L'HOMME QUE J'AI FAIT NAITRE Ouvrages parus dans la même Collection : desVoir volumes page 6 laparu suite s. CLAUDE ANET 64. La Rive d'Asie. JOSEPH DELTEIL 107. L'Amour en Russie. 50. Jeanne d'Arc (Prix Fémina). JACQUES BAIN VILLE 93. La Fayette. 84. Jaco et Lori. A. DEMAISON JEAN BALDE 92. Diato. 162. La Survivante. 133. Le Livre des Bêtes qu'on appelle 181. L'Arène Brûlante. sauvages. ÉMILE BAUMANN 164. Les Oiseaux d'ébène. 132. Job le Prédestiné. 193. La Comédie animale. TRISTAN BERNARD PIERRE DOMINIQUE 127. Les Moyens du Bord. 144. Notre-Dame de la Sagesse. BINET-VALMER 184. La Proiede Vénus. 136. Le Désir. 157. La Femme qui travaille. 153. Le Prince Jaffar. FRANCIS CARCO 178. La Pierre d'Horeb. 103. Au Coin des Rues. 150. Perversité. 118. Jacques et Jean. 138. La Belle Eugénie. BLAISE CENDRARS 161. Les Dames Pirouette. 120. L'Or. 186. Jacques Cassard. ANDRÉ CHAMSON RA YMOND ESCHOLIER 105. Les Hommes de la Route. 44. Cantegril (Prix Fémina). 160. Roux le Bandit. 95. Quand on conspire. LOUIS CHARBONNEAU 151. La Nuit. 114. Mambu et son amour. 203. Mahmadou Fofana. JACQUES CHARDONNE ÉDOUARD ESTAUNIÉ 159. Les Varais. 37. L'Ascension de M. Baslèvre. 185 L'Epithalame. 47. Un simple. 199. Claire. 54. Bonne-Dame. GASTON CHÉRAU 63. La Vie Secrète (Prix Fémina). 57. Le Monstre. 72. L'Appel de la Route. 78. L'Egarée sur la Route. 100. Le Ferment. 98. Valentine Pacquault (1). 129. Les Choses voient. 99. Valentine Pacquault (2). 130. Monseigneur voyage. 192. Fra Camboulive. 167. Malaisie (). J.-J. FRAPPA 69. Le Blé en Herbe. 146. Le Fils de M. Poirier. 90. L'Envers du Music-Hall. 172. Les Vieux bergers. 104. Le Voyage égoïste. JEANNE GALZY 119. La Naissance du Jour. 70. Les Allongés (Prix Fémina). 131. La Seconde. 88. Le Retour dans la Vie. 189. Ces Plaisirs... 111. La Grand'Rue. F. DE CROISSET 147. La Femme chez les Garçon. 67. La Féerie cinghalaise. 101. L'Initiatrice aux mains vides. 143. Nous avons fait un beau Voyage. M. GENEVOIX LUCIE DELARUE-MARDRUS 33 . La Joie. 59. Graine au Vent. 45. Raboliot (Prix Goncourt). 91. Le beau Baiser. 128. Les mains vides. 110. La Petite fille comme ça. 187. La boite à pêche. 139.158. Anatole.Rédalga. CHARLES GÉNIAUX. 171. Hortensia dégénéré. 197. Le Choc des Races. 198. L'Ange et les Pervers. JOSÉ GERMAIN L. DAUDET 168. Ma Poupette Chérie. 124. Un Jour d'orage. MARION GILBERT 135. Le Sang de la Nuit. 53. Le Joug (Prix Northcliffe). Pour paraître le 15 Septembre prochain : LES GRANDS VOILIERS Roman par Gilbert de VOISINS. — Bois originaux de Paul ACKERMANN MAURICE ROSTAND L'HOMME QUE J'AI FAIT NAITRE ROMAN Bois originaux en couleurs de RENEFER

