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INSIDE MAN, L’HOMME DE L’INTÉRIEUR Inside Man DE SPIKE LEE FICHE TECHNIQUE USA - 2005 - 2h10 Réalisateur : Spike Lee fi che fi lm che fi fi Scénario : Russell Gewirtz Image : Matthew Libatique Ce devait être le hold-up parfait, le chef-d’œuvre d’un génie Montage : du crime. Le décor : une grande banque de Manhattan. Les Barry Alexander Brown protagonistes : un commando masqué, cagoulé, lunetté SYNOPSIS et des dizaines d’otages affolés, contraints de revêtir Musique : la même combinaison passe-partout que les braqueurs. L’enjeu : la salle des coffres et ses trésors ? Ou un vieux Terence Blanchard secret dont seuls deux personnes connaissent l’impor- tance. Aujourd’hui, confiné dans une cellule, le cerveau de la bande s’explique. Mais, attention, chaque mot compte, Interprètes : et aucun indice ne vous sera livré au hasard. Prêts ? Ce Denzel Washington matin-là, donc, quatre peintres en bâtiment franchissaient le seuil de la Manhattan Trust Bank… (L’Inspecteur Keith Frazier) Clive Owen (Dalton Russell) CRITIQUE Jodie Foster Il y a dans le nouveau film de Spike Lee ce côté fusée à (Madeline White) deux étages susceptible de fédérer le public le plus large Christopher Plummer et le plus varié. Divertissement spectaculaire de bonne (Arthur Case) facture et remise sur le métier des obsessions d’un auteur Willem Dafoe de cinéma, Inside Man signale, après un sensible affai- blissement de sa production récente, le retour en grande (Le Capitaine John Darius) forme du trublion afro-américain de Brooklyn. La première Chiwetel Ejiofor étape du dispositif propulse un film de genre, voire de (L’Inspecteur Bill Mitchell) sous-genre, sous les espèces d’un récit particulièrement Carlos Andres Gomez ingénieux de cambriolage. Action dopée à l’adrénaline, (Steve) montée de la tension, personnages parfaitement campés, duels psychologiques sur le fil du rasoir, combustion à Kim Director mèche lente des ressorts de l’intrigue, crescendo crispant (Stevie) du suspense, retournements imprévus de situation, faus- ses pistes et vrais imbroglios sur [White Anglo-Saxon Protestants]). A Nous Paris - n°307 fond historico-politico-policier : Avec, entre ces trois pôles qui se Fabien Menguy tout y est. livrent une lutte à mort, une seule Fort de ce casting de luxe, ce bon (…) La construction sophistiquée question qui rebondit à l’infini : vieux Spike Lee n’en oublie pas du film contribue au plaisir du de quel côté se trouve la justice ? pour autant son style bien particu- spectateur par la déstructuration La réponse est tout sauf éviden- lier. (...) Spike Lee prouve – même du récit, qui navigue non seule- te, et il appartiendra à chaque si l’on reste un peu sur sa faim ment entre divers points de vue, spectateur de se la forger par lui- – que son talent et sa patte peu- mais aussi entre deux temps ren- même, à travers l’entrelacs d’am- vent transformer un simple polar dus synchrones : celui du braqua- biguïtés, de fantasmes et de rémi- en bon divertissement intelligent. ge proprement dit et celui de l’in- niscences historico-cinéphiliques terrogatoire des otages à l’issue ménagé par le réalisateur dans 20 Minutes - Caroline Vié de leur libération, et parmi les- ce film. Avec les fantômes de la (...) Spike Lee ne manque pas quels se dissimulent les criminels. Shoah qui côtoient l’ombre du ter- d’inspiration dans Inside Man (...). Le deuxième étage de la fusée est rorisme, l’appât du gain qui voisi- (...) Cet habile divertissement allie tout aussi remarquable : il consis- ne avec le devoir de mémoire, les le bonheur ludique d’une grande te, pour Spike Lee, à se servir de vrais morts qui cohabitent avec production hollywoodienne à une l’ingéniosité du scénariste Russel les faux cadavres, la loi qui prend peinture ironique d’une Amérique Gerwitz et de la commande de la des libertés avec le droit, les victi- paranoïaque tenaillée par ses major Universal pour marquer mes qui deviennent indiscernables angoisses identitaires. ce film de son empreinte. Sous des bourreaux et des politiques les auspices des genres les plus qui taillent des croupières à leurs Métro - Jérôme Vermelin divers (comédie de mœurs, Nola propres forces de l’ordre, il est (...) Spike Lee adore placer ses per- Darling n’en fait qu’à sa tête ; en tout cas probable qu’on sorte sonnages face à un conflit person- chronique urbaine, Do The Right ébloui, mais un rien perplexe, de nel, social, politique, voire tout à Thing ; biopic, Malcolm X…), on ce labyrinthe. la fois. Avec Inside man, il s’essaie sait quelle forme celle-ci adopte Jacques Mandelbaum avec bonheur au film de genre, ordinairement : la représentation Le Monde - 12 avril 2006 bien aidé par un