La Lutte Pour Le Suffrage Féminin En Valais
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Clémentine Davet Travail de Maturité Léonard Barman 5G Espagnol Lycée-Collège de l'Abbaye Professeur accompagnant CH-1890 Saint-Maurice 2020 La lutte pour le suffrage féminin en Valais Vote des femmes, Martigny-Bourg, 2 mars 1957, Médiathèque Valais - Martigny RÉSUMÉ Dès la fin du XIXe siècle, le féminisme, et plus particulièrement le droit de vote des femmes, devient un sujet qui prend de l’ampleur en Europe. La première partie de ce travail s’intéressera donc au suffrage féminin en Angleterre ; notre but étant de nous attarder sur le déroulement de la lutte dans d’autres pays européens. Puis, nous nous pencherons de manière plus détaillée sur l’histoire du féminisme en Suisse et ce jusqu’à la votation fédérale de 1959 sur le suffrage féminin. La deuxième partie sera consacrée au suffrage féminin dans le canton du Valais. Tout d’abord, nous expliquerons comment l’Association valaisanne pour le suffrage féminin fut créée, en insistant sur ses fondateurs et ses objectifs. Ensuite, nous verrons pourquoi le résultat de la votation fédérale de 1959 est aussi faible et quelles ont été les conséquences de cette défaite. Enfin, nous nous intéresserons aux différents acteurs de la campagne pour le suffrage féminin en 1970. Dans la troisième partie, nous évoquerons principalement le 12 avril 1970, journée lors de laquelle les femmes valaisannes obtiennent le droit de vote et d’éligibilité au niveau cantonal. Nous verrons notamment les réactions des partisan·e·s et les premières mesures qui ont été appliquées seulement quelques mois après : cycle de conférences pour instruire les Valaisannes qui voteront et première votation pour les femmes en Valais à Gampel. Enfin, la quatrième partie s’intéressera brièvement à la votation fédérale de 1971, en la comparant notamment avec la votation cantonale de 1970. Finalement, nous parlerons de trois femmes politiques qui ont eu un rôle à jouer dans la décennie suivante : Gabrielle Nanchen, Edmée Buclin-Favre et Françoise Vannay-Bressoud, en expliquant qui elles sont et quels ont été leurs rôles dans la lutte en faveur des droits des femmes valaisannes. 2 TABLE DES MATIERES Introduction 4 1. Du féminisme au suffrage universel 5 1.1 L’Angleterre 5 1.2 La Suisse 8 2. Les prémices du suffrage féminin 12 2.1 Création de l’Association valaisanne pour le suffrage féminin 12 2.2 La victoire du non (1er février 1959) 13 2.3 Une longue campagne pour l’égalité 14 a. Les partisans 14 b. Les arguments des opposants 17 d. Le paradoxe « Nouvelliste » 18 3. Un jour historique (12 avril 1970) 19 3.1 L’appel des urnes 19 3.2 Les réactions 20 a. Partisans 20 3.3 Les premières mesures 21 4. Les répercussions du vote 22 4.1 La Suisse dit oui 22 4.2 Les femmes politiques en Valais 24 a. Gabrielle Nanchen 24 b. Edmée Bulcin-Favre 25 c. Françoise Vannay-Bressoud 25 Conclusion 26 3 INTRODUCTION Au début des années 50, la Suisse et le Liechtenstein sont les seuls pays d’Europe à n’avoir pas encore accordé l’égalité civique à leurs citoyennes1. Une longue lutte est menée par les Suisses, avec des votations communales, cantonales et fédérales sur lesquelles il faut parfois se prononcer plusieurs fois. L’histoire du suffrage féminin en Suisse débute au XIXe siècle. En 1833, les Bernoises qui ont une fortune immobilière ou autre en leur nom, ont le droit de vote dans leur commune suisse-alémanique. « Elles [doivent], il est vrai, se faire représenter dans les assemblées communales par un bourgeois de leur choix, mais qui [doit] voter selon leurs instructions »2. En 1852, cette loi devient exclusive pour les veuves et les célibataires. Puis cette représentation est abolie en 1887 car les autorités ne peuvent pas accorder aux Bernoises ce qui est refusé aux autres Suissesses. De plus, ceci est, ironiquement, contraire à l’article 4 de la Constitution fédérale : « Tous les Suisses sont égaux devant la loi »3. La lutte commence véritablement à la fin du XIXe siècle en Suisse. Les premières associations qui se battent pour l’amélioration de la situation juridique et économique des femmes et pour le suffrage féminin apparaissent4. En 1909, l’Association suisse pour le suffrage féminin (ASSF) voit le jour dans le but de promouvoir le suffrage féminin. Bon nombre des membres sont des femmes pour la plupart célibataires, universitaires et salariées. Durant la Première Guerre mondiale, les femmes rendent un certain nombre de services et l’ASSF « [soutient] les interventions socialistes en faveur du suffrage féminin et [s’engage] pour les votations qui [ont] lieu dans plusieurs cantons »5. Ces votations échouent toutes. Lors de la Seconde Guerre mondiale, l’espoir pour les associations féminines d’obtenir des droits politiques est toujours présent. Des projets de loi sont écrits puis rejetés dans quelques cantons. Différentes votations ont lieu, toutes se soldent par un échec. En 1959, une première votation sur le plan fédéral a lieu mais c’est également une défaite pour les partisan·e·s du suffrage féminin. C’est finalement en 1971 que la population suisse accepte d’octroyer le droit de vote et d’éligibilité aux femmes6. 