La Policiarisation De L'administration Penitentiaire
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Université de Paris Ouest Nanterre La Défense UFR droit & science politique Master II Droits de l’Homme Année universitaire 2015 / 2016 LA POLICIARISATION DE L’ADMINISTRATION PENITENTIAIRE IDENTIFICATION DU MOUVEMENT AU PRISME DE L’INSTITUTION DES ERIS (EQUIPES RÉGIONALES D’INTERVENTION ET DE SÉCURITÉ) Mémoire préparé sous la direction de M. Serge SLAMA, maitre de conférence en droit public HDR Présenté et soutenu publiquement par M. Matthieu QUINQUIS, pour l’obtention du Master II Droits de l’Homme L’Université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur. REMERCIEMENTS Mes premiers remerciements sont adressés à M. Serge SLAMA pour son travail de direction. La liberté qu’il m’a laissée dans la conduite de mes travaux me permet aujourd’hui de signer un mémoire qui me ressemble. Je souhaite également remercier M. Vincent SIZAIRE et Mme Jacqueline DOMENACH qui, par leurs conseils et leurs regards, ont su m’assurer de la pertinence de ces recherches. Aussi, car ce mémoire ne serait entièrement ce qu’il est sans l’esprit et l’énergie insufflés par l’équipe pédagogique du Master II Droits de l’Homme, j’exprime à chacun.e de ses membres ma plus sincère reconnaissance. Celle-ci vaut aussi pour toutes les personnes qui, au cours de ces recherches, en répondant à mes questions, m’ont permis d’en faire naître de nouvelles. Parce que ces recherches sont aussi une affaire personnelle, mes remerciements s’adressent à ma famille, pour son soutien inaltérable et son intérêt profane, que je sais sincères. J’exprime, à d’autres intimes, ma profonde affection. Je remercie en eux autant les personnes remarquables que les ami.e.s décisifs qu’ils sont pour moi. J’ai, bien sûr, autant de reconnaissantes pensées pour Samuel GAUTHIER, sans qui ma curiosité ne se serait jamais aussi précisément développée, ainsi que pour Delphine BOESEL, Camille ESCUILLÉ et Amélie MORINEAU, pour tout ce qu’elles m’ont apporté au cours de ces instants de liberté joyeusement partagés. Enfin, j’exprime mes plus sérieux sentiments à Mme Claudine LE BRUN qui, il y a quelques années, avec bienveillance et confiance, m’a résolument éveillé. Parmi mes « myriades de secondes », elle incarne « la seule qui met en ébullition » ; l’instinct que j’ai de moi l’a saisie et je sais, à jamais, tout ce que je lui dois. NOTE PRÉLIMINAIRE Le lecteur et la lectrice doivent ici savoir que, si « les temps semblent presque lointains où l’enjeu politique central était d’ouvrir une fenêtre vers ce qui se cachait derrière les hauts murs des prisons »1, si désormais la prison fait effectivement l’objet d’études et d’analyses attentives de la part d’une pluralité d’observateurs, si les cloisons de béton ne servent plus tout à fait de rempart ou d’argument à une inacceptable fatalité carcérale2 – disculpant par là même notre silence et notre ignorance –, l’institution carcérale continue parfois d’opposer son implacable secret. Aussi, il et elle doivent savoir qu’il demeure au cœur même de l’univers pénitentiaire des champs et des objets peu – sinon pas – exploités. Les Equipes Régionales d’Intervention et de Sécurité (ERIS) ont ainsi bénéficié depuis leur création d’un regard et d’un examen relativement fuyants ; peu de choses ont été dites sur le régime juridique de ces équipes. « Il semble exister quelques difficultés spécifiques propres à ce type de recherches. Une première difficulté réside dans une tradition du secret, à laquelle se heurtent d’ailleurs souvent les recherches de sciences administratives, mais qui est ici considérablement aggravée dans la mesure où le secret peut apparaître comme une nécessité fonctionnelle, indispensable pour assurer les missions de police. »3 Cette recherche a débuté avec la ferme intention d’étudier l’encadrement et le contrôle de l’intervention des ERIS dans les établissements pénitentiaires. Néanmoins, compte tenu de leur « sensibilité », l’accès aux textes réglementaires qui y sont consacrés a été fortement dérangé. 1 BÉRARD Jean, « Les prisons valent-elles la peine ? », in BÉRARD Jean, DELARUE Jean-Marie, Prisons, quel avenir, PUF, 2016, pp. 87 à 102 2 GUILBAUD Fabrice, MALOCHET Guillaume, « Prisons : l’équilibre des tensions », in BENGUIGUI Georges (dir.), GUILBAUD Fabrice (dir.), MALOCHET Guillaume (dir.), Prisons sous tension, Champ social, 2011, pp. 7 à 18 3 LOUBET DEL BAYLE Jean-Louis, Police et politique. Une approche sociologique, L'Harmattan, 2006 Pour ne pas céder ce sujet à l’entière confidentialité, cette recherche s’est finalement dirigée vers l’esprit que supportent les ERIS et les trajectoires politiques qu’elles mettent en lumière. * * * Aussi, au début de cette rédaction, je garde ces lignes en mémoire : « La police