La fontaine de Charlemagne dans la forêt de Saint-Hubert (). Mythes, rites, légendes. par Philippe WALTER, membre correspondant

Dans la forêt de Saint-Hubert, à une vingtaine de kilo­ mètres au nord-est de , en bordure de l'ancienne fron­ tière linguistique romane, (1) se trouve la chapelle de Notre-Dame de Rabas. Elle se niche au cœur d'une vallée sauvage où serpente un ruisseau. Celui-ci reçoit en contre­ bas de la chapelle les eaux d'une source jaillissant à proxi­ mité du chemin conduisant du village de Saint-Hubert au hameau de Béfey (2). La source porte le nom de Fontaine de Charlemagne. Mais d'où vient cette tradition locale? Et puis que vient faire Charlemagne dans cette forêt perdue de Lorraine? (3) Comment comprendre ce site sur le plan du folklore mais aussi de l'ethnologie religieuse?

Avec l'aimable autorisation "des Amis de Rabas" de Vigy La source païenne et la chapelle romano-gothique

C'est avec Raphaël de Westphalen (1873-1949), le plus illustre folklo- riste du pays messin, qu'il faut commencer l'enquête. Ce médecin de cam­ pagne consignait au retour de ses visites quantité de légendes, traditions et coutumes que lui livraient ses patients. Sa collecte constitue un véritable trésor du folklore lorrain. S'agissant de la fontaine de Rabas, il indique :

A côté de cette fontaine, on apercevait jusqu'en 1919 et 1920, une grosse pierre émergeant d'une quinzaine de centimètres du sol. Sur la surface de cette pierre on remarquait une figure ressemblant vaguement à l'empreinte d'un énorme fer à cheval, à un rudimentaire croissant. La pierre était appelée : la Pierre de Charlemagne; les habitants de l'ancien bailliage de Lorraine allemande lui don­ naient le nom de Karlsprung, c'est-à-dire Saut de Charlemagne. (4)

Une fontaine et une pierre à légende: même minimal, ce décor n'est pas innocent. Il rappelle bien d'autres lieux semblables que le folkloriste français Pierre Saintyves faisait remonter à la préhistoire. (5) La descrip­ tion donnée est celle d'une pierre à cupules de l'ère néolithique. (6) Elle relève d'une culture mégalithique qui a laissé d'innombrables traces dans pratiquement toute l'Europe. (7)

A défaut de témoignages historiques sur cette pierre, on en est réduit, dans le cas de Rabas, à scruter les bribes éparses de la tradition orale. Car la fontaine a sa légende depuis longtemps. C'est l'abbé Cazin, archiprêtre de Vigy et premier historien de Rabas, qui la résume :

C'était, paraît-il en été. L'empereur s'adonnait au plaisir de la chasse, ou, selon d'autres, était en guerre. La chaleur était accablante. Chasseurs ou guerriers, valets, destriers, lévriers, tout le monde languissait, périssait. Le prince touché de compassion pour les siens et souffrant lui-même de la soif, fit alors vœu à la Sainte Vierge de lui bâtir, à l'endroit même, une chapelle si elle venait à son secours. Soudain, sous les pieds frémissants du coursier royal, une source jaillit, fraîche ; limpide, et abondante. L'empereur tint parole : la chapelle fut bâtie. (8)

Raphaël de Westphalen indique une variante de la légende :

Le coursier de l'empereur, arrivé au bord du talus, sauta dans le vide et imprima dans la pierre dite de Charlemagne la marque de sabot ferré. (9)

La légende comprend ainsi trois motifs principaux. Deux sont nette­ ment païens : la pierre à empreinte et le cheval sourcier, le troisième est chrétien puisqu'il s'agit de la fondation d'une chapelle. (10) A quand remonte la légende ? Il est difficile de le dire. Un chroniqueur messin du XVIe siècle nommé Jean Châtelain rapporte : En celui temps, le grand Charlemaigne, Roi et empereur d'Allemaigne, En chassant au bois a l'esbat Fonda la chapelle de Rabas. (11)

