ATHENA Recherche et développement technologique

L’avion polymère La voiture à air comprimé Bureau de dépôt Bruxelles X - Mensuel ne paraissant pas en juillet et août 254 Octobre 2009 Sommaire

63 La théorie du Big Bang, plus actuelle que jamais. À l’occasion de l’année de l’astrono- mie, de nombreuses activités - dont une pièce de théâtre - ont été programmées un peu partout dans le monde sur la théorie du Big Bang, telle qu’elle a été définie par le belge Georges Lemaître. Il fut le premier à avancer l’idée révolutionnaire pour l’époque d’un commencement de l’Univers. Des explications de Jean-Luc Léonard 72 La quête d’un vaccin thérapeutique. Le système immunitaire pourrait-il être mobilisé pour éliminer les cellules tumorales comme il élimine les cellules infectées par un virus ou une bactérie ? Aujourd’hui, l’on sait qu’il existe des antigènes reconnus par le système immunitaire, dont notamment les lymphocytes T, et capables d’engen- drer une réponse immunitaire. Philippe Lambert nous présente les recherches effectuées à ce sujet et leur contribution dans la lutte contre le cancer. 76 Dépression: inflammation et neuroplasticité. Plusieurs études ont mis en évidence des lésions neurologiques spécifiques de la dépression qui se traduisent notamment par une atrophie de l’hippocampe, impliquée entre autres dans la modulation des répon- ses émotionnelles. Philippe Lambert en explique les différents mécanismes ainsi que les processus inflammatoires à prendre en considération. Vous pouvez consulter Histoire… d’une préférence. Tel un miroir à deux faces, une population de neurones du la revue Athena 78 striatum, les neurones striatopallidaux, joueraient un rôle à la fois dans l’activité sur le site locomotrice et dans l’assuétude aux drogues. Suite à de récentes expérimentations, http://recherche- de nouvelles solutions thérapeutiques dans le traitement de la maladie de Parkinson technologie.wallonie.be et les dépendances aux drogues, se profilent à l’horizon. Un article de Philippe Lambert. Si vous désirez un abonnement, Répertorier le savoir. Dans cette seconde partie, Christian Vanden Berghen explique 84 vous pouvez en quoi le monde digital change notre regard sur le classement et l’infinité des pos- vous adresser : sibilités offertes en la matière. Les objets peuvent désormais se trouver dans plu- sieurs catégories, chose impossible dans le monde physique. Il expose les différents soit par courrier types de classements, les avantages et les inconvénients. Place de la Wallonie,1 Bât. III L’avion polymère. Il a la taille d’un Airbus, le poids d’une voiture de tourisme et la 87 5100 Jambes puissance d’un scooter. Son défi: voler jour et nuit sans carburant, uniquement grâce à l’énergie du soleil. Mais si le projet est innovant, la plupart des matériaux utilisés soit par téléphone existent déjà. La difficulté a été de les adapter afin d’obtenir un avion léger, mais sûr. au 081/33.44.76. C’est une présentation d’Alain de Fooz.

soit par courriel La voiture à air comprimé: mythe ou réalité ? Il y a la voiture à essence ou diesel. Il y a 91 à l’adresse aussi la voiture électrique. D’autres pistes non-polluantes sont depuis envisagées, geraldine.tran@ dont la très peu connue voiture à air comprimé que Michel Wautelet et Damien spw.wallonie.be Duvivier nous font découvrir ici. Les avantages sont nombreux: écologique, écono- mique, simplicité, légèreté. Ses performances sont limitées à un usage restreint mais ou encore via c’est sans aucun doute un pas de plus dans la lutte contre la pollution. le site repris ci-dessus. 93 Un défi pour l’humanité. Il est aujourd’hui avéré que la principale cause du réchauffe- ment planétaire est l’émission des gaz à effet de serre induite par les activités humaines. Paul Devuyst expose dans cet article les efforts qui devront être fournis dans les prochaines années, efforts qui feront avant tout l’objet d’un consensus international.

Sans oublier les rubriques :

Actualités, de Jean-Claude Quintart, pp. 55-61, et de Henri Dupuis, p. 62; Info-Bio, de Jean-Michel Debry, pp. 67-71; Première Info-Physique, de Henri Dupuis, pp. 81-83; de couverture: Astronomie, de Paul Devuyst, p. 96, et de Yaël Nazé, p. 97; photomontage de Espace, de Théo Pirard, pp. 98-102. Nathalie Bodart.

Athena 254 / Octobre 2009 54 UUnnee iiddééee,, uunnee UUnniivveerrssiittéé !

Le 20 novembre 1834, l’Université libre de Bruxelles (ULB) ouvrait sa première année académique dans la salle gothique de l’Hôtel de ville de Bruxelles. Une initiative lancée par Pierre-Théodore Verhaegen (1796-1862), avocat bruxellois qui souhaitait doter le jeune royaume d’une université libre de tous les pouvoirs politiques et religieux. Une audace à l’époque dont le bien-fondé a traversé toutes les vicissitudes rencontrées par notre pays en 175 ans !

onstruite sur l’idée du libre-examen, l’ULB structurelle et fonctionnelle de la cellule. Enfin, Ilya rejette tous les dogmes et arguments d’autorité. Prigogine (1917-2003), prix Nobel de chimie en 1977, C Sur base de ce principe, «le libre-exaministe pour ses travaux en thermodynamique. De plus, 22 prix s’engage à mettre ses paroles et ses actes en accord avec Francqui, 14 prix quinquennaux du Fonds national de la ce qu’il tient pour vrai. Sa vérité, il a le courage de la dire recherche scientifique (FNRS), une médaille Fields, trois et de la défendre. La tolérance que nous proclamons est prix Wolf et deux Marie Curie Award. le respect de la personne et de la liberté d’autrui». Cette philosophie sera appliquée à la lettre. L’ULB témoignera Les prochains mois feront l’objet de manifestations diver- toujours de son esprit d’indépendance, allant même jus- ses. Conférences, colloques, expositions, publications et qu’à fermer ses portes, en 1941, afin de ne pas devoir col- spectacles invitent les visiteurs à découvrir les multiples laborer avec l’occupant ! facettes de ULB. Parmi les points forts: une création théâ- trale fera revivre les débats philosophiques et politiques de la période 1820-1840; la Nuit des lumières, réunira les Des partenariats privilégiés anciens lors d’une grande soirée au Mont des Arts, à Bruxelles, et la semaine des Nobel durant laquelle quinze À ses débuts, en 1834, l’Université comptait quatre facul- prix Nobel dialogueront avec les chercheurs et recevront tés, 38 professeurs, 96 étudiants et deux administratifs ! leur insigne de Docteur Honoris Causa. Aujourd’hui, elle comprend sept facultés, quatre instituts, un hôpital académique, trois campus à Bruxelles et deux en La création de la fondation ULB, consacrée à la recher- Wallonie. Elle emploie près de 3 500 personnes et dispense che, aura pour objectif de collecter des fonds pour porter ses cours à quelque 21 000 étudiants ! des projets et renforcer les pôles d’excellence de l’Université. Elle sera dirigée par le Conseil d’adminis- Elle entretient actuellement des partenariats privilégiés tration, assisté d’externes et d’un Comité scientifique avec les plus grands noms du monde académique. Citons international de premier plan. «Cette fondation sera l’ins- l’University of California (Berkeley), l’Université de trument qui nous permettra d’apporter aux chercheurs Montréal, l’University of British Columbia (Vancouver), l’environnement dont ils ont besoin pour s’épanouir», la Fudan University (Shangai), le Collège de France, explique le recteur, Philippe Vincke. l’Université Pierre et Marie Curie (Paris VI), l’Université d’Oxford, l’Université de Cambridge et l’Université de 175 ans et plus que jamais tournée vers l’avenir: tel est Waseda (Japon). l’esprit de l’ULB, consciente de son rôle académique et économique au sein de la collectivité. Pour Philippe Au fil des années, les professeurs ont amassé une foule de Vincke, «l’Université apparaît comme une communauté prix, notamment trois Nobel: Jules Bordet (1870-1961), de connaissances… Un ensemble d’acteurs qui met en prix Nobel de médecine en 1919, pour ses travaux sur les commun savoir et savoir-faire et les transforme collecti- mécanismes de l’immunité; Albert Claude (1899-1983), vement au bénéfice de leurs besoins particuliers, de la prix Nobel de médecine en 1974, qu’il partagea avec un communauté et de la société en général.» autre belge, Christian de Duve et George E. Palade (États- http://www.ulb.ac.be et http://www.ulb175.be Unis), pour leurs découvertes concernant l'organisation

55 Athena 254 / Octobre 2009 Actualités Construire votre avenir

aviez-vous ce que vous vouliez devenir de toutes les orientations (général, technique et à 17 ans ? Cette question reste difficile professionnel) du troisième degré du secon- S pour la plupart des adolescents. Le 18 daire. mars 2010, DREAM (1) propose de partager pendant deux heures une expérience profes- Vous pouvez nous aider dans cette démarche ! sionnelle avec des jeunes de 16 à 19 ans pour En tant que professionnels motivés, vous êtes (1) Projet destiné les aider à y voir plus clair. passionnés par votre secteur. En partageant aux jeunes de 16 à votre passion pour les métiers scientifiques, les 19 ans et à leurs professeurs. Comment aider les jeunes à entreprendre leur nouvelles technologies et la recherche, vous L'objectif de avenir professionnel en devenant témoin ouvrez le large champ de possibilités souvent DREAM est d'aider DREAM ? Peu d’adolescents ont déjà une idée méconnues et investissez dans l’avenir de ces les jeunes à de leur futur métier. Ils sont souvent découragés métiers. construire leur par le faible pourcentage de réussite dans l’en- avenir seignement supérieur et par les statistiques du Anne-Lise Girboux, chimiste cosmétologue professionnel sur chômage, mais ils ne disposent pas toujours chez Dow Corning, à Seneffe, a déjà participé base de leurs d’informations correctes et de modèles positifs plusieurs fois à l’action. Elle témoigne: «Je talents, de leurs pour effectuer un choix réfléchi et pertinent. garde de la rencontre un sentiment très positif passions et de car elle fut interactive et le groupe était inté- leurs rêves. Car Le but de DREAM est de permettre au jeune de ressé. J'ai voulu partager avec eux le genre «la passion, c'est le plus beau métier faire un choix professionnel conscient. En plus d'informations que je n'ai pas eu la chance du monde». d’une réflexion outillée, le DREAM Day lui per- d'avoir à leur âge.» met de rentrer en contact avec un professionnel passionné, afin de le guider, de lui faire prendre Le prochain DREAM Day aura lieu le 18 mars conscience de ses propres possibilités et oppor- 2010. Pendant deux heures, professionnels et tunités et de l’inciter à prendre sa vie en main de jeunes auront ainsi l’occasion de se rencontrer manière entreprenante. pour discuter, comprendre, expliquer et décou- vrir une expérience enrichissante pour les deux Les quatre objectifs de DREAM sont: guider parties ! les jeunes; développer chez eux des compé- tences; leur inculquer dynamisme et esprit Inscriptions et informations sur d’entreprendre; enfin, renforcer les contacts http://www.dreamday.be Christine Évrard: entre les écoles et le monde professionnel. Téléphone: 02/739.38.70. ou [email protected] Depuis 11 ans, 115 000 jeunes ont participé à DREAM ! La raison de ce succès tient au fait que le projet répond à un besoin qui se fait sen- tir aussi bien au niveau de l’enseignement qu’à celui des entreprises. Beaucoup ont du mal à se faire une idée de leur avenir professionnel, tan- dis que de nombreuses entreprises et organisa- tions (hôpitaux, instituts de recherche) éprou- vent des difficultés à trouver des collaborateurs fiables et tentent de faire connaître leur secteur et leur entreprise de manière positive auprès des futurs candidats à l’emploi. Chaque année, DREAM rassemble 6 000 jeunes et 300 profes- sionnels wallons: les élèves, en petits groupes, se rendent sur le lieu de travail du professionnel choisi. Ceux-ci sont issus de tous les réseaux et

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Les Lesbrèves... brèves...

co et rien d’autre ! Parler vert, c’est bien ! 12, la dernière version du logiciel de reconnais- agir c’est mieux. Si notre région n’est pas sance de texte d’Iris. En effet, ce produit répond É en reste dans le domaine de l’écologie, la tant aux attentes de gestion documentaire des province de Namur vient de franchir un pas de professionnels que des particuliers. Il permet plus en lançant un parc d’activités dédié uni- notamment de gagner un temps considérable quement à l’éco-construction. Une première lors de la conversion de tout document papier, initiée par le Bureau économique de la province Pdf ou image en fichiers numériques pouvant de Namur (Bep) à qui la Wallonie doit déjà le être ensuite édités, partagés et sauvegardés. parc Créalys©, consacré aux sciences du vivant, aux technologies de l’information et de Avec ce contrat, Iris grimpe encore d’un cran ! la communication et à la qualité. Et, c’est juste- «Cette offre nous permet d’asseoir davantage ment le succès de ce parc à thèmes qui a poussé notre position dans le canal retail français. Un le Bep à développer Ecolys©, parc centré sur la réseau dont nous sommes particulièrement heu- thématique de l’éco-construction. Dans cette reux du très fort développement. Ce succès perspective, Namur capitalise les atouts en récompense tous les efforts entrepris cette L'agriculture bio matière de développement durable avec Énergie année pour étendre nos partenariats avec les fixe rendez-vous et Habitat qui organise le salon éponyme tous leaders de l’Hexagone. Grâce à cette position, à Bio-Eglantine, les deux ans et la présence de deux clusters: nous continuerons à offrir de nouveaux produits au Hall des Éco-Construction: http://www.ecoconstruction.be et toujours plus innovants avec l’ambition de res- expositions Cap 2020: [email protected] ter le leader incontesté en solutions de numéri- de La Louvière, sation mobiles en France, Europe, Moyen- les 14 et 15 novembre. Ecolys© sera situé dans le prolongement de la Orient et Afrique», déclare Bernard de Fabri- http://www.natpro.be zone industrielle de Namur-Nord-Rhisnes. Un beckers, directeur des ventes d’Iris. parc, trois zones, tel est le concept retenu par les promoteurs. Il comprendra une zone de servi- Lancé par de bonnes technologies, un excellent ces, véritable vitrine de l’éco-construction, une plan d’affaires et le soutien de la Région wal- zone industrielle et une zone mixte. Au-delà de lonne, Iris est désormais la référence lorsqu’il sa fonction première, Ecolys© entend servir s’agit d’accroître la productivité et les connais- d’exemple dans la manière dont seront conçues sances des entreprises grâce une meilleure ges- les zones industrielles de demain. Le parc sera situé à quelques centaines de mètres de la gare de Rhisnes, desservie par les bus des Transports en commun (Tec). La gestion des ordures s’inté- grera quant à elle, dans un système de gestion Le temps passe vite environnemental. Bref, une initiative à suivre et dont on reparlera certainement dans les pro- ynamisme fête ses 20 ans. «Lancer un magazine comme Dynamisme comme l’a fait chains mois. http://www.ecolys.be D l’un de mes illustres prédécesseurs il y 20 ans était un projet fou. 20 ans déjà et encore pour au moins 20 ans», déclare avec enthousiasme Eric Domb, président de l’Union wallonne des entreprises (Uwe). En 20 ans, Dynamisme n’a cessé de mettre en ris à la Fnac ! La société Iris surfe plus que exergue les succès wallons, d’informer ses lecteurs sur les législations, les nouveautés I jamais sur les succès. Après avoir remporté technologiques utiles aux entreprises. de nouvelles références commerciales lors des trimestres écoulés, Iris annonce aujourd’hui Ainsi, quelques années à peine après son lancement, Dynamisme s’est imposé comme qu’elle collabore avec le site FNAC.com pour le la référence en matière d’informations entrepreneuriales. Aujourd’hui plus que lancement d’une action spéciale «bundle» sur le jamais, Dynamisme se veut au service de l’entreprise face aux aléas d’une basse thème de la gestion documentaire. conjoncture. Présenter des pistes, des idées, donner des informations pertinentes quant aux problèmes économiques actuels, voilà comment se profile Dynamisme. Sa Pour présenter des paquets attractifs sur le plan devise: l’entreprise par ceux qui la font. Un slogan qui en dit long sur la qualité du prix et technologies, FNAC.com a décidé de cou- rédactionnel offert par cette revue, l’un des bras de levier de l’Uwe. pler une large panoplie d’imprimantes/scanners http://www.uwe.be des plus grandes marques avec Readiris™ Pro

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tion des documents, données et informations. ler dans un espace de quelque 400 m², l’usage Actuellement Iris emploie plus de 600 person- de salles, de tous les logiciels Microsoft, l’utili- nes réparties entre son quartier général de sation des serveurs du Mic, un accès Internet à Louvain-la-Neuve, Vilvorde et Anvers, Orly 100 MB et 1 GB pour les applications IP TV. (France), Windhof (grand-duché du Luxem- 500 euros sont demandés, mais des bourses bourg), Amstelveen et Maastricht (Pays-Bas), peuvent être accordées aux étudiants et entre- Aachen (Allemagne), Delray Beach (Floride), prises en phase de création. Hong-Kong et enfin Oslo (Norvège). En 2008, http://www.mic-belgique.be Iris a réalisé un chiffre d’affaires de 109,3 millions d’euros. http://www.irislink.com écouverte prometteuse. Le professeur D Thierry Grisar, de l’Université de Liège ous avez des idées en informatique. Alors (ULg) et ses partenaires américains, viennent de V c’est le moment d’adresser votre projet au publier dans Nature Neurosciences les propriétés Les 21 et 22 octobre Microsoft Innovation Center, plus connu sous du gène EFHC1 ou myoclonine dont certaines se tiendra Mic. En effet, depuis le début septembre et jus- mutations sont à l’origine d’un syndrome épilep- à la Foire qu’à la mi-novembre, le Mic organise, dans ses tique fréquent: l’épilepsie myoclonique ou syn- internationale installations du parc Initialis de Mons, une ses- drome de Janz. Ce nouveau gène est identifié de Liège, sion pour les porteurs de projets innovants comme jou-ant un rôle régulateur important dans le Forum des concernant les technologies de l’information et la division cellulaire et la migration des neurones Entrepreneurs by de la communication (Tic). Ce camp de lance- corticaux du développement précoce du cerveau. Initiatives. ment s’adresse à tout entrepreneur, inventeur, Infos sur ce salon étudiant, porteur d’un projet Tic orienté sur, Plus concrètement, les chercheurs montrent que du service et entre-autres, l’e-santé. le gène EFHC1 code une protéine qui, en se du conseil fixant sur des microtubules, participe au con- aux entreprises : À l’occasion de cette période dite bootcamp, les trôle de la migration neuronale précoce lors du http://www.enjeu.be candidats disposeront de moyens pour peaufi- développement cérébral. «Notre hypothèse est ner ou améliorer encore leur projet, le faire de considérer désormais ce syndrome épilep- grandir dans un certain nombre de dimensions. tique décrit dans le passé comme non lésionnel, La formation s’appuie sur une dizaine d’ate- mais résultant en fait de micro-dysgénésies liers, vers les compétences de la Maison de dues à des troubles subtils intra-cortical. Cet l’entreprise (LME) avec des formateurs experts exemple pourrait d’ailleurs s’appliquer à d’au- indépendants. tres pathologies plus sévères du système nerveux, comme la schizophrénie», explique Ensuite, le Mic et ses partenaires mettent à Thierry Grisar. disposition un ensemble de ressources pour pousser le projet durant le bootcamp. Citons la Pour rappel, l’épilepsie myoclonique qui touche possibilité pour le porteur de projet de s’instal- l’adolescent est une des formes les plus fré- quentes d’épilepsies généralisées idiopathiques. Si les facteurs génétiques jouent un rôle impor- tant dans le développement de la maladie, asso- ciée à des altérations subtiles de l’architecture corticale et sub-cortical, en revanche, le méca- nisme pathologique sous-jacent demeure tou- jours largement méconnu. http://www.nature.com et [email protected]

artenariat entreprise-université. Le 3 septem- P bre dernier, l’Université catholique de Louvain (UCL) a signé, avec AGC Glass Europe une convention de partenariat en vue de soutenir la mobilité des étudiants ingénieurs. Selon les termes de l’accord, dix bourses per- mettront aux étudiants en masters belges et étrangers d’effectuer des stages académiques à l’UCL ou dans des universités étrangères. Ces bourses visent en priorité les étudiants se spé- cialisant dans des disciplines liées aux activités du groupe AGC, à savoir le développement de procédés et produits verriers en phase avec le défi climatique et l’éclairage du futur.

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Agissant dans le cadre de sa politique Cor- porate Social Responsability (CSR), AGC Glass Europe mise ainsi sur l’éducation et la forma- tion dans des domaines scientifiquement affec- tés par un déficit d’intérêt et d’image. Pour Jean-François Heris, président et administrateur délégué d’AGC Glass Europe, «dans une optique d’ouverture sur l’Europe, cette action entend contribuer à la valorisation des métiers industriels tournés vers l’innovation. Par l’offre de stages en entreprises, elle apporte par ailleurs le complément nécessaire à la forma- tion académique des jeunes talents.»

Innovation et excellence opérationnelle sont à la base des valeurs d’AGC Glass Europe, qui produit, chez nous et dans le monde, du verre plat pour la construction et les industries spé- cialisées. Premier producteur de verre plat au monde, le groupe s’attache, avec son centre de R&D de Jumet (Charleroi), à préparer les pro- contrer d’autres utilisateurs et développeurs duits verriers haute technologie de demain. tout en découvrant ce que sera demain la plate- http://www.agc-flatglass.eu forme Claroline. Est-il encore utile de rappeler que Claroline est une plate-forme Open Source qui permet, actuellement, à des centaines d’ins- ouveau succès pour le WIN. Intégrateur de ser- titutions dans quelque 95 pays, de créer gratui- N vices dans les Technologies de l’informa- tement des espaces de cours en ligne. Via cette tion et de la communication (Tic), le Win vient solution, chaque formateur dispose d’outils lui de se voir confier le projet d’équipement en permettant, par exemple, de rédiger la descrip- Wireless LAN Haut débit du Centre hospitalier tion d’un cours, de publier des documents sous Energie+ Hornu-Frameries, près de Mons. Au pro- différents formats, d’élaborer des parcours péda- gramme: installation d’antennes Wifi et, à tous gogiques, de composer des exercices, de propo- Le salon les étages, d’une technologie Tic parmi les plus ser des travaux à remettre en ligne... Ces atouts des économies récentes et les plus innovantes. Grâce à celle-ci, combinés à une grande souplesse, expliquent d'énergie le personnel de l’hôpital travaillera en réseau et pourquoi cette plate-forme est utilisée non seule- fixe rendez-vous échangera des données, même très importantes, ment pas les écoles et universités mais également à ses visiteurs dans un niveau optimal de confort et de sécurité par des centres de formation, des associations et au Wex de en accord avec le traitement de l’information même des entreprises. D’où le développement Marche-en-Famenne, médicale. d’une version 2, complètement intégrée au Web du 13 au 15 novembre. 2.0, qui fera de Claroline l’une des meilleures http://www.mapcom.be Sur le plan pratique, les médecins et le personnel plates-formes techniques et techno-pédago- consulteront le dossier des patients ou toute giques de l’univers Open Source. information nécessaire à leurs traitements depuis la chambre d’hôpital via un ordinateur portable Durant trois jours, les participants ont non seu- relié au système central de données. Par la suite, lement fait le point sur leur outil et son devenir, le système pourra également offrir un accès mais ils se sont également penchés sur la Internet aux patients sur simple délivrance d’un manière d’enseigner avec l’aide des Techno- code d’entrée individuel. Évitant les travaux de logies de l’information et de la communication câblage onéreux, ce projet apporte au Centre (Tic). Ils ont tenté de répondre à la question qui hospitalier Hornu-Frameries une réponse con- leur est fondamentale: comment arriver à des crète aux besoins croissants de mobilité. Il espaces de cours générateurs de valeur ajoutée confirme aussi la parfaite maîtrise du Win en durant l’apprentissage ? Bref, tout un pro- matière de développement et d’implémentation gramme qui, loin d’être épuisé, fera certaine- de projets complexes. http://www.win.be ment la Une de la conférence Accu 2010, qui se tiendra à Rimouski, dans les locaux de l’Uni- versité du Québec. http://www.claroline.net pprendre via l’Open Source. C’est à Bruxelles, A dans les locaux de la Haute école Léonard de Vinci, que s’est tenue la 4e édition de l’Accu ouveau site Web pour Innovatech qui entend ou Annual Conference of Claroline Unsers. N de la sorte être encore plus proche de la Extrêmement enrichissante, cette manifestation réalité des besoins des entreprises wallonnes en a été l’occasion pour chaque participant de ren- matière d’informations. Par exemple, sous l’on-

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glet Innovation, le surfeur découvrira et téléchar- un premier comprimé tricouche le Trimalarex gera gratuitement des fiches conseils sur tout 400 mg: la première couche contenant 400 mg processus d’innovation technologique. Le nou- de chlorhydrate d’amodiaquine, la seconde un veau site passe également en revue les actualités, placébo et la dernière 100 mg d’artesunate. Via les métiers, les services, les conditions, les évé- cette structure tricouche, la société sépare les nements et les formations d’Innovatech. D’une deux principes actifs incompatibles entre eux navigation conviviale, ce site est incontournable par une couche placébo, supprimant toutes les à celles et ceux qui font de l’innovation la straté- interactions de surface entre les principes gie essentielle de leur raison sociale. actifs, entraînant de la sorte une meilleure sta- bilité. À noter, qu’un second comprimé tricou- Soutenu par la Région wallonne et le Fonds che, le Trimalarex 100 mg a été développé à social européen (FSE), Innovatech aide les por- l’intention des nourrissons et petits enfants. teurs de projets de petites et moyennes entrepri- ses wallonnes (Pme). Au-delà de cette activité, Le Trimalarex offre de nombreux avantages. l’entreprise se profile aussi comme le commu- Tout d’abord, sa formule tricouche utilise une nicateur des Pme en se tenant à leur disposition technologie complexe difficilement falsifiable. pour les orienter vers les acteurs de l’innovation La solution fait appel à du chlorhydrate technologique en Wallonie: centres de recher- d’amodiaquine au lieu de l’amodiaquine base, che, laboratoires universitaires, entre- ce qui apporte une meilleure solubilité au prin- prises hi-tech et acteurs de l’intermé- cipe actif d’où une bonne biodisponibilité. La diation scientifique membres de son combinaison galénique des excipients permet réseau. En bref, Innovatech s’active une dégradation du comprimé en moins de sans ménagement à rendre les entre- trois minutes. Enfin, avec sa forme oblongue prises wallonnes plus innovantes pour biconcave, le comprimé est très facile à avaler. qu’elles deviennent encore plus com- pétitives ! http://www.innovatech.be/ Concrètement, il ne s’agit pas d’une simple copie d’un brevet rentré dans le domaine public mais d’un nouveau médicament asso- ’exposition ittinérante, «Les ciant les principes actifs de deux molécules L transports du futur», se dépla- jusqu’à présent peu compatibles. Né en 1998, cera à la Maison Folie, à Mons, du Propharex comprend deux pôles d’activité: 30 janvier au 14 février 2010, dans l’ingénierie et le pharmaceutique. Au niveau le cadre de l'opération «Penser le futur». Cette exposition est égale- ment mise à la disposition des centres culturels et des écoles qui le désirent. Elle est organisée avec le Une vieille maladie ! soutien du Service public de Wallonie. Des activités (conférences, Déjà connu en Chine en l’an 186 avant Jésus-Christ, le animations, démonstrations, etc.) paludisme ou malaria est aujourd'hui l'une des trois autour du thème de l'exposition seront maladies les plus importantes de l'Afrique, avec le organisées. Un livret accompagnera sida et la tuberculose. On estime que deux milliards cette manifestation. de personnes sont exposées et 300 à 500 millions de Contact: [email protected] personnes déjà victimes de la maladie avec de 1,5 à 2,7 millions de décès par an !

