RECHERCHES MORPHOLOGIQUES SUR L'APPAREIL DIGESTIF (INTESTIN MOYEN) DES GONYLEPTOMORPHI (ARACHNIDA, OPILIONIDA). par DAN DUMITRESCU

Extrait des« Travaux du Muséum d'Histoire Naturelle Grigore Antipa» Vol. XVII 1976 Bucarest ... RECHERCHES MORPHOLOGIQUES SUR L'APPAREIL DIGESTIF (INTESTIN MOYEN) DES GONYLEPTOMORPHI (ARACHNIDA, OPILIONIDA) DA r DUMITRESCU

The author presents a comparative stndy npon the intestinal complex in 19 species of Opilionids belonging to 9 families and 2 snperfamilies (Travunoidea and Conyleptoidea). The intestinal complex in the families Stygnidae, Travnniidae, Paranonychidae, P entany­ chidae and Synthetonychidae is described as first. This complex is able to give sorne indications on the phylctic ro~ition of the fam i ies. The morphology of the intestinal complex of Opilionids oeems lo be a good criterilnm for the classification of these in the 3 sub-order s of the classical system: Cyphoph tha­ lmi, Laniatores and Palpatores.

L'intestin moyen des Gonyleptomorphi a fait l'objet d'étude pour So r c n sr n (1879), Loman (1903), Kastner (1934) ct Du rn i- t rf' sc u (1974). Ainsi, S ore n s e n fait des observations sur l'appareil digestif d'une Pspèec de la famille néotropicale des Gonyleptidae, Paragonyleptes uncinatus (Sorenscn) et mentionne que le complexe intestinal se compose de 4 paires de cœcums. L o rn au étudie C'->mparativement l'intestin moyen chez différ entes (·spèccs placérs dans 3 sou s-ordres : Laniatores, Insidiatores f't Palpatores. Des Laniatores, l'auteur porte ses recherches sur Pachy lus chilensis (Gray ), Tumbesia juliginosa Loman (fam. Gonyleptidae) et Gnomulus sumatranus (fam. Oncopodidae). Chez les Insidiatores, sous-ordre crée par L o rn an t• ,r-Iusivement pour les Opilions de la famille des , l'auteur étudie le complexe intestinal dans des espèces des genres Larifuga Loman, Acumontia Loman ct A daeum Karsch chez lesquelles il constate une faible ramification des cœcums intestinaux. En ce qui con cerne l'importance de l'étude de l'appareil digestif pour la syst ématique des Opilions, L orna n fait la m ention suivante : , Mein Urtheil geht somit dahin, dass zwar d as System der Blindsacke unserer Thierc vergleichcnd anatomisch recht ver­ schieden gestaltet ist , jedoch durchaus keinc Anhaltspunkte für Systematik bictet. N aheverwandte Gattungen derselbcn Familien besitzen grund ver­ schieden Rohrverlauf, weit entfernte Arten sogar aus verschiedenen Unter· ordnungen, sind in dies er Hinsicht ahnlich gebaut" (op. cit., p. 161). K a s t n er (op. cit.) publie une étude comparative de l'intestin moyen ch ez des espèces appartenant à 7 familles dont 4 (Phalangodidae,

Trav. jUus. Rist. N at. << Gr. Antipa ~. Vol. 17, p. 17-30. 18 DAN DUMITRESCU

Cosmetidae, Gonyleptidac et Triaenonychidae) sont placées parmi les Gony· leptomorphi (sensu Si 1 ha v y, 1960); exception faite pour les Triaenony· chidae, l'auteur remarque l'uniformité du complexe intestinal dans ce groupe flcs familles: Dans un travail antérieur (Du mitres cu, 1974) nous avons décrit cc complexe dans la famille des Ercbomastridac.