scénario redou- antihollywoodienne des minorités, table et un casting grand luxe. à commencer par l’afro-américai- ne, et, partant, la stigmatisation L’Express - n°2858 rageuse de l’écart existant entre Car c’est la bonne surprise : Inside le mythe du melting-pot et une CE QU’EN DIT LA PRESSE Man est un divertissement, mais réalité gangrenée par le racisme, Mad Movies - n°185 pas seulement. A ce tarif-là, Spike l’injustice et l’inégalité. Stéphane Moïssakis Lee ne vole personne. Inside Man est à cet égard une Carré, sans prétention, diablement nouvelle variation sur le thème, efficace dans son déroulement et Studio - n°222 - Thierry Cheze organisée pour la circonstance en filmé avec un sens cinématogra- (...) [Le film] s’impose comme l’un triangle : un côté noir pour l’in- phique imparable, Inside Man est des plus grands polars de ces carnation de la loi (le flic intègre), l’exemple même de la commande dernières années. Par son intri- un côté juif pour l’incarnation du transcendée par la maîtrise de son gue, tout d’abord, riche en rebon- crime (le mobile, sinon l’identi- auteur. dissements inattendus et menée té des cambrioleurs), et un socle sans temps morts. Par sa forme, blanc pour l’incarnation du pou- ensuite. Chaque plan est une leçon voir (le cynisme des notables Wasp de cinéma. 2 CinéLive - n°100 - Philippe du, qu’il utilise avec une grande Paumier Quel est votre film de braquage facilité. Ce qui ne veut pas dire Contre toute attente, Inside Man préféré ? qu’il ne travaille pas, au contraire. conjugue classe rétro et tempo C’est évident, nous avons égrené Mais il donne l’illusion de ne faire allegro, sans ravaler les personna- trois ou quatre citations au long aucun effort. Pour Inside Man, ges au rang de marionnettes. du film, c’est Un après-midi de nous avons travaillé avec un poli- chien. cier afro-américain, Neil Carter, et Rolling Stone - n°39 Denzel s’en est inspiré pour son Mathilde Lorit Wall Street n’est pas un quartier comportement, sa tenue. Sans vraiment renouveler les de New York que vous avez beau- règles du jeu, Spike Lee se révèle coup fréquenté. On dirait qu’il est plus facile un artisan très capable au moment Je n’y avais jamais tourné, je ne aujourd’hui à Hollywood de faire de polir un objet aussi vu que le suis pas un grand financier. Le des films intelligents que ces der- film de casse. quartier garde les traces du 11 nières années. Septembre, on voit des chiens Non, ça a toujours été le cas. Dès Les Cahiers du cinéma - n°611 détecteurs de bombes partout. La mes débuts, j’ai voulu faire des Emmanuel Burdeau – Eugenio banque que vous voyez est au coin films qui distraient tout en provo- Renzi de Hanover Street et d’Exchan- quant la réflexion. C’est un numéro Meilleur film de Spike Lee depuis ge Place et les gens du quartier de funambule ; quand on tombe, bien longtemps. (…) ont adoré nous voir tourner, voir il n’y a pas de filet. Ce n’est pas Denzel Washington, Jodie Foster. nouveau : tous les studios dépen- dent d’énormes corporations, ce Dans ce genre de films, on reste qui rend plus difficile la réussite ENTRETIEN AVEC SPIKE LEE d’habitude assez éloigné du quo- de projets personnels. tidien ; ici, il n’arrête pas de faire Qu’avez-vous pensé du scénario irruption. Votre prochain film évoquera le d’Inside Man quand vous l’avez C’est l’une des choses qui m’ont boxeur Joe Louis. Ce sera un gros lu ? plu dans le script, et j’ai apporté film ? La majorité des scénarios que je aussi des éléments dans ce sens : Si on a l’argent. Ce sera un film reçois sont bons pour la poubelle. voir New York dans sa diversité, épique, plus gros que Malcolm Celui-ci était bien écrit, spirituel, non seulement ethnique, mais X, d’une magnitude David Lean. plein d’humour - et en plus je ne aussi de classes, de croyances, de J’ai coécrit le scénario avec Budd suis pas arrivé à en deviner la styles. Nous avons travaillé très Shulberg (le scénariste de Sur fin. Pour avoir beaucoup étudié le dur sur la distribution des petits les quais), qui a 92 ans, toujours cinéma, je devine ce qui va arriver rôles, sur la figuration, pour être en forme. Il était présent lors du dans un film. Pas dans ce cas. fidèles à la ville. Par exemple, second combat entre Joe Louis et l’ouvrier du bâtiment qui donne un Max Schmeling (le boxeur alle- Vous aviez déjà pensé à réaliser coup de main dans l’enquête n’est mand dont le IIIe Reich avait fait un film sur un hold-up ? pas un acteur professionnel. un ambassadeur sportif) en 1938. Non. Je voudrais mettre les cho- (…) ses au point : je n’ai pas décidé Comment avez-vous travaillé avec Propos recueillis par de réaliser un gros film commer- Denzel Washington, pour dessiner Thomas Sotinel cial, un film de gangsters.