AU REVOIR LES ENFANTS

de FFICHE FILM Fiche technique

France - 1987 - 1h40

Réalisation & scénario : Louis Malle

Chef opérateur : Renato Berta

Son : Jean-Claude Laureux

Musique : Franz Schubert Résumé ans, c’était ma première année dans ce collège. Camille Saint Saëns Mes parents m’y avaient placé pour m’éviter les Janvier 1944. Julien (11 ans) et son grand frère complications de la guerre, les bombardements Interprètes : François regagnent leur collège des Carmes à sur Paris... J’étais furieux de me retrouver là, Gaspard Manesse Provins après les vacances de Noël. sans eau chaude, dans le froid. C’était un lieu très protégé jusqu’à ce qu’on découvre la pré- (Julien) Un nouveau, Jean Bonnet, est introduit dans la classe et se fait un peu rejeter par le groupe, sence de trois enfants juifs recueillis par les Raphaël Fetjo l'orgueil de Julien étant en particulier exacerbé prêtres du collège". C’est cette histoire, son his- (Bonnet) par les brillants résultats scolaires du nouvel toire, que Louis Malle a décidé d’adapter à Francine Racette élève. l’écran, celle de cet enfant, Julien, qui va se lier (Madame Quentin) Les deux garçons que rapproche un égal amour d’amitié avec un "nouveau", Jean, le jeune gar- de la lecture se trouvent un soir isolés lors d’un çon juif qui va être arrêté par les nazis à la suite grand jeu de piste se déroulant dans la forêt de la dénonciation du garçon de cuisine, bien après l’heure du couvre-feu. Ils sont rame- Joseph, renvoyé du collège pour y avoir organi- nés au collège par une patrouille allemande. sé un marché noir. Dès lors ils se sentent plus proches, mais Julien cherche à percer le mystère de la différence de Couleur mémoire Bonnet… Pour mettre en scène ce retour, Louis Malle a choisi le collège Sainte-Croix-de-Provins, crépis couleur du temps passé, gris souris des blouses et tableau noir, murs jaunis à la graisse d’une Critique vieille cuisine sur laquelle se détache le rouge vif d’un genou écorché. Dans ce décor en demi- Louis Malle est de retour, doublement. En tour- teintes, défile une galerie de portraits : le petit gros nant Au revoir les enfants en février et mars joufflu toujours à la traîne dans les cross-coun- dernier dans un vieux collège de Provins, le try, le grand benêt costaud aux joues couleur cinéaste renoue avec la France, et aussi avec tomate, le jeune romantique de bonne famille, l’univers de l’enfance. "En 1944, j’avais onze Joseph (François Négret), I’infirme au regard L E F R A N C E www.abc-lefrance.com

