Les Sites Fortifiés Protohistoriques Du Haut-Beaujolais : Bilan De Trois Années De Recherches Entre Loire Et Saône
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Documents d’archéologie méridionale Protohistoire du Sud de la France 40 | 2017 Habitats de hauteur et fortifiés à l’âge du Bronze et au premier âge du Fer entre Alpes et Massif central Les sites fortifiés protohistoriques du Haut- Beaujolais : bilan de trois années de recherches entre Loire et Saône Bastien DUBUIS Édition électronique URL : https://journals.openedition.org/dam/5133 DOI : 10.4000/dam.5133 ISSN : 1955-2432 Éditeur ADAM éditions Édition imprimée Pagination : 57-72 ISBN : 2-908774-29-1 ISSN : 0184-1068 Référence électronique Bastien DUBUIS, « Les sites fortifiés protohistoriques du Haut-Beaujolais : bilan de trois années de recherches entre Loire et Saône », Documents d’archéologie méridionale [En ligne], 40 | 2017, mis en ligne le 01 janvier 2020, consulté le 01 juillet 2021. URL : http://journals.openedition.org/dam/5133 ; DOI : https://doi.org/10.4000/dam.5133 Tous droits réservés 57 Bastien DUBUIS Les sites fortifiés protohistoriques du Haut-Beaujolais : bilan de trois années de recherches entre Loire et Saône Résumé : Dans le cadre du PCR dirigé par F. Delrieu, un programme de prospection des sites fortifiés de hauteur a été engagé entre 2013 et 2015 dans le Haut-Beaujolais, territoire auparavant méconnu dans ce domaine. Ces recherches ont permis la découverte de 19 sites inédits, portant à 22 le corpus local. Sur l’espace investi, de près de 1000 km², 344 sommets ont été vérifiés, selon une approche voulue systématique. Le corpus est essentiellement constitué d’enceintes complètes ou partielles, dont la superficie varie de quelques milliers de m² à près de 3 ha pour le site le plus étendu. Deux des sites inventoriés ont fait l’objet de sondages, permettant de documenter pour l’un d’eux une occupation du Ve s. av. J.-C. La plupart des autres sites sont encore mal datés, mais leur attribution à la protohistoire paraît confortée par quelques indices matériels et architecturaux. Replacées dans le contexte régional, ces occupations s’inscrivent vraisemblablement en continuité d’un phénomène redondant à la fin de l’âge du Bronze et à la fin du premier âge du Fer. Mots-clefs : Beaujolais, enceinte, éperon barré, prospections, terroirs Abstract: A survey of fortified hill sites in the Haut-Beaujolais has been carried out for the research program directed by F. Delrieu in an area where few sites of this type had been recorded. The survey has brought to light 19 previously unknown sites bringing the total number of sites up to 22 in a 1000 km² area where 344 hilltops were systema- tically studied. The database is mainly made up of complete or partial enclosures varying from several 1000 m² to almost 3 hectares. Trial trenches were dug on two sites, leading to the dating of one site to the 5th century BC. Even though few of the sites have been dated, they were probably founded sometime during Late Prehistory according to material and architectural indicators. Replaced within a regional context, these occupations follow on from the already confirmed phenomenon of hill top sites dating from the end of the Bronze Age to the end of the Early Iron Age. Keys-words: Beaujolais, defensive enclosure, Barred spur, surveys, terroirs 58 BASTIEN DUBUIS de sites perchés et/ou fortifiés sont autant de caractères 1. Introduction propices à l’installation des communautés humaines, au moins depuis le Néolithique. En 2012 débutait en région Rhône-Alpes un vaste programme collectif de recherches intitulé Les habitats 1.2. Contexte archéologique fortifiés à l’âge du Bronze et auer âge1 du Fer sur le versant oriental du Massif Central. Dirigé par F. Delrieu (S.R.A. Auvergne - Rhône-Alpes), ce projet achevé en 2015 avait Le cœur du territoire en question ici n’a pas, pour l’ins- pour ambition de recenser et d’étudier les sites fortifiés tant, été touché par l’archéologie préventive ; les données protohistoriques des départements de la Loire, du Rhône le concernant sont donc souvent anciennes et lacunaires. et de l’Ardèche (Delrieu et al. 2014). Le Haut-Beaujo- Malgré tout, découvertes fortuites et recherches d’ama- lais constituait le secteur le plus septentrional de l’espace teurs dessinent, autour des vallées du Reins et de la Tram- investi par ces recherches. La morphologie collinaire favo- bouze (à l’ouest, donc, face au pays Roannais), un terroir rable à l’installation de sites fortifiés de hauteur, la présence anciennement occupé (Dubuis 2011) : nous n’évoquerons de quelques découvertes anciennes, motivaient un travail ici que ce secteur, sa périphérie restant méconnue. de prospection systématique qui n’avait encore jamais été mené entre Loire et Saône. Réalisées entre 2013 et 2015 La période s’étendant de la fin du Néolithique à l’extrême fin (Dubuis 2017), ces recherches ont porté essentiellement du deuxième âge du Fer reste globalement peu