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mensuel

Revue culturelle à tendance musicale... Actualité non exhaustive, enthousiasmes et fulgurances. Quelques fondus polyvalents se répandent sur le Web et activent le bouche à oreille en vous mettant le doigt dans l’oeil.

à emporter ou à consommer sur place edito sommaire

Tête en l’air, l’air en tête... chroniques Y a-t-il toujours une musique dans votre esprit ? cd/dvd rdv manqué spectacles Celle du supermarché, celle de l’ascenseur, celle du le chanteur oublié générique d’un dessin animé le matin ? la porte ouverte Cela vous est-il déjà arrivé de fredonner inconsciem- ment la «Corinne» des VRP ou de Pierre Perret de- interrogations écrites vant une amie du même nom ? dis-moi qui tu suis Après un concert, n’est-ce pas toujours une chan- au doigt et à l’oeil son qui n’a pas été chantée qui nous poursuit ? Voire celle qui aura été mise à l’allumage de la salle rencontres pour faire fuir les spectateurs ? interviews scriptées Ne vous a-t-on jamais dit «ah non, avec tes conne- le jeu de la barbichette ries, je vais avoir ‘Vanina’ en tête toute la journée!» ? hors chant Lorsqu’une connaissance soupire «j’voudrais bien» decryptage avec lassitude, n’avez-vous pas envie de rajouter reportages «mais j’peux point/c’est pas commode/d’être à la mode/quand on est bonne du curé» ?! le doigt dessus Non ? Vraiment pas ?! Alors c’est moi, peut-être... radios et médias La fi lle de la chèvre l’air du temps par ignatus

les doigts de la main le point de vue d’éric mie la rédaction

dans ce numéro : H-F Thiéfaine - Sttellla - MIG Benoît Morel (ex-la Tordue) - Gérard Blan- chard - charlotte etc.- Marka - J. Dutronc - MC Solaar - Du cinéma avec Grégori Deran- gère - Renan Luce - Henri Tachan - Festival de Marne- Festival des Musiques émergen- tes (Québec) - F. Hadji Lazaro - Sarclo/Bel Hubert/Simon Gerber... page 2

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caressent les idées dans le sens de l’idéal. Il y a plus de force dans « Le temps des cerises » que Piers FACCINI Lara GUIRAO «J’aime beaucoup ce que dans les chants guerriers de re- «Tearing sky» vendication, parce que le temps vous faites...» des cerises chante dans la voix des enfants, et plante les grai- Pour son deuxième opus, Piers Dans un monde du showbiz un nes de ces envies d’absolu dans Faccini est parti aux US bosser peu phagocyté par le syndrome lesquelles chacun de nous a une avec la bande de Ben Harper, il performance, au niveau des chif- part, et se reconnaît , un jour ou a eu envie de mettre le paquet le fres de vente autant que des dé- l’autre, parce que le temps des garçon : résultat...en demi teinte. cibels vocaux, quelques résistants cerises, c’est l’espoir d’un rêve Mais tout d’abord, Piers c’est une s’attachent à explorer les sentiers à cueillir, presque à la portée du voix, magique, rare, teintée de à l’écart des autoroutes. Histoire bras tendu. Qui peut être poing blues, qui rappelle les folksingers de respirer un air plus frais, plus fermé, ou main ouverte, l’un pou- style Tim Hardin, et surtout Nick léger, plus subtil. vant devenir l’autre (Salut Allain Drake, une voix qui fait craquer Il y a un peu plus d’un an, Lara Leprest). les fi lles et tout le reste. Cette voix Guirao terminait la maquette d’un Dans ce disque, Henri Texier, est encore plus belle qu’avant, disque, dont une chanson fut re- Hassan Hadji, Bernard Lubat, elle a pris des coups, mais est tenue dans la sélection Inrocks’ Marc Perrone et Patrick Sigwalt de plus en plus puissante, car CQFD 2006. ont offert leur talent pour une mar- Piers a beaucoup tourné et pas Ensuite, de scène en scène, elle che en avant vers une révolution forcément dans des théâtres où a fait vivre ses chansons, et la vie poétique. le public écoute religieusement. continue. (voir le reportage « Sous Belle proposition de programme. Les chansons sont presque des les étoiles » pour plus de détails) standards. De ce côté rien à dire. Cet album « avance note après Norbert Gabriel Du coup, on aurait envie de rien note, sur un fi l et sans fi let » regard d’autre que çà : la voix, la gui- amusé et lucide de quelqu’une qui Citations de Lara Guirao, Jean de tare, les chansons. Mais la pro- est « chose légère et vole à tout La Fontaine, et Michel Rio, réfé- duction...La production, elle est sujet, et va de fl eur en fl eur et rences sur demande. timide, bizarre d’ailleurs pour des d’objet en objet » mais la légèreté gros ricains qui sont censés assu- apparente, la fragilité ne sont pas www.lara.guirao.free.fr rer à mort ! Le disque sonne plus faiblesse ou détachement, il y a home studio que gros son. Mais une mémoire vive jamais blasée bon, faut rassurer la maison de de ces vieux rêves qui bougent. disques... A force de vouloir être « Sans l’action, le rêve est creux, trop fi n, de trop bon goût, tout fait et sans le rêve, frère de l’idéal, fabriqué et on se demande par- l’action est vaine » fois où est la sincérité... On trouve tout cela, des paysages A quand un enregistrement live familiers où chacun peut retrouver en solo ? un peu de soi, des tranches de vie esquissée en demi-teinte, des Elsa Linux sensations plus que des affi rma- tions, une invitation à un voyage www.piersfaccini.com de mots et de musiques qui vous page 3

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(Comment ta mère aurait pu ima- Tout est bon dans ce disque. Je François giner / Que quand tu serais gran- ne peux pas dire mieux. C’est de, tu allais la remplacer / Que le HADJI-LAZARO mon coup de cœur du mois. Vive travail à la chaîne existerait en- le gros François !... « Aigre-Doux » core / La chaîne, méprisante de la vie à la mort.) « Libéral » dé- Eric Mie Un album joyeusement triste (et nonce, ironiquement, tous ces réciproquement…) discours, qu’on nous balance cha- Tiens revoilà le gros François !... www.lazaro.artistes.universal Comme on le disait au temps béni que jour dans les médias, afi n de music.fr de la scène alternative. A l’époque mieux avaler l’horrible pilule ultra- il tournait dans trois groupes diffé- libérale (La raison du plus fort est rents : Los Carayos, Les Garçons toujours la meilleure / Protégeons le capital, tous en chœur). Mais bouchers et, le meilleur à mon LOZT goût, Pigalle. Il était également ce n’est pas qu’un disque de pi- le grand manitou de « Boucherie rate. C’est aussi un plaidoyer pour «l’homme Production » qui a donné la cou- la tendresse, pour l’être humain, ordinaire» leur musicale de toute une décen- pour le monde et pour l’amour. « nie en découvrant des artistes de Ma petite grande, écoute-moi », Si c’était un voyage, ce serait une talent comme Mano Négra, Les Elles ou Clarika. dialogue entre un vieux papa et sorte de scenic railway nonchalant Tiens revoilà le gros François !... sa grande fi lle déçue pour la pre- dans un monde rythmé à la façon Voyons un peu si le chantre de mière fois pas l’amour, est une jo- des Temps Modernes, avec des l’underground made in en lie perle de douceur. Pour la mu- clairières brièvement ouvertes sur a toujours dans le bide. Je mets sique c’est sautillant et entraînant. des tableaux de Klimt, de Grimault le disque et j’écoute. Et ça fait François Hadji-Lazaro a fait le ou de Dali. du bien de le retrouver. Il n’a pas pari de mélanger des textes durs Tel un fl âneur du pavé qui cueille changé. Je dirais même plus : il avec des musiques jovialement dans le béton, le verre et l’acier n’a pas oublié d’où il venait et, ô survitaminées. C’est encore lui qui l’ombre rouge d’un coquelicot, joie, il a une patate d’enfer !... A fait quasiment tout : les paroles, Lozt est un chef d’orchestre qui l’heure où la mode est de décrire un quotidien fade fait de souve- les musiques, les arrangements met en symphonie les bruits de la nirs Gloubi-Boulgaèsques, ça fait mais aussi le joueur de vielle à ville pour en faire un kaléidoscope énormément de bien d’entendre roue électro-acoustique, de gui- d’images sonores façon Man Ray des textes lucides et mordants. tare acoustique et électrique, de et ses solarisations... Le joyeux folk « A y’est le monde violon, de percussions vocales, Si c’était un voyage, ce serait une est en cul de sac » qu’on ne de- de samplings, d’accordéon chro- sorte de scenic railway nonchalant vrait pas tarder à entendre dans matique et diatonique, de oud, de dans un monde rythmé à la façon les futurs manifs, donne envie de guitare portugaise, de cornemuse des Temps Modernes, avec des se battre. « 40 ème jour de grève du centre, de clarinette, de fl ûte clairières brièvement ouvertes sur des tableaux de Klimt, de Grimault » nous parle de toutes ces luttes traversière, de mélodéon (ah ?... qui n’ont rien donné mais qui ont ou de Dali. eu le mérite d’avoir existé. Tout J’connais pas.), de banjo 4 et 5 Tel un fl âneur du pavé qui cueille comme « A la chaîne » qui est, à cordes, de Cavaquinho (?), d’har- dans le béton, le verre et l’acier mon avis, la seule et unique chan- monica, de madoline, de cromorne l’ombre rouge d’un coquelicot, son d’aujourd’hui qui nous parle (??), de basse électro acoustique, Lozt est un chef d’orchestre qui de ceux qui y sont toujours. de claviers et encore de etc. met en symphonie les bruits de la page 4

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ville pour en faire un kaléidosco- Or pas de manipulation hasar- l’ensemble de son album. Regar- pe d’images sonores façon Man deuse chez Renan Luce : frais, dez la pochette : la guitare couver- Ray et ses solarisations … On a léger, limité bio, d’une traçabi- te de goudron et de plumes, tel un l’impression d’un décor en noir lité irréprochable qu’il revendique Assurancetourix catapulté direct et blanc très strict derrière lequel dans sa seule chanson ouver- chez Lucky Luke … go phare ouest les couleurs frémissent. tement autobiographique : ‘Mes young man ! Ecoutez cette guitare, Racines’. Nature, il porte une d’un premier abord très Brassens, Norbert Gabriel grande attention au destin des avant que le folk ne s’impose, as- feuilles qui deviennent pages si cendant Bob Dylan. Et jusqu’à sa www.lozt.free.fr elles n’y prennent garde, supports voix : rauque certes, mais entre le bien malgré elles de confessions vibrato des singing lovers italiens tragiques (‘je suis une feuille’) ; et celui de Tom Waits, là encore, il nature quand il s’intéresse aux y a un monde… fl eurs pourvu qu’elles soient de Et pourtant il tourne ! Alors pro- Renan LUCE rhétorique (‘l’iris et la rose’)… fi tez-en pour découvrir son pro- «Repenti» Pour autant Renan Luce n’a rien gramme en détail, sur CD pour d’un ermite passéiste ou d’un hys- commencer et sur scène pour les FIAT LUCE téro-écolo hirsute et misanthro- veinards. Vous verrez qu’un autre pe, bien au contraire. Alter mon- monde est possible : votez Renan Cessons la langue de bois : il ar- dialiste au sens propre, il semble Luce ! rive un moment où il faut avoir le en permanence chercher l’autre, courage de ses opinions. Aussi je les autres, et l’ailleurs aussi. Son Mélanie Plumail l’affi rme haut et fort aujourd’hui : univers se peuple d’individus je n’aime pas tellement l’automne. plus ou moins bancals et interlo- www.renanluce.artistes.univers L’autre jour par exemple, j’étais pes, cousins des personnages de almusic.fr assise devant l’ordinateur, le thé Fersen, Alexis HK, Nicolas Jules vert à gauche, les vitamines al- ou Polo : le mari de la ronfl euse En concert : phabétiques à droite ; il était dans (‘Nuit blanche’), la bouillonnante 7/11 - 28/11 à (Tria- les 15h25, le soir tombait… hon- fi lle perdue aux adresses mala- non) - 1/12 à Paris-La Défense nêtement j’avais moyennement droites (‘la lettre’), la troupe épui- dans le cadre du festival Chorus l’humeur à la baguenaude. sée, digne de Freaks, d’un cirque des Hauts de Seine... Quelle ne fut pas ma surprise moribond (‘Lacrymal Circus’), IGNATUS signe dorénavant aus- donc, d’entendre les premières l’homme battu par sa maîtresse- femme (‘le chien mouillé’), le cro- si une chronique sur les textes notes de ‘Voisines’ et de voir ins- de chansons, dans l’émission de tantanément pousser dans mon que-mort narcoleptique (‘Mon- Mélanie Bauer «L’éléphant effer- bureau des pommiers et des ce- sieur Marcel’), la petite sœur vescent» (Radio Nova, 20h00 - risiers en fl eurs ainsi que l’envie, d’Amélie Poulain (‘Camelote’) ou 23h00). quasi-irrépressible d’enfi ler une le mafi oso carte vermeille nos- IGNATUS accompagnera égale- robe légère et de virevolter gaie talgique de ses nuits pailletées ment (melodica, harmonica, gui- ment, les bras tendus, les yeux au dans une Amérique carte postale tare...) sur scène LUDO PIN : ciel et les cheveux au vent (toute (‘Repenti’). Et pareil à tous ses 25/11: 1re partie de Dominique A, autre association me semble anti-héros, Renan Luce rêve par- Institut Polytechnique St Louis, fois d’être James Bond, une mi- Cergy (95) périlleuse). J’en suis restée per- 29/11: BERCY !!!!!!! pour les Nuits plexe, d’autant que les pommiers nute entre aujourd’hui et demain (‘24h01’) et on retrouve en fait Parisiennes organisées par Louise et les cerisiers ne fl eurissent pas Attaque et Yapuca en même temps. cette légère transgression dans

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à jeter un coup d’œil sur le site internet : www.lesoldatrose.com, Seb MARTEL histoire de pénétrer dans l’atelier « Le Soldat de miss Betty Quette et de jouer à «Coitry?» Rose » votre tour en déguisant par exem- ple les personnages. Il y a éga- D’abord, ça commence par un ob- Ca y est ! Il est lancé le garçon ! lement possibilité de télécharger jet…une jolie petite boîte en car- L’ album Ragalet était réussi pour quelques chansons de ce « conte ton pleine de tout un monde visuel un premier coup d’envoi, mais musical pour les enfants et ceux et sonore. Des dessins évocateurs était un peu timide et disparate. qui le sont restés » dixit un enfant et des chansons qui racontent la Ceci dit, il contenait tout de même d’Emilie Jolie, devinez lequel… le tube «Dumb». Cette fois-ci, Mr. rencontre entre un enfant (Raoul Le Pennec) et un jouet, le fameux Martel s’est trouvé à 100% et il Mademoiselle Arthur signe un double album (ça existe Soldat Rose (-M-), invendu pour défaut de fabrication. encore aujourd’hui ?) parfait : un www.lesoldatrose.com premier folk (countryside) l’autre Figurez-vous que ce dernier est le chef d’une joyeuse bande de plus blues rock urbain (city limits) En concert : jouets bien incarnés dont Alain : ça, c’est Seb Martel tout craché, 12/11 Grand Rex pour deux repré- Souchon en homme de ménage entre la campagne d’Angers et Pa- sentations dans la même journée. mélomane ou encore Sanseverino ris. Cette musique mélange chan- Sortie de l’album le 6 novembre et en conducteur de train aux airs de son (français et anglais), blues, des deux livres le 2 novembre. country, folk, rock, afrique. De bout Django Reinhardt. Qui sait, vous en bout, l’album est chaleureux, vous laisserez peut-être entraîner on a l’impression de pouvoir tou- par le rap du coussin puzzle inter- cher les musiciens, on dirait que prété par un certain Albin de la Si- c’est des potes qui t’envoient leurs mone ou vous abandonnerez-vous ERIC TOULIS à d’autres voix familières comme démos ! Enfi n, les potes qui assu- «Soyons rent... C’est très fi nement Lo-Fi celle de Catherine Jacob qui vous tout ça. Comme ces vieux albums guide tout au long de l’histoire. De classe» de Dr John, Captain Beefheart, ou quoi rassembler des personnalités même les vieilles demos de gram et des univers bien différents. Un disque à écouter le matin. Parsons, il y a toujours un petit dé- Bref, vous serez loin de vos sur- tail, une fi nesse qui vient titiller le prises quant à la répartition des Zazou égaré dans le milieu de tympan en douceur. Evidemment, rôles. Cependant il semblerait que la chanson française, Eric Toulis tous les potes ou presque sont là: les personnages n’ont pas été a plusieurs cordes talentueuses camille, M et sa bande, Piers Fac- créés en fonction de leur interprète à son arc. Déjà celui de porter cini, et j’en passe, qui participent (selon le dossier de presse), mais le plus beau prénom de la terre, comme compositeurs parfois ! Un cela reste encore à prouver… ensuite celui d’être un bon auteur disque rare en France en ce mo- Louis Chédid et Pierre Domini- compositeur interprète, ainsi qu’un ment. Une réussite totale à décou- que Burgaud sont les très inspirés bon guitariste et trompettiste, et vrir sur scène absolument. auteurs et compositeurs de cette enfi n celui d’être sympa puisque aventure, tant humaine que fan- les gens qui le connaissent m’ont Elsa Linux tastique, au cœur de la société de tous dit de lui qu’il l’était. consommation. D’ailleurs ce n’est pas un hasard www.sebmartel.com Pour un avant goût, n’hésitez pas si Bénabar, Sanseverino, Charles page 6

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Dumont, Christian Olivier des Tê- chef m’a dit qu’il fallait faire pro. albums de Sarclo, ses crus millé- tes raides et Charlotte Etc chantent Y’a du Trenet chez lui, mais aussi simés de Côte du Rhone produc- avec lui sur cet album : « Le coin du Ricet Barrier et du, je sais ça tions. De la belle œuvre pédagogi- de nappe ». va vous étonner, Julien Delli Fiori. que. En revanche, je l’avoue, je ne La musique, vous l’aurez compris, Pourquoi Julien Delli Fiori? Parce connaissais pas Bel Hubert et Si- est proche du jazz manouche mais que j’imagine que si mon anima- mon Gerber (c’était un tort). M’en- aussi des orchestres des années teur Jazzophile préféré (spécialis- fi n, que je me suis dit en voyant 50 qui faisaient danser dans les te du jazz à Radio France et pro- leur album, si avec l’un c’est jouis- caves voûtées de Saint Germain grammateur sur Fip que Toulis cite sance à tous les étages, à plu- des Prés. Les paroles quant à el- dans « La chanson du matin ») se sieurs, ma parole, ça ne pourra les, c’est du Francis Lemarque lance un jour dans la chanson ça qu’être réjouissant. De fait. Bénabarisé. Je veux dire par là sera en en faisant des comme ça. Réjouissantes agapes donc, de que ça fait Titi parisien à la sauce Bref « Soyons Classe » porte bien frères Jacques hilares et inter- d’aujourd’hui. son titre pour peu que vous aimiez générationnels qui délivrent des Il nous parle d’une tour Eiffel la joie de vivre, le swing, la trom- chansons agitées, petites sœurs libertine : pette et la malice. Petit conseil acrobates de celles de Boby La- « Si elle a mauvaise conduite/ d’utilisation : écouter ce disque pointe, Boris Vian ou encore Fran- Si elle se livre à l’adultère/ plutôt le matin. Vous tremperez cois Béranger. En ponctuation C’est que son papa l’a construite/ vos croissants avec plus de bon- fi nale on trouve même la reprise, Avec les quatre fers en l’air » heur. Parole de pro. presque évidente du ‘cul de ma Et fi nalement on se dit qu’il n’y en a sœur’ (Aznavour/ Dimey). pas tant que ça des chansons sur Eric Mie L’infernal trio manie avec brio la la Tour Eiffel. métaphore fi lée à forte connota- Il nous parle aussi de « La femme www.toulis.com tion érotique (‘la main verte’), voi- des autres » qui nous fait tous fan- re l’érotisme sans métaphore fi lée tasmer en faisant un petit clin d’œil En concert: (‘la fi lle du tracteur’); la polka ap- à tonton Georges : 3 et 4/11 Paris (Limonaire) proximative et le yodl 2nd degré ; «Le long de la vie et des rues 17 au 26/11 dans l’Oise l’humour noir expresso (‘du brun’); On croise seules ou bien pendues 30/11 Paris Bercy invité Bénabar les interludes et ‘bonus track’ ahu Aux bras d’inconnus qu’on déteste Des femmes au charme manifeste Ca nous fait comme dans Les Pas- santes / La jolie chanson de Bras- sens / On a le cœur qui déjante/Et SARCLO/ le temps d’un fl ash on en pince» BEL HUBERT/ Et comme jadis Michèle Bernard, S.GERBER d’une Dame Pipi bien sympathique «Quinzaine du blanc chez les «Mais ce dont je suis la plus fi ère trois suisses» En plus d’être dame pipi / C’est de ma collection de graffi tis / Et de Qui redoute les 3 Suisses ? poèmes qui parlent de fesses Que mes petits pensionnaires Pour une fi lle élevée aux em- me laissent / Sur les murs blancs bruns, la Suisse, c’est mystérieux. rissants. Et puis quand même par- de leurs cellules / Cette prose toute Comment vous expliquer ? Vous fois, il y a aussi de le tendresse en fi nesse / Qui rime en «ouille» voyez Sylvie Testud dans Stupeur (bordel) avec des chansons com- qui rime en «ule». et Tremblements ? Ben il y a de me ‘balade’ ‘les crayons de cou- Et pis encore d’autres trucs mais ça. Alors je me cultive. leur’ ou ‘juste un mec’ (chacun la je vais pas tout vous citer sinon ça Dans ma discothèque par exem- leur, pas de jaloux). A la première fera pas pro. Et ma rédactrice en ple, j’ai le vichy multicolore des écoute je sentais bien que des page 7

