PARCOURS Moulins Communauté, capitale des Bourbons

1 PRÉAMBULE

En novembre 2019, la commission nationale Située au nord du département de l’, au des Villes et Pays d’art et d’histoire a donné nord-est de la région -Rhône-Alpes, un avis très favorable pour l’attribution du la communauté d’agglomération regroupe label Pays d’art et d’histoire à la communauté 68 000 habitants répartis sur 44 communes. d’agglomération de Moulins. Ce nouveau Pays Elle est structurée autour du bassin de vie de d’art et d’histoire porte le nom de Moulins Moulins et constitue le cœur de la province du Communauté, capitale des Bourbons. Le dans laquelle l’histoire de Cluny label, attribué par le ministère de la Culture, et l’ascension de la dynastie des Bourbons reconnaît le travail engagé par la collectivité sont intimement liées. Territoire agricole dans la connaissance, la conservation, la et terre d’élevage, ses paysages ont été médiation, le soutien à la création, la qualité façonnés par la rivière Allier qui relie bocage et de l’architecture et du cadre de vie et soutient Sologne bourbonnaise. Les églises romanes, les projets à venir. empreintes du style clunisien, les innombrables châteaux et maisons fortes qui parsèment la campagne mais aussi les constructions et l’essor que connaît le territoire au XIXe siècle, témoignent de l’importante progressive prise par cette région, grâce aux actions conjointes d’une famille et d’une communauté monastique, qui aujourd’hui encore continuent à apporter leur prestige à Moulins Communauté et au département de l’Allier 1 dans son ensemble.

1. Le Pays d’art et d’histoire de Moulins Communauté, capitale des Bourbons, au sein des Villes et Pays d’art et d’histoire de la région Auvergne-Rhône-Alpes

Couverture : Maquette • Prophète, XVe siècle, chapelle Neuve de l’église c-toucom.com prieurale de d’après DES SIGNES studio Muchir Desclouds 2018 • Vue de la ville de Moulins et du pont Régemortes Les termes suivis d’un depuis la rive gauche de l’Allier Impression astérisque (*) sont expliqués Agence C-toucom Crédits photographiques Août 2020 dans le glossaire, p. 76 • Service du patrimoine de Moulins Communauté, Emerick photographie, sauf mentions contraires

1 Cartes : L. Pouchol-Blanchon, Moulins Communauté SOMMAIRE

3 Entre Bocage et Sologne, des 39 Les belles demeures de l’époque paysages naturels remarquables moderne 3 Un territoire aux entités paysagères 42 L’architecture religieuse des XIXe et singulières XXe siècles 5 Des espaces naturels protégés 50 L’architecture civile et les sculptures du XIXe au XXIe siècle 9 Bref aperçu géologique 50 Les châteaux du XIXe siècle 11 Histoire d’une province au cœur de la 54 Les sculptures des XIXe et XXIe siècles 11 Un territoire aux entités paysagères 58 Quelques édifices publics du XXe siècle singulières 58 Patrimoine et paysages 14 La seigneurie de Bourbon 58 Le patrimoine fluvial 16 Le duché de Bourbon 62 Les parcs et jardins 22 L’apport de l’archéologie pour la 65 L’habitat rural et le petit patrimoine période médiévale 65 L’habitat rural 25 L’Ancien Régime (XVIe-XVIIIe siècles) 68 Le petit patrimoine 28 La période révolutionnaire 71 Le patrimoine commercial et 30 Les XIXe et XXe siècles industriel 35 Portrait patrimonial du Pays d’art 76 Glossaire et d’histoire 80 Quelques éléments 35 L’architecture médiévale bibliographiques 35 Les églises et prieurés 36 L’architecture castrale 39 Les maisons à pans de bois

2 ENTRE BOCAGE ET SOLOGNE, DES PAYSAGES NATURELS REMARQUABLES

UN TERRITOIRE AUX ENTITÉS Le bocage bourbonnais occupe environ un PAYSAGÈRES SINGULIÈRES tiers du département de l’Allier, le Val d’Allier constituant la limite est de cet ensemble « Au nord de , les boqueteaux se et la rivière de la Sioule la limite sud. Il se multiplient, puis les forêts. Autour des caractérise par une succession de haies prairies et des champs, les haies vives et les basses, appelés bouchures dans le centre de chênes du bocage dessinent des mailles au la France, parfois jalonnées d’arbres. Malgré dessin irrégulier ». les remembrements* et l’intensification des Guy BOUET et André FEL, Atlas et géographie de la France pratiques agricoles, les haies sont encore moderne, Le Massif Central, Flammarion, 1983. très présentes dans ce territoire où l’élevage prédomine. Elles servent à la fois de clôture, Le Pays d’art et d’histoire se situe au carrefour de source d’ombre ou d’abri contre le vent. de deux zones paysagères délimitées par le Cette fonction de la haie comme limite de Val d’Allier : le bocage bourbonnais à l’ouest parcelle a une valeur juridique depuis le de la rivière Allier, la Sologne bourbonnaise Moyen Âge. Le réseau de haies est complété à l’est. par de grandes forêts, pour la plupart

3 2 2. Le bocage vers Aubigny domaniales, les deux ensembles les plus vallée de l’Allier à l’ouest et celle de la Loire vastes étant les forêts de Bagnolet et de bourbonnaise à l’est. Moladier classées en site Natura 2000. Traversé par le canal latéral à la Loire, il s’agit Au sein de ce paysage structuré en de d’un territoire très boisé, certaines forêts nombreuses parcelles, on retrouve quelques pouvant être de grande superficie comme îlots de grandes cultures. Villages, hameaux, celle de Munet ou les bois de Chapeau. A fermes isolées et nombreux châteaux cela s’ajoute une multitude de petits cours souvent situés sur des petits promontoires, d’eau très sinueux et faiblement encaissés. jalonnent ce bocage bourbonnais. Une des caractéristiques essentielles de ce paysage est l’importante concentration Les communes de Chemilly et Besson, d’étangs due au sol argilo-sableux. Ce au sud du Pays d’art et d’histoire, dans le sous-sol imperméable a permis la création bocage bourbonnais, constituent quant d’étangs de formes et de superficies à elles l’extrémité nord du vignoble saint- variables, qui se succèdent en chaîne et pourcinois qui s’étend sur près de 630 abritent une densité importante d’espèces hectares et 19 communes. animales ainsi qu’une flore très variée. Les étangs de la Sologne bourbonnaise sont « La Sologne bourbonnaise, entre Loire et classés en site Natura 2000. Allier, est assurément une des plus pauvres La Sologne bourbonnaise repose sur un terres de France […]. Il faut ici amender plateau très vaste et faiblement vallonné, les terres, drainer, chauler pour obtenir les espaces forestiers se trouvent sur les quelque rendement ». parties sommitales du plateau, les zones Guy BOUET et André FEL, Atlas et géographie de la France agricoles occupent les faibles pentes où le moderne, Le Massif Central, Flammarion, 1983. drainage du sol humide est plus aisé. Ce secteur reste cependant avant tout tourné La Sologne bourbonnaise correspond vers l’élevage. Les haies bocagères y sont aux paysages du nord-est du département rares, ce qui marque une nette différence de l’Allier, sur le vaste plateau entre la avec le reste du département. De nombreux

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châteaux, souvent entourés de grands ont façonné les paysages mais aussi le parcs, structurent ce territoire. Le long de substrat géologique qui a induit les diverses la vallée de l’Allier, les bois deviennent plus activités industrielles développées au cours rares, laissant place à de grandes parcelles des siècles, de la production de figurines en agricoles. Cette bande de deux à trois terre cuite de la période gallo-romaine aux kilomètres de large fait ainsi la transition sablières et aux carrières, en passant par entre la Sologne et la vallée de l’Allier. la verrerie de Souvigny ou la céramique et la métallurgie de la région de Lurcy-Lévis. Le Val d’Allier, vaste plaine sableuse et troisième ensemble classé comme site La frontière est du territoire du Pays d’art Natura 2000, correspond à la partie et d’histoire de Moulins Communauté élargie de la rivière et traverse le Pays est constituée par la Loire qui longe les d’art et d’histoire du nord au sud. L’Allier communes de Gannay-sur-Loire, Saint- est l’une des dernières grandes rivières Martin-des-Lais et Garnat-sur-Engièvre et sauvages d’Europe de l’ouest. Avant de constitue la limite entre les départements rejoindre la Loire, la rivière sinue entre de l’Allier et de Saône-et-Loire. Le canal bancs de sable et gravières, érodant ses latéral au fleuve, bordé d’arbres, fait partie berges instables et dessinant de larges intégrante du paysage. méandres* qui progressent au gré des courants et des crues. L’Allier a ainsi laissé DES ESPACES NATURELS l’empreinte de ses anciens lits dans la PROTÉGÉS plaine. Ce remaniement perpétuel et Outre ces trois sites classés Natura 2000 naturel constitue la richesse écologique par l’Union Européenne qui reconnaît essentielle du Val d’Allier, à l’origine d’une le caractère exceptionnel de la faune et très importante mosaïque de milieux de la flore qu’ils abritent, le Pays d’art et engendrant une forte biodiversité animale d’histoire est doté d’un réseau de sites et végétale. protégés et reconnus pour la qualité de leur Ses méandres* successifs, en tresses, espace naturel.

5 3. Les étangs de la Sologne, à Chapeau

4. Le canal latéral à la Loire à Gannay-sur-Loire

5. La forêt de Chapeau

6. L’Allier à Villeneuve-sur-Allier

5 6 8.

LA RÉSERVE NATURELLE espèces de mammifères dont 9 espèces de NATIONALE DU VAL D’ALLIER chauve-souris et abrite le castor, la loutre Créée par décret ministériel du 25 mars 1994, d’Europe et le chat forestier. Douze espèces la Réserve Naturelle Nationale du Val d’Allier de batraciens sont connues sur la réserve, 49 est placée sous l’autorité de l’Etat, sa gestion espèces de libellules et plus de 1000 espèces étant confiée à l’Office National des Forêts de coléoptères. Concernant la flore, plus de et à la Ligue de Protection des Oiseaux- 600 espèces ont été recensées. Auvergne. Située à quelques kilomètres au sud de la ville de Moulins, elle s’étend sur LA RÉSERVE NATURELLE une vingtaine de kilomètres et couvre 1450 RÉGIONALE VAL-DE-LOIRE- hectares qui comprennent plus ou moins BOURBONNAIS largement les deux rives de l’Allier. Quatre Les Réserves Naturelles Régionales communes du territoire sont intégrées présentent les mêmes caractéristiques de dans la Réserve : Bressolles, Toulon-sur- gestion que les Réserves Nationales mais Allier, Chemilly et Bessay-sur-Allier. Les sont créées par les régions, suite à la loi « milieux y sont très variés : bancs de graviers, Démocratie de proximité » de 2002. Celle du plages de sable, bras morts*, talus boisés, Val-de-Loire-Bourbonnais a été classée en landes et forêts, et participent à la fonction 2015 et occupe une surface de 208 hectares de corridor écologique de cette zone large compris sur les communes de Garnat-sur- de 1 à 2 km. Cette richesse se traduit par Engièvre et Saint-Martin-des-Lais, le long de une forte richesse faunistique. Plus de 260 la Loire. Les milieux naturels d’une grande espèces d’oiseaux ont ainsi été recensées, diversité sont façonnés par la Loire, on y comme la cigogne blanche, les sternes trouve le milan noir dans la forêt alluviale* naines et pierregarins, le petit gravelot ou de peupliers noirs, la sterne pierregarin encore l’hirondelle de rivage. Plus de 100 sur les bancs de galets, la rainette verte d’entre elles sont nicheuses, c’est à dire dans le bras mort* ou encore le guépier qu’elles s’y reproduisent et y gardent leur ou le castor d’Europe sur les berges. Plus couvée. Le Val d’Allier compte également 45 de 400 espèces de plantes sont présentes,

6 7. Périmètre de la Réserve Naturelle Nationale du Val d’Allier (carte INPN)

8. Sterne naine

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9. Périmètre de la Réserve Naturelle Régionale Val-de-Loire-Bourbonnais (carte INPN)

10 . La Réserve Naturelle Régionale Val-de- 7 Loire-Bourbonnais

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9

7 11. Les espaces naturels remarquables du Pays d’art et d’histoire dont 20 remarquables comme l’épervière Il abrite une grande diversité de milieux de la Loire. Le Conservatoire d’Espaces naturels en perpétuel mouvement. Naturels de l’Allier (CEN) a été désigné comme gestionnaire de cette réserve pour LES ZONES NATURELLES les 10 ans à venir. Ce dernier est également D’INTÉRÊT ECOLOGIQUE l’animateur des sites Natura 2000 et des sites FAUNISTIQUE ET FLORISTIQUE classés « Espaces Naturels Sensibles ». Enfin, 14 Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique LES ESPACES NATURELS (ZNIEFF) ont été inventoriées sur le territoire. SENSIBLES L’inventaire des Zones Naturelles d’Intérêt Le Conseil Départemental de l’Allier a Ecologique Faunistique et Floristique initié depuis 2003 un réseau de 16 sites a débuté en 1982 sous la houlette de considérés comme Espaces Naturels l’Inventaire Nationale du Patrimoine Sensibles, représentatifs des milieux Naturel (INPN). Il s’agit d’un recensement naturels bourbonnais. Ces espaces ont pour des secteurs présentant de fortes capacités objectif de préserver la qualité des sites, des biologiques et en bon état de conservation, paysages, des milieux naturels mais aussi de qui n’implique pas de mesures de protection les aménager pour l’accueil du public. Le Pays réglementaire comme les sites classés d’art et d’histoire de Moulins Communauté, ou inscrits. Il constitue l’un des éléments capitale des Bourbons, comprend l’Espace majeurs de la politique de protection de la Naturel Sensible des Coqueteaux sur la nature et doit être consulté dans le cadre de commune de , au nord de Moulins, projets d’aménagement du territoire. soumis à la dynamique fluviale de l’Allier.

8 12. Géologie du territoire de Moulins Communauté

BREF APERÇU GÉOLOGIQUE où s’accumule la houille, roche carbonée Le Pays d’art et d’histoire présente une sédimentaire, comme le Grand sillon grande diversité géologique qui a façonné houiller qui, remontant de l’Aveyron et la topographie et les paysages. Sa spécificité traversant tout le Massif central sur 270 réside avant tout dans le fait qu’il s’est km, s’achève au nord du Bourbonnais avec constitué à partir de dépôts sédimentaires le bassin de la Queune, dans les secteurs et alluvionnaires. Il correspond ainsi à un de Souvigny et Noyant. L’exploitation de réservoir de roches détruites et débris tels charbon, avec l’ouverture des mines dans que sable, argile, galets, limon ou graviers. la première moitié du XIXe siècle, a fortement Par sa forme géologique, le Bourbonnais marqué l’histoire et le paysage de l’ouest du appartient au Massif central, socle cristallin territoire. de roches métamorphiques* datant de l’ère Durant l’ère secondaire, l’érosion* puis la primaire, dont il constitue la limite nord. sédimentation* engendrent le grès, présent Ce substrat géologique est profondément notamment dans le secteur de , modifié par l’orogénèse (l’édification de les marnes et les schistes. Il faut noter montagnes) de la chaîne hercynienne* dont la richesse du sous-sol de Coulandon, subsistent les granites du sud-ouest du Pays commune où l’on trouvait des carrières de d’art et d’histoire de Moulins Communauté, grès, de calcaire, de granit, d’argile et de support du bocage avec ses prairies et ses sable. cultures de céréales plus localisées. Durant l’ère tertiaire, le Massif central est à nouveau profondément bouleversé suite Ces éruptions granitiques ont isolé un au plissement alpin qui génère des failles et certain nombre de bassins et dépressions l’effondrement du bassin de Limagne. Cette

9 13. Le tunnel de séchage des briques de la tuilerie de Bomplein à

cuvette de granite est alors recouverte d’un sont composés d’alluvions anciennes et immense lac où les sédiments, accumulés les plus proches du niveau actuel de l’Allier durant des millions d’années, ont formé correspondent aux alluvions déposées plus les sols argilo-calcaires. Le déversement récemment. Cette différence de niveau est d’alluvions, accentué par l’érosion* liée bien perceptible depuis la ville de Moulins au passage des cours d’eau préfigurant la d’où l’on voit les anciennes terrasses Loire, l’Allier, la Sioule et le Cher, a constitué d’ et de Bressolles. Ils sont également ce que l’on appelle « les sables et argiles du visibles au sud du territoire, vers Besson, où Bourbonnais ». Le passage de ces cours d’eau la présence de vignes les signale. Argiles a créé une importante érosion* en Auvergne et alluvions ont ainsi créé la plaine fertile et des alluvionnements démesurés dans les de l’Allier tandis que les coteaux calcaires plaines du Bourbonnais, constituant sur de forment la transition entre la vallée et les très grandes épaisseurs le substrat de la sols plus anciens des plateaux, créant des Sologne bourbonnaise, exploité depuis le ruptures topographiques. XIXe siècle dans les nombreuses tuileries et briqueteries implantées dans cette zone. L’alternance de périodes tempérées et glaciaires durant le quaternaire a creusé les vallées des cours d’eau. L’évolution des débits et les déplacements de la rivière Allier ont créé des terrasses alluviales* disposées en gradins, plus ou moins prononcés, de part et d’autre de la plaine. Les plus hauts gradins