MATÉRIEL ET MÉTHODE

Pour cette étude nous avons utilisé un matériel d'Opilions appartenant à 9 familles, groupées en deux superfamilles. Superfamille des GONYLEPTOIDEA: Libitioides ornata (Wood, 1868) 1 ~ -U.S.A., Texas, Jim Wells County, Alice; Vonones compressus (Cam­ hridge, 1904) 1 ~ -Mexico, Chichen ltza, Yuc.,; Roquettea singularis Mello­ Leitao, 1d'- Brésil, Est. do Para, Belém) (fam. Cosmetidae); Kimula ( Metakimula) botosaneanui Avram, 1970 1 ~ -Cuba, Cueva del Fustete; Paramitraceras hispidulus Cambridge, 1905 1 ~- British Honduras, N. Bel­ mopan (fam. Phalangodidae); Umtaliella rhodesiensis Lawrence, 1934 1 d'­ Mozambique, Gorongonza Mountain (fam. Assamiidae); Saramaciopsis har· pachyloides H.E.M. Soares, 1972 1 ~ -Brésil, Est. do Para, Belém, subfam. Stygnoleptinae; Metarthrodes speciosus Rœwer, 1913 1 ~ -Brésil Est. de Santa Catarina, Rio das Pedras, subfam. Caelopyginae; Hugoesia lopesi H. E. M. Soares, 1968 1 d'- Brésil, Brasilia, D.F., subfam. Gonyleptinac (fam. Gonyleptidae); Protimesius capito Soares et Soares, 1972 1 d',- Brésil, Est. do Bahia, Municipio Itajiba, Fazenda Pedra Bianca (fam. Stygnidae). Superfamillc des TRAVUNOIDEA: Peltonychia japonica Miyosi, 1957 1 d'- Japon, Mt. Ishizuchi; Speleonychia sengeri Briggs, 1974 1 ~ -U.S.A., Washington, ielsen's Cave, 18 km W Trout Lake, Skamania County (fam. Travuniidae); Synthetonychia sp. 1 d'- Nouvelle-Zélande, Westland, South ls., Mawhcra (fa m. Synthetonychidae); Adaeulum areolatum Pocock, 1903 1 ~' R ep. Sud-Africaine, Port Alfred, East Cape; Larifuga weberi Loman, 1898 1 ~' Rep. Sud-Africaine, Knysa, Cape Province; Sclerobunus nondimor­ phicus Briggs, 1971 1 ~- U.S.A., Washington, Easten Kittitas County; Zuma awta Goodnight et Goodnight, 1942 1 juv. - U.S.A., California, Big Sur, Monterey County, sousfam. Triaenonychinae; Paranonychus brunneus Briggs, 1971 1 ~- U.S.A., Washington, Skamania County, sousfam. Para­ nonychinae (fam. Triaenonychidae); Pentanychus bilobatus Briggs, 1971 1 d' - U.S.A., Lane County (fam. Pentanychidac).

RÉSULTATS

Dans le seul travail concernant le développement embryonnaire ct po.st-embryonnairc chez une espèce des Gonyleptomorphes (M u ii o z - Cu ev as, 1971), on mentionne que la partie dorsale du vitelus se segmente au niveau de ses bords latéraux, procès qui conduit à la délimitation des 3 futurs cœcums intestinaux. APPAHEIL DIGESTIF DES GONYLEPTOMOHPHI (OPILIONJDA) 19

Si l'on tient compte de ces données, on peut considérer que les Opi­ lions placés dans le sous-ordre des Gonyleptomorphi présentent 3 paires de diverticules intestinaux, une située dans le prosoma et deux au niveau de l'opistosoma.

