Story

Dossier spécial

Inventeur du Finn, le suédois Rickard Sarby (en bas) portant la casquette de son Club : l’Uppsala Kanotförening. A 28 ans, il a déjà conçu et construit plusieurs

canoës à voile .R. si typiques dans la Suède

d’alors. © S ka nd ia D L’incroyable faiseur de champions C’est à Uppsala FINN. C’est avec une sérieuse dose de reconnaissance que l’on Kanotförening, se doit d’aborder les 60 ans d’histoire du Finn, ce petit dériveur ce chantier situé sur les rives du suédois, et de la confrérie des « Finnistes ». Prompt à arborer son lac Ekoln, tout impressionnante moustache d’écume dès que le vent fraîchit, il a près d’Uppsala, qu’est né le formé et consacré parmi les plus grands champions de la voile Finn ! Là aussi actuelle. Il a marqué aussi paradoxalement l’histoire de la plai- que Rickard créa les pubs sance mondiale par la simplicité de sa conception. de ses Finn

Par Jacques Taglang - Photos : Documentation personnelle et D.R. © COLL. J.T. avec humour.

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Une histoire hors- norme qui débute sur un paisible lac suédois.

n pourrait croire à une plaisanterie : le père du Finn fut d’abord coiffeur de talent avant d’être de- signer occasionnel ! Au- todidacteO parfait (il n’avait pour tout bagage que six années d’école élémen- taire) le Suédois Rickard Sarby fut un personnage fascinant, aux multiples talents (à l’âge de 4 ans, il savait déjà lire), remarquablement doué et doté d’un génie créatif évident. à vrai dire, toute la famille Sarby affichait des ap- titudes artistiques diverses et variées, comme la peinture et la musique mais également la menuiserie et la charpen- terie. Dériveur monotype international de 4,50 m de long et de 1,51 m au bau, conçu en 1949 en Suède, doté d’une dé- rive en aluminium, le Finn est pourvu d’une seule voile de 10 m2 enverguée sur un mât autoporté pivotant avec la bôme. C’est un bateau physiquement très exigeant en même temps que très technique. Il a d’ailleurs servi de trem- plin à de grands noms de la voile mo- derne. Reste que derrière cette descrip- tion laconique, le Finn étire son sillage et une histoire hors-norme. Apprenti coiffeur. La saga commence par son géniteur, lui-même hors norme. Rickard Sarby est né le 19 septembre 1912, à Dannemora, un hameau situé non loin du village de Pesarby, à 95 ki- Avril 1949, lac lomètres au nord-ouest de Stockholm, Ekoln, tout près à l’intérieur des terres. Le nom de ce d’Uppsala : village est vraisemblablement à l’ori- première sortie gine du patronyme de la famille Sarby du prototype dont Rickard fut le cadet de quatre du futur frères et d’une sœur. Finn. Sarby Au début des années trente, la maison- a embarqué née déménage dans la ville d’Uppsala, 3 passagers au sud de Pesarby, où le jeune Rickard pour cette devient apprenti barbier-coiffeur. Par promenade

la suite, il va diriger l’un des plus U © COLL. J.T. inaugurale.

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Russell Coutts, quatre fois vainqueur de Tout sourire, l’America’s Cup Rickard Sarby remporta la assis à bord du médaille d’or Finn en 1951. aux Jeux de Un Suédois Los Angeles en jovial et inventif. © COLL. J.T. 1984. © COLL. J.T.

U grands salons de coiffure de la ville, de régatier, Rickard se met à dessiner et approche est de tracer les plans de de Londres en 1948 n’avait guère attiré célèbre pour la décoration originale de à construire de petits canoës à voiles de ses projets à l’échelle 1 tout en réali- les régatiers scandinaves. A vrai dire, il sa vitrine à Noël. compétition. Il se distingue par ses in- sant des modèles réduits. La plupart n’existe pas de dériveur qui se soit uni- Russel Coutts : le super man Peu après l’arrivée à Uppsala, Ernst, le novations notamment après la Seconde du temps, il construit lui-même, en fa- formément imposé dans les pays nor- Triple vainqueur barreur et skipper à frère aîné de Rickard, entraîne son petit Guerre mondiale, lorsqu’il imagine des mille, le bateau qu’il a conçu. Et c’est diques à l’exception de quelques flottes bord de trois America’s Cup consé- frère à faire du canoë à voile et en hi- voiles étanches en papier collé car le selon le même scénario qu’il imaginera éparses et confidentielles de Snipes, cutives (1995, 2000 et 2003 plus ver de la voile sur glace. Ils adhèrent au Il semble être né tissu à voile est devenu une rareté. le Finn… Dans des circonstances pour de Pirates ou de yoles locales. Seule la une victoire à terre en tant que skip- Club de Canotage d’Uppsala (Uppsala Empannage raté. Il est l’un des pre- le moins étonnantes ! Suède peut s’enorgueillir de disposer per du trimaran BMW Oracle Racing Kanotförening) fondé en 1916 par l’in- autant pour le miers à utiliser des mâts rotatifs au- Des centaines de canoës. A l’issue de plusieurs centaines de canoës à voile en 2010), le Néo-Zélandais Russell génieur Sven Thorell, soucieux de re- plaisir que pour toportés et flexibles et sera à l’origine des Jeux Olympiques de Londres en que l’on ne trouve nulle part ailleurs. Coutts se souvient encore du conseil grouper l’élite locale des canoéistes sur du bailer à volet ou auto-videur, dé- 1948, la Fédération Finlandaise de Mise au pied du mur, la FYA lance le que son père lui donna lors de l’ul- les bords du lac Ekoln, à 10 km au sud l’exigence de la sormais un incontournable dispositif Voile – Finnish Yachting Association 1er janvier 1949 un concours de plans time manche en Finn à l’occasion de la ville. Une vingtaine d’années plus articulé que l’on retrouve dans le fond (FYA) – se voit confier l’organisation devant permettre le choix d’un dériveur des JO de Los Angeles de 1984 : tard, Rickard se retrouvera en concur- haute compétition. de la coque de tous les dériveurs et qui des épreuves de voile aux Jeux d’Helsin- pour les JO de 1952, avec, en arrière- « Souviens-toi, pas de fantaisie. Vas-y rence avec Thorell pour le choix du dé- permet, lorsque le bateau prend de la ki de 1952. Si la sélection des quillards pensée, le projet de lancer d’abord un et fais ce que tu dois faire, laisse les riveur olympique de 1952… vitesse, d’aspirer et de rejeter l’eau em- (Star, Dragon, 5.5 Mètre JI, 6 Mètre bateau fédérant les sportifs scandinaves autres commettre des fautes. » Les En attendant, le jeune Sarby s’adonne barquée lors du dernier bord de près JI) s’impose, le choix du dériveur en et qui pourrait par la suite être choisi adversaires de Russel s’en seraient à fond dans les activités du club local. ou lors d’un empannage mouvementé. solitaire pose un sérieux problème : le pour les Jeux. Estimant que les Sué- bien passé tout au long de sa carrière. Bientôt, s’appuyant sur son expérience S’agissant de ses petits bateaux, son Firefly qui avait été choisi pour les Jeux dois, forts de leur expérience dans U