us au paludisme ! Il tue encore un enfant Responsables de la maladie, les parasites plasmo- S toutes les 30 secondes en Afrique ! Et dium sont transmis par la piqûre d'un moustique pourtant, cette maladie est oubliée dans la fou- femelle appelé anophèle. Les parasites injectés par lée de nos préoccupations légitimes à l’égard le vecteur moustique migrent rapidement, via la cir- de la grippe A(H1N1). Aussi, pour pallier cette culation sanguine vers le foie. Là, le parasite se situation, la société wallonne Propharex, de divise pour donner très rapidement, dans des condi- Courcelles, près de Charleroi, a décidé de tions propices, des dizaines de milliers de nouveaux créer un nouveau générique plus efficace dans parasites. cette lutte contre le fléau qu’est toujours le paludisme. Et le moins qu’on puisse dire est Les symptômes sont très divers. La maladie débute que la Pme a fait réellement preuve d’origina- par une fièvre huit à trente jours après l'infection qui lité dans sa démarche. peut s'accompagner de perte d'appétit, fatigue généralisée, vertige, céphalée, vomissement, diar- En effet, se référant aux dosages préconisés rhée, tremblement, etc. par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en prise unique, Propharex a élaboré

Athena 254 / Octobre 2009 60 Actualités de son pôle ingénierie, Propharex conçoit des usines modulaires pour l’industrie pharma- ceutique (salles blanches aux normes interna- Aerofleet, l'artisan des composites tionale de l’OMS et Good Manufacturing a Pme familiale Aerofleet (http://www.aerofleet.be), au cœur du village de Practices), l’industrie cosmétique et l’agro- Soumagne, sur le plateau de Herve, s'est spécialisée dans la fabrication «sur alimentaire. S’ajoutent de l’assistance tech- L mesure» de structures en matériaux composites: coques de bateaux, coupoles pour nique (expertise pour production locale, for- télescopes, piscines aux formes diverses…Elle est par ailleurs réputée dans le monde mation et gestion) et de la logistique (centrale entier pour son procédé de thermolaquage des surfaces métalliques les rendant à la d’achat). Avec le pôle pharmaceutique, fois esthétiques et résistantes à la corrosion. Celui-ci consiste à revêtir les métaux avec Propharex développe des produits pharmaceu- de la résine thermodurcissable (polyester ou époxy) par poudrage électrostatique et tiques et cosmétiques, fabrique des produits cuisson à 190 °C. propres ou à façon, assure de la logistique, commercialise des produits et forme des clients du pôle ingénierie.

En 2008, l’entreprise a réalisé un chiffre d’af- faires de 2,6 millions d’euros. Actuellement, elle occupe 23 personnes, hautement quali- fiées. Le développement du Trimalarex devrait permettre d’engager cinq personnes par an. Le secteur pharmaceutique wallon conforte une position déjà bien établie. Avec ce succès, la Région confirme, une fois de plus, sa volonté d’investir dans les secteurs qui composeront l’avenir. Plus d’infos: [email protected]

Raphaël et Marc Van Vlodorp, les créateurs d'Aerofleet, ont surtout développé l'emploi e prix Triennal Jean Teghem a été attribué à des composites dans la construction artisanale (aménagement intérieur) de bateaux L l'astrophysicienne Yaël Nazé, pour ses acti- performants, sous la forme de monocoques (Endurance-38, Aero-660) et de catamarans vités de vulagrisation. Collaboratrice au maga- (Aero-45). Dans la famille Van Vlodorp, on a le pied marin et on est passionné de navi- zine Athena, Yaël Nazé donne des conférences gation de plaisance. Aerofleet avait besoin d'un port fluvial pour y tester ses produits. grand public et est aussi l’auteure de nombreux La société s'est donc installée sur les bords de Meuse, à l'entrée de Givet. À 1 km de la ouvrages, notamment, en cette année internatio- Belgique, elle vient de construire un superbe bâtiment pour réaliser les coques, assem- nale de l’astronomie: Histoire du télescope, bler et aménager les navires, effectuer des réparations et procéder à des améliora- Vuibert; Astronomie des anciens, Belin; Cahier tions. Cette infrastructure devait être inaugurée ce 10 octobre en présence des autori- d’exploration du ciel, Réjouisciences. tés de Givet et de Champagne-Ardenne. http://www.astro.ulg.ac.be/~naze/ http://www.astro.ulg.ac.be/%7Enaze/ La famille a un autre projet, en Suisse cette fois, sur le Lac Léman. Aerofleet a en effet conçu un frein de bôme très sécurisé qui permet la délicate manœuvre d'empannage (passage de la voilure d'un côté à l'autre) sans encourir de dommages matériels ni de ne pas rater. 4000 euros en espèces ! Voilà le risques corporels. Breveté sous le nom d'Aero-bôme, en cas de succès, il sera produit À montant du prix annuellement décerné par dans un atelier à construire près de Saint-Gingolph. le RI Europlanet en reconnaissance à l'excel- lence de la communication grand public de la science planétaire par un individu ou une insti- tution. Le dossier de candidature, téléchargea- ne exposition scientifique organisée par ble, doit être renvoyé avant le 11 janvier 2010. U l’asbl Science et Culture, en collaboration avec les départements de physique et de chi- Le RI Europlanet octroie également des fonds mie de l’Université de Liège (ULg) et avec le pour de petits projets novateurs favorisant la soutien de la Région wallonne, se tiendra du science planétaire en Europe. Ouvert à toutes et 12 au 30 octobre et du 9 au 20 novembre, sur à tous, y compris les organismes de recherche, le site du Sart Tilman de l’ULg. Des expérien- les associations, les musées, etc. à l'exception ces extraordinaires, adaptées aux élèves des des projets d'éducation formelle, les bourses deux dernières années de l’enseignement varient de 5 000 à 15 000 euros. secondaire, seront présentées par des scienti- Informations sur le prix et les bourses: fiques de l’ULg. Plus d’infos sur http://www.europlanet-eu.org/demo/ http://www.sci-cult.ulg.ac.be/Expo2009.html

La réservation est indispensable Jean-Claude QUINTART par téléphone au 04/366.35.85. [email protected] De 9h30 à 12h30 et de 13h30 à 17h.

61 Athena 254 / Octobre 2009 Actualités

Comprendre le réchauffement climatique

ans la foulée de C’est notre Terre !, exposition Copenhague, à travers un échiquier dont les cases s’ani- qui a connu un imposant succès à Bruxelles l’an ment pour présenter la position de certains protagonistes. D dernier, en voici une nouvelle, C’est notre Terre Puis, vient un rappel de ce qui a déjà été fait, tant au 2!, consacrée au réchauffement climatique. À visiter niveau scientifique que politique dans la lutte contre le pour comprendre les enjeux du prochain sommet de réchauffement climatique depuis un siècle environ. C’est Copenhague. ensuite à lui d’agir et de prendre conscience de la diffi- culté de s’engager collectivement, au niveau des États ou En décembre prochain, des représentants de presque tous des entreprises. Il sera en effet appelé à se prononcer sur les pays du monde se réuniront au Danemark pour déci- l’opportunité de diverses solutions: la taxe carbone, le der de nouveaux engagements à prendre en matière de développement ou non de l’énergie nucléaire, le permis réduction des gaz à effet de serre. L’enjeu est important de polluer, etc. Chacun pourra voter à propos d’argu- car il demande que l’on saisisse toutes les occasions pour ments qui seront proposés en faveur ou défaveur de ces s’informer sur le processus de changement de notre cli- solutions. Enfin, il pourra établir son propre bilan mat actuellement en cours. d’émissions de gaz à effet de serre et surtout, prendre des engagements pour le réduire à travers des actes quoti- L’exposition C’est notre Terre 2 !, de diens très simples qui ne diminuent en Kyoto à Copenhague est une bonne intro- rien son confort de vie. duction au sujet, mêlant parcours scienti- fique et artistique. Le parcours scienti- Tout au long du parcours, approches fique fait appel à toutes les ressources de scientifiques et œuvres d’art alternent au la muséologie moderne: multimédias, point que le public visite deux exposi- interacativité, jeux, films, textes, mettant tions en une. Ce n’est pas là simple arti- en œuvre tous les sens. Quant au parcours fice, encore moins une coquetterie gra- artistique, il permet de découvrir le regard tuite. La science et l’art étant deux que des artistes contemporains posent sur manières de saisir le monde, de le rendre le réchauffement climatique. lisible, l’exposition a recours aux deux. Conçu pour structurer un parcours cohé- rent, se répondant l’un à l’autre et se Le temps qu’il fait complétant l’un l’autre, le mélange des genres s’avère formidablement efficace Après un prologue qui montre les menaces dues au réchauffement climatique pesant Cette nouvelle exposition, C’est notre sur la biodiversité, le visiteur, à travers des Terre2!, prend place après les deux expériences simples de physique ou la premiers espaces de la précédente C’est vision de films d’animation, est amené à découvrir l’effet notre Terre ! - Le temps de la Terre, Le temps des de serre naturel, son fonctionnement et son importance Hommes -, que le public peut (re)visiter gratuitement. Ils pour notre climat. C’est l’effet de serre vital, celui sans constituent en effet une base commune à toutes les décli- lequel la vie telle que nous la connaissons aujourd’hui ne naisons du thème «développement durable». Cette nou- se serait sans doute pas développée. Dans un second velle exposition a été conçue dans le même esprit que la espace, il en apprendra davantage sur les gaz à effet de précédente: humanisme, foi dans le progrès et refus de serre d’origine anthropique cette fois, ceux que nos acti- toute culpabilisation. À Bruxelles, site de Tour et Taxis, vités les plus diverses produisent: la consommation jusqu’au 28 mars 2010. http://www.expo-terra.be d’énergie fossile surtout, ainsi que l’agriculture, l’élevage et certains processus industriels.

Après avoir pris connaissance de ce que sont les gaz à Henri DUPUIS effet de serre et les causes de leurs émissions, le visiteur [email protected] découvre tout d’abord les enjeux du sommet de

Athena 254 / Octobre 2009 62 La théorie du Big Bang, plus actuelle que jamais

Pour les passionnés de science, 2009 est à la fois l’année Darwin et l’année de l’astronomie. On célèbre l’origine des espèces vivantes et l’observation de l’Univers. C’est aussi l’occasion de rappeler l’œuvre de celui qui fut le premier à ébaucher une théorie de l’origine de l’Univers. Connue aujourd’hui sous le nom de Big Bang, elle a été formulée dès 1927 par Georges Lemaître, un physicien, mathématicien et prêtre originaire de Charleroi

é le 17 juillet 1894, d’une famille bour- Hubble au tout nouvel observatoire du Mont geoise du pays noir, Georges Lemaître Wilson, en Californie, que la plupart des objets N révèle une intelligence brillante dès les célestes ont une couleur décalée vers le rouge, ce humanités gréco-latines, qu’il termine avant son qui indique qu’ils s’éloignent (les objets qui se 16e anniversaire, au collège des Jésuites de sa rapprochent étant décalés vers le bleu). Il établit ville natale. Après une «spéciale math», il entre- alors, en vertu de la relativité prend des études d’ingénieur interrompues en générale, une relation à 1914 par la guerre, qu’il vit comme engagé laquelle personne ne pouvait volontaire dans l’artillerie. Après l’Armistice, il croire à l’époque.» Il est reprend des études de sciences physiques et d’ailleurs remarquable que, mathématiques, à l’Université de Louvain dans cette note de 1927, (UCL), qui lui valent un doctorat en 1920, puis Lemaître propose une formula- un programme de formation religieuse accélérée, tion anticipée de la loi de réservé aux vocations tardives, au séminaire de Hubble qui sera publiée Malines où il est ordonné prêtre en 1923. quelques années plus tard et qui dit que la plupart des galaxies de l’Univers s’éloi- Une nouvelle vision de l’Univers gnent les unes des autres à une vitesse d’autant plus grande Georges Lemaître part ensuite pour l’Angle- qu’elles sont éloignées. terre et les États-Unis, où il rencontre les plus grands astronomes de son temps. Il fait la En 1931, en réaction à connaissance d’Albert Einstein, auteur de la Eddington qui refusait de relativité générale, dont il exploite les équa- donner un statut physique à la tions au-delà de ce que leur auteur avait ima- notion de commencement de giné. Nommé chargé de cours à l’UCL en l’Univers, Lemaître rédige 1925, il obtient en 1927 un titre de PhD pour la revue Nature, un bref (Doctor of Philosophy), au Massachusetts article qui, sous un nom Institute of Technology (MIT). La même année, quelque peu nébuleux («The beginning of the il publie dans une revue scientifique de world from the point of view of quantum Georges Lemaître Bruxelles, un article où il décrit l’Univers en theory»), explique, en résumé, que l’Univers a a construit les fondations expansion sous le titre: «Un Univers homogène une histoire, que la matière dont il est fait de la théorie de masse constante et de rayon croissant ren- devait être présente au départ, sous la forme du Big Bang dant compte de la vitesse radiale des nébuleu- d’un unique quantum, mais que son évolution en passant ses extra-galactiques». n’était pas écrite d’avance «comme une chan- au crible son sur le disque d’un phonographe». Cette les observations «C’est sa première intuition géniale, explique le conception du monde allait être, trente ans plus astronomiques professeur Dominique Lambert des Facultés uni- tard, au cœur de la pensée d’Ilya Prigogine, de la relativité versitaires Notre-Dame de la Paix de Namur et physicien de l’Université libre de Bruxelles générale. de l’UCL, meilleur connaisseur de la vie et de (ULB) et prix Nobel de chimie, pour qui la l’œuvre de Georges Lemaître. Il a appris, en ren- «flèche du temps» est une donnée capitale de la dant visite à l’astronome américain Edwin cosmologie.

63 Athena 254 / Octobre 2009 Actualités

Attention: l’expansion de l’Univers ne signifie direction. Il n’y a pas de limitation naturelle à pas que les galaxies se dispersent dans l’espace. la puissance de la pensée. L’Univers ne fait pas Nous sommes dans un espace qui s’élargit et exception. Il n’échappe pas à son emprise.» qui entraîne dans ce mouvement les galaxies L’Inquisition avait condamné des gens à mort qui le peuplent. Elles sont comme des raisins pour beaucoup moins que cela. secs dans un gâteau qui gonfle à la chaleur du four. Si les raisins s’éloignent les uns des autres, La troisième grande intuition de Lemaître, issue c’est parce que l’ensemble du gâteau grossit. Et d’une controverse jamais résolue avec Albert Lemaître, audacieux, fait un pas conceptuel de Einstein, est la constante cosmologique. Cette plus: si l’Univers est en expansion, c’est qu’il a constante avait été introduite par Einstein pour été auparavant plus condensé. En «rembobinant assurer la stabilité de l’Univers dans ses équa- le film» de l’expansion, on arrive donc forcé- tions de la relativité générale. Lemaître et d’au- ment au début de cette expansion, à un moment tres l’avaient finalement convaincu que où l’Univers est dans un état très dense qu’il l’Univers était en mouvement, donc instable, et appelle l’atome primitif. «Nous pouvons conce- Einstein avait alors renié cette constante cos- voir, écrira-t-il plus tard, que l’espace a com- mologique, la qualifiant même de «plus grande mencé avec l’atome primi-tif et erreur de sa vie». Mais Lemaître tenait à la que le commencement de l’espace conserver, lui, cette constante. Non pour stabili- a marqué le commencement du ser l’Univers, mais pour lui permettre au temps.» contraire de poursuivre son expansion.

Il concevait cette expansion en trois phases: une La création du monde phase d’expansion décélérée après le Big Bang, suivie d’une phase quasi statique durant «C’est sa deuxième grande intui- laquelle l’évotion de l’Univers semble stagnée tion», dit Dominique Lambert. hésitant entre expansion et contraction, puis C’est l’idée d’une singularité d’une troisième phase d’accélération dans initiale, d’un commencement du laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Cette monde. Une idée plus révolution- accélération exigeait, dans l’esprit de Lemaître, naire encore que l’expansion de «l’intervention d’une force de répulsion qui ne l’Univers car, dans les années devient vraiment active qu’à grande distance», 1930, les esprits sont encore explique Dominique Lambert, «car sous la nourris de la vision philosophique constante cosmologique, il y a cette force de classique de l’Univers, conçu répulsion liée à ce que l’on appelle plutôt comme éternel et immuable. aujourd’hui l’énergie du vide. Un vide qui, en L’idée d’un commencement théorie quantique des champs, ne signifie pas paraît aussi trop proche de la qu’il n’y a rien», précise-t-il. Lemaître confir- conception religieuse de la créa- mait ainsi l’intuition - déjà exprimée dans sa tion du monde pour être scientifi- lettre à Nature de 1931 - de l’importance des quement crédible. phénomènes quantiques.

Dominique Eddington, en particulier, trouve cette notion Lambert «répugnante». Le chanoine Lemaître pouvait Un triomphe posthume a beaucoup écrit évidemment paraître suspect à cet égard, bien sur la vie et qu’il se soit efforcé, avec constance, de séparer La cosmologie de Lemaître, très en vogue dans l’œuvre de son travail scientifique de sa foi chrétienne. Il les années 1930, lui vaudra de recevoir la plus Lemaître. écrit en 1936, dans un rapport destiné à un haute distinction scientifique belge, le prix Voir sa congrès catholique à Malines, que le chercheur Francqui, en 1934, et d’être nommé Associate bibliographie chrétien «fait abstraction de sa foi dans sa Fellow de la Royal Astronomical Society of complète à recherche, non pas parce que sa foi pourrait London, en 1939. Après la guerre 40-45, ayant l’adresse: l’encombrer, mais parce qu’elle n’a directement survécu au bombardement qui a détruit son http://fr.wikipedia. rien à faire avec son activité scientifique.» appartement à Louvain, il publie une synthèse org/wiki/ de ses travaux sous le titre L’hypothèse de Dominique_Lambert Il y a, aujourd’hui encore, des intégrismes qui l’atome primitif. Nommé doyen de la Faculté considéreraient une telle position comme des sciences de l’UCL en 1948, il se passionne blasphématoire. Et que dire de cette autre alors pour le calcul numérique et devient un des tirade, extraite de la conclusion d’un exposé de pionniers de l’informatique en Belgique. Il inté- sa théorie de l’atome primitif: «La Science n’a grera l’Académie pontificale des Sciences, dont pas à capituler devant l’Univers et quand il sera nommé président six ans avant sa mort, Pascal essaye de déduire l’existence de Dieu à en 1966, des suites d’une leucémie. Entre- partir de l’infinité supposée de la Nature, on temps, son hypothèse cosmologique avait peut penser qu’il ne s’engage pas dans la bonne connu une longue éclipse, au profit de la théo-

Athena 254 / Octobre 2009 64 Actualités rie d’un Univers stationnaire, défendue par les Britanniques Fred Hoyle, Tom Gold et Hermann Bondi. Confrontation avec Hoyle au théâtre Jean Vilar Mais peu de temps avant sa mort, Lemaître avait eu la joie d’apprendre, par son fidèle assis- a vie et l’œuvre de Georges Lemaître tant Odon Godart, que deux physiciens améri- L ont inspiré un jeune auteur braban- cains de la Bell Telephone, Arno Penzias et Bob çon, Jean-François Viot. Il a imaginé, sur Wilson, avaient détecté, par leur radiotélescope, une base très bien documentée, une ren- un rayonnement très ancien, presque totalement contre entre le cosmologiste belge et son refroidi (à 3 ° Kelvin, l’échelle qui mesure les plus farouche adversaire scientifique: températures au départ du zéro absolu), qui bai- l’astronome et physicien Britannique gne tout l’Univers. Fred Hoyle (celui qui, par dérision, a inventé l’expression «Big Bang»). Ce rayonnement universel ne pouvait être inter- prété que comme un lointain écho du Big Bang. Intitulée «Sur la route de Montalcino», la Lemaître l’avait cherché en vain dans les pièce a été couronnée en 2008 par rayons cosmiques qu’il interprétait comme l’Académie qui lui a décerné le prix Verdikt- «l’éclat disparu de la formation des mondes». Rijdams récompensant une œuvre met- On sait aujourd’hui que les rayons cosmiques tant en rapport les arts et les sciences. Elle sont produits au sein de la galaxie. Mais l’ini- a été créée en août 2009 au festival de Spa, tiateur du Big Bang avait été bien inspiré en dans une mise en scène d’Olivier Leborgne. recherchant obstinément ce rayonnement fos- Elle sera de nouveau proposée du 5 au 13 sile universel, témoin d’un événement mar- novembre 2009 au théâtre Jean Vilar, à quant du jeune Univers: la séparation de la Louvain-la-Neuve. Le chanoine Lemaître y matière et de la lumière, survenue 300 000 ans est incarné par Alexandre von Sivers et après le Big Bang. c’est François Sikivie qui fait revivre Fred Hoyle, les autres comédiens étant Maud Pelgrims, Grégoire Baldari et Michaël Manconi. Le spectacle, qui dure une heure trente sans entracte, est annoncé comme un régal pour les spectateurs un tant soit peu initiés à Les rides du temps la science. La représentation du 12 novembre sera suivie d’un débat scientifique.

De ce même événement sont nées de légères Renseignements et réservations: http://www.atjv.be. Le texte de Jean-François Viot, irrégularités de densité qui donneront lieu, bien qui sera bientôt édité en anglais, peut être téléchargé via le site http://viotart.eu plus tard, à la naissance des galaxies. Ces irré- gularités ont été cartographiées au début des années 1990 par l’observatoire satellitaire COBE (Cosmic Background Explorer), dont la l’idée d’un Big Bang froid, alors que l’Univers mission a valu un prix Nobel à son concepteur du début était chaud et s’est progressivement principal George Smoot. Une deuxième sonde, refroidi en se structurant. Il a aussi trop simpli- Alexandre appelée WMAP (Wilkinson Microwave Aniso- fié les choses en concevant un Univers sphé- von Sivers tropy Probe) a affiné le travail au début des rique, alors qu’on le considère aujourd’hui tient le rôle du chanoine années 2000. Et cet été, un troisième engin, comme plutôt «plat». Mais il avait eu de bons Lemaître dans Planck, a été tiré par une fusée Ariane en même réflexes, comme de revoir à l’envers le film de cette intrigue temps que le télescope spatial Herschel, pour l’expansion, de chercher un rayonnement fos- pleine de science préciser encore les détails de ces irrégularités sile et de croire en l’existence d’une valeur non- et d’humour, du rayonnement fossile que Smoot avait joli- nulle de la constante cosmologique. qui se déroule ment appelées «les rides du temps». On notera en 1951, dans que les détecteurs de Planck sont 30 fois plus Sur l’âge de l’Univers aussi, il avait formulé une auberge sensibles que ceux de WMAP et 1 000 fois plus une estimation assez juste de l’ordre de 10 de Toscane. que ceux de COBE, ce qui donne la mesure des milliards d’années. Depuis 2003, grâce aux (Photo Véronique progrès technologiques effectués en moins de observations de la sonde WMAP, on estime que Vercheval). vingt ans. l’Univers est âgé de 13,7 milliards d’années. Mais on n’est pas à quelques mois près. Bref, La découverte du rayonnement fossile et la nous conclurons avec Dominique Lambert que détection de ses irrégularités ont remis ferme- «même s’il s’est parfois trompé sur la nature ment en selle la théorie du Big Bang, aujour- des choses, Georges Lemaître a eu toutes les d’hui confortée par un faisceau d’observations bonnes intuitions» et qu’elles sont toujours qui la rendent incontournable. Cette cosmologie valables, quatre-vingt ans après. a certes beaucoup évolué depuis que Lemaître en a jeté les fondations. Il s’est parfois trompé. Par exemple en développant, contrairement à Jean-Luc LÉONARD son successeur américain George Gamow, [email protected]

65 Athena 254 / Octobre 2009 Actualités

La mémoire de Lemaître

l faut bien reconnaître que la mémoire de Moens et de son mari, Michel, docteur en Georges Lemaître n'est pas cultivée avec sciences, qui ont travaillé obstinément à sa I trop de ferveur dans son université d'ori- réalisation. Ce sont eux également qui gèrent gine, où la conservation des ses archives repose l'accès aux archives de Georges Lemaître, les- essentiellement sur du bénévolat. C'est Liliane quelles font l'objet de demandes de consulta- Moens, secrétaire retraitée de l'Institut d'astro- tions assez fréquentes de l'étranger. nomie et de géophysique Georges Lemaître - essentiellement voué aujourd'hui à la climatolo- Ils ont ainsi pu apporter une contribution subs- gie - qui a pris, dès les années 1970, l'initiative tantielle à de nombreux travaux, dont, entre au- de rassembler les documents et les objets tres, le livre d'un auteur américain, John Farrel, témoins de la vie et de l'œuvre de l'initiateur du joliment intitulé The Day Without Yesterday - Liliane Moens Big Bang. Elle les avait d'abord réunis dans un Lemaître, Einstein, and the Birth of Modern près d'une photo petit musée perdu à la lisière du campus de Cosmology, publié en 2005 et traduit en japo- en grandeur nature Louvain-la-Neuve, dont le bâtiment devait être nais. Ils ont été sollicités plus récemment pour du chanoine ensuite affecté à d'autres fonctions. une exposition itinérante et un concours de dis- Lemaître, réalisée sertation à Lisbonne, pour une traduction en en 1994, année allemand des textes de Lemaître, et pour l'ex- du centenaire Aujourd'hui, les archives sont conservées dans de sa naissance, un modeste bureau et les objets sont très bien position itinérante Lumières sur le Ciel, inau- pour le Palais mis en valeur derrière la grande paroi vitrée gurée à Troyes à l'occasion de l'année astrono- des Expositions d'un auditoire de la place des Sciences. Cet mique internationale. Ces contacts interna- de Charleroi. Espace Lemaître évoque quatre aspects de la tionaux permettent aussi aux Archives À l'avant-plan, vie du grand scientifique (la famille, l'étudiant Lemaître de s'enrichir. la Burroughs E-101, brillant, le prêtre, le temps de la gloire) et les première calculatrice trois axes de son activité débordante (le profes- Ainsi, à la fin septembre 2009, Liliane Moens a électronique seur, le cosmologiste et le calculateur). Il rap- eu le bonheur de trouver dans sa boîte aux let- de l'UCL pelle aussi que le nom de Lemaître a été donné tres, un envoi venant d'Amsterdam, qui conte- qu'il utilisait à un astéroïde ainsi qu'à un cratère de la Lune. nait notamment la copie de l'article de Lemaître en virtuose. Le petit musée fait la légitime fierté de Liliane de 1927, annoté par Eddington et envoyé à de Sitter. L'annotation de l'astronome britannique à son confrère hollandais dit: "This seems a com- plete answer to the problem we were discus- sing» (Ceci paraît être un réponse complète au problème dont nous discutions). Pour en savoir plus sur les archives Lemaître, voir le site http://www.uclouvain.be/204119.html

Jean-Luc LÉONARD [email protected]

Contributions bienvenues

Les personnes désireuses de contribuer à la conservation des archives de Mgr Lemaître peuvent faire un don au compte 271-0366366-29 d'UCL-Mécénats, place de l'Université, 1, à 1348 Louvain-la-Neuve avec la mention «Pour ASTR2751 - Mécénats Lemaître». Les donateurs de plus de 30 euros recevront une attestation d'exonération fiscale.

