Duos Piano Et Cordes Saint-Saëns
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Duos pour piano et cordes violoncelle/piano violon/piano Ensemble Le Déluge Laurent Wagschal, piano Pauline Bartissol, violoncelle Pierre Fouchenneret, violon Sébastien Surel, violon Ayako Tanaka, violon Camille Saint-Saëns Duos pour piano et cordes Du plus loin qu’il me souvienne, mon but, mon plus cher espoir, a toujours été d’ajouter une pierre à l’édifi ce de l’art français . Camille Saint-Saëns Jules Grün "Un trio de Saint-Saëns" (Joseph Hollmann au violoncelle ; Saint-Saëns écoute, accoudé au piano) - BnF Ensemble Le Déluge Laurent Wagschal Sans doute la partie la plus méconnue de son œuvre, la musique de En 2021, alors que nous fêtons le centenaire de la mort du compositeur, chambre est pourtant un genre dans lequel Camille Saint-Saëns a il est largement temps de (re)découvrir tout ce répertoire injustement excellé et laissé un catalogue considérable. oublié. C'est pour réaliser le projet complètement inédit à ce jour de jouer et d'enregistrer l'intégralité des œuvres pour cordes et piano On a encore aujourd'hui de lui l'image enracinée d'un compositeur de Saint-Saëns, que j'ai réuni à mes côtés différents chambristes conservateur et très académique. Cela mériterait d'être nuancé, on curieux des répertoires rares. Outre l'ensemble des duos avec violon oublie qu'il a d'abord été un pionnier : alors que l'opéra est un passage et violoncelle que nous sommes heureux de présenter sur ce premier obligé à son époque pour tout musicien voulant se faire un nom, il s'est volume, ont été également composés deux trios, deux quatuors et un en effet intéressé dès son plus jeune âge à la musique de chambre. quintette avec piano. Jusqu'aux ultimes sonates pour instruments à vents et piano de 1921, il va en écrire tout au long de sa longue existence et redonner ses lettres Ainsi s'est constitué en 2019 l'ensemble Le Déluge, dont le nom de noblesse à ce genre alors complètement délaissé en France. a été choisi en référence à l'oratorio homonyme de Saint-Saëns, et notamment en raison du fameux solo de violon apparaissant dans Acteur essentiel du renouveau de l'école française au XIXe siècle, Saint- le prélude, épisode radieux qui dépeint l’âge d’or de l’humanité. Ce Saëns ouvre la voie à toute une génération de musiciens français, en prélude fi gure sur cet enregistrement dans sa version avec piano premier lieu Gabriel Fauré, qui fut son élève et qui va accorder lui aussi réalisée par le compositeur. dans son œuvre une place très importante à la musique de chambre. On retrouve dans ces œuvres toutes les spécifi cités de son écriture Laurent Wagschal : notamment cette quête permanente de perfection de la forme qui a toujours été la sienne, ainsi que la qualité de la ligne mélodique. Saint- Saëns est en effet un mélodiste-né, il est véritablement un esthète qui recherche constamment la pureté et la beauté des lignes. S’il est vrai que l’on ne trouve pas en France, avant 1870 du moins, Au cours du confl it franco-prussien, des musiciens français se des monuments comparables à la musique de chambre de Beethoven, regroupèrent, autour du poète Romain Bussine et de Saint-Saëns lui- de Schubert, Mendelssohn ou Schumann, et plus tard de Brahms, même pour pratiquer une sorte de "Défense et Illustration de la Musique cette époque fut loin d’être inféconde, comme en témoigne l’importante française". Il s’agissait de créer les conditions du développement et de production instrumentale de Saint-Saëns. la diffusion de la musique nationale, et d’opposer enfi n à l’Allemagne une concurrence de valeur. Le patriotisme culturel n’était évidemment Avec la Suite pour violoncelle et piano, op.16 (1862), il tente un pas étranger à cette démarche, jusque dans la devise de la Société panachage entre des styles divers. La forme Suite évoque évidemment Nationale de Musique, Ars Gallica. Le premier concert de la SNM eut le XVIIIe siècle. Le contenu aussi, du moins en partie. Le Prélude se lieu le 17 novembre 1871 à la Salle Pleyel. souvient des Suites de Bach, mais les mouvements suivants tendent davantage vers le style romantique, avec trois pièces de caractère un C’est dans ce cadre que Saint-Saëns fi t exécuter, en mars 1873 sa peu mondaines, brillantes ou sentimentales (Sérénade, Scherzo et Première Sonate pour violoncelle et piano en ut mineur , op.32. On Romance) et un fi nal énergique et sévère – avec l’inévitable fugato, retrouvera dans cette œuvre les qualités coutumières du compositeur garantie de sérieux. Se profi le dès lors cet éclectisme qui caractérisera (clarté de la structure, charme mélodique, variété de ton) mais le si souvent la musique de Saint-Saëns, et que beaucoup lui reprocheront. premier et le dernier mouvements possèdent une force que l’on peut qualifi er de tragique, à laquelle