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U le domaine des canoës à voile, sont bau maximum) présentera des sections mieux à même de traiter l’aspect tech- en « U » à bouchains arrondis et devra nique de cette question, les Finlandais flotter sans réserves spécifiques. Le ba- confient à la Fédération Suédoise de teau sera doté d’une voile unique de 10 Voile – Swedish Yachting Association m2 à petites lattes établie sur un mât (SYA) – ce volet du cahier des charges. creux. La SYA réunit alors un comité de cinq Les designers devront fournir un set de personnalités dont la mission est de plans et prévoir un poids total à ne pas fixer les formes, les dimensions et la dépasser du voilier équipé, et inventer construction du futur voilier et où se un nom ainsi qu’un sigle de voile. retrouvent, entre autres, Sven Thorell, A partir de là, l’improbable naissance médaille d’or aux JO d’Amsterdam de du Finn va avoir lieu. La nièce de 1928 en dériveur solitaire et designer Rickard, Bert Sarby, explique le dérou- d’excellents canoës à voile et à rame, lement de cette conception : président du club d’Uppsala ; Arvid « Ce sont plus de quinze années d’in- Laurin, médaillé d’argent aux JO de tense expérimentation, de construction Kiel en 1936, en Star, yacht designer et de compétitions en canoë à voile et secrétaire de la SYA dont il est égale- qui vont être à l’origine des lignes et ment jaugeur ; et Rickard Sarby, auteur du potentiel du Finn. (…) Afin de de quelques plans de canoës à voile et mieux s’informer et de pouvoir se ser- récent participant malchanceux aux vir de sources internationales, Rickard Rickard en Jeux de 1948 à Torquay où son Firefly dut apprendre l’anglais et l’allemand. solitaire , à a sombré… Cela l’amena à développer des canoës la barre du Début 1949, ce comité publie les ca- à coques planantes, avec un tableau prototype du ractéristiques du concours et du voilier arrière plus bas et plus large que ce Fin/Fint ! Il attendu. D’une manière générale, la qu’on avait l’habitude de faire jusque- a déjà fière

coque (4,50 m de flottaison, 1,50 m de là, ce qui boostera l’allure au vent U © COLL. J.T. allure.

Les grandes dates du Finn

S’il fallait résumer le Finn au travers de grandes dates Les médaillés qui ont marqué son histoire, il faudrait retenir les étapes olympiques en suivantes : Finn à Helsinki - Début mai 1949 : Lancement du premier Finn. en 1952. De gauche - 15 mai 1950 : Le Finn remporte le concours pour la à droite : le sélection du dériveur en solitaire olympique (en vue des Britannique Jeux d’Helsinki de 1952). Charles Currey (argent) , le - Été 1952 : Le Finn dispute ses premiers JO. Danois Paul - 1956 : Création de la , de l’International Elvström (or) et Finn Association (IFA) et de l’European Championship. Rickard Sarby Fondation de l’International Finn Association (IFA). lui-même, en © COLL. J.T. bronze. - 1959 : Autorisation d’utiliser des voiles en tissus synthé- tiques. - 1984 : N’importe quel matériau flexible est autorisé pour fabriquer les voiles. - 1961 : Création du magazine de la classe FINN FARE (toujours édité). - 1993 : Les mâts en fibre de carbone sont autorisés. Coques en polyester renforcé. - 1994 : Le poids du mât est réduit à 8 kg. - 1967 : Création des Championnats d’Europe Juniors - 1995 : Le premier mât aile est utilisé lors de la Finn Gold (le vainqueur du premier championnat fut le Français Cup de Melbourne en Australie (sans suite semble-t-il). , en 1967). - 1996 : Le poids de la coque est réduit à 120 kg (- 5 kg). - 1964 : L’IFA présente une méthode universelle précise du contrôle de la coque. - 1998 : Les voiles en film polyester renforcé de fibres selon les lignes d’efforts principaux sont autorisées. - 1969 : L’aluminium et le polyester renforcé sont autori- sés pour réaliser les espars du Finn. - 2000 : Pour la première fois, les participants aux JO sont autorisés à courir sur leur Finn personnel. - 1970 : Création de la Finn World Masters (ex-Veteran Paul Elvström, Gold Cup créée en 1970). A La Rochelle en mai 2013, - 2005 : Les règles de la classe sont totalement réécrites. le légendaire elle rassembla 285 concurrents représentant 28 nations ! champion - 2009 : Le Finn a soixante ans. danois en - 1973 : L’IFA adopte le test pendulaire proposé par le - 2016 : Les Finn disputeront leurs 17e olympiades à Rio 1952. Il est au Français Gilbert Lamboley qui permet de contrôler la de Janeiro, Brésil. rappel, dans répartition des masses dans la coque. la position dite du « W » si - 1974 : Le choix des matériaux de construction de coque caractéristique est libre. Le double fond est autorisé. Un poids minimum A noter, les Championnats nationaux qui sont organisés des barreurs de des bômes et des safrans est fixé. par 27 nations, de l’Argentine au Zimbabwe…

Finn. © COLL. J.T.

40 Yachting Classique Yachting Classique 41 Story Finn, l’incroyable faiseur de champions

Le fruit d’un travail d’architecture insolent venant de PRESENTING la part d’un professionnel de RADIANCE la… coiffure.

Universalité du Finn : ici l’Allemand de l’Est Willy Kuhweide, médaillé d’or aux JO de

Tokyo en 1964. © COLL. J.T.