Athena 254 / Octobre 2009 66 Info-Bio

D’où viennent ces membres nouveaux ?

a régénération est liée à la vie elle-même tion. Une expérience assez élégante a donc été qui connaît, chez les organismes pluri- tentée pour le savoir. On a d’abord produit un L cellulaires en particulier, une usure animal transgénique pour le gène qui confère la permanente. Mais si, chez l’homme, ce renou- fluorescence, l’intention n’étant autre que de vellement concerne essentiellement des cellules disposer d’un marqueur cellulaire. On lui a isolées ou, au mieux, des fragments de tissus en ensuite prélevé un fragment de tissu qui a été cas de grande blessure, elle peut s’avérer nette- greffé à son équivalent «normal» destiné à ment plus importante chez les plantes mais aussi l’amputation. Dès que les chercheurs ont été chez nombre de groupes animaux, principale- assurés de la reprise de la greffe (très facile, ment inférieurs. Cela peut toutefois aussi être le comme on l’a rappelé), ils ont sectionné la cas des vertébrés tels que la salamandre, le triton patte concernée à hau- ou l’axolotl. En tant que vertébrés, il s’agit par teur de cette greffe, ce conséquent d’animaux assez haut placés dans qui a eu comme consé- l’échelle évolutive et on peut regretter que si la quence immédiate de régénération d’un organe ou d’un membre entier «mar-quer» à la fluo- leur soit coutumière - ou au moins accessible - rescence le moignon, l’évolution n’ait pas trouvé utile de conserver origine de la régénéra- l’aptitude chez les animaux plus évolués encore, tion du membre. ainsi que chez l’homme. Soit. Un premier bourgeon - L’axolotl - pour ceux qui l’ignorent - est un le blastème - s’est amphibien d’origine mexicaine qui a la particu- d’abord normalement larité d’être néoténique; en d’autres termes, il formé, lui aussi fluo- peut rester toute sa vie à l’état larvaire et se rescent. Puis le mem- reproduire sans obligatoirement passer par un bre s’est reconstitué, stade adulte. Son allure est globalement celle menant comme attendu à une réparation Amblystoma d’une salamandre et répond au nom d’Amblys- complète. Des examens cellulaires ont mexicanum toma mexicanum. S’il est connu, c’est pour sa évidemment été réalisés tout au long de la ou axolotl particularité évoquée, mais aussi parce qu’il a reconstitution et il est clairement apparu que les peut rester depuis longtemps sa place dans les laboratoires. cellules étaient d’emblée spécialisées, sans pas- toute sa vie à Cette présence a permis d’étudier la néoténie ser par un stade intermédiaire de pluri-potence. l’état larvaire qui le caractérise, mais surtout ses facultés Une seule exception à l’ensemble: les cellules mais aussi il a exceptionnelles de régénérer membres et orga- de la peau, qui contribuent autant à la régénéra- la faculté nes (y compris une partie du cerveau !) ainsi tion osseuse qu’à celle du tissu - la peau, par de régénérer que sa grande habilité à accepter les greffes. On conséquent - dont elles sont issues. membres et organes, peut aisément comprendre que les scientifiques y compris une lui ont trouvé quelque intérêt. Tout n’est évidemment pas encore éclairci dans partie du cerveau ! le processus. On ignore par exemple quel est le Si on coupe un membre entier à l’axolotl, il statut de spécialisation des fibroblastes, ces cel- repousse à l’identique. Fabuleux et bien connu lules qui assurent le «remplissage» de la plupart depuis longtemps si bien que les Aztèques pen- des tissus. Bref, on cherche et il n’y a pas de saient que leur dieu de la mort se réincarnait raison qu’on ne trouve pas d’ici peu. Les scep- dans cet animal doté de pouvoirs à ce point tiques vont évidemment se demander à quoi peu- «divins». Si le processus a perdu ce caractère vent bien servir des recherches de ce genre. Si magique aux yeux des scientifiques d’aujour- l’intérêt relève encore de la recherche fondamen- d’hui, ces derniers - pragmatiques - se deman- tale, il est tout aussi évident que la possibilité de dent toutefois si les cellules qui régénèrent le régénérer un jour un organe - ou partie d’orga- membre sont d’emblée spécialisées ou si, issues ne - humain est en perspective. Lointaine encore, du moignon, elles redeviennent d’abord pluripo- évidemment. Mais il n’est pas interdit de voir tentes avant d’accéder à nouveau à la spécialisa- loin… Nature 2009; 460: 39-40 et 60-65.

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Même problématique neuf mois plus tard. Lorsque l’enfant naît, il a besoin d’un regain d’énergie pour assurer sa vie désormais auto- nome. Il en profite donc, dans un registre cellu- laire, pour éliminer tout ce qui lui reste de la «nutrition» maternelle via le placenta. Même Je me mange, s’il est allaité, cette étape de son existence cor- respond à une phase de jeûne qui justifie la petite perte de poids observée juste après la tu te manges… naissance. Et la phagocytose se poursuit toute la vie, jus- qu’au dernier souffle. Elle permet notamment, en faisant - toujours - «le ménage» dans les cel- ous n’en avons évidemment pas cons- lules, de réduire l’impact de certaines maladies cience au quotidien, mais à chaque comme le diabète de type II ou les processus N moment de l’existence, de la concep- neuro-dégénératifs. Évidemment, elle ne peut tion jusqu’à la mort, nous pratiquons l’autopha- pas réellement les empêcher. Mais puisqu’elle gie. L’étymologie du terme parle d’elle-même: se montre efficace dans ces contextes, elle offre il s’agit d’autoconsommation. Pas question bien des perspectives thérapeutiques d’avenir. sûr de se mutiler pour assurer sa subsistance; le Accroître l’autophagie dans des cellules ciblées processus est cellulaire et a pour fonction essen- (du cerveau, du foie ou d’un autre organe selon tielle d’assurer la régulation métabolique et la la maladie à traiter) pourrait être une possibilité défense immunitaire, notamment. de contraindre certains développements patho- logiques; quitte à le renforcer, au besoin, d’un Le terme est né il y a un demi siècle environ complément pharmacologique. lorsque Christian de Duve a découvert des organites chargés de cette digestion auxquels il Une fois de plus, c’est un processus naturel a donné le nom de lysosomes. Ceux-ci sont de qu’il s’agit de modifier dans un sens «utilita- petites vésicules qui, dans des conditions de riste». Puisqu’il est ubiquitaire dans toutes nos nécessité métabolique, sont déchargées dans cellules, il s’agira de le faire en prenant toutes une autre inclusion cellulaire - l’autophago- les précautions d’usage. Afin que d’éventuels some - dont elles digèrent le contenu, mettant effets secondaires observés ne soient pas plus à la disposition de la cellule de l’énergie nou- dommageables que le mal à traiter. velle. Le contenu ? Ce sont des «aliments» m/s n° 4, vol. 25: 323-324. qui ont été absorbés, ou des structures cellulai- res anormales ou devenues inopérantes. La cellule sait faire feu de tout bois lorsqu’il est question de trouver l’énergie nécessaire à son fonctionnement. On a remarqué au passage qu’elle fait aussi office de vide-grenier pour ce Un peu de qui lui est devenu inutile. C’est «recyclage» et «développement durable» permanent, le tout dans un contexte d’économie de moyens et d’énergie. longévité Mais il y a aussi des phases de l’existence où ce mode de fonctionnement est tout à fait indispensable. Au tout début du développement embryonnaire, en particulier. Le génome du en plus ? jeune produit de conception n’ayant pas encore eu l’occasion de s’exprimer, les premières cellules fonctionnent grâce au contenu de es inhibiteurs de conversion du système l’ovule originel, c’est-à-dire des composants rénine/angiotensine sont des médica- exclusivement d’origine maternelle. Il va de soi L ments aujourd’hui bien entrés dans la que ces éléments risquent de rentrer tôt ou tard routine du traitement de l’hypertension. Pour- - soit après le 4e jour de développement - en quoi évoquer cette réalité qui relève plutôt de la conflit avec leur équivalent d’origine stricte- pratique médicale ? Pour deux raisons essen- ment embryonnaire. Dans ce contexte de possi- tielles. La première est que l’hypertension arté- ble incompatibilité, on comprend que la recher- rielle, qui concerne une partie importante de la che d’énergie de fonctionnement offre aussi une population (passé la quarantaine, souvent), reste bonne occasion de «faire le ménage». la principale cause des maladies cardiovasculai-

Athena 254 / Octobre 2009 68 Info-Bio res et celles-ci ont une fâcheuse tendance à réduire la durée de vie. Elle mérite donc une attention permanente.

Une autre raison tient au fait que cette angio- tensine bénéficie toujours d’une attention appuyée pour tenter d’en déjouer les effets vas- culaires, comme le démontrent des travaux récemment publiés. Cette molécule se fixe à des récepteurs cellulaires qui lui sont propres, appe- lés AT1. Or, des recherches menées chez la sou- ris ont conduit à inhiber la formation de ces récepteurs. Résultat: l’angiotensine n’a pu agir sur les parois artérielles et les souris traitées ont vécu significativement bien plus longtemps que des témoins «sauvages». À l’autopsie, elles ne présentaient en outre que peu de fibrose car- diaque et d’artériosclérose aortique.

On a également observé dans l’un ou l’autre de leurs tissus ciblés que certains gènes étaient davantage exprimés, tel celui qui code pour la sirtuine 3 (Sirt3) dans le rein. Il s’agit d’une enzyme qui régule le métabolisme cellulaire sur pour bénéficier des effets associés, dont… la un mode épigénétique, c’est-à-dire en affectant régulation de la tension artérielle et de la pré- le niveau d’expression de certains gènes sans sence des radicaux oxydants avec, en perspec- modifier ces derniers. Des tests d’inhibition tive, une longévité accrue qui en est la consé- spécifique de Sirt3 ont confirmé que ce gène quence indirecte. Chez la souris d’abord, on l’a était effectivement impliqué dans la régulation bien compris. Allez savoir s’ils ne penseront pas de l’angiotensine et, par conséquent, dans le à trouver des applications chez l’homme vieillissement cellulaire et général. aussi…

La suite, on la pressent: les chercheurs vont ten- À l’évidence, la vie prolongée reste un objectif ter d’agir directement sur l’expression du gène permanent. J. Clin. Invest. 119: 524-530. Le diabète en marche…

n le pressentait depuis plusieurs années: présume que l’incidence de ces maladies devrait s’ac- l’incidence du diabète de type I - insulino- croître aussi considérablement dans les pays émer- O dépendant - connaît une progression sans gents pour lesquels les données épidémiologiques sont précédent qui semble loin encore d’avoir atteint son encore lacunaires aujourd’hui. niveau de croissance optimale. On estime par exem- ple qu’entre 2005 et 2020, la proportion de nou- Si on dispose de quelques pistes «environnementales» veaux cas chez des enfants de moins de 5 ans devrait pour expliquer cet accroissement, on constate qu’il doubler et que la prévalence des cas chez les moins existe des variations parfois importantes d’une nation de 15 ans devrait s’accroître de 70%. Dans le même à l’autre, ce qui devrait permettre d’affiner l’évalua- temps, on observe aussi que le diabète de type II tion des causes possibles. Ce qu’on peut déjà suspec- concerne un nombre croissant de jeunes - et en par- ter, sans grand risque de se tromper, c’est que les ticulier d’enfants aussi - ce qui commence à poser malades plus nombreux aujourd’hui, et qui le sont de de sérieux problèmes de prise en charge par les surcroît à un âge de plus en plus précoce, devront instances médicales de nombreux pays. compter avec la maladie plus longtemps, avec tout le cortège des altérations corollaires que cela implique. Les valeurs disponibles - et les projections réali- Avec, par ailleurs, une majoration considérable des sées - concernent pour le moment préférentielle- coûts pour les soins de santé, associés à leur prise en ment les populations des pays occidentaux, mais on charge… The Lancet 373: 1999-2000.

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Le virus de la miniaturisation

lus personne aujourd’hui ne s’étonne de voir tenir dans quelques P centimètres cubes toutes les fonctions d’un dispositif électronique, qu’il s’agisse d’un smartphone, d’un MP3 ou d’un quelconque autre appareil qui agrémente notre quotidien. Pourtant, cette réduction de volume n’est possible que grâce à la miniaturisation simultanée de tous les organes nécessaires aux fonctions à assurer.

Parmi ceux-ci, les batteries occupent une place importante. Entre les «piles plates» de jadis et les pastilles au lithium d’aujourd’hui, on mesure tout l’effort de réduction de volume qui a été consenti et on pressent qu’on n’est pas encore au bout de nos surprises. Pour preuve, cette publication récente qui fait reposer l’ossature d’électrodes sur les liens de cohésion de nanotubes de carbones et de… virus !

Il ne s’agit pas de mettre à la peine le A (H1N1) dont il est si souvent question. On lui a préféré un virus de bactéries (ou bactériophage) moins problématique et sans doute mieux maîtrisé, le E4. On l’a modi- fié en lui adjoignant un peptide qui lui permet d’assurer les jonctions avec les nanotubes évoqués. Le tout sert de support aux échanges d’ions, générateurs de (dé)charges électriques. Plus que la réalisation, c’est surtout l’intention qui frappe: celle qui consiste à faire de virus des sources d’énergie. On aura tout vu ! Science 324: 1051-1055.

Épigénétique et infertilité

énétique et fertilité entretiennent un deux mécanismes: le dépôt de radicaux à lien très étroit. Ce n'est pas réellement certains endroits «stratégiques» des gènes dont G un scoop. Le sexe est génétiquement il fait moduler le fonctionnement ou une modi- déterminé et certaines anomalies chromoso- fication de la structure de la chromatine, cet miques ou géniques sont associées à des hypo- ensemble formé par la molécule d'ADN et les fertilités plus ou moins sévères, voire à des sté- protéines, les histones, qui y sont associées. rilités définitives. Mais qu'en est-il de l'épi- génétique ? (Voir Athena n° 218, pp. 283-286). Il existe pourtant un moment de la vie où cette régulation est levée: le tout premier, lorsque le Déjà, un petit rappel s'impose. Si chacun perçoit jeune embryon est constitué au départ des deux bien aujourd'hui les grands principes du fonc- cellules germinales originelles. C'est ce qui fait tionnement de la génétique, ce n'est peut-être que les premiers stades de développement pas le cas de l'épigénétique. Il s'agit tout embryonnaires sont dits «totipotents», puis- simplement d'un «système» de régulation des qu'ils disposent de toutes les potentialités. Or, il gènes. Disposer de ces derniers est une chose, apparaît de plus en plus évident aujourd'hui que les voir s'exprimer en est une autre. La spéciali- cette reprogrammation nécessaire ne serait sation de nos cellules (cœur, foie, cerveau, os, qu'imparfaite dans certains cas, rendant compte, etc.) est une première preuve de la régulation bien plus tard, d'une hypofertilité chez ceux qui épigénétique, chacun des types cellulaires ne en sont l'objet. retenant des gènes que ceux qui leur sont utiles. C'est donc que les autres ont une expression Comment ? En interférant avec l'«empreinte bloquée et c'est l'épigénétique qui s'en charge. parentale», une autre particularité de la géné- L'âge qui progresse peut être une autre cause de tique. Alors que les gènes issus des deux parents régulation (ou dérégulation). Bref, ce processus sont redistribués en principe de façon aléatoire est inhérent à la vie elle-même et procède de chez le nouvel embryon formé, il y en a qui ne

Athena 254 / Octobre 2009 70 Info-Bio peuvent être hérités que du père ou de la mère, sous peine d'apparition d'anomalies et même de syndromes assez graves. C'est ce qu'on appelle précisément l'empreinte parentale. C'est ce mécanisme de transmission préférentielle qui risquerait d'être perturbé, comme des études comparatives entre sujets fertiles et infertiles l'ont récemment montré.

Cela pose évidemment question lorsque l'infer- cours du XXe siècle, et plus précisément tilité du couple est traitée par ICSI (voir Athena pendant cette période qui correspond à la n° 247, pp. 221-225) - la méthode qui consiste «guerre froide» et à ce bras de fer américano- en l'introduction forcée d'un spermatozoïde soviétique qui a mené l’un et l’autre des prota- dans chaque ovule. Si l'anomalie épigénétique gonistes à multiplier les essais nucléaires. Ces est responsable ou associée à l'infertilité du démonstrations de force à intention dissuasive conjoint, elle est évidemment transmise à l'en- ont singulièrement enrichi l’atmosphère en fant conçu, avec le risque de faire apparaître dérivés radioactifs utilement mis à profit chez lui une des pathologies connues de l'em- aujourd’hui par les chercheurs en général et les preinte parentale (les syndromes de Prader- épidémiologistes en particulier pour dater des Willi, Angelmann ou Beckwith-Wiedemann). processus physiologiques en cours chez les contemporains de ces essais militaro-politiques. À l'évidence, la quête d'une conception respec- tant la filière génétique parentale trouve, avec Ces contemporains - un certain nombre d’entre l'épigénétique aussi, une autre source de ques- nous, au demeurant - ont donc notamment inté- tionnement. Andrologie 2009: 19: 121. gré dans l’ADN de leurs cellules en formation du 14C dont l’abondance relative permet aujour- d’hui une datation assez précise. Comme évoqué, le calcul est complexe et doit évidem- ment recouper d’autres données cliniques. Mais il a notamment permis d’établir le taux moyen de renouvellement des cellules cardiaques chez Ah ! une cohorte d’individus pris en considération. Il apparaît, assez clairement, que ce renouvelle- ment est de l’ordre de 1% par an chez l’homme de 25 ans, mais diminue progressivement votre bon ensuite pour n’être plus que de 0,45% vers l’âge de 75 ans. Au total et sur la durée d’une vie, on peut par conséquent en déduire que moins de la moitié des cardiomyocytes se renouvellent dans cœur… notre cœur. L’information le confirme: le cœur est donc un organe à ménager à tout prix si on veut le faire durer… ’il est bien convenu que nos cellules en général se renouvellent, on a aussi Les données apportées par cette étude vont S coutume de dire que le cœur avec lequel évidemment un peu plus loin et débordent on naît est aussi celui avec lequel on meurt; sauf nécessairement sur la thérapeutique d’avenir: bien entendu dans le chef, toujours marginal, de puisqu’on maîtrise de plus en plus les mécanis- ceux qui bénéficient d’une greffe cardiaque, ça mes de biologie cellulaire et notamment ceux va de soi. C’est donc que s’il se renouvelle, cet qui contribuent à la formation et à la spécialisa- organe unique ne le fait que partiellement. Ce tion des cellules souches, on va peut-être axer la qui restait à prouver. thérapie cardiaque de demain dans un sens préventif en accroissant le renouvellement C’est désormais chose faite grâce à une étude spontané des cellules myocardiques. Cela récemment publiée qui a établi la proportion suffira-t-il à réduire l’incidence des accidents des cardiomyocytes - les cellules musculaires - cardiaques ? Cela reste évidemment à démon- qui assurent leur remplacement. La méthode trer… Science 324: 98-102. exploratoire utilisée est complexe et mériterait à elle seule un long développement. Pour faire court, précisons qu’elle repose sur l’intégration, Jean-Michel DEBRY par les cellules, du carbone 14 (14C) dont la [email protected] proportion dans l’air a fortement augmenté au

71 Athena 254 / Octobre 2009 Oncologie La quête d'un vaccin thérapeutique

Est-il possible de «doper» notre système immunitaire pour qu'il soit capable d'éliminer une tumeur maligne? C'est l'espoir que l'oncologie place dans l'immunothérapie du cancer. Après de premiers résultats encourageants, les essais cliniques de vaccination thérapeutique n'ont cependant plus enregistré de réels progrès. Aujourd'hui, les raisons de ces échecs commencent à être élucidées, notamment grâce aux travaux du professeur Pierre van der Bruggen de l'Institut Ludwig contre le cancer

ès le début du XXe siècle, les biologis- même nature que les tumeurs provoquées chi- tes s'interrogèrent sur la présence éven- miquement - pas de rejet. N'exprimeraient-elles Dtuelle d'antigènes spécifiques à la sur- donc pas d'antigènes ? Dès 1972, les travaux de face des cellules cancéreuses. Oui ou non, se l'équipe du professeur Thierry Boon, directeur demandaient-ils, les tumeurs expriment-elles de l'unité bruxelloise de l'Institut Ludwig contre certaines substances particulières reflétant le le cancer, permirent de trancher le débat: ces dérèglement qui s'est emparé de la machinerie tumeurs spontanées ne sont pas dépourvues cellulaire ? Autrement dit, le système immuni- d'antigènes à leur surface. Mieux: elles peuvent taire pourrait-il être mobilisé pour éliminer les servir de cible à une réponse immunitaire cellules tumorales comme il élimine les cellules suscitée artificiellement, dont la traduction est infectées par un virus ou une bactérie ? une destruction des cellules cancéreuses par les lymphocytes T. La question demeura longtemps sans réponse, avant de rebondir dans les années 1940-50. Deux chercheurs américains, Richard La découverte des MAGE Prehn et Marjorie Main, avaient mis en lumière un phénomène Il y a à peine plus de vingt ans, on ignorait cepen- étonnant: si l'on induit chimi- dant encore s'il existe des antigènes spécifiques quement un cancer chez une sur les tumeurs humaines et, partant, si les lym- souris, qu'on le lui ôte ensuite phocytes T humains sont capables de distinguer chirurgicalement, puis qu'on le les cellules tumorales des cellules normales. lui réimplante, elle peut rejeter Question cruciale s'il en est puisque, en l'absence spontanément la greffe tumo- d'antigènes, toute stimulation artificielle du sys- rale. Il apparut en outre que ces tème immunitaire, toute immunothérapie, serait rejets reposaient sur l'«action» vouée à l'échec, les lymphocytes tueurs ne dis- du système immunitaire, en cernant aucun «ennemi». Pierre van der particulier des lymphocytes T. «L'espoir se pré- Bruggen, cisait donc, à condition que ce qui était observé En 1986, le biologiste anglais Alain Townsend, professeur avec les tumeurs de souris se vérifie avec des de l'Université d'Oxford, démontra que les à l'Université cellules cancéreuses humaines et, surtout, que lymphocytes T reconnaissent les protéines catholique de l'on comprenne comment les lymphocytes T virales même lorsqu'elles n'apparaissent pas à la Louvain (UCL) peuvent distinguer les cellules tumorales des surface de la cellule. Ces protéines peuvent en et responsable cellules normales», lit-on dans un article récent effet être fragmentées en petits peptides. d'un groupe intitulé Principes généraux et premiers essais Transportés dans le réticulum endoplasmique, de recherche cliniques de vaccination thérapeutique contre le ceux-ci se lient à des antigènes particuliers au sein de cancer (1). présents sur les globules blancs du sang et sur l'Institut Ludwig. toutes les cellules nucléées de l'organisme: en pierre. Courriel: La vague d'optimisme ne tarda pourtant pas à l'occurrence, des molécules de classe 1 codées vanderbruggen@ être écrêtée, car, soumises à un protocole expé- par le complexe majeur d'histocompatibilité bru.licr.org rimental similaire, les tumeurs spontanées de (système HLA - Human Leucocyte Antigens) souris ne faisaient pas l'objet d'une réaction de découvert en 1958 par le professeur Jean

Athena 254 / Octobre 2009 72 Oncologie

Dausset, prix Nobel de médecine en 1980. Se MAGE-3 présenté à la surface de leurs cellules forment ainsi des entités «peptides-antigènes cancéreuses par la molécule d'histocompatibi- d'histocompatibilité de classe 1» qui migrent lité HLA-A1. Elles reçurent des injections du vers la surface de la cellule, où ils sont identi- peptide MAGE-3, petit fragment de neuf acides fiés par les récepteurs des lymphocytes T. aminés issu de la protéine MAGE-3.