SUPERFAMILLE DES GONYLEPTOIDEA

L'étude du complexe intestinal chez les diverses espèces appartenant aux différentes familles des Gonyleptoidea nous a permis de confirmer les conclusions avancées par K as t ne r (op. cit.) quant à l'uniformité du type d'organisation. Ainsi, chez les espèces des 5 familles étudiées par nous (Cosmetidae, Phalangodidae, Assamiidae, Gonyleptidae et Stygnidae), ce complexe com· prend: un diverticulum primum (DI) simple, sans ramifications, un diverti· culum secundum (DII) qui émet un ramus transversalis et un ramus longi· tudinalis, et enfin, un diverticulum tertium (D III) qui se divise en: ramus medianus, ramus lateralis et ramus exterior. Tous ces cœcums intestinaux sont visibles en examinant la face dor· sale du complexe intestinal. Exception faite pour les rami transversalis et medianus, les coecums apparaissent partiellement en vue ventrale de cc complexe. L'enlèvement du «plancher» de l'intestin moyen et du contenu intestinal permet de mettre en évidence les orifices des diverticules ainsi que le pli délimitant la pars intestinalis anterior de pars intestinalis poste­ rtor. L'aspect Ju complexe intestinal chez les espèces étudiées de la "super· famille des Gonyleptoidea est représenté dans les figures 1-12. Il nous paraît nécessaire d'insister ici seulement sur les caractéristiques rie l'intestin moyen chez Roquettea singularis d' et Hugoesia lopesi r:)'. Chez la première espèce, dans la région postérieure du premier diverticule l'on observe une dilatation qui correspond à une excroissance située au niveau du premier tergitc abdominal. Cette dilatation, dont la partie proximale coïncide avec à la limite entre le prosoma et l'opistosoma, fait défaut chez les ~~ qui ne présentent pas l'excroissance mentionnée ci-haut. Au diver· ticulum secundum, le ramus transversalis est pourvu aussi d'une dilatation qui pénètre dans la seconde excroissance du scutum abdominal, La disposi­ tion caractéristique de ces deux dilatations peut être constatée en examinant le complexe intestinal en vues dorsale et latérale (fig. 3, 4). Une même dilatation, située cette fois-ci au niveau du ramus mcdianus(D III), présente le complexe intestinal de Hugoesia lopesi r:)'. (fig. 11).

SUPERFAMILLE DES TRAVUNOIDEA Famille des TRAVUNIIDAE

Chez Peltonychia japonicn (fi~. 18) et Speleonychia sengeri (fig. 17) l'aspect du complexe inte;;tinal est semblable. 20 DAN DUMITRESCU

La différence consiste dans la forme du D J, rectangulairl' ch e?: la pr<>mière et triangulaire chez la deuxième. Les D II et D III sont pourvus chacun, de deux cœcums : les rami t ransvt"rsalis et longitudinalis et, r espectivement m edia.nus ct lat cra lis.

Famille des SYNTHETONYCHIDAE

Chez Synthetonychia sp. (fig. 19), au niveau du D I sphérique, on n'observe pas l'impression qui indique la limite entre le prosoma et l'opis­ tosoma. Le D II se caractérise par un ramus transversalis développé, ay ant une forme qui rappelle celle d'un rectangle; en revanche, le ramus longi­ tudinalis apparaît à peine ébauché, son extrémité distale se situant au niveau du tiers proximal des coecums du troisième diverticule. Le D III présente 3 rami (medianus, lateralis et ext erior) faiblement contourés, de dimensions réduites ce qui determine qu'une grande région, de la pars intestinalis posterior soit visible en vue dorsale du complexe intestinal.

Famille des TRIAENONYCHIDAE

Les différences constatées quant à l'aspect du complexe intestinal chez les espèces appartenant aux sous-familles des Triaenonychinae d'un côt é, et celles des Triaenonychinae (sensu Br i g g s, 1971) et des Paranonychinae de l'autre côté, nous ont déterminés de présenter séparément l'intestin moyen ch ez ces deux groupes. Chez Adaeulum areolatum et Larifuga weberi (Triaenonychinae) le D 1 ém et 4 cœcums: deux antérieurs (ramus prominens m edialis et ramus pro­ minens lateralis) et deux postérieurs (ramus regrediens medialis et ramus regr ediens lateralis). Le D II est pourvu d'un ramus transversalis, dirigé en direction antéro-latérale et un ramus longitudinalis, masqué dans sa région proximale par le ramus regrediens lateralis du D I. L e D III présente les 3 rami:medianus, lateralis et exterior, du dernier étant visible, en vue dorsale du complexe intestinal, seulement son extrrmité distale. En vu e ventrale, on identifie les cœcums suivants: ramus prominens medialis, ramus regrediens lateralis, les deux tiers distaux du ramus exterior de même que la région distale du ramus lateralis. Chez Sclerobunus nondimorphicus (fig. 14) et Zuma acuta (fig. 15) (Triaenonychinae, sensu Briggs), l'aspect du complexe intestinal est tout à fait différent par rapport à celui des espèces étudiées ci-haut. En ce qui concerne le D I, il faut smi.ligner que chez les deux espèces une ramification de celui-ci apparaît à peine ébauchée. Le D II est pourvu d' un ramus transversalis et d'un ramus longitu­ dinalis, le dernier beaucoup plus développé chez Sclerobunus. 6 7 8

