La Peinture En Brie Au Xviiè Siècle

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La Peinture En Brie Au Xviiè Siècle 1 Juin 1990 Sylvain Kerspern La peinture en Brie au XVIIè siècle thèse de doctorat (« nouveau régime ») Université de Paris-1 – UFR 03 M. Daniel Ternois, directeur Version mise à jour en 1999 pour un projet d’édition 2 Sylvain Kerspern PEINTRES ET MÉCÈNES EN BRIE AU XVIIÈ SIÈCLE AVANT-PROPOS C’est probablement au dix-septième siècle que Paris est devenue la capitale artistique de la France et son actualité devient alors telle que bon nombre de synthèses consacrées à l’art de cette période, en particulier à la peinture, peuvent presque passer sous silence les productions des provinces. De récentes expositions, des ouvrages autour de certains centres ou consacrés à des peintres provinciaux témoignent pourtant de leur vitalité, à Toulouse, en Provence, à Lyon, Dijon, Troyes ou Rouen. Mais en faisant un inventaire exhaustif de ces centres, jusqu’à ceux de moindre importance, on ne citerait sans doute pas de villes briardes ni la région elle-même, coincée entre Paris et la Champagne. Cependant, lors de la préparation de l’exposition qui s’est tenue au palais du Luxembourg à Paris en 1988 et consacrée au patrimoine des églises de Seine-et-Marne (principale héritière de la Brie, à la Révolution), j’ai pu constater combien ce département était riche en peintures de ce siècle. Le domaine profane, mieux connu, ne manquait pas non plus d’intérêt : l’exemple de Vaux promettait de n’être pas un cas isolé. Sans véritable foyer vivant, la Brie au XVIIè siècle n’apparaissait donc pas pour autant comme une région sans peinture, bien au contraire. Il fallait juger de l’importance de la production pour la région et rechercher par quels chemins elle y était arrivée : les pages qui suivent font l’état de la question. Certaines précautions devaient êtres prises : il fallait définir clairement les limites tant chronologiques que géographiques du sujet (ce qui est notamment l’objet de l’introduction). Il s’est aussi agi de bien établir l’historique permettant d’affirmer que telle peinture était bien en Brie alors. Cette recherche était la principale difficulté matérielle de l’étude : la plupart du temps, elle pose problème, et certains cas présentés ici tiennent de l’acrobatie, en particulier pour la production destinée au clergé. Faute de pareille certitude, il a souvent fallu renoncer à évoquer des œuvres intéressantes; mais quelquefois (comme pour de Létin dans la région de Provins), la présomption a paru suffisamment forte. Quoiqu’il en soit, les rares entorses n’ont pas été prises en compte au moment de conclure. Conjointement devait être établie, dans la mesure du possible, l’identité du commanditaire, à l’origine de l’ancienne présence en Brie de l’ouvrage étudié. Cette question rejoint la précédente lorsque cette peinture est précisément documentée par le mécénat, don ou commande, d’un personnage, par exemple. Pour la présente étude, le point est capital en l’absence de véritable foyer artistique. Aussi a-t-il conditionné sa démarche et son plan. Cependant, dans ce qui se trouve être une étude du goût, l’accent a été mis sur le mécénat en n’évoquant qu’à l’occasion la collection, en guise d’éclairage. L’ambiguïté que l’on pouvait redouter est levée la plupart du temps puisque les collectionneurs principaux sont parisiens et amassent leurs pièces majeures dans leurs hôtels de la capitale. On ne peut négliger ici l’artiste, interlocuteur du commanditaire, source pour nous de nouvelles difficultés. L’auteur de tel décor, de tel retable, n’est pas toujours connu et certaines œuvres gardent même farouchement leur anonymat. Après d’autres, il m’a fallu faire ici des propositions les concernant, conscient que certaines (pour Grosbois, par exemple) devaient rester des hypothèses de travail. Si elles sont discutables, elles veulent d’abord s’inscrire dans le cadre de l’analyse approfondie du thème et du style, que l’on voudra bien prendre en compte avant tout. Des problèmes rencontrés, le pire et le plus cruel pour l’historien d’art est de disposer de documents pour lesquels aucune peinture ne peut être mise en regard. Loin d’être rare, il est parfois désolant : on ne sait plus rien d’une galerie entière peinte à Pamphou par Claude Vignon dont ce devait être un précieux témoignage de grand décor, aujourd’hui fort rare. L’action du temps, les changements du goût au moins autant que la rupture révolutionnaire ont fait disparaître bien des ouvrages et altérés à peu près tous les autres. La proximité de Paris intervint ici autant pour faire que pour défaire. À l’inverse, grâce à la bienveillance des services des Archives et du Patrimoine de Seine-et-Marne, une enquête approfondie a pu être menée localement, en particulier à partir des fonds érudits et notariés. Entre autres, il resterait à traiter l’imposante série B et, de façons systématiques, les minutes notariales dont seules les plus attrayantes (à Fontainebleau, Melun ou Meaux) ont été sondées. Les travaux préparatoires à l’exposition de 1988 ont par ailleurs permis de constituer une documentation dont ce travail a profité. 