Dossier Nomans Langue3.Indd
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NO MAN’S LANGUEGHERASIM LUCA COMPAGNIE DES LIMBES BIBLIOTHEQUE MERIADECK DESCRIPTIF DU PROJET NO MAN’S LANGUE Prendre corps avec Ghérasim Luca, poète. 21 novembre > 21h NO MAN’S LANGUE - Création théâtrale in situ à la Bibliothèque Mériadeck par la Compagnie des Limbes dans le cadre Conférence de Serge Martin sur l’écriture de G.Luca (Thématique à défi nir), Salle des conférences de la Bibliothèque Mériadeck Serge Martin est maître de conférences en langue et littérature fran- çaises à l’IUFM de Basse-Normandie, centre de Caen. Il a dirigé en 2005 le supplément de la revue Triages consacré à Gherasim Luca intitulé «avec Gherasim Luca passionnément...» (Voir CV : www.caen.iufm.fr/skel/html/recherche/cv/martin.pdf) Projection du fi lm «Comment s’en sortir sans sortir» de et par Ghérasim Luca réalisé par Raoul Sangla, Fr, 1989, 55’, DVD. Salle des conférences à la Bibliothèque Mériadeck «Entendre, voir, lire Ghérasim Luca, c’était redécouvrir le pouvoir pri- mordial de la poésie, sa puissance oraculaire et sa vertu de subver- sion», écrivait André Velter. Pour ceux qui assistèrent aux récitals qu’il donnait (pour le festival Polyphonix au MoMA à New York, au Centre Georges Pompidou à Paris ou dans différents centre culturels à Ren- nes, Nancy, Stockholm...) ou qui le découvrirent dans Comment s’en sortir sans sortir, récital télévisuel, sa présence était une transe calme, un envoûtement unique, inoubliable. Exposition des œuvres plastiques de Gherasim Luca, dessins, cubomanies, photos, livres-objets, manuscrits… Bibliothèque Mériadeck NO MAN’S LANGUE Création théâtrale in situ par la Compagnie des limbes La parole est du corps. Un mouvement qui transforme le corps et le langage. Se faire un corps en s’inventant langage. A travers la parole de Ghérasim Luca, nous tenterons de mettre en acte cette éthique du théâtre qui, depuis nos premiers travaux dans Mues en 2003, où plusieurs textes de Ghérasim Luca apparaissaient, ne cesse de nous interroger. La parole sera livrée par les interprètes de manière à faire entendre toute la jubilation contenue dans cette poésie et nous prendrons comme indication ce que Gherasim Luca appliquait pour son art : « Comme le funambule à son ombrelle je m’accroche à mon propre déséquilibre ». Ainsi, convoquant le déséquilibre comme force, les acteurs seront plongés dans une véritable expérience sensorielle avec comme partenaire, le langage. • S’INVENTER LANGAGE Le tangage de la langue chez Gherasim Luca Cette recherche théâtrale prenant comme matériau les poèmes de Gherasim Luca a été impulsée par la pensée de Gilles Deleuze, notamment à travers la lecture de Critique et Clinique, Dialogues et Superpositions. Il écrira à propos de l’écriture de Gherasim Luca « Bégayer, en général, c’est un trouble de la parole. Mais faire bégayer le langage est une autre affaire. C’est imposer à la langue, à tous les éléments intérieurs de la langue, phonologiques, syntaxiques, sémantiques, le travail de la variation continue » . Faire vibrer, bifurquer la langue, la mettre en état de perpétuel déséquilibre, cela crée une tension du langage qui transforme les corps et désoriente la scène. Les acteurs ne sont pas des personnages, ni la voix des auteurs, ils sont mus dans l’épreuve et la jubi- lation par une variation continue d’intensités et d’affects. « Faire un usage mineur d’une langue majeure », en babillant, en bégayant, c’est pour nous une manière d’échapper à l’ordre établi du langage, de le déstabiliser et ainsi de générer un « devenir-minoritaire : non pas faire semblant, non pas faire ou imiter l’enfant, le fou, la femme, l’animal, le bègue ou l’étranger, mais devenir tout cela, pour inventer de nouvelles forces ou de nouvelles armes » . A la frontière du non-sens, les acteurs tracent des lignes de fuite et de désir qui, peu à peu, par babils et bégaiements successifs, dévoilent la potentialité de chacun de « s’inventer langage ». Dire la poésie de Ghérasim Luca Dire la poésie de Ghérasim Luca plonge l’acteur dans une expérience charnelle, un corps à corps avec le langage. Pour prendre corps dans le mouvement de cette parole, il nous faut ouvrir la matière des mots, en goûter la multiplicité des sens, libérer le souffl e et vibrer dans le tangage d’un « v’ivre au m’onde » . « Celui qui ouvre le mot ouvre la matière et le mot n’est que le support matériel d’une quête qui a la transmutation du réel pour fi n. Plus que de me situer par rapport à une tradition ou à une révolution, je m’applique à dévoiler ma résonance d’être » . Laisser raisonner la parole de Gherasim Luca, conduit à une érotisation