Dans cette chronique du XVIe siècle, il est bien question d'une cha­ pelle mais pas d'une fontaine. Pas d'intervention d'un cheval non plus, pour la faire jaillir. Les éléments mythiques sont absents. Le chroniqueur se limite à des faits supposés historiques: l'empereur Charlemagne décide de fonder, dans un élan de piété, une chapelle perdue au fond des bois. Un tel sanctuaire, dans un site enclavé, ne pouvait trouver sa fonction religieuse que dans un pèlerinage. Or, il semble bien que la chapelle de Rabas ait entretenu un pèlerinage depuis au moins le XVe siècle. Dans leur histoire de Metz, les Bénédictins indiquent que cette chapelle « était destinée à recevoir les religieux de Saint-Arnould dans les temps de peste et de mala­ dies épidémiques ». (12) On pourrait alors peut-être expliquer la légende de fondation carolingienne par l'intervention du monastère de Saint- Arnould, propriétaire de la chapelle. Saint Arnould était un ancêtre de Charlemagne et le monastère messin qui porte son nom a été, tout au long du Moyen Age, un puissant relais de la propagande carolingienne, comme en témoigne encore la légende d'Hervís de Metz au XIIIe siècle. (13) Au mois d'octobre 1049, le pape Léon IX (pape français né en Alsace) aurait consacré l'église de Rabas sous l'invocation de la Vierge. (14) Une partie de l'édifice primitif existe toujours: c'est la première enceinte de la cha­ pelle actuelle. Au XVe siècle, la chapelle fut en grande partie reconstruite et consacrée de nouveau. La deuxième enceinte actuelle, en style gothique, et le retable de l'autel sont de cette époque.

Toutefois, les mentions historiques du pèlerinage et de la fontaine sont rares même si la tradition orale l'établit avec netteté. Jean-Emmanuel Drochon ne mentionne pas le pèlerinage de Rabas dans sa volumineuse histoire des pèlerinages français à la Vierge (15). Au XVe siècle, Jean Aubrion mentionne la chapelle mais sans donner d'autres précisions :

[1488] Le temps estoit fort dangereux d'oraiges, car, tantost qu'il faisoit ung peu de challour, le temps se chaingeoit; et fit le dairien jour d'apvril ung ter­ rible temps de grelle, et fit grant dommaige depuis St Germain jusque bien près de Nostre Dame de Rabay. (16)

Jehan Aubrion pouvait connaître Rabas à cause du pèlerinage à la Vierge dont on peut supposer qu'il était bien vivant à cette époque puis­ qu'on a conservé deux statues de la Vierge qui remontent aux XIVe et XVe siècles. Une statue en pierre date du réaménagement de la chapelle vers 1496. Une autre statue en chêne est un peu plus ancienne (XIVe siècle) : la Vierge y présente le sein à l'enfant Jésus qui tend la main vers lui. (17) Cette statue est fixée sur un brancard car elle était portée en procession. L'abbé Cazin prouve l'existence du pèlerinage de Rabas au XVIe siècle. En 1515, précise-t-il, il était déjà de coutume d'aller boire et se laver à cette fontaine. Car « dans les baux passés, en 1515 et 1564, entre les religieux de Saint-Arnould et les fermiers auxquels ils louaient la métairie de Rabas, il est expressément stipulé que le preneur devra prendre soin de la fontaine et en entretenir le cours ». L'abbé imagine alors le pèle­ rinage au fil du temps :

Arrivé à la chapelle, on chantait, on priait, on déposait aux pieds de l'image vénérée sa petite offrande ou quelque naïf ex-voto ; puis on se remettait en route, emportant, celui-ci une branche de lierre, celle-là un petit vêtement tou­ chés de Notre-Dame, tous un peu d'eau de la fontaine de Charlemagne. (18)

