Henri MARTIN

Combats deà Juin 1940 Xertignyet à

Illustrations de Georges MANGIN Grand Prix 1965 de la Ville d'Epinal

Edité par le SOUVENIR FRANÇAIS

COMBATPROGRESSIONS DE ALLEMANDESXERTIGNY . (18-6-1940)ECH. 1/20.000éme

Planche I

A l'occasion du 25 anniversaire des combats de et de Dounoux, cette courte introduction nous fera prendre contact avec nos lecteurs. Elle nous permettra d'adresser, avec un cordial souvenir de vifs remerciements à tous les acteurs ou témoins des drames des 18 et 19 juin 1940, qui ont bien voulu nous fournir, pour la rédac- tion de cette brochure, des renseignements aussi précis que divers, sans lesquels nos efforts seraient sans doute demeurés inutiles. Pour ne pas oublier les noms de certains d'entre eux, nous les avons joints à leurs témoignages, tous aussi véridiques qu'inté- ressants. Mais nous devons une mention particulière aux personnes qui ont le plus contribué à la réalisation de notre projet. Pour ne point froisser leur modestie, nous ne détaillerons pas leurs mérites divers, nous contentant de citer : M. le chanoine Lemoine, ancien doyen de Xertigny ; M. l'abbé Chaudeur, curé de Dounoux ; M Monin, présidente cantonale du Souvenir Français ; MM. Dupré, maire de Xertigny et Houillon, maire de Dounoux ; nos amis André Durand-Poignant, imprimeur et Georges Mangin, dessi- nateur, aux œuvres reproduites par M. Aymard. A tous nous adressons nos affectueux remerciements. Qu'on nous permette d'exprimer quelques regrets. D'abord, celui de n'avoir pu obtenir des familles des héros tombés chez nous des photos plus nombreuses, à insérer dans nos pages, beau- coup de lettres étant demeurées sans réponse. Ensuite, celui de n'avoir pu reproduire in extenso, faute de possibilités financières, tous les témoignages reçus. Cependant, grande a été notre satisfaction de pouvoir, enfin, publier des résumés ou des extraits de nombreux documents re- cueillis en captivité dans les hôpitaux et dans les stalags d'Epinal et de Silésie, en y joignant des souvenirs personnels vieux d'un quart de siècle déjà. Aussi, c'est bien volontiers que nous avons fait don du bénéfice éventuel de cette édition au Souvenir Français de notre canton. Ce petit livre, empreint, croyons-nous, de vérité historique, nous l'aurions souhaité plus complet et de plus riche présentation, pour mieux honorer la mémoire des héros qui, venus de loin vers notre frontière de l'Est — hélas ! prise à revers — en combattant vaillamment, ont versé leur sang pour l'honneur de notre drapeau et pour mon pays natal. HENRI MARTIN Lauréat de l'Académie de Stanislas (Prix du Souvenir) Lauréat de l'Académie Française (Prix Hérédia)

PRÉLIMINAIRES

Durant le mois de juin de la funeste année 1940, la petite ville de Xertigny, au cœur de la Vôge, n'a certes pas autant souffert qu'Epi- nal, Châtel ou . Cependant, ses habitants ont eu à déplorer en plus de la mort de nombreux soldats, leurs défenseurs, l'incendie d'une maison, de l'hôtel-de-ville et de l'église. A Dounoux, les dégâts furent également importants. Quant au combat qui s'est livré chez nous, on peut le consi- dérer comme un épisode marquant de la fin de la guerre de 1940, l'un des plus dramatiques et aussi des plus glorieux parmi ceux livrés dans nos pour ralentir l'avance ennemie durant les derniers jours précédant l'armistice du 22 juin. La place nous fait défaut pour situer ce fait d'armes dans l'en- semble des opérations assez confuses, et partant peu connues, qui ont abouti, dans notre région, malgré l'héroïque résistance d'une partie de nos troupes, à l'encerclement de nos armées de l'Est. C'est pour retarder cet encerclement et pour reculer la douloureuse échéance de l'armistice, que, parmi le flot de fuyards encombrant nos routes, quelques unités disciplinées et bien encadrées, inférieures à l'ennemi en nombre et en armement, mais non en vaillance, ont lutté sans espoir de vaincre jusqu'à la dernière extrémité, en sauvant l'honneur de nos drapeaux. De ce nombre étaient les héroïques défenseurs de Xertigny dont nous voudrions honorer, en les donnant en exemple aux générations futures, le magnifique comportement et l'émouvant sacrifice !

