Habitat Et Vie Paysanne En Quercy
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@ Éditions Garnier Frères, 1979 @ L'HYDRE Éditions, 2012 Route du Mont Saint-Cyr 46000 CAHORS ISBN : 978.2.913703.98.8 Habitat et vie paysanne en Quercy Nous remercions le Service Patrimoine du Conseil général ainsi que les Archives départementales du Lot pour l'aide apportée dans la recherche iconographique. À Jean LAFFARGUE, vigneron à ANGLARS-JUILLAC, et à sa longue lignée quercynoise. HABITAT ET VIE PAYSANNE EN QUERCY Par Alfred CAYLA en collaboration avec Bernard CAYLA Architecte D.PL.G. Cet ouvrage a été publié avec le soutien du Conseil général du Lot et du Conseil régional Midi-Pyrénées L'HYDRE 1 -Dans la diversité des reliefs créés par l'érosion, l'habitat fait un Choix. Le hameau de Ganil, à St-Cirq-Lapopie (canton de St-Géry) s'est implanté dans la plaine alluviale du Lot. La rive gauche, aux falaises abruptes, ne possède qu'une rare végétation d'épineux (1950). Il nous a paru nécessaire de rééditer en totalité, textes et illustrations, l'ouvrage depuis longtemps introuvable d'Alfred CAYLA. Il fut un des premiers, dès 1946*, à attirer l'attention sur l'étude de la vie campagnarde et les beautés qui s'en dégagent. Les résul- tats de quarante années de recherches, de réflexions et de photographies nous décrivent les traditions et les constructions si variées, encore visibles au XXIe siècle. Il nous montre com- ment le monde rural a su s'adapter à l'environnement. Nous devons penser à vivre dans ce cadre admirable en le respectant malgré la modernité qui nous pousse pour offrir à nos enfants des souvenirs du passé qui nous a fait et laissons-leur un environnement où l'homme a toute sa place. Le Docteur Alfred CAYLA est né à Neuilly-sur-Seine où son père exerçait depuis 1875. Dès sa plus tendre enfance il a parcouru le Quercy avec ce père veuf qui l'emmenait à cha- que vacance vers son pays natal. Puis avec son épouse il partagea la maison familiale de la vallée du Lot. Il fut un des premiers à attirer l'attention sur la beauté et les caractères particuliers de l'architecture de nos campagnes. Cofondateurs de l'association des Maisons paysannes de France, il en fut le Président de 1965 à 1971. Cette association sera reconnue d'utilité publique en 1985. * L'habitation rurale du Quercy et de ses alentours, Coueslant, 1946. PRÉFACE Selon l'expression de Pierre Grimai, dans un volume Cela entraîne un mouvement inverse. Les citadins de récent, le Quercy est une terre où la confrontation du passé souche ancienne ou d'immigration récente s'aperçoivent que et du présent se révèle fructueuse. On y sent la continuité de la vie concentrationnaire des villes, dans une circulation la vie, malgré la mécanique générale des travaux de la terre, motorisée de plus en plus dense, est mangeuse de notre des transports et même de la vie domestique. On y voit sur- temps et de notre pensée, veulent s'assurer le bienfait du gir des vestiges de très anciennes traditions, dans les façons calme restant à la campagne, pour les temps de repos ou de de penser, de s'exprimer dans un occitan commun à toute la retraite. Ceux qui en ont obtenu les moyens vont ainsi se France méridionale, mais avec des nuances particulières ; de créer une seconde demeure, en trouvant une maison pay- préparer sa nourriture, avec les mêmes aliments qu'ailleurs, sanne abandonnée ou cédée. Ils vont la restaurer de son de construire des maisons différentes de celles de régions vieillissement normal et l'aménager à leurs besoins actuels. voisines. Il y a là des différenciations dépassant largement les Sans le chercher ils banalisent d'ordinaire une architecture étroits besoins naturels. adaptée à la vie des terriens qui, en créant les terroirs de cul- Cela constitue une civilisation paysanne, née de la terre, ture, ont réalisé les paysages que nous apprécions. au contact de laquelle les hommes se sont formés. Cette analyse objective d'une campagne sans paysans, Civilisation relativement homogène, dans la variété des ter- n'est que le résultat de l'évolution spontanée de notre roirs de culture créés et humanisés par la succession des société, sans que nous en prenions conscience. Nous dilapi- générations. Nous l'évoquerons, avant tout dans l'architec- dons non seulement nos biens actuels, mais les biens futurs ture spontanée, indigène disent les publications anglaises, des générations qui nous suivent ; ceux qui représentent la « vernaculaire » d'après le mot latin. qualité de la vie. Mais on ne peut fermer les yeux aux transformations de Restaurer une maison suppose de bien connaître sa la vie. De toute antiquité, les campagnes ont fourni aux villes conception en rapport avec les productions et le genre de vie une grande part de leur population. Dans une démographie de ceux qui l'ont habité ; mais aussi de réaliser une construc- ascendante, elles n'envoyaient que ceux pour lesquels