renseignée ; sur le Haut-Beaujolais, c’est-à-dire sur le nord-ouest du en dehors des sites fortifiés dont le sujet sera développé département du Rhône ainsi que quelques communes de la ici, seuls quelques rares indices permettent d’envisager frange orientale du pays roannais, dans la Loire. une présence humaine dans le secteur, pendant l’âge du Bronze et la plus grande partie de l’âge du Fer. Ainsi, en 2013, la découverte d’une pointe de flèche à pédoncules à 1.1. Contexte géographique Bourg-de-Thizy « Le Cholet » (Dubuis 2015a) avait fourni un indice discret de la présence humaine dans la vallée de la Trambouze, vers la fin du Néolithique ou au Bronze Le Beaujolais, partie intégrante du Massif central, constitue ancien. Depuis 2007, les travaux d’aménagement menés à une petite chaîne de moyenne montagne, d’orientation Bourg-de-Thizy, sur la « Zac des Granges », ont permis de générale nord/sud, limitée à l’ouest par la vallée de la ramasser parmi les abondants vestiges antiques, quelques Loire et à l’est par celle de la Saône. Les Monts du Beau- tessons de céramique pouvant remonter à l’âge du Bronze jolais sont prolongés, au nord, par les monts du Mâconnais ou au premier âge du Fer. Le dépôt « d’armes en bronze » puis par le Morvan, au sud, par les Monts du Lyonnais. Le découvert anciennement à Mardore, sur « La Terre des Haut-Beaujolais en constitue la bordure occidentale ; l’al- Mille », est un indice intéressant mais seulement relayé par titude y varie de moins de 300 m (bordure du cours majeur la tradition orale (le mobilier n’est pas conservé). Il faut de la Loire) à plus de 1 000 m (Mont Saint-Rigaud). Il est également signaler la découverte d’un ensemble d’armes parcouru de plusieurs vallées structurantes, celle du Reins en fer près des « Perrats » et de « Rottecorde » au Col de la et de l’Azergues en étant les principales. Au cœur du Bûche, sur la commune d’Ecoche. L’origine funéraire de massif, ces vallées affectent une orientation générale nord/ ce dépôt mis au jour en forêt, dans un amoncellement de sud et constituent de forts obstacles à la traversée d’est en pierres, n’est pas assurée (Lavendhomme 1997, 93). ouest. Elles s’infléchissent ensuite en aval, soit à l’ouest (le Reins, qui se jette dans la Loire), soit à l’est (l’Azergues, L’engouement pour l’archéologie celtique et la civilisation qui se jette dans la Saône). Les vallées secondaires maté- des oppida, au XIXe et au début du XXe s., s’est ressenti rialisent au contraire des crêtes d’orientation est-ouest, dans le secteur considéré par l’identification de quelques plus propices aux passages humains transversaux, permis sommets fortifiés, à partir d’arguments souvent peu étayés. par plusieurs cols. De manière générale, la position de cet L’identification du site du « Terrail » à Amplepuis à un espace, au point où les vallées de la Loire et de la Saône oppida constitue un exemple d’erreur manifeste (De Varax sont les plus proches, l’altitude somme toute modeste du 1895), l’occupation correspondant à un établissement relief, les ressources abondantes en eau et en matériaux rural enclos de la fin de La Tène. L’érudit Dr. Lhéritier, qui de construction, la topographie favorable à l’édification publie en 1926 un premier et utile recueil de découvertes Documents d’Archéologie Méridionale, tome 40 - 2017 © ADAM éditions (2018) LES SITES FORTIFIÉS PROTOHISTORIQUES DU HAUT-BEAUJOLAIS : BILAN DE TROIS ANNÉES DE RECHERCHES ENTRE LOIRE ET SAÔNE 59 archéologiques du secteur de Cours-la-Ville (Rhône) fait Le mode opératoire a consisté en la vérification systéma- également preuve de celtomanie en mentionnant plusieurs tique de tout relief susceptible d’accueillir des fortifications oppida dans les hauteurs environnantes1. Ces sommets ont de type enceinte ou rempart de barrage, et pas seulement été évidement vérifiés et aucun indice de fortification n’y des points de hauteur les plus importants. Les recherches est relevé. Un autre oppidum est mentionné au « Bois du ont donc tendu vers une exhaustivité, qui a pu être atteinte Puy / La Fulie » à Amplepuis par C. Aubonnet, sans argu- dans certains secteurs (autour de la Trambouze et du Reins ment valable2 (Aubonnet 1964). Le même auteur rapporte par exemple). Cette méthode impliquait une concentration la présence d’une enceinte quasi-circulaire au « Crêt-Châ- des recherches sur un secteur initial réduit (« l’entre Reins tain » à Fourneaux, enceinte non retrouvée pour l’instant. et Trambouze », secteur au contexte le mieux connu actuel- Au final, seuls trois sites fortifiés identifiés anciennement lement), d’environ 400 km² de superficie, avec extension pouvaient être retenus dans le corpus : le cas du « Bois-Du- progressive vers les marges. En 2014, les prospections rieux » à Mardore, du « Crêt Neiry » à Saint-Just-d’Avray se sont étendues au nord, où se trouvent les plus hauts et de la « Pyramide » à Lamure-sur-Azergues (Faure-Brac sommets du Rhône, à l’est sur la vallée d’Azergues et au 2006).