On sait maintenant que ce processus n'est pas Premier constat: le traitement d'immunothéra- l'apanage des protéines virales, mais s'applique pie ainsi dispensé ne présenta aucune toxicité et aussi à toute protéine anormale résultant d'une s'avéra indolore. Deuxièmement, une régres- mutation ponctuelle dans un gène. «Il est acquis sion significative des tumeurs fut observée chez aujourd'hui que de nombreuses cellules tumo- sept patients. Elle fut même complète chez trois rales humaines portent à leur surface des pep- d'entre eux, ces personnes ayant éliminé totale- «Il est acquis tides antigéniques qui peuvent être reconnus ment leurs métastases, et la rémission persista aujourd'hui que par des lymphocytes T, en particulier des lym- durant plusieurs années chez deux autres répon- de nombreuses phocytes T cytolytiques (CTL), qui expriment deurs. Les régressions spontanées n'étant que de cellules tumorales les molécules CD8 (2)», précise Pierre van der 0,5% environ dans les mélanomes métasta- humaines portent Bruggen, professeur à l'Université catholique tiques, les résultats positifs obtenus paraissaient à leur surface de Louvain (UCL) et responsable d'un groupe prometteurs. des peptides de recherche au sein de l'Institut Ludwig. antigéniques Diverses techniques de vaccination furent tes- qui peuvent être En 1991, Pierre van der Bruggen et Catia tées par la suite. Les unes mettaient en œuvre reconnus par Traversari, de l'équipe de Thierry Boon, identi- d'autres antigènes MAGE avec ou sans adju- des lymphocytes T.» fièrent, dans le cadre du mélanome, un premier vants immunologiques, d'autres associaient plu- antigène spécifique d'une tumeur cancéreuse sieurs antigènes «Nous avons notamment pro- humaine: MAGE-1 (M pour mélanome, AGE cédé à des vaccinations où furent injectés dix pour antigène). Pour l'heure, plusieurs dizaines peptides antigéniques différents», rapporte d'antigènes tumoraux, la plupart reconnus par Pierre van der Bruggen. D'autres encore fai- des lymphocytes T cytolytiques, ont été saient appel non plus à des peptides mais à la découverts. Comme l'indique Pierre van der protéine antigénique MAGE-3 elle-même. Bruggen, certains d'entre eux présentent d'ores et déjà des caractéristiques qui en font d'excellents On notera que la firme pharmaceutique candidats pour le développement d'une thérapie GlaxoSmithKline Biologicals va précisément (vaccination thérapeutique) basée sur l'activation débuter un important essai de phase 3 (plus de de lymphocytes T antitumoraux. 2 000 patients répartis dans le monde entier) centré sur des malades ayant subi la résection Les chercheurs de l'Institut Ludwig se sont complète d'un cancer du poumon non à petites particulièrement intéressés à la famille des cellules et auxquels sera administré un vaccin antigènes de type MAGE, lesquels sont thérapeutique anti-MAGE 3. Sera étudié l'im- exprimés dans beaucoup de tumeurs mais non pact de la vaccination sur le risque de récidive. dans des tissus sains. Cette spécificité offre Par ailleurs, un typage génétique des patients l'avantage de prévenir tout effet secondaire sera effectué par la technique des microdamiers néfaste sur les cellules normales, tandis que la (puces à ADN), afin d'identifier une signature Le lymphocyte T présence des antigènes MAGE dans une grande génétique caractéristique des «bons répon- reconnaît les cellules variété de cancers autorise en principe l'utilisa- deurs» au traitement. via son récepteur T. tion d'un même vaccin thérapeutique chez beaucoup de patients. Depuis ces découvertes, de nombreux laboratoires se sont engagés sur la piste de l'immunothérapie du cancer.

Des succès mitigés

Au cours des quinze dernières années, l'unité bruxelloise de l'Institut Ludwig a initié, en collaboration avec d'autres centres belges et étrangers, un programme de vaccinations théra- peutiques visant à tester divers types de vaccin. Les résultats d'un premier essai clinique impli- quant vingt-six patients atteints d'un mélanome avec métastases fut jugé encourageant. Ces personnes étaient porteuses de l'antigène

73 Athena 254 / Octobre 2009 Oncologie

Il existe plusieurs autres voies thérapeutiques Si des essais cliniques sont poursuivis par diffé- que celles exposées ci-dessus. Elles font appel, rents laboratoires à travers le monde, les par exemple, à des cellules dendritiques ou à chercheurs de l'unité bruxelloise de l'Institut des virus recombinants. Ludwig ont ralenti provisoirement les leurs pour essayer préalablement de démêler l'éche- «Au début de notre programme clinique, nous veau: pourquoi les vaccinations thérapeutiques pensions que le système immunitaire d'un aboutissent-elles à des résultats relativement Cancer Vaccine malade cancéreux restait le plus souvent décevants ? et pourquoi fonctionnent-elles “endormi” face aux antigènes exprimés par la malgré tout chez certains patients ? Des études Collaborative (ENG) tumeur mais qu'un vaccin contenant les bons réalisées à Bruxelles ont notamment mis en http://bit.ly/CTvnI ingrédients pourrait induire de fortes réponses évidence une fréquence élevée de lymphocytes Une section d'un site de lymphocytes T qui détruiraient les cellules T cytolytiques dans le sang et dans des prélève- collaboratif cancéreuses», indique Pierre van der Bruggen. ments tumoraux émanant de patients cancéreux, consacrée aux essais Il fallut déchanter. Peu importait le vaccin et ce avant même toute vaccination. La vision cliniques proposé, la technique employée et les équipes initiale selon laquelle les tumeurs malignes dans le cadre de recherche impliquées, les succès demeu- s'avéraient peu antigéniques a donc été battue des vaccins. raient circonscrits à un faible pourcentage. Et la en brèche. Au contraire, les cancers ne sont pas situation n'a pas évolué: aujourd'hui encore, les «transparents» pour le système immunitaire, vaccinations thérapeutiques échouent dans la mais sans doute les CTL deviennent-ils généra- Cancer Vaccines (ENG) majorité des cas. Selon l'article susmen- lement inactifs après un certain temps. http://bit.ly/cKCJF tionné (3), les vaccins, quels qu'ils soient, et tou- Questions et réponses tes études confondues, induisent des régres- sur le vaccin sions tumorales chez 5 à 20% des malades Lymphocytes épuisés contre le cancer. vaccinés. Toutefois, le taux de réponses cli- niques objectives (complètes ou partielles), Sur le plan théorique, de multiples raisons basé sur les critères officiels WHO, est de l'or- peuvent expliquer pourquoi les cellules cancé- dre de 5% seulement. reuses échappent le plus souvent à la destruction par les CTL. Les auteurs de Principes généraux Certes, il y a des exceptions récentes. Mais les et premiers essais cliniques de vaccination thé- techniques utilisées empruntent alors des rapeutique contre le cancer (4) en donnent chemins plus abrupts: elles sont extrêmement quelques exemples: la perte de l'antigène par les lourdes, avec des effets secondaires importants. cellules tumorales, la perte d'expression des molécules HLA ou d'autres molécules impli- quées dans l'apprêtement (5) des antigènes, la résistance des cellules tumorales à l'apoptose (1) Principes généraux et premiers essais cliniques de vaccination (6), la production de facteurs pouvant interférer thérapeutique contre le cancer, par Jean-François Baurain, Pierre van der avec la réponse immunitaire... Bruggen, Benoît J. Van den Eynde, Pierre G. Coulie, Nicolas Van Baren, dans Bull Cancer, 2008. En 2003, l'équipe du professeur Benoît Van den Eynde (Institut de Duve, Institut Ludwig) a (2) Les lymphocytes T se partagent en deux sous-populations, qui expriment montré que beaucoup de cellules cancéreuses soit le récepteur CD4, soit le récepteur CD8. Les lymphocytes T CD4 sont produisent dans l'environnement tumoral une principalement des lymphocytes producteurs de cytokines régulatrices de la enzyme, l'indoleamine 2,3-dioxygénase (IDO), réponse immune, tandis que les lymphocytes T CD8 possèdent essentielle- qui dégrade le tryptophane, acide aminé néces- ment des capacités cytotoxiques. saire à la prolifération des lymphocytes T - le (3) Op. cit. manque de tryptophane provoque l'arrêt de leur cycle cellulaire. L'efficacité des vaccins théra- (4) Op. cit. peutiques pourrait-elle être améliorée si, conco- mitamment à leur administration, on réussissait (5) L'apprêtement de l'antigène est un mécanisme, réalisé à l'intérieur des à enrayer la destruction du tryptophane ? La cellules, qui coupe la protéine antigénique en petits fragments (peptides) et logique et les résultats d'expérimentations qui associe ceux-ci aux molécules HLA pour présenter les complexes au animales (souris transgéniques) incitent à le niveau de la membrane cellulaire. croire. Aussi la possibilité d'inhiber par des moyens pharmacologiques l'activité de l'IDO (6) Mort cellulaire programmée («suicide» de la cellule en cas de domma- chez le patient cancéreux est-elle actuellement à ges trop importants à son ADN). l'étude. (7) Restoring the association of the T cell receptor with CD8 reverses anergy in human tumor-infiltrating lymphocytes, par Demotte N., Stroobant V., Pierre van der Bruggen, lui, s'est penché sur une Courtoy P.J., Van Der Smissen P., Colau D., Luescher I.F., Hivroz C., Nicaise autre question: la présence constante de l'anti- J., Squifflet J.L., Mourad M., Godelaine D., Boon T., van der Bruggen P., gène ne pourrait-elle entraîner un phénomène dans Immunity, 2008. d'épuisement des CTL et leur dysfonctionne- ment ? Les réponses apportées lui ont valu de

Athena 254 / Octobre 2009 74 Oncologie recevoir, le 25 juin dernier, le prix Allard- Janssen 2009, lequel couronne tous les trois ans des recherches scientifiques de pointe dans le domaine du cancer.

Dans un premier temps, le chercheur et son équipe ont montré in vitro, à partir d'une popu- lation clonale de lymphocytes T cytolytiques mis en culture, que la capacité de ces lympho- cytes à être activés diminue au fil du temps au contact trop fréquent de l'antigène. Il en va de même de leur aptitude à tuer les cellules présentant l'antigène pour lequel ils sont compétents et à produire de l'interféron gamma.

Encore fallait-il comprendre ce phénomène d'épuisement qualifié d'anergie des lymphocy- tes T. «On sait qu'un CTL a besoin au minimum de deux récepteurs, le TCR (ou récepteur T) et le CD8, pour reconnaître l'antigène et être activé, indique le professeur van der Bruggen. autre sucre, réputé ne pas se lier à la galec- TCR et CD8 Or nous avons établi que les deux récepteurs tine-3, rien de tel ne se produisait.» ne colocalisent sont proches l'un de l'autre à la surface des lym- pas sur des phocytes fonctionnels, alors qu'ils sont distants Les lymphocytes T cultivés en laboratoire sont lymphocytes T à la surface des lymphocytes anergiques.» une chose, les lymphocytes infiltrant des anergiques. cancers de patients en sont une autre. Grâce à une collaboration avec les Cliniques universi- Une pincée de sucres taires Saint-Luc, Pierre van der Bruggen put récolter des échantillons de tumeurs provenant Comme dans un jeu de ricochets, la question de malades atteints d'un carcinome de l'ovaire. avait rebondi et il convenait à présent d'élucider Il y isola ensuite des lymphocytes T. le phénomène observé. Fut ainsi émise l'hypo- Qu'observa-t-il ? Que les TCR et CD8 présents thèse que les TCR et CD8 soient retenus à des à leur surface n'étaient pas proches et que les endroits différents de la membrane cellulaire. lymphocytes se révélaient incapables de pro- La plupart des molécules qui siègent à la duire de l'interféron gamma en réponse à une « Des études réalisées surface d'un lymphocyte T sont «décorées» de stimulation par des cellules tumorales. Autre- à Bruxelles ont sucres, mais il semble, dans le cas du TCR, que ment dit, l'anergie des lymphocytes T infiltrant notamment mis en la qualité ou la quantité des sucres dont il se les tumeurs est corrélée, elle aussi, avec une évidence une charge se modifie au contact prolongé de l'anti- absence de colocalisation des TCR et CD8. fréquence élevée gène. C'est ici qu'un nouvel acteur entre en de lymphocytes T scène: galectine-3. Cette protéine, qui peut être Élément capital: à l'instar de leurs homologues cytolytiques dans produite abondamment par les cellules cancé- cultivés in vitro, ces lymphocytes peuvent retrou- le sang et dans des reuses elles-mêmes, se lie à certains sucres. Et, ver leur vigueur si on leur applique un traitement prélèvements de fait, elle se lierait aux sucres présents sur les adéquat (7). En effet, quelques heures d'incuba- tumoraux émanant TCR des lymphocytes activés et formeraient tion en présence de LacNAc restaurent à leur sur- de patients cancéreux, des réseaux qui immobiliseraient lesdits TCR et face la colocalisation du TRC et du CD8 et leur et ce avant même les empêcheraient d'interagir avec l'autre récep- rendent la capacité de produire de l'interféron toute vaccination. teur, le CD8. gamma. D'où ce nouvel espoir: «Ces résultats La vision initiale obtenus ex vivo nous permettent de suggérer selon laquelle «Pour tester cette hypothèse d'une absence de qu'injecter dans les tumeurs du LacNAc, ou d'au- les tumeurs mobilité du TCR à la surface des lymphocytes tres sucres qui se lieraient à la galectine-3, pour- malignes s'avéraient T anergiques, ces derniers ont été mis en pré- rait restaurer au moins temporairement les fonc- peu antigéniques a sence d'un sucre qui se lie à la galectine-3, tions des lymphocytes T et créer des conditions donc été battue le LacNAc (N-acetyllactosamine), rapporte favorables à une réponse antitumorale efficace, en brèche.» Pierre van der Bruggen. Deux heures de ce fait remarquer Pierre van der Bruggen. Combiné traitement ont permis de récupérer une grande avec des vaccinations thérapeutiques, un traite- partie de la colocalisation du TCR et du CD8. ment avec ce type de sucre conduirait peut-être à Par ailleurs, les lymphocytes T traités au des régressions tumorales chez un plus grand LacNAc avaient également recouvré leur nombre de patients.» capacité de produire de l'interféron gamma en réponse à une stimulation avec l'antigène.» Et Philippe LAMBERT d'ajouter: «Par contre, si l'on employait un [email protected]

75 Athena 254 / Octobre 2009 Neuropsychiatrie Dépression : inflammation et neuroplasticité

Depuis quelques années, des découvertes re partie des travaux de recherche se sont foca- lisés sur l'hippocampe, structure à propos de neuroanatomiques ont balisé une voie nouvelle dans laquelle se sont ainsi dégagées des certitudes. la compréhension de la dépression et du mode d'action L'amygdale, par exemple, est difficile à mesu- des antidépresseurs. Sommes-nous face à une rer. Cet écueil méthodologique explique sans maladie inflammatoire et neurodégénérative ? doute pourquoi les études volumétriques dont elle a fait l'objet aboutissent à des résultats divergents. Cela étant, des travaux d'histopatho- ur le plan biochimique, l'action des anti- logie post-mortem concluent à une réduction dépresseurs conventionnels est quasi des cellules gliales de l'amygdale dans la S immédiate. Or plus de 30 à 45% des dépression, sans modification du nombre de patients déprimés ne répondent pas à ces médi- neurones (2). caments ou n'y répondent que partiellement. En outre, lorsque le traitement est Selon une méta-analyse réalisée par Stéphanie efficace, plusieurs semaines Campbell et Glenda MacQueen, la réduction sont néanmoins nécessaires à volumétrique de l'hippocampe chez le déprimé une amélioration de la symp- serait en moyenne de 8% dans l'hémisphère tomatologie. Comment expli- gauche et de 10% dans l'hémisphère droit par quer cet hiatus ? comparaison avec des sujets sains. Par ailleurs, son «rétrécissement» apparaît proportionnel à la Plusieurs hypothèses ont été durée de la dépression - plus les épisodes avancées mais, jusqu'il y a peu, dépressifs ont été nombreux, plus l'atrophie est aucune n'était totalement satis- importante. faisante. Ces dernières années, cependant, une approche qui L'hippocampe, rappelons-le, est une structure pourrait se révéler plus sous-corticale bilatérale dont les principales féconde semble gagner du ter- fonctions ont trait à l'apprentissage, à la rain. Elle applique le concept mémoire et à l'analyse des informations. Son de plasticité neuronale à la implication dans la modulation des réponses dépression. En effet, comme émotionnelles est également établie. Et c'est l'écrivent William Pitchot, probablement ce dernier élément qui fait de lui Marc Ansseau, Marie-Hélène Polis, Shibeshih Belachew et une cible de dégénérescences neuronales qui se responsable Marc Ansseau dans un article récent (1), «les étu- situeraient au confluent de facteurs environne- du service des neuroanatomiques basées sur l'imagerie mentaux, dont principalement le stress, et d'une de psychiatrie et médicale ont mis en évidence des lésions neuro- prédisposition génétique. de psychologie logiques spécifiques de la dépression de même médicale de qu'une tendance à la récupération volumétrique Plusieurs mécanismes peuvent expliquer la l’Université de Liège de certaines régions après traitement antidépres- réduction de volume de l'hippocampe chez Courriel: seur.» Ces données sont corroborées par les étu- certains déprimés. D'abord, la dépression [email protected] des histopathologiques. s'accompagne d'une élévation des taux plasma- tiques de glucocorticoïdes. Or, au même titre que d'autres structures, l'hippocampe est très Atrophie de l'hippocampe sensible à de fortes concentrations prolongées de ces substances, qui y engendrent des dom- Quelles sont les régions concernées ? L'hip- mages neuroanatomiques. Autre mécanisme: la pocampe, l'amygdale, le noyau caudé, le puta- diminution, sous l'impact de stress chroniques, men et le cortex frontal, structures interconnec- des concentrations de Brain Derived Neurotro- tées formant le circuit limbico-cortico- pic Factor (BNDF), substance protectrice des striato-pallido-thalamique. Toutefois, la majeu- neurones contre les agressions neurotoxiques.

Athena 254 / Octobre 2009 76 Neuropsychiatrie

La neurotoxicité du glutamate, neurotransmet- teur excitateur par excellence, qui se lie aux (1) William Pitchot, Marie-Hélène. Polis, Shibeshih Belachew et Marc récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA), est Ansseau, Dépression et neuroplasticité, dans La Revue Médicale de Liège, également mise en cause. L'hippocampe est 2007. riche en neurones dopaminergiques. À l'occa- sion d'un stress sévère, d'une hypoglycémie ou (2) Jusqu'au début des années 90, on considérait que chacun d'entre nous naît d'une hypoxie, le neurotransmetteur se retrouve avec son quota de neurones, appelé à s'éroder au fil du temps sans espoir de en excès dans la fente synaptique (3). S'ensuit régénération. Désormais, il est acquis que les mammifères, y compris l'homme, une cascade biochimique susceptible d'engen- sont à même de former de nouveaux neurones. Deux régions cérébrales sont drer un processus d'apoptose (mort program- concernées: la zone sous-ventriculaire, où «éclosent» des neurones appelés à mée) neuronale. migrer vers le bulbe olfactif, et le gyrus dentelé, une des deux fines couches de neurones - la seconde est la corne d'Ammon - qui, repliées l'une sur l'autre, constituent l'hippocampe.

Maladie inflammatoire (3) La fente synaptique est l'espace de communication électrochimique entre deux neurones. On le voit, il existe différents mécanismes qui, en réponse à un stress sévère ou prolongé, sont (4) William Pitchot et Marc Ansseau, Actualité thérapeutique en psychiatrie, de nature à occasionner une mort de neurones dans La Revue Médicale de Liège, 2007. dans l'hippocampe. Cette destruction concour- rait à faire le lit de la dépression. En outre, il (5) La sérotonine est un neurotransmetteur dont la diminution de concentra- apparaît aujourd'hui que des processus inflam- tion cérébrale joue un rôle important dans l'émergence et le maintien d'états matoires sont également à prendre en considé- dépressifs. D'où des médicaments, les antidépresseurs sérotoninergiques, visant à pallier ce déficit. ration. «La dépression a été associée à des signes d'inflammation susceptibles de favori- ser les pathologies somatiques souvent asso- ciées aux troubles de l'humeur et les lésions La théorie présentant la dépression comme une cérébrales observées chez certains patients maladie inflammatoire et neurodégénérative déprimés, notamment une diminution du dévoile évidemment de nouvelles perspectives volume de l'hippocampe, précisent William thérapeutiques. Par exemple, on pourrait déli- Pitchot et Marc Ansseau. (...) Certaines études vrer des substances antagonistes des récepteurs ont montré que des patients souffrant de NMDA, afin de contrer l'action du glutamate. dépression majeure présentent des taux élevés En fait, un large spectre s'ouvre à la recherche. de cytokines ou de facteurs de nécrose tumo- «Le but serait d'obtenir des médicaments plus rale. Ces cytokines tendent à induire certaines efficaces et qui agiraient plus vite que les anti- modifications, telle une production accrue de dépresseurs actuels, commente le professeur l'hormone de libération de la corticotrophine, Ansseau. Pour ce faire, ils devraient court- laquelle favorise l'apoptose neuronale. Ces circuiter la cascade d'événements biochi- observations soulèvent l'hypothèse que la miques par laquelle doivent passer les antidé- dépression pourrait être une forme de maladie presseurs connus pour aboutir à une action inflammatoire, voire une affection neurodégé- régénératrice. La souffrance du patient, ainsi nérative (4).» que le risque de passage à l'acte suicidaire, s'en trouveraient plus rapidement diminués, Dépression (FR) Neurodégénérative, mais réversible dans la tandis que la compliance serait améliorée.» mesure où les antidépresseurs peuvent favori- Symptômes, ser une neurogenèse hippocampique. «On a Des questions restent cependant en suspens. thérapies, montré, dans le cerveau adulte, l'influence Celle-ci, par exemple: tous les types de dépres- rôle de d'antidépresseurs sérotoninergiques (5) - entre sion s'accompagnent-ils de modifications l'entourage, etc. autres des inhibiteurs de la recapture de la neuroanatomiques ? En revanche, un vieux Un guide gratuit sérotonine - sur la régulation de la neuroge- débat s'éclaire d'un jour nouveau: on comprend à télécharger. nèse du gyrus dentelé de l'hippocampe», rap- désormais pourquoi les antidépresseurs, dont http://www.info- porte le professeur Ansseau. La logique est l'action biochimique est quasi immédiate, depression.fr/ respectée, car il semble acquis que la séroto- n'induisent une amélioration de la symptomato- nine intervient de façon cruciale dans le logie dépressive qu'après plusieurs semaines de contrôle de la prolifération des précurseurs traitement. À ce propos, Marc Ansseau s'en neuronaux à l'âge adulte. remet à une métaphore: «Ils agissent un peu comme un engrais.» Une fois le terrain «ense- De surcroît, les travaux de René Hen et de ses mencé», il faut un certain temps pour que de collaborateurs, à l'Université Columbia, ont nouveaux neurones soient générés et établissent permis de montrer chez la souris le lien existant les connexions qui les rendront fonctionnels. entre la neurogenèse hippocampique et les effets comportementaux induits par les antidé- Philippe LAMBERT presseurs. [email protected]

77 Athena 254 / Octobre 2009 Neurobiologie Histoire... d'une préférence

Le 8 mars 2009, la revue Nature Neuroscience publiait Le circuit de la récompense, quant à lui, a pour les résultats étonnants d'une étude réalisée par des pièce maîtresse le noyau accumbens (striatum ventral). Y aboutissent notamment des afféren- chercheurs de l'Université libre de Bruxelles. Tel un ces dopaminergiques en provenance de l'aire miroir à deux faces, une population de neurones tegmentale ventrale (VTA), structure active du striatum, les neurones striatopallidaux, jouerait dans le contrôle de la récompense et du renfor- un rôle à la fois dans l'activité locomotrice et dans cement et qui, par là même, pèse de tout son l'assuétude aux drogues. De nouvelles voies poids dans les phénomènes d'assuétude. Selon Alban de Kerchove d'Exaerde, chercheur quali- thérapeutiques se dessinent-elles pour traiter la maladie fié du Fonds national de la recherche scienti- de Parkinson et les addictions à ces substances ? fique (FNRS) travaillant au sein du laboratoire de Neurophysiologie de la Faculté de médecine n Europe, l'assuétude à l'alcool et aux de l'Université libre de Bruxelles (ULB), avoir drogues illicites touche 9 millions de beaucoup de plaisir n'implique cependant pas E personnes et, selon les estimations, une forte libération de dopamine. «Cette der- coûte 57 milliards d'euros par an à la commu- nière, dit-il, est davantage liée à la recherche nauté. La prévalence de la maladie de ou à l'anticipation du plaisir qu'au plaisir lui- Parkinson, elle, est de 1,2 million d'individus. même. La valeur de celui-ci, en tant que tel, est Alban de Kerchove Coût annuel: 11 milliards d'euros. Entre l'affec- plutôt traitée, entre autres, au niveau du cortex d'Exaerde, tion neurologique et les addictions aux substan- orbitofrontal.» chercheur qualifié ces existent deux importants traits d'union: la du Fonds national dopamine, neurotransmetteur déficitaire dans le de la recherche premier cas, excédentaire dans le second, et le Destruction spécifique scientifique (FNRS) striatum, noyau sous-cortical dont la partie dor- travaillant au sein sale est impliquée dans le contrôle moteur et la Le striatum est composé pour 90 à 95% de deux du laboratoire partie ventrale - plus spécifiquement le noyau populations distinctes de neurones entremêlées de neurophysiologie accumbens (1) -, dans le traitement des infor- et équivalentes en nombre: les neurones striato- de la Faculté mations relatives à la «récompense» et au «plai- nigraux et leurs homologues striatopallidaux. de médecine sir» et, partant, dans l'addiction aux drogues. Quels sont leurs rôles respectifs ? Jusqu'il y a de l'ULB. Courriel: peu, la réponse à cette question demeurait voilée adekerch@ Sans entrer dans les méandres de «circuiteries d'un certain mystère, d'autant que la plupart des ulb.ac.be complexes», rappelons que le Parkinson est travaux s'étaient concentrés sur la seule popula- défini comme la résultante d'une carence en tion des neurones striatonigraux. Pourquoi ? dopamine dans le système extrapy- Principalement parce qu'on avait observé que la ramidal, entité vouée au contrôle délivrance de cocaïne ou d'amphétamines à une des mouvements et dont les com- souris aboutissait à une augmentation rapide de posantes sont, d'une part, les l'expression de gènes précoces (c-fos, Zif) dans noyaux gris de la base (ou gan- ces neurones, lesquels focalisèrent dès lors l'at- glions de la base) et, d'autre part, tention des chercheurs. Leur rôle dans l'assué- les connexions qui les unissent. tude aux drogues est bien démontré aujourd'hui. Parmi lesdits noyaux figurent Mais cela signifie-t-il que les neurones striato- notamment la substance noire pallidaux n'ont aucune implication dans les phé- (locus niger) principalement com- nomènes de dépendance ? C'est ce que se sont posée de neurones dopaminer- proposé d'étudier les équipes d'Alban de giques (2), le pallidum, le noyau Kerchove d'Exaerde et de Serge Schiffmann au sous-thalamique et le striatum. Au sein du laboratoire de neurophysiologie de la départ, la maladie se traduit par une Faculté de médecine de l'ULB. perte des neurones dopaminer- giques du locus niger et de leurs Pour réaliser leur objectif, les neurobiologistes projections vers le striatum. bruxellois entreprirent l'étape préalable de la