U arrière. En même temps, la forme de la partie avant des œuvres vives TEST LAMBOLEY DU PENDULE son de la coque sur un plat-bord… Le se fit plus étroite, imposant de mieux Français Gilbert Lamboley a alors mis Embrace a rare opportunity to own a replica of yachting history. tenir compte du positionnement du Le Français Gilbert Lamboley a été au point un système qui fit autorité : le barreur par rapport à la section de Radiance is a modern sister to the iconic “Ticonderoga,” every exquisite detail hand-built by discerning craftsmen. stabilité, ce qui améliorera la marche président du Comité Technique de test du pendule. Le bateau étant sus- au près. » l’IFA de 1970 à 1980. C’est au cours pendu, il est soumis à des oscillations « J’ai dessiné et construit mon pro- de ce mandat qu’il a mis au point un dont la période est alors chronomé- Francis Herreshoff’s legendary performance enhanced by modern construction, systems, and rigging. totype au tout début de l’année test de répartition des masses, dit du trée et comparée aux résultats de tests 1949, explique Sarby Rickard. A pendule… de référence. Radiance is an unparalleled combination of the excellence of yesterday and today. cette époque, le destin (le sort) fut Au cours des vingt premières années Ce procédé précis de contrôle fut quelque peu brutal. Je m’étais blessé d’existence du Finn, on s’est aperçu adopté par la Classe en 1972 (réac- à un doigt avec un tondeuse élec- qu’il était facile de contourner la dis- tualisé en 2003 et 2006), les coques trique à cheveux (rappelons que Ric- kard était coiffeur) et je portais un tribution des poids lors de la fabrica- étant testées et jaugées à la sortie des FFERED AT USD énorme pansement. » tion des coques. Très tôt, certains es- chantiers. Cette méthode de « swing O $2,500,000 Projet familial. Il disposait donc de prits malins avaient découvert qu’en test » est devenue un standard du temps libre et les plans furent rapi- allégeant les extrémités de la carène, contrôle de distribution des poids dement tracés, selon la méthode ha- le bateau était potentiellement plus pour de nombreuses autres classes. bituelle de ses canoës en taille réelle. rapide. Le pot au roses fut découvert A noter toutefois que depuis une ving- « Lorsque les lignes sont réalisées lorsque les jaugeurs trouvèrent sur taine d’années, il semblerait que la View complete listing for Radiance on Yacht World de cette façon, confie Rickard, l’as- certains Finn des plaques de plomb forme des coques ne soit plus contrô- semblage des membrures est presque habilement distribuées et ce au mé- lée lors de grands événements, pas achevé en simultané, sans avoir à les agrandir en fonction de l’échelle. » pris des règles de jauge. même aux Jeux Olympiques… Puis le projet devint familial. Deux Diverses tentatives pour contrôler la De là à imaginer que les chantiers de ses frères (également passionnés répartition des masses échouèrent puissent produire des coques « adap- de bateaux) vinrent à l’aide ainsi que comme la méthode consistant à me- tées » à la morphologie ou à l’attente CENTRAL LISTING BY AFFILIATED BROKER STEPHENS WARING Bert, alors âgée de 9 ans. La carène surer le poids de l’étrave et l’inclinai- de son barreur… YACHT DESIGN fut réalisée en une sorte de double strip-planking posé en diagonale U

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Qui a gouté aux Paul Elvström, la légende 15 nœuds sur cette Né au Danemark en 1928, Paul est coque de 4,50 m une légende vivante du yachting de compétition : il fait partie des très verra son destin rares sportifs à avoir remporté 4 médailles d’or aux JO, une en 1948 changer. à Londres en Firefly, et 3 en Finn (Helsinki 1952, Melbourne 1956 et Rome 1960). Depuis 1957, il peut en outre s’enorgueillir de 11 titres de champion du monde en 5O5, en Finn, en Snipe, en Flying Dutchman, en 5,50 Mètre, en Star, en et en Tornado ! C’est dire si le Finn a été pour lui un tremplin exceptionnel dans d’autres classes. Paul a entretenu une relation parti- culière à l’endroit de son premier Finn (datant de 1950). Laissons-le en parler : « J’ai aimé mon premier Finn (le D 6). Je savais que mon dériveur et moi ne faisions qu’un et souvent je lui parlais pendant les régates. Ainsi,

par exemple, lorsque nous faisions LIOT oile - J.M.

