Du Bulletin Des Ecrivains De 1914 À L'association Des
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Du Bulletin des Ecrivains de 1914 à l’Association des Ecrivains Combattants (AEC) : des combats à la mémoire, 1914-1927 Nicolas Beaupré To cite this version: Nicolas Beaupré. Du Bulletin des Ecrivains de 1914 à l’Association des Ecrivains Combattants (AEC) : des combats à la mémoire, 1914-1927. Audoin-Rouzeau Stéphane, Becker Annette, Cœuré Sophie, Duclert Vincent, Monier Frédéric (dir.). La politique et la guerre. Pour comprendre le XXe Siècle eu- ropéen. Hommage à Jean-Jacques Becker., Agnès Viénot éditions, pp.301-315, 2002. halshs-00760433 HAL Id: halshs-00760433 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00760433 Submitted on 3 Dec 2012 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. Prénom, NOM et Nicolas BEAUPRÉ titre des auteurs Laboratoire Centre d’Histoire « Espaces et Cultures » Affiliation(s) Clermont Université, Université Blaise Pascal, EA 1001, Centre d’Histoire « Espaces et Cultures », CHEC, BP 10448, F-63000 Clermont-Ferrand Membre junior de l’Institut Universitaire de France (IUF, promotion 2010) Membre du Centre International de Recherche de l’Historial de la Grande Guerre (CIRHGG) Discipline(s) Sciences de l'Homme et Société/Histoire Sciences de l'Homme et Société/Littérature Titre du texte « Du Bulletin des Ecrivains de 1914 à l’Association des Ecrivains déposé Combattants (AEC) : des combats à la mémoire, 1914-1927 » Sous-titre Publié sous la Audoin-Rouzeau Stéphane, Becker Annette, Cœuré Sophie, Duclert direction de Vincent, Monier Frédéric (dir.) Publié dans La politique et la guerre. Pour comprendre le XXe Siècle européen. Hommage à Jean-Jacques Becker. Lieu, éditeur, Paris, Éditions Agnès Viénot, Noésis, 2002, p. 301-315. volume, n°, date, pagination Résumé du texte Ce texte analyse l’émergence, pendant la Première Guerre mondiale en France, déposé en français d’une association, dont les statuts sont déposés en 1919, destinée à défendre les intérêts de ceux qui se nomment alors les « écrivains combattants ». Cette Association des Écrivains Combattants (A.E.C.) tente de rassembler les auteurs de livres de guerre ayant fait la guerre au front par-delà leurs oppositions politiques et malgré le retour d’une conflictualité de plus en plus prononcée dans le champ littéraire. Sans y parvenir totalement, elle joue néanmoins un rôle crucial dans la construction d’une mémoire de guerre des milieux littéraires, en publiant notamment une monumentale anthologie des écrivains morts à la guerre. Mots-clés français Guerre 1914-1918 ; France ; combattants ; littérature de guerre ; écrivain combattant ; témoin ; témoignage ; deuil ; mémoire ; association des écrivains combattants Mots-clés autres First World War ; France ; soldiers ; war literature ; war writers ; langues witness ; witnessing ; mourning ; memory ; Du à l’Association des Ecrivains Combattants (AEC) : des combats à la mémoire, 1914-1927 Note : il s’agit d’une version « pré-print » qui peut être légèrement différente de la version publiée. La mobilisation et l'engagement massifs des écrivains, dès août 1914, représentent pour le monde des lettres un phénomène historique sans précédent. Des dizaines d’écrivains en âge de combattre rejoignent leurs régiments. D’autres, à l’instar des étrangers non mobilisables comme Blaise Cendrars, s'engagent comme volontaires ou appellent le monde des lettres au combat. Des « lieux de sociabilités » intellectuels spécifiques à cette situation nouvelle se mettent peu à peu en place. Le maintien de la vie littéraire, la circulation de l’information sur la destinée de ses proches, la cohésion du monde des lettres en guerre et la liaison entre les écrivains de l'arrière et ceux du front sont autant d’enjeux générés par cette situation radicalement nouvelle et qui, de plus, contre toute attente, s’installe dans la durée. Les deuils, qui par dizaines, puis par centaines, frappent le monde des lettres dans la guerre, nécessitent également la mise en place d'un « lieu » d'accueil pour rendre hommage aux morts. La création d'un Bulletin des écrivains destiné au monde littéraire en guerre entend répondre à ces besoins. Cinq ans plus tard, le 29 juin 1919, quatre-vingt écrivains se réunissaient à Paris lançaient un Manifeste et fondaient une nouvelle association destinée à défendre leurs droits au sortir de la guerre. L’A.E.C. 1. (Association des Ecrivains Combattants) était portée sur 1 Malgré l’intérêt porté par les historiens aux intellectuels, à leurs engagements et à leurs errements, ni le Bulletin, ni le Manifeste de l'association, ni l’A.E.C. ne semblent avoir retenu leur attention. Des ouvrages de référence sur le sujet comme ceux d'Antoine Prost sur les anciens