78 Athena 254 / Octobre 2009 Neurobiologie destruction spécifique des neurones striatopalli- «Une partie importante de notre travail daux, le but étant de déterminer ensuite les consista à valider le système, rapporte Alban de conséquences fonctionnelles de leur inactiva- Kerchove d'Exaerde. Ainsi, nous avons notam- tion. Or ces neurones, nous l'avons signalé, sont ment montré dans un hémistriatum, l'autre nous mélangés aux neurones striatonigraux dans le servant de structure de contrôle, que si une striatum. «Une inactivation par chirurgie ou injection de toxine diphtérique y entraînait la par injection était donc impossible, commente perte des marqueurs caractéristiques des Alban de Kerchove d'Exaerde. Par conséquent, neurones striatopallidaux (récepteurs D2 à la nous devions les cibler en recourant à un outil dopamine et A2A à l'adénosine, enképhaline), (1) Le nucleus génétique.» les marqueurs des neurones striatonigraux accumbens est (substance P, récepteur D1 à la dopamine, le centre Les deux grands types de neurones du striatum se dynorphine) y étaient préservés. Autrement dit, du renforcement et distinguent entre autres par le fait qu'ils expriment les neurones striatonigraux - de même de la récompense. des gènes différents. Dans le cas des neurones d'ailleurs que les interneurones cholinergiques striatonigraux: notamment le récepteur D1 à la et les autres populations d'interneurones du (2) Producteurs dopamine, la substance P, neuropeptide bien striatum - n'étaient pas touchés par l'injection, de dopamine. connu dans le domaine de la transmission de la ni les neurones dopaminergiques présynap- (3) Producteurs douleur, et la dynorphine, une endorphine. Dans tiques. Nous disposions donc bien d'un outil d'acétylcholine. le cas des neurones striatopallidaux, citons les autorisant une destruction sélective des neuro- gènes de l'enképhaline, une autre endorphine, du nes striatopallidaux.» (4) La toxine récepteur D2 à la dopamine et du récepteur A2A diphtérique est à l'adénosine. «Plusieurs équipes ont voulu se une exotoxine servir du promoteur du gène D2 pour cibler les Mon lieu préféré produite par le neurones striatopallidaux, mais cette technique Corynebacterium ne nous est pas apparue assez fine, explique L'étape suivante fut l'étude du comportement diphteriæ, Alban de Kerchove d'Exaerde. En effet, le récep- des souris transgéniques en réponse à la des- responsable teur D2 est également exprimé par les neurones truction de leurs neurones striatopallidaux, de la diphtérie, maladie qui fut une dopaminergiques qui se projettent sur les neuro- laquelle commence à s'opérer six à sept jours des causes majeures nes striatonigraux ou striatopallidaux, ce qui ne après l'injection de toxine diphtérique. Que de mortalité permet pas de distinguer l'implication présynap- constata-t-on ? Que les animaux privés de ces infantile jusque tique dopaminergique d'avec la partie postsynap- neurones devenaient hyperactifs sur le plan dans les années tique des neurones striatopallidaux.» De même, locomoteur. Il s'agissait là de la première 1930. Grâce à les interneurones cholinergiques (3) présents dans démonstration in vivo des prédictions du la vaccination le striatum à côté de ces deux catégories de neuro- modèle théorique en vigueur: les neurones stria- systématique, elle nes, mais en plus petit nombre, expriment eux topallidaux ont in fine, c'est-à-dire au terme a pratiquement aussi le récepteur D2 à la dopamine. d'une cascade de projections en aval impliquant disparu aujourd'hui plusieurs autres populations de neurones suc- des pays occidentaux. Pour éviter tout risque de se heurter à des fac- cessives, un effet inhibiteur sur l'activité loco- teurs confondants, les chercheurs de l'ULB motrice. D'où l'idée de possibles perspectives (5) La stéréotaxie choisirent de se concentrer sur le promoteur du thérapeutiques en médecine humaine dans le est une technique gène du récepteur A2A à l'adénosine. De fait, ce cadre de la maladie de Parkinson. Les patients de repérage fin récepteur est exprimé de façon quasi spécifique concernés ont un déficit de dopamine dans le des structures par les neurones striatopallidaux - on le retrou- système extrapyramidal, à la suite de la mort de intracrâniennes ve dans d'autres régions cérébrales, mais il y est ses neurones dopaminergiques. L'annihilation au moyen d'un beaucoup moins exprimé. de l'activité des neurones striatopallidaux, en dispositif placé aval, ne pourrait-elle les aider à se mouvoir plus à l'extérieur aisément ? La question mérite d'être posée. du crâne et Toxine diphtérique de coordonnées dans les trois Cela étant, la principale cible des travaux dimensions. En s'appuyant sur la technique de recombinai- d'Alban de Kerchove d'Exaerde et de Serge son homologue des BAC (Bacterial Artificial Schiffmann est l'assuétude aux drogues. Aussi, Chromosomes), qui permet d'insérer des gènes dans une étape ultérieure de leurs recherches dans d'importants fragments d'ADN géno- expérimentales, ont-ils détruit spécifiquement, mique, les équipes d'Alban de Kerchove dans leurs souris transgéniques, les neurones d'Exaerde et de Serge Schiffmann ont élaboré striatopallidaux du striatum ventral (noyau une souris transgénique qui, in fine, après croi- accumbens), structure étroitement associée, sement avec une autre souris transgénique, nous le savons, aux concepts de renforcement, exprime le récepteur de la toxine diphtérique (4) de récompense et, par là même, d'apprentissage. à la surface des seuls neurones striatopallidaux. Ils ont ensuite soumis ces animaux et des ani- Une injection stéréotaxique (5) de la toxine dans maux contrôles (normaux) à un «test de préfé- le cerveau de l'animal conduit alors à la des- rence de place» (Conditional Place Preference truction sélective desdits neurones. Test - CPP) après leur avoir administré de l'am-

79 Athena 254 / Octobre 2009 Neurobiologie

phétamine.«Pourquoi nouvelle fois au test de préférence de place. Il cette substance ? Parce apparut que les souris contrôles commençaient que l'effet moléculaire de à «oublier» leur préférence, contrairement aux l'amphétamine est parfai- souris sans neurones striatopallidaux, qui conti- tement connu: elle aug- nuaient à privilégier nettement le compartiment mente la libération de où leur avaient été administrées des amphéta- dopamine au niveau des mines. En résumé, non seulement les souris terminaisons des neuro- dépourvues de neurones striatopallidaux nes dopaminergiques qui avaient une préférence plus forte pour cet se projettent entre autres endroit, mais la mémoire de cette préférence se sur les neurones striato- révélait en outre de plus longue durée. pallidaux», précise notre interlocuteur. Ici encore, des perspectives thérapeutiques en médecine humaine pourraient se profiler à l'ho- Imaginons une boîte com- rizon. Il ne s'agirait plus d'inhiber les neurones portant deux comparti- striatopallidaux, comme on pourrait le conce- ments de taille identique voir dans la prise en charge de la maladie de auxquels des souris peu- Parkinson, mais, à l'inverse, de les stimuler vent accéder en emprun- chez les patients présentant une assuétude aux Neurones tant un petit couloir en plexiglas. Le premier drogues, des personnes ayant donc des excès de striatopallidaux compartiment est doté d'un sol lisse et de parois dopamine dans le striatum ventral après prise de exprimant la GFP verticales où alternent des lignes blanches et telles substances. Le but serait d'entraver leur (Green Fluorescent des lignes noires; le second est pourvu d'un sol addiction en diminuant l'effet «récompensant» Protein). rugueux et ses parois sont décorées de points de cette prise de drogue et la mémorisation de noirs sur un fond blanc. De la sorte, les souris cet effet, et de limiter ainsi les risques de peuvent les distinguer. Pour éviter tout biais rechute après sevrage. méthodologique, le pourcentage de blanc et de noir est égal dans les deux «pièces», car les (6) La mémoire souris manifestent un penchant pour les lieux À l'échelle des gènes déclarative est sombres. constituée Pour les neurobiologistes de l'ULB, l'explora- de connaissances explicites (épisodes Le premier jour de l'expérience, on laisse les tion continue. L'étape suivante de leurs recher- personnellement deux populations de souris (les souris contrôles, ches est génétique. En effet, au lieu de détruire vécus, à savoir celles qui ont toujours les neurones purement et simplement les neurones striatopal- connaissances striatopallidaux, et les souris sans neurones lidaux, ils s'attellent à présent à élaborer des générales sur striatopallidaux dans leur noyau accumbens) modèles de souris transgéniques knock-out le monde) que l'on déambuler librement dans les deux comparti- «population spécifique», où des gènes exprimés peut évoquer de ments sous l'œil d'une caméra vidéo. Au cours par ces neurones seront sélectivement inactivés façon conscience des jours 2, 4 et 6, elles reçoivent une injection à l'intérieur de ceux-ci et uniquement de ceux- sous la forme de drogue (amphétamine) dans le compartiment ci. Le but est double: mieux comprendre les de mots ou 1, par exemple celui où les parois sont zébrées mécanismes moléculaires mis en œuvre dans d'images. de noir et de blanc. les phénomènes révélés par le test de préférence (7) La mémoire de place et trouver, si faire se peut, de nouvelles procédurale est Les jours 3, 5 et 7, eux, sont réservés à une cibles thérapeutiques, parfaitement circonscri- impliquée dans injection de sérum physiologique, effectuée tes, pour la prise en charge des patients parkin- l'apprentissage dans l'autre compartiment. Qu'observe-t-on le soniens ou des personnes en proie à une assué- de nouvelles huitième jour, lorsqu’aucune injection n'est pra- tude aux drogues. habiletés tiquée et qu'on laisse à nouveau les rongeurs se perceptives, promener librement entre les deux comparti- «Deux des gènes qui nous intéressent sont motrices ou ments ? Si les souris contrôles, c’est à dire sans impliqués dans la plasticité synaptique, cognitives. perte de neurones striatopallidaux, passent plus explique Alban de Kerchove d'Exaerde. Celle- Difficilement de temps dans le compartiment où de la drogue ci est potentiellement un des mécanismes molé- accessibles à la verbalisation, leur a été administrée les jours précédents, les culaires de la mémorisation, tant en mémoire les connaissances souris dépourvues de neurones striatopallidaux déclarative (6) (hippocampe) qu'en mémoire qui y sont stockées y séjournent encore bien davantage. «Conclu- procédure (7) (striatum). Elle sous-tend donc reposeraient sur sion: ces souris ont une préférence plus affir- l'apprentissage et le renforcement des compor- des apprentissages mée pour l'endroit où elles reçoivent de la dro- tements. De ce fait, elle peut baliser la voie ne pouvant gue», indique Alban de Kerchove d'Exaerde. conduisant aux assuétudes.» s'acquérir que par l'action. L'expérience n'était pas terminée pour autant. Les animaux furent remis dans leur cage habi- Philippe LAMBERT tuelle durant cinq jours; ensuite, soumis une [email protected]

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De l'intérêt des atomes froids...

Lorsque des particules atteignent des vitesses proches de celle de la lumière, elles deviennent relativistes. C'est ce qui se passe dans les grands accélérateurs comme le LHC (Grand collisionneur de hadrons - Voir Athena n° 229, pp. 352 et 353). Peut-on simuler de tels systèmes en laboratoire ? Oui, grâce aux atomes froids. Plongeons, avec Nathan Goldman, de l'Université libre de Bruxelles (ULB), dans le monde de la physique statistique quantique

es travaux de Nathan Goldman, cher- les effets quantiques. Les particules d'une cheur au service des systèmes complexes boisson contenue dans une bouteille sont L et de mécanique statistique, de l’ULB, quantiques, mais l'ensemble ne l'est évidem- (photo ci-contre) s'inscrivent dans le champ de la ment pas», rappelle Nathan mécanique statistique quantique. L'idée générale Goldman. est de pouvoir observer, à l'échelle macrosco- pique, quasiment à l'œil nu, des phénomènes Mais que faut-il faire pour qu'on appelle quantiques et qui diffèrent radica- avoir des effets quantiques au lement des comportements observés dans la vie niveau macroscopique ? Il de tous les jours. Ces phénomènes exotiques sont faut quitter les environne- dits quantiques car ils sont décrits par la méca- ments traditionnels, par exem- nique quantique, contrairement aux systèmes ple la température ambiante. physiques habituels où les effets sont compris sur Quand on descend à très basse base de la théorie classique newtonienne. température, proche du zéro L’apparition d’effets quantiques à grande échelle absolu, les effets quantiques peut paraître étonnante à première vue, puisque ne sont plus lissés. Il est dès la mécanique quantique a justement été intro- lors possible de les observer duite pour pouvoir rendre compte des à l'échelle macroscopique phénomènes microscopiques ! «C'est pour cela, s'enthou- siasme Nathan Goldman, Cette physique est dite statistique car les qu'on s'intéresse à la physique chercheurs y étudient un grand nombre de des atomes froids ou des très particules puis utilisent tous les outils de la basses températures.» statistique (moyennes, variantes, etc.) pour caractériser un système entier. «On ne va plus s'intéresser, explique Nathan Goldman, à la posi- Piège à atomes tion exacte d'une particule dans le temps, par exemple, comme en mécanique classique, mais à Pour comprendre les résultats obtenus par la position moyenne dans le temps ou à l'énergie Nathan Goldman et les physiciens qui ont tra- moyenne du système. Et toutes ces moyennes vaillé avec lui - Maciej Lewenstein (Barcelone) vont permettre d'étudier les grandeurs macro- et Miguel A. Martin-Delgado (Madrid) -, ce qui (1) Non-Abelian scopiques alors qu'au départ la description des leur vaut aujourd'hui d'être publiés dans optical lattices: particules est bien microscopique.» Physical Review Letters (1), il faut dire un mot Anomalous de travaux plus anciens. quantum Hall effect Cette physique est aussi dite quantique parce and Dirac fermions qu'elle considère que les particules qui compo- Pour refroidir les atomes, il faut les piéger, les N. Goldman et al., sent un système, un gaz par exemple, sont immobiliser. Une fois piégés, ils sont refroidis Phys. Rev. Lett. 103, 035301 décrites par la mécanique quantique. «Dans les et réciproquement, pourrait-on dire, puisque les (2009). environnements habituels, il n'est pas néces- deux opérations sont concomitantes: en pié- saire de regarder la description quantique d'un geant les atomes, ils se refroidissent et en les système car en faisant la moyenne, on lisse tous refroidissant, on les piège. L'intérêt de ces piè-

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ges est qu'ils créent des réseaux. Ainsi, le sys- pour les piéger. Avec deux jeux de lasers croisés, tème utilisé par Nathan Goldman et ses il sera possible de créer un réseau, chaque laser collègues est constitué de nombreux petits piè- piégeant dans une direction. ges qui, ensemble, forment une structure pério- dique, comme un emballage d'œufs (voir le schéma ci-dessous). Si vous jetez des petites Les particules élémentaires billes sur un tel emballage, elles vont se répartir dans les petits trous, qui seront autant de pièges Les premiers travaux effectués dans ce domaine pour elles. C'est ce qui se passe avec les atomes. (voici plus de dix ans déjà) ont permis d'étudier avec une grande précision, des systèmes- Un tel système est un réseau puisque c'est une réseaux difficiles à examiner d'une autre façon: structure périodique. Et il est optique puisque les systèmes électroniques, les métaux. Un c'est grâce à la lumière - des lasers - qu'on va métal, c'est un réseau d'atomes et d’électrons pouvoir créer les bassins d'attractions, les qui se baladent d'un atome à l'autre. La repro- «creux». En effet, les atomes réagissent avec la duction de ce système en laboratoire, grâce à lumière. Celle-ci permet de les exciter ou les dés- des atomes froids piégés en réseau, a permis de Piège exciter, c'est-à-dire les faire passer dans des mieux comprendre ce qu'est un isolant, un à atomes niveaux d'énergie plus élevés ou plus bas. Quand semi-conducteur, et aujourd'hui ce qu'est un en forme on plonge le gaz d'atomes à refroidir dans une supraconducteur. «Pouvoir étudier comment d'emballage lumière très particulière, le laser monochroma- des particules se déplacent sur un réseau avec à œufs. tique, on peut les exciter de manière très précise un système simple, qu'on arrive à manipuler avec une grande précision en laboratoire, a été important, explique Nathan Goldman. Aujour- d'hui, beaucoup de propriétés électroniques sont simulées en laboratoire grâce aux systèmes d'atomes froids, notamment les transitions entre phase conductrice et phase isolante.»

Depuis 4-5 ans, les physiciens essaient de simuler davantage que des métaux: ils tentent de reproduire la dynamique des particules élémentaires étudiées en physique des hautes énergies. Ce qui nécessite de simuler la présence de champs de jauge non-abéliens sur des particules neutres… Le modèle standard unifie toutes les forces fondamentales sauf la gravitation. Mais il demande encore à être validé d'où, notamment, les expériences qui ont lieu dans le LHC. Il faut confirmer l'existence L'effet Hall quantique d'un certain nombre d'ingrédients qui ont été postulés dans le cadre du modèle, et notamment 'effet Hall quantique est la généralisation quantique de l'effet Hall. L'effet Hall, celle des champs de jauge non-abéliens. du nom du physicien américain (1855-1938) qui l'a découvert en 1879, est un phé- L nomène physique simple à observer: lorsqu'on soumet un conducteur à un champ Le champ magnétique est un cas particulier magnétique, le champ dévie les électrons et une différence de potentiel apparaît dans d'une famille générale de champs, les champs la direction perpendiculaire au courant et au champ. La mesure de cette différence de de jauge. Et le champ magnétique est abélien, potentiel transverse fournit ce qu'on appelle la résistance de Hall, qui est devenue une c'est-à-dire que la structure mathématique sous- caractéristique des matériaux. jacente satisfait à la loi de commutation (ab = ba); les autres types de champs sont non- À notre échelle, les valeurs de cette résistance en fonction du champ magnétique abéliens. Or dans la théorie qui décrit les s'inscrivent sur une droite parfaite. Mais dans le monde quantique, aux très basses quarks, ces particules interagissent les unes températures et lorsque le champ magnétique est très élevé, ces valeurs se regroupent avec les autres grâce aux gluons, particules par paliers. C'est l'effet Hall quantique. Notons que ces paliers apparaissent à des médiatrices qui sont associées à des champs de valeurs précises de résistance, quel que soit le matériau utilisé. La résistivité de Hall est jauge non-abéliens. Autrement dit, si l'on donnée par h/ne² où e est la charge de l'électron et h la constante de Planck; n prend s'intéresse à la dynamique des quarks et qu'on différentes valeurs qui correspondent aux différents plateaux. C'est ce qui explique la n'a pas envie d'accélérer des protons et des anti- robustesse des paliers, peu importent la géométrie du matériau, la présence ou non protons dans d'énormes machines comme le d'impuretés, etc. L'effet est dit effet Hall quantique entier lorsque n est un entier, LHC, une alternative consiste à simuler la fractionnaire dans le cas contraire. Dans le graphène, l’existence de cônes de Dirac présence de champs non-abéliens dans un modifie de façon considérable l’effet Hall quantique, ce qui lui vaut l’adjectif anormal système d'atomes froids ! Les atomes reprodui- dans ce contexte. sent alors la dynamique des quarks et simulent ainsi un ingrédient fondamental du modèle

Athena 254 / Octobre 2009 82 Info-Physique standard. La réalisation d'un tel système concré- tise l’intuition magistrale du grand physicien Richard Feynman qui avait émis l'idée qu'un jour on simulerait un système quantique avec un autre système quantique plutôt que d'utiliser un ordinateur puissant.

La première étape a consisté à simuler l'effet d'un champ magnétique sur des particules neutres. Normal puisque le champ magnétique appartient bien à la grande famille des champs de jauge. L'ennui, c'est qu'il s'agit ici de particules neutres, d'atomes et plus d'électrons comme dans le cas du métal étudié précé- demment. L'électron est une particule chargée, donc il est facile de lui appliquer un champ et d'en simuler les effets: ils se mettent à tourner sous l'impulsion de la force dite de Lorentz. Schrödinger - les fonctions d'onde qui décrivent Représentation les objets quantiques - mais vérifiant en plus les des cônes Mais des atomes ou des particules neutres contraintes «imposées» par Einstein dans le de Dirac. peuvent aussi ressentir la présence d'un champ. cadre de la relativité restreinte. «Une première réalisation expérimentale a vu le jour cette année, explique Nathan Goldman. Autrement dit, l'équation de Dirac permet de Des physiciens ont repéré des signatures de décrire des particules non seulement quantiques présence de champ magnétique artificiel. Ce mais aussi relativistes, comme elles le sont par n'est pas un vrai champ, c'est un dispositif qui exemple dans les accélérateurs lorsqu'elles simule la présence d'un champ.» Comment atteignent des vitesses très proches de celle de faire croire aux particules qu'elles sont soumi- la lumière. «Cette équation est importante, ses à un champ magnétique ? À nouveau grâce poursuit Nathan Goldman, puisqu'elle décrit le à des lasers, pas ceux qui créent le réseau monde des particules. Nous avons pu montrer optique, mais des lasers supplémentaires qui, que dans notre système, les particules a priori dans la façon dont ils vont interagir avec les décrites par l'équation de Schrödinger, tout particules, vont les affecter de la même manière d'un coup, rentrent dans un régime où elles sont qu'un champ magnétique affecte les électrons. décrites par des équations de type Dirac. Cela se produit pour une configuration particulière Pour en du système. Cela veut dire qu'on dispose en savoir plus: Champ de jauge non-abélien laboratoire d'un système qui reproduit bien la physique relativiste, celle qu'on essaie d'étudier Nathan Goldman, Deuxième étape: simuler cette fois un champ de dans les accélérateurs de particules: on peut Nonlinear Physics and jauge non-abélien. Il a été possible de générali- reproduire la physique de type Dirac avec des Statistical Mechanics, ser les propositions théoriques qui permettaient atomes froids !». campus Plaine - CP 231, de simuler un champ magnétique pour simuler ULB - 1050 Bruxelles des champs non-abéliens dans le système des L'équipe de Nathan Goldman a été plus loin Téléphone: atomes froids. De cette façon, les atomes froids encore, modélisant un phénomène particulier 02/650.57.97. ne signifient plus des électrons dans un champ dans le graphène: l'effet Hall quantique anor- électromagnétique, mais ils décrivent des mal. Le graphène est ce matériau constitué de [email protected] quarks soumis à des champs non-abéliens. feuilles de carbone à deux dimensions qui por- tent des réseaux hexagonaux. Quand on les http://homepages. Cette simulation a déjà porté ses fruits: on entre replie sur elles-mêmes, on obtient les célèbres ulb.ac.be/~ngoldman/ ici au cœur même des travaux de Nathan nanotubes de carbone. On sait qu'un grand Goldman. Lui et les autres signataires de l'article nombre de phénomènes de conduction qui se qui vient d'être publié ont observé que dans une produisent dans le graphène sont expliqués par configuration particulière du système d'atomes des équations de type Dirac. C'est le cas froids soumis à un champ non-abélien, apparais- notamment de l'effet Hall quantique anormal sent des cônes de Dirac. La présence de ces (voir encadré de la p. 82). Nathan Goldman a cônes dans des spectres d'énergie signifie que le mis en évidence que son système d'atomes système se comporte comme les systèmes de froids présentait un effet Hall quantique anor- particules décrits par l'équation de Dirac. mal dans ce type de matériau, effet qu’il étudie sur base de la théorie relativiste sous-jacente. Dès 1928, le physicien anglais Paul Dirac pro- posait une équation décrivant des particules Henri DUPUIS normalement représentées par les équations de [email protected]