Le pèlerinage de Rabas pourrait provenir de la dévotion des moines de Saint-Arnould envers Notre Dame. C'est en 1410 que Jean de Roillenat, abbé de Saint-Arnould, nomme un aumônier à Rabas. Cela prouve qu'à cette époque la grande abbaye messine tenait bien la chapelle sous son autorité. Il n'est pas interdit de penser que le pèlerinage aurait été institué pour concurrencer quelques rites païens entourant la fontaine. Le docteur de Westphalen fait même état de coutumes au paganisme marqué qui auraient survécu jusqu'au XIXe siècle :

D'après nos renseignements, on avait coutume, vers la fin du 18e siècle et après, d'aller à Rabas pour se prémunir contre les fièvres, contre les maladies des yeux, pour guérir les nourrissons malingres, en châte. Certains pèlerins y apportaient une chemise ou un autre vêtement du malade et jetaient l'objet sur l'eau du bassin creusé devant la fontaine. Si cet objet flottait sur l'eau, la guéri- son était considérée comme certaine. On trempait aussi la chemise du malade dans l'eau salutaire et on la laissait ensuite sécher sur un buisson d'aubépine du voisinage. D'autres venaient à la fontaine pour s'y laver les yeux et suspen­ daient le linge qui leur avait servi, à un arbrisseau où il était abandonné empor­ tant avec lui le mal. Le pèlerin allait ensuite toucher la statue miraculeuse de Notre Dame. (19)

Il s'agit de pratiques traditionnelles bien connues des folkloristes : épreuve par le flottement du linge, (20) ablutions, lavages de parties malades, (21) transfert des maladies aux arbres et buissons. (22) Elles sont très répandues non seulement en mais dans toute l'Europe et témoi­ gnent souvent de pratiques rituelles archaïques. Au fil des siècles, ces rites païens ont évidemment eu le temps de se christianiser. La croix dressée devant la fontaine cherche à attirer l'intérêt :

Autrefois, les jeunes filles de la contrée de Vigy désireuses de se marier allaient à la croix de Charlemagne, près de la fontaine. Elles coupaient des brindilles de rameaux verts et en formaient de petites croix. Après avoir prié devant cette grande croix, dite de Charlemagne, chacune y déposait sa petite croix soigneu­ sement confectionnée. (23) Ainsi la chapelle et la fontaine semblent être deux versants d'une seule et même dévotion. A Rabas, la superstition païenne rejoint la ferveur chrétienne. Lors de la Terreur, un document témoigne de la permanence des dévotions à Rabas: il s'agit cette fois d'une dénonciation adressée aux autorités révolutionnaires. Le pèlerinage et les statues survécurent néan­ moins à la tornade révolutionnaire.

C'est toutefois vers la mémoire légendaire qu'il faut se tourner à pré­ sent pour faire parler ce site. On se trouve bel et bien devant un de ces sites relevant de la « mythologie chrétienne » du Moyen Age (24), c'est-à- dire une mythologie païenne christianisée, ou tout au moins une mytholo­ gie païenne qui trouve dans le christianisme un moyen à la fois de mainte­ nir ses croyances et un moyen de les relier à une doctrine religieuse parée de tous les prestiges de l'autorité spirituelle.

Charlemagne sourcier

L'association de Charlemagne à des lieux légendaires n'est pas propre à Rabas. (25) Le souvenir de l'empereur est resté attaché dans la mémoire populaire à plusieurs autres sites lorrains. Dans les Vosges, la marque du fer de son cheval se trouve sur la Pierre Charlemagne près de Gérardmer. Deux autres légendes mettent en scène l'empereur: la corne de Cornimont et le brochet du lac de Longemer. Pour récompenser un garde-chasse qui l'avait secondé lors de la chasse d'un aurochs furieux, Charlemagne lui fit don d'une corne de la bête qu'il avait fait orner de bagues d'argent. Cette corne fut conservée à Cornimont qui tira, dit-on, son nom de l'objet. Une autre légende raconte que Charlemagne avait péché dans le lac de Longemer un brochet d'une taille exceptionnelle. Il lui fit ajuster un collier muni d'une clochette d'argent et le remit à l'eau. Depuis lors, ce brochet n'a jamais pu être péché et il nage toujours dans l'eau du lac tandis que l'on entend tinter sa cloche d'argent.