Fig. l - 8 Complexes intestinaux des Gonyleptoidea Fig. 2 et 7, en vue ventrale; fig. 4 en vue latérale; le reste en vue dorsale 1,2 - Libitioides omata; 3,4 - Roquettea singularis c!; 5. - Vonones compressus (Cosmetidae); 6,7 - Umtaliella rhodesiensis (Assammidae); 8. - Kimula (Metakimula) botosaneanui (Phalan- godidae) 12

Fig. 9-12 Complexes intestinaux des Gonyleptoidea (en vue dorsale) 9. - 'S(lramaciopsis harpachyloides; 10. - Metarthrodes speciosus; 11. - Hugaesia lopesi (Gonyleptidae); 12.­ Protimesius capito (Stygnidae). 15

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Fig. 13- 19 Complexes intestinaux des Travu:!oidea (en vue dorsale) I3. - Paranonychus brunneus; 14.-Sclerobunus nondimorphicus ; 15. - Zuma acuta (Paranonychidae); 16. ­ Pentanychus bilobatus (Pentanycbidae) ; i 7. - Sp eleonychia sengeri ; 18.- Peltonychia japonica1) (Travuniidae_)}; 19. - Synthetonychia sp. (Synthetonychidae).

1) D'aprës Suzuki (J, Sei. Hiroshima Univ. Ser. B. Div. 1,26, 1975) cette espèce doit être placée dans le nouveau genre N ippononychus Suzuki (Triaenonychicl.ae)· 24 DAN DUMITRESCU ------

L'existence de deux coecums seulement au niveau du D III (ramus medianus et ramus lateralis) représente la seconde caractéristique fonda­ mentale du complexe intestinal des « Triacnonychidae » nord-américaines. Chez Paranonychus brunneus (fig. ), le D I est simple tandis que D II et D III émettent un ramus transversalis et un ramus longitudinalis ct , respectivement un ramus medianus et un ramus lateralis.

Famille des PENTANYCHIDAE

Chez Pentanychus bilobatus (fig. 16), le D I semble présenter une ramification antérieure. Le D II a un ramus transversalis orienté en direction antéro-latéralc et un ramus longitudinalis dont l'extrémité distale atteint le niveau de la région terminale du complexe intestinal. Le D III sc ramifie en un ramus medianus et un ramus latcralis de dimensions approximativement égales.

DISCUSSIONS

L'examen de l'intestin moyen chez les Cosmetidae ( Libitiola borellii Rœwer) a permis à Kastner (op. cit.) de décrire deux cœcums seule­ ment au niveau du D III. En même temps, l'étude d'un exemplaire imma­ ture appartenant à cette famille a mis en évidence l'existence de 3 coccums au niveau de ce diverticule. Cette différence peut être expliquée par le fait que l'auteur n'a pas observé le ramus exterior chez l'exemplaire adulte. En ce qui concerne la famille des Assamiidae, nos observations sont en accord avec celles de K a s t n e r (op. cit.) mais diffèrent de celles de L orna n (op. cit.) effectuées chez Mermerus beccarii. Bien que l'auteur hollandais ne donne aucune description du complexe intestinal, dans la planche XI (fig. 22-26) il présente quelques schémas d'après des sections pratiquées aux différents niveaux de l'intestin; les figures 24-26 illustrent le trajet des cœcums du troisième diverticule. Le cœcum « 2a » de L o rn a n est en réalité, le ramus exterior de ce diverticule. Les résultats de nos recherches concordent avec les données publiées par K as t n e r, qui a étudié des représentants placés dans les sous-familles des Pachylinae, des Gonyleptinae et des Cranainae. S i:i re n s e n (op. cit.) en étudiant exclusivement la face dorsale du complexe intestinal« in situ» chez Paragony leptes uncinatus, n'a pas observé le ramus exterior, situé en général sous le ramus longitudinalis. En même temps, il faut souligner que la notation des cœcums a été malencontreuse­ ment faite par l'auteur danois («Ill» = ramus lateralis, «IV» = ramus medianus, cœcums d'un seul et même diverticule étant donc considérés comme paires différentes). De cette confusion ressort sa conclusion selon laquelle les Gonyleptiae sont pourvues de 4 paires de diverticules intesti­ naux. L o rn an reconnaît l'existence de 3 paires de diverticules au niveau de l'intestin moyen, mais il mentionne que, malgré leur appartenance à la APPAREIL DIGESTIF DES GONYLEPTOMORPHI (OPILIONIDA) 25