10 HISTOIRE D’UNE PROVINCE AU CŒUR DE LA FRANCE

UN TERRITOIRE AUX ENTITÉS époque essentielle dans l’évolution de PAYSAGÈRES SINGULIÈRES la société, marquée par de nombreuses La rivière, tant ressource nourricière que innovations telles que l’invention de voie de communication et ses plaines l’agriculture ou la domestication des fertiles ont favorisé très tôt une implantation animaux qui s’accompagnent d’une humaine dont témoignent des vestiges du extension démographique (-6000 à -2100 paléolithique supérieur retrouvés sur les environ). Ainsi, à , commune la plus rives de l’Allier et de la Loire. Bien que le explorée du département, plusieurs vestiges site emblématique de la préhistoire dans le témoignant d’une occupation humaine département de l’Allier se situe à quelques durant le 3e millénaire ont été retrouvés kilomètres du Pays d’art et d’histoire de depuis le XIXe siècle, comme des haches Moulins Communauté, à Châtelperron où se ou des poignards. Ces découvertes se sont trouve la grotte des Fées (- 35 000 / - 30 000 enrichies en 2010 et 2012 grâce au diagnostic ans), des communes telles qu’Avermes archéologique* et à la fouille précédant la ou Toulon-sur-Allier semblent avoir été création de la section à 2x2 voies à Avermes occupées dès cette période. Des silex ou et Trévol. Elles sont venues compléter encore des bifaces y ont été retrouvés. les connaissances sur les céramiques Le développement de l’archéologie du néolithique dont la forme témoigne préventive a permis de mieux documenter d’influences culturelles méridionales et le territoire à partir du néolithique. Même nord-orientales. si le repérage des habitats néolithiques Les fouilles d’Avermes ont été importantes reste délicat, des découvertes récentes concernant la période de l’âge de bronze ont apporté des informations sur cette (-2100 à -800 environ) avec la découverte de

11 Eduens Bourges

Bituriges Autun

Moulins

14. Limites des cités gallo- romaines des Eduens, des Territoire actuel du Bituriges et des Arvernes aux e er département de l'Allier II et I siècles avant J. C. (D’après Vincent Guichard, Lemovices Patrick Pion, David Lallemand, « Aux confins des cités arverne, Segusiaves Clermont-ferrand biturige et éduenne. Le Bourbonnais aux IIe et Ier siècles avant J. C. », Les âges du Fer en Arvernes Nivernais, Bourbonnais et Berry Vellaves oriental. Regards européens sur les âges du Fer en France, Bibracte, 2002).

vases ossuaires sur le site de La Couasse par frontières qui se devinent dans la toponymie exemple ou de vestiges de voie de circulation de certains lieux tel La Fin à Thiel-sur-Acolin, et d’enclos funéraire sur le site du Pont du site occupé depuis l’époque préhistorique Diable. Une nécropole* de l’âge du bronze et véritablement situé à l’intersection de a également été retrouvée à Toulon-sur- ces trois territoires. Le département de Allier, cette période étant surtout marquée l’Allier actuel correspond à un secteur sur le territoire du Pays d’art et d’histoire géographique assez éloigné des trois chefs- par les tumuli de Couzon et dans lieux de cité, que sont Augustonemetum lesquels des panoplies guerrières ont été (Clermont), Augustodunum (Autun) et découvertes. Deux autres tumuli ont été Avaricum (Bourges). Il est difficile de restituer retrouvés à Neuvy où des poteries et des l’extension de ces territoires gaulois et gallo- substructions* gallo-romaines ont été romains avec précision car il est probable identifiées sur le site de Vallières. que leurs limites ne correspondaient à un tracé précis que dans les régions les plus La période gallo-romaine est bien fréquentées et laissaient ailleurs la place connue. Les sites fouillés témoignent du à de large zone de confins. Les éléments syncrétisme* des cultures, caractéristique familiers retrouvés, comme la vaisselle ou de ce secteur qui depuis la préhistoire se les monnaies, mettent en évidence à la fois situe dans une zone de confins culturels. Il les productions caractéristiques de chaque est en effet à la limite des territoires antiques peuple et les échanges constants entre eux. des Eduens qui occupaient le nord-est de l’actuel département de l’Allier, des Bituriges Les fortifications de Château-sur-Allier, à l’ouest et des Arvernes au sud/sud-est, seules fortifications de l’époque gauloise

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15. 16. 17. Figurines en terre cuite de Toulon-sur-Allier

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conservées sur le territoire témoignent aussi extrêmement riches. D’autres ateliers de la volonté de contrôler un passage à de potiers de ce type ont été identifiés sur gué dans une zone stratégique, sur la voie la commune d’Yzeure dont les dernières reliant Limoges à Autun. Le murus gallicus fouilles laissent envisager qu’il s’agirait recouvert de terre est un marqueur fort du d’une agglomération secondaire gallo- paysage. romaine héritée d’un village de l’âge du fer, Le site de Toulon-sur-Allier est mais aussi à Thiel-sur-Acolin. Il faut signaler emblématique pour la période gallo- le rôle essentiel de l’archéologue auvergnat romaine. Grâce à un important réseau Hugues Vertet dans les travaux menés dans de voies de communication, routières et les années 1960 sur les ateliers de potiers de fluviales, on y produisait de façon semi- l’Allier et de Lezoux. industrielle des figurines moulées en terre cuite, des céramiques à vernis rouge, des Dans le cadre des travaux du contournement vases, assiettes et jattes exportés dans de Villeneuve-sur-Allier, un diagnostic tout le monde occidental dès le IInd siècle et des fouilles préventives ont été réalisés de notre ère. On peut mentionner pour en 2015 et ont abouti notamment à la Toulon le site du Larry découvert en 1856. découverte de fondations d’un sanctuaire Une série de fours est mise au jour, quantité rural gallo-romain sur le site des Clayeux, de vestiges de vases et de statuettes sont implanté sur une terrasse dominant la exhumés et font aujourd’hui partie du fonds rive droite de l’Allier. Les fondations et archéologique du musée Anne-de-Beaujeu structures excavées permettent de restituer de Moulins. Le site de La Forêt, ou encore le plan caractéristique d’un fanum du Haut- Le Larry dans la vallée de la Sonnante, sont Empire*. Il s’agit actuellement du seul

13 18. Limites des diocèses de Clermont, Bourges, Autun et Nevers.

fouillé dans son entier dans l’Allier. Cette depuis la préhistoire. Une pirogue d’un seul fouille a permis de retrouver du mobilier de tenant a ainsi été retrouvée en 2010, dans un qualité (figurines en terre cuite, céramiques, état de conservation exceptionnel. Longue amphores, verre, mobilier métallique, vases de 10,70 m, cette embarcation façonnée de stockage …). dans un unique fût de chêne évidé est Les recherches archéologiques se sont datée de 1137. Exceptée une pirogue de la beaucoup concentrées sur la vallée de période antique (entre 105 et 390 après. J.C), l’Allier, tout au long de laquelle subsistent toutes les autres ont été datées entre le Xe des villae gallo-romaines qui attestent et le XVe siècle. En 52 avant J.C, lors de sa d’une population relativement dense. Les conquête de la Gaule, César traverse l’Allier, découvertes sont ainsi nombreuses dans probablement vers Moulins. Les romains ce secteur depuis le XIXe siècle et les fouilles fixent alors les limites des territoires occupés d’Alfred Bertrand et de Gabriel Bulliot. par les différents peuples, fait notable car L’est du territoire est également riche en ces frontières vont être celles, au moins vestiges archéologiques, les conditions de dans leurs grandes lignes, des diocèses de conservation des plateaux de la Sologne Clermont, de Bourges et d’Autun jusqu’à la ayant été propices. Cependant, la plupart des Révolution. informations recueillies sur l’est du territoire du Pays d’art et d’histoire proviennent de la LA SEIGNEURIE DE BOURBON prospection aérienne. La documentation concernant les périodes La quinzaine de pirogues monoxyles mérovingienne et carolingienne est très répertoriées dans l’Allier atteste du rôle fragmentaire. Le territoire est partagé entre essentiel de la rivière comme axe de transport les comtés d’Auvergne, de Berry et d’Autun.

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19. Le château de Bourbon-l’Archambault (Cliché : mesvoyagesenfrance.com)

Plusieurs vigueries* se partagent le viguier de Deneuvre, est le premier membre territoire. En 778, une grande partie du futur connu de la famille de Bourbon. Bien que Bourbonnais est englobée dans le royaume les relations entre les premiers sires de d’Aquitaine qui disparaît en 877 lorsque son Bourbon, installés à Souvigny, et les moines dernier roi, Louis le Bègue, accède au trône clunisiens soient parfois conflictuelles, les de France. L’Aquitaine est morcelée en grands successeurs d’Aymard ne cessent d’être les commandements que Louis le Pieux, à la protecteurs du prieuré qui se développe fin du IXe siècle, regroupe en grande partie considérablement aux XIe et XIIe siècles. Il est pour en faire une principauté. Il possédait un fondement de la puissance des seigneurs notamment les comtés de Bourges et de Bourbon qui s’appuient également sur d’Auvergne. C’est sous son principat leur château de Bourbon-l’Archambault, qu’apparaît la seigneurie de Bourbon, dont la première mention apparaît dans un construction féodale ne correspondant acte de 953, pour étendre au fil du temps à aucune circonscription administrative leur domination et agrandir leur territoire antérieure et dont l’emplacement, aux aux dépens de leurs voisins. Moulins, qui confins de zones en déficit de pouvoir n’est au Xe siècle qu’une villa vendue en comtal, favorise le développement. Un 990 aux moines de Souvigny, devient le certain Aymard fait don en 915-920 de point d’appui de l’extension bourbonnaise sa villa de Souvigny, comprenant une en direction de l’Autunois et du Nivernais. église dédiée à Saint-Pierre, à l’abbaye de L’existence d’un château à Moulins n’est Cluny fondée quelques années plus tôt par toutefois pas signalée dans les documents Guillaume le Pieux, comte d’Auvergne et de avant 1049 et le premier acte connu d’un Berry et duc d’Aquitaine. Aymard, peut-être sire de Bourbon, daté de cette ville, ne

15 20. Vestiges du château des sires de Bourbon à Souvigny.

remonte qu’à 1214. En 1120, Archambaud mais également de puissance territoriale, VII succède à son père Aimon et épouse la Robert apportant avec lui le comté de belle-sœur du roi, Agnès de Savoie. Dès lors, Clermont-en-Beauvaisis. les rapports sont excellents entre la royauté et les sires de Bourbon. Archambaud VII fait LE DUCHÉ DE BOURBON preuve d’une constante fidélité à l’égard de En 1327, la seigneurie est érigée en duché. Louis VI et de Louis VII qu’il accompagne Louis, fils de Béatrix et Robert de Clermont lors de la IInd croisade. Sa petite-fille Mahaut devient le premier duc de Bourbon. Comme épouse Guy de Dampierre. En récompense son fils Pierre Ier, il est l’un des grands de sa lutte contre les anglais, le roi Philippe- officiers de l’entourage royal et continue la Auguste lui accorde l’importante seigneurie politique d’accroissement territorial de ses de Montluçon qui entre ainsi dans le ancêtres. Pierre Ier est tué à la bataille de domaine des Bourbons. Guy de Dampierre Poitiers en 1356. Le Bourbonnais a acquis dirige la conquête de l’Auvergne pour le à cette époque à peu près les limites qu’il compte du roi, de 1198 à 1213, les enclaves conservera jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. bourbonnaises en Auvergne se multiplient L’origine et la diversité de la seigneurie alors. Archambaud VIII puis Archambaud IX expliquent le caractère imprécis et mouvant meurent au service de Saint Louis. La petite- de ses frontières, sans cesse discutées et fille d’Archambaud IX, Béatrix de Bourbon, négociées entre les officiers des ducs et épouse en 1276 Robert de Clermont-en- les seigneurs voisins. Toutefois, le cœur du Beauvaisis, sixième fils du roi Louis IX. duché ne cesse d’être le secteur Moulins – Cette alliance se traduit pour la maison de Souvigny – Bourbon, où se concentrent les Bourbon par un accroissement de prestige organes décisionnaires.

16 GÉNÉALOGIE DES SIRES DE BOURBON

Aimard (vers 900-950)

Aimon Ier (950-959)

Archambaud Ier (après 954)

Archambaud II (985-1034)

Archambaud III dit du Montet (1034-1078)

Archambaud IV (1078-1095)

Archambaud V (1095-1096) Aimon II Vaire Vache (1097-1120)

Archambaud VI le pupille (1096-1115) Archambaud VII (1120-1171) meurt sans postérité Archambaud (mort en 1169) n’a pas été sire de Bourbon

Mathilde première dame de Bourbon Épouse (1171-1216)

Gaucher de Vienne Puis Gui de Dampierre (1196-1216)

Archambaud VIII (1216-1242)

Archambaud IX (1242-1249)

Mathilde ou Mahaut Agnès Dame de Bourbon (1262-1288) Dame de Bourbon (1242-1249) Béatrix Dame de Bourbon (1288-1310) Eposue Robert de Clermont, fils de St Louis

Louis Ier (1310-1342) Sire, puis duc de Bourbon en 1327

GÉNÉALOGIE DES DUCS DE BOURBON

Louis IX - Saint Louis

Robert de Clermont <> Beatrix de Bourbon

Louis Ier <> Marie de Hainaut Jacques Ier Ier duc de Bourbon en 1327-1342 Bourbon - la Marche - Vendôme

Pierre Ier <> Isabelle de Valois duc 1342-1356

Louis II <> Anne d’Auvergne duc 1356-1410 Branche dont descent Henri IV

Jean Ier<> Marie de Berry duc 1410-1434

Charles Ier<> Agnès de Bourgogne 1434-1456

Jean II Charles II Pierre II <> Anne de France, Marguerite de Bourbon duc 1456-1488 Le Cardinal fille de Loui XI duc 1488-1503 <> Philippe II duc de <> Jeanne de France, Savoie † 1483 sœur de Louis XI Suzanne <> Charles IIIde <> Catherine d’Armagnac Bourbon Montpensier, le Louis de Savoie <> Jeanne de Bourbon connétable dernier duc de - vendôme Bourbon 1505-1527

François 1517-1518 Le duché de Bourbon est officiellement rattaché à la Couronne de France en janvier 17 1532 21. La devise Espérance des ducs de Bourbon, détail du gisant de Louis II de Bourbon, église prieurale de Souvigny

Le principat de Louis II, marqué par la II le Bon, entre 1360 et 1366. Il n’y a pas eu guerre de Cent ans, constitue un tournant. sur le territoire de batailles importantes ni Il permet au duché de s’affirmer moralement d’opérations continues durant la guerre et administrativement, en installant ainsi de Cent ans. La seule chevauchée anglaise à Moulins en 1376 une Chambre des qui traversa la contrée fut celle du duc de comptes du Bourbonnais qui enregistre Lancastre en 1373, affectant notamment les ordonnances ducales, y compris celles Villeneuve-sur-Allier. Le duché souffre avant concernant le Forez et le Beaujolais. Le duc tout des incursions de routiers de toutes instaure un véritable Etat princier, avec une origines. Ainsi, en 1369 des routiers gascons politique indépendante. Le rôle politique de s’emparent du château de Belleperche, Louis II mérite également d’être souligné. A sur l’actuelle commune de Bagneux, et la mort du roi Charles V, il participe en tant retiennent prisonnière Isabelle de Valois, que beau-frère du roi au « gouvernement mère du duc Louis II et belle-mère du roi des oncles » qui assumait le pouvoir de fait, Charles V. Ce dernier mène alors durant pendant la minorité du jeune Charles VI. Sa trois mois le siège de Belleperche. Isabelle sœur, Jeanne de Bourbon, était l’épouse de Valois n’est cependant libérée que deux du roi Charles V. Depuis longtemps dans ans plus tard contre rançon. l’entourage du roi, les ducs de Bourbon accèdent pour la première fois aux Au XVe siècle, le duc de Bourbon devient responsabilités royales. Louis II a également un prince dont le territoire possède des été un négociateur du traité de Brétigny et institutions semblables à celles de la a été retenu prisonnier à Londres comme royauté. Les successeurs de Louis II ont otage en échange de la libération du roi Jean désormais un droit de regard et de contrôle

18 22

23

24

22. Louis II de Bourbon (Armorial d’Auvergne, Guillaume Revel, vers 1450)

23. Détail du gisant de Charles Ier de Bourbon dans la chapelle Neuve de l’église prieurale de Souvigny

24. Portrait d’Anne de France, détail du Triptyque de la Vierge en gloire attribué au peintre Jean Hey, cathédrale de Moulins

19 25. Duché de Bourbonnais et d’Auvergne à son apogée au début du XVIe siècle D’après Olivier Mattéoni, Servir le Prince. les officiers du duc de Bourbon à la fin du Moyen Âge. 1356- 1523, Paris, publication de la Sorbonne, 1998.

20 26

26. Le pavillon Renaissance du château des ducs de Bourbon à Moulins

sur la politique royale. Jean Ier meurt à la François Ier, il est l’un des plus grands bataille d’Azincourt, son fils Charles Ier lui seigneurs du royaume. Il entre toutefois en succède. Leurs principats sont avant tout conflit avec le roi de France. Cette lutte est marqués par le conflit entre les Armagnacs à replacer dans le contexte de la volonté et les Bourguignons. Ces derniers ravagent d’unification du royaume mise en place par les faubourgs de Moulins en 1412 mais les rois de France depuis près d’un siècle et cette lutte ne modifie pas la politique qui trouve son aboutissement sous le règne bourbonnaise. Les trois fils de Charles Ier de François Ier avec l’absorption des derniers et d’Agnès de Bourgogne prennent ensuite états princiers, en particulier le duché de la tête du duché. A Jean II, qui s’efforce de Bourbon. A la mort de Suzanne en 1521, un résister aux efforts de la royauté pour diviser long procès débute, faute d’héritiers directs, le duché de Bourbon, succède Charles entre Charles III et Louise de Savoie, mère de II, cardinal-archevêque de Lyon, qui se François Ier, qui réclame sa part d’héritage en désiste rapidement au profit de Pierre II. Ce qualité de descendante du duc Charles Ier de dernier, sire de Beaujeu, avait épousé Anne Bourbon. En 1523, un arrêt du Parlement de de France, fille du roi Louis XI. L’avènement Paris met tous les domaines en litige sous du nouveau couple ducal entraîne la séquestre. Le connétable* conclue alors restitution intégrale de l’Etat bourbonnais, une alliance avec l’envoyé de Charles Quint auquel s’ajoutent d’autres seigneuries. C’est dont le roi a connaissance. Le seigneur alors la période d’apogée du duché. bourbonnais Jacques II de Chabannes, maréchal de La Palice, est chargé d’arrêter A la mort de Pierre II, son épouse reçoit Charles III qui s’enfuit dans la nuit du 7 au l’administration de tous ses biens, en 8 septembre 1523, rejoignant les troupes attendant le mariage de leur fille unique de Charles Quint. En 1527, il est tué lors Suzanne. Cette dernière épouse en 1505 son du siège de Rome. Cette même année, ses cousin, Charles de Bourbon-Montpensier biens sont confisqués et les possessions qui devient Charles III, duc de Bourbon. ducales sont définitivement rattachées Nommé connétable* à l’avènement de à la Couronne au début de l’année 1532.