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cd / dvd rdv manqué choses m’échappaient : ‘le téléski’ çois Schneider, Denis Wetterwald m’est étranger, le suisse allemand et Bernard Joyet (j’en soupçonne encore plus, même traduit (‘Dr Al- certains d’être suisses, mais bon). pefl ug) : Stupeur et Tremblements Et puis après, vous verrez ça vient Philippe VAL vous dis-je. tout seul, vous irez vous procurer «Ouvert la Alors pour continuer mon étude : les albums solo des uns et des nuit » j’ai collé le DVD dans la fente idoi- autres. De toutes façons, il sem- ne. Qu’y vis-je ? Une petite scène blerait qu’ils fassent des trucs plus Principalement connu aujourd’hui éclairée d’abats-jours fl euris et ou moins avouables ensemble en tant que journaliste et directeur d’ampoules guinguette, rehaus- même en solo (je me comprends). de Charlie Hebdo, Philippe Val a sée de la mine satisfaite des trois Dernier argument de choix : les longtemps été chanteur notam- Helvètes. Et Sarclo le pied plâ- trois Suisses ont l’esprit logique et ment au côté de Patrick Font. tré sur une chaise, ponctuant de pragmatique et vous pouvez très Voilà un drôle de personnage vastede vastes mouvements de facilement obtenir leur CD-DVD que ce Philippe Val. Un person- béquilles une chanson de vieillard par correspondance. nage que je connais depuis belle indigne (‘Chanson posthume’)…, lurette. Car à l’heure où d’autres ou en rythmant une autre à coup Mélanie Plumail ados dansaient sur d’improbables d’allumage manuel et alternatif discos et relisaient les « Waouuuu des dites ampoules C’est là que « Quinzaine du blanc chez les ! » de « Podium », moi je refaisais j’ai compris qu’il fallait arrêter d’es- trois suisses » (Côtes du Rhône le monde en riant aux éclats avec sayer de tout comprendre. Productions 2006) Choron, Cavanna, Gébé, Reiser, Du coup tout est devenu plus sim- Tachan ou Font & Val. ple : déjà, je me poilais depuis un www.lechantlaboureur.ch Depuis j’ai vieilli mais pas mon bon moment (et ça, ça crée des www.sarclo.com utopie qui me fait toujours voyager liens). En plus à un moment ils www.belhubert.ch dans des sphères d’espoir. Chez parlent de vaches, et ça, je con- www.simongerber.ch Val c’est tout le contraire. Je me nais. A un autre moment aussi, demande aujourd’hui où est passé ils parlent de télé désolante (‘les 19 ème Festival l’animal révolutionnaire qui poéti- plombs’), de charters obligatoires NUITS DE CHAMPAGNE sait à l’ombre du drapeau noir (no- (‘La fi lle qui nous sert à bouffer’) BÉNABAR - MICHEL DELPECH tamment dans son tout premier et puis ils posent cette question Du 29/10 au 4/11, Troyes et toute album solo paru en 1980 intitulé « fort intéressante : « Comment sa région seront sous le signe de Ma petite chérie »). faire un pays heureux/ En étant la chanson et du chant choral en Je ne suis pas le seul à me poser si peu chaleureux/ C’est bien joli accueillant des centaines de cho- cette question. Un antivalisme pri- un pays vert/ Mais pas tant qu’un ristes venus de toute la France qui maire sévit actuellement sur le net. reprendront les chansons emblé- pays ouvert… » (‘la Suisse’)… La matiques des deux auteurs. Dès que l’on tape son nom dans stupeur s’éloigne, le tremblement La programmation musicale est un moteur de recherche quelcon- demeure. élaborée avec les deux invités que on ne tombe que sur des sites Enfi n bref, voilà un bien bel album, d’honneur : Vincent Delerm, Têtes anti-val ou anti-charlie. Dans les- à voir et à entendre, à boire et à raides, Thiéfaine, J-L Aubert, JL quels on lui reproche d’être deve- manger, le tout pour une somme Trintignant, Yuri Buenaventura, nu un « nouveau chien de garde » modique et dérisoire, un brin Clarika, Alexandre Tharaud ... si cher à Serge Halimi. Mais c’est d’exotisme dans un monde de Cette édition 2006 des Nuits de plus complexe que ça. brutes ? D’ailleurs dans le livret, Champagne s’annonce plus que Il y a, comme chez la plupart des vous verrez tout le bien qu’en pen- jamais comme des Nuits qui chan- mortels, deux masques chez Val. sent des humoristes, comédistes, tent avec au programme deux ar- Y’en a un que j’aime toujours car tistes attachants et, au fi nal, une chantistes ou simples consom- belle rencontre ! il me rappelle ce souvenir qui m’a matistes tels que Vincent Rocca, www.nuitsdechampagne.com fait grandir : c’est le masque de Jean Michel Mouron, Jean-Fran- l’homme libre, du poète. page 8

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Et un autre que j’ai toujours dé- celui qui, goguenard, aimerait faire testé : c’est le masque de l’homme l’amour à une Bernadette surprise messianique, du fondamentaliste. (Bernadette) et celui qui observe Val est toujours persuadé d’avoir son chat avec l’œil du philosophe KARPATT raison (mais « hélas il n’est pas le (Averroès). seul !... » comme il le chantait lui- Côté musique, c’est plutôt une même dans l’une de ses plus bel- bonne surprise. Les arrangements les chansons de jadis : « Les ver- sont nickels et l’ensemble est co- La véritable histoire de Léon de sets érotiques »). Val ne connaît hérent. Il y a dans ce disque une Karpatt au Cabaret Sauvage pas le doute. Et pour démontrer superbe trompette jazzy, dans « l’exactitude de ses thèses, il est Cadillac » une clarinette qui vire- Un clocher dans la salle, sur la capable d’user du pire manichéis- volte comme dans un orchestre scène, un Solex rouge (à vendre), me. Son dernier disque n’échappe klezmer et toujours l’éternel com- un tableau sur un chevalet, et un pas à cette règle. Quand Val dé- plice Binet à la basse. peintre, un conteur à gibus (dans crit un pauvre bougre c’est forcé- Au fi nal c’est quand même pas mal le clocher), un réverbère, une ta- ment un Raymond qui lit VSD et mais je me pose toujours autant ble de bistrot, quatre loustics à ne connaît rien à la musique à part de questions. En fait, comme pas casquette, une gigolette à béret, Sardou. Et ça me fait mal. Moi qui mal d’anciens fans de « Font & une échelle (pour allumer le réver- suis plouc, je connais des fans de Val », j’aimerais en savoir plus sur bère) et Karpatt. Sardou qui sont beaucoup plus de cet homme compliqué. « (…) De Et peut-être un raton laveur plan- gauche dans la pratique qu’un édi- toute façon pour y voir clair il faut qué dans un coin ou dans la con- torialiste de journal satirique. Je rester ouvert la nuit. » me répon- trebasse… crois même qu’ils sont de ma fa- dra-t-il… La véritable histoire de Léon em- mille. Quand Val décrit, dans une balle le Cabaret Sauvage dans autre chanson, une bourgeoise, il Eric Mie un feuilleton musico-épique, un retourne de nouveau dans les cli- happening débridé autour des 3 chés en citant « FIGARO MADA- LES 3 ARTS Café culturel piliers karpattiens qui orchestrent ME », un tailleur et un portable de 21 rue des Rigoles 75020 Paris leur barnum baroque avec public présidente directrice générale. Et http://les3arts.free.fr participant aux choeurs spontanés ça me fatigue. D’autant plus qu’en Une programmation world, jazz, et avertis. chanson à découvrir : Car les chansons du répertoire matière de bourgeoisie il devrait 2/11 FREYLEKH TRIO en connaître plus qu’un rayon l’ac- 3/11 OWEN’S FRIENDS Karpatt s’inscrivent dans cet opé- tionnaire principal de Charlie... 4/11 BAL VAL ra loufoque que la voix du conteur Val est pourtant le genre de mec 8/11 FREYLEKH TRIO structure comme l’architecte éta- avec lequel j’aurais plaisir à discu- 9/11 BLANCHE NEIGE blit le mur porteur. ter. Peut-être parce que je suis un 10/11 PAULINE PARIS Ensuite, la décoration en fera un soiffard et qu’il est un puits de cul- 11/11 JAZZ O FUN immeuble strict ou une fantaisie ture. Mais en l’invitant chez moi, il 15/11 FREYLEKH TRIO baroque dessinée par l’écureuil faudrait que j’ôte quelques ouvra- 16/11 O’DJILA fou de Tex Avery. ges de ma bibliothèque pour ne 17/11 Les Pieds dans l’Herbe Loïc Lantoine, le conteur à gibus, pas le déranger. 18/11 Collectif de Bals à la Voix a une voix mi-Leprest, mi-Pierre 19/11 QUATUOR BEDRICH Fresnay, de ces voix cuivrées qui Mais revenons au sympathique 22/11 FREYLEKH TRIO Val qui sauve malgré tout cet 23/11 soirée KLEZZICS sonnent comme les gongs anti- opus. J’aime ce Val qui se deman- 24/11 Rimes en Elles et Gallo- ques aux fréquences graves qui de d’où vient cette pluie (L’eau de chants prennent à cœur et à corps, ça fait la pluie). 25/11 LES HARICOTS LIBRES contrepoint au charivari échevelé J’aime aussi celui qui s’imagine 29/11 soirée KLEZZICS (encore que le mot ne soit pas le être dans le Vienne de Gustav Kli- 30/11 BAL VAL plus adapté aux pilosités crânien- mt ou d’ Egon Schiele (Vienne), nes épurées des Karpatt) qui rap- page 9

chroniques spectacles pelle le charivari des clowns dans cords du morceau «Orchestra», le cirque traditionnel : un joyeux une clameur générale a retenti bordel qui demande un art con- dans la salle pleine de fans, de sommé de l’acrobatie, du rythme The SERVANT fi lles, de couples et d’adolescents. et de la précision. / ELISTA Quelques cris de joie ont salué Karpatt, c’est tout ça à la fois, de l’annonce du leader du groupe la voltige musicale qui ressemble anglais de son installation dans la à de l’improvisation spontanée Le groupe parisien Elista débu- capitale française. (non ce n’est pas un pléonasme) tait mercredi sa tournée pour Il a alors avoué son penchant pour et qui demande un sens inné de la présenter le deuxième album, le vin et les croissants, et surtout musique et de la fête. «La Folie douce» fraîchement le saucisson (en français dans le A la façon de ces musiciens tzi- sorti le 23 octobre, après le suc- texte). Plein d’énergie, sexy, al- gano-manouches qui attrapent au cès de leur premier album épo- lumé, il dominait la scène entre vol n’importe quel air, et l’accom- nyme de 2003. violons et guitare acoustique, al- pagnent comme s’ils avaient fait Le titre «Debout» en particulier ternant émotion et registre plus ça toute leur vie. avait permis au groupe de se dis- péchu. D’ailleurs, ils ont fait ça toute leur tinguer comme bel espoir du rock La pop moelleuse et effi cace de vie, ils sont dedans comme l’oiseau français. Ce nouvel opus offre un The Servant a ravi le public du est dans l’air, naturellement. son lourd et brillant agrémenté Bataclan qui dansait et chantait Pendant le spectacle, Sébastien le d’une écriture remarquable. à l’unisson jusqu’au dernier mor- peintre réalise en direct, et en mu- Les paroles entièrement écrites ceau du concert qui a illuminé le sique, trois tableaux, une ovation par Benjamin Peurey abordent la show quelque peu engourdi en méritée salue sa performance. diffi culté d’aimer, de quitter, les tout début de prestation. Quand on évoque le spectacle vi- mots sont justes, sombres, mor- vant, on devrait prendre en réfé- dants. Caroline Besse rence ce genre de soirée, où rien Le morceau «Courage», subli- ne peut être identique d’un jour à me sur l’album, est éblouissant www.elistamusique.com l’autre, la vie, par nature, est mou- en live. En concert : vement, c’est comme le jazz, la Les Elista, visiblement heureux 19/12 Paris la Boule noire création est dans l’interprétation de retrouver la scène, ont été l’exact inverse des productions très bien accueillis par le public www.theservant.co.uk surgelées, pas forcément critiqua- qui attendait fi évreusement la en concert acoustique : bles, il y a d’excellents disques tête d’affi che. 11/11 FNAC Noisy le Grand qui ont gravé des moments histo- Les premiers morceaux joués riques, heureusement, c’est autre par le groupe britannique «The chose. Servant» étaient principalement Cette soirée était une avant-pre- extraits du nouvel album «How mière, le spectacle pourra vivre s’il to Destroy a Relationship», sorti trouve des possibilités de tournée, à la fi n de l’été. Bien accueilli par mais s’il est un spectacle tous pu- la presse, il confi rme l’ascension blics capable de faire un tabac du groupe aux tubes «Orches- dans toutes les salles de 3 ou 400 tra», «Liquify», et «Cells» que le places, c’est bien celui-là. public espérait avec impatience. «Vous voulez les vieilles chan- Norbert Gabriel sons, pas vrai ?» a demandé le chanteur Dan Black au public karpatt.free.fr fasciné. Dès les premiers ac- page 10

chroniques le chanteur oublié

son - Retour en France - 1965: toutes les radios. A cette époque premier album chez Barclay, la censure avait déjà honte d’elle grand prix de l’Académie du dis- même, et on déconseillait plus Henri que, lever de rideau de Juliette qu’on interdisait. Alors que dire Gréco à l’Olympia - 1968: pre- quand on a en face de nous l’artis- TACHAN mière partie d’Isabelle Aubret et te lui même ?... Ce fût la première et la censure de Félix Leclerc à Bobino - 1970: et la dernière fois qu’on entendit Henri Tachan n’est pas exacte- première partie de Pierre Perret plusieurs fois par jour pendant ment un artiste maudit puisqu’il à Bobino - 1972: première partie seulement une semaine sur tou- jouit du soutien d’un large public de à Bobino - tes les ondes une chanson d’Hen- depuis ses débuts. Disons qu’il fait 1974: il chante à la Pizza du Ma- ri Tachan. Elle s’appelait “Comme partie de cette grande famille de rais pour son ouverture - 1975: un rhume” et ce n’était vraiment génie, digne successeur des Brel, deux semaines au Théâtre de la pas ce qu’on appelle une chanson Brassens, Ferré, Barbara, jetée Ville, un soir à l’Olympia en tête dérangeante. aux oubliettes des médias tel qu’ d’affi che - 1978: une semaine à S’en suivirent 40 ans de carrière Allain Leprest, Romain Didier, Ri- l’Olympia - 1999: six semaines sans plus aucunes radios ni télés cet Barrier, Michèle Bernard, Jean au Théâtre de Dix Heures à Pa- mais avec un public qui allait gros- Roger Caussimon, Jacques De- ris. sissant. bronckart, Bernard Dimey, Mau- Parrainé donc par Jacques Brel, Dans les années 90, suite à un rice Fanon, Jehan Jonas, Gilles Henri Tachan sort son premier pari, Tachan décide d’enregistrer Servat, Anne Sylvestre, Veronique disque chez Barclay en 1965 un mini single bien à la mode avec Pestel etc. Autant de grands noms avec lequel il obtient le Grand du poum-poum-poum derrière qui auraient du être célébrés à Prix de l’Académie du Disque pour balancer aux radios, histoire chaque Victoire de la Musique si français et, en même temps, l’in- de voir si un truc bien merdique les médias faisaient réellement terdiction d’antenne pour cause a plus de chance de passer sur leur boulot et s’ils s’intéressaient de crudité de langage. toutes les antennes que l’une de plus aux artistes qu’aux produits. En 1967 il sort un autre 33 tours ses chansons bien travaillée. Le ti- Je vous fais rapidement une pe- à nouveau totalement censuré tre était : “Sleep sleep sleep” et ce tite bio piquée sur le net (www. de même qu’en 1969 où ce fût la fût un fi asco. Les programmateurs tachan.org) avant de vous par- même maladie et le même traite- ont jugé l’oeuvre trop dérangean- ler de celle qui nous préoccupe ment. Pas étonnant donc que ses te. “Même quand je veux faire de aujourd’hui, qui a tant tourmenté premiers albums (qui sont pour la merde, ils trouvent que ça fait l’oeuvre de Tachan et qui se nom- moi les plus beaux) ne se ven- encore trop Tachan !” s’exclama me : «Madame Anastasie»... dent pas... Après cet échec com- l’Henri de l’époque. mercial Barclay ne prendra plus Aujourd’hui Henri Tachan sort son Henri Tachdjian naît le 2 septem- le risque d’un prochain 33 tours. intégrale (14 C.D. de 18 titres !) bre 1939 à Moulins (Allier) Il lui fait enregistrer plusieurs 45 chez Naïve (la maison de disque Scolarité au pensionnat catholi- tours de 2 ou 4 titres avec pour qui vient de faire un carton avec que de Notre-Dame de Bury, puis seule mission de trouver le tube Carla Bruni et qui vient de signer lycée à Paris - École hôtelière à qui va propulser l’artiste. Mais la merveilleuse Agnès Bihl), ses Thonon-les-Bains, serveur au Ritz même son propre directeur artis- textes illustrés par les dessina- à Paris - Départ pour le Québec tique empêchera leurs diffusions teurs de “Charlie Hebdo” viennent en 1962; après son travail comme aux radios de peur que ses tex- d’être réédités et une biographie serveur, il dit des poèmes «Chez tes trop violents ne viennent bri- de Claude Sabatier aux éditions Clairette» (Claire Oddéra), 1124 ser sa carrière. « Arthemus » vient de sortir chez rue de la Montagne à Montréal Une nuit, Tachan dérobe ses tous les bons libraires. C’est sur - De passage, Jacques Brel l’en- propres disques à son produc- son deuxième album datant de courage à se lancer dans la chan- teur pour les porter lui-même à 1967, qu’Henri Tachan dénonçait page 11

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le chanteur oublié déjà celle qui ne l’a plus jamais lâ- DE A UN MONDE QUI LES AR- un peu moins : celle des trois der- chée par la suite : “La Censure”. RANGE !...» niers vers. Boris Vian n’avait pas Moralité : Aucune. écrit : Alors maintenant certains me di- ront qu’en ces temps Gaulliens BONUS DE CHRONIQUE ! “Prévenez vos gendarmes c’était la censure d’Etat et que, (Ouaiiiiiis !) Que je n’aurai pas d’arme Dieu merci, aujourd’hui elle n’exis- Et qu’ils pourront tirer” te plus, qu’on est libre, et que you- Quelques autres chansons cen- pi tralalala et etc. Je répondrais à surées : Mais : ces jeunes innocents que de nos jours c’est pire à l’aide d’un petit Mon Général (Léo Ferré) “Prévenez vos gendarmes conte que je vais avoir le plaisir de Chanson adressée au général de Que je possède une arme vous narrer maintenant : Gaulle écrite en 1947, enregis- Et que je sais tirer...” Hum hum… trée en 1962 en public. Censu- Ce qui change radicalement la rée puis commercialisée en 1990 couleur de la chanson. Le blaireau et le sanglier lors de la sortie de l’intégrale chez Barclay. Ferré donne la parole à Voilà vous pouvez ranger vos ca- Un jeune blaireau auteur compo- un résistant mort après avoir été hiers, enlever vos doigts de vos siteur interprète, appelé «assis» torturé par les Allemands. nez, mettre vos tabliers et sortir par feu Ferré, se trouve dans les dans la cour sans faire de bruit. locaux d’une grande station de Le Poulet (Pierre Perret) radio. Il discute avec un vieux Chanson interdite à la radio en Eric Mie sanglier programmateur chevelu, 1958. Pierre Perret fut tancé par tatoué et troué de partout qui pré- la critique “d’anarchiste et de Bistrot Musique 20.11.2006 tend qu’on ne peut pas tout passer subversif en des temps qui ne Funkhaus Halberg parce que ça pourrait choquer les s’y prêtaient guère” (guerre d’In- gens. dochine). Pierre Perret d’ailleurs, Frédérik Steenbrink : Pianiste et «Et alors ?, lui dit le blaireau trou- ceux qui le connaissent et qui chanteur à la voix de velours, Fré- badour des temps nouveau avec l’aiment le savent, préférera tou- dérik Steenbrink raconte avec hu- ce ton bourru qui lui vient de sa jours le vitriol à l’eau de rose. Ses mour et fantaisie le temps qui man- campagne profonde, les gens premiers albums étaient illustrés que, les bonheurs cachés, les filles c’est qui ?... Moi je sais que j’aime par Siné, vieil anar connu des inaccessibles et l’amour imparfait… Entre un morceau de piano à qua- bien être choqué. Ça me permet lecteurs de Charlie Hebdo. La tre mains et un vol de contrebasse, de réfléchir en me demandant chanson était un pamphlet con- laissez-vous emporter dans cet pourquoi cela me choque. Ça me tre le sentiment de nationalité et univers poétique et surprenant. fait avancer. Et pis qui te dit que notre mascotte à plume... ça va les choquer ? Les «gens» DobaCaracol c’est d’abord un duo ne sont pas aussi bêtes que TF1 Le Déserteur (Boris Vian) formé de deux percussionnistes- ou le Renard le croient.» Comme Écrite à la fin de la guerre d’Indo- chanteuses. Ce mélange de cultu- le sanglier programmateur s’aper- chine et au début de celle d’Algé- res, de styles et de rythmes donne çoit que ça l’énerve et que le trou- rie, cette chanson sera d’abord naissance à une musique qui est badour est à deux doigts de lui chantée par Mouloudji, le jour loin d’être traditionnelle, et à des foutre son poing sur son groin, il même de la prise de Dien-Bien- mots exprimés dans des dialectes africains, en français, en anglais et lui balance enfin la vérité : «Oui… Phu... et censurée pour “insulte même dans une langue inventée. mais… tu sais… faite aux anciens combattants”. A AUCUN ANNONCEUR N’AIME- signaler, sur cette chanson dont www.sfg-chanson.de RAIT PASSER SA PUB APRES l’histoire est de nos jours archi- UNE CHANSON QUI DIT MER- connue, une anecdote qui l’est page 12

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la porte ouverte

Au dessus de votre tête, un lustre de glace fond tranquillement LE CABARET tandis que les bou- Jean Jacques NONO chons de champagne VANIER volent. « A part ça, Imaginez un Serge Noyelle, offi ciant la vie est belle » chapiteau au en monsieur loyal, parc de la nous offre un moment Vilette. rare de poésie pure, un Rafales de vent dans l’est de la Imaginez un voyage hors du temps France. La panne d’électricité de cirque où le et hors des sentiers l’après-midi n’est plus qu’un mau- public serait battus, accompagné vais souvenir. Heureusement…car sur la piste par des acteurs terri- ce sera sa seule date en Lorraine, et la troupe blement attachants et nous dit-il. offi cierait à l’enthousiasme com- «On a de la chance alors !» crie un dans les municatif. spectateur. Sourire malicieux… gradins. Ce n’est pas du théâ- Et ça avait pourtant mal commen- Imaginez un spectacle pas comme tre, ce n’est pas de la danse, c’est cé avec ce photographe indélicat, les autres créé par Serge Noyelle n’est pas du chant, ce n’est pas du fl ashs en série car la loi des séries et sa joyeuse troupe du Styx théâ- cirque, c’est tout ça à la fois ! est ainsi…il n’a pas voulu donner tre de Châtillon. Du cabaret traditionnel il ne reste son appareil, seulement une main Imaginez une bande de gais lu- fi nalement que l’enchaînement gênée en guise d’excuse. rons costumés, une galerie de des numéros… «C’est peut-être même son métier portraits hétéroclite et irrésistible, Mais le cabaret Nono ne se racon- !?» dit Vanier penseur. un spectacle poétique et drôle, te pas il se vit, alors laissez-vous Aller à un spectacle rien que pour émouvant et iconoclaste, et plus tenter et envoûter par l’expérience un nom entendu des années encore… ouvrez les yeux : c’est le Nono… comme moi ! auparavant chez Laurent Ruquier cabaret Nono ! La preuve : je n’arrive pas à en dire à France Inter : Jean Jacques Va- Assis à votre table, le spectacle du mal même en me forçant… nier, spectacle coécrit et mis en est partout et vous ne saurez plus Ca y est je suis complètement scène par François Rollin. où donner de la tête ! Nono moi aussi ! Quel duo ! Car on y retrouve bien Les comédiens sont sur scène, ils ce soupçon de décalé, parfois ab- servent les plats, s’invitent à votre Frédéric Martin surde mais toujours succulent qui table et repartent accompagnés m’était resté en mémoire. de quelques notes de saxo ou de Tout commence par la fameuse loi trombone. Espace Chapiteaux des séries donc et ces deux amis Les sketchs s’enchaînent durant Parc de la Villette morts sont la porte ouverte à de plus de 2 heures en une succes- 75019 PARIS fabuleuses digressions. Le pre- sion de tableaux fous, surréalistes, du 29/09/2006 au 04/11/2006 mier a sauté à l’élastique à Juvisy oniriques, colorés et mystérieux. sur Orge mais avec l’élastique du Un surfeur stripteaseur précède pont de Fontainebleau, sachant un clown aux oreilles rouges, une www.villette.com que le pont de Juvisy est bien Miss Suisse à l’étonnante pilosité moins haut que celui de Fontaine- laisse sa place à une gironde équi- bleau…Le second est mort sous pe de danseuses de claquettes… une avalanche de poudreuse. page 13