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fuyant qui travaille aux cuisines et trafique de Bonnet, il y a eu une gravité formidable mettre toutes les combinaisons possibles au avec les élèves... Enfin, il y a Julien (Gaspard lors de la première prise, une émotion, montage au sein d’une même séquence. Arc Manesse), visage étrange qu’on n’oublie pas : quelque chose dans le tempo… Mais ça ne bouté sur sa MovieCam, souple, lent, précis. visage lisse, expression de gravité, voile fra- serait pas naturel s'ils s'imprégnaient de ça. Travellings au rythme des corps réglés gile et pâle qui masque à peine le tumulte J'aime les acteurs qui font des blagues comme du papier à musique. “Là où je intérieur, grands yeux captifs, acuité du jusqu’au moment du clap, je cherche plutôt m’entends bien avec Louis, c’est que son regard, tension permanente face aux signes du côté de ce paradoxe du comédien. C’est cinéma ressemble plus à la musique qu’à la du monde. Julien, celui qui se tient à distan- ce que j‘aime dans le travail avec les enfants : peinture, dit Renato Berta. Dans ce film, tout ce respectable des bandes, celui qu’on écou- ils s‘y mettent, se concentrent et dès qu’on est fait là-dessus”. te sans bien le comprendre, conscience trop dit “coupez”, ils se remettent à s’amuser." précoce et déjà blessée. On détient déjà, Louis Malle traque, aux aguets : "Tu as Le passé reconstruit dans la touchante familiarité de ces visages oublié ton regard"..."Là tu es venu trop Au son, Jean-Claude Laureux, vieux compa- ou dans l’étrangeté de ceux de Joseph et tard"..."Vous avez oublié le sifflement"... gnon de route du réalisateur (Calcutta, Julien, une des clés de la méthode Malle : la Petites touches, extrême précision, parcelli- Atlantic City, Cod’s Country, My Dinner justesse de ton ne peut naître que d’un sation ultime du tournage jusqu’à l’atome du with André...) : "Louis Malle accorde beau- tâtonnement qui laisse sa chance au hasard geste, du mot, du soupir, pour reconstituer coup d’importance au son mais il le manipule et s’appuie sur le temps. un édifice dont on ne sait pas exactement ce beaucoup au montage". Dernière pièce de Dès septembre 1986, I’équipe de Louis Malle qu’il sera. Un tournage est par essence le l’édifice, à venir, montage et mixage sont s’est mise au travail : recherche parmi de morcellement temporel et spatial d’une pro- chez Louis Malle l’occasion d’un ultime mor- jeunes acteurs, chez les élèves de la région jection de l’esprit. Louis Malle pousse à cellement, d’inversions, de superposition de Provins, dans l’entourage proche de la l’extrême l’éclatement, tournant à des d’un son sur une autre prise, la dernière production, MK2. Tests en tout genre, cas- semaines d’intervalle deux plans d’une occasion de douter, de chercher avant ting vidéo vont permettre d’avoir la liste défi- même séquence, en fonction du montage, l’aboutissement. Attentif au grain, au ton, au nitive des "élèves" auxquels viennent s’ajou- recrée en donnant des indications parfois rythme, il cherche encore, éparpille, recons- ter les "professionnels". "Ce qui me frappe, contradictoires, perd le fil, I’acteur, égaré, truit. C’est peut-être autour de cette idée de c’est à quel point ils sont dans les person- découragé qui d’un coup trouve l’inattendu. retour qu’il faut chercher la justification de nages. Le décalage de quarante ans n’est C’est sans doute comme garde-fou à cet sa méthode. Un retour n’est jamais la même pas un problème, ce qui compte, c’est le fait émiettage systématique que Louis Malle met histoire. Louis Malle n’a pas voulu tourner de réagir comme un enfant. Les garçons en place un dispositif de sécurité tout à fait dans le collège de son enfance, préférant d'aujourd‘hui ne sont pas des mutants par draconien : contrôle vidéo en cours de tour- retrouver, ailleurs, dans un autre site - pas rapport à ceux de l’époque." La relation de nage et enregistrement sur vidéo 8 dont on un studio, un vrai collège - ce monde enfoui Louis Malle avec les enfants, en cours de repasse la cassette sur un moniteur après les dans ses souvenirs. Transposition des lieux, tournage, consiste d’abord à briser toute vel- multiples prises (souvent une dizaine), écou- écoute de cette ré-interprétation par les léité de cabotinage en multipliant répétitions teur à l’oreille pour Louis Malle, Renato enfants de sa propre vie, répétitions-décom- et prises, en dirigeant les jeunes garçons Berta (le chef-op’) et bien sûr l’ingénieur du positions sont les instruments, les dispositifs vers un terrain où ils ne pourront pas projeter son Jean-Claude Laureux. De même, le dou- destinés à rendre juste le retard aléatoire du des comportements de mauvais comédiens, blement des axes pour une séquence assez présent, chargé d’expériences nouvelles, fil- reproduire des attitudes toutes faites, enten- brève, I’éclairage et le cadre sont conçus tré par l’opacité des années. Si les acteurs dues. C’est sur la forme qu’il les fait tra- pour saisir l’imprévu, se couvrir. "J’utilise ont un paradoxe, Louis Malle en est un, vailler, réduite à une simple musique des des lumières qui permettent le jeu des ambulant. L’homme qui se plaît à capter mots, une mélodie avec son rythme, son acteurs-enfants, explique le chef-opérateur, dans l’instant la force du réel dans son phrasé, son tempo. Et, lentement, à force de j’ai aussi recours au zoom pour ne pas les approche documentaire décompose pour répétitions, de prises, d’indications parfois terroriser avec leurs marques et pouvoir construire ce qui fera fiction. contradictoires, d’écoute, surgit la prise recadrer sans arrêt même si le môme se Frédéric Sabouraud juste, réinvestie progressivement du sens trouve deux mètres plus loin que prévu". Cahiers du cinéma n°398 dont on l’avait vidée. Renato Berta construit la lumière pendant que Louis Malle fait répéter les enfants. Rencontre avec le réalisateur Le hasard contrôlé Eclairage assez pâle, diffus, à base de quartz "Il est très difficile de savoir si les enfants 1000 watts. Eliminer les couleurs, pouvoir, à Dans le dernier entretien avec vous publié ont vraiment conscience de la gravité des tout instant, décadrer pour suivre le mouve- par Positif, en 1974 (n° 157), entretien situations qu'ils jouent. Lors de l’arrestation ment, se laisser entraîner. Eclairer pour per- recueilli par Gilles Jacob, vous racontiez