21 27. Fouilles archéologiques dans la nef de 27 l’église prieurale de Souvigny en 2002

L’APPORT DE L’ARCHÉOLOGIE expérimentale du pont-levis a été faite. POUR LA PÉRIODE MÉDIÉVALE Il s’agit actuellement du plus ancien retrouvé en France. Cette découverte a Les fouilles archéologiques se sont révélées été faite lors de travaux d’aménagement fructueuses pour la période médiévale. à et a abouti à la mise au jour Des travaux importants ont été menés sur de plusieurs enclos médiévaux identifiés les mottes castrales* qui se développent comme des maisons fortes. Dès le XIIIe aux Xe-XIe et XIIe siècles et s’implantent en siècle, Chevagnes héberge une importante Bourbonnais, comme les maisons-fortes, activité métallurgique, alliant l’extraction à l’écart des villages. Le territoire sur lequel du minerai de fer local à sa transformation. elles s’implantent est largement exploité. Cela confirme le rôle résidentiel, défensif et Ces buttes de terre de forme circulaire, économique de ces édifices seigneuriaux surmontées d’une plateforme sommitale et sur plates-formes circulaires entourées de entourées de profonds fossés, aujourd’hui fossés. Ces découvertes font de Chevagnes comblés, se retrouvent sur tout le territoire. un site essentiel pour le Moyen Âge en Si beaucoup ont été arasées, certaines sont Bourbonnais. bien préservées dans les zones forestières Dans beaucoup de communes, les fouilles notamment en Sologne telle celle des ont également permis de mettre au jour Maîtres-Jean à Gannay-sur-Loire, inscrite un grand nombre de nécropoles* à au titre des Monuments Historiques, ou sarcophages, situées autour des églises. encore dans le secteur de Lurcy-Lévis. En Cela est le cas à Auroüer où de nombreuses 2007, à Chevagnes, des vestiges de bois mottes féodales ont également été provenant d’un pont-levis qui permettait recensées. Il subsiste des ruines de la d’accéder à une motte sur laquelle se maison-forte de La Motte, au lieu-dit trouvait un château de terre et de bois, L’Arizolle qui fut le centre d’une seigneurie ont été retrouvés à l’emplacement des englobant de nombreux domaines. Dans douves. Datés par dendrochronologie* les années 1950, à Aubigny, des vestiges de l’hiver 1359/1360, une reconstitution d’une église du Haut Moyen Âge* ont été

22 28. Les gisants des saints Mayeul et Odilon reconsti- 28 tués et restaurés, église de Souvigny

retrouvés à côté du cimetière. Non loin, De 2009 à 2013, les travaux de à Limoise, une enceinte médiévale du réaménagement du bourg de Souvigny XIIIe siècle a été découverte. Occupant une ont été accompagnés de fouilles surface de 20 à 30 hectares, il s’agirait d’un préventives apportant des informations projet de fortification avorté. Il subsiste des inédites sur l’histoire de l’occupation du vestiges d’anciennes douves. site, principalement au Moyen Âge. Des tombes du IXe siècle ont été découvertes Les fouilles menées à Souvigny depuis sur le parvis de l’église Saint-Marc, ce qui le début des années 2000 ont conduit à incite les archéologues à localiser dans ce des découvertes majeures pour l’histoire secteur l’église Saint-Pierre mentionnée de la commune et du Bourbonnais. Le 2 dans les textes du début du Xe siècle. novembre 2001, une équipe d’archéologues D’importantes zones d’inhumation des Xe identifie l’emplacement des tombeaux des et XIe siècles couvrent une surface de plus deux saints abbés de Cluny, Mayeul et de deux hectares au cœur de la commune Odilon, inhumés à Souvigny autour de l’an et les tombes fouillées révèlent une grande Mil et qui ont fait la gloire du monastère. Au variété dans les pratiques funéraires et les fond de la fosse sont retrouvés les vestiges types de contenants dont la reconstitution des gisants sculptés. Les seuls témoins de est facilitée par la conservation des bois ces tombeaux étaient des reliefs conservés (cercueils monoxyles, coffrages en bois en depuis le XIXe siècle qui avaient reçu le bâtières, coffrages en bois trapézoïdaux, surnom de « tombeau de saint Mayeul », fosses associées à des couvrements en un mauvais plan et le dessin du monument bois …). A ce jour, le mode d’inhumation funéraire datant tous deux du XVIIIe siècle. en coffrage en bâtière n’est connu qu’à En 2009, à l’occasion de l’ouverture de la Souvigny, aucune autre découverte première tranche des travaux de l’église, comparable n’étant recensée en France. le monument funéraire reconstitué a été Des vestiges d’une porte de l’ancienne inauguré. Les deux gisants ont retrouvé leur enceinte de la ville ont été exhumés et place au centre de la nef de l’église prieurale. plusieurs portions de rues médiévales ont

23 29.La Mal-Coiffée à Moulins, ancien donjon du château des ducs de Bourbon 29

été étudiées. Les réfections successives des connaissance de l’histoire du duché du chaussées, du bas Moyen Âge à l’époque Bourbonnais. Il ne subsiste de l’ancien moderne, forment une stratigraphie dont château des ducs de Bourbon à Moulins l’épaisseur peut dépasser un mètre. Peu que la tour maîtresse, la « Mal-Coiffée », d’éléments ont été retrouvés concernant devenue prison à la fin du XVIIIe siècle, le bâti du fait que les zones explorées l’amorce du bâtiment de la grande salle et correspondent à des axes de circulation l’escalier d’honneur qui la desservait, ainsi déjà existants au Moyen Âge. Néanmoins, que le pavillon dit « Anne-de-Beaujeu ». des vestiges de plusieurs bâtiments ont été La première phase de fouille a concerné identifiés aux abords du château, certains la cour des Hommes, cour de promenade devaient dépendre de l’ancienne résidence de la prison. Deux grandes pièces ont été des Bourbons. mises au jour : la pâtisserie et l’office du château, chacune comprenant une Il faut également signaler que des cheminée monumentale de la fin du XVe éléments mobiliers protohistoriques siècle. Du mobilier et des blocs sculptés ont été découverts ainsi que des vestiges ont été découverts ainsi que des fragments témoignant de l’occupation du site d’éléments architecturaux. D’autres caves, durant le Haut Empire* et le Bas Empire*. une citerne et un escalier donnant sur la cour Dès l’époque mérovingienne, le site d’honneur ont également été dégagés. accueille des constructions sur poteaux et l’agglomération se développe durant la période carolingienne. Plusieurs vestiges de bâtiments carolingiens ont été explorés dont un qui pourrait avoir abrité un espace réservé à la préparation des aliments. D’autres fouilles d’envergure ont été menées de 2011 à 2013 sur le site du palais ducal de Moulins et contribuent là encore à la

24 La Charité

Ch. -Chinon Nevers

St-Pierre le-Moutier Decize

Bourbon L’Arch. MOULINS Hérisson

Montluçon

Guéret St-Pourçain

Evaux Gannat Aubusson Aigueperse

Enclaves royales

30. La généralité de Moulins vers 1700. (D’après A. Leguai, Histoire du Bourbonnais, 1974)

L’ANCIEN RÉGIME de l’Edit de Moulins, règlement portant sur (XVIe-XVIIIe SIÈCLE) le domaine royal. La reine Louise de Lorraine La confiscation des biens du connétable* meurt à Moulins en 1601. Dès 1523-1527, les en 1527 puis le rattachement du duché à institutions ducales avaient disparu avec le la Couronne marquent un tournant dans transfert à Paris des archives de la Chambre l’histoire politique du Bourbonnais qui, après des Comptes. Le territoire est intégré dans avoir été un état princier d’envergure, devient l’armature administrative et judiciaire de une simple province. Il devient le cœur de la la monarchie. Les officiers des ducs se sont généralité* de Moulins créée en 1587. Le adaptés à la nouvelle donne politique et se duché subsiste en tant qu’entité domaniale. sont placés sans difficulté sous l’autorité du Il fait partie du douaire* des reines mères, roi. Catherine de Médicis séjourne quelques mois Le Bourbonnais souffre épisodiquement à Moulins en 1566 avec le roi Charles IX et le des guerres de Religion. Pendant trente chancelier Michel de l’Hospital. Ce séjour ans, combats et pillages localisés affectent la aboutit à la signature de l’ordonnance de région, en particulier les édifices religieux. A Moulins qui limite notamment les pouvoirs Moulins, le château de Foulet devient le lieu des parlements et des gouverneurs, ainsi que de rencontre des protestants. Ces derniers

25 31 32

31. Tour, XVIe siècle, seul vestige du château de Foulet à Yzeure

32. Le pont traversant l’Acolin à Chevagnes

forment probablement une population lors de la venue de Catherine de Médicis et assez nombreuse puisque le roi Charles IX sous l’égide de Michel de l’Hospital, mais nomme en 1562 Jean de Marconnay, sans succès. Dès la promulgation de l’Edit seigneur de Montaret, gouverneur du de Nantes, une liberté de culte est accordée Bourbonnais. Homme violent et brutal, il aux protestants dans plusieurs villes du fait dès son arrivée exécuter deux artisans Bourbonnais, dont Moulins. considérés comme des chefs locaux L’arrivée de la duchesse de Montmorency protestants. Il expulse également des à Moulins suite à la condamnation et habitants de Moulins suspectés d’hérésie. la décapitation de son époux et son On peut noter comme faits notoires durant attachement à l’ordre de la Visitation qu’elle ces sombres années, l’attaque de la ville de intègre en 1641, s’inscrit dans un contexte Moulins en 1562 par une armée protestante de renouvellement religieux du territoire. conduite par les seigneurs de Saint-Aubain Elle finance la reconstruction du monastère et de Poncenat. Les couvents des faubourgs de la Visitation de Moulins et de sa chapelle de Moulins mais aussi le prieuré d’Yzeure et dans laquelle elle fait installer un mausolée l’abbaye de Saint-Menoux ont également à la gloire de son époux et dont le chœur été pillés lors de cette attaque qui aboutit des religieuses conserve toujours son au massacre par les moulinois de deux plafond peint du XVIIe siècle. On retrouve protestants notoires, le seigneur de Foulet les chartreux à la ferme de Montmalard à et l’avocat Brisson. En 1566, une tentative , où ils exploitent les vignes et les de réconciliation entre les chefs des deux mines d’antimoine, ou les augustins au partis représentés par le duc de Guise et prieuré Notre-Dame de Lorette du Veurdre. l’amiral de Coligny se déroule à Moulins, Aux XVIIe et XVIIIe siècles, le Bourbonnais est

26 33. La chapelle 33 de la Visitation à Moulins

un territoire où la tranquillité règne, loin pont permettant de traverser l’Allier. des frontières avec les pays étrangers. Le A la même période, Octave Trésaguet territoire est avant tout agricole, l’intendant de l’Isle est chargé de la construction du de Pommereu écrit en 1665 que « la richesse pont de Chevagnes, traversant l’Acolin, n’y est pas grande, il n’y a pas aussy de à l’occasion de l’aménagement de la pauvreté considérable, on y vit aisément ; nouvelle route allant de Moulins à Autun. il s’y fait commerce d’huiles, de bleds et de Le successeur de Louis de Bernage, Amable bestiaux [sic] ». de Bérulle, ordonne l’ouverture de la route En 1640, la levée d’une taxe des aisés qui deviendra la Nationale 7 et fait construire provoque des troubles à Moulins qui un château d’eau rue de Bourgogne à débutent par l’assassinat de la personne Moulins. Le comblement des fossés et leur chargée de recouvrer cet impôt. Les deux aménagement en cours est à replacer dans meneurs sont arrêtés et exécutés mais le le cadre de ces embellissements des villes. mécontentement perdure plusieurs années. Jacques de Bercy fait relier la porte de Paris A l’instar des guerres de Religion, la Fronde à l’Allier par un large boulevard, les cours de touche peu le Bourbonnais. Jusqu’à la Bercy. Souvent, ces grands projets ne sont Révolution, le Bourbonnais reste en dehors malheureusement pas achevés. Jacques de des conflits qui agitent le royaume. L’activité Flesselles fait édifier dans la capitale de la culturelle perdure. Les commandes, dès la fin province, la porte de Paris mais la porte de du XVIIe siècle, concernent essentiellement Lyon qui devait lui faire pendant n’a jamais l’urbanisme et les embellissements des été construite. Le fait que les intendants villes, notamment Moulins. Les intendants ne restent que peu de temps à Moulins, le qui exercent l’autorité royale sur l’étendue Bourbonnais étant un territoire dont on de la juridiction sont à l’origine de ces avait la charge en début de carrière avant grands projets. Jean-Louis de Bernage d’aller exercer des responsabilités dans occupe cette fonction entre 1744 et 1756. des généralités* plus importantes, peut Il est à l’initiative de la construction par expliquer l’inachèvement de nombreux l’ingénieur Louis de Régemortes du chantiers.

27 35

34. Le logement du prieur, abbaye de Souvigny, XVIIe - XVIIIe siècles

35. L’église de Saint-Menoux, un des seuls vestiges du monastère des 34 bénédictines détruit durant la période révolutionnaire

titulaires d’offices royaux et faisaient LA PÉRIODE RÉVOLUTIONNAIRE partie de l’Assemblée provinciale ou des Le Pays d’art et d’histoire de Moulins assemblées départementales de 1788. Communauté et la province du Bourbonnais Dans la Constitution civile du clergé votée en général, n’ont pas véritablement connu par l’Assemblée constituante le 12 juillet les troubles qui ont précédé la réunion 1790, est également prévue la création d’un des Etats généraux de 1789. Pourtant, diocèse par département, Louis XVI avait comme dans tout le royaume, la situation par ailleurs décidé avant la Révolution de la économique et sociale n’est pas bonne, création de l’évêché de Moulins. L’évêque suite notamment à plusieurs années constitutionnel choisi pour le nouveau de mauvaises récoltes. Des cahiers de diocèse de Moulins est l’abbé Laurent, doléances sont rédigés et les représentants député à la Constituante. élus participent aux États généraux. Un L’installation du nouveau régime est décret publié le 26 février 1790 met en place accueillie passivement par la population les départements. Parmi eux figure celui bourbonnaise et les problèmes du temps de l’Allier dont les limites sont définies au n’intéressent finalement qu’une minorité terme de négociations conduites avec les de bourgeois installés dans les villes les députés des provinces voisines. Moulins, plus importantes. C’est ainsi qu’est créée à capitale de l’ancienne généralité* et ville la Moulins, en 1791, une Société des Amis de plus peuplée, est choisie comme chef-lieu la Constitution. Les nouveaux dirigeants du de la nouvelle entité administrative. Les département sont de tendance modérée, ne hommes élus au directoire du département déployant pas un grand zèle révolutionnaire. et aux directoires de district ne sont pas Toutefois, une centaine de prêtres des hommes nouveaux. La plupart d’entre réfractaires ont dû quitter le département eux avaient été, avant la Révolution, des et les couvents sont fermés. Les prêtres

28 36

36. L’église Saint-Pierre de Moulins, ancien couvent des carmes

réfractaires n’ayant pas fui sont arrêtés et amenés à Lyon sont guillotinés. Il nomme regroupés dans l’ancien monastère des également de nouveaux fonctionnaires en clarisses de Moulins avant d’être envoyés remplacement de ceux qu’il avait révoqués. sur les pontons de Rochefort. Les gisants de Plusieurs communes sont débaptisées : l’église de Souvigny font partie de la vague Lurcy-Lévis devient Lurcy-le-Sauvage et de destruction menée en 1793, année de la Toulon-sur-Allier devient Mont-la-Loi. Terreur durant laquelle les troubles ont été Les administrateurs du département, « pour les plus importants. Le séjour de Fouché est faire oublier leur relative modération », ont lourd de conséquences, même si son passage appliqué avec sévérité les mesures décidées n’a été que de courte durée. Son attitude contre les monuments. La vente des biens antireligieuse et sa visite se traduisent nationaux a pris une grande ampleur dans par la mise en place d’un Comité central le département au vu des 150 communautés de Surveillance à Moulins, en lien avec les religieuses qui y étaient installées. Lors du comités de districts et chargé de poursuivre séjour de Fouché dans l’Allier, qui impose les adversaires du régime. Ce Comité mène une intense activité destructrice, beaucoup une violente politique anti-religieuse et d’objets religieux sont détruits lors de la procède à des arrestations arbitraires. fête civique organisée le 29 septembre 1793 L’évêque Laurent démissionne et renonce au à Moulins. sacerdoce avant de s’installer au domaine Après cette période fortement troublée, le de Mibonnet à Toulon-sur-Allier. Après le consulat est accueilli sans protestation et le passage de Fouché, trente-trois suspects premier préfet s’installe à Moulins en 1800.

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37. Le château de la famille de Tracy à Paray-le-Frésil 38 38. Buste d’Antoine Destutt de Tracy par David d’Angers, 1837, Galerie David d’Angers, Angers (cliché Wikipédia)

« idéologistes » méprisés par Napoléon Ier, ce LES XIXe ET XXe SIÈCLES dernier le nomme comte d’Empire en 1808. Les régimes politiques qui se succèdent Il entre à la Chambre des pairs en 1814. Son au XIXe siècle, jusqu’à l’avènement de la IIIe idéologie, fondée sur le rationalisme, a eu République, impactent finalement assez une véritable influence sur les philosophes peu le Bourbonnais. Quelques agitations et économistes du XIXe siècle ainsi que sur à Moulins en 1815 sont à signaler, mettant son fils, Victor Destutt de Tracy, député de aux prises bonapartistes et royalistes et le l’Allier sous tous les régimes politiques printemps 1817 est troublé dans certains du XIXe siècle, jusqu’à l’avènement du IInd cantons, notamment ceux de Souvigny, Empire. Ce dernier lutte pour l’abolition de Bourbon-l’Archambault et Lurcy-Lévis. l’esclavage, contre l’hérédité de la pairie* Cette « Insurrection de la faim » a été causée ou encore contre la conquête de l’Algérie. par une disette importante et a été suivie A la mort de son père, il hérite du domaine d’arrestations et de condamnations. familial à Paray-le-Frésil et mène un travail La famille de Tracy, implantée à Paray-le- essentiel d’irrigation et d’assèchement des Frésil en Sologne bourbonnaise, donne à terres ingrates de la Sologne bourbonnaise. l’Allier plusieurs représentants politiques de Le premier journal politique bourbonnais est renom. Antoine Destutt de Tracy représente publié en 1829 : La Gazette constitutionnelle la noblesse bourbonnaise aux Etats généraux de l’Allier et sous la Monarchie de Juillet, de 1789 avant d’être l’un des premiers de chaque courant a sa presse. Durant la son ordre à se rallier au tiers-état. Il exerce Seconde République, le Bourbonnais différentes fonctions politiques puis est Charles-Gilbert Tourret devient ministre nommé membre de l’Instruction publique de l’agriculture et du commerce après avoir en 1799, sénateur durant le Consulat et été préfet de l’Allier. Son nom a été donné au le Premier Empire. Bien que chef des lycée agricole de Moulins-Neuvy.