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Eh oui, mourir peut être drôle…. d’histoire très intimement mêlée à j’avais mes doutes avant de venir celle de sa famille, et on ne peut plus écouter les infos concernant à Sarreguemines. LIVRES Encore faut-il le suivre dans son le Moyen-Orient de la même fa- labyrinthe d’histoires, sa voix mo- (en vrac) çon. nocorde du début se transforme Un dernier point, pour casser bientôt avec poésie et fait vibrer la Casser la voix… l’image réductrice que véhiculent salle. Et surtout casser l’image…Avant les médias sur le thème Rika-bain Mais je garderai au fond de moi d’être le Patrick super star, Bruel de siège, je me souviens du témoi- le souvenir de cette carotte, je la était déjà un chanteur à succès. gnage d’un copain de Coluche, un vois encore sur scène, entre ses Rappelons que c’est après un de ceux qui assuraient la régie, le mains. Elle ne se soucie pas d’être concert d’Higelin aux Francos de transport ou les tâches obscures une carotte. Elle est une carotte. La Rochelle que Bruel a décidé et indispensables des tournées, « Prenez quatre graines différen- de revoir son approche du métier, après la mort de Coluche, une tes, mélangez les au creux de vo- et que son projet de disque a été seule personne s’est inquiétée tre main. Ils ne doivent plus savoir fraîchement reçu…avant de faire de savoir s’ils avaient du travail, qui ils sont après ça !…et pourtant un succès. Lequel a rallié tous les Rika Zaraî. Elle tournait beaucoup la carotte pousse carotte… » sceptiques, y compris ceux qui et leur faisait une place dans son Etre sereine comme cette carotte lui avaient prédit un échec, mais équipe si nécessaire. Il est bon là serait un bel objectif de vie… d’estime, c’est la traduction la plus parfois de remettre les pendules Et Jean Jacques Vanier de faire exacte pour ces échecs commer- à l’heure de la vérité et du cœur. rire sans artifi ce, avec rien, sim- ciaux que la critique encense, la « L’espérance vaincra toujours » plement les choses belles et même critique vouant souvent est le livre de vie d’une femme gé- tragiques de la vie. Il paraitrait aux gémonies le succès commer- néreuse, ce pourrait être la devise d’ailleurs que les deux compères cial. Ainsi « Casser la voix » a été de tous ceux qui n’abdiquent pas écrivent actuellement le nouveau d’abord un bel album promis à devant les mauvais coups et les spectacle de Vanier…séquence des ventes confi dentielles, avant pires situations. Malgré tout. attente… d’être un succès considéré avec Ce mois-ci, Octobre, les éditions condescendance. Christian Pirot ajoutent à leur ca- Malgré la tempête, aucun arbre Avant d’être une des prophètes des talogue spécialisé chanson, le li- n’est tombé sur notre voiture ce médecines naturelles, Rika Zaraï vre de souvenirs de Pierre Louki : soir là ! était chanteuse de variétés. Avant « Quelques confi dences ». Y a pas de doute, la vie est bel- d’être chanteuse, elle était une fi lle le…. d’Israël, état nouveau-né après la guerre, sur décision de l’ONU. Myriam Tchanilé Elle vient de publier une autobio- graphie qui se détache nettement www.vanier.fr des productions habituelles de Mi- www.professeur-rollin.com chel Lafon, « L’espérance vaincra toujours », n’a rien à voir avec les Prochaines représentations en ouvrages auto-complaisants qui 2006 du spectacle « A part ça, la ne sont souvent qu’une version li- vie est belle »: vresque des échos et potins de la 10/11 Sion Suisse presse spécialisée, avec quelques 14/11 Vierzon fausses confi dences, histoire de 18/11 Coutances faire briller le strass, ou pimenter 26/11 Garges lès Gonesse le brouet. Dans son parcours de vie, Rika Zaraï intègre une page page 14

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Dans un numéro précédent, Juin- çon qui a commencé par être un foudroyantes fleurissent en toutes juillet, nous avions proposé une bon élève, licence de philo s’il saisons, un peu de compassion rencontre entre Pierre Louki et vous plait, puis un mauvais gar- divine ça ne peut pas faire de mal. Claire Elzière. Lors de cet entre- çon, qui a fait du rap, comme quoi Sérieusement, ce livre ainsi que tien, il avait évoqué ce livre termi- la philo mène à tout. Il a publié en l’album « Gibraltar » que j’ai eu né au printemps 2006, 2003 «Qu’Allah bénisse la Fran- le bonheur de présenter en juin, autobiographie, mémoires et his- ce» ouvrage à la fois autobiogra- montrent à l’évidence que l’immi- toires vraies, avec des souvenirs phique et essai. Témoignage que gration est aussi une chance pour inédits, et des réflexions logico- l’état d’être «immigré de la deuxiè- la France. Ce n’est pas Léonard absurdes cocasses sur la drôle de me génération» et «habitant des de Vinci, Napoléon Bonaparte, vie d’un libelliste mi-Rabelais mi- quartiers» n’est pas une reléga- Marie Curie, Honoré d’Urfé, Ray- La Fontaine… Et il avait esquissé tion prédestinée et définitive dans mond Kopa ou Zidane qui diront le avec pudeur que c’est surtout une les marges de la société. Le poids contraire. Pas non plus Edith Piaf, lettre d’amour à la femme de sa vie des mots est parfois un boulet et Yves Montand, Aznavour, Ferré, disparue récemment. Et bien sûr, il un handicap, «quartiers» au plu- Brassens, Brel ou Hallyday qui ont y a la présence de l’ami Georges, riel, ça craint… Quant à «immigré tous une branche ou deux de leur qui n’a jamais su que sa chanson de la deuxième génération», c’est arbre généalogique dans un autre «Les deux oncles» avait blessé forcément du basané-bronzé-afro- paysage. Dans son album précé- Louki… Ni pourquoi quelques an- maghrébin. Mais si on donne aux dent, « Le face à face des cœurs », nées plus tard, Pierre Louki a écrit mots leur sens étymologique, je on trouve les thèmes et le fond de «Les deux voisins» réponse dis- constate qu’il y a des gens dont l’inspiration d’Abd Al Malik, mais la crète, dialogue virtuel… Louki a les parents sont nés en 1920, et forme plus Rap m’avait caché l’es- attendu son 80ème anniversaire qui vivent en France depuis 1921, sentiel, je n’avais pas les bonnes pour publier ses souvenirs, et il n’a sont des immigrés de la deuxième oreilles pour capter le message, pas la mémoire qui flanche. génération, et du coup, mes petits c’est mon problème avec le Rap. On y voit que l’auteur de «La môme enfants sont des immigrés de la aux boutons» a un parcours de vie quatrième génération…Intégrés ? Charles Aznavour plus qu’atypique, et en un sens, Oui, mais quand même, c’est un a terminé avec exemplaire. Exemplaire d’un art coup à vous désintégrer le senti- Daniel Pantchenko de vivre sans compromission, plu- ment patriotique, et par les temps le livre commencé sieurs vies qui s’entrecroisent et qui courent, je suis plus fier des par Marc Robine. dessinent un beau portrait d’hon- mes grands parents qui ont quit- Les biographies nête homme. Comme on disait té l’Italie et l’Espagne, parce que Fayard-Chorus jadis… l’air y était en voie d’insalubrité ont cette caracté- politique. Et en conséquence, je ristique d’être éla- Et comme on n’ai pas de raison spécialement borées avec l’artiste, travail d’in- pourrait dire fiérot d’être de ces français dont vestigation du journaliste complé- a u j o u r d ’ h u i les ancêtres gaulois étaient véni- té par le dialogue. Il y faut une part pour Abd Al tiens ou castillans…Et en plus, je de confiance, une part de bonne Malik. Voilà dois partager cet état d’immigré foi, et d’honnêteté réciproque. un garçon qui deuxième tour avec Sarkozy… Pas de connivence douteuse, un a commencé M’est avis que tous les immigrés accord sur des bases saines pour par être un ne sont pas sortis de la même fa- éclairer la vie et le parcours artis- bon élève, mille. En revanche, la famille hu- tique. Il y faut aussi le temps de licence de maine que propose Abd Al Malik recouper, vérifier, discuter, et dis- philo s’il vous me plait beaucoup, et je veux bien puter parfois un point à éclairer. plait, puis un être béni par Allah et Jéhovah. Hamon et Rotman avaient travaillé mauvais gar- En ces temps où les malédictions ainsi avec Montand. page 15 page 15

chroniques interrogations écrites la porte ouverte au doigt et à l’oeil

Les souvenirs sont rarement d’une fi abilité absolue, surtout quand ils ont été souvent racontés ou évo- qués, ils glissent dans le temps, MIG se métissent, ainsi Montand avait daté un fait en juin, avec détails En premier lieu, précis, pour le débarquement, choisissez un alors qu’il avait eu lieu en Août doigt ! pour la libération de Paris. C’est le Qu’est-ce qui détail qui a alerté Hamon et Rot- motive ce choix? man, et vérifi cation faite auprès Le petit doigt. d’un spécialiste indiqué par Mon- Parce qu’il est petit. tand, il s’avéra que les journalis- tes avaient raison. Et il s’ensuivit Comment la biographie de Piaf la plus docu- s’appelle chaque mentée pour tout ce qui concerne doigt de votre main? son parcours artistique, c’est la Les plantes (souvent référence absolue. Vous y trou- un peu sauvages !) Que signifi e pour vous «Le verez le détail de tout ce qu’elle a doigt dans l’œil» ? chanté, même une seule fois en Quelle place ont les mains dans Une rencontre inhabituelle, com- essai non enregistré. Et les faits votre activité ? me il en faudrait plus… cités sont vérifi és à la source. Elles tiennent un micro et permet- «PIAF» par Georges Martin et tent donc qu’on m’entende ! Mais Photo et Propos recueillis Pierre Duclos. parfois elles n’en font qu’à leur par Didier Boyaud tête et ne m’écoutent pas. Norbert Gabriel en concert : Qu’allez-vous faire de vos dix 18/11/06 GAGNY Théâtre André doigts demain ? Malraux Un concert important. www.mig-website.net Vous êtes à 2 doigts de faire quoi ? Acheter des gants…

Que faîtes-vous «les doigts dans le nez» ? Je cherche le soleil au milieu de la nuit.

Qui ou qu’est-ce qui est à «2 doigts de vous énerver» actuel- lement ? www.friendship-fi rst.com/chris- Le mépris des plus faibles, d’où tianpirot_fr.htm ma préférence pour le petit doigt. www.chorus-chanson.fr/ Que feriez-vous volontiers «à HOME2/DPT_FAYARD-CHO- l’œil» ? RUS/historiqueduDpt.htm Des ombres chinoises… page 16

interrogations écrites

au doigt et à l’oeil dis-moi qui tu suis

Que feriez-vous volontiers «à l’œil» ? Tant de choses…trop de choses ! STTELLLA Benoit Que signifi e pour vous MOREL «Le doigt dans l’œil» ? ça me fait penser aux Choco Prin- Quel est le dernier projet auquel En premier lieu, choisissez un ce, parce que eux aussi, ils sont vous ayez réfl échi ? doigt ! Qu’est-ce qui motive ce fourrés. Fabriquer des lampions pour la choix ? scène. Le pouce. Parce qu’ils sont rigolo, Propos recueillis mes pouces ! Ils sont tout tordus! par Séverine Gendreau Quel lieu où vous retournez ré- gulièrement vous inspire et vous Comment s’appelle chaque en concert : rassure ? doigt de votre main? 11/08 Liège Forum . L’océan et tous ses habitants… John – Paul - Ringo - Georges et 10/11 Lessines Centre Culturel Tarzan. René Magritte . Je quitte la terre pour quelques 11/11 Dolhain Le Kursaal mois, quels livres et disques me Quelle place ont les mains dans 17/11 Braine l’Alleud Acte 3 . conseillez-vous d’emporter ? votre activité ? 18/11 Marche Wex . «100 ans de solitude» (Garcia Elles sont toujours là. C’est l’idéal 24/11 Colfontaine Espace Marquez) pour la folie tourbillonan- pour écrire, jouer de la guitare, Magnum . te, «Sous les vents de neptune» le jouer du synthé, dessiner…faire 25/11 Sivry Centre Culturel . meilleur de Vargas, des poèmes ses tartines, défaire ses valises, 30/11 Bruxelles Cirque Royal . d’Apollinaire, Prévert, Baudelaire, répondre aux questionnaires sur Vincensini…, «Le maitre et Mar- les doigts, etc…etc… www.sttellla.be guerite» (Bougakoff) pour la folie et l’histoire d’amour fou, Louis Arms- Qu’allez-vous faire de vos dix FIFOU trong «the good book» (version doigts demain ? originale) pour le swing irrésistible, Je vais leur mettre du joli vernis à revient le feeling, la voix, pour se réveiller ongles pour leur montrer comme au Théâtre de La Main d’Or avec l’humeur bonne. 15 passage de La Main d’Or je les aime ! 75011 PARIS les mardis à 20 heures Vous n’avez encore jamais osé Vous êtes à 2 doigts de faire du 7/11 au 5/12/2006 le faire… de quoi s’agit-il ? quoi ? Chanter le requiem pour un con D’aller manger. à quelqu’un qui me prend la tête dans une administration ou à la Que faîtes-vous « les doigts banque… dans le nez » ? La vaisselle. J’adore ! Où préférez-vous être placé dans une salle de spectacles ? Qui ou qu’est-ce qui est à «2 Sur la scène. doigts de vous énerver» actuel- lement ? Citez-nous les paroles d’une Rien. Tout baigne. chanson qui vous ressemble. «au village sans prétention j’ai mauvaise réputation…» page 17

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dis-moi qui tu suis

Que vous évoquent les diman- Hibernatus se réveille d’un siè- Quel est votre luxe dans la vie? ches ? cle de cryogénisation et dé- Dormir à la belle étoile sur le pont Une chanson de Piaf. couvre le cinéma. A votre avis, d’un voilier. quels films anciens ou récents Quelle est la 1ère chanson qui sont à visionner en priorité ? Vous souhaitez pratiquer un vous a retourné la tête ? «Le temps des gitans», «Gadjo nouveau mode d’expression ar- La rousse au chocolat d’Higelin. dilo» «Le jour se lève», «Le méca- tistique, lequel et par qui aime- J’avais 10 ans, ma sœur est ren- no de la générale» et tous les films riez-vous être initié ? trée du lycée avec ce disque (Aler- de Keaton et de Chaplin, «Meurtre La danse avec Christina Hoyos. tez les bébés) et là, j’ai eu un dé- mystérieux à Manhattan», «Tout le clic, je me suis dit qu’il y avait autre monde dit I love you». Je n’arrive pas à dormir… pou- chose que la musique de mes pa- vez-vous m’aider à y remédier? rents (qui écoutaient Barbara, Brel, Ecrivez un sms à céline dion. Levez-vous et allez vous baigner Ferré, Montand…) et je suis tombé Stop. sous la lune. «Le meilleur est un «amoureux» de cette chanson qui sommeil bien ivre sur la grève» A. me fait toujours de l’effet. Quelle chanson n’avez-vous ja- Rimbaud mais osé chanter ? Le 1er concert vu ? «Love me tender» parce qu’il me Propos recueillis Encore ma sœur qui m’a emmené manque la banane. par Séverine Gendreau à un concert de Maxime Le Fores- tier sous chapiteau à St- Brieuc. Qui prend le volant en tournée? www.benoitmorel.com Aucun souvenir du concert. par Le ou la plus réveillé. contre je me souviens de la fin où En concert : l’on a vu Maxime de près, il parlait Ma cousine berthe débarque, 9/11 avec ses fans dont un gars qui vou- quels spectacles nous con- 10 et 11/11 Paris - L’Européen lait lui faire écouter ses compos. seillez-vous sans hésiter ? Maxime l’écoutait patiemment, j’ai Le cirque équestre tzigane de la trouvé ça génial… j’étais fasciné famille Werdyn. par son long manteau en peau de mouton. A quoi ressemble votre voyage idéal ? Comme Gérard Lenorman, vous Un voyage plein d’imprévus et de êtes élu Président de la Répu- rencontres. blique… qui voyez-vous comme Ministre de la Culture ? Quel est votre dernier rêve ra- Paco Ibanez. contable ? Sarkozy reconduit à la frontière. On vous donne Carte Blanche. Qui rêvez-vous d’inviter sur Que faites-vous quand vous ne scène (mort, vivant, réel ou ima- faites rien ? ginaire) et pour quel duo ? Je pense à tout ce que je pourrais «Je t’aime moi non plus» avec Mo- faire. nica Vitti. A l’instar de Lady Di, qui vou- Si vous deviez comparer votre driez-vous voir chanter à vos univers à un film, quel serait-il? funérailles ? «Huit et demi» de Fellini. Paco Ibanez. page 18

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il faut savoir le détourner pour que note des trucs. Des fois c’est le cela soit amusant. A travers des matin, j’vais travailler j’ai un truc à pensées sombres, en étant som- fi nir, puis après je reviens. Il y en Gérard bre mais près de la vérité, plus on a qui sont écrites tout de suite, qui sera dans le sombre, plus on aura arrivent en l’espace de 20 minu- BLANCHARD envie de remonter dans quelque tes, une demi-heure, je recorrige chose de plus clair, de plus pro- évidemment, mais sinon l’essen- pre. S’améliorer quoi. Il ne faut pas tiel est là. Puis d’autres ça peut avoir peur du sombre, mais aussi durer 3 ans. C’est jamais pareil. «GB chante GB» (22 chansons on peut le travailler le sombre, Faut que la chanson soit bien à de Georges Brassens qu’il a re- avec de l’humour, avec des vrais la fi n, faut pas qu’elle soit emmer- travaillées à l’accordéon) et «La sentiments, avec de l’émotion. dante, faut qu’elle soit magique. peau du cancre» (ses propres Mais surtout ne pas être ridicule, Qu’importe le sujet, qu’importe nouvelles chansons) sont les 2 ne pas en faire de la pleurnicherie, le tempo, qu’importe la mélodie, nouveaux albums que Gérard ne pas en faire de la guimauve. c’est qu’à un moment elle tienne Blanchard tient au chaud. Evitons la guimauve (sourire). tout seul. Ca veut dire le texte et la mélodie, si elle tient comme ça, on VB : Dans retrouvailles, il y a VB : Vous considérez toujours peut estimer qu’elle est fi nie. Des trouvailles. Avez-vous de nou- la poésie comme un médica- fois il y en a qui sont fi nies très vite velles idées, de nouvelles inspi- ment ? et d’autres qui sont jamais fi nies. rations ? GB : Oh oui. Enfi n cela dépend On arrête et on en recommence GB : Comme d’habitude, la mau- pour qui. Le problème, c’est que une autre. On sait jamais, c’est vaise foi (rires). Tout. Tout ce qui le gens préfèrent les vrais médica- pas palpable, à un moment ça fonctionne mal, comment on peut ments, d’après ce que j’ai compris, tient, elle est magique ou pas. en faire la complicité de l’être hu- tous les gens sont en dépression, main quoi, je crois que c’est ça… ont besoin de plein de choses com- VB : Vous explorez les possibili- Dans n’importe quelle époque, les me ça. Peut être que la poésie, ça tés de l’accordéon ? époques se suivent, mais les hom- demande un effort la poésie, il faut GB : J’ai surtout appris à en jouer mes sont toujours les mêmes. Ca la lire, peut être que les gens n’ont (rires), d’abord, on explore après, évolue techniquement, scientifi - pas la temps, ou n’ont pas envie, mais faut d’abord savoir s’en ser- quement et tout, mais en fait, on pensant que c’est inutile. Alors vir. Oui c’est riche, et puis en même régresse, c’est ça qu’est marrant. que c’est certainement une aide temps c’est pareil, ça dépend com- L’homme reste comme il est, quoi… la poésie, la chanson, la musique, ment on appréhende l’accordéon. Faut s’en méfi er. Il peut être luna- la peinture, la littérature…Tout ce Il y a ceux qui ont la technique tique, l’homme et la femme atten- qui peut aider, qui ne parait pas conventionnelle, consensuelle tion ! Parce qu’elle est pas mieux important, pas assez commercial du musette, et puis il y en a qui elle ! (rires) Elle en fait partie, c’est comme dirait Souchon. Pourtant ont un autre esprit. C’est ce que la même chose. En gros. Puis en c’est des côtés qui sont importants j’ai fait, je suis un autodidacte, je plus ils se reproduisent donc… je pense, qui peuvent aider à se suis venu avec un autre esprit. Je voilà (sourire). Il n’y a pas de la comprendre, à mieux se compren- m’en sers pour m’accompagner place pour tout le monde, va falloir dre, soi, et les autres. quoi, comme une guitare, puisque faire une sélection un jour… Non, je fais un peu de guitare aussi, non, enfi n voilà, je sais pas… Oui VB : Comment et où créez- voilà. Mais bon c’est devenu un c’est un éternel recommencement, vous? instrument, vraiment. Sur l’album un éternel… problème de l’humain GB : Oui chez moi bien sur. Seul. précédent «La migraine du moi- quoi. L’humain à travers des situa- Non je ne suis pas un fonctionnai- neau», j’ai fait tout à la guitare et tions différentes. Voilà, c’est ce qui re, c’est n’importe quand, le soir, j’ai tout retranscrit à l’accordéon. a un petit peu inspiré les chansons. d’un seul coup ça vient. Je vais Cet album là, « La peau du cancre Au fond il y a de l’amour, il y a peut faire du vélo, du VTT, 4 heures », il n’est fait qu’avec l’accordéon. être de l’amitié, de la misanthro- dans les paysages de campagne, Tout a été fait à l’accordéon. Com- pie, au fond, il y a un pessimisme, je reviens, j’ai l’idée qui arrive, je posé, mélodie,tout à l’accordéon. page 19