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exactement le sujet d’Au revoir les puisque ce qui nous a manqué, c’est le culier des distributeurs, m’ont dit : "Oui, ça enfants. temps, et je suppose qu’une des compo- fait dix ans que tu n’es plus en France, on a Ah bon ? santes de mon souvenir, c’est une culpabilité fait trop de films sur l’Occupation, ça n’inté- que j’ai gardée et qui a certainement influen- resse plus personne ici". J’avais envie de Exactement. En disant que VOUS aviez envisa- cé ma vie, ma façon de penser et même mon faire le film de toute façon, j’avais l’impres- gé de le tourner comme prologue de travail. L’idée que ce qui s’est passé était sion que pour moi le moment était venu de le Lacombe Lucien, et que vous y aviez profondément injuste, que ça n’aurait pas dû faire, j’avais attendu longtemps. Depuis renoncé parce que vous ne vous sentiez pas se passer, et qu’après tout on était tous res- quelques années où je me disais : "ll va fal- prêt pour le faire. ponsables. J’ai un peu chargé Julien. En par- loir que je revienne faire un film en France, C’est très drôle... En fait, j'ai raconté cette ticulier il a l’impression que c’est lui qui que je revienne à mes sources", il avait tou- histoire un certain nombre de fois, de toute donne Bonnet, quand il se tourne vers lui jours été évident pour moi que ce serait ce évidence c’est le souvenir le plus dramatique dans la classe, ça, je l’ai probablement rajou- sujet-là. J’ai pris des notes, j’ai tourné de mon enfance... C’est paru dans une té. Mais c’est ma mémoire aussi, parce que autour du sujet. Et l’été dernier j’ai écrit, et Histoire de la Résistance, publiée par le Parti dans ma mémoire je suis un peu responsable j’ai eu l’impression que ça venait comme un Communiste, écrite par un type qui s’appelle de la mort de Bonnet... Une fois - une fois, cheveu sur la soupe, que c’était complète- Guérin, en cinq volumes. Je l’avais rencontré parce que je n’ai pas une mentalité d’ancien ment en marge de ce qui pouvait intéresser quand je préparais Lacombe Lucien, je le combattant - j’ai raconté cette histoire dans les gens... lui avais raconté, et ça fait deux pages dans une réunion d’anciens élèves, et je me suis Et évidemment, depuis, il y a eu un tournant. son bouquin. Je l’ai aussi raconté dans un aperçu que cette histoire m’avait beaucoup Le procès Barbie. En automne dernier, on livre paru en 1979, qui s’appelle Louis Malle plus affecté que les autres. D’autres se la avait l’impression qu’on allait laisser Barbie par Louis Malle, un bouquin passé inaperçu rappelaient comme un événement drama- en prison jusqu’à sa mort, on pensait vrai- parce que la petite maison d’édition qui tique, mais ils ne se souvenaient pas bien de ment que son procès n’aurait jamais lieu, l’avait sorti a fait faillite une semaine après. Bonnet alors que moi j’en ai un souvenir très qu’il dérangeait trop de gens... En même Maintenant que j’ai fait le film, des gens me précis. Disons que je l’ai pris personnelle- temps, j’étais déjà en préparation du film disent effectivement : "Tu en as déjà parlé..." ment, et c’est pourquoi j’ai fait ce film. C’est quand il y a eu le mouvement étudiant de C’est