LE LIVRE MODERNE ILLUSTRÉ J. FERENCZI ET FILS, ÉDITEURS 9, rue Antoine-Chantin. (14 MCMXXXIV Ouvrages parus même Collection : (suite) JEAN GIRAUDOUX PAUL MORAND 76. Provinciales. 55. L'Europe Galante. CHARLES LE GOFFIC 68. Bouddha Vivant. 112. La Payse. 94. Magie Noire. GYP 154. Champions du Monde. 122. Le Chambard. PIERRE MILLE 137. Le Coup du Lapin. 43. Myrrhine, courtisane et martyre. 175. Le Monde à côté. F. DE MIOMANDRE LOUIS HÉMON 56. La Naufragée. 40. Battling Malone. 140. L'Amour de Mlle Duverrier. LÉON HENNIQUE 182. Jeux de Glaces. 180. Minnie Brandon. IRÈNE NÉMIROVSKY ABEL HERMANT 126. David Golder. 51. L'Aube ardente. PANAIT ISTRATI 58. La Journée brève. 81. Les Chardons du Baragan. 77. Le Crépuscule tragique. 148. Kyra Kyralina. 102. Camille aux Cheveux courts. 165. Oncle Anghel. 134. Les Epaves. 195. Présentation des Haïdoues. CHARLES-HENRY HIRSCH MARCEL PRÉVOST 46. La Grande Capricieuse. 61. La Nuit finira (1). 101. Mimi Bigoudis. 62. La Nuit finira (2). EDMOND JALOUX 82. Mon Cher Tommy. 121. L'Agonie de l'Amour. 106. L'Homme Vierge. 169 . Le Démon de la vie. 155. Nouvelles Lettres à Françoise. JOSEPH JOLINON LOUIS DE ROBERT 149. Le Joueur de balle. 156. Ni avec toi ni sans toi. MARIUS-ARY LEBLOND 202. Le partage du cœur. 87. L'Ophélia. J.-H. ROSNY AINÉ GEORGES LECOMTE 48. Le Cœur tendre et cruel. 123. Le Mort saisit le Vif. 71. L'étonnant Voyage de Hareton 177. Les Forces d'amour. Ironcastle. MARIE LE FRANC 113. La Fille d'Affaires. 85. Grand-Louis l'Innocent (Pr. Fém.) 200. L'Initiation de Diane. 96. Le Poste sur la Dune. J.-H. ROSNY JEUNE 66. Claire Tecel, Avocat à la Cour. LÉON LEMONNIER 79. La Courtisane passionnée. 201. L'Amour interdit. 116. La Pigeonne. ANDRÉ LICHTENBERGER 152. La Désirée. 825. Le Cœur de Lolotte. 176 Les Beaux yeux de Paris. ALFRED MACHARD M. ROSTAND 73. L'Ange du Suicide. 142. Coquecigrole. 97. L'Homme que j'ai tué. ANDRÉ MALRAUX 141. Le Second Werther. 166. Les Conquérants. 196. La Voie Royale. FRANÇOIS MAURIAC 41. Mousseline (Prix Goncourt). 38. Le Fleuve de Feu. 170. Mienne. 49. Le Désert de l'Amour. ANDRÉ S SAVIGNON 65. Thérèse Desqueyroux. 39. Une Femme dans chaque Port. 75. L'Enfant chargé de chaines. A. THÉRIVE 108. La Robe Prétexte. 115. La Revanche. 117. Trois Récits. 179. Sans Ame. 194. Ce qui était perdu. P. VILLETARD ANDRE MAUROIS 183. Un homme les regarde. 42. Les Silences du Colonel Bramble. GILBERT DE VOISINS 52. Meïpe ou la Délivrance. 83. L'Absence et le Retour. 60. Les Discours du Dr O'Grady. M. CONSTANTIN-WEYER 74. Ni Ange, ni Bête. 80. La Bourrasque. 89. Ariel ou la vie de Shelley. 86. Cavelier de la Salle. 145. Climats. 109. Manitoba. 113. Byron(tome I). 174. Byron (tome II). 163. Cinq éclats de silex. 190. Tourguéniev. 188. Clairière. Copyright by Ernest Flammarion 1931.