combattants ou celui de Jean-François Sirinelli sur les manifestes et pétitions d'intellectuels ne les évoquent pas. Pourtant l'Anthologie des écrivains morts à la guerre, œuvre de l'A.E.C. est bien connue et parfois utilisée comme source. Il faut dire que les archives de cette association sont très fragmentaires et sont seulement en cours de classement. Elles sont encore détenues les fonds baptismaux. Au mois de juillet de la même année, le Bulletin des écrivains, qui avait été pendant presque toute la guerre, le « lien » entre les écrivains en guerre, cessait de paraître après 49 numéros2. Il publiait alors un dernier hommage aux écrivains français morts à la guerre sur toute sa première page : A LA DEFENSE DE L'ESPRIT ET DE LA CITE NES POUR PARLER AUX AUTRES HOMMES ILS ONT SACRIFIE DANS LA MEME ACTION HEROIQUE LA VIE ET LE VERBE PROMIS MORTS QUE LEUR SILENCE PARLE QUE LEUR DON FLEURISSE LA TERRE Le même numéro appelait le monde des lettres et la Nation dans son ensemble à se mobiliser pour la mémoire de ses écrivains morts en déposant une plaque commémorative portant le nom des morts sur les murs du Panthéon. Le premier article des statuts de la nouvelle association exhortait ses membres à : « (...) entretenir le culte du souvenir des camarades tombés au champ d'honneur. » Il fallut près de 8 ans de « travail de mémoire » à l’association nouvellement créée pour parvenir à cette « Panthéonisation. » Le Bulletin des écrivains pourtant disparu devait servir de socle à l’édification du « monument aux morts » de l’association et le passage de 1914 à 1927, du combat au souvenir, « de la mort à la mémoire »3. par l'A.E.C. qui existe toujours. Il nous a été donné d'en consulter une partie pour cet article (liste de membres, bulletins, publications internes...). Nous l’en remercions. 2 Une nouvelle série est lancée en novembre 1919. Cf infra. 3 L'expression est empruntée au sous-titre du livre d'Annette Becker, La guerre et la foi, de la mort à la mémoire, 1914-1930, Paris, A. Colin, 1994, 142 p Naissance et rôle du « Stupeur », « surprise »4, ces sentiments qui saisirent l’opinion française à l’annonce de la guerre dans les premiers jours d’août 1914 n’épargnèrent pas les intellectuels. Bouleversé par l’annonce de la guerre, désorganisé par la mobilisation générale, choqué par ses premiers morts, - Péguy, Psichari, Jean de la Ville de Mirmont…-, le monde des lettres semblait frappé de saisissement. Certes d’aucuns s’enflammèrent pour la guerre et chantèrent leur « enthousiasme » mais d’autres prirent rapidement la mesure de la gravité de la situation5. Sous les effets conjugués de la stupéfaction, de l’espérance en une guerre courte et naturellement victorieuse et de la gravité de l’heure, et sans doute des problèmes matériels ou dus à la mobilisation du personnel, certaines institutions littéraires cessèrent alors brutalement de fonctionner en 1914. Le Prix Goncourt de 1914 ne fut pas attribué. La Nouvelle Revue Française suspendit sa parution périodique mais poursuivit son activité éditoriale ; L'Effort Libre, une jeune revue née en 1910, animée par Jean-Richard Bloch cessa toute activité ; le Mercure de France lui-même, vénérable institution, s’était interrompu et ne devait reparaître que le 1er avril 1915. Son éditorial ressemblait alors à un manifeste et témoignait de la renonciation implicite – et tardive- à l'illusion de la guerre courte tout en justifiant tout à la fois son interruption et sa reparution : « (...) nous n'avions qu'à nous taire quand nous nous sommes tus. En face de l'événement formidable, qui renversait subitement toutes les valeurs, que pesaient la littérature, la poésie, l'art, la philosophie, la science même, toutes choses qui sont notre joie et notre raison de vivre? Nos travaux devenaient des jeux de mandarins, auxquels il eût été indécent de s'adonner parmi le recueillement grave que suscitait l'agression du peuple fou. Et, nous étant effacés, nous avions résolu de ne reparaître qu'après l'internement au cabanon du dangereux dément. »6 Mais auparavant, déjà, le monde des lettres avait commencé à se restructurer autour de « l'événement formidable », et en fonction des nécessités sociales et intellectuelles qu'il imposait. L'éloignement des amis et des membres de la famille littéraire, l'incertitude sur leur sort provoqua donc la création d'un bulletin spécifique. C’est en novembre 1914 que le premier numéro du Bulletin des Ecrivains de 14 est publié à Paris. La rédaction de L'Intransigeant se charge de cette publication mensuelle et de sa diffusion. Ce n'est sans doute pas un hasard si ce sont justement trois écrivains et 4 Nous renvoyons bien entendu à la thèse de Jean-Jacques Becker, 1914 : Comment les Français sont entrés dans la guerre, Paris, FNSP, 1977, 638 p., voir p.