30 39. Mgr de Dreux-Brézé, évêque du diocèse de Moulins de 1850 à 1893, photographie de Nadar (cliché Bnf)

successeur, Monseigneur de Dreux-Brézé, il est un légitimiste déclaré et cherche l’appui de grands propriétaires terriens qui regrettaient eux aussi la monarchie légitime. Cela conduit à un anticléricalisme 39 latent dans les campagnes bourbonnaises, caractérisé plus par sa méfiance que par sa virulence. Cette situation est à replacer au Une violente insurrection a lieu en 1851, sein du phénomène du métayage, ancien à l’appel des notables républicains pour et particulièrement ancré en Bourbonnais. la défense de la Constitution qui s’est La lutte ouverte de Monseigneur de Dreux- suivie d’une violente répression avec 852 Brézé envers le régime de Louis-Napoléon arrestations. Bonaparte est bien connue. Il est un des deux Le premier lycée de France ouvre à seuls prélats de France ayant fait publier Moulins en 1803 et la première Ecole dans son diocèse, malgré l’interdiction Normale en 1833. Dès le Second Empire, les gouvernementale, l’encyclique* Quanta écoles s’ouvrent et les premières protections Cura (Avec quel soin) du pape Pie IX. sociales s’esquissent. Le rétablissement du diocèse conduit à l’agrandissement de l’ancienne collégiale L’un des faits essentiels durant la de Moulins, devenue cathédrale. Sous Restauration est le rétablissement du le Second Empire, Jean-Baptiste Lassus diocèse de Moulins. L’évêque Laurent, édifie l’église du Sacré-Cœur à Moulins et contraint à la démission en 1793, n’avait pas de nombreuses églises sont démolies sur eu de successeur. En 1818, le gouvernement le territoire pour être remplacées par des de Louis XVIII nomme Monseigneur de Pons édifices néo-romans ou néo-gothiques et érige l’Allier en diocèse indépendant. construits par des architectes en vogue de Cependant, l’installation du nouvel évêque l’époque tels que les Moreau père et fils, n’a lieu qu’en 1823. Tout comme son Louis Esmonnot, Emile Dadole ou Michel

31 40. Porte des anciennes usines Baudin de Lurcy- 40 Lévis, maison du Pays de Lévis

Mitton. Ces mêmes architectes construisent à . 150 personnes travaillaient à ou réhabilitent dans le même temps quantité l’usine Baudin à Lurcy-Lévis au XIXe siècle de belles demeures et châteaux, entourés pour y fabriquer des sabots exportés dans de vastes parcs et jardins. L’épiscopat de le monde entier. Une usine de placage de Monseigneur de Dreux-Brézé, entre 1849 et meubles était également installée dans 1893, a été essentiel aussi bien sur le plan la commune qui comptait jusqu’à 4000 religieux que du point de vue social. Il offre habitants à la fin du XIXe et au début du XXe ainsi sa première messe dans le diocèse aux siècle. ouvriers de l’Allier et participe à la création d’écoles et de pensionnats. L’avènement de la IIIe République confirme la déroute politique du Conservatisme Avec le Second Empire, les industries bourbonnais qui perd ses représentants minières et métallurgiques entament leur au niveau national. C’est alors du bassin véritable essor. L’ouest du département de industriel de Montluçon et l’Allier, plus que le territoire du Pays d’art que sont issus les nouveaux représentants, et d’histoire de Moulins Communauté, est notamment Christophe Thivrier, ouvrier marqué socialement et patrimonialement élu premier maire socialiste ainsi que député par l’industrialisation. Il faut toutefois socialiste de l’Allier. mentionner l’importance de la verrerie de L’essor économique se dessine à partir de Souvigny qui profitait des mines de charbon la seconde moitié du siècle avec le premier de la vallée de la Queune et des sables de réseau routier départemental, le télégraphe l’Allier et employait encore 200 personnes et les débuts du chemin de fer qui supplante en 1975, ainsi que le bassin industriel de progressivement la navigation fluviale sur Lurcy-Lévis. L’industrie de la céramique l’Allier et provoque le déclin des canaux. s’est développée au XIXe siècle dans ce Encore active jusqu’au milieu du XIXe siècle, secteur, sous l’impulsion du marquis de la corporation des mariniers disparaît à Sinéty qui ouvrit une porcelainerie dans partir des années 1880. A partir de 1884, le son château de Lévis, par la suite transférée réseau principal est complété par le réseau

32 41. Officiers allemands contrôlant le passage du pont Régemortes à Moulins durant la Seconde Guerre mondiale (Archives départementales de l’Allier, 996 W 59) 41

de « chemin de fer économique » avec des chevaux dont témoigne la création notamment la ligne Moulins / Cosne-d’Allier. du premier hippodrome de Moulins en L’agriculture se modernise 1850 et l’arrivée d’entraineurs anglais qui progressivement sous l’impulsion de s’implantent notamment à Bagneux, au grands propriétaires tels que les familles haras de Ray créé par le vicomte d’Harcourt. de Tracy, Rambourg ou de Vaulx. De gros Le Bourbonnais connaît, au XIXe siècle, un travaux d’amélioration des terres sont renouvellement intellectuel qui marque entrepris en Sologne, la race charolaise le début de l’attachement sentimental à prend la tête des troupeaux bovins, les ce territoire, entretenu par les sociétés cultures du blé, de l’avoine, de la pomme savantes et les associations de Bourbonnais de terre, des betteraves fourragères, de expatriés. Cette renaissance littéraire la vigne qui n’échappe pas à la crise du est liée, avec un décalage de quelques phylloxera au XIXe siècle, s’étendent et années, au mouvement romantique. Les remplacent celle du seigle. A Moulins, se principaux protagonistes en sont Achille développent les concours agricoles, les Allier et l’imprimeur Desrosiers, tous deux foires, les marchés auxquels participent les à l’origine de la publication de L’Ancien paysans des environs. En 1820, la Société Bourbonnais (parution en 1833 et 1837), de l’Agriculture est reconstituée après avoir ainsi qu’Emile Guillaumin qui publie La disparu durant la période révolutionnaire. Vie d’un simple en 1904, fresque sociale Ces améliorations ont de nettes sur le monde paysan, ou encore le poète et répercussions sur la situation sociale des romancier Charles-Louis Philippe. paysans bourbonnais encore très soumis à la dépendance des grands propriétaires La guerre de 1914-1918 éprouve fortement fonciers et surtout des fermiers généraux. le territoire, l’Allier comptant plus de 15000 Le premier syndicat paysan est fondé morts. à Bourbon-l’Archambault en 1905. Le Le 18 juin 1940, les troupes allemandes Bourbonnais est un territoire également entrent à Moulins. Le département de marqué par l’élevage et l’entrainement l’Allier est coupé en deux, la ligne de

33 42. La ligne de démarcation dans le département de l’Allier, Le Progrès, édition spéciale de , 13 octobre 1940 (Archives 42 départementales de l’Allier, 996 W 59)

démarcation traverse les communes de politique agricole commune, ont provoqué Thiel-sur-Acolin, Toulon-sur-Allier, Chapeau, une révolution dans le monde agricole et Moulins, Villeneuve-sur-Allier. La ville de modifié les paysages du territoire avec la Moulins, préfecture du département, est destruction de près de 70% des haies du elle-même coupée en deux, séparée de son bocage bourbonnais en 50 ans. faubourg de La Madeleine resté en zone libre. Le pont Régemortes, au-dessus de Dans les années 1950-1960, s’implantent l’Allier, est un point de passage névralgique. d’importantes entreprises telles que La Mal-Coiffée, ancien donjon du château Thomson à Moulins qui fait travailler des ducs, devient dès 1940 une prison jusqu’à 900 salariés ou encore l’usine Potain allemande, « prison raciale, prison politique, à Avermes qui embauche 250 personnes prison militaire » comme l’explique Yvonne- en 1970. Quant à l’usine de serrurerie JPM Henri Monceau, érudite locale juive qui n’y ouverte en 1970 à Moulins, elle embauche a séjourné que quelques jours grâce aux 350 personnes au début des années 2000. relations de son mari chirurgien. A la ferme Cependant, le territoire du Pays d’art et des Mayences, sur la commune de Chapeau, d’histoire est plus fortement marqué par subsiste une stèle érigée en mémoire des les activités tertiaires que par l’industrie. Il militaires français et de trois civils fusillés faut signaler l’importance du centre d’essai lors d’une attaque le 5 septembre 1944. Potain à qui conçoit les prototypes Accusés d’être des maquisards, ils avaient des grues Potain, expédiés après validation été pris à parti par les troupes allemandes. dans le monde entier. Il s’agit d’un site Le domaine est pillé ce jour-là. Après la international, axé sur la recherche et le Libération, le département est marqué par développement. une évolution politique notable avec l’essor du parti communiste. Au cours du XXe siècle, la mécanisation et l’intensification des pratiques agricoles, les remembrements* auxquels s’ajoute la

34 PORTRAIT PATRIMONIAL DU PAYS D’ART ET D’HISTOIRE

L’ARCHITECTURE MÉDIÉVALE devenus ducs, choisissent à la fin du XIVe L’architecture médiévale constitue un siècle l’église prieurale comme nécropole*. patrimoine de premier plan. Berceau de la Après la mort à Souvigny de Mayeul, dynastie des Bourbons qui ont été durant quatrième abbé de Cluny, le 11 mai 994, puis plusieurs siècles les protecteurs des moines celle de son successeur, Odilon, le 1er janvier clunisiens implantés à Souvigny, le territoire 1049, l’église devient rapidement un lieu regorge d’églises médiévales, de donjons et important de pèlerinage et le monastère de maisons-fortes. est florissant. La bible de Souvigny, manuscrit enluminé sur parchemin de la fin Les églises et prieurés du XIIe siècle, en est un précieux témoignage, Si Moulins abrite l’ancien château des ducs de de même que les gisants des ducs et de Bourbon, dont subsiste le donjon surnommé leurs épouses, conservés dans les chapelles la Mal-Coiffée et le pavillon renaissance, dites « Vieille » et « Neuve » de la prieurale. Souvigny est un site emblématique. La Le monastère est l’une des cinq principales donation d’Aymard, premier ancêtre connu fondations dépendant de l’abbaye des Bourbons, aux moines de Cluny au bourguignonne de Cluny. L’église prieurale début du Xe siècle, concerne la Villa avec est un édifice remarquable de l’architecture son église de Souvigny. Les sires de Bourbon gothique clunisienne. Des remaniements s’y implantent et il subsiste des vestiges du importants ont été effectués au sein du château des XIVe et XVe siècles. Les sires se monastère aux XVIIe et XVIIIe siècles avec la font alors enterrer au couvent des cordeliers reconstruction des logements des moines de Champaigue, à quelques kilomètres du et du prieur, la construction de la porterie bourg, jusqu’à ce que leurs successeurs, ou encore de la sacristie réputée pour son

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43. L’église prieurale de Souvigny (cliché musée de Souvigny)

43 44. Détail des boiseries de la sacristie de l’église de Souvigny

ensemble de panneaux sculptés de la fin du Yzeure où l’église, avec ses chapiteaux* XVIIIe siècle, du sculpteur dijonnais Marlet. ornés et son portail du XIIe siècle, est à la fois Face à la prieurale, subsiste l’ancienne prieurale et paroissiale. Quant au prieuré église Saint-Marc édifiée au XIIe siècle qui de Moladier à Besson, dont il subsiste une figure sur la première liste des monuments partie de l’escalier à vis et le logis prieural à historiques dressée par Prosper Mérimée pans de bois, il dépendait de l’abbaye Saint- de 1840. Elle était séparée de la prieurale Gilbert de Neuffontaines implantée à Saint- par le cimetière. Treize paroisses du Didier-La-Forêt, dans le sud du département territoire du Pays d’art et d’histoire étaient de l’Allier, puis plus tard, du couvent des placées sous la dépendance du prieuré minimes de Moulins. de Souvigny : Bresnay, Besson, Chemilly, Bressolles, Marigny, Coulandon, Avermes, L’architecture castrale médiévale est Limoise, , Le Veurdre, mais directement liée à la présence des ducs de aussi les moines du prieuré de Montempuis Bourbon. A partir du Xe siècle, les donjons à Saint-Parize-en-Viry et les chanoines de la implantés sur des mottes, centres d’une collégiale de Moulins. Mis à part Bressolles, seigneurie, se retrouvent sur tout le territoire. Avermes et Limoise où les églises ont été Leurs possesseurs devaient protéger la reconstruites au XIXe siècle, ces communes population environnante et possédaient conservent leur église médiévale. Dans un certain nombre de prérogatives sur leur chacune d’elle se devine l’empreinte de domaine : droit de justice, droit de lever une Cluny, notamment à travers les éléments armée, impôts divers … La motte principale sculptés comme les portails avec leurs était entourée de mottes secondaires voussures* très ornées ou les chapiteaux*. où se trouvaient les granges, les fours, Un, voire deux édifices de l’époque les installations artisanales. Le long de médiévale sont ainsi conservés dans plus l’Allier et de la Loire, les mottes castrales* de la moitié des communes du territoire. permettaient de surveiller les points de D’autres paroisses dépendaient de l’abbaye passage et dominaient souvent d’anciens bénédictine de Saint-Menoux, comme itinéraires romains. Tenir un ou plusieurs

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45. L’église Saint-Marc de Souvigny 46. L’église de Coulandon

47. L’église de Marigny 48. Le chœur de l’église du Veurdre

49. Le prieuré de Montempuis à Saint-Parize-en-Viry 50. Le portail de l’église d’Yzeure

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51. Le château de Fourchaud à Besson 52 52. Le château des Bordes à Couzon péages était un droit féodal très disputé. les variantes apparaissant dans la forme et L’exemple le plus marquant est celui du l’agencement des tourelles ou des pavillons. domaine du Péage, à Thiel-sur-Acolin, Le donjon du château de Moulins, la Mal- ancien camp romain devenu le siège d’un Coiffée, mais aussi le château des Bordes fief* qui comportait une maison forte. Un à Couzon appartiennent à cet ensemble droit de passage y était perçu. Au XVIIe siècle, caractéristique. D’autres châteaux et le château est remplacé par des bâtiments maisons fortes, certes moins monumentaux en brique entourant une cour carrée. mais présentant des éléments architecturaux Le développement du duché et de la cour similaires, se retrouvent sur le territoire. de Moulins entraîne une augmentation Tous se caractérisent par leur logis flanqué sensible du nombre d’officiers ducaux. Les de tours et desservi par une tour d’escalier, charges moins importantes reviennent aux des douves souvent comblées aujourd’hui, bourgeois, notamment ceux de Moulins, qui des fenêtres à meneaux*, des décors voient par cette fonction le moyen d’obtenir d’arcs en accolade* ou de tympans à un possible anoblissement. Les officiers se pinacles et crochets*. Certains conservent voient offrir des fiefs* en récompense des encore leurs cheminées monumentales. services rendus. Si aucun donjon en bois sur On peut mentionner les châteaux de Chéry, motte ne subsiste, le Pays d’art et d’histoire de la Matray, de la Viveyre et de Besnay à regorge de manoirs, châteaux et maisons Souvigny, de Ritz à Besson, des Foucauds fortes qui ont succédé à ces édifices aux XIVe à Chemilly, des Ecossais à Bresnay, de et XVe siècles essentiellement. L’un des sites Certilly à Coulandon, de Coudray au emblématiques est le château de Fourchaud Veurdre, le château de Pouzy à Pouzy- à Besson dont la première mention remonte Mésangy ou encore du Plessis et d’Autry à à 1351 et qui appartient à un ensemble très Saint-Léopardin d’Augy ou de Champaigue répandu en Bourbonnais de donjon-logis. à Marigny. Posséder une maison forte est Tous présentent la même monumentalité, alors un symbole de pouvoir et de noblesse un aspect compact et élancé, des toitures et leurs fortifications, aménagées avec pentues qui couvrent d’immenses combles, l’autorisation des ducs, sont là pour le

