co rrespondance imaginai MEHDI Illustration Fiodor de Sumkin Par RachèleBevilacqua DJ re 11 tu le connais. Ta culture musicale est démente. Mais pas que. Tu es aussi un grand fan que. Tu fan pas démente. est Mais Ta grand musicale un aussi es le connais. tu culture j’imagine, horriblement est que, évidemment, et acidulé titre ce moquer demoi, car Je PENSE. n’attendsJE qu’une c’est chose, det’en te parler, vas déjà que tu sachant ÀTOI l’ont QUE qui le C’EST rendre monde, et pour meilleur, de ce deceux changé Wonder, morceau deStevie peuplé GRANDS des notre univers, premier rôle un dans Dans le vol m’emmène qui Dans « en Tasmanie, je découvre nouveau d’un àl’autre monde porte la àexplorer.ouvrait joyeux. nous rendait Et ça qui celle celui ou étions victoire. Nous une et un plaisir l’autre,une photo à c’était film, musique, une un livre, un à chaque fois et apportait que autres, l’un des et uns des sées tu échangeais pour essayer d’aller encore plus loin dans la compréhension la encore plus d’aller essayer dans loin pour du monde. échangeais tu L’autre HOMME. toi un savoir de une source avec qu’un qui pas mais n’était reflet, n’est rien Car hasard. àl’écoute. Sois gratuit. Turoger. « étais. tu Pour me qui comprendre disais et là foutais que ce tu del’inter Tu Ne présente. cessais Tu vivant. en la vie étais la lui traverser l’écoutais. l’ont. Et peu en vie. Tu d’être conscience la voulais avais tu car homme chanceux un ça depouvoir vivre chance quelle réglée autre vie cette jouais tu lesquelles dans villes les visiter rencontrais tu s’amplifient. perceptions Que voyais-tu Les àParis. di vendre soit mercredi soit un un ton était le et nuit, jour la jeudi nuit, la le devient jour toi, temps pour où, sans rythme ce ailleurs, ces sur det’interroger Je ne cessais heures. àl’autre, continent àl’autre, d’un en l’espace dequelques dequelques jours, ville d’une passer mois, trois Tu partir d’été. pouvais tournées longues tes d’autres dans tant mi qu’une n’étaient par étape villes Ces clubs àMelbourne. des àSydney et dans jouais Toi, fois. plusieurs Tu été en Australie. yas tu d’aller ont chance la d’Occidentaux n’a C’est Tu que vie la magique. dequoi delimites. l’impression Peu pas je parle. sais J’ai c’est àl’autre, grisant. l’ouverture àl’inconnu, horaire, décalage Le à l’impossible. Mehdi, Mon Cher Mehdi, Avec toi, je passais des heures à essayer dedécoder, àessayer Avec heures des decomprendre toi, pen les je passais seul le voyage peut procurer. Je touche à l’extraordinaire, au merveilleux, au le voyage merveilleux, peut procurer.seul Je touche à l’extraordinaire, que, peut-être, bonheur d’intense état un Dans Tasmanie. reportage. En septembre 2011. àl’autre bout littéralement du Je monde. suis En ? N’étais-tu pas frustré de ne pas avoir le temps et souvent l’énergie de de avoir dene le pas temps souvent et l’énergie frustré pas ? N’étais-tu ? « Oui c’est vrai, c’est compliqué et super crevant, disais-tu, mais mais c’est c’estOui disais-tu, vrai, compliqué super crevant, et ! I’m aLucky boy ? Comment vivais-tu tes retours à , dans dans àParis, retours tes ? Comment vivais-tu » Tu de faire tout pouvait prenais qui ce . » You are aLUCKY BOY ? Qui étaient tous ces gens que tous ces étaient ? Qui Kiss Lonely Good-Bye Kiss Paris, le 15 le juin 2012Paris, RIEN n’estRIEN Paris, le 2012 15 juin Paris, . Tu étais », un - - - - 5 | Correspondance imaginaire • DJ Mehdi 6 | PORTRAIT # 1 • Printemps 2014 partir. Nous