même famille des Gonyleptidae, les deux espèces étudiées par lui ont un complexe intestinal différent. D'après cet auteur, les complexes intestinaux de Phalangium et de Pachylus sont très semblables ( !). Les descriptions faites par L o rn a n sont érronécs, conséquence des observations effectuées «in situ», sans avoir isolé le complexe intestinal du corps de l'. Ainsi, cet auteur n'a pas pu observer le ramus extcrior du troisième diverticule. Il est le lieu de préciser aussi que les 5 ramifica­ tions latérales du ramus exterior n'existent pas, en réalité, chez les Gony­ leptidae. Les quatre dernières représentent, en fait, les empreintes des muscles métamériques dorsa-ventraux de l'opistosoma sur le tissu interstitiel disposé autour de l'intestin, tandis que celle antérieure n'est que la région commune des rami medianus et lateralis («3», selon la notation de Loma n). Les observations effectuées sur le complexe intestinal des Triacnony­ chidae (sensu B ri g g s, op. cit.) nous ont permis de remarquer deux types d'intestin moyen, fondamentalement différents: - chez Tasmanonyx montanus Hickman (D u rn i t re s cu, op. cit.), Adaeulum areolatum et Larifuga weberi nos conclusions sont en accord avec celles de K ii s t n e r concernant les espèces Paranuncia ingens Rœwer et Nuncia aspersa Pocock. En revanche, L orna n affirme que les différences · entre le complexe intestinal des Triaenonychidae et des Gonyleptidae ( Tum­ besia) sont négligeables (? !). Or, nous pensons que la description érronée du complexe intestinal faite par cet auteur pour les Triaenonychidae, de même que ses interprétations phylogénétiques doivent être soulignées car, en réalité, elles ont annulé la valeur réelle du carctère fourni par ce com­ plexe. - chez les espèces des sous-familles nord-américaines des Triaenony­ chinae (sensu Br i g g s, op. cit.) et Paranonychinae, nous avons identifié le deuxième type de complexe intestinal.

L'APPAREIL DIGESTIF (INTESTIN MOYEN), CARACTÈRE UTILI­ SABLE DANS LA TAXONOMIE DU «SOUS-ORDRE DES GONYLE­ PTOMORPHI » Si l' on compare les complexes intestinaux des différentes espèces, inclusivement des« sous-ordres» Dyspnoi et Eupnoi, on peut distinguer deux catégories: I) le type d'intestin moyen pourvu de 3 paires de diverticules Gonyleptomorphi et Oncopodomorphi sensu S i l h a v y, Laniatores auct.) et II) le type d'intestin moyen pourvu de 4 paires de diverticules (Cypho­ phthalmi, Dyspnoi et Eupnoi, les deux der!liers équivalents aux Palpatores auct.). L'étude des complexes intestinaux chez ces familles dont l'intestin moyen présente 3 paires de diverticules nous a suggéré de les grouper en fonction de deux critériums: l) le nombre des coecums au niveau du D III et 2) l'aspect du D I. C'est au niveau de ces deux paires de diverticules que l'on constate les différences les plus accusées chez les « Gonyleptomorphi » étudiés. l) en fonction du nombre des coecums de D III, les familles peuvent être placées en deux groupes: a) familles dont le D III présente 2 coecums DAN DUMITRESCU