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53. Le château de Ritz à Besson 54. Le château des Foucauds à Chemilly

signaler. La motte et son château ont ainsi entre la Loire et le Val d’Allier, on en retrouve rapidement perdu leur fonction militaire sur les deux versants de l’Allier. Plusieurs mais ils ont gardé le symbole d’une emprise d’entre elles ont fait l’objet de restaurations économique sur le territoire environnant. effectuées par les propriétaires privés ou Des vestiges de fortifications des villes publics. C’est le cas de la maison du bailli à sont également conservés, comme les tours Bressolles, de la maison dite « Henri IV » à encore visibles de Moulins, de Souvigny et Neuilly-le-Réal, de celle du Treuil à Paray-le- du Veurdre. Frésil ou encore de la grange de la Motte à Toulon-sur-Allier. D’autres sont en cours de Les maisons à pans de bois conservées restauration comme les maisons du hameau sont des témoignages essentiels du de Neuglize à Bessay-sur-Allier. patrimoine civil médiéval. Parmi les plus exceptionnelles, on peut mentionner celles LES BELLES DEMEURES DE de Mimorin à Lusigny, la maison Charbonnier L’ÉPOQUE MODERNE à Chevagnes, le logis dit « Henri IV » à Neuilly- Tout au long de la Renaissance puis au le-Réal, la maison du bailli dans le bourg de cours des XVIIe et XVIIIe siècles, les châteaux Bressolles et celle de Longvé également à sont réaménagés pour devenir des lieux de Bressolles et dont les terres appartenaient plaisance. Les fortifications disparaissent et aux moines de Souvigny. les pavillons d’angle se substituent aux tours d’enceinte. En général, les douves subsistent Les architectures à pans de bois et on continue à trouver des pigeonniers. Les médiévales et d’époques postérieures, sont communs qui viennent clôturer les cours particulièrement présentes en Sologne rappellent les anciennes basses-cours et bourbonnaise où ce type de constructions murs d’enceinte, comme aux châteaux de a été particulièrement employé du fait de la Pomay et d’Orvalet à Lusigny, à Mirebeau à présence abondante de bois pour la structure Trévol ou au château du Fresne à Neuilly-le- et de terre pour le torchis puis les briques. Réal. L’un des plus imposant est sans doute Ces édifices se concentrent essentiellement celui d’Avrilly à Trévol, dont il subsiste les

39 55. Le château des Ecossais à Bresnay

56. Le château de la Matray à Souvigny

57. Détail des pans de bois de la galerie de la maison du bailli à Bressolles

55 58. Le logis Henri IV à Neuilly-le-Réal

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59. Le château de Pomay à Lusigny 60. Le château du Fresne à Neuilly-le-Réal

douves et le pavillon d’entrée du XVe siècle. caractérisent ainsi par leur aspect imposant Il a été beaucoup remanié au XVIIe siècle comme le château de Lévis à Lurcy-Lévis puis au XIXe siècle. Le nombre important construit en 1655 pour la famille Lévis qui d’officiers du roi présents à Moulins, capitale obtient la création du duché de Lévis en de la généralité*, conduit à la construction 1723. On peut aussi mentionner le château de multiples gentilhommières telles celles de Saint-Augustin à Château-sur-Allier, de Demoux à Trévol, de Magny à La Chapelle- propriété de la famille Cadier de aux-Chasses, des Guilleminots à Marigny qui fait reconstruire le château en 1730, ou du château des Chaulets à Souvigny celui de Seganges à Avermes avec sa construit à la fin du XVIIIe siècle. On remarque façade renaissance où a séjourné durant l’architecture harmonieuse de l’édifice, avec quinze mois Anne de Bretagne en 1494- ses proportions équilibrées, son avant-corps 1495, celui de Dornes construit en 1547 central et l’utilisation du grès en décoration. par Florimond Fouet de Dornes de style Les demeures de Montgazon à Marigny, des renaissance avec sa loggia de trois arcades Positeaux à Paray-le-Frésil ou du Pavillon à ou celui de la Cour-en-Chapeau à Chapeau Lusigny sont plus modestes. réaménagé au XVIe siècle. Le château du Riau à Villeneuve-sur-Allier, transformé au L’édifice souligne la fonction sociale du XVe siècle en une luxueuse demeure par commanditaire mais on y recherche aussi Nicolas Popillon, grand argentier du duc le confort et l’intimité. En 1623, Pierre Jean II de Bourbon, puis réaménagé aux Le Muet développe l’idée de normes XVIIe et XVIIIe siècles, témoigne du prestige hiérarchiques dans son traité La Manière des sites médiévaux. L’origine sociale des de bastir, pour toute sorte de personne et commanditaires évolue tout au long des XVIIe l’abbé Laugier, au siècle suivant, insiste sur et XVIIIe siècles, l’ancienne noblesse cédant le fait que « pour les maisons de particuliers, progressivement sa place aux officiers, la bienséance veut que leur décoration à la bourgeoisie enrichie, aux fermiers soit proportionnée au rang et à la fortune généraux qui rachètent progressivement des personnes ». Certaines demeures se les domaines. C’est ainsi que Gilbert Tortel,

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61. La façade arrière du château d’Avrilly à Trévol 62. Le château des Chaulets à Souvigny

marchand fermier au château de la Presle Montchenin à Chevagnes, le château de à Coulandon et aux Melays à Neuvy, fils Paray à Bessay-sur-Allier, de Bagueux et d’un « bourgeois de Bressolles », achète le de Panloup à Yzeure, de La Fin à Thiel-sur- domaine des Melays en 1772 et prend le nom Acolin, du Fresne et de l’Ecluse à Neuilly-le- de Tortel des Melays. Réal et bien d’autres, sont caractéristiques des constructions bourbonnaises de Le château est le centre d’un domaine rural. l’époque moderne et se concentrent en A la fin de l’été et au début de l’automne, les Sologne bourbonnaise, terre extrêmement propriétaires y séjournent pour surveiller les argileuse. travaux des champs, chasser et poursuivre, Ainsi, les châteaux et grandes demeures de entre châtelains d’un même voisinage, les l’époque médiévale, réaménagés au fil des sociabilités urbaines. C’est le cas du château siècles, se concentrent sur la rive gauche de de Charnes à Marigny, des Girodeaux à l’Allier tandis que les nouvelles constructions Chemilly, de Patry à Neuvy, de la Chassagne en briques, avant tout lieux de plaisance et à Coulandon. A ces demeures sont associés, de détente, se retrouvent sur la rive droite outre la chapelle, de vastes granges-étables dont on commence à exploiter les terres. La et des pigeonniers. Le manoir de Chevray présence importante de forêts en fait aussi construit au XVIIe siècle à Chézy servait de un secteur idéal pour la chasse. rendez-vous de chasse à la famille Feydeau. L’ARCHITECTURE RELIGIEUSE La plupart de ces édifices sont construits en DES XIXᵉ ET XXᵉ SIÈCLES briques rouges et noires qui forment des Peu d’édifices religieux sont construits décors variés, associées à la pierre calcaire durant l’époque moderne. Les prieurés ou au grès dans les chaînages d’angle, les de Souvigny et d’Yzeure sont largement encadrements ou les soubassements. Les remaniés, de nouvelles constructions y châteaux de Pomay à Lusigny, des Prots à sont réalisées dont l’actuel bâtiment qui Saint-Ennemond, des Louteaux à Chézy, abrite aujourd’hui le lycée Jean Monnet de Paray à Paray-le-Frésil, le pavillon de d’Yzeure construit au début du XVIIIe siècle

42 63. La chapelle du château de Saint-Augustin à Château-sur-Allier

64. Le château de la Cour-en-Chapeau à Chapeau

65. Le château du Riau à Villeneuve-sur-Allier (cliché Auvergne-centrefrance.com)

66. Le château de Dornes

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67. Le château de Charnes à Marigny (cliché X. de Froment)

68. Le manoir de Chevray à Chézy

69. Le château des Prots à Saint-Ennemond

70. Le château des Louteaux à Chézy 72 71. Le pavillon de Montchenin à Chevagnes (cliché P. Hénin)

72. Le château de Panloup à Yzeure 44 73 73. Eglise de Saint-Martin-des-Lais

pour loger les bénédictines. Les deux ailes Rusand mais aussi dans les ornements sont cependant des ajouts du XIXe siècle. liturgiques. Son rôle est essentiel dans ce On peut également mentionner l’église de renouveau liturgique fortement empreint Saint-Martin-des-Lais construite en 1742, d’ultramontanisme (tendance, au sein de la précédente ayant été détruite par un l’église catholique, qui affirme la primauté incendie provoqué par un maréchal-ferrant du pape sur le pouvoir politique) et de en 1733. préoccupations sociales. Sous son épiscopat (1850-1893), onze églises du Pays d’art En revanche, le XIXe siècle est une période et d’histoire sont construites mais aussi intense de construction d’édifices des chapelles privées comme celle, de religieux. L’arrivée de Monseigneur style néo-roman, du château des Bordes à de Pons, premier évêque du diocèse à Couzon, ainsi que des bâtiments pour abriter Moulins en 1823 puis de son successeur, le séminaire destiné à former les prêtres. En Monseigneur de Dreux-Brézé, fils du 1894, le baron d’Aubigny fait ainsi don au maître de cérémonie de Louis XVI, aboutit diocèse de Moulins de son château du Réray à un important renouveau religieux dans à Aubigny, reconstruit en 1884-1885. Le l’ensemble du département. La collégiale domaine est confisqué par l’Etat en 1907 et le de Moulins devient cathédrale et des travaux séminaire est transféré à Yzeure, au château d’agrandissement se déroulent de 1854 à de Bellevue, édifice construit pour les pères 1888, sous la conduite des architectes Jean- jésuites en 1881-1882. Il y restera jusqu’en Baptiste Lassus puis d’Eugène-Louis Millet. 1927, année durant laquelle les séminaristes Monseigneur de Dreux-Brézé est l’un des rejoignent le nouveau séminaire de pionniers du mouvement néogothique Champfeu, construit à Avermes à l’initiative qu’il impose notamment dans l’orfèvrerie, de Monseigneur Penon. Fermé en 1967, l’exemple le plus marquant étant la ces bâtiments imposants accueillent chapelle (ciboire, calice, patène, burettes, aujourd’hui l’Institut de Formation plateau) réalisée à l’occasion de son sacre Interprofessionnels de l’Allier (IFI03). Un en 1850 par l’orfèvre lyonnais Poussièlgue- grand nombre d’églises antérieures au

45 74. La chapelle du château du Réray à Aubigny

75. Les anciens bâtiments du séminaire de Champfeu à Avermes

76. Chapelle de l’ancien séminaire du château de Bellevue à Yzeure

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77. L’église de Couzon

78. Le tympan du portail de l’église de Saint-Ennemond

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Bataillots, indépendante de celle d’Yzeure. XIXe siècle sont également remaniées. En 1968, il est décidé de construire une Des travaux importants se déroulent ainsi nouvelle église, les travaux étant trop à l’église d’Aubigny restaurée de façon importants pour rénover celle alors en place. importante au XIXe siècle sous l’impulsion L’architecte Jean-Michel Monier est chargé du baron d’Aubigny, personnalité proche du chantier qui comprend également des de Monseigneur de Dreux-Brézé, ou encore locaux annexes et le presbytère. Il s’achève dans l’église de Saint-Ennemond fortement en 1972. La nef est desservie par une allée remaniée. La date de 1888 apparaît sur centrale, la chapelle couverte en lamellé- le tympan du porche néo-roman. L’église collé* ne nécessite aucun pilier. L’éclairage de Lusigny fait également l’objet d’une naturel est assuré par des canons de lumière restauration poussée. verticaux aménagés de part et d’autre du chœur et en façade. Le clocher, à l’avant de Le XXe siècle voit la construction, grâce à la façade de l’église, a été construit en 1977. l’abbé Dumas, de l’église de Villeneuve- sur-Allier en 1904 par l’architecte Michel Mitton, troisième église construite à cet emplacement. L’église Sainte-Jeanne- d’Arc du quartier des Bataillots à Yzeure est plus tardive, construite en 1970-1972. En 1959, Monseigneur Bougon, évêque de Moulins, érige la nouvelle paroisse des

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79. L’agrandissement du XIXe siècle de la cathédrale de Moulins par Eugène-Louis Millet.

80. La nef de la cathédrale de Moulins en construction (cliché Charles Marville, Ministère de la Culture, Médiathèque de l’Architecture et 79 du Patrimoine)

EGLISES DU PAYS D’ART ET D’HISTOIRE DE MOULINS COMMUNAUTÉ, CAPITALE DES BOURBONS, CONSTRUITES DURANT L’ÉPISCOPAT DE MONSEIGNEUR DE DREUX-BRÉZÉ

Communes Epoque de Architectes Style architectural construction Auroüer 1850 néo-gothique Avermes 1871-1873 Desrosiers/Mitton néo-gothique Bressolles 1875 Abbé Pougnet néo-XIIIe siècle Couzon 1876 Desrosiers La Chapelle-aux- 1875 Moreau néo-gothique Chasses Garnat-sur-Engièvre 1879 Moreau néo-roman Limoise 1888 Moreau néo-roman 1884-1887 Mitton néo-roman Neuilly-le-Réal 1875-1879 Abbé Pougnet néo-roman Paray-le-Frésil 1878 Moreau néo-romano-gothique Saint-Léopardin-d’Augy 1880-1886 néo-roman Villeneuve-sur-Allier 1904 Mitton néo-gothique

48 81. L’église Sainte- Jeanne-d’Arc des Bataillots à Yzeure

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Ces chantiers sont pour le tout nouveau Ces édifices sont pour la plupart décorés diocèse de Moulins une façon d’affirmer de peintures murales, souvent de bonne l’importance de l’Eglise. Après la Révolution, facture. Les peintres Louis Mazzia, période durant laquelle quantité de lieux d’origine piémontaise, installé à de culte ont été désaffectés ou utilisés dans l’Allier et Auguste Sauroy, ont ainsi à des fins diverses, beaucoup d’églises exécuté les décors de l’église de Garnat- étaient en ruines, il devenait indispensable sur-Engièvre en 1895. Quant au peintre de les reconstruire. Le choix stylistique Paul Taconnet, il réalise les décors des pour ces nouvelles constructions s’est églises de Saint-Léopardin d’Augy en 1882, essentiellement porté sur le néogothique, de Limoise en 1892, de Neuilly-le-Réal en même si l’on retrouve quelques édifices 1896, de la chapelle du Petit-Séminaire néo-romans. du Réray à Aubigny en 1895, année durant Toutefois, bien que les formes s’inspirent laquelle il travaille également à Bourbon- du passé, des matériaux nouveaux sont l’Archambault. employés comme à l’église de Couzon Quant aux architectes, ils œuvrent où le clocher est surmonté d’une flèche en parallèle à la construction ou aux octogonale en béton. Construite en 1876, la réaménagements d’innombrables châteaux façade présente des formes qui annoncent et demeures du Bourbonnais. le style Art Déco. On remarque la sévérité, envers ces édifices, de l’architecte Marcel Génermont qui écrit en 1938 dans Les églises de France. Allier : « négligeant de restaurer une église le plus souvent romane, les municipalités ou les conseils de fabrique* l’ont abattue pour la remplacer par une de ces bâtisses «néo-romanes» ou «néo-gothiques», uniformes dans leur banalité ».

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82. Le chœur de l’église de Garnat-sur-Engièvre peint par Auguste Sauroy

83 83. Détail des peintures de l’église de Limoise réalisées par Paul Taconnet

L’ARCHITECTURE CIVILE ET LES qui sont agrandis ou reconstruits en SCULPTURES DU XIXe AU XXIe prenant soin de conserver une ou deux SIÈCLE tours, témoins de l’ancien fief*, comme au château de Bressolles où subsistent une tour Les châteaux du XIXe siècle ronde du XIIIe siècle et une tour carrée avec Grand nombre de châteaux, demeures ou des meneaux* du XVe siècle. Au château de maisons bourgeoises sont restructurés Vallières à Neuvy, subsiste le pigeonnier XVe ou construits au XIXe et au début du XXe tandis que les agrandissements du château siècle, dans un style qui s’inscrit là aussi de Villars à Villeneuve-sur-Allier se font dans ce nouveau goût pour le Moyen autour du pavillon du XVIIe siècle. Certains Âge. L’intérêt pour le Moyen Âge a pris une sites sont abandonnés au régisseur au profit importance particulière en Bourbonnais, d’un château plus moderne. L’exemple le ce dont témoigne l’ouvrage L’Ancien plus marquant est sans doute le château Bourbonnais d’Achille Allier. Les recherches des Melays, construit par Hippolyte « reconstruisent », voire « construisent » Durand au milieu du XIXe siècle, face à l’ancienne province du Bourbonnais qui a la gentilhommière du XVIIe siècle des connu ses heures de gloire entre le XIIe et Vieux Melays. La famille de Champfeu le début du XVIe siècle, période historique avait racheté l’ensemble du domaine qui a donné son identité à la province. La en 1790 et fait construire un château seconde moitié du XIXe siècle constitue ainsi moderne. Barthélémy de La Cazes rachète un âge d’or de l’architecture castrale* en le château en 1865 et confie la réalisation Bourbonnais. Une aristocratie prospère, de la décoration intérieure et du mobilier à enrichie par la réorganisation de l’économie Jean-Bélisaire Moreau. Il s’agit d’un des rares rurale, et une grande bourgeoisie en quête châteaux néo-renaissance construit sous le de notabilité rivalisent dans la construction règne de Louis-Philippe en Bourbonnais. de châteaux. Nombreux sont les anciens manoirs et gentilhommières considérés Ces nouveaux châteaux, grâce à des comme trop modestes et inconfortables aménagements de confort, sont plus

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84. Le château de Villars à Villeneuve-sur-Allier

85. Le château des Melays à Neuvy

86. Le manoir des Vieux Melays à Neuvy. 85

51 86 87. Vestiges du château de Montaret à Souvigny

88. Le château du Colombier à Toulon-sur-Allier

89. Le château du Parc à 87 Yzeure

88 89 adaptés au mode de vie des châtelains du fait peu à peu de cet élève et collaborateur de XIXe siècle. Ils sont édifiés à l’emplacement le Jean-Baptiste Lassus, son architecte attitré. mieux situé du domaine et sont entourés de Dès 1854, il est nommé Inspecteur des grands parcs qui les mettent en valeur. L’un travaux de restauration et d’agrandissement des premiers grands chantiers sur territoire de la cathédrale de Moulins. En 1881, du Pays d’art et d’histoire mais aussi du il s’associe avec son fils René qui vient département de l’Allier, est la restauration- d’achever ses études à Paris. A partir de cette reconstruction du château médiéval de date, ils élaborent leurs projets en commun. Montaret à Souvigny en 1862-1863 par La renommée et l’activité des Moreau Jean-Bélisaire Moreau pour Henri-François s’étend alors bien au-delà des frontières de Bonand, dans un esprit romantique. de l’Allier. Ils reconstruisent le château Une courtine manquante est reconstituée du Réray à Aubigny, en intégrant deux et un imposant donjon quadrangulaire tours quadrangulaires. On les retrouve aux d’inspiration anglaise est édifié. L’édifice a châteaux de Trévèze à Lusigny, d’Avrilly à malheureusement brûlé en 1929. Trévol et bien-sûr à Moulins. A partir des années 1860, Jean-Bélisaire Deux autres architectes locaux, Emile Moreau est le principal architecte Dadole, élève de Lassus, et Honoré Vianne, construisant des châteaux dans le ont également construits beaucoup de département. Monseigneur de Dreux-Brézé châteaux. Au milieu du XIXe siècle, Dadole

