Prudhomme Gabrielle 2018 M
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Université de Montréal Faculté des études supérieures et postdoctorales Ce mémoire intitulé : COMMÉMORER VERDI SOUS LE FASCISME : LES CÉLÉBRATIONS DE 1941 Présenté par : Gabrielle Prud’homme A été évalué par un jury composé des personnes suivantes : Sylvain Caron, Président-rapporteur Marie-Hélène Benoit-Otis, Directrice de recherche François de Médicis, Codirecteur Michel Duchesneau, Membre du jury Université de Montréal COMMÉMORER VERDI SOUS LE FASCISME : LES CÉLÉBRATIONS DE 1941 par Gabrielle Prud’homme Faculté des études supérieures et postdoctorales Mémoire présenté en vue de l’obtention du grade de maîtrise en musique option musicologie Septembre 2018 © Gabrielle Prud’homme, 2018 RÉSUMÉ Ce mémoire porte sur la récupération politique de la figure et des œuvres du compositeur Giuseppe Verdi (1813-1901) pendant la période fasciste en Italie (1922-1943), et plus précisément à l’occasion des manifestations relatives aux célébrations du quarantième anniversaire de sa mort en 1941, alors que l’Italie est en guerre contre la France et l’Angleterre. Le premier chapitre explore le développement du mythe de Verdi, et montre comment le compositeur est graduellement transformé en héros national pour devenir une icône de l’art lyrique italien, s’inscrivant dans un effort de glorification du passé pour la promotion d’un esprit nationaliste italien pour, ultimement, attester de la suprématie du pouvoir fasciste. Le deuxième chapitre propose une étude de l’organisation des festivités de 1941; il se penche aussi bien sur les événements musicaux que sur les discours et les publications, pour ensuite présenter une analyse plus approfondie des célébrations organisées à Parme. Il y est question de la riche réception des manifestations, qui assurent l’entretien et la fortification du mythe verdien. Le troisième chapitre analyse les éléments discursifs entourant les festivités, afin de démontrer que l’encensement de la figure de Verdi suit diverses lignes de force qui convergent vers la représentation fasciste de la civilisation italienne. Par l’exploitation des sujets nationalistes véhiculés dans ses opéras, la restitution de son image révolutionnaire et patriotique et l’exaltation de son génie, présenté comme étant à la fois italien et universel, les adhérents du régime ont entretenu et développé le mythe Verdi selon le canon de l’idéologie fasciste. Le but ultime de ce mémoire est de montrer comment, pendant la période fasciste et plus particulièrement au cours des célébrations de 1941, Verdi a fait l’objet d’une récupération idéologique visant à appuyer la légitimité du pouvoir en place pour créer une hégémonie favorable au climat de consensus nécessaire au régime en temps de guerre. Mots-clés : Verdi; fascisme; musique; Mussolini; opéra; commémoration; nationalisme; mythe; Italie; totalitarisme ABSTRACT This thesis focuses on the political recovery of the figure and works of the composer Giuseppe Verdi (1813-1901) during the fascist period in Italy (1922-1943), and more specifically in 1941 during the celebrations commemorating the fortieth anniversary of his death, a moment in time which coincided with Italy’s war against France and England. The first chapter explores the development of Verdi’s myth and sheds light on how the composer was gradually transformed into a national hero to become an icon of Italian opera. This was part of a wider effort to glorify the past in order to promote an Italian nationalist spirit, and ultimately, attest to the supremacy of the fascist power. The second chapter studies the organization of the festivities of 1941; it examines musical events as well as speeches and publications, and presents a more in-depth analysis of the celebrations organized in Parma. It deals with the rich reception of the manifestations, which assure the maintenance and the fortification of the Verdian myth. The third chapter analyzes the discursive elements surrounding the festivities, in order to demonstrate that the exalting of Verdi’s figure follows various lines of force that converge towards the fascist representation of the Italian civilization. By exploiting nationalist subjects conveyed in his operas, restoring his revolutionary and patriotic image and exalting his genius, presented as being both Italian and universal, the adherents of the regime maintained and nurtured a Verdian myth according to the fascist’s cannon. The ultimate goal of this thesis is to show how, during the fascist period and more specifically during the celebrations of 1941, Verdi was subjected to an ideological appropriation that aimed, on the one hand, at given the legitimacy to the fascism authority and on the other, establish a climate of social consensus essential to the exercise of power during wartime. Keywords : Verdi; fascism; music; Mussolini; opera; commemoration; nationalism; myth; Italy; totalitarianism TABLE DES MATIÈRES Résumé i Abstract iii Table des matières v Liste des tableaux vi Remerciements vii Introduction 1 Chapitre 1 : Giuseppe