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VB : Nano, autre accordéoniste, VB : Votre tera pas «Rocamadour», mais dit de vous que vous êtes un ar- rapport au est-ce que c’est lui ? Ca doit être tiste comme il n’en existe plus… temps ? lui, il va la faire !» Il le fait tout GB : Arnaud, c’est un mec qui joue GB : Quel de suite comme cela vous allez bien, mais qui contrairement aux rapport voir que c’est lui, mais c’est vrai autres a essayé. Lui va explorer avec le que je m’amuse de ça, il faut autre chose, il cherche autre chose. temps ? bien. Ca appartient au public, les Il a accompagné des gens comme Bah il passe (rires) et heureuse- tubes. Et puis si on les fait pas, Kent, Au p’tit bonheur, d’autre gens ment. Je ne suis pas du tout nos- même si ça m’a gonflé à un mo- comme Moustaki. Il sait jouer des talgique. L’avenir… Je suis vrai- ment donné. Moi je suis très fier choses, il essaye de faire sortir… ment pour le présent. A 2 mois, 3 d’avoir fait dansé la France avec Il accompagne très bien les chan- mois près. Je suis vraiment pour «Rocamadour», mais en même teurs, par contre je sais qu’il joue le présent, je ne suis pas nostal- temps, c’est à double tranchant, bien de son instrument, mais il est gique de rien. Je trouve qu’il faut on dit toujours les mêmes cho- capable de faire autre chose et ça faire attention, la nostalgie. Il faut ses. J’ai eu un mépris à un mo- c’est le temps qui le dira. C’est her- savoir ce qu’il s’est passé, avoir ment, ça m’emmerdait, et c’est métique pour l’instant, c’est com- compris ce qui s’est fait, le pour- normal. Parce qu’on avance, on ment dire, ça reste un peu confi- quoi du comment. Ca, ça compte fait des belles choses, on veut dentiel, voilà, ce qu’il fait. Lui, il a pour moi. Mais être nostalgique, que ce soit des belles choses, une approche de l’accordéon inté- le passé c’est le passé. Il faut al- on veut être reconnu pour des ressante, parce que lui justement ler vers l’avenir, l’avenir peut fai- vraies choses. Mais ça passe il essaye des possibilités, il essaye re peur aussi. Je crois qu’il faut pas alors ça gave un peu, ça fait autre chose. Il joue des musiques vivre sur le moment, sur l’instant, mal, on s’en veut. Une étiquette un peu plus savantes, un peu plus essayer d’être honnête, en ac- pour déchirer, c’est vraiment dif- composées. C’est Arnaud. C’est cord avec soi-même, d’être le ficile, on est catalogué, étiqueté. Arnaud Méthivier. Il est fou, il est moins dégueulasse possible, gé- On a envie de faire autre chose, complètement dingue, un vrai din- néreux, gentil. Avec tout l’acquis on fait autre chose. C’est tout à gue, mais bon, il est sympathique, du passé, il faut savoir s’amélio- fait normal. Alors des fois, c’est mais un vrai dingue. (sourire) rer, se corriger, pour simplement un peu gavant, fatiguant. Main- être bien. Pour être mieux. La tenant ça m’amuse de faire VB : Nano vous demande : «Etes- seule chose qu’est sympa dans «Rocamadour», à la fin j’avais vous heureux dans votre art» ? vieillir, c’est qu’on connaît mieux trouvé une nouvelle version, qui GB : Ouais, maintenant ouais. C’est les choses, on commence à com- m’amuse moi-même et qui amu- marrant, depuis que je signe pas de prendre le système, le fonction- se les gens. Je le faisais… par maison de disque je suis heureux nement. Ca, c’est quand même politesse. Et puis maintenant par (sourire). Oui mais c’est vrai. C’est sympa de savoir. Comme disait plaisir parce que j’ai trouvé une assez drôle, c’est paradoxal. Il y a Sacha Guitry, «Si jeunesse sa- version qui m’amuse aussi. J’ar- des périodes où j’étais malheureux vait, si vieillesse pouvait» (rires). rive à faire «Rocamadour» en mais en ce moment, depuis 3…4 m’amusant. Le problème c’est ans ça va. VB : A une époque, vous dé- aussi de s’amuser à faire des La chanson c’est quand même écri- marriez les concerts par les morceaux. Quand on fait des re des textes et faire des mélodies, tubes, comme ça, c’est fait ! morceaux comme ça très con- c’est déjà pas mal, et s’accompa- GB : Vous, vous avez trouvé ça nus, faut s’amuser aussi, si on gner c’est déjà pas mal. Auteur marrant, mais il y en qui ne trou- s’amuse pas, c’est pas la peine. compositeur interprète, mais pas vent pas ça marrant. Ils disent Faut s’amuser soi en premier «rive gauche», avec un phrasé plu- «Putain, il se moque de qui ?». pour amuser les autres. tôt rock. Mais il n’y a pas la guitare. En même temps, il faut les faire. Propos recueillis Donc je suis entre le « rive gauche A l’époque où j’ai changé de ook, par Valérie Bour » et un ancien rockeur, voilà. Sinon, par moments, j’étais rasé avec oui j’ai fait beaucoup de dessins. Je des grosses moustaches, «Si En concert : dessine beaucoup. L’affiche, le petit c’est lui il va nous chanter Roca- 27/11 à l’Européen Paris personnage, c’est moi qui l’ai fait. madour, si c’est pas lui, il chan- page 20

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LDDLO: Cet univers développé sur scène aura une suite ? C & Y : Comme souvent en auto- production, c’est la scène qui ali- CHARLOTTE ETC. mente les disques. et Yann FERY Effectivement, le prochain dis- que sera imprègné de cette créa- «Nous ne savons plus qui nous tion, mais sera aussi ouvert à la sommes». participation d’autres musiciens. L’Espace Jemmapes accueille Nous pensons également pou- le nouveau spectacle de char- voir reprendre ce spectacle en lotte etc. dans le cadre d’une groupe. résidence de création qui s’achèvera par une série de 5 LDDLO : D’autres projets vous concerts du 7 au 11 novembre attendent ? 2006. C & Y : En parallèle, nous pré- parons un autre spectacle avec Cette résidence est l’occasion Yan Allégret «ISSUE», dans le- pour nous de pouvoir assister quel nous sommes uniquement à un spectacle en création. Nous portons un regard neuf sur acteurs. notre travail de plusieurs années, Il sera joué dans la foulée des LDDLO : Comment travaillez- d’où le titre du spectacle «Nous concerts à l’Espace Jemmapes. vous sur ce nouveau specta- ne savons plus qui nous som- cle ? mes», comme un thème décliné Propos recueillis par C&Y : Nous sommes en répéti- tout au long du concert. Didier Boyaud tion depuis une semaine avec le metteur en scène Yan Allégret, LDDLO: Le plateau paraît bien charlotteetc.free.fr avec qui nous partageons une nu, un piano, une guitare et esthétique commune, un petit ses effets, un accordéon ? www.soweiter.net/actu.html côté «David Lynch qui traîne». C & Y : C’est une démarche, un Nous créons un spectacle en travail sur la liberté de recréer. A voir en vidéo sur le site de continu, un fi l tenu du début à la Partir d’un plateau nu, habillé de LDDLO, quelques ambiances fi n, et non pas une succession de lumiéres et peut-être de projec- de travail. chansons, même s’il existe des tions. interruptions volontaires entre Quelques présences, tel ce piano certains morceaux. éclairé par un néon, une lumière noire en fond de scène, une dé- LDDLO : Est-ce l’occasion marche lumineuse de Stuff, notre pour vous de revisiter certains éclairagiste. de vos morceaux ? Nous souhaitons donner de l’am- C : Nous avons la volonté de pleur, de l’intimité à cet univers. réouvrir notre répertoire, de le En étant seulement 2 sur scène, bousculer. se laisser aller à expérimenter. Yann pourra quitter la guitare Mais ce n’est pas juste un con- pour l’accordéon, et de mon cept, il faut aussi parler au pu- côté me mettre au piano. blic. Nous nous laissons toutes ces Partir à notre découverte permet possibilités pour voir comment de vivre des choses plus fortes et cela résonne. de les partager. page 21

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dans l’imaginaire. La preuve, Vous êtes hyper productif pour j’ai écrit ‘Alligator’ 10 ans avant un artiste qui écrit depuis si Tchernobyl, j’ai écrit ‘quand la longtemps… banlieue descendra sur la ville’ J’écris beaucoup mais ya un mo- Hubert-Félix 10 ans avant que ça n’arrive. ment où j’arrête d’écrire, où je THIEFAINE J’écris un peu pour les autres… corrige… Au début, je peux trouver ça in- Là, j’ai écrit 15 chansons en 15 Thiéfaine sort de scène…de- téressant, surtout s’il y a une jours, ça va être transformé en vant les loges du théâtre Jean musique, parce que la musique essai je pense…c’est-à-dire, je Vilar, quelqu’un me dit « Hubert peut m’inspirer des idées mais si ne vais pas sortir un disque le se sèche les cheveux et il sera j’ai une commande et que je dois mois prochain, je le sortirai peut- à vous »…Je n’en espérais pas m’appliquer à écrire pour quel- être jamais. tant, et pourtant… Thiéfaine se qu’un, je m’emmerde à faire ça. Mais oui, j’aime bien écrire, ça montre extrêmement disponi- J’arrive à travailler que lorsque me délasse… ble pour quelqu’un qui sort de j’arrive à détourner mon travail scène. Il ne fait pas semblant. en jeu. Je suis une sorte d’enfant Quand vous faîtes de longues Il est malicieux, gêné quand il de ce côté-là. tournées, quelles sont vos ru- s’agit de compliments, d’admi- J’ai besoin de tout mon imaginai- ses pour éviter la routine ? ration, de recevoir…beaucoup re, de travestir la société, de me Ben, il n’y a pas vraiment de rou- plus à l’aise lorsqu’il s’agit de travestir moi-même… tine parce que les tournées à pro- création… La vie, ça n’a aucun sens, ya rien. prement parler sont relativement Ça fait 2500 ans et plus, puisqu’il courtes. On a eu par exemple Si vous teniez un journal ou y avait Homère… mars/avril où on a fait 45 dates un blog, qu’écririez-vous sur Ca fait des milliers d’années que en 5 semaines, il y a même des le concert de ce soir ? certains philosophes se pen- jours où on a joué 2 fois ! HFT : Je ne sais pas, je pense chent là-dessus et ya rien qui a Là, c’est intense mais c’est un que je raconterais que des con- évolué au niveau de la pensée, laps de temps. neries. Enfi n je m’amuserais au niveau de la connaissance, à Ensuite, on s’est un peu reposés avec, j’écris pas pour m’emmer- part la façon de transformer une et on est repartis sur des festi- der à raconter la réalité donc si arbalète en char d’assaut et une vals. j’avais un blog ou si je devais fl èche en missile, c’est à peu Alors les festivals, c’est très fati- écrire une biographie, ce serait près tout ce qui a évolué dans le gant parce que pour un concert, forcément un roman et ce serait monde. on perd 3 jours des fois parce plus proche de moi-même et de Et c’est tout. qu’il faut y aller. ma propre réalité en m’amusant Bon, au lieu que ce soit par les Des fois, on fait 1000 km pour et en déformant tout, que si je hommes, la mini jupe est portée un concert et même plus, on a prenais les choses sérieuse- par les femmes aujourd’hui, ça, fait le tour de France en 3 jours ment et de façon chronologique. c’est très bien comme ça, cette donc ça, c’est très fatigant mais D’ailleurs, c’est ce que je fais inversion. Mais rien n’a évolué. par contre, c’est pas une routine souvent, j’écris mon journal, en- On ne sait rien. parce que c’est aéré… fi n, c’est pas un journal, j’écris Alors je pense que quand je joue, On a 3 jours où on rentre chez quand j’ai le temps…mais ça de- quand je mens, quand j’imagine, soi et on repart. Chaque fois, vient des poèmes, ça devient un quand je trafi que, mes sens et c’est un nouveau jeu puis c’est peu tout sauf un journal, quoi ! Je mes sentiments, je suis sans pas les mêmes lieux, c’est pas la vis déjà la vie, j’ai pas besoin doute aussi proche de la vérité les mêmes gens, c’est différent. de la raconter en plus. Ce qui que si je disais la vérité. Puis une fois qu’on joue, on ne m’intéresse, c’est le futur parce Je crois que le mensonge est joue pas pareil 2 soirs de suite, que le futur, pour moi, il est déjà une autre forme de vérité. quoi. page 22

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Qu’est-ce qui fait que ce soir, vies et cette envie c’était d’être le c’est différent des autres con- chanteur d’un groupe. J’ai choisi certs ? des gens qui avaient cette possi- Ben ce soir, c’était une reprise, bilité. C’est ça la grande différen- c’est-à-dire que le dernier concert, ce. Bon ce soir, à la fin, on jouait c’était le 3 septembre à Charle- mieux qu’au début, parce qu’on ville. On sortait des festivals d’été. a retrouvé nos marques et là, je Et puis là, on ne s’est pas vus, pense qu’on va faire une fin de tous, depuis un mois donc c’est tournée absolument…bien. Déjà une reprise et une reprise, c’est cet été en festival, on a vraiment une reprise, quoi ! Y a forcément fait de belles choses. On s’est des tâtonnements, des fois, on se bien éclaté et je crois le public dit « merde, on est où ? Qu’est- aussi. Nous, on est plus heureux ce qui se passe ? Comment est la tournée en solitaire. Pendant quand on sort de scène sans avoir la structure à ce moment-là ? ». la tournée solitaire, j’ai également fait la moindre erreur, en ayant mis On ne sait plus bien la partition fait le disque scandale mélancoli- toute notre énergie…Moi j’aime mais en même temps, on est frais, que et en 2006 le scandale mélan- bien traverser la scène, aller de-ci, donc on récupère très vite les er- colique tour. C’est complètement de-là…quand les gens sont assis, reurs…enfin je pense qu’on en a des nouveaux musiciens que j’ai ça fait un peu ridicule. En festival, fait pas mal mais qu’on est à cha- recrutés 15 jours avant la répé- j’aime bien quand les scènes sont que fois retombés sur nos pieds tition, en 3 jours, et c’était super grandes, on peut vraiment bouger. parce qu’on revient de vacances. efficace. Et là, j’ai aucun regret Donc voilà… Un concert de reprise, c’est forcé- parce que ça marche. Je rêvais ment un petit peu comme ça. depuis longtemps non pas d’avoir Est-ce que cette tournée vous a des gens derrière moi qui m’ac- donné de nouvelles envies ? Vous aviez un réel plaisir à vous compagnent mais d’être le chan- Je sais pas, moi je n’écris pas retrouver ! teur d’un groupe. trop en tournée. J’écris pendant Oui puis certains étaient partis en les repos. Là, je me suis retrouvé, vacances, moi j’étais rentré chez J’ai l’impression que vous re- j’avais besoin d’être seul et dans moi…ça fait 3 ans ½ que je suis trouvez le plaisir d’écouter la le silence donc je suis parti dans sur la route. C’est simple, en quel- musique quand vous êtes sur la forêt du Jura et j’y ai passé 3 ques années, j’ai fait 3 tournées, scène… semaines. Donc ya un moment où 2 disques, un disque live, une piè- Oui, parce que ça joue d’abord ! je me suis remis au vert, j’ai repris ce de théâtre, un spectacle Léo Pis ça joue fort…et ça joue dense des bonnes habitudes, je me suis Ferré, un spectacle Brassens…je et eux, ils ont du plaisir à jouer. mis à me lever tôt le matin et puis prépare un spectacle sur Boby La- Donc on est un groupe sur scène, naturellement au bout d’un certain pointe, là…c’est très intense. Pour je ne suis pas Charles Trenet ac- temps je me mets à écrire, j’ai des moi le luxe, c’est de dormir 3 soirs compagné par untel… On a re- idées. Comme je suis dans le si- dans le même lit. peint les arrangements, c’est-à- lence, j’use pas mes mots avec dire que j’avais une autre équipe les autres. Les autres sont des Et là, vous finissez une tournée qui était prête et puis le chef d’or- voleurs de mots. On est tout le en novembre… chestre au dernier moment m’a dit temps obligés de parler avec les Je suis arrivé le 17 novembre qu’il ne pouvait plus faire la tour- autres. Alors que quand je suis 1971 à Paris avec ma guitare et née et comme il avait choisi des tout seul dans le silence, les mots, mon sac à dos et je vais quitter le musiciens, j’ai dissous le groupe ils viennent et je peux en faire 17 novembre 2006… qui devait m’accompagner et j’ai quelque chose. C’est pour ça qu’à Il y a eu 3 tournées qui se sont sui- choisi un autre groupe avec mes une époque, je partais souvent à vies. Celle de Défloration 13 puis propres critères, mes propres en- l’étranger, je faisais de grandes page 23

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interview scriptée randonnées que ce soit en Europe Vous êtes un peu madame Irma, c’était exactement ce que j’avais ou en Amérique, au Mexique, aux vous voyez des choses en ce décrit avant. Donc je ne suis pas Etats-Unis, au Canada. moment ? un prophète mais disons que c’est Je partais pour avoir d’autres lan- Oui j’ai toujours eu ce côté un vrai que quand on est disponible gues autour de moi et pas être petit peu d’avance…j’ai eu plus et qu’on a l’habitude d’aller grat- obligé de comprendre les autres. d’avance que ça même quand ter le futur, le futur vient vers nous Et pour garder juste les mots prin- j’étais jeune. J’arrivais à voir l’ave- des fois. cipaux pour le discours avec les nir. J’ai prévu des déraillements autres et garder toute la crème de train qui sont arrivés. J’ai des Ça vous inquiète ? pour soi. tachyons qui viennent me traver- Non, pas du tout. J’ai aucun sens C’est-à-dire, je redevenais proprié- ser parfois. J’ai un de mes fils qui de la vérité ni de la réalité. Donc taire de mes mots et je pouvais les est un peu comme ça d’ailleurs. ça ne m’inquiète pas du tout. mettre dans des chansons. Mais c’est à travers les rêves ou Tandis que quand on parle toute la bien il pense à un truc et ça lui journée… arrive…il va découvrir un mot et Y’avait un très bel exemple, c’est puis il va le voir inscrit 5 minutes Manzarek, le clavier des Doors, après. Moi ça m’arrive aussi, là…il qui parlait de la fin de Jim Morri- faut être disponible, faut pas avoir son quand il passait ses journées de gros soucis, faut laisser flotter à discuter dans les bars. son esprit et on peut voir le futur Et Manzarek a fait une très belle pénétrer le présent. J’ai eu 2 ou 3 analyse, il disait à Morrison « à trucs ces jours-ci où je me mets à passer tes journées, moi je m’en penser à quelque chose qui n’est fous que tu picoles avec les mecs pas coutumier et tout d’un coup, mais tu bouffes ta poésie parce je vois la chose écrite sur un mur. que tu tchatches toute la journée Voyez, par exemple, je pensais à avec tes potes de bar en vidant François Truffaut, en voiture…et des bouteilles et des bouteilles et je pensais à François Truffaut VB : La chemise, elle est comme tu t’épuises complètement à ne parce que je cherchais le nom vos textes, on croit y voir des cho- rien faire, tu fais rien de tes mots d’un autre metteur en scène de la ses et au fur et à mesure du con- qui sont magiques quand t’en nouvelle vague, de sa génération. cert, on en découvre d’autres… prends soin. ». Et tout d’un coup, je vois à la fois HFT : C’est Arno qui me l’a rame- Donc je pense qu’il est important sur un même bâtiment ‘Truffaut’ et née de New-York, ça a dû lui faire de s’isoler quand on veut écrire. le nom de ‘cinéma’ – alors je ne penser à moi quand il l’a vue… ! De toute façon, quand je m’isole Et le T-shirt, c’est Paul Personne sais pas si c’est Truffaut les grai- qui me l’a offert… même quand je ne veux pas écri- nes qui partage le même bâtiment re, j’en reviens à l’écriture… qu’un cinéma ou si c’est le cinéma Donc en tournée je peux pas, je Truffaut mais de toute façon, 5 rencontre trop de gens, je suis tout minutes avant, j’étais en train de Mais vous parliez des élections le temps en train de parler, de ré- penser à François Truffaut quand tout à l’heure sur scène… pondre à des questions… j’ai découvert ce truc que je ne Moi je vois du fascisme partout en Je suis toujours entouré donc on connaissais pas, quoi… ce moment. J’aimerais bien enten- parle quand on est des humains J’ai décrit une fois la gare de Me- dre un peu plus des gens comme ensemble. lun alors que je n’avais jamais été Strauss Kahn ou les autres…par- C’est pas un rejet que je fais, j’ai be- à Melun et je me suis retrouvé ce qu’on n’en entend que 2 en ce soin des 2, mais pour écrire, il faut quelques années après à Melun moment. que je sois seul et dans le silence dans des circonstances assez pé- Et les 2 ont le même discours fas- et plutôt le matin d’ailleurs… nibles et dramatiques et à la gare, cistes de 2 façons différentes. page 24