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90. La façade du château d’Avrilly à Trévol 91. Le Chalet à Saint-Martin-des-Lais

reconstruit le château de Demoret à Trévol, Yzeure, le château du Parc, a également bâtiment rectangulaire cantonné de tours été reconstruit vers 1890 dans les styles circulaires de style néogothique et pourvu gothique et renaissance. d’une tour axiale polygonale. Il travaille Le néogothique castral a perduré dans également au château d’Origny à Neuvy l’Allier jusque dans les années 1920. C’est où il élève une tour d’entrée carrée flanquée seulement en 1928 que les architectes d’une tourelle d’escalier en brique bicolore. François et Adrien Mitton coiffent d’un haut Vianne travaille, sous le Second Empire, à la toit à croupes le château d’Avrilly à Trévol, transformation en château néogothique de pour le comte de Chabannes-Tournon, et la gentilhommière du Colombier à Toulon- réhabilitent dans le style Louis XII la façade sur-Allier. principale, y compris l’imposant pavillon Paul Selmersheim, neveu et élève d’Eugène ajouté en 1875 par Jean-Bélisaire Moreau Millet, est chargé en 1889 par le comte Guy qui est surélevé et transformé en donjon. de Bourbon-Châlus, de la restauration du On peut également mentionner l’élégance château de Thoury à Neuvy, ancienne du château de la Barre à Château-sur-Allier, demeure de la duchesse Anne de France, la vue sur le Val d’Allier dont dispose le qu’il agrandit considérablement par l’ajout château de Préviat à Chemilly ou l’utilisation de galeries, d’ailes en retour d’équerre et la de la brique au domaine de la Bergerie à construction d’une chapelle. Saint-Ennemond, aux châteaux de Mirebeau Le château de Béguin à Lurcy-Lévis est à Trévol ou encore de Plaisance à Yzeure. En assurément le château néogothique le 1850 est construit le Chalet à Saint-Martin- plus impressionnant et le plus moderne, des-Lais, demeure de style Napoléon III dont l’architecte n’a pas été identifié. Il a qui rappelle, en plus modeste, les chalets été reconstruit pour l’homme politique construits à Vichy pour l’empereur et sa Edouard Mathurin Fould, neveu du banquier suite. Ces chalets vichyssois ont inspiré et ministre des Finances de Napoléon Ier, quelques propriétaires de l’époque. On Achille Fould. retrouve cette référence dans l’architecture L’ancienne résidence d’Anne de France à du château des Fougis à Lusigny.

53 92. Le domaine des Vieux-Murs à Souvigny (cliché : allier- 92 auvergne-tourisme.com)

91. Le Chalet à Saint-Martin-des-Lais

Pour le XXe siècle, on peut mentionner le artistique*. Devant le bâtiment principal du château de Saint-Martin-des-Lais largement collège de Dornes se trouve ainsi un totem remanié après la Seconde Guerre mondiale en grès d’Albert Vallet. Le lycée agricole et le domaine des Vieux-Murs à Souvigny, de Neuvy possède quant à lui des œuvres demeure construite en 1902 dans le style du sculpteur Pierre Sabatier (totem et néo-classique et entourée d’un parc de lave émaillée). Installé à Auroüer, où son près de deux hectares. L’architecture atelier est toujours en place, il a beaucoup s’inspire du Petit Trianon de Versailles. travaillé en France et à l’étranger dès les Dès sa construction, la demeure possédait années 1960, cherchant le plus souvent l’eau courante, fournie par une éolienne qui à intégrer son œuvre à l’architecture. A pompait l’eau dans un puits pour remplir l’arrière de l’église de la commune d’Auroüer une citerne surélevée. Une chaudière à est conservée la sculpture Génésia réalisée bois à production d’air chaud diffusait la en acier peint en rouge vif et découpé au chaleur dans toutes les pièces par un réseau laser par Pierre Sabatier en 2003. Plusieurs complexe de tuyauteries. œuvres de l’artiste sont conservées dans des édifices moulinois. Certaines sont A ces réalisations privées, s’ajoute la également conservées à Yzeure, place de construction des nombreuses mairies, Bendorf et devant le bâtiment des archives écoles ou mairies-écoles construites au XIXe départementales. Cette commune est par siècle et au début du XXe siècle. ailleurs riche en sculpture contemporaine puisque le jardin de la Baigneuse est orné Les sculptures du XIXe et XXIe siècles d’une Baigneuse du sculpteur vichyssois Des œuvres sculptées des XIXe et XXe siècles André Tajana exécutée dans les années 1980 sont réparties sur l’ensemble du Pays d’art et La Sardane de Juan Palau est installée et d’histoire de Moulins Communauté, devant le théâtre Yzeurespace. D’origine capitale des Bourbons. Il faut tout d’abord catalane, arrivé à Moulins dans les années mentionner le nombre important de 1960, Juan Palau a réalisé pour la ville et ses réalisations issues de la loi de 1951 sur le 1% environs un grand nombre de sculptures

54 93. Totem d’Albert Vallet au collège de Dornes

Allier est également ornée d’une sculpture en métal réalisée en 2008 à l’occasion du réaménagement urbain et représentant un enfant et un dauphin au centre d’un arbre. L’enfant et le dauphin sont là encore 93 une référence à un type de figurine gallo- romaine produit sur la commune.

qui ornent les espaces publics et les ronds- Sur le plan religieux, outre l’abondante points. Sa sculpture installée au jardin de statuaire des églises, une statue du Sacré- Grillet à Yzeure, intitulée La Paix et conçue Cœur en métal du sculpteur Moreau domine en lien avec l’ensemble du rond-point depuis 1913 le rond-point de la commune des Martyrs du quartier de la Madeleine à de Chevagnes. Quant au monument aux Moulins, devait prendre place au niveau aéronautes de la catastrophe du dirigeable du pont Régemortes. N’ayant jamais été République, réalisé en 1923 à Villeneuve- installée, elle a été donnée à la ville d’Yzeure sur-Allier par Henri Bomchard en souvenir par l’artiste. L’œuvre au centre du rond-point des quatre victimes mortes lors de la chute de Toulon-sur-Allier représente une poterie du dirigeable en 1909, ainsi que le buste en deux parties, l’interstice entre les deux du colonel Aimé Laussedat réalisé par formant la silhouette d’un potier, référence à François Sicard en 1911, font partie des la production de céramiques et de figurines monuments commémoratifs marquants du en terre cuite, très importante à Toulon-sur- Pays d’art et d’histoire. A l’origine installé Allier durant la période gallo-romaine. Une dans la cour du musée de Moulins, le buste sculpture de Palau représentant une flamme a été sauvé de la destruction durant la est aussi installée devant la salle des fêtes de Seconde Guerre mondiale et installé dans la commune. On retrouve d’autres œuvres le parc Laussedat à Yzeure, à proximité de de l’artistes à Avermes, Bressolles, Neuvy, la propriété qui appartenait à la famille Trévol. La place centrale de Toulon-sur- Laussedat. Le sculpteur moulinois Pierre

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94. Génésia de Pierre Sabatier à Auroüer 95. La Baigneuse d’André Tajana à Yzeure

96. La Sardane de Juan Palau à Yzeurespace 97. La Paix de Juan Palau au jardin de Grillet à Yzeure

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98. Le Monument aux aéronautes du dirigeable République d’Henri Bomchard à Trévol

99. Buste du colonel Laussedat par François Sicard à Yzeure

100. Monument aux morts de Saint-Ennemond par Pierre Fournier des Corats

101. Détail du monument aux morts de Saint-Léopardin d’Augy par Louis Galfione

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57 102. Le vélodrome 102 de Lurcy-Lévis

Fournier des Corats réalise un monument Génermont, fils de Marcel Génermont qui a aux morts original à Saint-Ennemond beaucoup œuvré dans le département. vers 1924. Une pierre monolithe sculptée Dès 1984, est lancé le projet de création d’une représente une femme pensive, allégorie salle de spectacle à Yzeure, Yzeurespace. Le de la France blessée. De même, vers 1920, projet, confié à l’architecte Bruno Bourdiel Louis Galfione représente une jeune fille et au cabinet Imholz, est achevé en 1992. distribuant des lauriers et des feuilles de Dans les mêmes années, le cabinet Imholz chêne, dans une atmosphère vaporeuse sur est également chargé de la construction le monument aux morts de Saint-Léopardin du Foirail « Parc des Isles » à Avermes d’Augy. A l’arrière-plan des saules pleureurs (1981). Une extension de ce bâtiment est évoquent la tristesse et le sein dénudé de la réalisée en 1986 avant sa transformation en jeune femme est une référence à Marianne. bâtiment de foirexpo en 2000. On retrouve D’autres monuments aux morts sont de Bruno Bourdiel pour la construction de la belle qualité, comme celui du sculpteur salle polyvalente des Ozières en 1995 et Moretti à Villeneuve-sur-Allier. en collaboration avec d’autres architectes pour la construction de l’école de musique Quelques édifices publics du XXe siècle à Moulins et de la salle des fêtes de Toulon- Enfin, quelques édifices publics du XXe siècle sur-Allier. sont à signaler. La commune de Lurcy-Lévis accueille un vélodrome, aménagé en 1897 PATRIMOINE ET PAYSAGES et le plus ancien encore en activité en Le patrimoine fluvial France ainsi qu’un circuit automobile L’importance du Val d’Allier dans le paysage, possédant la plus grande ligne droite qui joue un rôle d’interface entre le bocage d’Europe et une piste modulable. Parmi et la Sologne bourbonnaise, a été évoquée. les créations d’établissements scolaires, on Cependant, il faut rappeler l’importance peut mentionner la construction du lycée du phénomène de « dynamique fluviale » agricole de Neuvy entre 1966 et 1969 essentiel lorsque l’on évoque la rivière Allier. par les architectes Henri Martin et Robert Erodant ses berges instables, elle dessine

58 103. Les méandres 103 de l’Allier (cliché ens.puy-de-dome.fr)

d’amples méandres* sans cesse recoupés. à mal bien des ponts construits sur l’Allier. Les activités humaines modernes ont fait Celle de 1790 est considérée comme la crue disparaître beaucoup d’anciens lits mais la la plus importante depuis trois siècles. Si le plaine reste encore une vaste zone inondable, pont de Moulins construit par l’ingénieur les eaux de l’Allier pouvant recouvrir plus de Régemortes résiste depuis sa construction 20 000 hectares, comme lors des grandes en 1763, notamment grâce à son système crues du XIXe siècle. La plaine de l’Allier est ingénieux de digues et à la destruction d’une aujourd’hui beaucoup plus modeste en partie de l’ancien quartier de la Madeleine taille, mais jusqu’au milieu du XIXe siècle, afin de redonner à la rivière la surface dont elle constituait une large bande de deux elle avait besoin en période de crue, ce n’est kilomètres de large. Son lit était alors en pas le cas des divers ponts construits au tresse, il était constitué de plusieurs chenaux Veurdre, comme en témoignent les poteaux instables cheminant entre de nombreuses en bois encore visibles. En 1834, un pont îles. Jusque vers 1850, le débit de l’eau y était suspendu à péage est finalement construit, beaucoup plus important. Sa physionomie quelques mètres en aval de l’ancien passage s’est modifiée à partir de cette période. à gué. En 1910, il est remplacé par un pont Comme l’explique Estelle Cournez dans en béton armé conçu par Eugène Freyssinet. son ouvrage Sur les traces de l’Allier. Histoire Cet ouvrage d’art est dynamité par les d’une rivière sauvage, à l’issue du « petit âge Alliés en 1944 pour empêcher l’avancée glaciaire », le réchauffement relatif a induit des Allemands. Un nouveau pont en béton un moindre débit et une moindre érosion* armé est alors édifié sur les piles du pont des versants, renforcés au cours du XXe Freyssinet. siècle par l’enfrichement ou le boisement des Les communes du Veurdre et de hauteurs du bassin versant, liés à la déprise Château-sur-Allier correspondent, agricole. Cela a tari l’apport de sédiments par depuis la préhistoire, à des lieux de l’amont et a provoqué une transformation passage stratégiques. Les bourgs ne sont extrêmement rapide de la rivière. éloignés que d’un kilomètre environ de Les crues, parfois spectaculaires, ont mis la rivière et ont une histoire intimement

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104 et 105. Les ponts successifs au Veurdre (cliché efreyssinet-association.com et fortunaposte.com)

106. Ancre de marinier sur la façade d’une maison rue Bourbon au Veurdre

de bateaux et l’on trouvait également, installés sur des radeaux, des moulins. L’activité batelière décline au cours 106 du XIXe siècle avant de disparaitre du fait de la difficulté à maintenir le lit liée à la batellerie qui a permis le navigable. A cette période, les routes développement de ces communes. deviennent beaucoup plus praticables Elles exportaient par voie d’eau des bois et le chemin de fer se développe. et fers de Tronçais, acheminés jusqu’au Pour traverser la Loire, un pont est port du Veurdre à dos de mulet ou par construit à Gannay-sur-Loire en 1897. de gros chariots, des céréales ou encore Long de 243 mètres, sa construction a du vin. Ce commerce a fait du port du duré quatre ans. Il constitue un point Veurdre l’un des plus importants de de jonction entre les départements de l’Allier. La présence de mariniers est l’Allier, de la Nièvre et de la Saône-et- attestée dans la cité dès le XIVe siècle. Loire. Comme au Veurdre ou à Moulins, Quelques vestiges sur les maisons une des arches a été détruite au début témoignent encore de cette activité de la Seconde Guerre mondiale pour comme l’ancre, sur une façade d’une retarder l’avancée allemande. Certes maison rue de Bourbon, accompagnée beaucoup plus modeste avec ses de la date 1648, ou des graffitis du XIXe trois arches, le pont de Chevagnes siècle représentant des bateaux. Quant permettant de traverser l’Acolin est au port, il a été plusieurs fois déplacé néanmoins un bel ouvrage d’art même si le port principal a été avant construit en 1753 par le sous-ingénieur tout attaché à l’embouchure de la et architecte du roi de la province du Bieudre. Celle-ci formait une large gare Bourbonnais, Trésaguet de l’Isle, lors naturelle pouvant accueillir facilement de la création de la route permettant 130 bateaux. Le port était couplé à de relier Moulins à Autun. d’importants chantiers de construction D’autres témoignages de l’activité des

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107. Le pont des Seguins à Garnat-sur-Engièvre 108. La « maison Saint-Nicolas » à Gannay-sur-Loire

mariniers sont conservés le long de la Loire appui sur deux piles en pierre, les poutres et du canal latéral à la Loire. Mis en eau de la passerelle métallique sont rivetées, en 1837, le canal latéral à la Loire ouvre type d’assemblage le plus courant avant la en 1838. Long de 196 kilomètres, il longe généralisation de la soudure, et assemblées la Loire de Digoin à Briare et traverse le en forme de croix. La construction de ponts département de l’Allier sur 45 kilomètres, métalliques, dont les premiers exemples passant par le Pays d’art et d’histoire de remontent à la fin du XVIIIe siècle, connaît Moulins Communauté à Gannay-sur-Loire, son apogée à partir des années 1830. Non Saint-Martin-des-Lais, Paray-le-Frésil et loin du pont, se trouve l’écluse du Clos du Garnat-sur-Engièvre. Comme les rivières, May, l’une des 37 écluses qui jalonnent le les canaux permettent depuis le Moyen canal et permettent aux bateaux de franchir Âge de transporter des marchandises. les dénivellations. Elle comprend un sas Jusqu’à l’ouverture du canal, ces transports dans lequel le niveau de l’eau peut varier. Il s’effectuaient sur la Loire. Les canaux font subsiste, en face de l’écluse, une ancienne la liaison entre deux rivières et ont été un auberge où s’arrêtaient les marins. Sur la moyen efficace d’assécher les marais de commune voisine de Gannay-sur-Loire, la Sologne bourbonnaise. Le canal latéral deux maisons à pans de bois agencées en à la Loire témoigne de l’évolution d’une forme de L, correspondant à l’habitation et activité économique. Ainsi, la navigation la grange et surnommées « maison Saint- de plaisance a remplacé les bateaux de fret Nicolas », semblent également être une à moteur qui ont eux-mêmes succédé aux ancienne auberge de mariniers. péniches halées par des chevaux. Plusieurs On trouve également sur la commune ponts métalliques permettant de traverser l’écluse des Vanneaux. Ces lieux le canal subsistent, comme celui des Seguins s’accompagnent aujourd’hui de bases à Garnat-sur-Engièvre. Il a été construit nautiques qui accueillent les bateaux de immédiatement après la percée du canal, plaisance. Il faut également mentionner les par la Société Fournier et Cornu, société maisons de garde comme celle de la Boise de constructeurs-mécaniciens. Prenant à Gannay-sur-Loire, située à proximité du