NOTE

Ce roman est la suite de « L'Homme que j'ai tué », paru en 1921 et dont l'auteur a fait une pièce représentée en 1930 à Paris et qui se joue maintenant dans le monde entier. Rappelons brièvement la donnée. Un jeune soldat français a tué en 1915 un jeune soldat allemand de son âge que le hasard a mis sans défense en face de lui. Il a vu son dernier regard chargé d'intel- ligence, de douleur, presque de surprise. Il a ramassé son bracelet d'identité dans le sang et dans la boue. Le mort s'appelle Hermann von Holderlin. Dès la guerre finie, le jeune Français, obsédé par le remords de son crime, ira en Allemagne et s'introduira dans la famille d'Hermann. Il veut essayer de connaître celui qu'il a tué, de savoir ce qu'il était, ce qu'il pensait. On le prendra, à son émotion, pour un ami d'Hermann qui aurait connu le mort pendant un séjour qu'il fit en France. Le jeune Français n'osera détromper ni le père ni la mère ni la fiancée du mort. Peu à peu, grâce à cette erreur, il apprendra en effet à connaître « l'homme qu'il a tué »... Il comprendra, peu à peu, en lisant des lettres de lui que lui confiera sa mère, qu'Hermann était un homme comme lui, une âme fraternelle, un ennemi de la guerre.

I

IL lui semblait à présent qu'il n'y avait plus qu'une issue à la sombre tentative qu'il avait faite : mourir! I Mourir comme Hermann qu'il avait tué et instincti- vement, douloureusement, ses pas le conduisaient vers le cimetière où le corps d'Hermann n'était pas, mais où une pierre émouvante, d'une blancheur juvénile, évo- quait sa destinée interrompue. Se tuer làl A l'endroit même où la pierre creusée imprimait le nom d'Hermann von Holderlin. Et cette mort ainsi serait à la fois une absolution et un aveu. Et les parents d'Hermann apprendraient en même temps son crime et la façon dont il avait voulu l'expier. Les parents d'Hermann! Il les revit brusquement, et il ne put, sans un frisson, songer à l'extraordinaire bon- heur qu'il leur avait rapporté. Il était impossible main- tenant qu'il se le dissimulât à lui-même, il avait rempli la maison vide, rallumé la flamme éteinte. Il avait ré- pondu à ce besoin d'aimer qui persistait dans leurs vieux cœurs, et peu à peu, grâce à son mensonge, il était devenu une sorte d'Hermann pour eux. Il se dirigeait vers le cimetière, ou du moins il pen- sait le faire, et brusquement il s'aperçut que, par une volonté plus forte que sa propre raison, il était en train de revenir vers la maison des Holderlin. Il la vit, pas très loin devant lui, avec sa douceur un peu roman- tique, sa coutumière intimité. Et alors, il eut brusque- ment une impression bouleversante. Sans doute il était devenu pour les parents d'Hermann une sorte de fils, mais, à la façon dont son cœur battait en revenant vers la maison, il s'aperçut qu'il l'était devenu non seule- ment pour eux, mais, ce qui était plus surprenant, éga- lement pour lui-même. Oui, il n'en pouvait douter, il était devenu Hermann peu à peu. Les sentiments, les impressions de celui qu'il avait tué ressuscitaient en lui avec une extrême vigueur. A la minute où il avait décidé de se tuer, le cœur d'Her- mann l'avait ramené, sans qu'il l'ait réalisé immédia-; tement, vers la maison familière, et il lui semblait que c'était avec le regard d'Hermann qu'il regardait main- tenant ces arbres, ce paysage sentimental, ce doux ciel allemand qu'il reconnaissait avec quelque chose de plus lointain que lui-même. Oui, voilà où l'avait amené la tentative qu'il avait faite, non pas, comme il se l'était imaginé, à la mort, mais à devenir Hermann tout à fait. A devenir Hermann, à ce que peu à peu les senti- ments d'Hermann, ses attirances, ses révoltes, soient en lui d'une manière irrésistible. A ce que... Tout à coup, il fut dans le jardin, devant la maison. La nuit tombait avec quelque chose de pitoyable et de quotidien. Mais, dans ce jardin, même dans cette obs- curité, il lui semblait qu'il aurait pu se diriger avec une netteté infaillible, comme s'il y avait été élevé, comme s'il y eût grandi, comme si, en vérité, il y était né. Bientôt, il fut devant la fenêtre de la grande pièce où, à cette heure, toute la