Verdi et le développement d’une figure mythique 9 1.1 Verdi au cœur du Risorgimento : L’exaltation du patriotisme par l’art lyrique 9 1.2 L’appropriation utilitaire du mythe verdien 12 1.3 Le fascisme italien : Un régime attentif à la question culturelle 20 1.4 Récupération de Verdi dans l’Italie fasciste 28 Chapitre 2 : Les célébrations 31 2.1 Événements musicaux 35 2.2 Discours 50 2.3 Écrits 57 2.3.1 Revues officielles du régime 59 2.3.2 Quotidiens 61 2.3.3 Périodiques culturels 64 2.3.4 Fascicules commémoratifs 69 2.3.5 Ouvrages et autres 70 2.4 Étude de cas : Les célébrations de Parme 74 Chapitre 3 : Paysage discursif des festivités 85 3.1 Verdi patriote 85 3.2 Verdi rural 95 3.3 Verdi homme et légende 102 3.4 Verdi italien et universel 108 Conclusion 115 Annexe 1 : Chronologie des célébrations verdiennes 1940-1941 124 Annexe 2 : Publications concernant Verdi (1940-1942) 140 Annexe 3 : Éditeurs et publications 151 Annexe 4 : Membres des célébrations 158 Bibliographie 184 LISTE DES TABLEAUX Tableau 2.1 : Principales productions italiennes d’opéras et d’œuvres chorales de Verdi recensées dans Musica d’oggi de 1940 à 1942 36 Tableau 2.2 : Œuvres représentées dans le cadre des célébrations – productions d’opéras et d’œuvres chorales 38 Tableau 2.3 : Œuvres représentées dans le cadre des célébrations – extraits présentés en concert 39 Tableau I : Célébrations organisées en Italie 124 Tableau II : Célébrations à l’étranger 138 REMERCIEMENTS Ce mémoire de maîtrise vient boucler deux années parsemées de nombreux apprentissages et de travail mettant à l’épreuve toute forme de persévérance, mais surtout, d’expériences stimulantes et mémorables. Je me dois de souligner l’enthousiasme et le soutien constants de mes co-directeurs de recherche, Marie-Hélène Benoit-Otis et François de Médicis, à qui j’exprime toute ma reconnaissance pour m’avoir accompagnée dans les nombreuses péripéties et idées folles, mais également pour leurs précieux conseils, leurs relectures attentionnées et leur heureuse proposition de m’interroger sur le couple Verdi-fascisme. Cette dernière aura permis d’approfondir mon amour pour l’Italie : sa langue, sa culture, ses paysages, bref, ce pays où il fait bon vivre. Et où l’éventail de combinaisons pasta-pomodoro se fait un plaisir de nous doter de quelques kilos en trop. Je tiens également à remercier le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), le Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC), le Centre canadien d’études allemandes et européennes (CCÉAE), l’Observatoire interdisciplinaire de création et de recherche en musique (OICRM), le Fonds Les Amis de l’Art de l’Université de Montréal, ainsi que la Fondation de l’Association des gens d’affaires et professionnels italo-canadiens (CIBPA), qui m’ont offert un précieux soutien financier tout au long de mes études. Enfin, je tiens à exprimer ma plus vive gratitude envers mes parents, qui ont dû écoper de mon goût prononcé pour les escapades à l’étranger, mais qui m’ont épaulée tout au long de l’aventure et qui sont toujours demeurés fidèles à me rappeler que ce mémoire devait se finir. INTRODUCTION Depuis la période du processus d’unification italienne, le Risorgimento (1848-1870), le compositeur italien Giuseppe Verdi (1813-1901) occupe une place prépondérante dans la représentation musicale de la civilisation italienne. Il est devenu une figure emblématique de l’art et du patriotisme italiens, en raison de la renommée de ses œuvres, ainsi que par l’interprétation des intrigues comme des déclarations politiques incitant à la consolidation d’une nation. Continuant après sa mort de jouer un rôle déterminant dans l’imaginaire collectif italien, Verdi – par sa figure aussi bien que son œuvre – fait l’objet d’une importante récupération idéologique en Italie entre 1922 et 1943, alors que la péninsule est sous la gouverne totalitaire du régime fasciste. À son arrivée au pouvoir en 1922, Mussolini est très conscient de l’utilité de la culture pour promouvoir les idées du régime1. Il se montre donc sensible envers les arts et résolu à leur offrir un soutien considérable2. Il défend d’ailleurs cette position lors de l’inauguration de l’exposition Artisti del Novecento à la Galleria Pesaro de Milan le 26 mars 1923, alors qu’il affirme dans son discours que « dans un pays comme l’Italie, un gouvernement ne montrant aucun intérêt envers l’art et les artistes serait déficient3 ». Sous le régime fasciste, la culture est présentée comme l’expression d’un héritage commun appartenant à l’ensemble du peuple, élément que le parti utilise pour créer un consensus au sein de la population. Pour cela, le Duce emploie une stratégie populiste visant à « aller vers le peuple », en facilitant l’accès public à l’art, notamment au théâtre. Les initiatives culturelles se dotent donc d’une fonction essentielle au service de l’État – dont le but est de séduire les masses et les convaincre du bien-fondé de l’idéologie que défend le régime –, permettant au parti de 1 David Ward, « Intellectuals, Culture and Power in Modern Italy », dans Zygmunt G.