sommes en 1999. La religion n’est pas ta grille de lecture du monde. delecture en 1999. Nous n’est sommes religion La partir. grille ta pas Tu J, entre en religion. le leader d’Ideal de décides James, Kery plus tard, années Tu dejeu existentiel. n’avais terrain un que devient 15t’a Elle absorbé. musique La dete découvrir. possibilité touché as àcette tu avec condition, et elle une doute, sans partageais, avec tu qui communauté hip-hop une radicale rentré dans Avec es J, tu douloureux. Ideal très ENGAGÉ. parfois et fut Et ce homme LIBRE un contre toi-mêmetoujours d’aller detoi. Tu contre que et attendaient autres ce les étais diversitéintériorité.la de ton personnalité, ta de essayais Tu traits ter différents les exis faire pour ailleurs, aller pour le pas, toujours as franchi tu et bande àune école, à une appartenir genre, réduit à un être pas compte ne pouvais que te rendais tu tu plus vie, ta dans Plus avançais en soi. tu porte apparentes que chacun contradictions àfaire pas je n’arrivais Tu que, àl’époque, ce réussissais séduite. et j’étais Et j’avançais plus plus J’avais connaître. dete monterenvie fil. un ». sorte dela Tu telagit ou un decomprendre. essayais « Tu dejugement donc car, disais-tu, jamais ne portais que nichent se force la beauté C’est la dechaque et être. unique. ici, pensais-tu, savais la ressemble àbien tu histoire d’autres mais Cette Histoire. plus une Grande famille, le de cette quotidien à travers transmettre, à Tunis. ainsi Tuson quartier imaginais dans d’études première la son aété certificat femme àobtenir qui grand-mère de ta Tu desuite. avec aussi, beaucoup ainsi et d’admiration, parlais Martine, Fatia, tante gé le Ta prénom ta s’est onclestantes. detes appelée et Danièle, mère Latifa vue toute avant avaient, chan chose, sociaux Tu que services les en souriant me racontais en juillet 1964. C’était àGennevilliers. s’est qui installée africaine premièrela famille Ware, avec ton de Chris auteur préféré deBD. Tu l’écrire l’histoire lais écrire voulais Tu tienne. dela vou Tu l’histoire écrire voulais famille. La famille. àta visite rendais tu parfois et mère. Tu deta le pays d’origine Ali deBen deprès politique la suivais Tunisie, attachement àla Tu continent. ce joué preuve sur grand avais d’un tu faisais raconté si aurais que Je ce tu me demande en Afrique. été aies que tu souvenir Aucun homme. un àdevenir às’épanouir, l’aide àgrandir, Quelque passion. qui chose une trouve espérer que, aussi, lui m’as tu Gardette, printemps dernier Square au confié, quelques Au mois tard. plus Nielnaîtra graffeuse. est Elle quête desens. cette poursuis tu avecet, elle, tu amoureux tombes fou crois, je rencontres2004, en tu Fafi, Quand Tu deMichel-Ange àme parler sion heures du des plus et la Caravage. vraie. passé as l’expres en était Gainsbourg, pour comme comprendre. la peinture, pour clés les La chercher c’est vie, L’art ta allais où là tu dans essentiel était surréalistes. des et tialisme del’existen deSartre, disais-tu, del’humanité, le destin relations internationales, des Depuis notre rencontreDepuis je n’ai en 2003, de t’interroger, d’essayer de re cessé États-Unis. les et l’Asie, principalement l’Europe parcourais tu tournée, En échanges. nos de merveilleux et jegarde souvenir un ensoleillé Mehdi, tu ne sais pas pourquoi tel pas un ne sais tu : trouver ponts les entre les ans. Quelques Quelques ans. ------