généralisée. Nous ferons converger toutes l’équipe de NO MAN’S LANGUE, autour de cette no- tion d’une érotique du langage. Cela se traduira par la création d’un bain sonore et lumineux aux rythmes changeant, prolongeant par le traitement électroacoustique et la scénographie des lumières le bégaiement poétique inventé par Gherasim Luca. Cela conduira également le spectateur, tout au long de cette plongée dans l’univers du poète. La fi xation du désir sur une partie du corps, sur un objet, ou sur une matière, dans les textes poétiques et théoriques, nous amène à penser le fétichisme comme l’un des pos- sibles accès à une dimension esthétique de cette mise en scène. • UNE CRÉATION IN SITU Exploration du lieu L’écriture scénique s’inventera grâce aux spécifi cités de la Bibliothèque Mériadeck créée par l’agence d’architectes Tournier-Ardilouze-Rousselot, en investissant des espa- ces connus et inconnus du grand public. Chaque site investi sera l’objet d’une explo- ration minutieuse des caractéristiques plastiques, spatiales, lumineuses et accoustiques ; la voix et le corps serviront d’outils de mesures et d’appréhension de ces différentes composantes. L’histoire et les pratiques des usagers de la Bibliothèque pourront être un axe de recherche pour inventer une scénographie, il s’agira alors de «rendre visible le mouvement des lieux» grâce aux vibrations, aux rythmes, aux tensions et aux métamor- phoses opérées par le langage. Scénographie – note d’intention Les spectateurs seront conviés tout d’abord dans le grand hall de la bibliothèque, ce hall, ainsi que le puit de jour qui le surplombe avec ses diverses terrasses en feront le centre névralgique de cette création. Grâce au dispositif sonore et lumineux qui sera une sorte de guide pour le spectateur, le parcours prendra la forme d’une ascension. Certain espace, « comme les magasins » pourront être des lieux de passage, où une installation sonore et vidéo accompagnera la traversée des espaces. • TEXTES CHOISIS La Mort Morte (issu de L’inventeur de l’amour suivi de La Mort Morte, ed José Corti) Passionément ; Le rêve en action ; Prendre corps ; Qui voyez vous? Les cris vains (issu de Héros limite, Poésie / Gallimard) > Le rêve en action Ce poème somnambulique fragmente et recompose insatiablement le corps de l’aimée. L’invention d’une géographie du corps nous entraîne vers une écriture qui fl irte avec le surréalisme, pour mieux se perdre. Et savourer cette perte. “La beauté de ton sourire Ton sourire en cristaux Les cristaux de velours Le velours de ta voix Ta voix et ton silence Ton silence absorbant Absorbant comme la neige La neige chaude et lente Lente est ta démarche Ta démarche diagonale Diagonale soif soir soie et Flottante •••” > La Mort Morte Ce face à face avec la mort qui se résout à chaque fois dans l’humour, est avant tout un défi . Nous assistons à cinq tentatives de suicide « par l’impossible » qui sont décrites puis analysées en directe grâce à trois lettres laissées avant, pendant et après l’acte. Ces simulacres voluptueux et grinçants érotisent la pensée et jettent un trouble sur le langage. Texte écrit pendant la troisième tentative > Passionnément Poème emblématique de l’œuvre de Gherasim Luca, Passionnément détient une force théâtrale hors du commun. La tension du bégaiement poétique est ici portée à son pa- roxysme, débordant presque vers de la poésie sonore. Bégayant pas à pas le mot « passionnément », se répétant et se multipliant ad libitum, le poème fait éclater un cri en un jaillissement d’affects : « je t’aime passionnément ». « … je t’ai je t’aime je je je jet je t’ai jetez je t’aime passionném t’aime je t’aime je je jeu passion j’aime passionné éé ém émer émerger aimer je je j’aime émer émerger é é pas passi passi éééé ém éme émersion passion passionné é je je t’ai je t’aime je t’aime passe passio ô passio passio ô ma gr ma gra cra crachez sur les rations ma grande ma gra ma té ma té ma gra ma grande ma té ma terrible passion passionnée je t’ai je terri terrible passio je je je t’aime je t’aime je t’ai je t’aime aime aime je t’aime passionné é aime je t’aime passioném je t’aime passionnément aimante je t’aime je t’aime passionnément je t’ai je t’aime passionné né je t’aime passionné je t’aime passionnément je t’aime je t’aime passio passionnément » >Prendre corps Dans un mouvement ininterrompu du «je» vers le «tu», le poème opère comme une tentative d’exploration des effets de la relation amoureuse. « Je te fl ore tu me faune Je te peau je te porte et te fenêtre tu m’os tu m’océan tu m’audace tu me météorite Je te clef d’or je t’extraordinaire tu me paroxisme … » extrait du poème Prendre corps, Gherasim Luca, Héros-Limite, ed.