), ces « chants » sont de dignes 3 héritiers de l’esthétique wagnérienne : on comprend mieux ainsi qu’ils aient besoin de ce cadre temporel élargi pour épanouir leur évasive dramaturgie. La genèse (composition et orchestration) des Gurre-Lieder s’étendit sur une dizaine d’années et se passa en deux temps. un an après le début du travail sur le cycle de neuf lieder, en mars 1900, l’œuvre telle qu’on la connaît aujourd’hui est quasiment entièrement composée. L’année 1903 y met un terme provisoire, Schönberg se tournant notamment vers Pelléas et Mélisande, et ce n’est pas avant 1910 que le compositeur ressort de ses tiroirs la cantate. Après une exécution de sa première partie (aux côtés de compositions plus récentes comme les lieder du Livre des jardins suspendus op. 15 et les Trois Pièces pour piano op. 11) dans une réduction pour deux pianos, en janvier 1910, il remet la main sur son papier à musique géant – 48 portées spécialement imprimées pour lui – et reprend l’orchestration où il s’était arrêté, au chant du Paysan de la troisième partie. Le chœur final doit encore attendre l’achèvement de son Traité d’harmonie ; la cantate est enfin terminée le 7 novembre 1911 et fait un triomphe à sa création, le 23 février 1913. Fondée sur une traduction allemande des Gurresange de l’écrivain danois jens Peter jacobsen (1847–1885), l’œuvre s’organise en trois parties. Au centre, l’épisode où le roi Waldemar se dresse contre Dieu (« Ton nom est Tyran, et non Seigneur ! »), qui forme la totalité de la courte deuxième partie. L’avant, c’est le récit des amours du roi Waldemar et de la jeune Tove : neuf lieder où, par le biais d’une stricte alternance entre les deux voix, se dessinent, sur fond de nature, les retrouvailles des amants au château de Gurre et leur union. « Alors je te dis pour la première fois : “Roi Waldemar, je t’aime !” Je t’embrasse pour la première fois et te prends dans mes bras », chante Tove. Le merveilleux tableau de bonheur et d’exaltation profonde, tissé de rappels thématiques (le prélude, composé après ces neuf numéros, en est également émaillé), est cependant perméable à l’angoisse ; « Roß! Mein Roß! », où Waldemar pressait son cheval, l’avait laissé deviner. « Es ist Mitternachtszeit », avec son thème lugubre de violoncelles accompagnés d’un glas de harpe, cymbales, grosse caisse et contrebasses, préfigure le drame ; la réponse de Tove, « Du sendest mir einen Liebesblick », transforme l’anxiété en caresse, sans rien résoudre cependant : elle ne fait que réinterpréter l’aspiration de Tristan et Isolde à se fondre dans la mort. L’interlude orchestral qui fait suite au chant de joie de Waldemar (« Du wunderliche Tove ») malaxe les thèmes dans une atmosphère de plus en plus inquiétante, et le célèbre Chant de la colombe des bois, dont Schönberg donnera en 1922 une version pour voix et dix-sept instruments, confirme ce que nous venons d’entendre : « C’est le faucon d’Helwig [la reine] qui a cruellement déchiqueté la colombe de Gurre ». L’après, c’est l’errance ; Waldemar a été condamné par Dieu à chevaucher toutes les nuits entouré de ses vassaux. L’on pense au Hollandais volant : à semblable péché d’hybris, semblable punition. Toujours partiellement pris en charge par Waldemar, que la haine ne quitte pas (« Du strenger Richter droben »), le récit fait également appel à de nouvelles voix. Celles, individuelles, d’un paysan, effrayé par le passage de la horde maléfique du roi, et du bouffon, aux sonorités acides – premier exemple du goût schönbergien du grotesque que l’on retrouvera dans Pierrot lunaire (1912) – répondent à celles, collectives, des hommes 4 samedi 25 juIN de Waldemar et du chœur final. Avant celui-ci, une introduction orchestrale grouillante de vie mêle des réminiscences de la première partie à un style moins homogène et introduit la Narratrice. Le court passage crié/parlé du chant du Paysan n’avait pas préparé à ce radical changement de style, qui donne à l’ensemble un caractère presque cinématographique. Ce mélodrame intitulé La Chasse sauvage du vent d’été préfigure les recherches du Pierrot lunaire, dont « la mélodie indiquée par des notes pour la voix parlée [Sprechstimme] n’est pas destinée au chant ». Comme dans Pierrot, l’interprète doit ici « se bien pénétrer de la différence entre la note chantée et la note parlée. La note chantée maintient invariablement la hauteur marquée ; la note parlée la donne à l’attaque, mais l’abandonne aussitôt par une chute ou une ascension du son » (introduction à la partition du Pierrot lunaire). L’exaltation qui gagne peu à peu la Narratrice explose bientôt dans l’énorme tutti du chœur final, où l’on entend des échos de la fin de la Symphonie « Résurrection » de Mahler.