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EN IMAGES PAR MARC DARMON (83)

GEORGES BIZET : ANNA CATERINA ANTONACCI, , COVENT GARDEN, DIR

Il aura fallu que cette rubrique ait quinze ans, il aura Mais bien entendu, si je me suis précipité sur ce DVD, fallu cette production idéale de Covent Garden, pour c’est pour la grande Anna Caterina Antonacci, que je que je parle ici de l’opéra le plus joué au monde, connaissais bien comme Cassandre hypnotique dans Carmen de Bizet. Pourtant les de Berlioz (DVD commenté réalisations de qualité en vidéo ne ici en janvier 2007), formidable Cléopâtre manquent pas, dont la prise de rôle de de Berlioz en concert (ma fille m’avait la grande Anne Sofie von Otter (un DVD emmené de force la rencontrer dans sa Opus Arte, avec Laurent Naouri en loge, tellement elle m’avait vu enchanté). toréador), mais aussi bien entendu le Nous étions également à sa prise de rôle film de avec Placido dans Carmen, dans la froideur d’un décor Domingo, Ruggero Raimondi et Julia et d’une mise en scène à l’Opéra Bastille Migenes dans le rôle de la bohémienne, qui desservait sa voix et son célèbre production de Gaumont de engagement. Elle avait partagé son 1984 qui a contribué à populariser cet sentiment avec moi après le spectacle. opéra, et un des meilleurs exemples Là, à Covent Garden, elle est incroyable. de films d’opéra. Carmen reste un Elle combine une musicalité superlative, grand souvenir de ma jeunesse un sens du théâtre avec l’agressivité et d’amateur d’opéra, je garde un souvenir le « chien » que doit avoir la bohémienne, vraiment précis des représentations une voix d’une grande chaleur et un de 1980 au palais Garnier, avec une français parfait. Sa Habanera (« L’amour distribution impensable à Paris est enfant de bohème ») est brillante, aujourd’hui : sous la direction de sa Séguedille trente minutes plus tard Claudio Abbado, Teresa Berganza, est encore supérieure. Placido Domingo, Ruggero Raimondi Le plus grand ténor actuel, Jonas et Katia Ricciarelli ! Kaufmann, aborde ici son second grand Exceptionnellement, nous ne dirons rôle français après un qui a fait rien de l’intrigue de cet opéra qui date. Exceptionnellement avec les reprend fidèlement la nouvelle que Mérimée écrivit cheveux longs (noués quand il est soldat, dénoués quand en 1845, cinq ans après son autre drame célèbre il est brigand), il est naturellement remarquable, avec empli lui aussi de vengeance, de tradition familiale sa voix à la fois brillante et chaude. Et précisons qu’à et d’amour contrarié, Colomba. Les décors simples Londres tous les chanteurs (sauf peut-être le toréador mais justes (vrai feu de bois au milieu de la scène, Escamillo), même les enfants soldats, ont un français vrai cheval pour soutenir le toréador…) de cette clair et intelligible, bien plus qu’à la dernière production sont un écrin parfait pour une représentation à Paris. performance musicale remarquable. Pour une fois Avec le film de Francesco Rosi, à l’image un peu vieillie, commençons par le chef, Antonio Pappano, qui nous c’est la version de Carmen en vidéo que je recommande prend à la gorge dès l’ouverture, son orchestre étant sans hésiter. particulièrement bien enregistré et d’une stupéfiante qualité (les solos de flûte pendant les entractes !). Un Blu-ray Decca

66 LA JAUNE ET LA ROUGE Avril 2019 N° 744