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Donc pour moi, j’attends vraiment Vous avez rencontré plein d’ar- Et puis par contre, y’a une caté- que les autres parlent. tistes sympathiques quand gorie de gens qui cherchent un Mais apparemment les autres ne- même ces derniers temps… gourou donc ils me mettent à cette vont même pas avoir le droit de Ouais, complètement…mais ils place. parler parce que les…les…les… sont emmerdés des fois quand Y’en a qui cherchent le diable et ils ils se trompent vraiment les gens je dis du bien d’eux. me trouvent forcément. qui font les…les…les…merde. Pis moi aussi d’ailleurs, quand Puis y’en a d’autres qui sont dans ils disent du bien de moi, jsais des catégories de gens qui souf- C’est un nom que je déteste telle- plus où me foutre. ment que…les gens qui prévoient C’est gênant quand on dit du bien frent donc ce qu’ils aiment en les pourcentages…qui disent ‘voi- de vous ! Et je me suis aperçu moi, c’est ma façon de parler de là, Arlette Laguillier a 3,5%...’ bien souvent, les gens qui disent du la souffrance parce que c’est une avant…ou ‘en ce moment, c’est bien de vous, c’est juste avant façon pour eux de la partager. Ségolène Royal qui aurai’…com- qu’ils vous cassent. Ça c’est un Que ce soit des gens qui sont ment ça s’appelle ce truc-là… truc, au bout de 58 ans j’ai re- malades ou handicapés ou des Y’a des noms que je perds après marqué ça. Les gens disent tou- gens qui font des séjours chroni- minuit, ma mémoire s’efface… jours du bien de vous avant de ques en HP, des schizo paranoï- J’ai pas besoin du passé, c’est vous assassiner. J’ai toujours des par exemple parce qu’ils ont pour ça que ça m’emmerde et que peur quand les gens, surtout remarqué que chez moi dans mon mes proches, disent du bien de écriture y’avait un petit côté schizo je perds la mémoire… moi parce que je me dis « houla, y’a un drame qui se prépare » et paranoïde donc je les attire, ce qui Vous arrivez à vous projeter ou je ne rate jamais le drame. est normal. vous êtes vraiment dans le pré- Des gens qui sont en prison aus- sent ? Et avec vos fans ? Quand si…enfin, des gens qui souffrent Ouais, je me projette au bout d’un vous chantez «Soleil, n’est-ce d’une façon ou d’une autre. canon de revolver souvent…de pas merveilleux de se sentir Alors bon mon combat par rapport préférence dans la bouche… piégé ?», ça veut dire «arrêtez aux fans, c’est ceux qui cherchent J’ai toujours été sensuel. de m’aimer» ? un gourou parce que je ne serai C’est beaucoup plus général, pas celui-là. Si vous étiez journaliste pour c’est pas tout à fait ça, parce La façon de parler de Président de qu’ils n’ont aucune raison de la République, c’est une façon de notre magazine et que vous m’aimer puisqu’ils ne me con- pouviez y dire beaucoup de bien naissent pas. Ils ne connaissent casser ce truc-là. d’un artiste, ce serait de qui ? que mes mots et mes musiques. Pis c’est une façon d’utiliser une Oarf, j’arrive pas à dire du bien J’ai beaucoup de sortes de fans photo que j’aime bien parce que des gens, moi. différents, c’est ça qui est inté- je la trouvais vraiment pute cette Pour dire du bien des gens, faut ressant d’ailleurs. photo et je me disais, punaise, on arriver à dire du bien de soi- Ça va du côté universitaire et dirait carrément la photo d’un mec même, pour dire du bien de soi- très cultivé au petit zonard…j’ai qui se présente aux élections sur même, faut s’aimer, moi j’m’aime quand même une très large des affiches devant les mairies, pas, l’amour n’est pas un mot qui échelle…comment on dit ? Une tout ça. me passionne terriblement… fourchette, plutôt !...une four- C’est pour ça, ça m’a donné l’idée chette assez large dans le pu- du gag à une période, j’en profi- Enfin, je crois que je suis passé à blic alors bon y’en a certains je côté de ça. Donc je ne dis jamais ne me fais pas de soucis pour tais pour présenter toute l’équipe de bien des autres. eux, c’est des gens qui s’amu- technique comme ministres, mais Je les massacre souvent. Je leur sent avec mes textes, qui aiment ça faisait un peu long parce qu’ils taille des costards, je les coupe à bien ce que j’écris parce qu’ils sont beaucoup. la tronçonneuse mais je ne dis ja- aiment la musique et la poésie Donc là, j’essaie de faire plus mais de bien des gens… et la chanson. court. page 25

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Est-ce que vous pensez « oser donner un nom… pis tout à coup, » un jour ne plus chanter la fi lle ils se disent ‘merde, il est encore- du coupeur de joints ? vivant le mec qui a fait la fi lle du Je ne sais pas, y’a une tournée où coupeur de joint ?’ ! je n’ai pas chanté la fi lle du cou- Ils sont très étonnés de ça parce MARKA parle de Jacques peur et il s’est trouvé que la gens qu’ils connaissent la chanson mais DUTRONC, MC SOLAAR, la chantaient quand même…alors ils ne savent pas qui je suis. etc... autant que je la chante avec eux ! Enfi n, c’est rigolo, surtout qu’on ne la fait jamais pareil, quoi. Une découverte récente ? Vous prenez encore du plaisir à Donc c’est vraiment une façon de J’ai entendu une fi lle ce matin la chanter ? faire participer les gens sans les en radio qui s’appelle Anaïs qui Oui parce que c’est vraiment la obliger, sans leur dire ‘tapez dans chantait une chanson sur les gens chanson où les gens chantent les mains, chantez avec moi’… qui s’aiment et je trouve qu’elle a tous le chorus avec moi…enfi n une énergie et une fraîcheur dans non, c’est eux qui chantent, moi je Propos recueillis par sa voix…elle a l’air super sexy ne chante pas ! Valérie Bour d’ailleurs…comme quoi, les voix C’est quand même très intéres- c’est important…au téléphone sant, cette chanson, c’est un des www.thiefaine.free.fr déjà, tu peux te faire des fi lms…et seuls tubes souterrains qui exis- www.thiefaine.com cette fi lle, elle a quelque chose tent en France. d’assez intéressant. J’en vois pas d’autres. En concert : Elle a l’air toute jeune en plus, Parce qu’il n’est jamais passé 3/11 Troyes (10) elle a l’air d’être intelligente, elle vraiment, ça n’a jamais été un 14/11 Murs Erigne (49) a beaucoup de choses pour réus- tube de radio mais c’est un tube 15/11 Mayenne (53) sir. souterrain. 16/11 Orléans (45) Et en plus, les gens, au lieu de 17/11 Zénith de Paris Des rencontres artistiques ? chanter les couplets ou le refrain, J’ai des contacts réguliers avec ils chantent la partie orchestre… MC Solaar (voir photo) parce c’est pas un pont, c’est…mais je qu’on a quand même fait quel- ne trouve pas les mots, là…une ques chansons ensemble… sorte de leitmotiv, un riff, c’est J’ai travaillé au tout début avec presque une sorte de riff…c’est Camille mais là, depuis que ça comme si les Stones en commen- marche, je n’ai plus de nouvel- çant Satisfaction, tout le monde les d’elle, je ne parviens plus à la ferait « tintin, tindindin… », c’est joindre. un riff. Donc c’est assez étrange que les Fan de qui ? gens chantent le riff plutôt que le Avec Jacques Dutronc, j’ai eu refrain et que ce soit un tube sou- l’occasion de bien vivre ça. terrain. Parce que ce n’est pas évident, le D’ailleurs, quand je suis invité sur moment peut très bien basculer, les scènes des jeunes que ce soit on peut être fortement déçu. Tryo ou Cali ou Aldebert ou Mat- Là, j’ai beaucoup apprécié la ma- matah… enfi n, j’ai fait pas mal de nière dont il s’est occupé de moi. groupes… ce qui est troublant, Il y a un bout de temps, j’étais in- c’est que quand j’arrive sur scène, vité à une émission sur M6 et je ils ne réagissent pas, ils ne savent devais chanter une de mes chan- pas qui je suis, ils ne savent pas sons. page 26

rencontres la barbichette hors chant C’est rigolo parce que j’ai appris que lui déjà chantait comme Dean Martin. Quand il fait «croyez-vous que je sois jaloux…pas du tout, pas du GREGORI tout…» avec une voix de crooner, DERANGERE il se moquait de Dean Martin. Quand il fait «croyez-vous que je A l’affi che du fi lm «Les frag- sois jaloux…pas du tout, pas du ments d’Antonin» de Gabriel tout…» avec une voix de crooner, Le Bomin. En salle dès le 8 no- il se moquait de Dean Martin. vembre. Avec Grégori Deran- Et quand je faisais «la dame au gère, Anouk Grinberg, Auré- youki», je chantais à la manière de lien Recoing, Niels Arestrup… Dutronc qui chantait à la manière «Il y a des combats dont on de Dean Martin ! revient sans blessure appa- rente…» Propos recueillis par Valérie Bour Né en 1971, Grégori Deran- Il a refusé de venir me voir pour ne gère a notamment joué dans pas me mettre la pression, ce qui Pour information, sachez que MC ‘la chambre des offi ciers’ (no- était déjà très bien vu. Solaar est actuellement en studio mination aux César en 2002), Et puis quand ça a été enregistré et qu’il est le sujet d’un livre de ‘bon voyage’, ‘les parisiens’, et qu’on a fait un bout d’interview, photos paru aux éditions Panama ‘l’équipier’, ‘le passage de il a dit «maintenant, on va boire un : par Philippe Bordas de 1991 à l’été’… verre» et il m’a fait découvrir les 2006, depuis la rencontre d’un vendanges tardives que je ne con- chanteur débutant avec un photo- Est-ce qu’il vous arrive de naissais pas. graphe débutant… chanter sous la douche ? J’en ai toujours dans ma cave Je l’ai beaucoup écoutée, cer- maintenant. tains artistes énormément et Et pour moi, ça restera un moment Le récent album de Marka, « ak- maintenant, je tends l’oreille extraordinaire de me retrouver tion man » est toujours disponible mais j’écoute moins. Avant je avec Jacques Dutronc, accoudés sur www.marka.be m’endormais tout le temps avec à un bar. la musique maintenant plus du Et il n’y avait que nous dans le tout. Donc je connais Santana café réservé pour lui. par cœur, je me suis écouté Dutronc, je l’ai entendu à la radio en boucle tous ses albums sur quand j’étais jeune, il cartonnait plus de 15 années, Stan Getz dans les années 60, dans les an- aussi, mais dans les chanteurs nées 70 aussi…et puis je l’ai vrai- d’aujourd’hui, je n’y connais rien ment découvert en 80 où j’ai tout du tout. La musique je l’écoute réécouté, j’ai même fait un groupe principalement en voiture…par- qui s’appelait les Cactus et on re- ce que je n’ai plus mon petit prenait sa chanson ‘les cactus’ sur walkman orange…En voiture, scène. dès que les gamins m’en lais- Et puis ça m’a fortement infl uencé sent l’occasion entre «je m’ap- pour ma carrière solo…J’ai même pelle Emilie Jolie» et «Pierre et fait une chanson clin d’œil sur le le loup»… Quand je voyage, je 1er album où je chante un peu ramène des musiques tradition- comme lui. nelles en souvenir…sauf qu’au page 27

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Yémen, je suis tombé sur un guide Si chacun de vos films était une entend beaucoup Satie mais ce fan de Jean-Jacques Goldman ! chanson… : sont des scènes dans lesquel- Je n’écoute pas de musique non L’équipier [de Philippe Lioret les je n’apparais pas. Et quant plus pour préparer un rôle. Je sais avec Sandrine Bonnaire et Phi- à la scène de percussions sur le que ça se fait, c’est se mettre dans lippe Torreton] ? champ de bataille, c’était un con- une ambiance grâce à la musique, «Dès que le vent soufflera» de trechamp donc j’étais parti cas- mais il faudrait l’avoir en jouant ! ser la croûte ailleurs ! aussi ! Je me demande si je n’ai C’est un rôle avec toute une par- pas lu que Johnny Deep le faisait Bon voyage [de Jean-Paul Rap- tie un peu opaque donc au con- avec un écouteur dans l’oreille peneau avec Gérard Depardieu, traire, je restais dans ma bulle à mais ça me paraît un peu alambi- Isabelle Adjani, Yvan Attal…] ? essayer d’entendre plutôt qu’une qué. Un truc un peu enlevé…la chan- musique les sons d’explosions, son du film chantée par Isabelle de détonations, de cris ou de Allez-vous voir des concerts ? Adjani ! C’est un peu facile mais machins comme ça. Le person- Très peu. Santana m’a beaucoup en même temps, c’est celle qui ra- nage est censé revoir des scè- déçu. Je continue à aller voir Bi- conte le mieux le film !!! nes dans ses crises, et on a com- réli Lagrène parce que ça reste mencé le tournage par ça alors très festif et comme j’ai joué de Le passager de l’été [de Floren- fallait s’inventer des trucs que je la guitare jeune, le voir jouer est ce Moncorgé-Gabin avec Cathe- n’avais pas vécues puisqu’on ne toujours plaisant. J’aimais les gui- rine Frot et Laura Smet] ? les avait pas tournés. tar hero mais c’est un genre qui Ce serait plutôt « allez, viens boire En fait, Antonin souffre de phéno- n’existe plus. Moi je jouais dans un p’tit coup à la maison ! » ou « mènes de reviviscence. C’est des les caves avec un coup dans le les vaches rouges, blanches et gars qui ont vécu des moments nez et les copains… noires…nya nya…made in nor- d’effroi, des choses tellement in- mandie ! » concevables que le cerveau ne Vos premiers souvenirs liés à les digère pas et l’événement des chansons ? Les fragments d’Antonin [de se répète à eux 60 fois par jour Quand j’habitais en Guyane, c’était Gabriel le Bomin, sortie le 8 no- avec les mêmes sensations et ils la biguine et les musiques de car- vembre] ? réentendent les sons de la scène naval ou « Cé-cé-cé-célimène ! ». Houla…un truc d’un mec qui ne initiale. Donc ce que j’avais en Après, c’est Renaud, un 33 tours va pas bien…comment il s’ap- tête, c’était davantage un uni- à Bobino, quand il avait son ban- pelle, celui qui ne va jamais bien ? vers sonore qu’une musique. La dana rouge et ses pantalons trop D’ailleurs, il est mort…Reggiani ! seule, c’est une espèce de ren- serrés. On m’a acheté ça comme Ou Miossec aussi qui ne va jamais gaine sur des bouteilles dans la un disque d’Annie Cordy et la 1ère bien… Ou l’histoire d’un mec pen- tranchée…mais je l’ai découver- K7 de Madonna quand elle avait dant la guerre… «le déserteur» de te pendant le tournage. ses cheveux en pétard et ses pe- Boris Vian…un truc antimilitariste, tits collants et qu’elle chantait « quoi. like a virgin »…bon, y’en a que j’ai gardés et d’autres que j’ai jetés ! [le réalisateur Manuel Pradal Et Renaud, c’est resté. Mais je ne passe devant le café où se dé- portais pas le bandana, j’étais trop roule l’interview et, apercevant jeune, ça aurait fait Jordy !!! Grégori à travers la vitre, se met Ado, il y avait la musique de la à trembler comme le personna- boum, c’était super efficace…un ge d’Antonin !] 45 tours blanc avec une pomme Ecoutiez-vous de la musique et la tête de Sophie Marceau…et sur le tournage de ce film ? puis la musique d’Indiana Jones ! Dans les fragments d’Antonin, on page 28

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Réfléchissez-vous en jouant ? Vous arrive-t-il après montage J’essayais de revoir les scènes et rajout de musique de sentir qu’il était censé revivre : quand il un décalage avec ce que vous poignarde un allemand, quand il avez tourné ? se prend du sang dans le visage… De vrais décalages, non, parce Enfin, entre les scènes, je me dé- qu’au bout d’un moment, on com- tends un peu parce que 15 jours à mence à piger puis aujourd’hui y trembler comme ça, y’a des jours a ces espèces de retours vidéo, où j’étais claqué, je n’en pouvais on peut toujours jeter un œil mais plus, j’en avais marre. Mais ça parfois la sauce prend, parfois demande quand même un sacré elle ne prend pas et ça se joue à effort. 3 fois rien. Des fois, on est sorti Quand on a l’habitude de jouer, on du plateau en se disant « on a fait s’ouvre un peu aux autres, la scè- un truc vraiment chouette » et la ne, on la fait 6 fois, on essaye de scène dans le montage quand elle la redécouvrir, à chaque fois d’y est enclenchée elle perd tout son trouver un truc un peu nouveau jus. D’autres fois des trucs ano- donc ça demande d’ouvrir toutes dins prennent une ampleur pas les écoutilles. possible. Mais j’arrive toujours à des notes un peu western…ou Là, c’était l’inverse, fallait que je deviner ce que ça peut donner. dans des trucs beaucoup plus sois opaque aux 2 autres acteurs puissants comme dans ‘il était constamment donc c’était un peu Pour le spectateur, c’est impen- une fois en Amérique’. Je trouve bizarre de rester seul et de garder sable un film sans musique… ça évident ce qu’il fait, accessi- tout ça en tête, avec la guibole qui êtes-vous surpris par le résultat ble et ça transporte tout de suite tremble ! en découvrant l’utilisation de la dans une atmosphère. Et ça se musique ? prête à tout, je ne vois pas for- Comment est intervenue la mu- Ce que je trouve magnifique avec cément les images du film pour sique du film ? la musique, c’est la dimension lequel il a composé. Quand on Je crois qu’elle est arrivée après. que ça prend tout à coup. Notam- écoute ça en voiture, ça peut col- J’ai l’impression que c’est en ment dans ce film-là où il y a des ler à un paysage, à un plan sur voyant les images, le rythme du silences, des moments un peu quelqu’un…ça révèle, ça donne montage…C’est un allemand qui durs…je trouve que les grandes de la force à ce qu’on voit. a fait ça [Fabian Roemer]. Moi je envolées puissantes et un peu ly- l’ai découverte en même temps riques, ça décolle, ça donne une Qu’allez-vous retenir du tour- que le film. émotion phénoménale sur une nage des fragments d’Anto- image d’un type plutôt dans une nin? Le film correspondait à ce que réflexion intérieure. Parfois l’ima- Avant j’avais participé à des films vous imaginiez ? ge ne peut pas raconter certaines plutôt confortables financière- Oui oui. J’étais quand même là choses et la musique va pouvoir ment, avec des vedettes. Et là assez souvent sur le tournage et donner de l’ampleur comme juste- c’était une ambiance vraiment je voyais ce qu’on était en train ment ces plans où le personnage, particulière. C’était la 1ère fois de faire. Je trouve que Gabriel le après tout ce qu’il a vécu, avait un que je vivais ça, que je tournais Bomin, le réalisateur, a réussi son coup de fatigue. La musique per- avec un type de mon âge. Et coup et je lui tire mon chapeau met d’avoir accès aux tourments toute l’équipe avait entre 30 et parce que c’était un pari, avec ces de son esprit. Moi, j’adore Ennio 36 ans…Y’avait pas beaucoup crises, avec cette construction du Morricone. C’est des musiques de sous et pour certains, c’était film un peu débridée, fragmen- qui amènent des images tout de le 1er film. Et puis c’était un film tée…j’ai aimé le film. suite. Autant dans l’humour, dans très dur. Par exemple, les filles page 29

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hors chant reportages des costumes devaient les laver Est-ce que ça a soulevé des tous les soirs, on était souvent questions en vous ? dans la boue. Au début, oui…le type vit des si- On dormait dans des hôtels très tuations extrêmes et particulières bas de gamme. Fallait se lever donc quand on doit interpréter FESTI’VAL très tôt. Et donc il y avait toute ça, on est toujours amené à se DE MARNE cette énergie-là, motivée par le demander ‘moi, comment je me fi lm que Gabriel voulait faire et serais comporté ?’ et puis j’avais Rencontre le respect qu’il a inspiré à tout le joué un autre rôle comme ça, dans avec monde assez rapidement. J’étais « l’équipier », d’un type qui rentrait Jean-Claude plus excité et plus à l’aise parce de la guerre d’Algérie où il avait BARENS qu’on était sur la même longueur torturé. Là aussi, on se pose des Directeur du d’onde. questions, on lit des témoignages. Festival Avec Adjani, Depardieu, etc, je me Je n’ai évidemment aucune expé- mettais la pression, les premiers rience de guerre, le seul truc que Comment est né le Festival de pas dans un grand cinoche. Pis je puisse retirer de mes lectures, Marne ? faut apprendre, faut se tromper, c’est que c’est un autre monde L’idée du Festival, n’est pas faut ‘croire que’ et s’apercevoir quand sa vie est mise en jeu. mienne...dans les années 1985, que non. Le terrain de bataille est un uni- en pleine paupérisation lexicale vers où les codes et les repères (Jean-luc Lahaye, Partenaire Quelle était la 1ère réaction qu’on a ici n’existent plus. On peut Particulier, Gold, Licence IV, après lecture du scénario ? se projeter mais on n’aura jamais Sabine Paturel, etc...) Jean Fer- Je ne suis pas dans la tête des les réponses. Ça m’a permis de rat, citoyen d’honneur de la ville autres acteurs mais je crois que réfl échir aussi à des choses qui d’Ivry, rencontre les élus du Con- c’est le genre de rôles après les- m’étaient arrivées mais ça ne ré- seil Général, et au lieu de s’at- quels on court tous un peu et qui sout rien non plus. Le personnage tarder sur un constat tristounet, proposent des choses qu’on n’a n’a pas pu défendre des innocents décision est prise de créer une pas l’habitude de faire. Avec tou- donc on peut y trouver aussi une manifestation avec des moyens tes ces crises, il y avait quelque certaine forme de lâcheté avec un conséquents, pour donner à voir chose à créer. Et puis ça pouvait sentiment de culpabilité comme et à entendre autre chose que ce être facilement « cucu ». J’ai lu un dans tous les traumatismes. que les médias proposaient. A bouquin sur le sujet. On a parlé à Donc je peux la retrouver aussi l’époque, j’étais l’adjoint de Gé- un psychiatre. dans des situations moins drama- rard Meys, premier directeur du On a regardé des images d’archi- tiques que j’ai vécues et dont je festival, et producteur de Jean ves de types de 14 à qui on fait me sers mais ça ne fait pas avan- Ferrat. Il me laissera les com- des stimuli et ils ont des réactions, cer le schmilblick. mandes en 1993. ils sautent en l’air en se tenant Ce n’est pas qu’un fi lm de guer- comme des femmes apeurées. re…c’est un fi lm sur des gens qui Quel est le principe de ce fes- C’est presque caricatural, on s’est ont touché quelque chose d’incon- tival ? dit, on ne peut pas pousser le bou- cevable et leur esprit, leur corps, Partage, brassage, et convi- chon aussi loin, les gens risquent le rejette. vialité sont les maîtres-mots du de se fendre la gueule…et en Et ce n’est pas seulement les mili- Festival. Toutes les scènes sont même temps, on ne pouvait pas taires qui vivent ces choses-là… partagées (premières parties, s’arrêter aux tics donc on a inven- co-spectacles, plateaux à trois...) té et dosé. Je faisais confi ance à Propos recueillis par Tout artiste refusant une premiè- Gabriel. Valérie Bour re partie, est invité à rester chez Dans ces moments-là, vaut mieux lui pour méditer sur son passé et éviter de se regarder ! www.gregoriderangere.com vaincre bien souvent l’amnésie. page 30