A 3 kilomètres de Gérardmer, sur le chemin du Holweck on trouve un Pont des fées et une pierre où le cheval de Charlemagne a laissé la trace de son sabot. Près de Chavigny, à quelques kilomètres de Nancy, se trouve une source Charlemagne. La légende ressemble étrangement à celle de Saint-Hubert. A la poursuite d'un cerf, Charlemagne assoiffé s'arrête pour chercher un peu d'eau. Ne trouvant aucune source, il ordonne à son cheval de frapper trois fois le sol de son sabot. La terre s'entrouvre et il en jaillit une source dont l'eau passait pour miraculeuse. Mais le site n'a pas été christianisé, bien qu'il se trouve à proximité d'une route de pèlerins menant à Saint-Nicolas-de-Port. (26)

Autre exemple: la source Sainte Menne. Entre Vannes-le-Châtel et Blénod-lès-Toul, se trouvait autrefois une chapelle dédiée à sainte Menne, sœur de sainte Libaire et de saint Elophe. La légende fut rapportée par l'instituteur de Blénod-lès-Toul en 1889. Charlemagne passe par là lors d'une partie de chasse. Comme il a soif, il frappe la terre de la pointe de son épée et profère un mauvais jeu de mots : « Menne, menne, amène-nous de l'eau ». Aussitôt, une source abondante jaillit. Plus de cheval, mais le sourcier Charlemagne a fait merveille, une fois de plus.

La légende existe également en Allemagne. L'église de Gudensberg (en Hesse) possède une pierre à empreinte où le cheval de Charlemagne aurait laissé jadis la marque de son sabot. Il en aurait fait jaillir une source. Autre présence carolingienne dans le folklore allemand : au confluent de la Diemel et de la Weser, sur une colline, se trouve une roche présentant l'empreinte du bras de l'empereur. (27)

Une telle récurrence de légendes topographiques conduit à une obser­ vation : les motifs relevés laissent apparaître une stéréotypie légendaire qui pourrait bien être la trace d'anciens mythes préchrétiens. Tout se passe comme si, en des endroits très différents, la configuration particulière d'un site (avec pierre, fontaine et arbres) avait suscité une explication légen­ daire de son origine. Toutefois, ce n'est pas le site qui a créé la légende, c'est plutôt la légende qui a créé le site. Le mythe possède évidemment sa part de responsabilité dans cette création. On en conclut alors que la visite supposée de Charlemagne à Rabas ne doit plus se poser en termes de vrai­ semblance historique mais bien en termes de symptôme légendaire. Cette présence d'une légende fait signe et fait sens dans un scénario mythique aux significations ethnologiques.

Les origines mythiques du cheval sourcier ne sont plus à démontrer. Dans ses Métamorphoses (V, 262), Ovide mentionne la source Hippocrène que le cheval Pégase né du sang de sa mère fait jaillir sous son sabot. Cicéron évoque l'empreinte géante du cheval de Castor (frère de Pollux) lors de son apparition pendant la bataille du lac Régille remportée par Postumius. (28) La mythologie védique raconte comment Mithra fait jaillir une source d'un rocher. (29) La mythologie celtique n'ignore pas non plus le cheval sourcier. Celui-ci appartient à un dieu ou un personnage de l'autre monde. Un texte irlandais intitulé L'Inondation du Lough Neagh raconte qu'Oengus, fils du Dagda (le dieu bon), remet un cheval fée à des visiteurs. Il leur prescrit de toujours faire marcher ce cheval au pas. Mais les posses­ seurs du cheval négligent ce conseil et une fontaine magique surgit sous les pas de l'animal. On peut aussi songer à la légende du cheval Bayard auquel la tradition médiévale puis populaire attribue des faits semblables. (30)

Dans le cas de Rabas, on se trouve, à l'évidence, devant un récit mythique de fondation. L'invention de la source par le cheval se redouble de l'édification d'une chapelle par son impérial cavalier. La source païenne a certainement précédé la chapelle chrétienne, cette dernière ayant proba­ blement eu pour fonction de christianiser un site cultuel païen. Il n'y avait aucune raison d'édifier une chapelle dans un lieu si écarté sinon pour recouvrir de piété chrétienne de vieilles pratiques superstitieuses qui se perpétuaient à cet endroit.