famille était d'habitude réu- nie et où il les avait tous vus le premier jour, pour la première fois. Il se mit à épier à la fenêtre. Et il ne vit qu'Angélica. Elle était assise dans un fauteuil, la tête entre les mains, comme absorbée dans une profonde réflexion. Il n'y avait qu'elle dans la pièce. Hans Gaspar et Louise étaient sans doute sortis, à sa recherche peut-être, puis- que, depuis la veille, il n'avait pas reparu. Mais Angé- lica savait. Elle pensait qu'il ne reviendrait pas et, seule, elle se laissait aller à la douleur qui l'envahissait. Il lui semblait même qu'elle pleurait. De temps en temps, elle relevait ce beau visage rêveur, ces yeux qui avaient pleuré sur la mort d'Hermann et qui pleuraient maintenant sur quelque chose de plus désespérant en- core. Le drame qui se passait dans le cœur d'Angélica, l'horrible vérité qui, tout à coup, s'était imposée à ses yeux, il les devinait au trouble même qui l'agitait à son tour. En même temps n'avait-elle pas deviné qu'il était le meurtrier d'Hermann et n'avait-elle pas com- pris qu'elle ne pouvait se passer de lui? Ah! il s'était glissé dans son cœur d'une manière si irrésistible! Il était arrivé dans cette maison solitaire, auréolé de cette affection et comme s'il leur eût été en effet présenté de la main même du mort. Et c'était par fidélité à Hermann que d'abord elle avait éprouvé de l'amitié pour lui. C'était pour parler d'Hermann que d'abord elle avait chéri les longues promenades rê- veuses, les souvenirs échangés. C'est au bord de son tombeau que leurs âmes s'étaient involontairement unies. L'idée qu'il repartirait lui semblait peut-être cruelle, mais c'était surtout à cause de Hans Gaspar et de Louise qu'elle ne pouvait l'admettre. Elle, avec sa jeune fer- meté d'âme, supporterait cette nouvelle douleur et de voir partir celui-ci comme elle avait vu mourir l'autre, mais ces deux vieux cœurs déjà ravagés par la douleur, si le jeune Français repartait maintenant, ce serait véritablement comme s'ils voyaient mourir leur fils une seconde fois. C'est ce qu'il fallait empêcher. Mais où était-il à cette heure? Que faisait-il? Déjà décidé à mourir, il avait peut-être mis son cruel projet à exécution! Com- ment l'avait-elle laissé! Comment ne s'était-elle pas attachée à ses pas, sans le quitter une minute? Lui-même éprouvait le besoin de revoir Angélica, de lui parler de nouveau, de s'expliquer. Leur toute der- nière rencontre avait été si brève. Puisqu'elle était seule, pourquoi n'entrerait-il pas? Il croyait qu'il était décidé à mourir, et rien, pensait-il, ne pouvait mainte- nant le faire revenir sur sa première résolution. Angélica avait de nouveau laissé retomber sa tête entre ses mains. Elle n'entendait pas la porte s'ouvrir, et sa pensée était si pleine de pas qui tournaient autour d'elle qu'elle n'entendait même pas le pas qui s'appro- chait. Ce n'est que lorsqu'elle releva la tête et qu'elle ouvrit les yeux, quelques instants plus tard, qu'elle s'aperçut que le jeune Français était devant elle. Elle ne poussa même pas un cri et n'éprouva pas de surprise. Elle se rendit compte tout de suite qu'elle avait toujours été sûre qu'il reviendrait. Sans le réali- ser, elle avait fait confiance à la destinée. Alors même qu'elle pleurait, une partie secrète d'elle-même avait toujours été convaincue de son retour. Et elle atten- dait qu'il lui parlât, elle était sûre de ce qu'il allait lui dire et elle savait aussi maintenant que pour rien au monde elle ne le laisserait partir; du moment qu'il avait eu la faiblesse ou la force de revenir, il était à sa merci. Mais elle savait aussi à présent qu'elle avait devant elle l'assassin d'Hermann von Holderlin, celui qui l'avait tué un simple jour de 1917, dans un paysage français. Elle savait qu'elle n'avait devant elle ni l'ami de son fiancé, ni le doux camarade d'Hermann, mais simple- ment son meurtrier. Et elle réalisait cependant avec horreur qu'elle ne parvenait pas à avoir horreur de lui. Le premier jour où il était entré dans cette maison L'IMPRIMERIE MODERNE 177. Route de Châtillon Montrouge (Seine) 1934

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