un résultat non conforme à nos es- © FFV pérances, je lui disais : ‘‘Nous avons réussi avant ! N’abandonnons pas !’’ Hélas, ce premier Finn a fini ses jours matiquement le contraire de ce qu’on et les plus festifs qui soient. Jonathan sur une autoroute allemande. » (En attend de lui. En Finn, c’est l’amitié qui sert de car- Lobert, médaillé avril 1960, près de Hanovre, à l’issue La fine Ainsi on le croyait conçu pour la pra- burant. « On n’arrête pas de se parler de bronze aux d’un dramatique tonneau… L’épouse tique en solitaire de la souffrance. Il se sur le plan d’eau », s’enthousiasme JO de Londres de Paul sera sérieusement blessée). révèle au contraire un instrument de Marc Allain des Beauvais, pilier de la en 2012. La Figure exceptionnelle de la Classe, plaisir, et qui plus est, à partager en série. De fait, il ne viendrait à l’esprit nouvelle figure Elvström avait coutume de dire élé- équipe ! groupe. de personne de pratiquer une discri- de proue made gamment : De même, il semblait avoir été dessiné mination en fonction du classement de in France du « Vous n’avez pas remporté la course olitaire, le Finn ? Allons donc ! pour les abonnés des salles de mus- l’un par rapport à l’autre. De même, Finn. (en Finn) si, en gagnant l’épreuve, Ce dériveur réunit au contraire culation. Il a quand même séduit des l’espionnite y est considérée comme Paul Elvström, vous avez perdu le respect de vos une bande de navigateurs so- intellos, à l’exemple de l’écrivain Eric grotesque. En revanche, l’entraide est à nouveau adversaires… » lidaires. En outre, l’engoue- Orsenna, du chef d’orchestre Jean- omniprésente : le champion donne au portant en ment pour la série n’a jamais Claude Casadesus ou du PDG du volontiers ses recettes de victoire. Il les 1952, à l’aise Sété aussi fort. Et il n’est pas près de groupe Canal Plus, Bertrand Méheut. livre le plus naturellement du monde, par tous les s’éteindre ! Car le temps ne semble La flotte a doublé en France ces cinq tout en aidant son voisin de parking à temps. © COLL. J.T. pas avoir de prise sur cette commu- dernières années. Mais les nouveaux ramener son chariot de mise à l’eau. nauté de joyeux énergumènes. En mai pratiquants n’ont pas tous des tablettes Existe-t-il de meilleure manière pour U (deux couches de fines bandes de pin Informée que le bateau de Sarby est dernier, le centre-ville de La Rochelle de chocolat en lieu et place du ventre. progresser et se découvrir de nouvelles de 5 x 20 mm, collées entre elles et vis- déjà construit, la Fédération l’invite à a été investi par un groupe suspect Les mâts en carbone ont procuré des envies d’y retourner ? p F.L.B sées à la quille et, dans les fonds, sur les participer aux régates de sélection pro- de 285 individus : 25 septuagénaires, membrures fines). Pesant 150 kilos en grammées en octobre 49. Se joignent 57 sexagénaires, 112 quinquas et 91 La flotte a doublé en Marc Allain tout, le prototype fut lancé la première aux concurrents deux autres bateaux, quadras. Ils provenaient de vingt-neuf Des Beauvais, semaine de mai 1949. Olympia, la yole allemande des JO pays, réunis par une drôle de passion France en 5 ans. Les président de Dessin écarté. Même si tout n’est pas de 1936 et le plan d’un architecte de commune, celle des parties finn. nouveaux pratiquants la Classe Finn encore au point, les plans sont immé- grands yachts finlandais, M. Kynzell. Concrètement, ils venaient courir le en France et diatement envoyés à la FYA en Fin- A chaque épreuve, les barreurs chan- championnat du monde des masters, n’ont pas tous des assureur dans lande. Pour un résultat décourageant. gent de voilier. A l’issue des régates, l’expression consacrée pour désigner le « civil », Le jury de la FYA se réunit en juin Pricken et Fin semblent faire jeu égal, des régates à la double particularité. tablettes de chocolat à illustre à lui 1949 et, bientôt, le résultat tombe : le avec un petit plus pour Fin qui est plus D’une part en effet, les départs cessent la place du ventre. tout seul les premier prix revient au Suédois Harry spacieux et plus manœuvrable, même d’être donnés au-delà de vingt nœuds facettes du Carlson pour le dessin de Pricken. Sui- si certains barreurs trouvent sa bôme de vent. D’autre part, les derniers ressources insoupçonnées à de nom- Finn : exigence vent, dans l’ordre, le projet du Finlan- trop basse. La FYA refuse de trancher bords sont plutôt des bordées à terre. breux sexagénaires enrobés. Ces sportive et dais Anderson et, ex æquo, le Suédois et demande à l’architecte de Pricken Et si on sait quand elles commencent, sportifs ont eu leur bac à une époque convivialité Thorell et le Finlandais Rehlander… de revoir sa copie en tenant compte nul ne peut prédire quand et comment soixante-huitarde, où il n’était pas bien (pour ne pas Non sans humour, Rickard Sarby se du résultat des épreuves. De nouvelles elles se termineront. vu, politiquement, de briller à l’épreuve dire de sacrées souvient : « Mon dessin aurait été sélections sont programmées pour mai Ce rassemblement n’avait donc rien de gym. poilades à terre

écarté parce que le bateau était trop 1950. Les trois bateaux choisis à l’issue © COLL. J.T. de spécialement méchant. Mais Le Finn reste certes l’incarnation de comme lors du petit. Certains membres du jury ont du concours, ainsi que Sarby et son Fin avouez que la confusion était possible. l’élitisme olympique. Il n’empêche, il dernier national

toutefois remarqué qu’un bon bateau y sont conviés. En attendant, les maga- Ce dériveur finlandais a tellement l’art sert désormais de vecteur aux rassem- .R. à Saint-Pierre

semble toujours ‘‘trop’’ petit… » zines de yachting suédois publient les U de tromper son monde ! Il fait systé- blements nautiques les plus populaires © D de Quiberon).

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John Bertrand à l’école du sang froid Qui ne connaît pas John Bertrand, « Soudain je me suis demandé : ‘’Suis- le skipper qui a su mettre fin à 132 je assez bon ?’’ Ce fut mon premier ans de domination du New York Yacht grand moment de doute depuis que Club sur l’America’s Cup ? A la barre je faisais de la compétition. (…) Rapi- d’Australia II en 1983… Peu se sou- dement j’ai pensé : ‘’Suis-je capable viennent que John a également été de le maintenir derrière moi ?’’ » médaille de bronze en « Finn » aux Il décide de le contrôler en se lançant JO de Montréal en 1976 après avoir dans un empannage mal maîtrisé qui terminé 4e en 1972 à Kiel et terminé se termine en chavirage. Il a pris un à deux reprises la Finn Gold Cup risque stupide et fatal qui va lui coû- – l’équivalent du championnat du ter l’or. Une leçon qu’il n’oubliera monde de la classe – à la deuxième jamais : L’Australien place en 1979 et 1980 derrière un « C’est toujours la leçon qui prime. John Bertrand certain Cam Lewis. Dans mon esprit, il ne fait aucun aux Jeux de Lors des JO de 1976, au cours d’une doute que sans ma défaite du 27 Kiel en 1972, manche déterminante pour la victoire juillet 1976 face à un habile et im- l’année où finale, talonné de très près par son pavide Jochen Schümann, ‘‘Austra- le Français principal rival, Jochen Schümann, à lia II’’ n’aurait catégoriquement ja- Serge Maury l’issue d’un bord de vent arrière ven- mais gagné l’America’s Cup en 1983 empochera té, John perd de son assurance. Il se (notamment à l’occasion de l’ultime l’or. Il ratera souviendra toujours de ce moment-là, manche lorsque Liberty talonna de le podium juste après avoir jeté un rapide coup longues minutes Australia II.) » d’un cheveu, d’œil à son impassible concurrent : finissant 4e. Quatre ans plus tard, il Les résultats décrochera du Finn (Fint) le bronze à dans sa course Kingston, Choisi après une Manche/Classement I II III IV V VI à la sélection Canada, et en Olympique en 1983, à âpre bataille en Fint 1 1 1 1 1 2 1950 face à la barre Thorell 2 3 2 3 3 1 ses concurrents. 1950 comme Une victoire d’Autralia II, Pricken I 3 5 4 4 4 5 il entre dans dériveur olympique. probante sur Anderson 4 2 ab. 2 ns. 3 la légende ns. : n’a pas pris l’eau. Il n’en sera pas de en arrachant Pricken II 5 4 4 5 2 4 le départ. même sur le l’America’s Cup Rehlander 6 6 ab. ns. ns. ns. ab. : a abandonné

au NYYC. © COLL. J.T. tapis vert.