3 L’investissement fut moindre dans les autres fonds départementaux concernés (Aisne, Aube, Essonne, Marne, Val- de-Marne, Yonne et Yvelines), en proportions des possibilités et de l’importance : pour chacun de ces départements, la part briarde est faible, alors qu’elle représente la majeure partie de la Seine-et-Marne. Des découvertes y sont donc possibles, moins sans doute qu’à Paris où l’essentiel des affaires de nombre de mécènes briards se tient et où je n’ai fait, pour l’essentiel, qu’explorer les pistes disponibles, sans plan systématique. Tout au long de cette étude, j’ai bénéficié de précieux concours, certains ponctuels et signalés en leur temps par la suite, d’autres plus soutenus que je voudrais mettre en avant dès maintenant. Ces recherches font suite, en quelque sorte, à l’exposition de 1988 déjà mentionnée, aussi me faut-il marquer ici la dette contractée alors (et qui n’a cessé de s’alourdir ensuite) avec le Service du Patrimoine de Seine-et-Marne, notamment Monique Billat, conservateur des Antiquités et Objets d’Art du département, et surtout Patrick Poupel qui m’a prodigué encouragements et conseils. Le concours des services d’Archives, dirigés par Martine Cornède, fut également capital par les facilités qui me furent accordées dans l’accès aux documents. Des historiens d’art m’ont fait l’amitié d’ouvrir leurs dossiers lorsqu’ils coïncidaient avec mes recherches. J’ai apprécié, en particulier, la disponibilité et les encouragements de Sylvie Béguin, Paola Pacht Bassani, Jean-Claude Boyer, Dominique Brême, Gilles Chomer et Nicolas Sainte-Fare-Garnot. Il est aussi des soutiens moins spécialisés mais aussi importants pour tout accomplissement : que mes proches, famille et amis, trouvent ici l’expression de toute mon affection, et du souvenir de ceux depuis lors disparus. Enfin, mes recherches n’auraient pas pris corps sans l’appui de deux personnes à qui je tiens à exprimer ma profonde reconnaissance. Jacques Thuillier, professeur au Collège de France, aurait pu, jadis, traiter le sujet s’il n’en avait été détourné par les circonstances (que vous pourrez regretter...). De fait, il a contribué de façon primordiale à l’élaboration du sujet et l’a cajolé de mille conseils et encouragements. Daniel Ternois, professeur à l’université de Paris-1, a accepté de diriger des recherches a priori peu attrayantes, sous un jour peu commun, par un élève peu discipliné. Patiente et rigoureuse, sa direction m’a évité maints écueils, et des plus graves. Avec Jean Jacquart, professeur émérite d’histoire à l’université de Paris-1, qui a bien voulu participer au jury de thèse, substance de cette publication, ils ont accueillis avec bienveillance ce qui ne fut rien d’autre qu’un effet de leur confiance. J’espère que cette version révisée ne la trahira pas. Nota : depuis 1990, un certain nombre de documents, de travaux et autres nouveautés sur le sujet ont pu l’éclairer, le compléter voire le modifier, en particulier l’exposition consacrée à Jean Senelle durant l’hiver 1997. Dans ce dernier cas, le chapitre consacré au peintre n’avait plus de raison d’être et a été remplacé par une partie plus directement centrée sur sa place dans la perspective du thème. Pour le reste, il a été choisi d’opérer par repentirs, en évitant les retouches radicales : supprimer les erreurs, sans rien ajouter de neuf que pour complément. L’essentiel, me semble-t-il, ne tient pas en tel ou tel point précis, discuté ou inconnu alors, mais dans le caractère inédit et fécond de l’approche et dans ce qu’il révèle des rapports entretenus par la société française du XVIIè siècle avec la peinture. 4 INTRODUCTION C’est bien souvent une expression intriguée, étonnée voire sceptique qui a accueilli l’énoncé du sujet du présent ouvrage : la peinture en Brie au XVIIè siècle. Cet accueil était essentiellement dû à l’interrogation suscitée par le terme géographique; joint à la démarche adoptée et justifiée dans l’avant-propos, il appelle toute une série de définitions tant géographiques que chronologiques et rend nécessaire la mise en place d’un cadre historique faisant état des données politiques, religieuses, économiques et sociales concernant la Brie à l’époque. D’un point de vue géographique, la Brie se définit assez facilement : elle recouvre les terres entre la Seine et la Marne limitées à l’Est par l’escarpement de l’Île-de-France. “Peu de régions naturelles sont aussi bien délimitées sur la carte de France”, souligne Émile Mireaux dans un excellent ouvrage qui a servi de base pour ces lignes1 .
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