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Notre formidable maillage de lieux, Les plus belles découvertes des oreilles. Une fois le con- (90 à 2500 places) nous permet et émotions artistiques de fort d’écoute assuré, il suffisait d’accompagner les artistes à tou- 2006 ? d’absorber la musique.Au dé- tes les étapes de leur parcours. La soirée d’ouverture, où j’avais but, on a senti le chanteur per- Le festival, c’est également des proposé à Philippe Meyer, de turbé, les yeux rivés sur son actions hors de la période autom- transformer en spectacle vivant, prompteur, comme s’il avait du nale : fonds d’aide à la création, son émission « la prochaine fois mal à se mettre dans le bain… escales en France et à l’étranger, je vous le chanterai « beaucoup Mais le public n’en semblait premières parties dans le 94... d’émotion, et un public aux an- pas particulièrement gêné. De ges. nombreux agents de la sécurité Qu’avait de particulier ce 20ème empêchaient les spectateurs de anniversaire ? Quels sont vos rêves les plus se lever. Lorsqu’une dame s’est Tous les ans, depuis 1992, nous il- fous concernant l’avenir du écriée « On n’a pas le droit de lustrons un théme.Le 20 éme,nous festival ? danser ! »…Thiéfaine, compa- a permis de faire une multitude de Nous allons nous attacher à ré- tissant, répond « ça m’est arrivé clins d’oeil à ces thèmes dévelop- sister à toute entreprise de do- aussi…au CM2 !...Vous êtes at- pés dans le passé (un air de music mestication et d’uniformisation, tachés ?...C’est bien de rester hall, du Québec dans l’air, poètes à être du côté de ceux qui préfè- attachés les uns aux autres… » vos papiers, chanson de traverses rent la poésie sur la distance au Tiens, le guitariste s’est blessé etc...) profit dans la minute. Le cri ci- au dessus de la lèvre, Hubert toyen, le brassage, montrer aux essuie régulièrement la plaie Quelques souvenirs et anecdo- zélés laudateurs, qu’il est telle- pendant les solos mais supporte tes marquantes des 20 premiè- ment bon que le mot se rebiffe, difficilement la vue du sang, dit- res éditions ? qu’il sorte de ses gonds et de sa il. Enfin, comme l’avoue l’artiste Léo Ferré, quittant en 1988 sa gangue.Car sur l’océan des pa- à sa sortie de scène (voir Inter- Toscane, pour venir faire un roles, seule flotte la langue de view de thiéfaine dans les ren- spectacle exceptionnel, accom- bois ! contres), c’était un ‘concert de pagné par 30 musiciens, Brigitte reprise’, plein de maladresse et Fontaine en 1993, avec sa grâce Propos recueillis par d’enthousiasme à la fois. Et cela arachnéenne, un peu comme Valérie Bour n’enlevait en rien l’espèce de une renaissance. Silhouette cas- cohérence de cette tournée dont sante et fragile. Pour coudre hier les excellents arrangements à aujourd’hui, faire partager une mettent en valeur les anciens scéne (Pierre Perret et les Ogres comme les nouveaux titres. de Barback,Paco Ibanez et la Tor- due, Dikés et Idir, Arno et Zebda) Christophe Mali Des apparitions bien avant que le à Maisons- succès ait fait son oeuvre (où ses Alfort ravages) Juliette (1988), M-Yann Tiersen (1997) IAM- mc Solaar Oui, c’est un (1991) Louise Attaque- Miossec peu facile de (1997) Camille (2003) etc...Nou- Hubert-Félix Thiéfaine dire que garo, au sortir du Palais des Con- à Vitry sur Seine Christophe Mali grès, qualifiant notre chapiteau de est un mix entre somptueuse goêlette. Des centai- Pour apprécier ce concert de Bénabar et nes de ces auteurs qui se font un Thiéfaine, il était de bon ton Jacques Higelin… sang d’encre et qui suent la syn- d’avoir sur soi des boulettes…de mais c’est tellement taxe. papier humide collées au fond vrai ! Confondant parfois. page 31

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Il alterne entre les ambiances pla- Pour finir, une chanson a cap- Et pour finir, un clin d’œil amical à nantes et enjouées. Il communi- pella en hommage à sa grand- ses collègues de soirée : «Merci à que, il tutoie, il se moque parfois ! « mère « il est encore gros mais LO’JO d’être venu faire ma 2ème ça, c’est une chanson ‘Bac+7’…si plus petit qu’hier, ton cœur’… partie ! ». Une bonne mise en les parisiens pouvaient expliquer Rendez-vous le 27 novembre à train pour cette soirée aux multi- aux gens de Maisons Alfort et que la Cigale, quoi ! ples couleurs. les provinciaux aillent au bar ! » Christophe a l’art de se rendre Valérie Bour sympathique, jusqu’à débrancher sa guitare pour chanter au milieu RIT du public. à Gentilly Sur scène, entouré d’un petit univers à fleurs (joli porte-manteau servant également de porte ac- cessoires), Rit se lance dans LO’JO à Gentilly des chansons entre campagne ensoleillée et reggae, avec des Un fond de scène représentant textes citoyens, à l’image de une muraille naturelle, parcourue Tryo, mais en solo ! Accompa- de petits films où apparaissent Franck Monnet gné d’une guitare, d’un harmo- des mains, un chien sautillant, à Maisons Alfort nica, d’un carone, de quelques des tourbillons ou des dessins effets électroniques, et de sons d’influence « aborigène ». Deux Franck Monnet a les mains moi- champêtres, ce marseillais nous voix féminines, reconnaissables tes 2 jours avant la sortie de son offre quelques ballades folk, entre toutes et qui donnent la magnifique album ‘Malidor’ (à se un blues-rock avec la verve de chair de poule, font irruption dans procurer les yeux fermés). Ils sont Massilia et la tchatche des Fa- le noir de la salle, soutenues par 3 sur scène, guitare, basse, petite bulous Trobadors, une intro des rythmes vibrants. Nous voici batterie/percu, 3 bonshommes fu- simple et mélodique à la guitare déjà immédiatement plongés rieusement efficaces et humbles nous entraîne dans un univers dans l’univers de LO’JO. La voix à la fois. Franck s’excuse des Pink Floydien (ou Dire Straitiens grave, unique en son genre, de approximations de cette 1ère et selon ma voisine). Denis Péan, presque caché der- pourtant l’émotion est déjà là. Sa Une simplicité également dans rière son piano, éternel chapeau voix est incomparable, son utilisa- la façon d’annoncer ses mor- vissé sur la tête, vient compléter tion est très ample et surprenante. ceaux sous leur petit nom : « le tableau sonore. Puis des en- Vers la fin, il précise « ceux qui veu- N°1, N°2,…, N°4 c’est une nou- volées de violon envahissent la lent peuvent partir, je vais chanter velle chanson ». salle, tandis qu’une basse solide encore un peu » et demande au Rit distille un univers bucolique fini d’enfiévrer le tempo. C’est public ce qu’il doit chanter ! et malicieux : «J’aime bien les bien une nouvelle rythmique qui Et une reprise de Tryo version jours d’automne, monotones/ les accompagne depuis l’album « rock ! (puisque Christophe Mali, Mais je voudrais revoir la mer,/ Bazar savant », avec l’arrivée du membre du groupe Tryo, ne l’a On est bien l’hiver sur les bancs batteur Franck Vaillant. pas fait…)… « J’adore t’écrire », verts, Mais j’aimerais revoir la Entre 2 morceaux, Denis Péan grandiose…Pendant «Soliloque», mer / On ira pieds nus sur les salue le festival et la salle des il glisse des paroles de Thomas galets, les rochers pollués, les fêtes (typique des années 60 ! Fersen « mais la nuit, dans mes déchets, les tessons de bou- On croirait d’abord assister à un rêves »…tout se mélange, tout se teille» (paroles notées pendant radio crochet ou un concours de transforme, c’est un plaisir parta- le concert et sujettes à approxi- jerk !) qui les accueille. gé et des visages ravis à tous les mation !). Les influences multiples s’égrè- étages. nent au fil des morceaux, et des page 32

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reportages nombreux instruments utilisés assise presque dans l’ombre (elle D : Le choix du Français ou de (harpe africaine, violon touareg, me jurera avec malice que le l’Anglais dans les chansons in- …) avec parfois une basse qui sien est mieux d’ailleurs !), et qui tervient comment ? prend des sonorités grunge ! donne la réplique à celle, debout, Carla (violon) : Le Hasard. Les Certains morceaux tournent à un accrochée à une guitare rageu- textes sont composés par nous funk aux sonorités arabes. Des se, et voix anglaise d’inspiration deux plus une 3ème personne, morceaux enivrants, à la limite de Radiohead (sensation purement dans l’ombre (rires). la transe, de la «free world» com- personnelle, voir interview !). Le Julia (guitare) : L’influence de me on dit du « free jazz ». morceau ose la durée, jusqu’à l’Anglais fait plus rock, et le fran- Denis Péan reprend la parole pour épuisement presque physique. çais plus chanson mais nous vou- rendre « hommage à ceux qui ont Belle mise en condition. Suivent lons arriver à ce qu’il n’y ait plus créé ces instruments et plus gé- des morceaux plus intérieur, piano de différence. J’ai été bercée par néralement à tous ceux qui nous et violon, les 2 jeunes filles jouant la chanson anglaise et de ce fait ont précédés depuis des siècles très proches l’une de l’autre, j’ai plus exercé ma voix dans cet- ». Une attitude d’ouverture sur le comme pour mieux ressentir cet- te langue. monde bien à l’image du groupe. te intimité. Et cela fonctionne très Retour à des moments plus inti- bien. Je suis touché par le côté D : Vous venez d’univers musi- mes, avec une version dépouillée rock du violon, alors que le piano caux différents ? de «Brûlé la mèche», piano et et la voix se font doux. Et cette C : Je suis violoniste classique de violon touareg, Denis Péan et fusion se poursuit tout au long du formation, et je joue toujours cette Yamina aux voix. Créée après la concert, même quand l’une se musique. Avec le duo, j’ai recher- sortie du dernier disque, la chan- déplace d’un instrument à l’autre, ché d’autres sonorités, des bruits son « Rodrigue », dédiée «A tous elles se retrouvent pour mainte- aussi. C’est un plaisir de sortir du ceux qui ont une utopie, une île nir le fil. Je retiendrais également classique. quelque part au milieu d’une vil- une belle confrontation violon/ J : Hormis la musique anglaise, le», résonne comme un appel à guitare, un face à face qui monte mon influence « chanson fran- oser d’autres voix, d’autres voies, crescendo, propulsant le public çaise » c’est surtout les Bérus et de celles qu’emprunte le groupe vers des sommets. Noir Désir. et qu’il nous fait partager. Après un dernier rappel, les mots Emballé par leur performance, D : Une influence forte semble THE END puis FIN viennent s’in- je me dirige vers le bar attenant sortir de votre musique. Qui cruster sur la toile de fond. à la salle, et propose, à leur sor- écoute le plus Radiohead ? Un bonheur d’avoir fait ce voyage tie de scène, de les interviewer. J : Je n’écoute pas ce groupe. On avec eux. Ce qu’elles acceptent très gen- nous parle souvent de gens com- timent. me Radiohead, Suzanne Vega, MANSFIELD TYA mais on ne se positionne pas à Villejuif DB : Votre duo est la forme pre- dans un genre particulier. Nous mière du groupe ? privilégions l’ambiance, avec peu Toute 1ère partie MANSFIELD TYA(Carla et Julia): de notes. Au départ le violon est du concert de ce Oui, nous avons privilégié le mi- venu sur les parties de guitares soir, comprenant nimalisme. que j’apportais. J’ai appris ainsi également Diving Au départ, il y a environ 3 ans, la quand les notes étaient fausses with Andy, et MIG, formation était guitare, violon et (rires). je fais la rencontre voix. sur scène de Puis, pour enrichir notre univers D : Si vous êtiez journaliste MANSFIELD TYA, et apprendre de nouveaux instru- pour LDDLO, de qui nous par- qui a déjà commen- ments, sont arrivés l’harmonium, leriez-vous ? cé son set. Etrange de retrouver le piano. Carla : « Half aslepp » (www.half- l’harmonium, laissé la veille dans Nous avons commencé à jouer asleep.tk). Piano voix acoustique les mains de Denis Péan du grou- notre musique en concert, puis à très intérieur par une jeune Bel- pe LO’JO, résonnant maintenant un moment est venue l’envie de ge. sous les doigts d’une jeune fille l’album. Julia : « Tender for ever ». Une page 33

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fille seule à la guitare et ordi, dans Un frémissement parcourt le pu- un style un peu plus remuant. blic qui se lève à la fin de cette- chanson écrite il y a plus de 30 Didier Boyaud ans. Pas besoin de centaines de déci- www.mansfieldtya.free.fr bels pour électriser cette salle, où tous les âges se mélangent. Il y a eu tous les rendez-vous at- tendus, Sans la nommer, Le métèque, Sarah, Le temps de vivre, Le fac- teur, Têtes Raides à Champigny sur Les amis de Georges, que la fou- Marne le accompagne volontiers. Il y a eu la très ludique Bahia de Retrouver sur scène un musicien tous les saints, que les musiciens que l’on a eu la chance d’inter- entraînent dans une samba toni- viewer quelques heures aupara- Georges Moustaki à Villiers sur que et jubilatoire … vant (Grégoire SIMON prochai- Marne On a voyagé dans des musiques nement en vidéo sur LDDLO) fut de tous les pays, de lumière de une grande première pour moi. «.. Car ce sont nos enfants qu’on préférence, mais jamais dans Mon regard n’était plus le même, appelle la pègre» l’anodin. mais je pense aussi que ce mu- «Gauchistes, blousons noirs, dro- C’est une soirée qui donne un sicien, affable lors de notre en- gués ou autres nègres» supplément d’humanité et de fra- tretien, ne montre plus la même «Tous ceux qui pour survivre ternité, et un peu de fierté d’avoir image une fois son saxo solide- cherchent à rêver» fait notre métier de spectateur … ment empoigné, embarqué à tou- «Ceux qui cherchent la plage au- Merci à Georges Moustaki de res- te vitesse dans l’univers TETES dessous des pavés» ter ce messager amant du soleil, RAIDES qui rugit sur scène. «Et si je viens chanter à la télé- de la musique, un de ces oiseaux Eh oui, car TETES RAIDES rugit vision» migrateurs qui efface les frontiè- de nouveau sur scène, comme «Dans le cadre établi de la con- res au gré du vent, guetteur d’arc au temps des premiers albums. sommation» en ciel et de chemins d’étoiles, Anciens et nouveaux morceaux «Avec l’approbation du prince et qui invente des musiques mé- sont portés par l’énergie rock- de la cour» tissées de toutes les douleurs, punk des débuts (tels que je les «Ne va pas croire que c’est pour des chants de cœur battant, des ressentais à l’époque). faire un discours» ritournelles dansantes, bulles lé- Bien sûr, grâce au violoncelle en- «Ce n’est pas non plus pour te gères de champagne, éclats de tre autres, l’intimité est toujours convaincre ou te plaire» rêve et de vie, éparpillés le long présente au détour de certaines «Ou chanter les idées qui sont du parcours… chansons. déjà dans l’air» C’est comme un souvenir qui mar- Mais j’y ai retrouvé surtout la gui- «Mais c’est pour demander un che, et qui aurait l’âme tatouée tare atypique très reconnaissa- aujourd’hui meilleur» d’un chemin destiné à n’arriver ble, les cuivres percutants, et les «En faisant simplement mon mé- jamais, entraîné par l’écho d’une mots graves de Christian Olivier. tier de chanteur…» note de guitare, un chant éternel Rien de passéiste dans tout cela. venu du fond des âges… Un moment très présent. La soirée va s’achever… Porté par des métèques flam- Aussi fort qu’un «bon vieux Seul avec sa guitare, un homme boyants de soleils égyptiens, et TETES RAIDES» ! à la voix un peu cassée par une c’est la vie qui danse et renaît heure et demie de concert et un chaque matin. Didier Boyaud début de grippe, termine cette Chanson-cri. Norbert Gabriel page 34

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Vite, le festival va commencer ! Daby Touré Par le service de presse, on nous à Choisy le distribue toutes les infos néces- Roi saires ainsi que des brosses à dents…mmh, comment le pren- Comment FME QUEBEC dre ?! trois êtres Avec humour, bien sûr ! peuvent-ils Et ça démarre, petit discours, embarquer Journal du concert d’ouverture, bière à vo- ainsi dès les Festival des lonté, barbecue à l’arrière…pre- premières Musiques miers contacts chaleureux avec notes tout Émergentes à les gens du coin…tous les clichés un chapiteau? Rouyn qu’on peut avoir du Québec se Un presque Noranda Abitibi-Témiscamin- seraient-ils vérifi és en quelques inconnu pour gue…Québec…Canada…Amé- heures seulement ? moi (en tout cas en live) : Daby- rique…du Nord ! Ce pays, ce n’est pas un pays, Touré à la guitare et ses 2 acoly- c’est l’hiver…puis l’été…puis l’hi- tes (basse et batterie/percus). Dans l’avion déjà, des paroles me ver, dans la même journée ! Inu- Une musique enfl ammée par le trottent dans la tête tile de s’attendre à un programme rock, secouée par l’Afrique, plus «C’est une cabane au creux des rectiligne, donc… qu’un mélange dirais-je, un cock- bois/une vieille chanson d’autre- tail du type 1 + 1 = 3. fois/…/C’est un accent comme un Quelques concerts au hasard : Car ici pas de bataille entre 2 in- ancêtre/des mots qui donnent en- René Lussier, tel un historien de fl uences. vie de naître/C’est une province la chanson québécoise, raconte Plutôt un travail en commun qui qui me cause/une langue qui s’op- avec sa guitare et son corps tout génère un nouvel élément musi- pose/à parler autre chose…»*. entier, il siffl e, il grimace, et s’ins- cal. Durant les 6 heures de vol, on pire d’ambiances folk, country et Daby Touré est sur scène pour nous gave de cookies, de glace, même hawaïenne…Ce touche à tout donner (malgré le décalage de pizza…pas de doute, on a tout jouera un extrait d’une musi- horaire avec son dernier concert déjà changé de continent… que de fi lm en précisant « c’est un de la veille) et il y met toute son Mois d’août mitigé à Paris, grand instrumental, vous pouvez parler énergie. soleil à Montréal…un avant goût ». Sourires poétiques « Quand on On en prend pour soi sans rechi- de l’été indien et de ses écarts ne peut plus dormir, faut bien rê- gner. de températures…pas le temps ver les yeux ouverts… » de réaliser, une correspondance Didier Boyaud nous attend, un petit coucou pour Un autre jour, Thomas Hellman l’Abitibi, à plus de 600 km au dans une espèce d’intensité clas- Merci à l’équipe du Festi’Val Nord-Ouest de Montréal. sieuse… «dans la jouissance, je de Marne, et particulièrement à Par le hublot, des lacs, des forêts, regrette le désir»…on sent beau- Virginie Riche. vertes immensités, et quelques coup de complicité et de respect rares habitations éparses. sur scène…même quand le guita- Comme on peut le faire depuis la riste se change en gogo dancer… terre avec les nuages, on se laisse «nous sommes tous d’éternels aller à chercher des formes dans romantiques à la quête de l’inac- le paysage, des visages fendus cessible étoile»…la puissance de rires ou divers animaux… n’est pas forcément dans le vo- Vues du ciel, les routes sont des lume sonore et dans son cas, elle cicatrices à travers la nature. est toute en subtilité. La rumeur Arrivée à Rouyn Noranda… dit que le sauvage Richard Des- Dans le petit aéroport, les pan- jardins serait sorti de son bois, neaux sont bilingues, français/ qu’il aurait émergé pour assister amérindien… à quelques concerts… page 35

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D’ailleurs d’après Thomas Hell- l’imaginaire…(la mienne ressem- man, croisé un peu plus tard dans ble à s’y méprendre à un lapin la rue, l’usine de cuivre qu’il poin- nain). te du doigt serait celle-là même Des rencontres et des concerts chantée par Desjardins : toujours…de grands succès que «J’entends la fonderie qui rush/ le public reprend en chœur… Pour ceux qui l’ savent pas/On Les petits français que nous som- y brûle la roche/Et des tonnes mes prennent conscience de leur de bons gars./Les grandes che- méconnaissance en matière de minées/Éternelles comme l’en- production musicale québécoi- fer/.…/Le jour s’est l’vé sur Rou- Nadj (photo Christina Alonso) se…un peu comme dans un rêve yn/ ‘Ec des gros rayons d’or/J’ai où on est poussé sur scène, tout jasé ‘ec mon instinct.../Et j’ai cou- Que de surprenantes découver- le monde connaît des textes et ché dans mon char.» tes à faire et pas seulement artis- des artistes dont on ignore tout. tiques car la journée, il reste une Réal V Benoît, qui après une in- Sur des écrans dans les salles région incroyable à visiter. Le re- cursion remarquée dans la chan- sont projetées les images des fuge où la famille Pageau soigne son s’est retiré pour travailler tou- concerts passés ainsi qu’une et protège des animaux sauvages te sa vie dans les mines d’or de bande annonce totalement déli- blessés ou abandonnés…chacun l’Abitibi. Voilà que ce retraité re- rante du festival montrant un fé- d’eux aurait une histoire émou- monte sur scène lorsque de jeu- roce hard rockeur qui joue de sa vante à raconter…celle du chat nes rockeurs émergents vont le guitare dans une piscine ! qui veille sur un vieil ours brun ou titiller. Quel bonhomme ! Et quel celles de ces 2 lynx qui ont cessé bonheur donc ! La salle savoure D’autres concerts encore, Caféï- de s’appeler et de pleurer dès lors les histoires de ce pince sans rire ne et son rock hérité des meilleu- qu’on les a placés dans la même dont les paroles n’ont rien d’ano- res productions des années 80… cage… din. «La réelle sagesse, c’est un Franz Ferdinand francophone, Sur les routes de la région, on quand on ose avouer ‘j’sais pô». en quelque sorte, la déjante éner- sentira à l’occasion l’odeur acide gique en plus et le côté « victime de la mouffette écrasée…Là-bas Pour finir, dans le désordre le plus de la mode » (en québécois dans plus loin, la ville d’Amos qui a ga- complet, il nous restera en mé- le texte) en moins. gné le concours de l’eau la plus moire une soirée pas banale au Nadj, la belle grenobloise, qui pure du monde (plus crédible que Paramount. Les gens attendaient chante depuis une dizaine d’an- l’enseigne « meilleure poutine** la star de l’élite rock, Marc Ribot nées sur les scènes alternatives du monde » au centre de Rouyn (qui a notamment travaillé avec françaises, s’est trouvée une fa- !!!) Tom Waits et Bashung). Il faudra mille musicale au Québec…ça De belles personnes encore, patienter le temps de la 1ère par- donne des invités de luxe comme inoubliables, qui se battent con- tie… Fred Fortin à la Batterie. tre les préjugés envers les amé- Il faisait chaud à crever dans cet rindiens… « Avant de cogner endroit…les lumières s’éteignent, Suit Dobacaracol (en Europe quelqu’un, faut avoir chaussé Pat Watson et ses musiciens prochainement), symbole d’un ses souliers ». Mémoire, philo- s’installent…dès le premier mor- métissage réussi…les filles sont sophie et bras ouverts, ceux-ci ceau, des frissons me parcourent, impressionnantes avec leurs per- nous offriront de précieuses Pier- la fille derrière moi a les larmes cussions, le rythme dans leurs res de Fées, baptisées ainsi par aux yeux. cheveux et leurs amples mou- les indiens, sensibles à d’éton- A ma gauche, une personne plus vements…les atmosphères sont nants phénomènes magiques et expansive me tape le bras en ré- chaudes et envoûtantes, tant naturels à la fois… Façonnées pétant « c’est incroyable ! c’est musicalement que visuellement. naturellement par l’ère glaciaire incroyable ! »… C’est un voyage enthousiaste au bord de certains lacs, elles Au risque d’être réducteur, imagi- dans des pays inconnus et fami- portent bonheur et leurs formes nez un mélange entre Radiohead, liers à la fois. variées poussent les portes de Rufus Wainwright et Kurt Weill... page 36