U plans du bateau sous le nom de Fint… enthousiaste – un ‘‘finnatic’’ – habitant d’Anderson, et des 3e ex æquo – Tho- milieu d’une forêt de bouées. Un ba- licates, Fint achève son long bord de Devant la simplicité de sa construction, au cœur de la Suède, près du grand lac rell et Rehlander – et le Fint de l’ami teau à moteur était présent, pour nous près sans problème pendant que An- de nombreux amateurs se lancent dans Siljan où la navigation en dériveur était Sarby ! Une nouvelle fois, l’échange des regarder mais pas pour nous guider. derson et Rehlander chavirent… la réalisation du dériveur solitaire et, à peine connue… » barreurs est de mise. Rickard s’en sou- La marque que j’avais fini par trouver Verdict sans appel. Par la suite, trois au cours de l’hiver 1949-1950, vingt- Plan définitif. Dans l’intervalle, Sarby venait encore en 1971 et toujours avec n’était pas la bonne ; j’ai donc dû m’en barreurs finlandais vont mener Fint cinq Fint voient le jour ! Tous ces pas- fait savoir aux Finlandais qu’il n’ira l’humour qui le caractérisait : aller à la poursuite des autres… une dans les 2e, 4e et 5e manches. Dans la sionnés (déjà !) se mettent à réclamer pas aux sélections. Il vient d’apprendre Course décisive. « Les conditions de belle avance de perdue. » 6e, Fint est attribué au gendre de Tho- un sigle de voile. Habilement, Sarby par son ami Paul Elvström que le nou- temps étaient proches de l’horrible : Et Sarby de poursuivre : « La force rell pendant que Sarby se voit confier trouve la solution. veau Pricken de Harry Carlson est pluie, froid et vent fort. Dans sa glo- moyenne du vent était de 4 Beau- le prototype – qu’il mènera à la vic- « Je leur ai demandé de m’adresser présenté à Copenhague comme étant balité, la situation était quelque peu fort avec des risées à 5, voire un peu toire – de son compagnon de club et leurs propositions pour une marque de « LE » nouveau dériveur olympique. singulière. En réalité, j’espérais que plus. Vous n’avez jamais pensé qu’une concurrent, Sven Thorell. Le verdict de voile, propositions que j’ai dupliquées La FYA dément et la Fédération sué- quelqu’un d’autre barre Fint, au moins telle brise est un vent fort ? Certes, les ce challenge est sans appel : et renvoyées à chacun des construc- doise finit par le convaincre d’aller ré- pour la première régate. Mais cela ap- choses ont un peu changé. Imaginez : Le Fint écrase la concurrence (voir ta- teurs. Chacun devait voter pour celui gater. Pour l’occasion, Rickard se voit paraissant comme une facétie, j’y re- nous n’avions pas de bailer (pour vi- bleau ci-dessus). qu’il aimait le plus, expliquait-il en même offrir une nouvelle voile dont la nonçais. J’ai dû barrer également Fint der l’eau embarquée) et aucune réserve Le 15 mai 1950, la Fédération Finlan- 1971 à un journaliste suédois qui fai- chute plus courte de 15 cm va relever la dans la 3e manche disputée sur le par- de flottabilité supplémentaire, mais un daise de Voile (FYA) choisit sans pro- sait déjà à l’époque une enquête sur ce bôme d’autant, la surface ainsi décou- cours le plus long ; je me suis rendu là cockpit très spacieux… Et je devais blème le Fint comme dériveur olym- phénomène Finn. pée étant reportée sur le rond de chute. où devait se trouver le parcours olym- tenir le bateau à plat. Il n’y avait pas pique officiel des Jeux d’Helsinki de « Douze retournèrent leur choix et Le plan de voilure définitif du Finn est pique. J’aime à penser que cette course de combinaison isotherme, ni d’har- 1952. Elle finalise également le nom les vagues bleues récoltèrent deux fois trouvé ! fut la plus décisive. Après un départ en nachement en plomb (pour se lester), du bateau qui s’appellera désormais le plus de votes que le second meilleur Début mai 1950, les compétitions ont eaux protégées, le parcours nous mena ni de mât flexible, ni la maîtrise de la Finn et retient les deux vagues bleues choix. N’était-ce pas une bonne idée ? enfin lieu. La flotte se compose de Pric- (…) en pleine mer. Le problème immé- technique du catboat. Privé de tout ce superposées du sigle de voile. Rickard L’actuel sigle de la voile est parfait pour ken I et de Pricken II, les plans retenus à diat qui se posait aux concurrents était bel ensemble, force 0 c’est déjà trop Sarby, tout heureux de la décision, re-

le Finn. Son concepteur était un jeune l’issue du concours à savoir les bateaux © COLL. J.T. de trouver une marque particulière au de vent ! ». Malgré ces conditions dé- grettera plus tard l’attitude désinvolte U

46 Yachting Classique Yachting Classique 47 Story Finn, l’incroyable faiseur de champions

Serge Maury, l’obstiné. Il aura fallu patienter 40 ans – Jacques Lebrun avait gagné le titre olympique à Los Angeles en 1932 à bord d’un Excellent régatier Snowbird – avant que la France ne remporte à nouveau l’or en voile lui-même, son concepteur, grâce à Serge Maury, né en 1946, vainqueur en Finn aux JO à Kiel en disparu en 1977, ne pourra 1972… A l’issue de ces Jeux, Serge Maury, tonnelier de son état, recon- contempler sa petite coque naissait qu’avec le Finn, cela avait toute simple en découdre été à la vie à la mort : « J’ai consacré deux ans de ma vie à ne faire pra- lors des prochains JO tiquement que du Finn. J’ai même, en accord avec ma fiancée, reculé brésiliens en 2016. de deux ans mon mariage ! Pendant deux ans, j’ai fait deux heures de culture physique par jour. A tel point que je n’envisage pas de recommen- cer l’expérience. (…) © COLL. J.T.

Jochen Schümann, l’irrésistible ascenssion. Avec l’Allemand Jochen Schümann, né à Berlin Est en 1954, trois mé- dailles d’or aux JO dont une en Finn en 1976 à Montréal, on entre dans le vivier des grands noms de l’America’s Cup. Jochen a été directeur sportif de l’équipe suisse d’Alinghi qui remporta le trophée en 2003 et 2007… avant de rejoindre brièvement le défi ger- mano-français ALL4ONE en 2009. © COLL. J.T.