vrai, pendant des années, ça a remonté toujours pareil quand on s’inspire d’un évé- décembre, ça m’a encouragé. On dit à la surface. Mais au fil des années, je ne nement réel, et qu’on le revisite quarante aujourd’hui : "Il y a eu 68, et puis l’après-68". sais pas bien comment l’expliquer, c’est pour ans après, c’est tortueux, compliqué... Faire Une dépolitisation qu’on a tous constatée, en moi très mystérieux, il semble que ma un film qui ne soit qu’une reconstitution his- France comme aux Etats-Unis. Et on s’est mémoire se soit transformée. Elle s’est enri- torique, ça n’avait pour moi aucun intérêt, et aperçu à la fin de l’année dernière que ça chie. Je ne crois pas que la mémoire soit sta- donc je crois que j’ai rajouté toute ma n’était pas vrai du tout. Et ça, ça m’a fait tique, au fur et à mesure qu’on avance, on réflexion sur cet événement pendant toutes plaisir, ça m’a encouragé. J’ai pensé que les voit les choses autrement. Aujourd’hui que le ces années. J’aurais pu en faire mon premier gens de ces nouvelles générations trouve- film est fini, je m’aperçois que ce que je film, mais j’aurais été terrifié. C’était un sou- raient dans le film quelque chose qui pourrait raconte ne ressemble pas tellement à ce qui venir encore en évolution. Je suis vraiment les intéresser. s’est passé, réellement. Certains éléments content de l’avoir fait aujourd’hui, j’espère De toute façon, j’aurais fait le film... J’ai tou- du film, dont j’étais persuadé que c’étaient que ça me dépasse un peu. jours fait des films avec l’espoir d’intéresser des souvenirs authentiques, je les ai vérifiés les gens. Commencer un film en se disant : quand j’ai terminé le premier scénario, et je Vous le faites en 1986-87. Y a-t-il un rapport "Je le fais parce que c’est dans le vent", me suis aperçu que ça ne correspondait pas avec l’actualité ? c’est une erreur. du tout à la réalité de 1944. Par exemple, Non seulement il n’y a aucun rapport, mais mon frère qui était avec moi dans cette école ça a même un côté comique. Quand on a Ouand vous avez fait Lacombe Lucien, voyait les choses différemment. Finalement, commencé à montrer le film, c’était pendant c’était une manière indirecte d’aborder le je m’en suis tenu à ce que je crois être mon le procès Barbie, et des gens m’ont dit : sujet ? souvenir, sachant très bien que c’est un peu "Quel timing, vraiment, c’est formidable". La vérité, c’est que le tout premier scénario réinventé. Disons, pour simplifier, que dans Comme si j’avais sauté sur l’occasion, il y a de Lacombe, avant que je ne travaille avec le film c’est un peu comme j’aurais voulu que Le Pen, il y a une montée du racisme en Modiano, commençait dans une école, et le ça se passe. C’est plus intéressant que ce France, dans la foulée il y a eu le passage de personnage, c’était le Joseph d’Au revoir qui s’est réellement passé. Ma relation avec Shoah à la télévision. En fait, quand j’ai les enfants, ce garçon de cuisine mis à la Bonnet, dans le film, est plus compliquée et commencé à montrer le scénario en sep- porte qui pour se venger allait à la . plus intéressante que dans la réalité, tembre l’année dernière, des gens, en parti- Puis très vite on l’a enlevé. Je me suis dit :