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Répertorier le savoir

Nous consacrons énormément de temps à ranger, son tour taguer des photos - même si elles ne lui d'abord parce que le désordre est généralement appartiennent pas - et les rassembler dans des contre-productif, ensuite parce qu’il a mauvaise albums virtuels. réputation. Or, cette bataille permanente est inutile Résoudre le problème de la surabondance des dans le monde digital. Comment change-t-il notre photos ne sera possible qu'en y ajoutant de regard sur le classement ? C'est l'objet de la seconde l'information. En d'autres termes, la solution à partie de ce dossier (voir Athena n° 253, pp. 25-28) ce problème passe par de l'information supplé- mentaire. ’endroit où sont stockées les photos digitales contient probablement plus de L mille photos prises en quelques années Une autre manière de classer avec un nouvel appareil numérique. Et la situa- tion va inévitablement s'aggraver. Les premiers Dans le monde physique, nous faisons d'ailleurs appareils sont apparus vers 2003 et ont commen- la même chose: nous collons des étiquettes sur cé à se répandre dans le monde en 2004. Cette les bocaux de confiture ou nous surlignons année-là, 150 millions de téléphones portables certains passages d'un rapport. Mais ce monde équipés d'une caméra ont été vendus, soit limite le volume d'informations que nous environ quatre fois le nombre d'appareils photos pourrions ajouter: il ne faut pas que l'étiquette numériques. Leur coût étant masque le dossier sur l'étagère. Et si nous quasi nul, nous sommes surlignons l'ensemble d’un texte, nous perdons tentés de prendre de plus en tout le bénéfice du travail. Dans le monde plus de photos, espérant digital, cette limitation disparaît. Notre ordina- simplement que l'une d'entre teur peut contenir plus d'informations décrivant elles sera réussie. un dossier que d'informations contenues dans ce dossier. Et si un texte numérisé a déjà été Les photos sont automatique- surligné par des dizaines de lecteurs, l'ordi- ment affublées d'un nom du nateur peut nous dire très facilement quels pas- genre DSC00426.jpg. Qu’il y sages ils ont surligné, à quelle date ou pro- ait deux, cinq ou vingt mille venant de quel pays. photos sur votre disque dur, celle de votre jardin portant la Tout ceci modifie profondément notre manière référence DSC00426.jpg est de classer l'information. Une photo représentant virtuellement perdue car cel- Amandine et Sébastien, jouant au ballon sur la le-ci ne vous dit évidemment plage de Blankenberge en 1997, avec une plan- rien et vous ne la retrouverez che à voile à l'arrière plan, peut être désormais plus. indifféremment classée selon toute une série de critères: photo des enfants, d'Amandine, de Neil Armstrong, Le nombre de photos numériques - pour ne parler Sébastien, de 1997, de plage, de Blankenberge, le premier homme que d'elles - augmente presqu’à notre insu. La de ballon, de planche à voile, mais également marchant technologie nous permettra-t-elle un jour d'iden- taguée par des mots tels que vacances, sports, sur la Lune. tifier automatiquement où a été prise telle photo jeux, etc. Nous pourrons alors demander à C’était il y a et qui y figure dessus ? Leur classement devien- l'ordinateur de sortir toutes les photos sur quaranate ans déjà ! dra-t-il une activité sociale ? Ce phénomène se lesquelles figurent les deux enfants, mais uni- (Photo Nasa). développe sur un site de partage de photos quement celles qui ont été prises en 1997. comme Flickr (http://www.flickr.com/). Sur ce site «collaboratif», né du Web 2.0, chacun peut Le monde digital permet ainsi de dépasser la déposer ses photos et les taguer (c'est-à-dire y règle fondamentale de tout classement dans le associer des tags, des labels) pour les retrouver monde physique: chaque chose occupe simulta- plus facilement. De plus, chaque visiteur peut à nément plusieurs places. Un album photos digi-

Athena 254 / Octobre 2009 84 Internet tal est constitué comme une liste de lecture de le but de construire une immense photothèque morceaux de musique dans un iPod: un simple numérique à but commercial moyen de récupérer un assemblage particulier (http://fr.wikipedia.org/wiki/Bettmann_Archive). d'éléments. Une photo peut se retrouver dans des centaines d'albums pour un coût virtuellement En 2001, Bill Gates loue 90 camions nul. Par contre, le monde physique impose des pour transporter la collection de choix permanents. Si l’on crée un album photos Manhattan vers une grotte calcaire, à à l'occasion d’un anniversaire de mariage, certai- une profondeur de 70 m, au centre de nes devront être sélectionnées. Cet album consti- la Pennsylvanie où elles seront dé- tuera une sorte de référence et entraînera inévita- sormais à l'abri. Les 11 millions de blement un choix dans la mémoire familiale en photos et de négatifs sont rangés par faisant ressurgir certaines d’entres elles. Le tri ordre chronologique. dans le monde physique provoque toujours une hiérarchisation des éléments. Dans le premier type de classement sont rangés les objets eux-mêmes, les Mais il serait faux de croire que ces change- livres sur des étagères, les photos ments n'affectent que notre vie privée. De dans des albums. Mais la Bettmann nombreuses institutions - les bibliothèques Archive comporte un second type de nationales par exemple - sont chargées de classement: dans une pièce attenante maintenir un classement dans notre mémoire. se trouve un catalogue de fiches La bibliothèque du Congrès, à Washington, aux contenant des informations sur cha- États-Unis, possède environ 142 millions cune des 11 millions de photos. Ce d'éléments (livres, gravures, documents divers), catalogue sépare donc l'information sur l'objet Albert Einstein disposés sur plus de 1 000 km de rayons. de l'objet lui-même. Les fiches sont rangées (1879-1955) Chaque jour, elle reçoit 22 000 nouveaux par ordre alphabétique et par sujet, permettant tirant la éléments et en conserve environ 10 000 par exemple de trouver toutes les photos de langue. (http://www.loc.gov/about/facts.html). Les nouveaux soldats. Un code sur chaque fiche du catalogue livres sont rapidement triés par thèmes et placés renvoie vers l'endroit physique où se trouve dans des caisses envoyées ensuite à 300 ou 400 une photo. personnes représentant 80 spécialités, chargées de les examiner un par un et de les classer dans Ce type de classement du deuxième ordre une des 285 000 catégories. Tout cela pour évi- fonctionne, mais il coûte extrêmement cher et la ter que le savoir s'embrouille... recherche est lente. Car c'est précisément là que se situe la faiblesse du second type de classe- ment: toute l'information concernant l'objet Plusieurs types de rangement n'est pas enregistrée.

Fondée en 1936 par Otto Bettmann (1903- Imaginons une photo représentant des soldats 1998), la Bettmann Archive est une banque de durant la Guerre de Sécession: ils sont assis photographies et d'images, certaines remontant devant un feu, prennent leur repas et bavardent. Ceux qui à la période de la Guerre de Sécession (1861- La fiche correspondante comportera certaine- contrôlaient 1865) et comprenant des images historiques les ment les mots-clés «soldats», «guerre civile», l'organisation plus célèbres de l'histoire des États-Unis, mais mais sans doute pas d’informations sur le lieu de l'information aussi provenant du monde entier. où la photo a été prise, ni les mots-clés «repas», avaient ainsi plus «feu de camp», «uniformes», etc. Cela signifie de pouvoir que En 1981, lorsque Otto Bettmann la vend à la que pour rechercher une photo montrant des ceux qui la créaient. Kraus-Thomson Organization, la collection est soldats de la guerre civile prenant un repas Les éditeurs sont plus composée de 5 millions de photos, tirages, dehors autour d'un feu, il sera nécessaire de pas- puissants que posters, gravures et autres supports graphiques ser en revue des milliers de photos. Et si cette les reporters. La façon dont tous retraçant l'histoire du XXe siècle. En 1990, information manquante était ajoutée aux fiches, Kraus-Thomson achète 11,5 millions d'images, c'est le stockage de celles-ci qui créerait un nou- les obscurantismes la plupart provenant de la United Press Inter- veau problème. tentent de gérer national et de Reuters. Nombreuses d'entre elles l'accès au savoir sont célèbres comme celle de Winston Churchill La difficulté des deux premiers types de classe- leur permet de faisant le V de la victoire, un astronaute sur la ment est qu'ils rangent des atomes. Ces atomes disposer du pouvoir Lune, Albert Einstein tirant la langue, ou encore occupent de l'espace. Une grande collection de de le diffuser des ouvriers assis sur une poutrelle suspendue photographies oblige à créer un volumineux ou non. dans les airs, Marilyn Monroe retenant sa robe catalogue pour nous permettre de retrouver une au-dessus d'une bouche de métro. photo bien précise. Et de plus, un élément constitué d'atomes ne peut se trouver qu'à un En 1995, les archives sont revendues à Corbis, endroit à la fois. Il faut donc décider où classer une banque d'images créée par Bill Gates dans la photo «des soldats assis autour du feu».

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Tout change dans le monde numérique car le d'espèces) en seulement deux catégories: les contenu des photos est digitalisé sous forme de insectes et les «vers» (vermes en latin), une bits et l'information les concernant également. sorte de masse indifférenciée où Linné a tout C'est le troisième type de classement. Le mélangé, les vers de terre et les méduses. C'est monde digital ignore par exemple la limitation Lamarck qui a corrigé la taxinomie de Linné en de la taille des étiquettes. Et une librairie en classant beaucoup plus précisément les «vers». ligne comme Amazon (http://www.amazon.fr) peut Que chacun classe selon ses besoins. Linné, ajouter autant d'informations qu'elle le souhaite Lamarck ou un pêcheur à la ligne portent néces- à un livre: un résumé, une bibliographie, une sairement un regard différent sur les vers. biographie de l'auteur, des évaluations de lec- teurs, des commentaires, etc. Pour comprendre un classement, nous avons besoin de métadonnées. Soyons conscients que Ce classement porte le nom de métadonnées, les limitations physiques du classement des élé- c'est-à-dire d'informations sur l'information. Ce ments ne se bornent pas qu’à notre vision du type de classement d'une collection n'autorise sa monde. Ceux qui contrôlaient l'organisation de consultation que par des experts. Corbis, la l'information avaient ainsi plus de pouvoir que banque d'images de Bill Gates, a réalisé un clas- ceux qui la créaient. Les éditeurs sont plus sement du troisième type de la collection puissants que les reporters. La façon dont tous Bettmann qui est désormais consultable par tout les obscurantismes tentent de gérer l'accès au le monde. Corbis a numérisé toutes les images, savoir leur permet de disposer du pouvoir de le les rendant ainsi insensibles au temps qui passe. diffuser ou non.

Rappelons-nous la fameuse «encyclopédie chi- C'est vrai dans le premier et le second type de noise» citée par Borgès selon laquelle «les classement. Dans le troisième, c'est beaucoup animaux se divisent en: a) appartenant à plus compliqué. On comprend dès lors beau- l’Empereur, b) embaumés, c) apprivoisés, d) coup mieux pourquoi certains régimes interdi- cochons de lait, e) sirènes, f) fabuleux, g) chiens sent l'accès à Internet (Corée du Nord) ou le en liberté, h) inclus dans la présente classifica- contrôlent (Cuba, Tunisie, Chine). Les deux tion, i) qui s’agitent comme des fous, j) innom- premiers types sont une lutte pour le pouvoir brables, k) dessinés avec un pinceau très fin en car il s'agit d'imposer un choix, il doit y avoir un poils de chameau, l) et cætera, m) qui viennent vainqueur. Le troisième libère le territoire de casser la cruche, n) qui de loin semblent des emprisonné dans le classement. Plutôt que de mouches». faire entrer des éléments au chausse-pied dans des catégories, il les tague. Ce qui permet à l'utilisateur d'ajouter quelques mots-clés sur un Un regard différent élément (page Web, photo) pour le retrouver plus tard. C'est ce que font les systèmes En bons Occidentaux, nous éprouvons une sociaux de signets (social bookmarking) certaine difficulté à comprendre la logique de ce comme Delicious (http://delicious.com/) ou Diigo classement qui échappe à tout ce que nous (http://www.diigo.com/). connaissons. Une page sur Namur peut être taguée «Namur», Face à une telle hétérogénéité - mais en est-ce «Namen», «ville», «Wallonie», etc. selon les réellement une ?-, nous sommes immédiate- besoins, la sensibilité et les envies de chaque ment enclins à nous demander si l'auteur a uti- visiteur. Les anciens systèmes de gestion de lisé suffisamment d'informations. Si je range signets obligeaient à créer des catégories pour y dans une même catégorie les grands ducs placer des pages Web qu'on ne retrouvait plus au d'Europe et les baleines, je dois ajouter comme bout de quelques jours. Gmail - le génial information que tous deux sont des espèces système de messagerie en ligne de Google - a menacées, c'est ce qui les unit. Mais si je les également adopté les tags pour classer les range dans une catégorie «divers» avec les cri- messages. quets et les sauterelles, je perds ce lien; notons au passage le remarquable projet de répertorisa- Voilà comment le désordre libère notre travail et tion du monde vivant entrepris par Wikispecies d'une certaine manière notre liberté de penser. (http://species.wikimedia.org).

Ainsi pouvons-nous être légitimement surpris Christian VANDEN BERGHEN lorsque Linné (voir Athena n° 228, p. 266) [email protected] classe les animaux en deux catégories aussi dés- http://www.brainsfeed.com/ équilibrées que les vertébrés et les invertébrés. Il divise les vertébrés (40 000 espèces) en qua- tre sous-catégories et les invertébrés (1 million

Athena 254 / Octobre 2009 86 LL’’aavviioonn ppoollyymmèèrree

La taille d’un Airbus, le poids d’une voiture de tourisme, la puissance d’un scooter. Et, surtout, la force d’une vision: voler jour et nuit sans carburant ni pollution. Un défi suisse… et belge par l’apport technologique du groupe Solvay. Si le projet est futuriste, la plupart des matériaux utilisés existent déjà sur le marché

ême s’il a l’envergure d’un A340, le Wright en 1903 lorsqu’ils ont réalisé le premier Solar Impulse n’a pas d’ambition vol motorisé. Et c’est avec cette énergie-là, M commerciale; il ne remplacera jamais optimisée du panneau solaire à l’hélice par le nos Airbus et autres Boeing. Le projet n’est pas travail de toute une équipe, que Solar Impulse davantage sportif: le défi n’est pas de signer un ambitionne de voler jour et nuit sans carburant ! Quelque nouveau record en faisant le tour du monde avec 11 628 cellules la seule énergie solaire. En revanche, ses promo- Le problème, ce sont les batteries. Par nature, solaires très teurs - les Suisses Bertrand Piccard et André elles pèsent lourd. Avec une densité énergétique exactement Borschberg - sont bien décidés à repousser les légèrement supérieure à 200 Wh/kg, la masse recouvrent limites de l'impossible à l’instar, en leur temps, d’accumulateurs de type lithium-polymère la surface de Blériot ou des frères Wright. Objectif: réaliser nécessaire pour un vol de nuit se monte à 400 des ailes en 2012 le tour du monde, en étapes, avec un kg, soit plus du quart de la masse totale de de Solar Impulse. avion habité, mû uniquement par l’énergie tl’avion. Conséquence: il a fallu réduire le poids Ce sont elles qui solaire, à l’exclusion de toute autre source du reste de l’avion, optimiser toute la chaîne produisent l’énergie d’énergie, sans aucune émission polluante. énergétique et maximiser le rendement aérody- pour faire voler Premier décollage dans les semaines à venir. namique par un grand allongement et un profil l’avion de jour… d’aile conçu pour les basses vitesses, moins et de nuit. D’emblée, c’est la taille de l’avion qui suscite la gourmandes en énergie. Tout l’enjeu a été fascination: 63,4 mètres ! Soit encore 200 m2 de de les fixer et cellules photovoltaïques - en réalité, 12 000 cel- Ces batteries fourniront l’énergie pour voler. de les protéger. lules en place en silicium monocristallin de 130 Chacune - constituée de 70 accumulateurs et Des films plastiques spéciaux à hautes microns d’épaisseur… C’est gigantesque. Et, en d’un système de gestion contrôlant le seuil de performances même temps, à peine suffisant pour faire voler charge et de température - actionne un moteur. ont été utilisés. l’engin. Chaque moteur a une puissance de pointe de

Optimiser les énergies

On s’en doute, la question énergétique condi- tionne l’ensemble du projet, des dimensions de la structure aux contraintes extrêmes de masse. À midi, chaque m2 de surface terrestre reçoit l’équivalent de 1 000 Watts, soit 1,3 CV de puissance lumineuse. Répartie sur 24 heures, l’énergie du Soleil ne fournit qu’une moyenne de 250 W/m2. Avec 200 m2 de cellules photo- voltaïques et 12% de rendement total de la chaîne de propulsion, la puissance moyenne produite par les moteurs de l’avion n’atteint plus que 8 CV ou 6 kW.

Les batteries, un quart du poids total, c’est à peu de choses près ce dont disposaient les frères

87 Athena 254 / Octobre 2009 Technologie Oublié le métal, remisé le titane !

olvay apporte au total 6 000 pièces du sous forme de pièces sous capots moteur ou Solar Impulse, 12 produits et 15 applica- dans l’habitacle, dans nos appareils portables S tions. Dans tous les domaines: pour allé- (téléphones, ordinateurs), dans les avions et ger l’avion, pour accroître son efficience éner- dans de nombreuses applications de sécurité. gétique, pour renforcer l’isolation, pour tester la Ces matières participent ainsi à la réduction de résistance des pièces… poids extrêmement importante pour limiter la consommation d’énergie. Si la plupart des matériaux utilisés sont déjà commercialisés, certains ont été optimisés. L’objectif a été de remettre en question l’utili- Exemple, l’encapsulation des cellules photovol- sation du métal, ce qui devait permettre de taïques. Assemblées par plaques de 3 m², les réduire le poids d’un certain nombre de compo- cellules en silicium monocristallin de sants. Plusieurs applications furent détectées et l’Américain Sun Power (au rendement de 22%) analysées. L’une d’entre elles concerne les Cette libellule ont été emprisonnées dans des couches plas- coussinets et les manchons entre pièces en mou- géante, d’une tiques développées par Solvay. Ce sont elles qui vement l’une par rapport à l’autre. En aéronau- envergure encaissent les déformations. Restait à tester tique, on utilise généralement du titane, dont la de 63,40 m et cette solution. La validation s’est déroulée au densité est de 4,5 gr/cm3; avec des matériaux d’un poids sol, toujours chez Solvay. Une masse de 5 ton- comme le Torlon 4435 ou le Ketaspire KT 820 de 1 600 kg, nes a été répartie sur ses ailes pour simuler une SL30, on atteint un niveau de densité de 1,59 est mû par accélération de 3g. gr/cm3 pour le premier et 1,45 gr/cm3 pour le quatre moteurs second. d’une puissance variant entre Alléger les composants Le partenariat technologique de Solvay, avec 4 et 10 CV Solar Impulse, qui couvre les domaines de la maximum. Solvay Advanced Polymers possède, à l’échelle chimie et des plastiques, se matérialise dans: Ses batteries mondiale, une gamme unique de matières plas- représentent la recherche de solutions et de matériaux à elles seules tiques à hautes performances, utilisées notam- optimaux, notamment par la définition de un quart ment dans des applications de remplacement matériaux de structure hybride; des métaux. Ces produits offrant des résistances du poids total. la production et/ou sélection de polymères à chimiques en milieu agressif, ou encore ayant Le stockage hautes performances destinés à des applica- des propriétés de frottement remarquables, sans de l’énergie a été tions critiques (joints d’étanchéité, lubrifica- être visibles, sont présents dans la vie courante le plus grand défi. tion); les méthodes d’encapsulation et d’assem- blage de cellules photovoltaïques avec le matériau de structure sélectionné pour l’avion; la recherche concernant la production et l’utilisation de matériaux photovoltaïques adéquats; la recherche concernant les batteries répon- dant aux besoins du projet; la sélection de matériaux d’isolation ther- mique haute performance; la modélisation technique et simulation avec des logiciels adaptés particulièrement aux pièces de grande taille et aux conditions extrêmes et l’évaluation mécanique et des tests de maté- riaux en conditions extrêmes.

Athena 254 / Octobre 2009 88 Technologie

10 CV et est muni d’un réducteur limitant à 200-400 tours/minute la rotation d’une hélice bipale de 3,5 mètres de diamètre. L’avion doit être capable de voler à des vitesses aussi rédui- Ambassadeur du futur tes que 45 km/h (au sol) en vol de nuit où l’économie d’énergie sera vitale, tandis que sa De nouvelles cellules solaires offrant un meilleur rapport efficacité-poids, des systè- vitesse moyenne de croisière sera de l’ordre de mes intelligents de gestion d'énergie, des matériaux aussi légers que résistants, un 75 km/h. système de stockage des plus performants… Si l’énergie solaire est au cœur du projet, le défi Les solutions développées pour l'avion solaire trouveront d'autres applications a été de gérer et d’optimiser tout à la fois notamment dans la médecine ou dans la construction, où efficacité et fiabilité sont l’énergie lumineuse dans le rayonnement des facteurs déterminants. solaire, l’énergie électrique au niveau des cellu- les photovoltaïques, des batteries et des Solar Impulse est à ce titre une formidable plate-forme éducative, dont l'impor- moteurs, l’énergie chimique dans les batteries, tance culminera pendant les missions. Lors de chaque vol, à partir de 2010, le pilote mais aussi l’énergie mécanique via le système et l'équipe seront en contact avec le public. De plus, en faisant une escale sur chaque de propulsion, l’énergie cinétique lorsque continent, ils iront à la rencontre des autorités et des populations locales afin de l’avion prend de la vitesse, l’énergie thermique promouvoir les technologies indispensables pour assurer l'avenir énergétique de la pour toutes les pertes (frottement, échauffe- planète. ment) que l’on cherche à minimiser à tout prix. Le projet a valeur de symbole. De fait, sur Terre, nous sommes tous dans la situation du pilote de Solar Impulse. Si ce dernier n'a pas les bonnes technologies ou gaspille Une «peau» de cellules son énergie, il devra atterrir avant que le lever de soleil ne lui permette de poursui- vre son vol. Si nous n'investissons pas dans les moyens scientifiques pour permettre Dans un avion, tout est équilibre, tout est com- de développer de nouvelles sources d'énergie, nous nous trouverons face à une crise promis. Le Solar Impulse pourrait être plus majeure, qui nous empêchera de transmettre la planète à la génération suivante. puissant, mais il serait alors plus lourd. Ses promoteurs l’ont conçu autour d’une ossature en matériaux composites constitués de fibres de carbone et de nids d’abeilles assemblés en sand- wich. L’aile est recouverte sur l’intrados (partie inférieure) d’un film flexible et, sur l’extrados Un même effort d’optimisation poids-efficacité (partie supérieure), d’une «peau» composée de a été réalisé en matière de matériaux d’isola- cellules solaires encapsulées dans un film en tion, nécessaires pour que le pilote et certains polymère fluoré, appelé à les protéger et à composants tels que batteries et modules maintenir leur rendement dans les conditions électroniques puissent affronter les températu- les plus extrêmes rencontrées en vol, sans pré- res extrêmes (- 40 °C à + 60 °C) en vol, notam- senter de dégradations suite à l’exposition aux ment par l’utilisation de gaz fluoré dernière rayons UV. Quelque 120 nervures en fibres de génération pour le moussage de résines PUR. carbone, réparties tous les 50 cm, profilent ces C’est ainsi que toute la face avant du cockpit, deux couches pour donner à l’ensemble sa protégeant le pilote, est accrochée à la structure forme aérodynamique. et est constituée d’une mousse de résine très Pour en légère, peu épaisse, mais présentant cependant savoir plus: Atteindre 61 m d’envergure pour 1 500 kg tout des propriétés d’isolation particulièrement [email protected] équipé est un défi jamais réalisé à ce jour en élevées. termes de rigidité, de légèreté et de contrôlabi- lité en vol. L’intégration des cellules solaires Pour les équipes de Solvay, ce ne fut pas une encapsulées (fragiles et rigides) sur l’aile qui chasse aux kilos, mais aux grammes. Il était devra subir des contraintes diverses en torsion nécessaire d’«aller chercher» ces quelques et en flexion, a fait l’objet de recherches très grammes partout: dans la structure, la chaîne longues et approfondies. énergétique, l’isolation thermique… Un travail de fourmi, un exercice d’extrême patience qui a C’est là que Solvay a fait la différence en pro- débuté en octobre 2004 pour aboutir aujour- posant, non seulement avec des cellules photo- d’hui. Et tout penser, tout concevoir, tout tester. voltaïques, mais aussi en remplaçant, partout où Jusqu’à la lubrification des pièces mobiles. Un cela était possible, des pièces métalliques à hau- mauvais frottement peut en effet faire perdre tes contraintes mécaniques par des ultra-poly- 5% d’énergie, ajouter un lubrifiant aurait coûté mères et autres polymères techniques, tels des en poids. Dans Solar Impulse, les composants polyamide-imides (PAI), des polyetheretherké- sont donc autolubrifiants ! tones (PEEK), des polyphénylènes auto-renfor- cés (SRP), des polyphénylsulfones (PPSU) ou Alain de FOOZ des polyarylamides (PA MXD6). [email protected]

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Concevoir et développer de nouveaux produits

«A travers ce projet, nous lançons un message fort aux otre engagement est concret: apport technologique, scientifiques et à l’industrie: il est urgent de rassembler V ressources humaines, fonds… Attendez-vous un retour nos expertises !», explique Claude Michel, Senior Vice sur investissement ? C’est évident. Et ce retour se matérialisera sous différentes formes. Participer President, Head of Solvay / Solar Impulse partnership au défi permet au groupe de renforcer son savoir-faire dans les nouveaux matériaux, la plu- ourquoi investir dans l’aéronautique ? Un nouveau part dérivés de l’or noir. Le retour sur investis- P débouché pour Solvay ? Oubliez l’avion ! Ce sement se concrétise déjà au niveau humain: nos n’est pas lui qui compte; c’est le projet, l’ambi- collaborateurs sont particulièrement fiers de tion qu’il représente et le message qu’il porte: participer à ce projet. De fait, par-delà l’exploit peut-on imaginer un monde moins dépendant de de faire voler un avion autour du monde avec la l’énergie fossile ? L’idée est née lors du tour du seule énergie solaire, on peut imaginer la monde en ballon de Bertrand Piccard fin des conception et la fabrication de nouveaux pro- années 90. Pour le réaliser, il a décollé avec 4 duits issus du développement durable. tonnes de propane en nacelle; il lui en restait à peine 40 kg à l’atterrissage. Son exploit était donc intimement lié à l’énergie fossile… L’Histoire se perpétue Demain, les performances devront contribuer à protéger les ressources de la planète et à entrer Toutefois, il ne s’agit pas d’imaginer de nou- dans une logique de durabilité. veaux concepts. Nous voulons montrer que les technologies existantes sont déjà des bonnes e projet, on ne peut plus ambitieux, est risqué. Pourquoi solutions à nos problèmes énergétiques et qu’el- C l’avoir relevé ? Dès son annonce, Solar Impulse les sont immédiatement disponibles pour des Claude Michel, contenait, à nos yeux d’industriel chimiste et utilisations à grande échelle. Comme il est quasi Senior pharmacien, les éléments fondamentaux du for- impensable que la population accepte de dimi- Vice President, midable défi humain qui se dresse devant nous. nuer son niveau de vie, nous devrons développer Head of Solvay / Nous savons tous que nous allons manquer de des équipements efficaces consommant moins et Solar Impulse pétrole; nous sommes conscients de notre des sources d’énergie alternatives dont, en pre- partnership. dépendance et, tout autant, de ses conséquences mier lieu, l’énergie solaire. Courriel: sur l’environnement. Il est urgent de réagir. À claude.michel@ travers ce projet, nous lançons un message fort es liens tissés voici près d’un siècle entre Ernest Solvay, solvay.com aux scientifiques et à l’industrie: rassemblons L fondateur du groupe, et Auguste Piccard, le grand-père nos expertises. de Bertrand Piccard, ont-ils pesé dans la balance ? Nous avons tout de suite cru dans le projet de Bertrand comme Ernest Solvay a cru dans les projets de son grand-père. Et nous sommes heureux de prolonger ainsi une amitié qui traverse les géné- rations… S’il est mené en Suisse, et si Bertrand Piccard est Suisse, ce projet est également belge. Pour l’anecdote, Auguste Piccard inspira le pro- fesseur Tournesol à Hergé ! Plus sérieusement, il faisait partie de l’Institut international de phy- sique de Solvay; il a maintes fois séjourné à La Hulpe, chez Ernest Solvay, avec Albert Einstein, Pierre et Marie Curie pour ne citer qu’eux. L’Histoire, avec un grand «H», se perpétue.