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C’est juste surréaliste d’être em- Jenny Quel est le principe de ce fes- porté comme ça sans s’y atten- THIBAULT tival ? dre et d’accepter de perdre le co-fondatrice A la base, c’était de donner ac- contrôle devant tant d’inventivité, du FME cès aux gens de la région à de d’intelligence, de sensibilité, de la musique dite alternative…à générosité, de talent… Montréal y a une scène locale Le jury ne s’y est pas trompé et lui Qui êtes-vous ? très vivante tandis qu’en région, a décerné le prix étoile galaxie de Quel est votre étant donné que l’Abitibi est une radio Canada. parcours ? région très éloignée, y avait une demande pour de la musique non Tant de belles rencontres, de bel- J’ai 28 ans, je suis originaire commerciale mais y avait pas de les découvertes, de beaux sou- de Rouyn Noranda, j’ai grandi radio universitaire ou indépen- venirs, de belles émotions…on ici, j’ai déménagé à 15 ans en dante…et se croirait dans un dessin animé, Outaouais parce que c’était la «émergente », c’est une définition Heïdi au pays des caribous… récession, mon père travaillait polyvalente et large, constam- Cependant, pour être honnête, dans les mines après quoi je suis ment en mouvement…peu à peu s’il y a bien une chose qu’on peut allée à Montréal étudier dans le la marge influence la masse, l’in- reprocher à l’organisation du fes- cinéma et l’anthropologie, puis dustrie n’a pas le choix de prendre tival, c’est qu’ils n’aient pas su j’ai commencé à travailler pour en considération les groupes de invoquer les Dieux du champs des événements culturels et puis la « relève »…ça fait partie d’une magnétique (rien à voir avec la j’ai toujours été une grande mélo- ouverture d’esprit qui se passe au bande du même nom) pour qu’on mane bien que n’étant pas musi- Québec et on y participe. Dans assiste, ébahis, à la splendeur cienne puis j’ai rencontré Sandy tous les genres musicaux, y a de d’une aurore boréale… (le directeur du festival) quand j’ai l’émergence, ça bouillonne…on Rusés, nos cousins américains… organisé des retrouvailles abiti- essaye d’être à l’avant-garde et voilà une raison supplémentaire biennes. de les repérer… pour nous faire revenir ! Et puis un jour, c’était au mois de On collabore maintenant avec novembre 2002, en pleine tem- le festival des vieilles charrues Valérie Bour pête de neige, on s’en revenait en France et ça permet d’élargir du parc de la Vérendrye, j’em- encore les découvertes et les re- * « Montréal » de Kent barquais avec lui et il m’a dit «on tombées… ** plat typiquement québécois : pourrait ça faire un festival de frites, fromage genre cheddar et musique», c’était une idée un peu Le festival en quelques chif- sauce… farfelue mais on a fait une étude fres? de faisabilité, on a arrêté des da- Cette année 12 salles, 49 projets tes. artistiques, donc 49 « band » qui On connaissait plein de musiciens sont venus tour à tour donc ça fait par nos différentes expériences et du monde à loger, à nourrir, à re- on a fait la 1ère édition des FME cevoir, c’est plus lourd un festival en septembre 2003, ça a été vrai- de musique que de cinéma ! ment un grand succès tout de sui- 110 bénévoles qui ont œuvré aux te et depuis ce temps-là, chaque transports, à la billetterie, aux année on grossit pis on rajoute bars… des salles pis tout l’argent qu’on Par rapport aux spectateurs, on a a, on l’investit dans le festival, on ajouté des salles, par conséquent ne se prend pas de salaire. on attend une augmentation de C’est un peu un projet fou mais ça notre auditoire…on frôle les 9000 René Lussier fonctionne, c’est un peu là qu’on mais on essaie de garder le ca- (photo Christina Alonso) va chercher notre paye ! chet intime des salles… page 37

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Où un échange peut vraiment ceux, jamais de show annulé… s’établir entre l’artiste et le public, mais il n’a pas manqué de bière c’est ça qui a vraiment donné lieu nulle part, je suis curieuse de voir à des spectacles magiques com- combien il s’en est bu pendant me Pat Watson…les artistes ont le festival. Habituellement, c’est vraiment l’impression de connec- toujours un chiffre assez farami- ter pis de sentir l’énergie…et les neux ! gens sont très réceptifs. Maintenant ce qui est difficile à gérer, c’est que dans le milieu de Quel est votre rôle concrète- la musique, notre réputation nous ment pendant la manifesta- précède, ça jase et on a beau- tion? coup de demandes, sans parler On est un peu des pompiers, acheté un passeport, loué une des artistes qui veulent revenir ! on part, le téléphone sonne, y chambre en ville pis profité du Va falloir qu’on apprenne à s’as- a un problème, on va l’éteindre. festival. sumer sur nos choix ! On essaye de recevoir, les ar- Les gens prennent pas beaucoup tistes, les journalistes, faire en le temps d’aller visiter mais on www.fmeat.org sorte que le séjour se passe au essaye de les emmener à la pê- mieux…cette nuit, j’ai géré toute che, vu qu’ils sont logés sur une la soirée électro parce que les base de plein air au bord d’un Thomas HELLMAN gens étaient tous fatigués alors grand lac…ils vont marcher un j’ai pris le relais…On n’a pas de peu dans le bois, c’est juste les description de tache très définie. sortir un peu de la ville. Pis pour C’est assez intense, je n’ai même les montréalais, l’Abitibi c’était un plus de voix ! les 2 premiers jours peu comme le bout du monde, c’est les plus difficiles, c’est des alors nous on leur donne un pré- transmissions de savoir avec les texte pour venir nous visiter ! Ça bénévoles…une fois que tout le commence à faire boule de nei- monde sait quoi faire, on pourrait ge, les gens commencent à dire continuer quelques jours encore que la fête du travail, ça se passe après la fin ! à Rouyn, on a vendu quasiment 15% de passeports à Montréal, La région est importante pour c’est quand même bien… Thomas Hellman le festival… (photo Christina Alonso) Je crois qu’avec un festival dans Des souvenirs qui resteront de une région ou dans une petite l’édition 2006 ? Les présentations : ville, le côté festif prend tout son Cette année, au dessus du caba- Je suis Thomas Hellman et nous sens. Les opportunités de rencon- ret de la dernière chance, s’est sommes dans une loge bizarre tres sont quintuplées, les gens ne installée la radio. Puis juste en au dessus de l’Abstracto à Rouyn retournent pas chez eux après haut dans les loges se trouvent Noranda, loin, loin au Nord… le spectacle donc ils se rassem- des toilettes condamnées puis blent…alors tous ceux-là qui cou- y a eu un dégât, des gens sont Le FME, c’est quoi ? rent toute l’année surtout à Mon- quand même allés à la toilette et Les musiques émergentes, on dit tréal qui se connaissent et qui se ça s’est retrouvé sur la console, souvent la relève, les nouveaux, croisent parfois, là pendant 3 ou 4 c’est quand même assez parti- mais je l’associe aux musiques jours ils n’ont pas le choix que de culier, je me suis faite réveille un alternatives, dépendantes donc se parler, de vivre ensemble pis matin et on m’a dit «ah non, y a en fait tout ce qui est de la musi- de faire la fête, alors les gens de plein de pipi sur la console !», que pas commerciale. Et la musi- l’industrie musicale tripent autant c’est complètement anodin, on que commerciale, ça ne veut pas à venir jouer ici. Même cette an- n’aurait jamais pu penser qu’une dire de la musique qui fonctionne née, y a des artistes qui ont joué telle chose pouvait arriver ! Mais commercialement parce qu’il y les années précédentes qui ont sinon, on a toujours été chan- a de la très bonne musique qui page 38

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reportages réussit mais c’est de la musique que mes enfants soient élevés Vous faîtes référence à Brel dont le but 1er est de faire de en français…donc ils se sont en spectacle, quelle est votre l’argent donc pour moi c’est un installés à Montréal et ma musi- inaccessible étoile ? travestissement de l’art et c’est que, c’est vraiment une rencontre Moi j’ai commencé la musique très grave…Faut dire que l’art et entre les cultures musicales que à 15 ans et je n’étais pas prêt… l’argent ont toujours dû cohabiter, m’ont inculquées mes parents, certaines des chansons écrites c’est une espèce de mariage né- le folk américain comme Woody ce soir, je les ai écrites à 17/18 cessaire mais difficile et compli- Guthrie, Leonard Cohen tous ces ans…donc j’ai fait plein d’autres qué…depuis toujours mais en ce gens-là et tous les grands de la choses, j’ai voyagé, j’ai fait des moment, je pense qu’il y a vrai- chanson française, Brel, Richard études de lettres, pas de musi- ment une guerre contre tout ce Desjardins donc culturellement je que, et après, j’ai fait 2 albums qui est un peu la culture Bubble voyage un peu dans ces styles- en anglais, 1 en français mais je gum qui est en train d’appauvrir là, ce qui fait que je chante dans n’ai pas l’impression d’avoir fait terriblement l’inconscient collec- les 2 langues mais surtout je mé- ce que je voulais faire. Je suis ma tif de l’humanité, donc un festival lange les styles. plus dure critique et plus je con- comme ça met l’accent sur tout ce D’ailleurs quand je suis allé en tinue et plus j’avance et je dirais qui est en dehors de cette fausse France, ils m’ont dit « ah, vous que l’inaccessible étoile, c’est le culture… faîtes partie de la nouvelle chan- fait que je ne ferai jamais vraiment son française ! » et c’était une ce que je veux faire, que je serai De retour à Montréal, que serez- grosse surprise pour moi d’abord toujours insatisfait et que c’est ce vous tenté de raconter quand parce que je ne connaissais pas qui me fait avancer… on vous demandera comment vraiment ce courant et j’ai dé- Ce qui est intéressant pour tous ça s’est passé ? couvert depuis des choses que les artistes, visuels, théâtre ou Faut dire que là, je sors de scè- j’aime beaucoup, mais surtout je musique, c’est qu’en ce moment, ne…c’était vraiment un très bon m’exprime en français mais je me beaucoup de gens mettent l’ac- spectacle, le public était incroya- sens beaucoup plus nord amé- cent sur la nouveauté, faut tou- ble…moi, je suis de Montréal et ricain au niveau de mes racines jours créer du neuf, le milieu cul- c’est fou de se retrouver tous ici, à musicales… turel est un peu saturé par ça et à 8h au Nord de Montréal dans cet- force de vouloir faire du neuf on te ville très éloignée des grands Vous vous êtes créé votre pro- fait de l’absurde…c’est pas parce centres, et de voir qu’il y a telle- pre identité… qu’on mélange un didjeridoo avec ment de musiques excellentes, C’est pas forcément qu’on la un clavecin électronique qu’on j’ai vu des shows magnifiques… créé, c’est qu’on la comprend, est nécessairement en train de Sinon, il y a des anecdotes mais plus le temps avance, plus on faire quelque chose de révolu- je ne peux pas les raconter (rires) est confronté à des gens et à des tionnaire. Moi je pense qu’avant mais j’ai surtout vu Marc Ribot situations donc l’identité évolue, les artistes avaient beaucoup plus que j’ai beaucoup aimé, le guita- elle n’est pas arrêtée, on peut l’idée du respect pour les maîtres, riste de Tom Waits qui a collaboré d’ailleurs être plusieurs person- apprendre à les imiter le plus par- avec Bashung aussi, j’ai vraiment nes dans la même journée…c’est faitement possible, c’est une le- trouvé ça excellent… en perpétuel état de création… çon d’humilité, avant de voler de ses propres ailes et mes maîtres Vous êtes un grand voyageur? à moi étaient des gens très sim- J’ai beaucoup voyagé mais je ples, des folksingers qui sillon- voyage beaucoup entre les cultu- naient l’Amérique sur des trains res parce que je suis né à Mon- ou des autobus…c’est des gens tréal d’un père américain qui vient que j’ai énormément écoutés, de d’un petit village dans le Texas et qui j’ai énormément appris…et d’une mère française, du Sud de puis la chanson et la littérature la France…mes parents se sont parce que ce qui fait une bonne rencontrés à Paris et ma mère chanson, c’est avant tout le rap- a dit « j’accepte de te suivre en port privilégié entre les textes et Amérique du nord à condition la musique, pas juste de beaux page 39

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reportages textes, il faut qu’ils aient un rap- d’oreille dans le nez pis tou- son que j’avais pas fait depuis 30 port intime avec la musique, que tes les choses qu’il peut y avoir ans, quand moi jme rappelle pas, les 2 se complètent… aujourd’hui…c’est vraiment pas c’est lui qui m’aide. Y a quelque Alors si j’ai appris quelque chose, mon monde…pis ça parlait pas, chose de fun, moi ça me fait plai- c’est vraiment le respect des maî- ça bougeait pas, ça gobait les pa- sir…Des choses comme ce soir, tres, l’humilité et surtout se dire roles…y a quelque chose qui se ça me fait dire à moi-même que que la chose vraiment nouvelle, passe… Où jvais être demain, je peut-être il était pas si fou que ça c’est l’expérience qui est à l’ori- le sais, je vais être chez moi dans Réal Benoît dans le temps ! gine de la chanson, le moment ma cour arrière pis jvais prendre d’inspiration qui fait que même si mon café ben tranquillement. www.realvbenoit.com ça a déjà été dit, c’est toi qui l’as vécu et ta manière de l’exprimer, Qu’est-ce que ce festival a de si elle est sincère, va nécessaire- particulier, vous qui connais- Pat WATSON ment toucher les gens… sez bien la région ? Moi je trouve que c’est fantastique www.thomashellman.com pour la région. Ça fait 2 jours que je passe avec eux autres, jsuis allé à leur campement hier, pas Real V BENOIT parce que j’ai pas de logement, je demeure ici, mais pour voir qu’est-ce qu’ils font les jeunes, pis qu’est-ce qu’ils mangent, pis de quoi ils parlent, pis tout ça… pis je suis allé souper à 2 reprises avec eux autres pis à chaque fois, j’étais reçu à bras ouverts, j’ai pas- (photo Christina Alonso) sé des beaux moments. Je trouve que la musique émergente c’est (coup de cœur général…qui merveilleux. Dans mon temps, on fera l’effort de répondre en n’avait pas ça, des endroits où on français) pouvait faire connaître notre ma- tériel…on dirait aujourd’hui, mais C’est quoi le FME ? ptêt chuis pas correct, chuis pas C’est trop parce que c’est très rare un connaisseur du showbizness, dans un festival que tu as la situa- y a vraiment 2 bandes de mon- tion que tu peux vraiment t’asseoir de…Y a eux autres, la musique avec les autres musiciens. Nous émergente qui sont tous ensem- autres, on reste en campagne à Dans son Abitibi natale, le ble et qui essayent de se faire côté d’un lac, on a de la bouffe, bienheureux retraité des mi- connaître des grandes chaînes on a de la place, c’est tellement nes sort de scène où il a re- qui sont réservées malheureu- beau, c’est comme un rêve, tous trouvé son amour de jeunesse, sement à 4 ou 5 personnes pis les musiciens qui peuvent parler la chanson… (Découvrez son font tout le temps jouer les mê- ensemble, avoir un esprit ensem- parcours insolite dans un pro- mes musiques. Avant quand on ble et rencontrer différents grou- chain numéro) n’aimait pas les chansons à ra- pes. Et aussi je trouve que le… « dio nord, on changeait de station audience ? »…j’ai oublié le nom Eux autres ce soir, ils ont insisté, pis on avait d’autres choses mais en français, excusez-moi… C’est ils ont dit «Réal, on est à Rouyn, maintenant, c’est tout le temps la pas tout le temps qu’on peut avoir on est chez toi, faut que tu vien- même musique, tout le temps les la musique à Rouyn…et quand tu nes nous faire quelque chose» mêmes personnes…Y a complè- viens jouer ici, ses oreilles, c’est pis c’est comme ça qu’on est là… tement 2 gang mais moi jme sens comme s’ils sont soif…et ça fait et pis j’ai eu une réaction… jveux bien avec les jeunes, là…Tantôt, tellement du bien de jouer pour dire y avait des jeunes avec des yen a un qui m’a chanté une chan- des oreilles qui sont soif, tu peux page 40

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reportages vraiment rentrer dedans…ceux des groupes expérimental, et tu pas ?». Je rentre là et il me dit « qui entendent de la musique tou- dis « ah, il essaie de faire quelque tu vas chanter un solo »…mais tes les journées sont « oh ouais, chose » mais la différence avec j’ai jamais chanté de ma vie ! « c’est bon » (un peu blasé) mais le groupe de ce soir, de Marc Ri- Pourquoi tu me dis ça ? C’est fou quand le monde il veut vraiment bot, c’est pas « on va essayer », ! »…lui, c’est mon premier ren- écouter la musique, ça donne la c’est « on est quelque chose, on contré dans la musique et durant chance aux musiciens de don- va toucher quelque chose » mais tout mon voyage en musique, j’ai ner quelque chose de spécial et c’est pas forcé, c’est naturel. J’ai trouvé des personnes comme lui j’ai trouvé ce soir vraiment on a pas de mots pour exprimer ça. et comme ce soir. Les gens qui eu cette chance-là, m’exprimer sont intéressant, c’est jamais vraiment parce que le monde Si la musique est une science qu’ils sont techniquement bons vous laisse et j’ai trouvé ça génial expérimentale, que recherchez- mais quand tu les rencontres, comme place. vous ? ça change quelque chose dans Le groupe de Marc Ribot, c’est à ton ventre, y a toujours un senti- Qu’allez-vous retenir et racon- peu près le 1er que j’ai vu dans ma ment super beau…tu sens que « ter de votre concert ici ? vie qui cherche la même chose wouah, c’est des humains super (rires) Come on ! Je vais dire que je cherche…c’est sûr que je intéressants ». c’était fou, c’était incroyable ! On chante, je fais des mots, c’est dif- a fait beaucoup de festivals en férent, c’est des chansons mais je www.patrickwatson.net Europe cet été et c’est très rare trouve que la recherche qu’ils font en Amérique du nord que tu ren- pour trouver une place où tu t’en www.myspace.com/patrickwat tres dans la place et qu’il y a tout vas quand tu joues la musique… son le kit de besoin, les boissons, la tu sens comme « butterflies in the bouffe et tout ça…normalement stomac » (des papillons dans l’es- Nouvel album «Close to para- ici, si t’es pas un gros groupe, tu tomac)…c’est sûr, il y avait quel- dise» reçois rien ! Quand je suis venu que chose que je comprenais. ici je me suis dit « ah, c’est bon » Quand on rentre sur scène, on parce qu’y a une belle ambiance recherche la même chose…on va et je trouve ce festival-là très spé- changer chaque show parce que cial parce que ça donne un goût à on cherche le risque, l’excitation, faire la musique. la faim d’un peu de folie…et c’est génial de se sentir proche de ce En 1ère partie de Marc Ribot en groupe expérimenté. plus ! C’est drôle, on a joué avec beau- Vous jouez depuis longtemps coup de monde, cette année, aussi ! mais je peux dire facilement c’est J’ai 26 ans. J’ai chanté dans des le meilleur groupe que j’ai vu chorales depuis que j’ai 7 ans et dans ma vie, là…parce que c’est je joue du piano depuis que j’ai 8 un groupe qui attache à quelque ans…toute ma vie, j’ai joué et je chose et ça fait longtemps que connais ce langage. Mais je suis j’étais pas touché comme ça. nul en français…et en anglais ! On l’a vu hier soir à Montréal et ça (rires) a sûrement influencé mon concert Je cherche depuis longtemps de ce soir. Simon, mon guitariste, dans la musique mais c’est sur- avant ce concert, c’était déjà son tout des gens que j’ai trouvés, des musicien préféré et Simon aussi, gens tellement tripants que ça ins- c’est toujours la découverte dans pire pour toute ta vie. Quand j’ai les sons, les bruitages, ça fait commencé la musique, il y avait que quand on est venus ce soir, un vieux monsieur qui me gardait on savait qu’on voulait vraiment et me disait «veux-tu chanter en sortir de la boîte ! Des fois, tu vois chorale ? ». J’ai dit «ok, pourquoi page 41

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d’originalité. Cette année, ça a commencé avant même le gala. L’animatrice qui était prévue a claqué la porte LES OREILLES A L’OUEST en disant que la programma- tion musicale des artistes invités 4ème épisode n’était pas assez grand public. Ou populaire. Il y a de ces rendez-vous qui Et c’est le moment où mes racines sont de bonnes occasions de françaises se sont senties vérita- faire un portrait de l’actualité blement troublées. Ou pas assez musicale, ou de relancer de de droite. Mais oui, mais oui, il y grands débats culturels. Au a une musique de droite et une Québec, le Gala de l’ADISQ est mortelles. Le vote se fait auprès musique de gauche. À droite de un bon prétexte pour dresser des membres de l’ADISQ, sauf l’hémicycle, on retrouve la « pop ce panorama culturel. trois catégories : Chanson popu- » dans le sens le plus conven- laire de l’année, Interprète fémi- tionnel du terme. À gauche, c’est Le Gala de l’ADISQ, c’est l’équi- nine de l’année et Interprète mas- la musique émergente, voire un- valent local des Victoires de la culin de l’année. derground (hooo, attention, c’est musique, un grand rendez-vous Puisque j’ai l’occasion de donner extrême). annuel qui récompense les « mon opinion toute personnelle, la Et cette présentation réductrice meilleurs » artistes de l’année. sélection des chansons est mal- et limitée (mentalement, artisti- Et souvent l’occasion de dé- heureusement désolante. Mais quement et même politiquement) bats enfl ammés sur les cou- bon. Au moins la sélection des joue le rôle de l’arbre qui cache rants musicaux, l’animation, artistes, hommes et femmes, est la forêt. les nominés et les gagnants. un éventail sinon intéressant, en Car faut-il récompenser le suc- tout cas représentatif. Le vote est cès commercial ou la créativité? Commençons par le côté «ar- ouvert en remplissant des cou- Un artiste qui a du succès a-t-il tistique» de la chose … pons dans des quotidiens, sur nécessairement vendu son âme La liste des nominés donne un le site du télédiffuseur du gala et au diable populaire? Ce qui est bon aperçu de l’éventail musical dans les rôtisseries St-Hubert (un émergent est-il nécessairement d’ici. Avec celles et ceux que vous genre d’hippopotamus mais qui intéressant? Le poids de la masse connaissez déjà (Céline Dion, Isa- ne servirait que du poulet). Mi- est-il le seul juge véritable ou la belle Boulay, Simple Plan ou Ro- sère. foule est-elle idiote par essence? bert Charlebois), ceux dont vous Et pourtant, même masqué, le avez peut-être entendu parler … qui est un prétexte au côté Caribou que je suis ne se pronon- (Les Cowboys Fringuants), ceux «tarte-istique» (ou le concept cera pas en justicier de la musi- que je vous ai personnellement de droite et de gauche appli- que. recommandés (Pierre Lapointe, qués à la musique) Car ce n’est pas un cervidé qui Yann Perreau, Ariane Moffatt), de En dehors de la découverte mu- saura mieux que vous ce qui fait nombreux autres et même quel- sicale, le gala de l’ADISQ est frissonner vos orteils. Lisez mes ques uns qui ont plus de succès souvent l’occasion de déchirer sa conseils, mais ne les suivez pas, de votre côté de l’océan (Natasha chemise sur des grands débats. faites-vous votre propre idée et St-Pier ou Corneille). Luc Plamondon s’est distingué laissez la diversité l’emporter! Au total, les nominés sont un il y a quelques années par une joyeux mélange de chanteurs po- sortie mémorable sur les droits Avant de vous envoyer écouter pulaires, de groupes émergeants, d’auteurs. L’année dernière, le le tout, voici mes conseils à ne de vedettes préfabriquées (on a très recommandé par moi-même, pas suivre sur les nominés de notre propre Star Académie – Pierre Lapointe a profi té du prix cette année. avec ie à la fi n en bon français, qu’on lui remettait pour secouer Les vainqueurs seront connus enfi n … « bon » c’est un bien les radios commerciales qui ne le dimanche 30 octobre. grand mot;-), et de légendes im- font pas preuve d’assez d’origi- On s’en reparle! page 42