(ramus medianus ct ramus lateralis) - Paranonychidae, Pentanychidae, Travuniidae et Erebomastridae; b) familles dont le D III présente 3 co e­ cu ms (ramus mcdianus, ramus l::tcralis et ramus exterior) - Synthctony­ chidac, Triacnonychidar, Phalangodidae, Gonyleptidae, Cosmetidae et Assa­ miidae). 2) en fonction de l' aspect du D I, les familles étudiées se laissent groupées toujours en deux catégories: a) familles dont la D I est simple ­ (Cosmetidae, Assamiidae, Phalangodidae, Gonyleptidae, Paranonychidac, Travuniidae ou pourvu de ramifications à peine ébauchées-Erebomastridae et Pcntanychidae; b) le diverticulum I pourvu de 4 coecums - Triaenony­ chidae. L'existence des groupes de familles dont le D III émet 2 et, respecti­ vement 3 coccums suggère deux directions de l'évolution qui coïncident, ('Il général, aux groupes établis par Br i g g s (1969) ct confirmés par Mar tc n s (1972) sur la base de la morphologie de l'organe copulateur mâle chez les Laniato!·es. Ainsi, tous les représentants des familles étudiées dont le D III pré­ :o ente 2 coecums sont pourvus d'un muscle qui actionne sur le gland du pénis. De l'autre côté, chez les familles dont le D III a 3 coecums, le gland du pénis est actionné par la pression de l'hémolymphe, l'organe copulateur màle étant dépourvu de muscle. Exception font les familles des Triaenony­ chidac ct des Synthctonychidae, chez lesquelles le pénis présente cc muscle. Faisant usage de certains caractères de morphologie externe, et notam­ ment de l'aspect des griffes tarsales des pattes III et IV, Kr at o c h vi 1 (1958) et Si 1 ha v y (op. cit.) distinguent les deux superfamillcs. (Travu­ noidea et Oncopodoidea et, respectivement Travunoidea et Gonyleptoidca) auxquelles correspondent, en général, les caractères de morphologie interne mentionnés ci-haut. Au sein des Travunoiùca, l'aspect du D III nous a permis de recon­ naître deux lignées: une propre à l'Hémisphère Nord (D III à 2 coecums) et l'autre à l'Hémisphère Sud (D III à 3 coecums). Tous les spécialistes ont admis l'existence des Triacnonychiùae aussi dans le continent nord-américain. Toutefois, Star e ga (1972), se basant sur les données fournies pai· la répartition géographique de ces Opilions, a fait la mention suivante: , ... ihr Vorkommen im westlichen Nordamerika :;cheint mir fraglich- es handelt sich hier vielleicht um Vertreter einer andcrer, aber morphologisch sehr ahnlichen Gruppe" (p. 60). Nos recherches effectuées sur l'intestin moyen des différentes espèces appartenant tant à la lignée propre à l' Hémisphère Nord qu'à l'Hémisp­ hère Sud, viennent de confirme'!' l'hypothèse de cet auteur. Comme nous l'avons déjà mentionné, les différences sont évidentes au niveau des D I et D III, fait qui plaide donc pour l' existence de deux familles différentes. Ainsi, pour les représentants nord-américains des « Triaenonychidae» nous avons élevé au rang de famille les Paranonychinae créées par B r i g g s (op. cit.) (Du mitres cu, 1975). Si l'on considère le critérium utilisé par l'auteur américain pour la systématique de ces Opilions de l'Amérique du Nord (la morphologie des griffes tarsales des pattes III et IV), il résulte qu'ils se laiEsent groupés en r ' APPAREIL DIGESTIF DES GONYLEPTOMORPHl (OPILIONIDA) 27

ùeux sous-familles: les Paranonychinae et les Sclerobuninae ( = Triaenony­ chinae nord-américaines sensu Briggs), subfam. nov., pour laquelle nous désignons le genre Sclerobunus Banks, 1893 comme genre-type. Par conséquent, les Triaenonychidae comprennent exclusivement les formes cantonnées dans les continents australs, ayant une distribution typi­ quement gondwanienne. Par leurs 4 coecums au niveau du D 1, elles s'éloig­ nent du reste des familles placées dans le sous-ordre des Gonyleptomorphi. En revanche, les 3 coecums au D Ill, la présence du muscle érectile an pénis, de même que la répartition géographique les rapprochent des Syn­ thetonychidae. Celles-ci, par leur D 1 simple, semblent représenter un groupe plus ancien par rapport aux Triaenonychidae. En ce qui concerne la superfamille des Gonyleptoidea, chez toutes les c~:~pèces étudiées, le complexe intestinal se caractérise par son uniformité. II est utile de rappeler que les Stygnidae ont été considérées initiale­ ment comme une sous-famille des Gonyleptidae, pour qu'elles soient ensuite élevées au rang de famille par Me Il o-Le i tao (1931). En même temps, il nous paraît intéressant de mentionner l'opinion avancée par Go o d ni g h t (1975, in litt.) quant à ces Opilions: "At present we have not recognized the fa mil y Stygnidae as did Silhavy. W e have workcd extcn­ sively with those forms wich he places in this family and do not feel that their differences are marked enough to separate them from other mcmbcrs of the Phalangodidae". Si l'on tient compte du fait que Me Il o -Lei tao (1935) considère ln; Stygnidae comme plus récentes par rapport aux Gonyleptidae et que G o o d n i g h t préconise leur placement parmi les Phalangodidae,_ nous nous rendons mieux compte des difficultés rencontrées dans l'établissement Je la position systématique de ces Opilions. De l'examen du complexe intestinal chez Protimesius capito il ressort qu'il est de même type que celui des autres familles des Gonyleptoidea étudiées. Malheureusement, nous n'avons pas eu l'occasion d'étudier l'intestin moyen chez les Opilions appartenant à la famille des Oncopodidae. Ainsi, la seule possibilité d'avancer quelques considérations concernant leur com­ plexe intestinal est limitée uniquement à l'interprétation du dessin publié par L orna n (op. cit., Pl. XI, fig. 19). L'examen de ce dessin nous a permis de constater que dans la moitié droite du complexe intestinal chez Gnomulus sumatranus l'auteur a figuré un coecum «supplémentaire» ( ?), fait qui rend très difficile son homologation. Cependant, on peut supposer qu'il s'agit ici d'une impression musculaire au niveau du ramus transver­ salis qui a déterminé l'auteur d'y tracer une limite si nette. L'aspect du complexe intestinal chez cette espèce laisse l'impression q 'il comprend aussi 3 paires de diverticules, mais pour le moment, il serait difficile de préciser le nombre de coecums au niveau du D III.