Alain de FOOZ [email protected]

Athena 254 / Octobre 2009 90 Technologie La voiture à air comprimé : mythe ou réalité ?

Que ferions-nous sans notre voiture ? Synonyme de liberté, nous l'utilisons tous les jours pour aller au travail, effectuer des achats, conduire les enfants à l'école, dire bonjour à la famille, partir en vacances. La voiture, et les transports en général, sont un des points névralgiques d'une société développée. On en compte aujourd'hui un milliard dans le monde

es voitures à essence et diesel classiques ment sur l'application du moteur à air comprimé vivent actuellement leurs dernières pour l'automobile. Citons Energine, au Japon, L années. Tout le monde s'accorde en effet ou MDI (Motor Development International), à dire que l'ère du pétrole abondant et bon mar- une société française installée à Carros, près de ché est bientôt révolue. De plus, l'utilisation Nice, et menée par Guy Nègre. massive de ce type de transport pollue considé- rablement l'air que nous respirons et, à plus Son principe de fonctionnement repose sur de grande échelle, notre planète entière. Alors l'air comprimé qui entraîne les pistons du quelles solutions pourrions-nous trouver ? moteur, et donc fait avancer le véhicule. L'idée Quelle sera la voiture du futur ? est venue au départ d'une pratique bien connue en sport automobile, qui consiste à utiliser une Depuis des dizaines d'années, les scientifiques injection d'air comprimé dans les cylindres pour travaillent avec acharnement sur des nouveaux faire démarrer un moteur récalcitrant. types de voitures: électriques, à hydrogène, au biocarburant, solaires ou encore au gaz. Il y a un Le moteur de base fonctionne selon un cycle autre type de voiture dont on parle peu: la voi- thermodynamique différent des moteurs actuels ture à air comprimé. Mais cette solution est-elle à 4 et à 2 temps. Le moteur à air comprimé est crédible ? un moteur à 5 temps et à 3 chambres séparées: 2 chambres d'aspiration et d'expansion et L'utilisation de la détente de l'air comprimé 1 chambre de compression reliée par un comme force motrice remonte à l'époque du injecteur électronique à deux réserves d'air développement des chemins de fer où, dans le comprimé de 300 litres à 300 bars. Avec ces cas des réseaux miniers et urbains, il était 3 chambres, on dispose donc des différentes L’AIRpod de MDI, nécessaire d'éviter les risques et pollutions inhé- étapes: aspiration, compression, injection d'air première voiture rents à la locomotive à vapeur. Les premières comprimé additionnel, expansion, détente, à air comprimée applications pratiques de véhicules à moteur à échappement. commercialisée. air comprimé, sur rail, datent du percement de tunnels ferroviaires (1872) et de quelques expé- rimentations de tramways.

Un moteur à cinq temps

Aujourd'hui, l'air comprimé est surtout utilisé dans divers instruments comme les fraises de dentiste, les marteaux burineurs, les boulonneu- ses, agrafeuses et marteaux, visseuses, tourne- vis, foreuses et meuleuses pneumatiques, pinces coupantes, etc.

La mise en œuvre sur les voitures a fait l'objet de quelques réalisations. Mais le concept semblait avoir été oublié. L'idée revient à la mode. Plusieurs sociétés travaillent actuelle-

91 Athena 254 / Octobre 2009 Technologie

Ainsi, par le jeu du piston, le premier cylindre L'intérêt majeur du moteur à air réside surtout aspire l'air extérieur à travers un filtre et dans la possibilité de remplacer les batteries au l'envoie dans la chambre de compression où, lithium dans les véhicules hybrides futurs. Les au même moment, un jet d'air comprimé est batteries au lithium sont coûteuses, lourdes et introduit. Aussitôt relâché dans le cylindre ont un temps de vie limité. Dans le cas de la d'expansion, l'air pousse le deuxième piston qui voiture à air, seul le volume important du réser- va actionner la roue du moteur. voir pose problème. On pourrait ainsi avoir une voiture hybride avec un moteur à combustion et Prenons l'exemple de la voiture AIRpod proposée un moteur à air comprimé, consommant moins, par MDI. Elle a un moteur bicylindre, roule à polluant moins, et sans les désavantages de la maximum 45 km/h ou 70 km/h selon la version batterie au lithium (prix, durée de vie, temps de (c'est donc une voiture exclusivement urbaine). charge). Elle offre, selon le constructeur (1), une autono- mie de 220 kilomètres grâce à un réservoir en fibres de carbone contenant 200 litres d'air com- Des voitures intelligentes primé à une pression de 350 bars. Contrairement (1) Selon nos calculs, à la propulsion électrique qui demande beaucoup De plus, avec les batteries au lithium, certains l’autonomie est de temps pour la recharge, ici 1,5 minute suffit pensent que nous pourrions passer d'une dépen- plutôt de 135 km pour recharger le véhicule à l'aide d'un compres- dance au pétrole à une dépendance au lithium. à 45 km/h. seur. Le coût d'un plein (220 km) est estimé à Sur Terre, le lithium n'est pas présent sous sa moins de 1 euro. Pour ceux qui n'ont pas de sta- forme métallique à cause de sa grande réacti- tion à proximité, les ingénieurs ont prévu un petit vité. On le trouve principalement comme impu- compresseur, monté en série sur la voiture, per- reté dans les sels de métaux alcalins. Bien que mettant de la recharger en 4 h chez soi, en la très abondant dans la nature (33e élément le plus branchant sur une prise électrique. Selon MDI, le abondant sur Terre), il n'existe, en concentration prix estimé de la AIRpod serait de 6 000 euros. permettant une exploitation économiquement rentable, qu'en très peu d'endroits. Le plus grand gisement au monde est le Salar de Uyuni, Consommer moins, polluer moins un désert de sel au sud-ouest de la Bolivie. Ce gisement représente un tiers des ressources La voiture à air comprimé est écologique. On mondiales. n'utilise pas exclusivement de l'air comprimé pour faire rouler le véhicule, mais également Demain, les voitures devront être beaucoup plus l'air extérieur, qui est aspiré, filtré et rejeté. sobres, et plus optimisées pour un certain type Cette voiture ne pollue pas, mais en plus, elle de déplacement. D'où des véhicules différents filtre l'air ambiant ! C’est aussi un véhicule sim- pour la conduite en ville et sur autoroute. Cela Pour en ple, peu coûteux et économique à l'entretien, permettra de disposer de voitures mieux adap- savoir plus grâce notamment à la température modérée de tées, plus sobres, mais plus intelligentes. Il est fonctionnement du moteur (pas de combustion). possible, on l’a dit, de faire rouler une voiture à Michel Wautelet, l'air comprimé. Les performances sont cepen- Damien Duvivier, Du point de vue de la climatisation, la voiture dant assez limitées et ne permettent, et ne per- «Sciences, électrique doit consommer une part importante mettront, que d'avoir un petit véhicule léger et technologies et société. de son énergie afin de refroidir l'habitacle, alors lent, uniquement destiné à une utilisation Guide pratique en que la voiture de MDI n'a qu'à récupérer urbaine ou pour de petits déplacements. La 250 questions», l'air froid qui sort du tuyau d'échappement. société MDI va d'ailleurs livrer ses premiers troisième édition, Le temps de charge est également très réduit: AIRPod dans les aéroports parisiens et hollan- De Boeck, quelques minutes contre 6 à 8 heures pour les dais. La commercialisation est prévue pour la Bruxelles, 2009. batteries. fin de l'année 2009.

http://www.mdi.lu Ce qui nous amène la question piège, celle que Notons que, contrairement à une voiture élec- brandissent les adversaires du moteur à air trique, la voiture à air fait du bruit. Ce qui n'est http://www.energine. comprimé. «Pourquoi utiliser de l'électricité pas forcément un désavantage (on l'entend arri- com/e_main.php pour compresser de l'air (avec un rendement ver), mais cela limite ce genre de véhicule à une assez mauvais) au lieu de prendre cette même utilisation en extérieur, comme les aéroports. électricité pour charger directement des batte- Les petits véhicules électriques seront eux plus ries ?». Les supporters du moteur à air com- appropriés pour les centres commerciaux, par primé rétorquent que le poids excessif des bat- exemple. teries des voitures électriques vient plomber Damien DUVIVIER leurs performances et entraîne une consomma- [email protected] tion d'énergie plus importante pour une presta- tion équivalente et ce, malgré leur rendement Michel WAUTELET théoriquement supérieur. [email protected]

Athena 254 / Octobre 2009 92 UUnn ddééffii ppoouurr ll’’hhuummaanniittéé

Les dirigeants du monde entier devront parvenir à surmonter leurs divergences d’intérêts pour se rassembler autour d’un projet politique fondé sur un constat scientifique objectif. Parvenir fin 2009 à un nouveau traité intergouvernemental ambitieux pour poursuivre la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) au-delà du 1er janvier 2013, tel est l’objectif que s’est fixé la Convention des Nations unies sur le réchauffement climatique

l semble qu’il y a une énorme bonne volonté en ce sens. La nouvelle administra- I tion américaine est favorable à des mesures fortes sur le plan intérieur. La Chine se fixe des objectifs ambitieux en termes d’économie d’énergie et procède déjà à d’importants inves- tissements dans les énergies renouvelables. L’Inde a dressé son propre plan d’action et l’Europe s’est fixé comme objectif d’atteindre en 2020 un niveau d’émission inférieur de 30% à celui de 1990. Ainsi, un peu partout à travers le monde, les engagements se font de plus en plus nombreux.

Les scientifiques et les politiques souhaitent qu’en 2050, après un pic qui devrait être atteint vers 2020, la totalité des émissions de GES de la planète soit inférieure de moitié à ce qu’elle était en 1990. Or les émissions de l’ensemble des pays en voie de développement sont des 800 000 dernières années. Or le rythme de Voilà l'océan Arctique inférieures à celles du monde industrialisé et, ces cycles s’est brutalement modifié il y a tel que l'a croqué à court terme, il serait nécessaire qu’elles 420 000 ans. Si les périodes chaudes les plus le satellite ICESat restent à la hausse de manière à maintenir la récentes sont caractérisées par des températures à l'hiver 2008. croissance économique et réduire la pauvreté ! comparables à celles que nous connaissons Les zones les Il faut par conséquent qu’en 2050 les pays actuellement, avant 420 000 ans, elles étaient plus pâles sont industrialisés aient baissé leurs émissions d’au moins chaudes mais duraient plus longtemps. les couches de glace moins 80% par rapport à 1990 avec une mise en les plus épaisses œuvre des principales mesures en ce sens lors D’autre part, sur un site situé au Groenland, les (5 mètres) et de la prochaine décennie. chercheurs ont repéré des variations rapides les plus foncées, (c’est-à-dire des élévations abruptes de tempé- celles où la glace est la plus fine rature suivies de lents refroidissements) du (moins d'un mètre). climat jusqu’il y a 123 000 ans. Au vu des Instabilité du climat (Photo: Nasa). changements climatiques que nous connaissons Au cours de son histoire, la Terre a connu aujourd’hui, la compréhension de ces instabili- plusieurs bouleversements climatiques, les plus tés est un enjeu majeur pour les climatologues. importants étant les périodes glaciaires. Celles- À Neem (North Greenland Eemian Ice Drilling Dans le titre: ci se sont produites par cycles d’environ - un projet impliquant 14 pays dont l’Université l’ouragan Humberto 100 000 ans séparés par des périodes plus libre de Bruxelles (ULB) et s’étendant de 2007 s’enroule au nord chaudes. L’analyse des carottes de glace préle- à 2011), les scientifiques se sont intéressés à la des Bermudes vées jusqu’à une profondeur de 3 260 mètres en période interglaciaire dénommée Eémien, un le 24 septembre 2001. Antarctique a mis en évidence les neuf cycles bref répit entre deux glaciations et qui aurait (Photo: Nasa). glaciaires que notre planète a connu au cours débuté il y a 130 000 ans pour s’achever il y a

93 Athena 254 / Octobre 2009 Climat

115 000 ans, lors de la dernière glaciation. L’analyse des carottes de glace révèle que dans Faire parler la glace l’Arctique les températures ont été jusqu’à 5 °C plus élevées qu’aujourd’hui pendant cette pé- L’analyse d’une carotte glaciaire repose sur riode, présentant une situation proche de celle deux éléments principaux: l’eau et l’air. Le vers laquelle nous semblons nous diriger à dosage isotopique (mesure de la concentra- cause du réchauffement climatique. tion des isotopes d’un élément) de l’hydro- gène présent dans l’eau de la glace permet de Il est donc évident que le climat a toujours subi reconstituer les températures. Il s’agit de des variations sous l’influence de facteurs déterminer la teneur en deutérium, dont on naturels, et ceci bien avant que l’espèce sait qu’elle est d’autant plus faible que la humaine ne commence à utiliser des combusti- température qui règne pendant les précipita- bles fossiles tels que le charbon, le pétrole et le tions est basse. gaz. En effet, de nombreux indices laissent à penser que l’activité solaire a une incidence sur Quant à l’analyse de l’air piégé dans la glace, le climat de la planète, outre le fait indiscutable elle renseigne la composition atmosphérique que le Soleil est la source de la quasi-totalité de de l’époque, par exemple la concentration l’énergie présente sur Terre. des gaz à effet de serre.

Qui est responsable ?

L’activité solaire (voir Athena n° 253, pp. 8 et La chasse aux six gaz 9) fluctue en fonction d’un cycle d’une durée approximative de 11 ans et le nombre de taches e sont des gaz dont la particularité est d’être transparents à la lumière visible mais solaires permet de se situer au sein de ce cycle C opaques pour une majeure partie du rayonnement infrarouge émis par la Terre. Le (nous sommes actuellement dans un minimum) taux d’absorption dépend du gaz considéré en raison de la structure électronique des qui a vraisemblablement un effet sur le climat molécules qui le composent. de la planète. Cet effet semble toutefois relati- Les GES visés par le protocole de Kyoto (émis par les activités humaines) sont: vement limité si on le compare à celui des gaz à le dioxyde de carbone (CO2), d’une durée de vie de 5 à 200 ans, principal responsable effet de serre anthropiques. du réchauffement climatique (70%) est le résultat de la combustion des énergies fos- siles (pétrole, charbon) et de la biomasse; Les scientifiques pensent qu’à l’ère préhisto- le protoxyde d’azote (N²0), d’une durée de vie de 114 ans, responsable pour 14% du rique de violentes éruptions volcaniques ou réchauffement, produit des activités agricoles, de la combustion de la biomasse et d’autres incidents géologiques sont la cause de des produits chimiques comme l’acide nitrique; sérieux effets sur le climat. Ils en prennent pour le méthane (CH4), pour 12%, produit par l’agriculture (rizières et élevage), la produc- preuve l’éruption du Pinatubo en 1991 qui a été tion et la distribution de gaz et de pétrole, l’extraction du charbon et les décharges d’une telle puissance que l’on a enregistré au publiques; cours des deux années suivantes une chute les gaz fluorés (hydrofluorocarbures, perfluorocarbures et hexafluorure de soufre) mesurable de la température moyenne à la pour 4% proviennent des systèmes de réfrigération et sont employés dans les aéro- surface de la Terre. Cette baisse s’explique par sols et les mousses isolantes ainsi que dans l’industrie des semi-conducteurs. Les gaz la projection d’une énorme quantité de fluorés ont un pouvoir de réchauffement 1 300 à 24 000 fois supérieur à celui du particules solides dans l’atmosphère durant dioxyde de carbone et une très longue durée de vie. C’est pourquoi ils représentent l’éruption, qui ont eu un effet refroidissant. un réel danger malgré leur modeste part dans les émissions totales de GES. Et il y a ces gaz à effet de serre ! L’effet de serre La part relative des activités humaines dans les émissions de GES en Europe est est un phénomène naturel qui contribue à (environ): pour le transport (27%), l’Industrie (21%), le bâtiment (20%), l’agriculture retenir la chaleur émise par la surface terrestre. (16%), l’énergie (13%) et les déchets (4%). À l’heure actuelle, la température moyenne à la surface de la Terre est d’environ 14 °C mais sans l’effet de serre, elle serait d’environ -19 °C. Différents gaz présents dans l’at- mosphère terrestre contribuent à ce phénomène, Breaking the deadlock (Sortir de l'impasse) le principal étant la vapeur d’eau suivie par le CO2. La teneur atmosphérique en GES, Ce projet, initié par l’ancien premier ministre britannique Tony Blair, vise à mobiliser notamment en CO2, et ses conséquences sur le toutes les parties prenantes face au problème climatique. «Il est possible de parvenir climat font l’objet de débats car l’accroissement à 70% des réductions prévues pour 2020, estime Tony Blair, en investissant dans trois des concentrations de GES dans l’atmosphère a domaines: l’augmentation du rendement énergétique, la réduction de la déforesta- été considérable depuis environ 250 ans et plus tion et l’utilisation de sources d’énergie à faible émission de carbone.» particulièrement au cours des 50 dernières années.

Athena 254 / Octobre 2009 94 Climat

À l’heure actuelle, les concentrations atmos- phériques de CO2 sont d’environ 385 ppm (parties par million). Avant l’ère industrielle, la concentration était d’environ 280 ppm. Des Des faits récents analyses de bulles d’air emprisonnées dans les glaces antarctiques montrent que les concentra- La concentration en CO2 atteignait au mois de mai 2009 le sommet de 390 ppm (partie par million) alors qu’en 1958 à Mauna Loa (Hawaï) elle n’était encore que de tions de CO2 sont bien plus élevées aujourd’hui qu’elles ne l’ont jamais été pendant les 650 000 316 ppm. Cette valeur est la plus élevée relevée depuis les dernières deux millions années écoulées. d’années. 2008 figure parmi les dix années les plus chaudes observées depuis le début des observations en 1850: en deuxième place derrière 2007 ! La température moyenne Les dernières recherches annuelle est de 0,49 °C plus élevée que la température moyenne du XXe siècle. L’étendue des glaces de l’Arctique (entre la Russie et le Canada) a atteint, à une Ces dernières années, les recherches sur le cli- année près (2007), leur minimum d’extension depuis le début des observations par mat adhèrent dans leur quasi-totalité aux satellite en 1979. conclusions du dernier rapport de synthèse du Au cours de la saison 2008 les ouragans furent particulièrement dévastateurs. Entre GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental janvier 2009 et août 2009, les États-Unis enregistrèrent 1 489 tornades, un record sur l'évolution du climat). Ses conclusions mon- depuis le début des relevés en 1953. trent que le réchauffement planétaire est une Jamais la fonte des glaciers ne fut aussi importante en volume et, au rythme actuel, e réalité et que le facteur le plus important y la majorité d’entre eux aura disparu pour la fin du XXI siècle. contribuant est l’émission de GES induite par Chaque année plus de 13 millions d’hectares de forêt disparaissent, soit l’équivalent les activités humaines. L’un des exemples allant de 1 400 terrains de foot chaque… heure. Et malgré les efforts de reboisement, dans ce sens est la fonte des glaces de l’océan 7 millions d’hectares sont perdus. Arctique, produite ces dernières années à un Depuis 2000 le niveau moyen de la surface des mers s’est élevé en moyenne de 3 mm rythme beaucoup plus rapide que ce qu’avait par an. Selon une projection de l’IPCC, cette élévation devrait atteindre 80 cm entre prévu le dernier rapport de synthèse du GIEC. Il 2000 et 2100. en va de même de la quantité de glace ayant Entre 20 et 30% de toutes les espèces végétales et animales risquent de disparaître fondu dans l’inlandsis groenlandais. si la température moyenne de la Terre devait augmenter de 1 à 2 °C.

Un exemple est le «budget carbone mondial» compilé chaque année par l’organisation Global Carbon Project. Ce budget récapitule la quan- tité de GES émise durant l’année et la quantité absorbée par la mer (voir Athena n° 253, pp. 36-37) ou disparaissant de l’atmosphère par d’autres moyens.

Une autre tendance pousse de plus en plus la recherche sur le climat à empiéter sur des domaines autres que les sciences naturelles, la technologie et l’économie. Alors que le réchauf- fement climatique se trouve désormais au cœur des débats politiques et économiques dans le monde entier, les sciences sociales et humaines commencent de plus en plus à se pencher sur les conséquences du changement climatique sur l’homme et la société. dans la perspective de la réunion de La multiplication Le rapport présenté à l’issue de la réunion de Copenhague, des initiatives d’investissement des situations L’Aquila montre qu’il est possible de parvenir à devront être étudiées afin d’en récolter les béné- extrêmes inquiète des réductions drastiques déjà à l’horizon 2020 fices au moment opportun. les climatologues: si nous concentrons notre action sur certaines pics de pollution, tempêtes, cyclones, technologies-clés, si nous mettons en œuvre des Depuis des années, on a voulu, à juste titre, orages et inondations mesures dont l’efficacité est avérée et si nous persuader la population d’avoir la volonté de atteignent parfois investissons dès maintenant dans le développe- réagir face au réchauffement climatique. une violence ment de technologies du futur qui nécessiteront C'estseulement en combinant la volonté popu- inattendue. du temps pour parvenir à maturité. laire et celle des dirigeants que l'on réussira. (Photo Lamiot). Heureusement il existe une solution - elle cons- Il est clair que ces mesures (ou une partie) sont titue un énorme défi, mais elle est réalisable. déjà appliquées avec succès dans plusieurs pays un peu partout dans le monde mais il est Paul DEVUYST indispensable de leur donner de l’envergure et,

95 Athena 254 / Octobre 2009 Le ciel depuis la Terre en novembre 2009

Les heures indiquées sont celles d’Uccle exprimées en temps officiel 16 novembre. À 19h14, nouvelle Lune. pour les manifestations du mois et en temps universel (TU), soit une heure de moins pour les événements astronomiques. 17 novembre. À 12h21, Mercure est à l’aphélie (distance maximale au Soleil) soit à 0,46670 unité astronomique Les jours décroissent de 1 heure 20 minutes du 31 octo- (1 unité astronomique = 149 597 870 km). bre au 30 novembre. 20 novembre. Après le coucher du Soleil, l’étoile variable 2 novembre. À 21h14, pleine Lune. Mira (constellation de la Baleine) sera visible à l’œil nu juste au-dessus de l’horizon. 7 novembre. À 07h24, la Lune est au périgée (distance minimale à la Terre), soit à 368 903 km. 22 novembre. À 20h06, la Lune est à l’apogée (distance maximale à la Terre), soit à 404 733 km. 9 novembre. À 15h56, dernier quartier de Lune. 23 novembre. Juste avant le coucher du Soleil, Jupiter sera 10 novembre. À 10h37, Mercure est à l’apogée (distance visible à 3° du croissant lunaire. minimale à la Terre), soit à 1,44544 unité astronomique (1 unité astronomique = 149 597 870 km). 24 novembre. À 21h39, premier quartier de Lune. Il y a 150 ans, Darwin publie «Sur l’origine des espèces», 11 novembre 1572, Tycho Brahé (1546-1601), astronome ouvrage dans lequel il explique le mécanisme présidant, danois, aperçoit dans la constellation Cassiopée une selon lui, à l'évolution graduelle des espèces vivantes étoile temporaire (une supernova) qui devint aussi dans la nature. Il est aujourd’hui considéré comme le brillante que Vénus et qu’il put observer pendant 17 mois. fondateur de la théorie de l'évolution.

15 novembre. Vénus sera observable juste au-dessus de l’horizon, à 7° à gauche du fin croissant lunaire. Paul DEVUYST

À voir ou à écouter en Wallonie

16 novembre, à 20h00, conférence sur Le fond cosmique micro-onde: une fenêtre vers l’Univers primordial, donnée par Ruth Durrer, de l’Université de Genève, auditoire Adam Smith, Facultés Notre-Dame de la Paix (FUNDP), rempart de la Vierge, 8 à 5000 Namur. http://perso.fundp.ac.be/~alemaitr/IYA2009/

18 novembre, à 20h, conférence sur Énergie noire et matière sombre, donnée par Jean-Michel Alimi, directeur du laboratoire Univers et théories, de l’Observatoire de Paris-Meudon, aux grands amphi- théâtres de l’Université de Mons-Hainaut, avenue du Champ de Mars, à Mons. http://olympus.umh.ac.be

30 novembre, conférence donnée par Sophie Van Eck de l’Université Du 17 au 19 novembre, la Terre traversera l’essaim de poussières libre de Bruxelles sur Les étoiles au plomb, auditoire Adam Smith, associé à la comète périodique 55P/Tempel-Tuttle. Ces étoiles FUNDP, rempart de la Vierge, 8 à 5000 Namur. filantes se situent dans la constellation du Lion et ont http://perso.fundp.ac.be/~alemaitr/IYA2009/ été baptisées Léonides. (Photo Nasa).

Athena 254 / Octobre 2009 96 Astronomie

Pour la première fois, un robot a pris des photos des traces laissées il y a quarante ans par les missions Apollo : ce ne sont pas les pas de Neil Armstrong que l'on peut À la Une voir, mais les étages les plus bas des modules de descente. En juillet, notez qu'une vente aux enchères organisée par la Nasa, du... Cosmos a permis au public fortuné d'acquérir des souvenirs de ces missions historiques... (Photo Nasa).

À gauche: un des plus grands télescopes au monde vient d'être inauguré: le GTC (Gran Telescopio Canarias). Il a coûté 130 millions d'euros, soit moins de la moitié du coût du stade «Allianz Arena» de Munich dont la construction a employé plus de 1 000 personnes depuis 1987. (Photo Zyance). À droite: quinze ans après l'impact de la comète Shoemaker-Levy 9, un autre objet vient de rentrer en col- lision avec la planète géante, y créant des taches sombres comme son prédécesseur. Il faut souligner que cette découverte a été faite non par un professionnel mais bien par un astronome amateur australien ! Comme par jalousie, Vénus s'est parée presque en même temps d'une tache brillante, d'origine encore inconnue (nuages ? éruption volcanique ?). (Photo Gemini).