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J’adore, je veux qu’ils gagnent •Dan Bigras – pour moi c’est un Ce que j’ai entendu jusque là me dans n’importe quelle catégo- incontournable, mais je com- laisse froide. rie : prends qu’il ne fasse pas l’unani- •Jean Leloup - depuis il a changé mité. Personnellement, je le pré- Beurk, quoiqu’on essaie de m’en de nom pour Jean Leclerc et il fère en solo piano. Je commence dire, c’est non, non et non! Syl- est nominé avec un autre groupe, à pleurer au milieu de la première vain Cossette, Mario Pelchat, mais c’est pas grave, il refusera chanson et je m’arrête deux heu- Marie-Chantal Toupin, Corneille, tous les prix qu’il mérite plus que res après la fin du show. Même si, Gage, Natasha St-Pier - Bon, tous les autres objectivement, il est inégal. Mais c’est tout à fait subjectif, et même •Ariane Moffatt – je vous en ai il n’y a aucune objectivité. certainement méchant de dire ça. déjà parlé, même si j’aime moins •Thomas Hellman – j’ai une amie Mais que ce soit le sirop, les tex- son deuxième album et que ses qui ADORE son album que je tes insipides ou autre chose d’im- textes mériteraient de se bonifier, commence tout juste à apprivoi- palpable, et quelques soient les elle irradie de talent ser … je suis impatiente de le dé- qualités humaines dont sont ils •Chloé Sainte-Marie – une que je couvrir sur scène (voir reportage et elles certainement bourré(e)s, vous présenterai peut-être bien- FME Québec) non seulement je ne suis pas tôt, un chemin artistique à décou- •Mes Aïeux – le néo-trad dans capable mais en plus je ne com- vrir avec curiosité toute sa splendeur, ça se prend prends pas. Faites vous votre •Marie-Jo Thério – vous la con- avec du violon, à boire et un plan- propre opinion. naissez certainement, de la folie, cher de danse, ou juste avec bon- une voix singulière et des frissons ne humeur Ah, il y a aussi : Céline Dion, Isa- sur l’échine •Robert Charlebois – connu, re- belle Boulay, France D’Amour et •Pierre Lapointe – au cas où vous connu et à redécouvrir (même si Simple Plan me liriez pour la première fois, personnellement il me tombe un c’est LA découverte québécoise peu sur les nerfs, mais chut, je à faire ne me sens pas la légitimité pour Le carnet web du •Yann Perreau – n’importe où, critiquer une légende qui tient la CARIBOU MASQUE n’importe quand, pourvu que scène depuis avant ma naissan- ce) vous aimiez autant les vibrations Gardons le thème jusqu’au que les chansons •DobaCaracol – je ne suis pas fan, mais les amateurs de reggae bout : À découvrir ou de dub vont adorer autant sur le meilleur truc pour vous •Les Trois Accords – du pur délire, disque que sur scène. autres, dans les vieux pays, leurs textes ne veulent pas dire le site de l’ADISQ permet grand-chose, la musique est cor- Il faudrait que je me penche sur de retrouver toutes les no- recte, mais la magie prend dans leur cas pour mes prochaines minations et d’écouter en un univers absurde et la bonne chroniques : Marc Dupré, Kaïn, ligne les artistes / chansons humeur submerge tout Aut’Chose, Rick Hughes, Les / albums qui sont en nomi- •Les Cowboys Fringants – du bon Porn Flakes, Andrée Watters, nation. gros rock de fête avec un fond de Martin Deschamps, Karkwa, Ma- lajube, Manu Militari, Anik Jean, revendications, beaucoup aiment, Visitez le moi pas trop Champion et ses G-Strings, Mar- •Mara Tremblay – on adore sa jo. voix, ou on la déteste, pour choisir http://www.adisq.com/doc/ votre camp, il faut vous risquer Bof, c’est qui ça : Annie Blan- gala-2006/index.html •Marc Déry – Sur scène comme chard, Annie Villeneuve, Dany sur disque, il dégage quelque Bédar, Stéphanie Lapointe, Ma- et ouvrez grand les chose de sympathique et d’inté- rie-Élaine Thibert - il y a dans oreilles… ressant. À apprivoiser. le lot au moins 3 échappés de pour le meilleur ou pour le •Dumas – Lui, j’adore son uni- la Star Académie locale. C’est pire. vers, mais je suis curieuse de voir mesquin, mais je ne m’y intéres- la suite. serai qu’après quelques albums. page 43

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radios et médias

lis et Futuna, en passant par Nou- On retrouve exactement l’intimi- méa, Mexico et Vancouver, entre té particulière des émissions de la nuit, l’aube, ou la sieste, on est nuit, entre amis, comme chez soi, quelques uns à partager ce mo- quand tout le monde ou presque SOUS LES ETOILES ment privilégié… Sous les étoi- est endormi, sauf le chat qui est les, ou sous le soleil pour d’autres dans son quart d’heure d’exubé- Il est bientôt 20 h à Montréal, et latitudes, le cabaret musical de rance effrénée. Les invités ne sont notre agent local « Le caribou Serge Levaillant reçoit du lundi là que pour vous, et lorsque les masqué » a mitonné une fricas- au jeudi à minuit et 63 minutes applaudissements du public, 3 ou sée de carcajou, au sirop d’éra- heure de Paris et de St Paul des 4 personnes, saluent la première ble et au blé d’Inde ; la famille va Landes. chanson « J’aime bien c’que vous s’installer pour le prime time de Ce 11 Octobre, nous attendons faîtes », on se sent tout-à-fait in- l’émission de Serge Levaillant « Lara Guirao et Karpatt, l’une fait tégré dans ce cabaret de nuit, les Sous les étoiles… ». sa première radio nationale pour clients de passage sont partis, A New Orleans, dans une maison la sortie de son premier album, restent quelques privilégiés qui se encore marquée par les ravages Fred, Hervé, Gaétan, les Karpatt sont attardés volontairement pour de l’ouragan, Peter Baroux se viennent en habitués. accueillir avec Serge Levaillant, cale sur la fréquence de France Les balances commencent vers des artistes à découvrir. Premier Inter, comme Brian Thompson à 23h45, car ici on chante en direct disque première radio pour Lara Boston, et Marianna Yupanqui à réel ; petit studio intime qui doit Guirao dans son aventure chan- Buenos Aires. accueillir deux vraies contrebas- son. Dans le deuxième numéro Il est 5 heures, Moscou s’éveille, ses, 3 guitares, un banjo, un uku- de LDDLO, elle avait confi é ses Vladimir Sardouski s’approche du lélé, mais pas de piano à queue. envies d’élargir son champ d’ar- samovar pour le premier thé de la Lara Guirao révise les deux chan- tiste vers la scène chanson. Les journée. Tandis qu’à Tokyo, il est 9 sons prévues, avec Jack Ada et rencontres, les envies, les doutes, heures, Mitsuko Kucheida prend François Fuchs, les musiciens les angoisses d’aller vers un che- son petit déjeuner en famille et en avec qui elle fait une tournée, min nouveau, alors que sa car- paix, en écoutant Serge Levaillant puis Karpatt prend son tour, c’est rière-théâtre-cinéma-télé marche annoncer ses invités, Lara Guirao bouclé vers minuit 30, on fait sa- bien. Il y a pas mal de comédiens et Karpatt. lon dans le couloir, présentations, qui sont tentés par la chanson ; A San Francisco, il est 17 heu- échanges, tiens cette marque de le comédien est le prolongement res, Martine Forrester et Juanita cordes est remarquable suggère des phantasmes du réalisateur, il Salvador à Valparaiso, préparent le guitariste Ada au banjoîste Fred est l’objet de toutes les attentions, le goûter des enfants, à Tahiti, … On échange aussi des infos de toutes les intentions, c’est l’in- Maerva et Joséfa Lavillié s’affai- sur les salles de concert, moment térêt du métier : entrer dans des rent au repas de midi, sous le so- paisible dans une maison de ra- personnages parfois aux antipo- leil exactement… dio presque déserte, écrin de si- des de ce qu’on est. Ainsi, Lara A Naples, au sortir d’une soirée lence, puis, à minuit 58, arrivée Guirao a interprété avec succès de jazz ; Enrico Crolla arrive pile du maître de cérémonie, et 5 mi- le rôle d’une jeune prostituée toxi- à l’heure du générique. Et Stan nutes après, ça commence. comane, alors qu’elle a un mode Severino fait l’acrobate sur un de vie bio garanti sans OGM, nuage gipsy en swing 9 ème di- ni substances chimico-euphori- minué. ques. Du côté d’Adélaïde, sur le coup Le comédien qui passe à la chan- de 10 heures, Jack Moiustaking son change de statut, d’objet sou- tartine un muffi n de confi ture de mis aux désirs des réalisateurs, cactus en surveillant ses kangou- aux contraintes du scénario, il rous… et l’émission commence, devient seul maître en scène et entretien avec Lara Guirao, « dans sa démarche, Lara Guirao J’aime bien c’que vous faîtes » va jusqu’au bout, elle écrit ses chante-t-elle, nous aussi. chansons, d’abord interprétées Je sais que de Chicoutimi à Wal- en after théâtre, pour les copains, page 44

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radios et médias ensuite, les choses s’enchaînent, A Cheyenne, Wyoming, il est à dit mon cher petit Robert ainsi rencontre d’un musicien, qui en peu près 5 heures, et Cheval que mon vénéré Larousse, est parle à un autre musicien, la ma- Dansant regarde les étoiles qui censé répéter texto ce qu’il a en- quette prend forme, elle circule, s’éteignent…provisoirement. Les tendu. Mais il semble que la règle et les affi nités se confi rment, brumes de l’aube tamisent le so- est maintenant de raconter selon Marc Perrone, Patrick Sigwalt, Art leil qui apparaît pour un nouveau son propre angle de révision, il Mengo dont elle fait les premières matin que saluent les oiseaux. ne faudrait pas confondre soup- parties, et un producteur, Olivier L’homme est l’ombre d’un rêve et çonner et sonner la soupe, ce Pedretti du Label MVS qui est in- chacun est l’ombre de tous, disait que d’aucuns font allègrement téressé. Tashunka Witko, Cheval Dansant, au détriment de la simple hon- La maquette, très aboutie, réali- celui qui voit à travers les choses. nêteté fondamentale. Cela dit, je sée il y a un an a été enregistrée Après une nuit sous les étoiles, soupçonne fort celui qui a rap- telle quelle, pas de remixage, on voit le monde avec plus d’in- porté le propos de ne pas avoir pas d’arrangements qui font sou- dulgence. Malgré tout. vu l’émission mais d’avoir relayé vent d’une œuvre personnelle, un C’est un bon jour pour chanter. ce qu’on lui a dit, et c’est le plus produit formaté et aseptisé. souvent ainsi qu’il faut compren- Merci à MVS d’avoir gardé Norbert Gabriel dre «écho» on raconte ce qu’on l’authenticité, et merci à ces « nous a répété, et de confi dence petits » labels indépendants qui en déviance, la contre-vérité de- respectent les artistes. vient l’écho. Pas d’artifi ce, pas de fanfreluches Il n’y a pas que des raisons de superfl ues, c’est ce qu’on décou- gronchonner avec la télé, pour vre au cours de cette heure. RADIO TELE MEDIA ceux qui ont la TNT, Direct 8 pro- Serge Levaillant guide l’entretien pose parfois de bons moments avec souplesse, il y a ce charme Echo-et ko-ko-ko-ko : voilà bien musicaux, ainsi l’émission Mel- particulier des heures de la nuit le genre de chose qui m’énerve ting Pop qui recevait Vincent De- qui installent une relation intime pour la journée au moins : un écho lerm et Seb Martel, c’est une ver- avec les auditeurs, et il faut le ta- qui déforme ou ampute, mais que sion télé de « Sous les étoiles » et lent de celui qui écoute vraiment je vous narre par le menu. Hier, c’est plutôt bien, des artistes qui les réponses de ses invités pour 17 Octobre, je jette un œil sur la chantent en direct devant un pu- que le charme opère. télé, l’émission de Ruquier qui blic de 2/3 personnes, c’est très Levaillant sait créer ce climat, accueille Marc-Edouard Nabe, sympa, et ce rendez-vous était avec tact, pas de cirage de pom- un écrivain contesté, mais qui a particulièrement réussi. Grâce à pes, un dialogue riche, vivant, et néanmoins écrit de jolies choses une animatrice Caroline Halazy des invités qui sont heureux de sur Django. Gérard Miller a pré- qui n’en fait pas des tonnes et sert ce moment. paré quelques missiles. Après un bien ses invités qui avaient l’air Si des obligations matutinales bref préambule évoquant l’avocat très content de leur soirée, nous n’imposaient de se séparer, on Vergès « le salaud lumineux » il aussi. C’est le lundi à 22h30. « aurait bien continué à discuter sur lit quelques lignes d’un bouquin Melting Pop » le trottoir, à 2 heures, vers la Mai- de Marc-Ed Nabe récemment son de la Radio, les bistrots ont réédité. On est dans le genre cé- Presse chanson baissé le rideau depuis minuit. linien le plus détestable, et je suis Ça laisse le temps de rentrer pour modéré. Marc-Ed Nabe se lève et La presse, en général, traverse 3 heures, et se mettre à l’écoute s’en va. Bon. Ce matin, 18 Oct, une mauvaise passe. En sortira- de l’heure consacrée à Barbara dans l’émission médias de France t-elle, et dans quel état ? Hendricks, ou Jean-Michel Ri- Inter, un éditeur déplore qu’on ait Quelques quotidiens comme Li- bes… traité de salaud un écrivain. C’est bération et l’Humanité sont dans un peu court, bonhomme, l’écri- une phase critique, voire très Après ça, il est temps de som- vain n’est pas parti quand on l’a critique. La presse chanson, ce meiller quelques heures si on traité de salaud, même lumineux, n’est pas mieux. Chanson-Mag veut être fringant pour la revue de mais quand on l’a mis devant sa qui avait donné quelques numé- presse de 8h30. propre (hum) prose. Un écho me ros de belle tenue a disparu des page 45

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radios et médias kiosques après 6 mois. Fran- aller un peu plus loin dans la ré- Pour soutenir LDDLO, il suffit de coFans qui a tenu deux ans en flexion. le faire passer aux copains… mensuel s’est restructuré en bi- Allez, soutenez et circulez, y a mestriel. Ces deux revues à do- Les quasi quinqua qui avaient 20 rien à boire ? minante chanson francophone ans en 1982 se souviennent des Alors chantez ! n’ont pas trouvé un public assez radios libres qui se sont très vite nombreux pour continuer dans ralliées à des réseaux commer- Norbert Gabriel des conditions viables. ciaux formatés aux standards les Pourtant la chanson s’est refait plus conformes aux produits de Bientôt, des infos au sujet du ma- une santé, surtout en scène, et la grande diffusion anglo-saxons, gazine « Sur la même longueur presse people dérivée des Nou- avec l’idéologie Mac Coca com- d’ondes » velleStarac produit une avalanche me évangile. Et Endemol comme de sous-Gala Hola, lointains ava- directeur de conscience politique- tars de Salut les copains, Podium, ment asservie aux principes du Mlle Age Tendre et autres papo- libéralisme. Résultat: des radios tins teen-agers. En ce temps-là, aux play-list gérées par ordina- à la une, c’était Johnny, Sylvie, teur et dupliquant les recettes qui Cloclo, Sheila. Aujourd’hui, ce ont marché. Niveau zéro de la sont le plus souvent les sorties création. de Mlle Paris Hilton dont le seul talent est de ne pas porter de cu- Si vous avez par chez vous, dans lotte, photos à l’appui. Accessoi- les départements, ou les belles rement, si j’ose dire, elle a hérité provinces, des radios vraiment li- de quelques millions ou milliards bres, et si vous les écoutez, vous de dollars…C’est là sa gloire, sa seriez bien aimables de nous en renommée et c’est tout. faire part, mais il semble que l’es- Ça pose quand même quelques pèce soit en voie de disparition, questions fondamentales. ou alors, encore pire, personne Remplacer les quotidiens par des ne lit ce que je raconte. www.longueurdondes.com publications gratuites aux infos sommaires, voire simplistes n’est En revanche, malgré tous les re- pas rassurant pour la qualité de frains sur l’inculture qui prolifère, l’information. Et multiplier les la médiocrité revendiquée de publications spécialisées dans quelques turlupins du PAF, l’édi- l’anodin, le potin insignifiant et tion se porte plutôt bien. (voir ru- l’image du néant à paillettes n’est brique « la porte ouverte » ? pas très valorisant pour le monde FrancoFans est reparti sur de en général et du showbiz en par- nouvelles bases, bimestriel, pa- ticulier. gination accrue, et une forme Il faut choisir son camp, les jour- associative qui réunit tous les naux gratuits, la musique gratui- gens concernés, chroniqueurs, te, c’est la même dérive, le jour artistes, lecteurs, tout le monde où le camembert sera donné gra- est une sorte d’actionnaire. Ne www.francofans.fr cieusement avec la baguette de me demandez pas plus de dé- pain, le bifteck et la danette au tails, mais allez aux nouvelles, chocolat, je veux bien qu’on me pour 4,80 Euros vous avez une www.direct8.fr/emissions/ donne une chanson gratuitement. revue de 80 pages de belle te- melting_pop Mais la résistance aux grands nue qui mérite un soutien. Bizar- systèmes industriels ne peut se rerie des évolutions du langage, concevoir sur le principe « tombé aujourd’hui le fait d’acheter une du camion », version actuelle de revue, un journal, est un acte de la récupération individuelle, il faut soutien et presque militant… page 46

l’air du temps

che de plaisir ? Ce qui poussait Orson Welles à fi lmer, était-ce le désir de faire plaisir ? Non, la culture peut donner du plaisir, mais elle ne doit pas s’y réduire. LA CULTURE Baiser donne du plaisir mais cela peut être aus- DU PLAISIR si un moyen de faire l’amour (nuance), et même de faire des enfants, ce qui, en soit, reste quel- C’est actuellement le libellé que chose d’incroyable (mais si, mais si). Aller, d’une publicité pour les magasins je continue avec mon parallèle limite : le plaisir Virgin. De grandes affi ches avec une fi lle est à la culture ce que le cul est à l’amour. toute nue dessus. Wouah ! C’est terrible, ça. C’est d’autant plus pertinent qu’il y a une fi lle à poil sur l’affi che de Cela fait déjà un certain temps que la culture est devenue la pub et que son cul est à la même hauteur que une marchandise, je ne suis pas naïf. Cela fait déjà un le « cul » de culture ! Aller, je le répète tellement certain temps que l’on cultive et que l’on vend les livres et je suis content de moi : le plaisir est à la culture les Cds comme des petits pois (en boîte), mais ça n’est ce que le cul est à l’amour. pas une raison pour ne plus s’en indigner. Bon, j’arrête mes délires. Depuis toujours, la lecture, l’écoute de musique ou la vi- Mais j’affi rme haut et fort que la culture doit avoir sion d’un fi lm peuvent être une source de plaisir et, per- du sens. Elle doit nous faire réagir, nous inter- sonnellement, puisque je suis un acteur de la culture (« peller, nous étonner, sinon elle n’est que plaisir ouille »), j’aime à donner du plaisir aux gens (ah) ! et consommation. Ce qui est bien l’objectif de Mais de plus en plus, la culture se réduit au plaisir et le l’industrie des loisirs : nous faire consommer. danger vient de là. Nous sommes dans l’ère de l’industrie Bien sûr, quand ils réclament la baisse de la des loisirs, et dans cette ère, le rôle de l’ «artiste» est TVA sur les Cds (qui serait une bonne chose de plus en plus de distraire, de faire passer un moment pour les labels qui font autre chose que de la agréable et de moins en moins de faire réfl échir, de sur- soupe), les mêmes lèvent bien haut l’étendard prendre ou d’étonner. de la culture au sens noble du terme. Mais c’est Van Gogh peignait-il pour le plaisir ? Quand on écoute bien le seul moment. Thélonious Monk, est-ce uniquement dans une recher- Ignatus les doigts de la main la rédaction

Si vous souhaitez nous contacter Rédactrice en chèvre ou envoyer des articles pour les numéros à venir : Valérie Bour [email protected] Webdoigt/webcam Didier Boyaud Graphiste Sophie Tournel

Rédacteurs Caroline Besse - Valérie Bour - Didier Boyaud Norbert Gabriel - Séverine Gendreau - Mélanie

Plumail - Eric Mie - Elsa Linux - Fred Pallem Mademoiselle Arthur - Catherine Pinto - Myriam Tchanilé - le Caribou Masqué Rendez-vous au prochain numéro début Décembre «Faites passer, si vous brisez la chaîne Rédacteurs exceptionnels il ne vous arrivera rien... Jean-Claude Barens - MIG - Jean-Luc Fonck (Sttellla) et ce serait bien dommage» Benoît Morel - Christina Alonso - Ignatus www.ledoigtdansloeil.com