U de la FYA en matière de droits sur Carlos Miguel Benn-Pott, l’artiste. les plans. Né en 1924 d’une mère argentine et Sélectionné. Après les Jeux d’Helsinki, d’un père britannique, Carlos Miguel le 11 octobre 1953, la Fédération Scan- Benn-Pott (étudiant aux Beaux-Arts) dinave de Voile retiendra le Finn comme avait été, en 1952, retenu pour re- Classe Nordique. Les droits légaux des présenter son pays aux JO d’Helsinki, plans lui furent transférés. à l’issue de régates de sélection en Avant cela, sous les couleurs de son Olympia ou Yole Olympique de 1936 Photo du Finn pays, Rickard Sarby disputera les Jeux (plan monotype de Helmut Stauch). des origines d’Helsinki de 1952 où il s’adjugera la à Helsinki, en même temps que le prise en mai médaille de bronze derrière l’Anglais Finn se révèle à Carlos, le jeune bar- 1949. Tout est Charles Currey et le légendaire cham- reur mesure le bonheur d’échapper déjà en place. pion danois, Paul Elvström. Quatre à l’ambiance étouffante du dictateur Depuis, la ans plus tôt, il avait participé aux JO Perón. A l’issue des Jeux il ne rentre composition de Londres, en Firefly, le prédécesseur pas au pays. Il n’a qu’un objectif en e du mat est du Finn, et avait fini 4 . En 1956, le tête : rejoindre Paris ! Il va fonder en passée de la père du Finn est sélectionné pour les © COLL. J.T. 1956 le groupe Los Incas. Dans les matière bois, à Jeux de Melbourne où il se classe cin- années 70, il devienra mondialement l’aluminium et quième. Qui dit mieux ? célèbre avec l’inoubliable tube : El maintenant Au-delà, et comme l’explique si joliment Condor pasa… au carbone. © COLL. J.T. la section française de l’International U

48 Yachting Classique Yachting Classique 49 Story Finn, l’incroyable faiseur de champions

Finn en chiffres Type : Dériveur Monocoque solitaire Le Finn est à (plaisance : + 1) Matériaux : Bois moulé puis polyester l’Americas’Cup, ce Gréement : Catboat Architecte : Richard Sarby (Suède) que le kart est à la Année de conception : 1950 Longueur de coque : 4,50 m Formule 1 : le vivier Largeur : 1,51 m des purs talents. Poids Prêt à naviguer : 116 kg Tirant d’eau : 0,15/0,84 m Voiles : GV : 10 m2

Ces trois petits monocoques de rien alors n’était comparable, sport sont précurseurs. Le Finn, à part le vainqueur de la série le plus ancien (1950), trouve One by Class de John Westell, le ses origines parmi les meilleurs Coronet, un 18 pieds construit à 14 pieds d’après-guerre, mais un seul exemplaire. Le talent de va un peu plus loin. En avan- John, à la demande de l’Asso- çant le creux maximum, Richard ciation de propriétaires de Ca- Sarby peut tirer les lignes arrières neton, s’est révélé à la hauteur comme elles n’ont jamais été de leurs espoirs, et dès le pre- tendues. Les sections en large mier exemplaire construit, le 505 V ouvert augmentent la stabilité est devenu Classe Nationale. de route et réduisent la surface Beaucoup plus jeune, le 470 remporte mouillée à la gîte. (1962) a formé toute une gé- en 2012 à Le Cinquo (1954), révolution- nération de coureurs français. Weymouth, naire, avec une flottaison étroite André Cornu, architecte talen- une troisième et son large pont, possède une tueux, a réussi à augmenter la médaille d’or légendaire instabilité, qui ferait raideur du 505 sur un voilier en Finn et sourire les régatiers sur les en- plus petit. En diminuant le franc rejoint son gins d’aujourd’hui comme les bord il réduit la surface dévelop- aîné Elvström er au pinacle de 49 et 29 . Mais ceux qui l’on pée et diminue le déplacement, l’Olympisme. découvert il y a cinquante-neuf tout en conservant ses qualités. Il fait partie Trois dériveurs mythiques ans pouvaient être estomaqués, F.C. du team Oracle lors 470 en chiffres 505 en chiffres

de la dernière .R. Type : Dériveur Monocoque Type : Dériveur monocoque à America’s Cup. © D à 2 équipiers (plaisance : + 1) 2 équipiers (plaisance +1) Matériaux : Polyester Matériaux : Bois moulé puis polyester U Finn Association, le succès du Finn une énigme. Il y a plus de Finnistes qui Gréement : Bermudien Gréement : Bermudien s’appuie sur trois concepts pour le ne visent en aucun cas les Jeux Olym- Et bien d’autres ! Architecte : André Cornu (France) Architecte : John Westel (US) moins déconcertants. Ce petit voilier à piques que l’inverse. Alors, qu’est-ce Dans cette prestigieuse galerie, il Année de conception : 1962 Année de conception : 1954 dérive serait à la fois : qui fait naviguer ces hommes et ces aurait fallu évoquer Willy Kuhweide, Longueur de coque : 4,70 m Longueur de coque : 5,05 m - Un paradoxe, car à l’heure des déri- femmes ? Peut-être le mythe d’un ba- Jose Luis Doreste, Jacques Rogue, Largeur : 1,70 m Largeur : 1,88 m veurs ultra légers, aux formes très ten- teau qui ne les empêche pas de navi- Peter Holmberg, John Cutller, Luca Poids Prêt à naviguer : 120 kg Tirant d’eau : 0,15/1,13 m (puis 1,55 m) dues et complètement ouvertes, il est guer au-dessus de leurs moyens… p Devoti, , les Français Xavier Tirant d’eau : 0,15 à 1,15 m Poids prêt à naviguer : 125 kg tout le contraire, ce qui ne l’empêche 2 2 2 Rohart, , Guillaume Voiles : GV : 14 m , Foc : 3,85 m , Voiles : GV : 12,3 m , pas d’attirer de plus en plus de barreurs. 2 2 2 Florent – médaille de bronze aux JO Spi : 14 m Foc : 4, 94 m , Spi : 27-29 m - Un mythe ! A son bord, on affronte de 2008 à Pékin (Qingdao) – et Jona- seul la mer ; il faut prendre ses respon- Sources : than Lobert – médaille de bronze aux sabilités et accepter le poids d’un échec. • Source principale : http://www. JO 2012 à Londres (Weymouth), du Il exige maîtrise des techniques de ré- finnclass.org/ Britannique Ben Ainslie – quatre mé- glage et bonne condition physique. Ce • FINNatics. The History and Tech- dailles d’or dont trois sur « Finn » – et qui explique que les barreurs de Finn niques of Finn Sailing, par Robert de bien d’autres encore comme le forment une confrérie unique dans le Deaves, 1999. vétéran français Didier Poisant qui chevalier • Photo FINNish, 60 years of Finn monde de la voile de compétition. naviguait encore en 2009 à l’occa- ois ç - Enfin, un mystère… Voir un dériveur Sailing, par Robert Deaves, 2009. sion des Master Finn, finissant à plus N e lent, lourd, avec une dérive en alumi- Merci à Louis Pillon pour ses infor- de 80 ans à la 213 place sur 261 ! FRA S nium et rester le meilleur et le plus mations (Gilbert Lamboley et Carlos N

universel des solitaires, cela est bien Miguel Benn-Pott). PLA ©

50 Yachting Classique Yachting Classique 51 Story Finn, l’incroyable faiseur de champions

Le Finn arbore son mât le plus souple, bien adapté au petit temps. Le hale-bas est d’une simplicité désarmante.