Mythe, site et rite

En fait, prise isolément, la tradition carolingienne de Rabas ne peut relever que d'une tradition historique invérifiable ou de la belle légende invraisemblable. C'est l'attitude qui a prévalu jusqu'aujourd'hui. Il y a toutefois une autre voie à explorer: celle du folklore comparé. Les sites légendaires constituent de véritables complexes mythiques qu'il convient d'analyser comme tels. Ils peuvent révéler des sites plus anciens (préhisto­ riques) qui ont pu entretenir un lien avec la religion mégalithique. Un mythe s'inscrit toujours dans un site auquel sont associés des rites (chré­ tiens ou profanes, voire les deux à la fois).

La rencontre de la source et de la pierre à légende est en soi significa­ tive. En rajoutant l'arbre (Béfey, nom du village voisin nous renvoie au fagus « hêtre », (31) on obtient la triade pierre, source et arbre qui est caractéristique d'un site druidique. Un bon exemple se trouve dans la forêt de Brocéliande où une fontaine (celle de Barenton) est associée à un per­ ron mégalithique et à des pins. Pour le celtisant C. Guyonvarc'h, « toute forêt celtique, quelle qu'elle soit et où qu'elle soit, est en principe un sanc­ tuaire. C'est le nemeton, d'un mot qui, dans la Gaule méridionale, ne ser­ vait plus qu'à traduire le latin templum » (32). A Rabas, la présence d'un toponyme en fagus (Fey) à côté d'un site cultuel (sans doute antérieur au christianisme) n'est pas étonnante. On sait que le hêtre était un arbre sacré chez les Celtes puisque l'on possède une inscription à un Deo Fago avec des motifs végétaux dans le Comminges. A Rome se trouvait le Fagutal, sanctuaire dédié à Jupiter, et en Thessalie était adoré un Zeus Phégos (33). Dans les cultes antiques, principalement d'origine indo-européenne, le hêtre se présente bien comme un arbre sacré, au même titre que le chêne. Béfey fait donc bel et bien partie du décor mythique de Rabas.

Par ailleurs, c'est probablement une erreur d'isoler le site de Rabas et de le considérer dans sa singularité purement locale. Il existe d'autres sites comparables dans d'autres régions françaises, souvent avec des rites sem­ blables, des légendes identiques, voire des noms analogues. Une telle redondance n'est pas une simple coïncidence. L'explication paraît être la suivante: on se trouve devant des sites cultuels dont l'importance aurait été marquée d'une légende significative car récurrente. C'est précisément cette récurrence qui en modèle le caractère mythique. En Saintonge par exemple, Robert Colle a rapporté l'histoire d'une autre fontaine de Charlemagne qui ressemble étrangement à celle de Rabas :

Il s'agit bien sûr d'une légende, Charlemagne n'ayant peut-être jamais mis les pieds dans notre région. Sur la route de Marennes, entre Saint-Sornin et Saint- Just, on montrait encore il y a quelques années les « traces des pas du cheval de Charlemagne ». Je les ai vues avant qu'elles ne disparaissent sous le goudron de la route : ce sont les fossiles de coquillages, les hippurites, qui ressemblent à des sabots de cheval.

Au village de Villeneuve, non loin de Montierneuf, rapporte Garnier, existait une « fontaine de Charlemagne ». On raconte que le monarque, parti à la pour­ suite des Sarrasins, campait là avec toute son armée et que ses soldats man­ quaient d'eau. Comme il priait le Seigneur, son cheval frappa du pied et fit jaillir du sol une source dont l'eau merveilleuse faisait guérir rapidement les blessures.