CONCLUSIONS

L'étude du complexe intestinal chez différentes espèces appartenant aux deux superfamilles, Gonyleptoidea et Travunoidea, nous a permis d'avancer les conclusions suivantes: DA N DUl\IITRESCU

J. Lf' caraclèrc fourni par la morphologie du complexe intestinal virut s'ajonter à ceux des griffes tarsales des pattes III ct IV et de l'organe l'opulatcur mâle et permet de reconnaître deux lignées d'évolution au sein drs Gonyleptornorphi: une propre aux Gonyleptoidea (uniformité dP ce ('Omplexe) et l' autre propre aux Travunoiclca (hétérogénéité des complexes intestinaux) 2. Chez les Travunoidea, eommc chez les Dyspnoi ct les Eupnoi aussi, l'évolution serait allée des complexes intestinaux avec un nombre réduit de cof~cums aux complexes intestinaux avf'c beaucoup de coecums, de telle sorte que les familles possédant un nombre réduit seraient les plus primitives. 3. Au sein des Travunoidea, l'intestin moyen plaide pour l'existence Je deux lignées: une propre à l'Hémisphère Nord (D III avec 2 coccums) ct une propre à l'Hémisphère Sud (D III avec 3 coecums). 4. Le caractère offert par le complexe intestinal nous a permis Je l'onsiJérer les « Triaenonychiclae» nord-américaines un groupe différent (les Paranonychidae) de celles cantonnées exclusivement dans l'Hémisphère Sud, dont la répartition géographique est typiquemet gondwanienne. 5. Les caractéristiques de l'intestin moyen des TriaenonychiJae nous font penser aux systèmes énoncés par L orna n (1902) et Poco c k (1902) clans lesquels ces Opilions occupent une position particulière. 6. Par leurs 3 paires de diverticules intestinaux, les Oncopodidae peu­ vent être placés dans le même sous-ordre que les Travunoidea et les Gony­ leptoidea, à savoir celui des Laniatores. A l'état actuel de nos connaissances, le caractère offert par la morphologie du complexe intestinal semble plaider pour la classification des Opilions en 3 sous-ordres (Cyphophthalm~, Lania­ tores et Palpatores) admis par les spécialites avant l'exposition du système de Silhavy (op. cit.).

REMERCIEMENTS Nous tenons a exprimer notre gratitude à tous les arachnologistes qui ont cu l'amabilité de nous faire parvenir le matériel de cette étude: Madame Prof. dr. Relia Eller Monteiro Soares (Botucatu, Brésil), Madame Stefania Avram (Bucarest, Roumanie), Messieurs les Professeurs H. W. Levi (Harvard, Massachussctts, États unis), S. Suzuki (Hiroshima, Japon) R. F. Lawrence ( Grahamstown, Rep. d'Afrique du Sud), Messieurs les Docteurs R. R. Forster (Dunedin, Nouvelle Zélande), B. H. Lamoral (Pietermaritzburg, Rép. d'Afrique tlu Sud), T. S. Briggs (San Francisco, Californie, Etats Unis)et C. J. Goodnight (Kalamazoo, Etats Unis).