elles tion où l'on utilise les matériaux courants et leurs techniques n'avaient pas de travail. Y émigraient aussi ceux qui souhai- d'emploi, sans y ajouter des décorations, mêmes prétendues taient ce qu'on nomme une ascension sociale, que la ville rurales, pour attirer le regard. pouvait leur permettre. Si l'on est amené à construire une habitation nouvelle, Or, nous assistons depuis plusieurs décennies, par une on ne pourra profiter de la campagne qu'en la laissant telle progression croissante, à une évolution sociale tendant à qu'elle est, sans l'urbaniser par des constructions disparates ; entraîner la désertification des campagnes. la laisser dans sa simplicité souveraine, sans en faire un de ces Depuis le milieu du XIX" siècle, date de l'apparition des sites de villégiature, par lesquels on a gâché tant de nos côtes chemins de fer, les conquêtes scientifiques en accélération et de nos sites réputés. constante, ont fait naître et s'étendre une industrie qui ne Au-delà de ce point de vue esthétique, il y a la connais- peut vivre que par l'apport de main-d'œuvre qu'elle attire, et sance de la vie du pays. Les historiens actuels se rendent par un système commercial assurant la vente de tout ce compte que leurs études ne doivent pas ne considérer que qu'elle produit en abondance : en un mot, une consommation, l'histoire politique des règnes, des conquêtes ou des défaites, sans période de repos qui compromettrait tout le système. Ce des révoltes ou des révolutions politiques ou religieuses ; ni ne sont plus quelques individus, venant de la campagne vivi- même dans les lettres, les arts ou les sciences. Cette connais- fier les villes, c'est presque la majorité des terriens, attiré par sance est dans la vie quotidienne de cette société terrienne, la facilité de vie apparente de ces villes que touche cette créatrice des terroirs culturaux, des paysages qu'ils ont mutation. Ils abandonnent leurs terres productrices et leurs humanisés. Les citadins peuvent l'y chercher, sans provoquer habitations pour devenir citadins, travailler à une création de de destructions sociales, d'une civilisation traditionnelle plus produits dont il faut obtenir la consommation. créatrice que consommatrice. 2 - Page précédente. Le moulin Darnis, dans la vallée de la Masse, à naturelles de cette architecture fonctionnelle, des volumes ou de Cazals (1949). L'intégration au paysage découle-t-elle des qualités leur sensibilité à la lumière ambiante ? 3 -La Combe de Filhol (canton de Puy-L'Evêque). Parmi les principes élémentaires d'implantation de l'habitat rural, la recherche de la pro- tection apportée par le relief, situation idéale lorsqu'elle coïncide avec le choix d'un sol fertile (1959). SITUATION Carte administrative du Quercy. Le Quercy est un petit pays de l'ancien régime, dépendant du Tarn-et-Garonne, pris en 1808, lorsque, voulant donner à l'époque de la vaste Guyenne. L'Assemblée constituante, dès une préfecture à Montauban, on a détaché onze cantons au 1790, a fait de ses limites celles du département du Lot. Il faut Lot, ancien Quercy, pour former ce département. Nous en y ajouter quelques communes voisines, mais surtout, le nord étudierons l'architecture. L'ensemble était donc voisin à l'est du Rouergue et de et granitiques, imperméables, où l'eau circule en surface. On y l'Auvergne cantalienne ; au nord du Bas Limousin corrézien ; trouve le point culminant du pays, à Labastide-du-Haut-Mont, à l'ouest du Périgord (Dordogne) et de l'Agenais (Lot-et- à 778 mètres d'altitude. Région assez rude, on lui donne les Garonne) ; au midi, des plaines garonnaises du Toulousain. noms de Châtaigneraie ou de Ségala, rappelant les seules Le nom de Quercy n'est que l'évolution linguistique du productions végétales que put donner ce sol avant que n'in- nom de « Cadurques », par lequel, au temps de César qui tervienne la pratique du chaulage, dans la première moitié du l'employait, on désignait ce peuple, entré en rébellion contre XIXe siècle. Comme dans l'Auvergne voisine, l'élevage y l'envahisseur, en 52 avant notre ère. Il désigne une popula- domine. tion d'une telle particularité que l'Assemblée Nationale Au nord-ouest au contraire, une région sidérolithique, Constituante, en 1790, en a adopté les limites traditionnelles calcaire, assez boisée, confine au « Pays au Bois de Belvès » en pour en faire un département. Elle repoussa son nom tradi- Périgord. Elle porte le nom de Bouriane, le pays des « bories » tionnel pour lui attribuer celui de la rivière qui le traverse c'est-à-dire des fermes dans des clairières. d'est en ouest et formait une voie de communication active. Il faut encore compter une bande de lias argileux, large Géographiquement, il est essentiellement constitué de de 10 km environ, partant du nord près de Cavagnac, vers le causses pierreux et de vallées alternativement larges ou étroi- sud-est près de Livernon et le Lot même.