L'étoile Bételgeuse Au mois de juillet, les dans Orion a été observateurs attentifs ont pu observée en détails par remarquer de nombreux les grands télescopes nuages noctulescents ou européens: si sa taille noctiluques, des nuages énorme était déjà brillants apparaissant au connue (l'étoile- crépuscule. Certains seraient pourrait remplir associés aux lancers de l'orbite de Jupiter !), navettes spatiales - ou plus les nouvelles données précisément à la vapeur montrent la présence d'eau émise lors du de gigantesques lancement... Comme on en a plumes de gaz, vu beaucoup en 1908, après certaines aussi l'impact de Tungunska, cela grandes que le système renforce l'idée que le bolide solaire tout entier. de 1908 était une comète. Ces structures (Photo Mika Yrjölä/licence seraient liées à des Creative Commons). mouvements dans l'atmosphère de l'étoile. (Photo Eso). Yaël NAZÉ [email protected]

97 Athena 254 / Octobre 2009 EEssppiioonnss aauuttoouurr ddee llaa TTeerrrree

Plus question de dissimuler une piscine ou un cabanon aux l'Allemagne et l'Italie exploitent secrètement des administrations du cadastre et de l'urbanisme. Impossible constellations de satellites-radars. de continuer l'exploitation d'une terre qui devait être mise en friche suite à des subventions européennes. On peut désormais es sociétés privées sont-elles capables de tout observer et tout surveiller grâce à des satellites ? suivre les déplacements des véhicules, surveiller les prisonniers D Les récents satellites commerciaux d'observa- en congé pénitentiaire, retrouver des malades égarés ou des tion développés par des sociétés privées aux navires piratés. Depuis l'espace, les satellites prennent des images États-Unis (DigitalGlobe (1), GeoEye), en Israël détaillées, captent et localisent des signaux. Leurs observations et (Imagesat), en Inde (Antrix), prennent des ima- leur écoute permettent ainsi d'améliorer la sécurité de tous. ges ayant une résolution de moins d'un mètre au Mais en même temps, l'intimité de chacun est mise à mal. sol. À condition que le ciel soit dégagé, certains De là-haut, vous êtes espionnés sans le savoir ! peuvent déjà distinguer des éléments d'un demi- mètre ! Des radars sur orbite - les TerraSAR-X d'Infoterra et Cosmo-SkyMed d'e-Geos - sont omment cet espionnage de nos faits et gestes même capables de voir la surface terrestre C a-t-il commencé ? Depuis les années 60, notre durant la nuit et à travers les nuages, avec une planète est en permanence auscultée par des précision métrique. Ils permettent aussi d'étudier satellites dont les performances n'ont cessé de des zones polluées sur les océans et le long des s'améliorer. Le premier à avoir été «espionné» côtes, et d'identifier les pollueurs. Mieux, le trai- (1) Le 8 octobre, est le temps (météorologique). Chaque jour, le tement de leurs signaux parvient à déterminer la la société téléspectateur a droit à des images animées à l'é- vitesse des véhicules sur les autoroutes ! américaine chelle du continent. Les Meteosat, réalisés par DigitalGlobe prévoyait l'industrie européenne et exploités par Eumetsat usqu'où peut-on mettre en question le respect de la de lancer (organisation intergouvernementale dont sont J vie privée ? L'emploi des satellites pose un de Californie membres 30 États d'Europe), donnent tous les sérieux problème d'éthique, lié aux aspects per- son satellite quarts d'heure une vue en plusieurs couleurs sonnels d'intimité et de confidentialité. Des WorldView-2 (images multispectrales) de tout un hémisphère images Google Earth de la ville de La Haye, capable de voir depuis 35 800 km d'altitude, complétés par les aux Pays-Bas, réalisées depuis l'espace, ont par des détails de observations et sondages du satellite Metop qui exemple «dévoilé» des personnes qui prati- 46 cm partout survole le globe sur une orbite quasi-polaire. quaient le naturisme sur la plate-forme d'un sur le globe. Les satellites météo permettent ainsi le suivi des immeuble… Les instances du Pentagone, pour pollutions, feux de forêts, inondations… des raisons de sûreté militaire, ont exigé que les prises de vues ultra-précises des observatoires Lors de la guerre froide, les militaires améri- américains soient dégradées jusqu'au demi- cains et soviétiques, avaient bien compris l'im- mètre de résolution. Par ailleurs, des satellites portance des satellites pour s'épier mutuelle- d'écoute parviennent à intercepter les communi- ment. Les systèmes spatiaux se sont révélés des cations et à collecter des signaux d'identifica- outils efficaces d'informations, d'observations, tion. Si cette technologie est intéressante à bien de surveillances, d'écoutes. Sur orbite, de puis- des égards, elle pose la question de la vie pri- sants télescopes, de grandes antennes servent à vée. À l'heure actuelle, aucune législation ni prévenir les crises, à intervenir dans des situa- juridiction internationale n'est en mesure de tions d'urgence, à aider les troupes sur le ter- contrecarrer le phénomène Big Brother, sym- rain… La France a d'ailleurs déployé des bole de l'État policier qui veut tout connaître sur satellites d'espionnage optique, tandis que ses citoyens.

Athena 254 / Octobre 2009 98 La plus-value de l'imagerie spatiale

e 10 septembre, dans le cadre de sa (Global Monitoring for Environment and World Satellite Business Week, à Paris, Security), a décidé de miser sur les observatoi- L la société d'analyse des marchés spa- res spatiaux - avec la famille des Sentinel de tiaux Euroconsult organisait son premier sym- l'Esa et d'Eumetsat - afin d'assurer un suivi posium sur le business de l'observation de la durable de l'environnement et de la sécurité de Terre. C'était l'occasion d'un échange d'informa- notre planète. L’Europe veut aller de l'avant tions entre les constructeurs, les opérateurs, les avec le projet Musis (Multinational Space- utilisateurs des satellites de télédétection, les based Imaging System) et ses satellites optiques Le satellite permet, distributeurs de produits et services à valeur et radars pour effectuer des observations à très grâce au traitement ajoutée. «Le secteur de l'observation par satel- haute résolution (de l'ordre de la dizaine de cm). 3D de ses images, lites est en train de connaître une métamor- Ils seront lancés à partir de 2015. La Belgique, d'étudier le relief. phose avec une croissance des ventes commer- intéressée par les images dans le cadre de ses Ici, la région ciales de données qui est de 16% par année et opérations militaires, a octroyé 140 millions montagneuse qui va dépasser les 2,5 milliards d'euros dans d'euros aux chercheurs et aux industriels. du Tibet avec dix ans», constate le président-directeur géné- la ville de Lhassa. ral, Pacôme Revillon. Déjà cette année, le chif- L’imagerie spatiale connaît aussi un beau suc- (Doc. Spot Image). fre d'affaires du marché de la télédétection spa- cès auprès du grand public. Les fournisseurs de tiale devrait atteindre les 550 millions d'euros. services Internet - tels Google Earth et Microsoft Virtual Earth 3D - proposent l'accès à des vues et cartes résultant de la photographie La Wallonie en bonne position aérienne et des observations, de plus en plus précises, depuis l'espace. On demande que les Le nombre des satellites d'observation va aug- banques de données de télédétection soient menter de façon substantielle. Alors que 101 mises à jour rapidement et disponibles facile- satellites ont été mis en service par 24 opéra- ment par le biais de logiciels d'interconnexion, teurs publics et privés entre 1999 et 2008, on dans le cadre de systèmes de géo-information. peut s'attendre à ce que 206 soient lancés par 34 opérateurs au cours de la prochaine décennie. L'Europe compte une demi-douzaine d'opéra- Cet essor de l'imagerie spatiale s'explique par le teurs de satellites d'observation: l'organisation fait que le coût du satellite de télédétection intergouvernementale Eumetsat (météorologie), placé sur orbite sera moins élevé, passant de les sociétés Astrium Services (et ses filiales Spot 115 à 65 millions d'euros. Les pays à l'économie Image pour les satellites optiques et Infoterra émergente souhaitent d'ailleurs se mettre aussi à pour les satellites radar), Dmcii (Disaster la mode des systèmes spatiaux: ils s'équipent de Monitoring Constellation International Ima- petits satellites optiques pour assurer la gestion ging), Rapid-Eye (suivi optique de la végétation), de leurs ressources et pour garantir la sécurité e-Geos (satellites radar). En Wallonie, avec la de leur territoire. En Europe, 5 teams industriels collaboration d'équipes scientifiques des proposent à l'exportation de tels satellites: Universités de Liège et de Louvain-la-Neuve, Astrium Satellites, pour la France, Thales des sociétés ont développé des compétences, Alenia Space/Telespazio, pour l’Italie/France, reconnues sur le plan international, dans le traite- Surrey Satellite Technology Ltd, pour le ment de l'imagerie spatiale: KeyObs (Liège), Royaume-Uni, Ohb-System, pour l’Allemagne Image Consult (Namur) et Walphot (Namur). Au et Verhaert Space/Spacebel, pour la Belgique. sein du groupe Erdas, Ionic Software (Liège) réalise des outils informatiques performants qui Dans les dix prochaines années, il y aura, en permettent aux banques de données de dialoguer Europe, une cinquantaine de satellites opéra- entre elles avec beaucoup de flexibilité. tionnels d'observation. L'Union européenne, en entreprenant le «système des systèmes» Gmes Théo PIRARD

99 Athena 254 / Octobre 2009 Espace

En bref... En bref...

rank De Winne sur orbite : pilote et professeur. À belge est le premier commandant de bord, non- F bord de l'Iss (International Space Station), américain et non-russe, de la station. un ensemble de 305 tonnes à 350 km autour de la Terre, Frank De Winne, très actif, tant pour erschel et Planck bien placés pour des révé- les tâches de maintenance que pour les expé- H lations sur l'Univers. Lancés avec succès riences scientifiques et technologiques trouve par une Ariane 5-ECA le 14 mai dernier, les encore le temps de rapprocher le monde de satellites scientifiques Herschel et Planck sont l'espace de la communauté éducative et du arrivés à destination, chacun suivant sa trajec- grand public. Il établit chaque semaine des toire. Les premiers résultats de Herschel (ima- contacts «en direct» avec les étudiants et les ges de phénomènes célestes dans l'infrarouge) Frank De Winne jeunes grâce au réseau des radioamateurs: c'est et de Planck (mesures du bruit de fond cos- a commencé à tester le groupe de travail Ariss (Amateur Radio on mique) se révèlent très prometteurs. On peut l'expérience the International Space Station), animé en s'attendre à ce que le traitement de leurs don- Foam Stability Europe par le dynamique octogénaire Gaston nées se traduise par une autre vision de l'infini- de l’ULg, Bertels, qui veille à établir l'agenda et à organi- ment grand, depuis ses origines jusqu'à son apportée par la ser les liaisons avec la station. Il se veut péda- devenir. Pour rappel, les deux observatoires de navette Discovery gogue via des transmissions vidéo: il réalise en l'Esa ont été testés à des températures proches en septembre. microgravité des leçons d'enseignants pour des du zéro absolu, par le Csl (Centre spatial de (Photo Esa/Nasa). classes d'élèves du secondaire. Liège) avec le support technique de l'entreprise liégeoise Amos.

e Proba-2 «made in Belgium» sera lancé le 2 L novembre. Le second satellite européen de fabrication belge est arrivé sur le cosmodrome russe de Plesetsk pour son lancement avec une fusée Rockot. La mission Proba-2, dont le maî- tre d'œuvre est Verhaert Space, près d'Anvers, est principalement financée par le Service fédé- ral belge de la Politique scientifique (Belspo). Le logiciel de bord et le centre de contrôle à la station Esa, de Redu sont quant à eux réalisés par Spacebel. Ces deux grandes expériences scientifiques - observations du Soleil et recher- ches de «météo spatiale» - sont dues au Centre spatial de Liège et à l'Observatoire royal de Belgique, pour un coût de quelque 18 millions d'euros auxquels il faut ajouter les frais de lan- cement et des opérations sur orbite.

Proba-2, de 130 kg, tire parti de l'expérience Le 2 octobre, l'Iss devait recevoir l'équipage du acquise durant huit années avec Proba-1, qui Soyouz TMA-16 comprenant deux membres de continue de prendre des images de la surface l'expédition 21 de longue durée, ainsi que l'ar- terrestre. La miniaturisation est au cœur de ce tiste québécois Guy Laliberté, pour effectuer un modèle de microsatellite compact qui a les vol spatial de dix jours. À bord, sous le siège dimensions d'une machine à laver avec un d'un cosmonaute, se trouvaient les cinq plaquet- volume de moins d'1 m³. Il fait partie des plus tes de l'expérience liégeoise Foam Stability petits satellites lancés à ce jour par l'Agence (étude du comportement des mousses en impe- spatiale européenne. Ses dimensions réduites santeur). Depuis le 11 octobre, l'astronaute contribuent à diminuer la complexité et le coût.

Athena 254 / Octobre 2009 100 Espace

Et on peut tirer parti de possibilités bon marché de lancement «sur les épaules» en compagnie d'un satellite plus important. Fruit de l'engage- ment de l'Esa à stimuler l'innovation technolo- gique, Proba-2 servira également de banc d'es- sais pour de nouvelles technologies (17 au total) en vue d'autres missions dans l'espace.

es trois prochains pays sur l'orbite géostation- L naire. L'essor des télécommunications et de la télévision par satellite ne laisse pas indiffé- rents les pays qui veulent garantir leur dévelop- pement jusque dans l'espace. En 2008, le Vietnam (avec Vinasat-1 de fabrication améri- caine) et le Venezuela (avec Venesat-1 fourni par la Chine) ont mis en service un satellite sur leur position géostationnaire (à quelques 35 800 km au-dessus de l'Équateur). Dans les trois prochaines années, trois nouveaux pays feront de même: l'Angola avec Angosat-1 com- rale de Lausanne). Ils n'ont pas voulu attendre mandé à la Russie, l'Ukraine avec Libid-1 le vol inaugural (prévu fin 2010) du lanceur réalisé avec le soutien du Canada, et européen Vega pour placer autour de la Terre l'Azerbaïdjan avec Azersat-1, de fabrication leur premier Cubesat, baptisé SwissCube (la américaine. photo). Ce nanosatellite de 1 kg, destiné à des observations de l'horizon atmosphérique, lancé par la fusée indienne Pslv-C14. etit pas de travers pour le Congo spatial. Cet P été, une vidéo sur YouTube (http://www.youtube.com) a présenté le lancement a Nasa… grippée ! Il y a quarante ans, la Nasa Luxspace discret de la fusée congolaise Troposphère V, L (National Aeronautics & Space Administra- pour le suivi qui a eu lieu le 29 mars dernier devant un par- tion) brillait par son dynamisme, en ayant réussi du trafic terre de personnalités, dont Joseph Litityo les premiers pas sur la Lune. maritime. Afata, ministre de la recherche scientifique de la République démocratique du Congo. Dans les années 60, à une époque où il n'y avait Le fabricant ni portables ni Internet, il fallut 98 mois, à par- luxembourgeois Les médias congolais ont salué ce retour du tir de la déclaration - le 25 mai 1961 - du prési- de systèmes pays aux affaires spatiales, après la tentative dent Kennedy, pour tenir le pari du programme spatiaux avortée des fusées modulaires à liquides du pro- Apollo ! est en train jet privé allemand Otrag dans les années 70. Ils de tester ont parlé de grand succès pour la fusée à poudre En 2009, la Nasa a plutôt grise mine. Cette l'identification de 560 kg baptisée Soso pembe (Coq blanc): agence s'est lourdement bureaucratisée et s'es- des navires depuis cette fusée à deux étages - le 1er étage combi- souflle à rendre des comptes aux politiciens sur l'espace grâce à nant quatre pains de poudre explosive pour une lesquels les industriels exercent des pressions. des équipements poussée de 7 tonnes - était la troisième lancée Elle est atteinte du mal de l'indécision et de l'in- sur micro-satellites par la société Dta (Développement tous azi- certitude pour son programme d'exploration de et à bord muts). Avec le rat Kavira enfermé dans sa coiffe l'espace avec des engins automatiques et des de la station récupérable, elle devait monter à une altitude de vaisseaux habités. spatiale. 36 km et atteindre trois fois la vitesse du son ! Le reportage TV, réalisé par la chaîne C'est un mal contagieux qui guette ses partenai- InfôAfrique, montrait les préparatifs avec des res dans l'exploitation de la Station spatiale outils modestes, le rudimentaire centre de internationale (ISS): la Russie, le Canada, contrôle, puis un brillant feu d'artifice en guise l'Europe, avec l'Esa (Agence spatiale Euro- de lancement… péenne), l'Asi (Agenzia Spaziale Italiana) ainsi que le Japon risquent, à force de s'interroger sur la suite qu'il convient de donner au vec SwissCube-1, la Suisse est en orbite. La programme, d'être touchés par une sinistre pan- A Confédération Helvétique avait déjà un pre- démie appelée léthargie. mier astronaute (Claude Nicollier), mais pas encore de satellite dans l'espace. C'est chose Théo PIRARD faite depuis le 23 septembre grâce à l'équipe [email protected] d'étudiants de l'Epfl (École polytechnique fédé-

101 Athena 254 / Octobre 2009 Espace Prolifération des centres spatiaux

a construction de satellites n'est plus habités. Le pays veut dans le futur devenir un l'apanage des grands ! Suivant l'exemple acteur dans le lancement et le développement L de l'Algérie et son programme Alsat, la de satellites. Avec la Russie, il a conclu un Turquie, les Émirats Arabes Unis et le Kazakh- accord de coopération pour mettre en œuvre à stan affichent leurs ambitions dans le développe- Baïkonour - en modifiant l'un des ensembles de ment, sur leur territoire, de satellites de petite lancement Proton - le système de transport spa- taille pour des missions gouvernementales. tial Baïterek, dérivé du lanceur modulaire Angara (version moyenne), développé par le La Turquie est en train de se doter, à Ankara, centre spatial Khrounitchev à Moscou. Le sys- d'un centre de développement de satellites de tème Kazsat a fait appel à ce centre pour ses télécommunications Türksat et d'observation deux premiers satellites, équipés de propulseurs Goktürk. Elle entend se doter d'une industrie électriques à plasma. Alors que Kazsat-1, lancé nationale des systèmes spatiaux qui sera capa- en juin 2006, est tombé en panne et a dû être ble de tester et d'intégrer des satellites dès 2015. expédié sur l'orbite «cimetière», Kazsat-2, de Dubaï, dans les Émirats Arabes Unis et le 1 330 kg en orbite géostationnaire, est en pré- La Corée du Sud Kazakhstan, en Asie centrale, ont décidé d'avoir paration pour être lancé en 2011. Le 19 mai, la a de grandes eux aussi leurs propres installations, y compris société Jsc Kazakhstan Gharysh Sapary signait ambitions des simulateurs d'en- avec Astrium un spatiales pour vironnement spatial, accord de partenariat sa micro- destinés à la concep- stratégique pour la électronique et tion et à la réalisation technologie spatiale. sa robotique. de systèmes spatiaux. Elle s'est dotée, Dans le cadre de ce avec le Naro Space Center, À Dubaï, l'Eiast partenariat franco- (près de Goehung) (Emirates Institution kazakh, dans lequel le d'une installation for Advanced Science Cnes (Centre national de préparation, and Technology) veut d'études spatiales) a d'intégration et se positionner dans la joué un rôle, Astrium de lancement fabrication de petits fournira des images pour petits satellites sur mesure. des satellites d'obser- satellites Dubaisat-1, premier vation Spot et Terra- (Photo KARI). minisatellite destiné Sar-X/TanDem-X et à de l'imagerie de installera des stations haute résolution, a été fourni par l'entreprise de réception. Outre la formation d'une centaine sud-coréenne Satrec Initiative. Il a été mis en d'ingénieurs kazakhs, il y aura la création d'une orbite le 29 juillet dernier par un lanceur russe société commune pour la mise en œuvre d'un Dnepr à partir de Baïkonour. Dubaï s'est égale- centre de tests et d'intégration de satellites à ment doté d'une station de contrôle, d'un centre Astana, capitale du Kazakhstan. Deux satellites de réception et de traitement des images. Pour d'observation de la Terre vont être commandés développer Dubaisat-2, qui sera le premier à Astrium: un Astrobus 250, de 500 à 600 kg d'une famille de satellites compacts de 200 kg, (images de 2,5 m de résolution) et un Astrobus l'Eiast s'équipera d'installations d'essais et d'in- 100, de 50 à 100 kg. La technologie spatiale, tégration. avec ses études et carrières à valeur ajoutée, est considérée comme l'une des portes vers le Le Kazakhstan est une terre historique pour l'as- monde du futur. tronautique. C'est là que se trouve son berceau, le cosmodrome de Baïkonour qui a permis, à l'heure soviétique, de lancer les premiers Théo PIRARD Spoutniks (des sondes d'exploration de la Lune, [email protected] Vénus et Mars), ainsi que les vols spatiaux

Athena 254 / Octobre 2009 102 Inhaltsübersicht

Die Theorie vom Urknall (auch Big Bang genannt) ist aktueller denn je. Sie stammt von dem Belgier Georges Lemaître, der als erster diese für seine Zeit revolu- tionäre Idee von der Entstehung des Universums vorbrachte. Jean-Luc Léonard schildert den unglaublichen Werdegang dieses Denkers, von dem ein Athena n° 254 Theaterstück handelt, das gegenwärtig in den Schauspielhäusern läuft. Octobre 2009 Auf der Suche nach einem therapeutischen Impfstoff. Lässt sich das Immunsystem möglicherweise dazu anregen, Tumorzellen zu bekämpfen, so wie es viren- Ce mensuel d'information, tiré oder bakterieninfizierte Zellen beseitigt? Inzwischen weiß man, dass es à 13 500 exemplaires, est édité par le Antigene gibt, die das Immunsystem erkennt, insbesondere T-Lymphozyten, Département die eine Immunantwort generieren können. Philippe Lambert stellt die du développement Forschung-sergebnisse in diesem Bereich und ihren Nutzen im Kampf gegen technologique, den Krebs vor. Service public wallon Spw - DGO6 Depression: Entzündung und neuronale Plastizität. Mehrere Studien haben neuro- Place de la Wallonie 1, Bât. III logische Schädigungen aufgedeckt, die spezifisch bei Depressionen auftreten, à 5100 Jambes. und zwar in Form einer Atrophie des Hippocampus, das unter anderem bei der Téléphone vert: Modulation emotionaler Antworten eine Rolle spielt. Philippe Lambert 0800/11 901 (appel gratuit). erläutert die einzelnen Mechanismen und die hier relevanten Entzündungs- http://recherche-technologie.wallonie.be/ prozesse.

Geschichte … einer Präferenz. Wie ein zweiseitiger Spiegel beeinflusst eine Éditeur responsable: Neuronenpopulation des Striatums, die striatopallidalen Neuronen, sowohl die Michel CHARLIER, lokomotorische Aktivität als auch die Drogenabhängigkeit. Im Zuge jüngster Ir. Inspecteur général Experimente zeichnen sich jetzt neue Therapiemöglichkeiten zur Behandlung Ligne directe: 081/33.45.01. der Parkinsonschen Krankheit und der Drogensucht ab. Ein Artikel von [email protected] Philippe Lambert.

Katalogisiertes Wissen. In diesem zweiten Teil erklärt Christian Vanden Assistante de rédaction Berghen, inwiefern die digitale Welt unser Verständnis von Kategorien und Marie-Claude SOUPART Denkmustern verändert und welch unbegrenzte Möglichkeiten sich hier bie- [email protected] ten. Gegenstände können jetzt mehreren Kategorien angehören, was in der realen Welt nicht denkbar wäre. Christian Vanden Berghen erläutert die Graphiste verschiedenen Klassierungsarten mit ihren jeweiligen Vor- und Nachteilen. Nathalie Bodart Ligne directe: 081/33.44.91. Ein Flugzeug aus Polymer. Es hat die Größe eines Airbus, das Gewicht eines Personenwagens und die Antriebskraft eines Motorrollers. Ziel ist es, Tag und Impression: Nacht ohne Treibstoff fliegen zu können, allein mit Solarenergie. Ein innova- Les Éditions européennes tives Projekt mit überwiegend bekannten Materialien. Die Schwierigkeit bes- Rue Thiefry, 82 à 1030 Bruxelles tand jedoch darin, die Werkstoffe so anzupassen, dass ein leichtes, aber siche- res Fluggerät daraus entsteht. Eine Präsentation von Alain de Fooz. ISSN 0772 - 4683 Das Pressluftauto: Mythos oder Realität? Nach dem Benziner und Diesel gibt es Ont collaboré à ce numéro: inzwischen das Elektroauto. Doch es wurden noch weitere umweltschonende Jean-Michel Debry; Alain de Fooz; Antriebssysteme erforscht, unter anderem das kaum bekannte Pressluftauto, Paul Devuyst; Henri Dupuis; das Michel Wautelet uns hier vorstellt. Es bietet eine ganze Reihe von Damien Duvivier; Philippe Lambert; Vorteilen: umweltfreundlich, sparsam, unkompliziert und leichtgewichtig. Die Jean-Luc Léonard; Leistungen begrenzen allerdings die Einsatzmöglichkeiten. Dennoch ist das Yaël Nazé; Théo Pirard; Pressluftauto ein weiterer Schritt auf dem Weg zu einem saubereren Planeten. Jean-Claude Quintart; Géraldine Tran; Eine Herausforderung für die Menschheit. Hauptursache der globalen Erwärmung Christian Vanden Berghen ist nachweislich der Ausstoß von Treibhausgasen durch die Tätigkeiten und et Michel Wautelet. Techniken des Menschen. Paul Devuyst führt in diesem Artikel vor Augen, Traduction: Europaco. welche Anstrengungen der Mensch hierzu in den nächsten Jahren unterneh- men muss. Dies setzt allerdings einen internationalen Konsens voraus. Dessinateurs: Olivier Saive et Vince.

Weitere lesenswerte Rubriken: Comité de rédaction: News, von Jean-Claude Quintart, S. 55 - 61, und Henri Dupuis, S. 62; Michel Charlier; Marc Debruxelles; Bio-Info, von Jean-Michel Debry, S. 67 - 71; Jacques Moisse; Jacques Quivy; Physik-Info, von Henri Dupuis, S. 81 - 83; Marie-Claude Soupart et Astronomie, von Paul Devuyst, S. 96, und Yaël Nazé, S. 97; Michel Van Cromphaut. Weltraum, von Théo Pirard, S. 98 - 102.

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