Par la suite, on oublia la source et ses vertus curatives. Or, un jour, un chasseur nommé Gauvin blessa une biche. Il partit à sa poursuite et la retrouva près d'une fontaine. La bête buvait de l'eau et fut aussitôt guérie. Le chasseur goûta à son tour l'onde rafraîchissante et sentit immédiatement toute sa fatigue s'envoler.

[Le seigneur de Marennes gravement malade est guéri par Gauvin grâce à une fiole d'eau venant de la fontaine. Pour le récompenser, le seigneur lui accordera le droit de garder la source afin qu'il puisse guérir les malades et blessés qui viendraient y chercher remède.]

On oublia de nouveau la fontaine miraculeuse: Gautier prétend qu'elle fut détruite par la construction d'un canal. En fait, elle existe toujours près de Saint-Agnant, je l'ai retrouvée : elle alimente en eau des jardins maraîchers dont les légumes doivent être particulièrement délicieux et bénéfiques. (34)

Paul Sébillot (35) rapporte une autre série de légendes - généralement caniculaires (36) - racontant des inventions de sources parfois par des héros (comme Roland) mais le plus souvent par des saints. Lorsque l'ar­ mée de saint Martin traversait le territoire d'Ancerville (Meuse), ses sol­ dats souffraient de la soif. Le saint commanda à son cheval de frapper la terre et sous son sabot se mit à sourdre la fontaine abondante qui coule encore au Pré Saint-Martin (37). Ailleurs encore: tandis que saint Martin prie le ciel pour obtenir de l'eau, son cheval frappe un rocher d'un violent coup de pied qui y reste empreint et il en sort une fontaine qui existe près de Druyes (Yonne). A Clion (Loire atlantique), même miracle pour le che­ val du même saint. (38) Pour la France, le témoignage écrit le plus ancien d'un équidé laissant son empreinte sur une pierre et faisant jaillir une source se trouve chez Grégoire de Tours au VIe siècle. De passage à Nieul- lès-Saintes, l'âne de saint Martin imprime la marque de son sabot sur une pierre, à côté d'une source que l'animal a fait surgir. (39) Il existe par ailleurs des Pas saint Martin dans de très nombreuses régions françaises et même en Belgique. Dans sa fonction de sourcier, saint Martin a ainsi des émules : saint Julien, saint Jacques, saint Georges, saint Mathurin, etc. Le saint change parfois de nom mais l'histoire reste toujours la même.

Le positivisme moderne condamne le folklore où il ne voit que super­ stitions et fadaises galopantes. Il oublie qu'avant de relever d'un cadastre foncier la terre relevait d'un plan d'occupation sacré des sols dont on entre­ voit aujourd'hui l'importance pour l'étude des cultures dites traditionnelles.

Le nom de Rabas

Un mythe se conserve souvent dans des noms. L'onomastique et la toponymie sont de véritables conservatoires des traditions mythiques. Le nom de Lyon, capitale des Gaules, contient celui du dieu panceltique Lug (Lug-dunum) dont la mythologie souligne la fonction souveraine. Le nom de Rabas n'a pas la même notoriété mais suscite quand même l'intérêt. Il faut d'abord prêter attention aux différentes formes attestées du nom dans les textes écrits depuis le XVe siècle (il n'y a pas d'attestation plus ancienne). (40) Ces formes transcrites sont le reflet d'une prononciation changeante, le copiste médiéval écrivant généralement ce qu'il entend :

Ralbas (1405, dans un document relatif à l'abbaye de Villers, liasse Rabas) Capella beatae Mariae de Rabay (1410, abbaye de Saint-Arnould) Ravay (1437, chronique du doyen de Saint-Thiébault) Notre Dame de Rabay (1488, Journal de Jean Aubrion) Notre Dame de Raibay (1511) Notre Dame de Raba Ribba (1610) Roba (1756) Raibay (en patois) Rebach (en allemand)

On écartera l'étymologie de Rabas proposée par l'abbé Cazin d'après le seul nom germanisé Rehbach (« ruisseau des chevreuils »). Elle est pho­ nétiquement indéfendable et résulte de la germanisation artificielle des noms de lieux français pendant l'occupation allemande. (41)