61 109 109. Plaque sur la maison de garde de la Boise à Gannay-sur-Loire

pont métallique construit en 1895. Les de paysagiste, le comte de Choulot a été maisons de garde sont destinées à abriter au service de la famille de Bourbon-Condé les personnes employées à la surveillance en tant que « gentilhomme ordinaire ». Il a du canal, elles sont donc implantées tout trouvé sa clientèle dans son réseau d’amis près du canal, le long du chemin de halage. légitimistes et de gentilshommes installés La maison de la Boise se compose d’un à la campagne qui s’intéressent alors aux rez-de-chaussée contenant la chambre progrès réalisés en recherche agronomique principale avec une alcôve, d’une petite et aux nouvelles techniques agricoles qui pièce, d’un grenier et d’un four. Une révolutionnent l’agriculture. Le comte plaque est accrochée au-dessus de la porte distingue deux types de parcs : le parc orné d’entrée, côté canal et porte l’inscription : et le parc agricole. Ce dernier limite à la fois «canal latéral à la Loire garde». le nombre de routes indispensables et le fleurissement aux abords de l’habitation. Parcs et jardins Ce type de parc semble être une réponse Les nombreux châteaux construits ou aux besoins des propriétaires du XIXe réaménagés au cours du XIXe siècle sont siècle désireux de tendre vers le progrès et pour la plupart implantés dans des écrins l’harmonie. Choulot s’inspire fortement des de verdure qui les mettent en valeur. Le parc parcs à l’anglaise. des Melays a ainsi été dessiné par le comte En 1903, l’architecte paysagiste Achille Paul de Lavenne de Choulot, né à Nevers Duchêne remodèle le parc du château en pleine Terreur et époux d’Elisabeth de d’Avrilly à Trévol, en alliant l’élégance Chabannes-La Palice. On doit à l’auteur de d’un jardin à la française à l’atmosphère L’Art des Jardins, la conception des parcs des romantique d’un parc à l’anglaise. châteaux de Lécluse à Neuilly-le-Réal, de Concevant avec son père Henri Duchêne, Lévis et de Neureux à Lurcy-Lévis, de Pomay de remarquables jardins, comme à Vaux- à Lusigny, de Bressolles et de l’hôtel Vic-de- le-Vicomte ou Champs-sur-Marne, il est à Pontgibaud à Moulins pour la comtesse du l’origine d’un genre nouveau qui combine Prat. Avant d’entamer à 50 ans une carrière jardin mixte, architecture, art paysager et art

62 110. Le parc du château d’Avrilly à Trévol (cliché : auvergne-tourimse.info) 110

horticole. L’eau tient une place centrale, sous existence à son domaine. Elle fait restaurer le forme de sources et d’étangs. Au château château, aménage le parc à grands renforts d’Avrilly, sept grands bassins disposés sur de travaux : curetage des douves, drainage quatre niveaux se succèdent d’est en ouest. des sols, canalisation des sources, mise en A l’ouest se déploie un jardin en terrasse, place de coupe-vent, l’ensemble s’organisant structuré par des allées, tandis que dans le progressivement autour du dessin d’un prolongement de la façade est, un système jardin à l’anglaise. Un verger, un potager élaboré de canal, de bassin et de douves naissent au fil des années et Aglaé Adanson donne accès au parc paysager. plante des arbres remarquables comme un platane d’Orient, des cyprès, des chênes On doit également à la dynastie et des noyers américains dont elle se fait d’horticulteurs et paysagistes Treyve, expédier les semences d’Amérique du nord. l’aménagement de nombreux parcs et Son petit-fils, Paul-Napoléon, fait aménager jardins comme celui du château d’Aigrepont par la suite deux longues galeries pour à Bressolles ou du Colombier à Toulon-sur- abriter les collections de son père et de son Allier au début du XXe siècle. grand-père. Un abreuvoir est installé sous cet aménagement qui renferme des objets Dans ce domaine, le site le plus remarquable variés datant pour certains de la préhistoire. du département est sans nul doute A la fin du XIXe siècle, cette collection est la l’arboretum de Balaine à Villeneuve-sur- plus importante de France après celle du Allier créé par Aglaé Adanson en 1805. Museum national de Paris. Paul-Napoléon Il s’agit du plus ancien parc botanique et Doumet-Adanson fait également édifier une floral privé conservé en France classé en chapelle en briques, à fronton triangulaire, 1944 parmi les sites et les monuments pour sa grand-mère Aglaë. Le parc, jalonné nationaux et depuis 1993, classé au titre des de fabriques*, compte aujourd’hui 2500 Monuments Historiques dans sa totalité. variétés de fleurs, plantes et arbres, certains Aglaé Adanson est la fille du naturaliste et ayant plus de 200 ans. botaniste Michel Adanson. Elle consacre son

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111. Le jardin du château d’Aigrepont à Bressolles

112. Portrait d’Aglaé Adanson (cliché Gallica)

113. Le parc du château de Balaine à Villeneuve-sur-Allier

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64 114 : La grange de La Motte à Toulon-sur-Allier

115 : Maison du Treuil à Paray- 114 le-Frésil, détail de la toiture en débord

L’HABITAT RURAL ET LE PETIT autres grands propriétaires du canton PATRIMOINE de Chevagnes qui était alors un « pays … d’une affreuse stérilité», comme le rappelle L’habitat rural l’historien André Leguai. Les métayers de la Tout au long du Moyen Âge et jusqu’à la région commencent à défricher les landes, à fin du XVIIIe siècle, la superficie des terres assécher les étangs, à labourer à la charrue cultivées ou utilisées en Bourbonnais Dombasle, à utiliser la chaux et la marne reste assez limitée, les forêts occupant pour améliorer leurs terres. La construction une étendue considérable. La terre est de fours à chaux à Saint-Menoux permet très divisée, les exploitations sont faites l’utilisation de ce procédé. Les zones de de parcelles éparses et peu étendues. Les culture s’étendent et l’élevage des bovins campagnes sont ainsi beaucoup moins de la race charolaise remplace, en Sologne peuplées qu’au début du XXe siècle, même bourbonnaise, celui des moutons. Sur si les paysans forment la majorité de la le plan humain, les améliorations sont population. Les modes de culture évoluent sensibles également, même si les situations peu également. L’agriculteur et agronome restent plus compliquées dans le cadre du britannique Arthur Young écrit en 1789 métayage, phénomène qui aboutit à une que le Bourbonnais est une « province crise importante au début du XXe siècle, avec arriérée ». Il ajoute : « On m’a dit à Moulins la naissance d’un mouvement syndical que les trois quarts du Bourbonnais paysan auquel Emile Guillaumin apporte sont en bruyères, en genêts et en bois ». son soutien. Très présent en Bourbonnais, le L’agriculture bourbonnaise évolue de métayage est un contrat entre le propriétaire façon sensible à partir du Second Empire. du domaine et l’exploitant, c’est-à-dire le Un travail considérable est alors mené métayer, qui vit sur le domaine, travaille les pour assécher les terres de Sologne et terres mais ne les possède pas. Il ne possède développer l’agriculture et l’élevage, pas non plus le matériel ni son logement. Le sous l’impulsion du député Victor de Tracy produit de la terre est partagé entre les deux originaire de Paray-le-Frésil et de quelques parties. Souvent, le propriétaire laisse la

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conduite du domaine à un fermier général, trouvaient les récoltes. Dans le secteur du intermédiaire entre les deux parties. Le bocage bourbonnais, cette porte est souvent métayage est progressivement remplacé précédée d’un porche, espace très utile pour par le fermage qui est un contrat de location décharger à l’abri. En Sologne, il s’agit plutôt sur une longue période. de la toiture de la grange qui déborde Les domaines bourbonnais se composent pour former un auvent comme la grange en général d’une habitation et d’une grange réhabilitée des Jeandins à Chézy ou du Treuil étable. La maison des Prodins à Yzeure, à Paray-le-Frésil. Celles de Fougerolles à avec sa tour à l’arrière, est un exemple de Bessay-sur-Allier ou de Fontenay au Veurdre maison appartenant à un domaine agricole, sont bien caractéristiques des constructions elle correspondait au logis du propriétaire. du bocage, avec leur porche, une partie La ferme des Roux à se compose réservée au bétail, une autre au stockage des également d’une imposante demeure récoltes et le fenil à l’étage pour stocker le pour les propriétaires et de vastes granges foin, espace muni de fenêtres pour être aéré à proximité. Les granges étables sont des et accessible par une échelle ou un escalier. bâtiments imposants où sont logés les La grange et l’étable communiquent entre animaux et stockés les céréales et le foin. elles par une porte permettant à l’exploitant Celles encore visibles sur le territoire datent de circuler sans avoir à ressortir du bâtiment. de la fin du XVIIIe siècle, du XIXe et du XXe La grange de la Motte, à Chapeau, du XVIIIe siècle. Les granges de la Motte à Toulon- siècle, se caractérise par ses pans de bois à sur-Allier, avec ses pans de bois en forme « grilles verticales », rares en Bourbonnais. de croix de Saint-André, ou des Jeandins Celles de Maison-Neuve à Chemilly, de Cizel à Chézy sont cependant antérieures, à Lusigny, du Chaînon à Saint-Ennemond ou probablement du XVIIe siècle. des Sanciots à Trévol, également du XVIIIe siècle, rappellent l’importance du bois Les granges se caractérisent par leur grande et du torchis dans la construction de ces porte charretière qui permettait de rentrer bâtiments. Toujours à Chemilly, la grange le char ou la charrette dans lesquels se des Thévenots se rattache à l’architecture

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116. La grange de Fougerolles à Bessay-sur-Allier

117. La Grange des Sanciots à Trévol

118. La ferme de Saint-Jacques à Chevagnes

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de la Sologne avec son toit débordant. Ces rurales de la région, elle a été remeublée avec granges ont pour la plupart été abandonnées du mobilier traditionnel paysan. au profit de grandes stabulations. Nombre d’entre elles ont été réaménagées en Il subsiste également quelques maisons habitations. Ces anciennes granges, réparties vigneronnes comme au domaine sur tout le territoire, témoignent de son abandonné de La Couarde à Bresnay. On histoire très marquée par l’agriculture. trouve aussi sur la commune, aux Aubis, une unité d’habitation minimale qui servait de Quelques fermes sont à mentionner, soit logement aux ouvriers agricoles et aux pour leur qualité architecturale soit pour paysans les plus pauvres, aux XVIIIe et XIXe leur réhabilitation intéressante. Celle de siècles. Le petit bâtiment en rez-de-chaussée Saint-Jacques à Chevagnes construite en est surmonté d’un fenil où l’on conservait briques en 1753 le long de la route, forme un le foin, avec une pièce d’habitation sur ensemble imposant. Elle correspondait à laquelle ouvre un four. La seule dépendance l’origine à un ancien relais de poste. A l’arrière semble être une porcherie ou un poulailler. se trouvaient les écuries, les abreuvoirs sont La ferme de Cacherat à Gouise se compose conservés. La ferme des Cornus à Saint- d’une petite maison paysanne notée comme Martin-des-Lais forme également un bel moulin sur les cartes mises au point par les ensemble avec la maison d’habitation à cartographes Cassini au XVIIIe siècle, et d’un pans de bois restaurée. Le logis des Bardets bâtiment agricole situé en face. Le logement à Gannay-sur-Loire est un bel exemple de comporte une unique pièce, l’entrée du four maison rurale du XVIIe siècle avec un logis se trouve au fond de la cheminée. rectangulaire encadré de deux communs à colombage servant d’étable et d’écurie. Enfin, la Sologne bourbonnaise conserve Quant à celle d’Embraud à Château-sur-Allier, des vestiges d’un type d’habitat très elle accueille l’association la Chavannée ancien qui a disparu au début du XXe siècle depuis 1977. Caractéristique des demeures : l’habitat communautaire, appelé aussi 67 119

119. Détail du calvaire de Saint-Léopardin d’Augy

120. La croix de mission d’Yzeure

communautés familiales agricoles. Plusieurs familles d’agriculteurs vivaient sous le même toit, chaque habitant était appelé « parsonnier », issu du latin portio, c’est-à-dire que chacun était propriétaire d’une partie de l’habitat communautaire. A la tête de la communauté se trouvent un maître et une maîtresse élus. Ces 120 familles sont souvent liées entre elles par les liens du sang et l’installation de telles communautés a souvent pour origine Sur chaque commune de nombreuses la mise en valeur de terres délaissées et croix, de formes diverses, en bois, en souvent isolées. Les maisons comportent fonte, en pierre, sont conservées. On peut plusieurs chambres et une grande pièce à simplement citer les croix sculptées en vivre. Les granges sont situées à proximité. pierre de Montbeugny. Parmi elles, certaines La ferme de Bellem à Chemilly, le château sont des calvaires comme à Saint-Léopardin des Bonnins à Gannay-sur-Loire, la d’Augy. La croix au sommet de la colonne est maison de Ferrières à La Chapelle-aux- ornée d’un côté de la Crucifixion, de l’autre Chasses ou le site des Seguins à Saint- d’une Vierge de pitié. Beaucoup de croix sont Ennemond étaient le siège de fermes également associées à des missions. On y communautaires. lit ainsi la date de la mission, évènement spirituel organisé dans les paroisses par des Le petit patrimoine prédicateurs, souvent des ordres religieux, Le « petit » patrimoine, petit par sa essentiellement au XIXe siècle. Celle de discrétion et pour ses fonctions dépassées Bressolles trône devant l’église. Quant à plus que par sa taille ou sa valeur, se celle d’Yzeure, en pierre, réalisée pour la trouve sur tout le territoire. mission de 1914, elle se rattache au style 68 122

121. Le lavoir taillé dans la pierre de Pouzy-Mésangy

122. Le lavoir de Couzon

121

Art Déco. Les croix de Jubilé, comme celle officier assermenté qui fournissait un bon de Toulon-sur-Allier, font référence à une de pesage. On peut en voir à Chapeau, année jubilaire, année reconnue par le pape Gennetines, Gouise, Trévol, Neuilly-le- comme un temps religieux particulier. Réal. A Montbeugny subsiste seulement la guérite. Les sources sont associées à des puits, des fontaines, comme celle de la place Le territoire était réputé pour ses moulins de Souvigny, surmontée d’une petite qui ont donné leur nom à la capitale construction en forme de temple dorique, de la province, Moulins. Il n’y avait en ou des lavoirs encore visibles dans Bourbonnais quasi-exclusivement que des beaucoup de communes. Celui de Couzon moulins à eau qui servaient à moudre le blé, a été restauré et la commune de Pouzy- l’épeautre, le seigle pour obtenir de la farine. Mésangy en conserve plusieurs, dont un La plupart ont disparu. Néanmoins, certains taillé directement dans le sol rocheux. ont été réhabilités en habitation comme le Moulin de la Paire à Villeneuve-sur-Allier ou La plupart des poids publics conservés ont celui de Sanne à Toulon-sur-Allier. Se trouve été installés à la fin du XIXe siècle, époque également sur cette commune le Moulin qui correspond à un essor économique et Neuf qu’un passionné a remis en service. technique important. Situés souvent au Au Veurdre, l’écluse servant de barrage au cœur du village, près d’un puits ou d’une Moulin Neuf est bien visible et le Moulin croix, ils servaient à déterminer le poids Barrat conserve sa machinerie. de la marchandise et à définir le montant de la taxe à payer. Ils se composent d’une Après avoir produit la farine, il faut plate-forme, entourée parfois de barrières, préparer le pain. Là encore, les vestiges où se plaçaient le véhicule ou les animaux, de fours à pain sont nombreux. Le four et d’une guérite utilisée par le peseur, à pain privé correspond souvent à une

69 123 124

125

123. Le poids public de Trévol

124. L’ancien four à pain à Auroüer

125. Le four à pain de Piroir à Bressolles 70 126. Fontaine, XIXe siècle, place Aristide Briand, 126 Souvigny

petite construction colée sur un mur pignon fabriquer 70 000 bornes, poteaux et plaques d’habitation, comme à Auroüer. Le four à à installer dans toute la France, comme celles pain étant un équipement assez complexe, il conservées à Bessay-sur-Allier. pouvait être utilisé par plusieurs habitants, ce qui lui donnait un caractère public ou semi- L’arbre de Sully à Gannay-sur-Loire est un public. C’est le cas à Piroir, sur la commune exemple inhabituel de petit patrimoine. Il de Bressolles. Le four est disposé dans une s’agit des vestiges d’un arbre qui aurait été petite maison indépendante de l’habitation. planté sous le règne du roi Henri IV pour servir de borne de distance entre Limoges Sont également inclus dans le petit et Autun, à l’époque où le grand voyer de patrimoine les chapelles, les niches et les France, c’est-à-dire le responsable des routes oratoires, comme la petite chapelle du royales et des embellissements urbains, était

château121 de l’Augère à Montilly ou l’oratoire le duc de Sully. de Longvé à Bressolles abritant une copie de la Vierge à l’Enfant de Longvé conservée au LE PATRIMOINE COMMERCIAL ET musée du Louvre. INDUSTRIEL Quelques édifices intéressants par leur On peut aussi mentionner les murets de architecture ou leur décoration témoignent pierre sèche, c’est-à-dire qui n’ont pas de l’activité commerciale du territoire au été humidifiés au contact d’un mortier, XIXe siècle et dans la première moitié du XXe. délimitant les parcelles au lieu-dit Beaumont Le marché couvert de Dornes, construit en de Pouzy-Mésangy ou encore les plaques 1948 par l’architecte Cristo, se rattache au de signalisation à Yzeure ou Bessay-sur- style Art Déco. Il a été transformé en salle des Allier. Le développement de la signalétique fêtes et des poutres métalliques remplacent routière, qui succède aux plaques en fonte les précédentes en bois. Lurcy-Lévis comme celle visible à Yzeure, rue Bergeron- conserve également un marché couvert à Vébret, est lancé par les frères André et structure métallique réalisé vers 1900, avec Edouard Michelin à partir de 1921. Ils vont un décor remarquable de briques colorées.