Il a été construit en 1957 en bois moulé (à partir de petites lattes) par le chantier Jouët.

riveurs en solitaire, est un magnifique de la Manche qu’il découvre ce Finn. moins performant que les unités der- animal. Lourd comme un âne mort, Jusqu’à ses 70 ans, son propriétaire nier cri riches en carbone. La souplesse Nous avons 116 kg pour la coque et le pont au mi- a navigué assidument à son bord. du mât (à l’époque, le contrôle de la nimum de la jauge d’aujourd’hui, c’est Le bateau est restauré, pas tout à fait tenue du mât en latéral, en longitudi- peut-être bien son seul défaut. Alors le dans les règles de l’art puisque le pont nal, le tout à différentes hauteurs est retrouvé plus simple est de rejoindre la cale la est en contre-plaqué. Notre Finn est encore mal maîtrisé) et du tissu de la plus proche. Nous voilà sur le ponton : « dans son jus », d’ailleurs les fonds voile grève quelque peu le rendement. le Finn arbore son mât le plus souple, prennent un peu l’eau, difficile de sa- Mais le bateau est finalement bien plus un doyen bien adapté aux petits temps et aux ga- voir si elle vient du puits de dérive ou tolérant et moins exigeant. D’autant barits légers dans la brise. L’autre profil des vide-vite, son caisson défoncé (il que les réglages se limitent ici à la est bien plus raide. Les réglages, com- sera bientôt réparé) par un stockage grand-voile : écoute et barre d’écoute, passionnant parés aux unités les plus modernes, instable en témoigne. et c’est tout. J’apprends à anticiper les sont incroyablement simples : si l’étar- Après avoir suivi les évolutions de Jé- mouvements de la longue bôme, qui quage se fait toujours à l’ancienne, ta- rôme, une valse de virements et d’em- ne demande qu’à accrocher mon cuir érôme souhaite rester discret, quet au mât, il n’y a pas de hook ni pannages au gré des vents coulis qui chevelu et la surface de l’eau en sortie aussi nous ne citerons pas son cunnigham pour reprendre la tension filtrent entre les feuillages, je n’y tiens d’empannage. nom ni le lieu précis où s’est dé- de drisse et donc travailler la voile… et plus. Moi aussi je voudrais tâter de cette Histoire d’amour. La douceur de roulée cette navigation hors du quant au hale-bas, il se résume à deux barre bien plus âgée que moi ! Par pré- barre est exemplaire, je suis immédia- temps. Car c’est une drôle de cales fichées entre bôme et mât. caution, je laisse à terre mes clés de tement conquis… et donc pas vraiment Jrencontre qui m’attend, à quelques vi- Caisson défoncé. Au cœur de ce voiture et mon téléphone. Mon guide étonné quand Jérôme m’explique qu’il rages de la ville… Ma voiture longe le bel été, la température de ce milieu s’en amuse : « On navigue au sec, pas s’est rapidement porté acquéreur d’un fleuve jusqu’à ce qu’une voile triangu- d’après-midi flirte avec les 30°C et comme en Laser. En rivière, tu peux na- Finn Lanaverre pour se lancer dans laire surgisse des buissons. Le « F » et la le vent peine à franchir le rideau des viguer en tenue de ville ! » Reste qu’en ses premières régates. Pour finalement double vague de la série, c’est bien un arbres et à rider l’eau douce. Jérôme, cas de chavirage, le bateau se remplit craquer pour un modèle plus récent Finn qui est amarré au ponton en bois en simple short, saute à bord et par- d’eau comme un Optimist. La moindre encore, histoire d’être dans le coup, Le 126 est fatigué. Le mât bois et le numéro 126 vient à glisser de risées en risées. Son risée est aussitôt captée par la grand- même face aux meilleurs de la série. évidemment nous confirment qu’il s’agit bien d’un Finn a été construit en bois moulé (à voile, 10 m2, c’est grand, se traduisant « Plus on connaît le Finn, mieux on le bien moins des plus anciens exemplaires de la sé- partir de petites lattes) par le chan- par une sensible tension à l’écoute. Le fait marcher », confie Jérôme. performant rie. Jérôme a fait construire sa maison tier Jouët en 1957. Il s’agit donc bien Finn accélère en se créant rapidement Une longue histoire d’amour. Ce qui que les unités juste au-dessus de l’eau, aussi la mise d’une vénérable antiquité, puisque un important vent apparent. L’étrave n’empêche pas le marin de nourrir dernier cri à l’eau de son Finn, depuis la berge, le premier exemplaire des fameux marsouine, il faut monter sur le plat un projet secret : « Mon rêve, c’est de riches en est simple. En revanche, la sortie d’eau plans Rickard Sarby a tiré ses premiers bord pour contenir la gîte. Fabuleuse construire un Finn de seulement 60 kg, carbone, mais demande des bras, impossible, si on bords en 1949… Jérôme, passionné sensation de glisse, il est difficile de complètement hors jauge, juste pour ce bateau est seul, de remonter le bateau sur sa de voile, s’est vite intéressé aux an- croire que le bateau a été conçu il y a voir ce que ça donne, entre dissidents ». est bien plus remorque. Car le Finn, le roi des dé- ciennes unités. C’est sur les rivages 65 ans. Le 126 est évidemment bien Nous suivrons l’affaire. p E.V.D. tolérant.