1 N. JACQUEMET, Le suffrage féminin dans le canton du Valais, 1992, p. 70. 2 S. WOODTLI, Du féminisme à l’égalité politique, 1977, p. 8. 3 S. WOODTLI, Du féminisme à l’égalité politique, 1977, p. 8. 4 Y. VOEGELI, « Suffrage féminin », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS) en ligne, version du 17/09/19, url : https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/010380/2019-09-17/. 5 Z. KERGOMARD, « Association suisse pour le suffrage féminin (ASSF) », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS) en ligne, version du 12/06/19, url : https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/058044/2019-06-12/. 6 Y. VOEGELI, « Suffrage féminin », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS) en ligne, version du 17/09/19, url : https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/010380/2019-09-17/. 4 Le Valais fait partie des neuf cantons à avoir déjà institué le suffrage féminin avant la votation de 1971. C’est le 12 avril 1970 que les Valaisans se rendent aux urnes pour se prononcer sur le sujet du vote des femmes à l’échelon cantonal. Dans ce travail de maturité, nous allons expliquer la longue lutte que les citoyen·ne·s ont menée pour que la Suisse, et plus particulièrement le Valais, octroie le droit de vote aux femmes. Nous allons d’abord nous intéresser à l’histoire du suffrage féminin en Angleterre et en Suisse au début du XXe siècle. Concernant le suffrage féminin, plusieurs associations sont mises en place. En Valais, l’Association valaisanne pour le suffrage féminin (AVPSF) est créée. Nous remarquons que suite à la défaite de 1959, cette association, accompagnée d’une partie de la population, mène une longue campagne pour que les Valaisannes obtiennent le droit de vote en 1970. Les partisans et les opposants ont chacun leur argumentaire. Enfin, le 12 avril 1970 devient un jour historique pour le Valais : les Valaisans se prononcent favorablement à l’octroi du droit de vote et d’éligibilité aux femmes pour toutes les affaires communales et cantonales. La Suisse dit oui en 1971. Quelques années plus tard, les Valaisannes peuvent s’engager officiellement en politique. Dans ce travail, nous allons nous attarder sur le parcours de plusieurs d’entre elles. Ce travail a pour but de présenter la longue lutte qui mène à l’octroi du droit de vote aux femmes en Valais. 1. DU FÉMINISME AU SUFFRAGE UNIVERSEL 1.1 L’Angleterre « Dans les pays anglo-saxons prédominait, sous l’influence de John Stuart Mill, la conception de l’égalité de l’homme et de la femme et, par conséquent, l’exigence d’un traitement égal des deux sexes »7. Le XIXe siècle au Royaume-Uni est traversé de tensions politiques, économiques, sociales et culturelles. C’est dans ce contexte qu’émergent les mouvements politiques et sociaux qui visent à transformer le visage du pays. La lutte pour le droit de vote des femmes vient s’inscrire dans ces mouvements avec comme but de corriger les inégalités subies par les femmes. 7 E. JORIS, « Féminisme », Dictionnaire historique de la Suisse (DHS) en ligne, version du 23/10/06, url : https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/017427/2006-10-23/. 5 Dans les années 1860 et 1870, les premiers comités pour le droit de vote sont créés au Royaume-Uni : la Société nationale pour le droit de vote des femmes de Manchester8 et le Cercle des dames de Kensington9. Durant ces années, le principe d’égalité entre les hommes et les femmes est un principe jugé très radical. En 1866, John Stuart Mill10 se saisit du débat sur l’élargissement du suffrage censitaire pour demander le droit de vote pour les femmes. Il récolte mille quatre cent nonante-neuf signatures11 et présente la pétition au Parlement. À l’occasion de ce débat, John Stuart Mill écrit le texte : The Subjection of Women12. Lorsqu’il reçoit la proposition de publier une œuvre entièrement consacrée à la condition des femmes, il se juge incapable de tout dire. Toutefois deux ans plus tard, soit en 1869, il se décide finalement à publier son œuvre rédigée auparavant : The Subjection of Women13. En 1867, le philosophe défendait également le premier débat sur le droit de vote des femmes qui a lieu à la Chambre des Communes. En 1869, les femmes britanniques imposables, c’est-à-dire les célibataires ou les veuves, obtiennent le droit de vote aux élections locales. C’est l’année suivante qu’une première proposition de loi relative au vote des femmes, écrite par Richard Pankhurst, est présentée au Parlement par Jacob Bright.