71 127

127. Plaque de signalisation routière à Yzeure

128. Plaque de signalisation Michelin à Bessay-sur-Allier

129. Murets de pierre sèche au lieu-dit Beaumont à Pouzy-Mésangy

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129

72 130. L’arbre de Sully à Gannay-sur-Loire

industrielle importante avec la verrerie qui a entraîné, jusqu’à la fermeture de l’usine, une grande vitalité commerciale. La verrerie royale de Souvigny a été fondée en 1755, pour répondre à la nécessité de fabrication 130 de bouteilles pour les stations thermales voisines de Bourbon-l’Archambault et La façade soignée de la boucherie de Néris-les-Bains. Elle ferme définitivement Dornes, avec ses mosaïques aux éléments ses portes en 1979. Deux-cents personnes y végétaux stylisés, a été réalisée en 1943 par travaillent encore en 1975. Le choix du site d’Andreat, carreleur italien installé à Decize, s’explique par la proximité des mines et de spécialisé dans l’agencement des vitrines, sources de matières premières à Noyant- à la demande du propriétaire Rozan. Quant sur-Allier, ou encore Buxières-les- à l’ancien café/tabac construit sur la place Mines ainsi que des sablières de l’Allier. d’Avermes en 1894 avec sa décoration Au XIXe siècle, son activité a été favorisée qui rappelle le style Art Nouveau, il laisse par la création de la voie ferrée Moulins- deviner l’ambiance qui devait régner lors des Montluçon. Une partie de la production était marchés ou encore des foires agricoles qui livrée dans la région, une autre embarquée à se tenaient non loin, à Moulins. Une maison Moulins pour être acheminée, par voie d’eau, du bourg de Souvigny porte encore la trace vers les pays de la Loire, Orléans et Paris. de son ancienne destination. On peut lire L’entreprise produisait essentiellement des sur la façade du XIXe siècle l’inscription bouteilles. Au XXe siècle, elle s’orienta aussi « Rouennerie Parapluie », la rouennerie vers la gobeleterie pour l’hôtellerie et la étant à l’origine la fabrication de toile de restauration, la fabrication de matériel de laine ou de coton de couleur réalisée dans laboratoire, la production de verres colorés la région de Rouen. spéciaux et le façonnage d’objets décoratifs. Elle a également produit des objets pour La ville de Souvigny a connu une activité Air France, le Concorde ayant été équipé de

73 131

132 134

135

131. L’ancien marché couvert de Dornes

132. Le marché couvert de Lurcy-Lévis

133. Détail de la mosaïque de la façade de la boucherie Rozan de Dornes

134. L’ancien bar-tabac d’Avermes

135. Inscription sur une façade de la place de Souvigny

133 74 136

138

138. Assiette en porcelaine avec décor de noix en trompe-l’œil, manufacture de Champroux, vers 1830, Moulins, musée Anne-de-Beaujeu (cliché Christian Parisey)

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136 et 137. Des bâtiments subsistants de l’ancienne verrerie de Souvigny

verres provenant de Souvigny. Les bâtiments siècle de nombreuses forges s’implantent, ont occupé plusieurs emplacements. Ceux de notamment au Veurdre ou à Pouzy-Mésangy la place Saint-Eloy n’existent plus mais ceux qui devient un petit centre métallurgique. situés le long de la route de Cosne d’Allier et La ville de Lurcy-Lévis compte ainsi jusqu’à de Montluçon subsistent encore. Les corps 4000 habitants à la fin du XIXe et au début de bâtiments où se trouvaient les bureaux ne du XXe siècle (presque 2000 habitants présentent pas de caractère particulier mais le actuellement). Il subsiste malheureusement grand atelier qui contenait les fours est assez peu de témoignages de ces activités. imposant. Il comporte une série d’ouvertures en plein-cintre bien proportionnées et il est renforcé de contreforts.

La région de Lurcy-Lévis a un passé industriel notable, avec des activités liées à la céramique (porcelaineries de Champroux à Pouzy-Mésangy, de Lévis à Lurcy-Lévis) mais aussi à la métallurgie. Le nord du Bourbonnais bénéficie d’importantes ressources en bois, eau et fer et dès le XVIIe

75 GLOSSAIRE Pinacle

Arc en accolade

139. Porte en accolade, maison Thierry de Clèves, Moulins 139

Alluvial : terrain constitué par des dépôts sont aujourd’hui les vestiges, notamment le de sédiments tels que du sable, de la vase, Massif central. de l’argile, du limon, des galets, des graviers, transportés par les cours d’eau. Chapiteau : élément architectural qui couronne un support vertical comme une Arc en accolade : arc dont les lignes colonne, un pilier ou un pilastre et qui lui dessinent des contre-courbes en terminaison transmet les charges qu’il doit porter (vient des courbes, à la manière d’une silhouette de du latin caput signifiant « tête »). flammes ou de l’accolade écrite. Connétable : chef suprême des armées Bras morts : anciens méandres ou tresses n’ayant pour supérieur que le roi. Cette isolés de la rivière qui peuvent être à sec fonction attribuée des princes de sang royal, ou en eau suivant la saison et le contexte nommés à vie, est attestée en France dès le météorologique. Ils constituent des milieux Xe siècle. riches en biodiversité. Conseil de fabrique : communauté Castral : adjectif correspondant à « château ». paroissiale catholique, formée de clercs Les mottes castrales sont ainsi considérées et de laïcs, qui assure la gestion des fonds comme les premiers châteaux forts, avec nécessaires à la construction, l’entretien leurs remblais de terre, le tertre, entourés des édifices religieux et du mobilier de la d’un fossé, et leurs palissades au sommet paroisse. Hormis en Alsace-Moselle, les entourant la tour de guet en bois, prémice fabriques ont été supprimées en 1905, suite des donjons. à la loi de séparation des Eglises et de l’Etat.

Chaîne hercynienne : chaîne de montagne Dendrochronologie : méthode scientifique granitique qui se forme durant l’ère primaire de datation des bois par analyse de la (entre 500 et 225 millions d’années). Cette morphologie des cernes du bois (ou chaîne s’est érodée et les grands massifs en anneaux de croissance). Ces espacements,

76 Chapiteau

140 140. Portail du lycée Banville, rue de Paris, Moulins

conditionnés par les phénomènes Fabrique : petite construction élevée dans climatiques, sont caractéristiques d’une un jardin qui peut prendre des formes année donnée. architecturales variées : pavillon, rotonde, tholos … Diagnostic archéologique : il s’agit d’une prescription de l’Etat pour réaliser des fouilles Fanum : temple gallo-romain associant une préventives en amont de grands travaux salle centrale interdite aux fidèles (la cella), à d’aménagements, dans l’objectif de vérifier une galerie l’entourant permettant un rituel si le terrain conserve des traces d’anciennes de déambulation. Les fana peuvent être de occupations humaines susceptibles d’être plan carré ou circulaire. détruites. Fief : terre cédée par un seigneur à un Douaire : terme de droit ancien qui désigne vassal qui lui rend foi et hommage et qui a la portion de biens que le mari réserve à éventuellement d’autres devoirs envers lui. son épouse dans le cas où cette dernière lui Cette pratique s’est développée au Moyen survivrait. Âge et a conduit à l’établissement d’une aristocratie foncière. Encyclique : lettre adressée par le pape à tous les évêques et parfois à l’ensemble des Généralité : circonscription administrative fidèles. Elle expose à ses destinataires la de la France d’Ancien Régime. Les généralités position officielle de l’église catholique sur ont été créées en 1542 par l’Edit de Cognac un thème précis. et placées sous l’autorité d’un « trésorier de France et receveur général des finances ». Erosion : phénomène naturel d’usure des sols, dû à l’association du temps qui passe et Haut-Empire / Bas-Empire : le Haut- des conditions climatiques comme le vent, Empire désigne la première période de la pluie ou le gel. l’Empire romain, de 27 avant J.C jusqu’au IIIe siècle après J.C, les dates variant selon

77 Traverse

Meneau

141 141. Façade sur cour de l’hôtel du Doyenné, Moulins les historiens. Débute alors le Bas-Empire général associé à un élément horizontal dont la fin coïncide en Occident avec la fin appelé traverse. de l’Empire romain en 476. Murus gallicus : mur gaulois constituant la Haut Moyen Âge : il débute, par convention, fortification d’un oppidum, c’est-à-dire une en 476 avec la chute de l’Empire romain ville celte. Il est construit en terre solidifiée d’Occident et se prolonge jusqu’au XIe siècle, par un empilement entrecroisé de poutres début de la période dite du Moyen Âge horizontales et recouvert d’un parement de classique ou central. Les XIVe et XVe siècles pierres sèches, c’est-à-dire non collées entre sont habituellement désignés en France elles par un mortier. sous les termes de Moyen Âge tardif ou bas Moyen Âge. Nécropole : ce terme signifie littéralement « cité des morts », il désigne un groupement Lamellé-collé : technique permettant la de sépultures monumentales ou de tombes. fabrication de poutres de grande portée, Par extension, il désigne l’abbaye ou le pouvant être droites ou courbes, par collage monastère où les membres d’une dynastie de lamelles de bois. royale, princière ou d’un Etat, ont coutume de se faire inhumer. Loi 1% artistique : loi entrée en vigueur en 1951 qui prévoit de consacrer 1% du budget Pairie : ensemble de personnalités d’une construction publique à la réalisation appartenant à la noblesse, dotés durant d’une œuvre d’art. l’Ancien Régime de privilèges spécifiques, notamment celui de pouvoir siéger au Méandre : sinuosité que décrit un cours Parlement. Ce privilège héréditaire est aboli d’eau. en France en 1831.

Meneau : élément vertical qui divise la baie d’une fenêtre ou d’une porte. Il est en

78 143

Voussures 142 142. Château de Ritz, Besson Tympan Arc en accocolade Crochet Pinacle 143. Portail de l’église de Chemilly

Remembrement : nouvelle distribution Tumulus : éminence artificielle, constituée des parcelles agricoles dans l’objectif de de terre et de pierres, recouvrant une constituer des exploitations d’un seul tenant sépulture. Il est souvent consolidé par un afin de faciliter l’exploitation des terres. parement en pierre sèche.

Roche métamorphique : roche ayant Tympan à pinacles et crochets : le subi une métamorphose, c’est-à-dire une tympan surmonte la baie. Il est parfois orné transformation dans sa structure même, en d’éléments saillants en pierre sculptée, raison des paramètres dans lesquelles elle a recourbés à leurs extrémités, appelés évolué, notamment la chaleur et la pression. crochets, ou de pinacles, éléments en forme de pyramide ou de cône effilé. Sédimentation : phénomène de dépôts de particules, à l’origine des roches Viguerie : juridiction administrative sédimentaires. Les sédiments s’accumulent médiévale, administrée par un viguier. Il en couches (strates). Ils peuvent être s’agit de la juridiction seigneuriale la plus transportés par l’eau (calcaire, grès, petite qui ne s’occupe que des affaires argile) mais peuvent aussi provenir de courantes. La plupart disparaissent au l’accumulation et de la transformation milieu du XVIIIe siècle. par la chaleur ou la pression de matériaux organiques (charbon, pétrole). Voussure : Courbure d’une voûte ou d’un arc surmontant une porte ou une fenêtre, Substruction : fondation dont l’objectif est pouvant être ornée de sculptures. Plusieurs de surélever au-dessus du niveau naturel du voussures concentriques, en surplomb les sol le niveau le plus bas d’une construction. unes par rapport aux autres, définissent une archivolte. Syncrétisme : mélange d’influences s’assimilant de manière cohérente.

79 QUELQUES ÉLÉMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

Il ne s’agit pas d’une bibliographie complète - BOURDET Jean, VOINCHET François, Un mais de la mention de quelques références patrimoine en péril : l’architecture à pans-de- essentielles pour la connaissance bois de la Sologne bourbonnaise, Moulins, historique et patrimoniale du Pays d’art éditions Les Marmousets, 1984. et d’histoire de Moulins Communauté, capitale des Bourbons. - BRESC-BAUTIER Geneviève, CREPIN- LEBLOND Thierry, TABURET-DELAHAYE - AUBERT DE LA FAIGE Genest-Emile, Elisabeth, WOLFF Martha, France 1500. Entre LA BOUTRESSE Roger, Les Fiefs du Moyen Âge et Renaissance, Paris, Galeries Bourbonnais, Editions Crépin-Leblond, nationales, Grand Palais, RMN, 2010. 1896-1936. - CARADEC Marie-Anne, PAILLET Antoine - BAUDOIN Jacques, La sculpture (dir.), Terres en Bourbonnais, la terre et ses flamboyante : Auvergne, Bourbonnais, usages à travers les collections des musées Forez, Nonette, 1998. de l’Allier, Moulins, Association des Musées Bourbonnais, 2007. - BERCE François, CARADEC Marie-Anne, DELMIOT Franck, LENIAUD Jean-Michel, - CORROCHER Jacques, PIBOULE Maurice, PAILLET Antoine, STRATFORD Neil, « Au nom HILAIRE Monique, Carte archéologique de la de l’art et des souvenirs ». Le Bourbonnais Gaule. L’Allier 03, Académie des Inscriptions dans la redécouverte du Moyen Âge, Moulins, et Belles-Lettres, 1989. Association des Musées Bourbonnais, 2014. - COLAS Raymond, Châteaux en Bourbonnais, - BONNAUD Pierre, LECLERCQ Jean-Pierre, Moulins, éd. Ipomée, 1983. Habitat rural en Bourbonnais, Commission Régionale d’Auvergne de l’Inventaire - COURNEZ Estelle, Sur les traces de l’Allier, Général des Monuments et des Richesses Histoire d’une rivière Sauvage, , Artistiques de la France, 1978. Tomacom, 2015.

80 144. Orgue de François-Henri Clicquot, 1783, église prieurale de Souvigny

144

- CREPIN-LEBLOND Thierry, CHATENET - LECLERCQ Jean-Paul, « L’architecture Monique (dir.), Anne de France. Art rurale », Patrimoine du Bourbonnais, Vieilles et pouvoir en 1500, actes du colloque Maisons Françaises, n°94, octobre 1982. organisé par Moulins, Ville d’art et d’histoire les 30 et 31 mars 2012, Picard, - LEGUAI André (dir.), Nouvelle histoire du 2014. Bourbonnais des origines à nos jours, Le Coteau, Editions Horvath, 1985. - FOURNERIS Régis, Histoire de Lurcy- Lévis, Moulins, 1898, réimpression de - LEGUAI André, Histoire des communes de 1984. l’Allier : arrondissement de Moulins, éditions Horvath, 1986. - GERMAIN, René (dir.), Châteaux, fiefs, Mottes, Maisons Fortes et Manoirs en - LEGUAI André, Histoire du Bourbonnais, Bourbonnais, Romagnat, Editions collection « Que sais-je ? », Paris, n°863, Gérard Tisserand, 2004. Presses Universitaires de France, 1974.

- LALLEMAND David, VALLAT Pierre, - LITAUDON Marie, Histoire du canton de Les ateliers de potiers gallo-romains Chevagnes, Les Imprimeries Réunies, 1950- du département de l’Allier : état des 1952, réédition de 1997. connaissances, Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Auvergne, Service - MATTEONI Olivier, Servir le Prince. Les Régional de l’Archéologie, 2002. officiers des ducs de Bourbon à la fin du Moyen Âge (1356-1523), Paris, publication - Le patrimoine des communes de l’Allier, de la Sorbonne, 1998. Charenton-le-Pont, Flohic Editions, 1999. - NICOLAÏ Nicolas de, Générale description du païs et duché de Bourbonnais, Ed. M. - LEBRUN Eugène, Le Veurdre, 1913. Hérisson, Moulins, 1875.

81 145. Tombe dite de «l’Ermite», forêt de Bagnolet, Bagneux

145

- PHALIP Bruno, CHEVALIER Pascale, - Panorama Bourbonnais 1950 – 2000, MAQUET Arlette, Souvigny, la priorale et le 50 ans de la vie de notre département, prieuré, Inventaire général du patrimoine Moulins, Association Panorama culturel, Cahier du patrimoine, Bourbonnais, 2006. L’Inventaire, Paris, Somogy, éditions d’art, 2012. - Carnet de fouilles. L’actualité de l’archéologie dans l’Allier, catalogue - REGOND Annie, DELORME Henri (dir.), d’exposition du musée Anne-de-Beaujeu, Bourbonnais baroque ? Aspects du 2011. baroque et du classicisme aux XVIIe et XVIIIe siècles dans l’Allier, musée de Souvigny, - « Souvigny, des sires de Bourbon à 2009. l’animation du patrimoine », Revue d’Auvergne, n°595-596, Clermont-Ferrand, - RICARD Marie-Claire, DRILLON Caroline, Société des Amis des Universités de RAFLIN Jacques, Les plus beaux jardins Clermont-Ferrand, 2011. d’Auvergne, Luçon, Editions Sud-Ouest, 2006. - Paul de Lavenne, Comte de Choulot, Paysagiste (1794-1864), Varennes- - ROUGERON Georges, REGOND Annie, Vauzelles, Editions du CAUE de la Nièvre, CORROCHER Jacques, DUSSOURD 2018. Henriette, VARENNES Jean-Charles, Pierrette DUBUISSON, Louis GUILLOT, Articles des Bulletins de la Société Jean CLUZEL, Bourbonnais, Le Puy-en- d’Emulation du Bourbonnais, de la Société Velay, éditions Christine Bonneton, 1984. bourbonnaise des études locales, de la Revue archéologique de l’Allier ou encore - Congrès archéologique de France. des bilans d’activités édités suite aux Bourbonnais, 146e session, 1988. Société Journées Régionales de l’Archéologie. française d’archéologie, 1991.

82 146

146. Publicités sur le pignon d’une maison rue de Decize à Dornes

83 147

147. Le Château de la Fin à Thiel-sur-Acolin.

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148. Les Melays à Neuvy, détail d’une lucarne

84          ­                    „                     †             

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86 « Le Bourbonnais est couvert en partie de bois et de collines […]. On y trouve en abondance tout ce qui est nécessaire à la nourriture, mais principalement des poissons excellents que fournissent, soit des étangs, soit la Loire et l’Allier. La capitale de la province est Moulins ».

Notes d’un voyageur allemand, Just Zinzerling , vers 1612-1616

Informations pratiques

Laissez-vous conter Le Pays Le service d’animation Moulins Communauté d’art et d’histoire de Moulins du patrimoine coordonne appartient au réseau national Communauté, capitale des les initiatives du Pays d’art des Villes et Pays d’art et Bourbons, en compagnie d’un et d’histoire de Moulins d’histoire. Le Ministère de guide-conférencier agréé par le Communauté, capitale des la Culture attribue ce label Ministère de la Culture. Bourbons et conçoit un aux collectivités locales qui programme de visites. Il animent leur patrimoine. Il Le guide vous accueille, propose toute l’année des garantit la compétence des il connaît toutes les facettes animations aux habitants et guides conférenciers et des du Pays d’art et d’histoire aux scolaires. Il se tient à votre animateurs de l’architecture et et vous donne les clefs de disposition pour tout projet. du patrimoine et la qualité de lecture pour comprendre leurs actions. son histoire, découvrir son Si vous êtes en groupe, le patrimoine et ses paysages. Pays d’art et d’histoire de Le guide est à votre écoute, Moulins Communauté, capitale n’hésitez pas à lui poser des Bourbons vous propose des questions. des visites toute l’année sur réservation. Des brochures conçues à votre attention vous sont envoyées à votre demande. Renseignements auprès de l’Espace patrimoine.

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