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"C’est une chose que je ferai un jour, c’est un vrai que par rapport aux enfants déporter tous ceux qui n’étaient pas autre sujet". Lacombe, ça a été un chemine- d’aujourd’hui, même si j’évoquais à l’instant Français, les refugiés allemands ou d’Europe ment compliqué. Au départ, ce devait être un une enfance protégée, la vie était beaucoup centrale. Ensuite... (…) jeune Mexicain... J’ai aussi pensé le situer à plus dure. Tout de suite, dès le premier jet du Françoise Audé la fin de la guerre d’Algérie. C’était un per- scénario, j’ai voulu mettre le jeu d’échasses, Jean-Pierre Jeancolas sonnage que j’aurais pu situer à différents qui n’existe plus aujourd’hui, on l’a supprimé, Positif n°320 moments historiques. Quand il m’est apparu ou interdit. C’était incroyablement violent. que je pouvais le situer sous l’Occupation, je Mais ça, c’était l’affirmation de la virilité... me suis rappelé cet épisode de mon enfance, Comme le jeu scout en forêt. Et là, je l’ai Filmographie et tout de suite après, dans l’endroit où j’ai même un peu diminué. Le directeur de tourné le film et où j’habite, dans le Lot, je l’école, le père Jean dans le film, nous suis tombé sur un personnage qui avait réel- envoyait après le couvre-feu, la nuit, cher- Le monde du silence 1955 lement travaillé pour la Gestapo et qui avait cher un trésor dans la forêt de (avec Cousteau) infiltré les maquis. Ce personnage m’a orien- Fontainebleau. C’était dément, on était terri- Ascenseur pour l’échafaud 1957 té vers un jeune paysan qui aurait été mal- fiés, il y avait un risque réel, ce qui a provo- Les amants 1958 traité dans son enfance et qui trouverait qué des protestations de parents. C’était Zazie dans le métro 1960 dans son travail dans la Gestapo une sorte pour nous former le caractère. Et puis quand Vie privée 1961 d’affirmation sociale, tout ce qui fait même, cette violence, je crois qu’elle existe Le feu follet 1963 Lacombe Lucien. dans tous les pensionnats. Des rapports de Viva Maria 1965 Dans le cas d’Au revoir les enfants, tout a force entre les enfants. C’est presque nor- Le voleur 1966 été beaucoup plus simple. Je suis parti de ce mal, la façon dont on traite Bonnet : c’est un Histoires extraordinaires 1968 que j’avais réellement vécu. Le plus juste, nouveau, il n’est pas comme les autres. A (un sketch) par rapport à mon expérience, ce sont les part Julien, les autres ne sont pas assez Calcuta 1969 composantes sociologiques du film. Le fait curieux pour aller chercher plus loin que les Le souffle au cœur 1971 que par exemple les enfants de cette école différences immédiates. Je crois que c’est un Humain trop humain 1973 appartiennent à la grande bourgeoisie, que comportement social assez banal, les autres Place de la République malgré les difficultés de l’époque, le froid, Ia sont mal vus. Lacombe Lucien 1974 faim, que tout le monde partageait, ils Cela dit, je suis très content que vous ayez Black moon 1976 étaient tout de même très protégés. Il y a le remarqué cette violence : une fois le film ter- La Petite 1978 personnage de la mère, la conversation à miné, je me suis même demandé si elle était Atlantic City 1980 déjeuner, la réflexion sur Léon Blum... Je me assez apparente. J’ai de cette époque le sou- My dinner with André 1981 suis rappelé à quel point les gens de ma venir d’une violence à I’état nu. Il y avait une Crackers 1983 famille haïssaient Léon Blum, c’était l’hor- notion presque darwinienne des rapports de 1985 reur. Il y a le personnage de monsieur Meyer, force dans un groupe social, on laissait faire God’s Country le juif du restaurant, qui est inspiré de ceux qui prenaient le dessus. Il y avait des And the pursuit of happiness 1986 quelque chose qu’un de mes amis m’a racon- victimes et des bourreaux. Mais ce qui me La poursuite du bonheur té à propos de son grand-père, un grand paraît important dans le film, même s’il y a Au revoir les enfants 1987 bourgeois juif qui s’était fait arrêter dans un parmi les enfants des dominants et des Milou en mai 1989 restaurant. Pour lui, c’était inimaginable dominés, c’est l’intervention de la violence Fatale 1992 qu’on puisse l’arrêter, I’embêter. Il se sentait du monde des adultes, elle est plus abstrai- complètement français, je crois que Pétain te, elle est surimposée. Pour les enfants, elle lui-même lui avait remis la médaille militaire est incompréhensible. Alors que la violence Documents disponibles au France à Verdun. L’idée qu’on puisse le considérer des enfants est naturelle, je dirais presque comme un youtre lui paraissait absurde. Il biologique, quand les miliciens arrivent, et Dossier ABC Le France en PAO est mort en déportation... C’est plutôt dans la ensuite dans toute la fin du film, tout devient Revue de presse importante relation des deux enfants que j’ai inventé. incompréhensible, en tout cas pour Julien. Avant-scène cinéma n°373 Quand Julien demande à son frère : "Qu’est- Positif n°320, 326, 439 Nous sommes frappés par la violence qui ce que c’est, un juif ?", c’est terriblement dif- Cahiers du Cinéma n°398 … règne dans Ie pensionnat... ficile. D’ailleurs, même Vichy a eu bien du Pour plus de renseignements : Il y avait d’abord une dimension générale de mal à définir le juif, avant de le déporter. tél : 04 77 32 61 26 l’époque, qui était une époque dure. Et c’est C’était simple au début, ils ont commencé à [email protected]

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