est une institution qui suscitent des réactions et des jugements contrastés, fortement influencés par des réactions affectives plus ou moins conscientes et par des préjugés idéologiques. De ce fait, il n’est pas facile pour le chercheur d’adopter en ce domaine l’attitude de neutralité qui doit être la sienne, en évitant, comme le recommandait Auguste COMTE, de considérer l’objet de ses recherches comme un objet de critique ou d’admiration. D’autre part, à supposer qu’il parvienne à cette impassibilité, il lui est encore plus difficile de faire admettre et reconnaître cette neutralité qui risque d’être toujours vue avec suspicion au gré des préjugés de chacun. » 4 Puisse cette recherche, consciente de ces risques et attentive à la canalisation de ces travers, trouver ici une lecture diligente et apporter sa part à l’éclairage de ce qui constitue toujours « l’ombre du monde »5. 4 LOUBET DEL BAYLE Jean-Louis, Ibid. 5 FASSIN Didier, L'ombre du monde. Une anthropologie de la condition carcérale, Seuil, 2015, 601 p. TABLES DES ABRÉVIATIONS ACAT : Action Chrétienne pour l’Abolition de la Torture ARPEJ : Autorité de Régulation et de Programmation des Extractions Judiciaires CEDH : Cour Européenne des Droits de l’Homme CESDH : Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme CGCT : Code Général des Collectivités Territoriales CGLPL : Contrôle Général des Lieux de Privation de Liberté CNDS : Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité CSI : Code de la Sécurité Intérieure CPP : Code de Procédure Pénale CPT : Comité européen pour la Prévention de la Torture CRI : Compte-rendu d’incident DDD : Défenseur Des Droits EMS : État-Major de la Sécurité ENAP : Ecole Nationale de l’Administration Pénitentiaire ERIS : Equipes Régionales d’Intervention et de Sécurité FSI : Force(s) de Sécurité Publique GIGN : Groupe d’Intervention de la Gendarmerie Nationale ISP : Inspection des Services Pénitentiaires OIP : Observatoire International des Prisons (Section Française) PREJ : Pôles Régionaux d’Extraction Judiciaire RAID : Recherche Assistance Intervention Dissuasion RPE : Règles Pénitentiaires Européennes SOMMAIRE INTRODUCTION ............................................................................................ 12 TITRE PREMIER - LE MAINTIEN DE L'ORDRE : UNE AMBITION PÉNITENTIAIRE ..... 34 CHAPITRE UN - L'APPREHENSION PENITENTIAIRE DU MAINTIEN DE L'ORDRE .......................................... 36 Section un - L’indétermination juridique de l’ordre en prison .................................................. 36 Section deux - La concentration de l'action pénitentiaire sur le maintien de l’ordre ............... 46 CHAPITRE DEUX - L'AFFIRMATION PENITENTIAIRE DE LA MISSION DE MAINTIEN DE L’ORDRE .................... 60 Section un - L’organisation administrative gouvernée par le maintien de l’ordre ................... 60 Section deux - L’autonomisation de la gestion de l’ordre .......................................................... 74 TITRE DEUXIEME - LES ERIS : UNE INCARNATION DE LA POLICIARISATION .............. 85 CHAPITRE UN - L'ORGANISATION D'UNE RIPOSTE PENITENTIAIRE CONTRE LE DESORDRE CARCERAL ... 87 Section un - La création d'une unité d'élite pénitentiaire .......................................................... 87 Section deux - La pénitentiarisation de la gestion des incidents .............................................. 103 CHAPITRE DEUX - LA LEGERETE DE L’ENCADREMENT DE L’INTERVENTION DES ERIS ................................ 114 Section un - L'indulgent bornage de l'usage legitime de la force ............................................ 114 Section deux - L’impuissance des observations critiques ......................................................... 131 CONCLUSION ............................................................................................... 152 « Au milieu se dressait un dragon qui inspirait une terreur indicible et lançait en arrière des regards brûlants comme le feu. Sa gueule était remplie de dents blanches, cruelles, insaisissables. Sur son front menaçant voltigeait l'odieuse Éris, cette inhumaine déesse qui, excitant le trouble et le carnage, égarait l'esprit des guerriers assez hardis pour attaquer le fils de Jupiter ; leurs âmes descendaient dans la demeure souterraine de Pluton, et sur la terre leurs ossements pourrissaient, dépouillés de leurs chairs et dévorés par le brûlant Sirius. […] La cruelle Parque saisissait tantôt un guerrier vivant, mais qui venait d'être blessé ou un autre qui ne l'était pas encore, tantôt un cadavre qu'elle traînait par les pieds à travers la bataille. Sur ses épaules flottait sa robe souillée de sang humain ; elle roulait des yeux effrayants et poussait des clameurs aiguës. […] Un art merveilleux avait nuancé les corps de ces épouvantables