Saint-Saëns ne nous avait guère Tout au long de sa carrière, Saint-Saëns aura composé des pièces brèves, habitués. L’ Andante tranquillo e sostenuto , adapté d’une improvisation d’accès facile, au moins pour l’auditeur, mais jamais complaisantes et pour orgue que Saint-Saëns avait jouée aux obsèques de son ami le d’un style assez varié qui ne doit rien à la sentimentalité de la romance peintre Henri Regnault, tué aux combats de Buzenval, est une merveille vocale de salon. Ces morceaux sont souvent l’heureuse conséquence de rigueur sereine, tendue entre la netteté d’un accompagnement en d’une rencontre avec un instrumentiste, comme le corniste de l’Opéra notes détachées et une émouvante mélodie. Henri Garigue pour la Romance en fa majeur, op.36 (1872) ou, pour la Berceuse pour violon et piano, op.38 (1871), le tout jeune Paul Viardot. Si l’ Allegro appassionato pour violoncelle et piano , op.43 (1875) et la Ces deux morceaux, dont existent aussi des versions avec orchestre, Romance pour violoncelle et piano en ré majeur , op.51 (1877), font ont été respectivement transcrits pour violoncelle et pour violon, des partie de ces pièces brèves de divertissement, virtuoses ou tendres, pratiques courantes à l’époque, destinées à leur assurer une plus large dédiées à un soliste ami, elles n’en sont pas moins d’une écriture diffusion. soignée, et qui dénote une parfaite connaissance technique de l’instrument. A cette époque, le compositeur a confi é au violon un admirable solo Dans son âge mûr, Saint-Saëns n’a pas cessé de composer de avec orchestre dans le prélude de son oratorio Le Déluge (1875). La charmantes pièces brèves comme la Méditation pour violon et piano transcription avec piano qu’il a réalisée met en valeur la qualité de la (1892), transcription de la sixième des très romantiques Bagatelles, ligne mélodique. op.3, composée en 1854, ou le Chant Saphique pour violoncelle et piano, op.91 (1895), dédiée au grand violoncelliste Jules Delsart, On peut donc dire qu’autour de 1880, Saint-Saëns a mis au point une page mélodieuse mais pleine de surprises harmoniques attestant formule défi nitive de composition. Chaque œuvre est à la fois bâtie sur la fascination de l’époque pour la Grèce antique, lieu de la beauté des principes formels et esthétiques classiques tout en comprenant des intemporelle. Et les violoncellistes n’ont jamais boudé leur plaisir à innovations. Pour l’aspect classique, on notera une brillante écriture interpréter Le Cygne, tiré du C arnaval des animaux, un morceau où instrumentale, peut-être un peu extérieure (mais pas toujours, il fait le compositeur s’est montré volontairement et avec un brin d’ironie, sa part à la belle mélodie bien dessinée et lyrique), un équilibre entre presque trop romantique. des tendances que l’on pourrait qualifi er de romantiques (mais d’un romantisme très tempéré et sans excès) et un goût pour des formes Sarabande et Rigaudon, op.93 (1892) est la transcription de deux anciennes. Son exigence première est de composer une forme logique pièces conçues à l’origine pour orchestre à cordes (Sarabande) et équilibrée. Chaque élément de développement dépend étroitement et pour vents, cordes et percussion (Rigaudon), dont l’association de ce qui a déjà été énoncé mais des surprises peuvent apparaître constitue évidemment un nouvel hommage au Grand Siècle classique. dans le parcours pour en pimenter l’intérêt. Ces danses devaient être exécutées au cours d’une représentation du "Malade imaginaire", en complément de la musique originale de La Première Sonate pour violon et piano en ré mineur, op.75 (1885) Marc-Antoine Charpentier. En prenant de l’âge, Saint-Saëns se trouve illustre bien cette pratique. Très virtuose, avec notamment son fi nale en en décalage avec les tendances nouvelles. Avec une énergie non forme de mouvement perpétuel, elle comprend les quatre mouvements exempte de fureur, il défendra ses principes classiques jusqu’à sa mort classiques, répartis en deux grandes sections incluant deux en 1921. Est-ce à dire qu’il n’évoluera pas ? Certes pas. Mais ce sera mouvements enchaînés. Le second thème du premier mouvement dans un sens tout personnel et original. La Deuxième Sonate pour reviendra ultérieurement sous diverses formes, notamment à la fi n, violon et piano en mi bémol majeur, op.102 (1896) est signifi cative de introduisant un principe cyclique. Une lettre de Proust à Jacques de cette évolution. Au contraire de la première, Saint-Saëns renonce ici Lacretelle atteste que cette phrase "charmante mais enfi n médiocre" à toute innovation formelle, hormis un scherzando contrapuntique au lui aurait inspiré la fameuse « petite phrase » de la "Sonate de Vinteuil", milieu de l’Andante, mais aussi à tout l’aspect virtuose, au profi t de symbole de l’amour de Swann et Odette de Crécy, mais il est vrai que lignes épurées.