compréhension dumonde. plus loindansla encore essayer d’aller tu échangeaispour de savoiravecqui reflet, maisunesource L’autre n’étaitpasqu’un en vie. Etpeul’ont. la conscienced’être chanceux cartuavais Tu étaisunhomme You areaLUCKY BOY. 7 | Correspondance imaginaire • DJ Mehdi C’est la capacité à réfléchir par toi-même qui l’est. C’est la seule qui te mènera à une paix intérieure, disais-tu, et c’est ce qui t’intéresse. Tu ne cesseras de la nourrir. Par tes voyages, tes lectures et tes rencontres. En 2001 sort (The Story of) Espion, ton pre- mier album solo. Dans le livret tu écris : « Certains jours, je me suis même demandé : amis, qu’est-ce qui m’a pris d’avoir envie de faire ce disque ? Et aujourd’hui, à une semaine de sa sortie, je suis persuadé d’avoir bien fait, pour au moins une raison : ces questions font ma vie, tout simplement. Alors je vis, et ça me suffit pour avoir envie de recommencer vite ! Paix Mehdi. » Ta musique reste fondamentalement an- crée dans l’esprit d’un hip-hop old school mais elle intègre le rock, la pop et l’électro. À l’époque, tu sais que ce mélange des genres risque de heurter violemment les amis avec qui tu as grandi musicalement. Tu as mal. Plus tard, Têtu veut t’interviewer sur l’homophobie de certains rappeurs français. Tu acceptes. Et là encore, tu sais que cer- tains risquent de t’en vouloir terriblement. C’est toujours la même menace : penser différemment, c’est être vu comme un traître. Mais il n’en fut rien. Ils étaient tous là, le 17 septembre 2011, m’a-t-on dit. J’étais à Hobart dans une synagogue. La première qui fut construite en Australie. Ta rencontre avec , manager des , puis de Justice et d’autres artistes de la scène électronique française a été aussi im- portante que ta rencontre avec . Pedro et sa volonté farouche de ne mettre aucune limite à la création, pourvu qu’elle fasse danser les gens, te pousse à continuer à creuser ton sillon. Ce n’est ni du rap ni de l’électro. C’est du DJ Mehdi. Pourtant, t’inscrire dans cette mouvance musicale ne fut pas simple. Tu avais tellement peur de trahir tes sources, tes origines, ceux avec qui tu avais commencé. Et puis la musique n’était pas, pour toi, de l’entertainment. La musique t’a éveillé à la vie. Les mots et les sons de Woody Guthrie, Hank Williams, John Lennon, Bob Marley, Chuck D, Bob Dylan, Curtis Mayfield, Jimi Hendrix t’ont donné un plein accès, malgré la difficulté à vivre, à la beauté de la vie. Tu voulais être à la hauteur. Tu t’es donc vite interrogé sur ce que tu allais laisser au monde car, pour toi, toute création porte en elle un message. Tu lui as laissé (The Story) of Espion, Des friandises pour ta bouche, Lucky Boy, de très beaux et riches albums, qui vont, j’en suis sûre, à leur tour, ouvrir des portes et inspirer d’autres artistes et une force de vie, de celle qui donne envie de se lever tous les matins et de croire qu’on peut construire un monde meilleur. Un monde avec l’autre. Un monde dans lequel il ne faut jamais lâcher ni nos envies de faire, ni ce qu’on est, ni les valeurs auxquelles on croit. C’est de cela dont on a parlé pendant des années. Mehdi, tu étais un homme heureux. Heureux de la vie que tu avais choisie et que tu menais. Et cette réalité est le plus formidable message que tu puisses avoir laissé. Et je dois te dire que si Portrait existe aujourd’hui, c’est parce que nous nous sommes rencontrés •

Avec toute ma reconnaissance,

Rachèle | PORTRAIT # 1 • Printemps 2014 • Printemps 1 # | PORTRAIT

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