52 Yachting Classique Yachting Classique 53 Story Finn, l’incroyable faiseur de champions

Tous les

La bôme, très secrets basse, ne facilite pas le travail du du Finn ! hale-bas. C’est pourquoi ce dernier est monté sur une potence. de « se tenir » au près quand la mer est agitée. A noter : jusqu’à 18 nœuds, au portant, le barreur pompe en direct sur l’écoute. Le hale-bas, forcément très bas et peu angulé vu la position Au près, la bôme est au de la bôme, très proche du pont, est contact du pont doté d’une potence. Le réglage de mais son départ est de 55 cm entre l’arrière de extrémité ne la bôme et le pont. « Le hale-bas est rentre pas à pris au portant et au près dans le petit l’intérieur du temps, poursuit le skipper, mais atten- bateau. tion quand on vire, on ne passe pas, et ça peut même taper dans la barre. Au portant, c’est bien sûr le hale-bas Le stick qui relaie l’écoute pour tenir la chute. standard Dans la brise, on en choque un peu mesure 1,25 m, avant d’empanner, sinon la bôme ac- mais les plus croche l’eau en sortie de manœuvre. » grands gabarits L’indispensable culotte. Où se po- préfèrent sitionner ? « Le barreur s’installe au disposer de 5 cm de plus. maître-bau, éventuellement assis sur Les mystères rotz Ituralde fait partie un caisson ergonomique, juste der- d’un bateau des 10/15 premiers de Nous avons demandé à un spécialiste du Finn rière la barre d’écoute. » A portée de simple mais la série en France. Sur la de nous livrer son mode d’emploi. main, tous les réglages – cunnigham, Le caisson aux mille remorque, son Finn est bordure, hale-bas, sangles de rappel, rapporté peut facettes. bâché dessus/dessous. France –, Hit est basée en Hollande – de chute – cunnigham et hale-bas sont chariot d’écoute – sont doublés ; ils offrir un confort ONous aidons le champion basque à 3 500 euros le mât – et enfin Pata, une alors sollicités – pour affiner plus ou sont opérationnels sur chaque bord. relatif aux libérer la remorque et découvrons un société hongroise. moins le profil de la voile. Le pied de Particularité du Finn : la bordure clas- grands dériveur récent et parfaitement accas- Mât sur mesure. Toute la subtilité mât dispose d’un réglage, lequel est sique, à l’arrière, est épaulée par un gabarits. tillé : il s’agit d’un Devoti de 2007. de ce tube en carbone, c’est qu’il est relayé au pont grâce à des cales – elles autre réglage à l’avant. « 70% de la flotte en est équipée, on absolument nécessaire d’en contrôler sont déjà à poste, prêtes à l’emploi. La dérive « camembert » est une compte 20% de Pata, les 10% restants la déflexion longitudinale et latérale. « En navigation, détaille Orotz, 4 Fin- pièce en aluminium qui requiert une naviguent à bord de bateaux divers « On calcule la raideur par tiers, il y a nistes sur 5 ne touchent plus qu’aux grande finesse : « Au portant, on la Le compas », résume Orotz. Selon lui, la princi- un protocole établi à l’aide d’un pe- cales, et seulement entre les manches. relève jusqu’au brion, plus ou moins Tacktick est désormais son de 12 kg : le principe est de me- On simule la tension de chute avec pale évolution entre les tout premiers à 5 cm. On laisse donc un peu de autorisé par la modèles et ceux d’aujourd’hui, c’est surer la déformation en millimètres. un tensiomètre, bôme blindée sur le dérive pour ne pas déraper, parce jauge ; tous les l’emplacement du mât : « jauge ai- Pour moi, en longitudinal, c’est 91 pont. Moi, je prends 31 kg, les gros qu’on peut pomper – pavillon O –, à Finn qui dant, les emplantures ont avancé de en bas, 120 au milieu et 89 en haut. bras prennent 35 ou 36... Le poids du partir de 8 nœuds. Au près, la dérive régatent en 12 à 16 cm selon mes observations. Et on établit un second protocole très barreur et la manière dont il pratique est descendue à fond quel que soit le sont équipés. Et les bateaux modernes sont beau- proche pour établir la raideur du mât le rappel conditionnent cette valeur. » vent. Le trou dans lequel passe l’axe coup moins ardents que les anciens. » en latéral. » On l’aura compris, un Et l’écoute ? « La barre d’écoute reste est oblong, donc on peut la transla- En plus du Et le moteur du Finn, bien plus que sa mât se commande sur mesure… Reste toujours sous le vent, répond Orotz, à ter : la dérive est avancée par petit réglage de coque, c’est le fameux tandem mât/ à le gréer correctement. On com- l’aplomb du réglage de bôme le plus temps, reculée par gros temps, on a 4 pied de mât, voile, objet de toutes les attentions. mence par mesurer la quête depuis rentré, c’est-à-dire extrémité au-des- cm de marge. les cales sur le L’espar s’oriente avec la bôme, donc la tête de mât jusqu’au tableau, soit sus du liston, jamais dedans. Comme Le stick mesure habituellement 1,25 pont permettent avec la voile. Précisons que les mâts 6,72 à 6,8 m suivant la force du vent. il n’y a pas de voile d’avant pour assu- m. Celui d’Orotz fait 5 cm de plus de travailler la sont désormais en carbone alors que La plus grande valeur signifie que le rer une déflexion, le réglage doit rester parce qu’il est grand – 1,88 m. La quête du mât. les bômes restent en aluminium. Orotz mât est réglé assez droit, idéal pour ouvert, soit 8° minimum par rapport à moyenne mondiale, c’est 1,89 m et est formel : « le mât, c’est le plus im- le petit temps, alors qu’on tend vers l’axe du bateau. En revanche on borde 94 kg, constate notre spécialiste. Vous Tout est portant après le bonhomme. Ensuite la mesure la plus faible quand le vent l’écoute jusqu’au contact bôme/pont. êtes prêt à embarquer ? Alors enfilez réglable viennent la voile et la coque. » On monte… Mais dans la grosse brise, On lâche quand même 5 cm lors des votre culotte de rappel avec lattes pour à bord du il n’y a pas forcément plus de quête, phases de relance, un peu plus par Finn… même compte trois fabricants en Europe : les cuisses et naviguez ! « Indispen- la tension des Wilke est une marque Suisse – comp- car la bôme touche alors le tableau. petit temps. » Le Finn présenté ici est sable, la culotte… je l’ai oubliée une sangles de tez 4 000 euros pour un tube livré en Il s’agit alors de jouer avec la tension équipé d’une tourelle, ce qui permet fois à terre, pas deux.» p E.V.D. rappel.

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BADGE NAUTIQUE*PASS’PORT

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