Durant les premiers mois de la « drôle de guerre », comme presque partout ailleurs, malgré l'absence de nombreux mobilisés, la vie avait continué, assez paisible, à Xertigny, où n'arrivaient pas ces avis mortuaires si fréquents de 1914 à 1918 ; où des Alsaciens évacués par ordre, des environs de Strasbourg et notamment de Haguenau et Schiltigheim, avaient trouvé, pour adoucir leur exil passager, la plus cordiale hospitalité. En , on avait cru fermement qu'après notre couteuse vrctorre de 1918, gagnée par une armée qui avait mérité l'admiration du monde entier, il n'y aurait plus jamais de guerre (1), l'Allemagne étant désarmée pour toujours, et de prestigieux hommes d'Etat, éloquents pèlerins de la paix, envisageaient un désarmement général, après la « der des ders » qui devait empêcher les descendants des héroïques poilus de connaître à leur tour les horreurs de la première guerre mondiale. Bref, à une nation glorieuse mais épuisée, on promettait la paix éternelle, et quand fut venue la défaite, le 6 juin 1940, Paul Reynaud en attribuait la responsabilité « au pays tout entier... la démocratie ayant 1) La guerre avait été mise hors la loi par le pacte Briand-Kellog, en 1927, année où Painlevé ne voulait « qu'une armée qui ne puisse que défendre nos frontières ». depuis longtemps manqué de prévoyance et d'audace... l'idée de patrie, l'idée de valeur militaire ayant été trop négligées ». (1). Cependant, un nouveau conflit avait éclaté, et nos alliés polonais, malgré leur bravoure, avaient été submergés en quelques semaines par les chars et les avions de la nouvelle armée allemande. L'avertissement n'avait pas été compris, et, confiants dans notre armée, rassurés par d'éloquents et émouvants discours de nos diri- geants comme par les slogans de la radio, nous nous endormions dans une trompeuse sécurité, dans un beau rêve de paix, escomptant une victoire aussi prochaine que facile, sans grands combats pouvant provoquer les hécatombes de l'autre guerre. Persuadé que la vraie guerre n'aurait pas lieu, notre commande- ment hésitait à soumettre nos troupes à un entraînement intensif, considéré comme inutile. Pendant ce temps nos adversaires, profitant au maximum du répit des premiers mois de guerre, ne restaient ni dans la torpeur ni dans l'inaction, voulant donner à une armée de formation nouvelle la puis- sance qui lui faisait défaut au moment de la déclaration de guerre. Tandis que nous nous contentions d'améliorer un armement désuet, les usines allemandes sortaient en grande quantité du matériel moder- ne : mitraillettes, canons, camions, avions et chars perfectionnés. Tandis que notre infanterie, disposée à fournir dans « l'imprenable Ligne Maginot » le feu qui arrête plutôt que le feu qui progresse, se résignait d'avance à l'immobilité défensive (2), elle trouvait, non sans étonnement, en face d'elle, une infanterie agressive, nombreuse et bien entraînée. Bref, le climat de la « drôle de guerre était chez nous plus favorable au scepticisme qu'à l'esprit de sacrifice, et l'habile propagan- de allemande y contribuait en apportant la confusion dans l'âme des civils et même des combattants.

Qu'il s'agisse de chars lourds, de matériel anti-chars et même d'effets de petit équipement, chez nous le matériel n'était pas au point, ni en quantité suffisante. Quant à notre aviation, la déclaration de guerre de 1939 l'avait trouvée dans une situation si mauvaise qu'il ne pouvait être question pour notre commandement de prendre l'initiative d'opérations aériennes. Il devait se borner à demander à nos avions de reconnaissance de rechercher des renseignements, et à nos appareils de chasse de s'opposer aux incursions profondes des avions ennemis. Au cours de la période d'activité réduite qui dura de la déclaration de guerre au début de mai 1940, notre aviation n'eut pas trop à souffrir de son infériorité numérique et matérielle. 1) « Notre conception militaire n'admettait qu'une guerre imposée, donc défensive » Général Gamelin. 2 ) De son côté, le général de Gaulle a écrit, dans le tome I de ses Mémoires : « La faiblesse du pouvoir et ses discordes politiques... tout concourait à faire de la passivité le principe même de notre défense nationale... Le régime était incapable d'adopter les mesures qui eussent assuré le salut. » Aucun bombardement aérien des deux adversaires. Seuls appa- raissaient, de temps à autre, dans le ciel de notre région, quelques appareils allemands volant très haut, avec des traînées blanches, hors de la portée de notre D.C.A., d'ailleurs presque inexistante autour d'Epinal. Aussi, grande fut la surprise chez nous, le 10 mai 1940, quand débuta brusquement, avec le bombardement de nos terrains d'aviation, la puissante offensive allemande (1), suivie d'une avance foudroyante des armées ennemies, de jour en jour plus inquiétante pour notre Haut-Commandement, très vite impuissant à la stopper, après avoir cru à une nouvelle alerte, un peu plus sérieuse seulement que les précédentes. La presse et la radio françaises en parlaient sans grandes préci- sions, voulant jusqu'au bout rassurer l'opinion publique par un demi- silence et par des paroles d'encouragement et d'espoir. C'est pourquoi l'annonce de notre défaite au début de juin, jeta le désordre et sema la panique à Xertigny, comme dans toute la région environnante. De plus, le 11 mai, alors que la guerre paraissait gagnée par l'Allemagne, l'Italie se déclara contre nous, nécessitant la création sur les Alpes, d'un nouveau front que; d'ailleurs, les Italiens ne purent enfoncer (2). Vers cette date, par ordre préfectoral, commença à Xertigny, ainsi que dans les communes voisines, la construction, par la main-d'œuvre civile, de solides barricades destinées à arrêter, ou tout au moins à ralentir l'inquiétante progression des armées allemandes.

1) Cette offensive avait d'abord été fixée par Hitler au 17 janvier. A la suite de l'atterrissage fortuit d'un avion allemand à Mechelen, en Belgique, près de la Meuse — avion porteur de documents ultra-secrets — le jour « J » avait été reporté au printemps, par temps propice. 2) Le comte Ciano lui-même reconnaît qu'il est « très peu glorieux de tomber sur une armée déjà battue », autrement dit de nous poignarder dans le dos. Mussolini, plein d'une « extrême amertume », se rend compte qu'il ne joue qu'un rôle secondaire et que la guerre a été gagnée « sans le concours actif » de l'Italie.

PREMIÈRE PARTIE AVANT LE COMBAT IMPRIMERIE A. DURAND - POIGNANT ÉPINAL

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