CERCETARI MORFOLOGlCE ASUPRA APAHATULUI DIGESTLV (INTESTIN MEDIU) LA GONYLEPTOMOHPHI (ARACHNIDA, OPILIONIDA). REZUMAT ln lucrare este studiat comparativ complexul intestinal (intestinul mediu cu diverticulele ~i cecumurile sale) la 19 specii încadrate în 2 supra­ familii (Travunoidea ~i Gonyleptoidea), cuprinzînd 9 familii. APPAREIL DIGESTIF DES GONYLEPTOMORPHI (OPILIONIDA) 2()

Studiul demonstreaza ca morfologia complexului intestinal constitu ie un caracter care, alaturi de cele oferite de morfologia ghearelor tarsale dr la picioarele III ~i IV ~i de organul copulator de la mascul, pot fi folosite în taxononie; el permite identificarea a doua linii evolutive în cadrul subor­ dinului Gonyleptomorphi: una caracteristica suprafamiliei Gonyleptoidea, cc prezinta acela~i tip de intestin mediu, ~i alta suprafamilif'i Travunoidea, cu intestin mediu de tipuri diferite. La Travunoidea, ca dealtfel 7i la Dyspnoi ~i Eupnoi, evolutia pare sa fie indieata de sporirea numarului de cecumuri. În cadrul tr~vunoideelor sînt puse în evidenta doua linii: un a proprie opilionidelor clin emisfera nordica ( diverticulul III cu 2 cecu muri) ~ i alta cel or din emisfera sud ica ( diverticulul III cu 3 cecumuri). Se stahile~te ca opilionidele clin familia Triaenonychidae al caror complex intestinal este caracteristic, sînt cantonate exclusiv în continentcle australe, în continentul nord-american existînd o alta familie (Paranonychidae) ai carei reprezentanti au un intestin me diu diferit. P en tru « trienonihinele » nord-americane este creeatâ noua subfamilie Sclerohuninae. Pe baza studiului complexului intestinal, precum ~i a corelarii datelor clin literatura (fam. Oncopodidae) este sugerata gruparea familiilor studiat<' în subordinul Laniatores, fiind astfel argumentata 7i clasica împartire a opilionidelor în cele 3 subordine Cyphophthalmi, Laniatores ~1 Palpatores, anterioarâ sistemului propus de Si 1 ha v y (1960)

MOPOnOnFIECKHE HCCnE.II:OBAHH5I DHW:EBAPHTEnbHOrO

ADDAPATA (CPE)lH5I5I KHlliKA) TPYDEH << GONYLEPTOMORPHI >> (ARACHNIDA, OPILIONIDA)

PE3IOME

B ::rroH: pa6oTe H3yqaeTcH cpammTenMIO IŒJUeqHhiH: IWMnJieiKe THri cpe.[(He~l KHWKH, a .[(pyraH npe.[(CTBmreT CeMei:icTBO Tra­ VUnoidea CO Cpe.[(Heiî KHWKOH pa3J1J-IqHhiX THllOB. Km< y Travunoidea, TaK n y Dyspnoi n Eupnoi 3BOJIIOQH JJ T.;amcTCfl yiKHT OTIHJJHOHH.[(alll H3 CnepHoro rronywapHH (,ll;HBepCTHIKHT !OmHoMy nonywapHro (.nHnepTHKyn III) c TpeliUJ qeKallm. 30 DAN D UMITRESCU

YcTaHOBJIHBaeTcH, tiTO onHJIHOHH~hi H3 ceMeikTBa Triaenonychidae y III

BIBLIOGRAPHIE

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Muzeul « Grigm·e Anlipa • Kissdef 1, BueureftÏ 63 România

ABRÉVIATIONS

D I = ùivcrticulum primnm r. CÀ. = 1·amus exterior r. 1. = ramus longitudinalis r. la. = ramus lateralis r. mn. = ramus medianus r. tr. = ramus transversalis p. i. a. = pars intestinalis anterior p. i. p. = pars intestinalis postcrior