Le français dialectal ouvre une première piste pour comprendre le terme. En l'état actuel, l'explication reste toutefois hypothétique. En fran­ çais du XVIe siècle, le mot rabat se trouve chez Rabelais. L'un des titres facétieux d'ouvrages appartenant à l'abbaye de Saint-Victor est: La Mommerie des Rebatz et Lutins. (42) Comprendre : « la mascarade des esprits follets et des lutins ». Le dictionnaire de la langue française du sei- zième siècle d'E. Huguet glose le mot rabast en esprit follet, lutin (43) avec cet exemple daté de 1586, où Pierre Le Loyer, conseiller du roi au présidial d'Angers, rapporte : « Quelquefois aussi ès maisons particulières on oit des bruits et tintamarres qu'y font les Rabbats, Lutins ou Esprits follets ».

En dialecte solognot, les rabâteux sont « des gens peu scrupuleux qui faisaient peur aux gens, disent maintenant les esprits forts. Ils montaient dans les greniers la nuit, faisaient les revenants et en profitaient pour voler le blé. Les gens le savaient mais ils avaient peur quand même et n'osaient pas aller les surprendre ». (44) Le rabast, rabat est donc un lutin, un esprit follet. Il est, comme les korrigans bretons, un être de l'autre monde. Il était réputé faire du tapage, autrement dit rabater. Selon O. Bloch et W. von Wartburg, le verbe rabâcher serait un synonyme de l'ancien rabaster (attesté vers 1175) puis rabater « faire du tapage ». L'étymon serait d'ori­ gine pré-romane ou germanique. (45) On se demande si cet esprit plus ou moins souterrain qu'est le rabat ne conduirait pas alors vers le raboliot solognot, le lapin de garenne qui creuse des terriers et qui vit donc, lui aussi, dans le monde souterrain. La rabouillère est le lieu où le lapin de garenne creuse son terrier (lequel lapin se dit en anglais rabbit). Ce lien avec le monde souterrain est peut-être suggestif car il conduira à envisager plus loin l'aspect archéologique du site de Rabas. On comprendrait assez mal cependant que le nom d'un lutin ou d'un feu follet ait pu être associé à celui de la Vierge. Il faut donc envisager une autre explication.

Le nom de Rabas pourrait, par l'intermédiaire du rabat, évoquer la rage (*rabia, en latin vulgaire). (46) Au Moyen Age, on attribue l'origine de certaines maladies à des êtres malfaisants, généralement des revenants ou des êtres de l'autre monde (esprits incubes ou succubes). C'est le cas pour un certain Roba mentionné dans la Légende dorée et qui est possédé par des démons au point de devenir enragé. (47) La rage est transmise par des animaux infestés qui possèdent de ce fait un statut diabolique: l'assi­ milation de la rage et du rabat aurait pu être facilitée par une ancienne homonymie remontant au latin vulgaire (où Rabas et *rabia devaient être proches).

La toponymie locale appuierait peut-être cette explication. Pour arri­ ver à Notre-Dame de Rabas, on passe par le village de Saint-Hubert. Or saint Hubert est un éminent guérisseur de la rage. (48) Lors du pèlerinage (au lundi de Pentecôte) avait lieu (encore dans les années 1960) la bénédic­ tion des enfants. Ceux-ci passaient devant le prêtre qui posait l'extrémité de son étole sur leur tête. On sait l'importance de l'étole de saint Hubert dans les rites de protection contre la rage. C'est vraisemblablement pour protéger les enfants de la rage ou de toute autre influence maligne comme la folie par exemple que le prêtre procédait à cette bénédiction (à cet effet, l'étole de saint Hubert est bien posée sur la tête). La période de la Pentecôte est d'ailleurs marquée, un peu partout, par des rites apotro- païques contre la rage et la folie. Le pèlerinage de Rabas a lieu le lundi de Pentecôte. Or, le lendemain, à Echternach au , la procession dansante en l'honneur de saint Willibrord mime des phénomènes de pos­ session ou une danse de Saint-Guy qui s'apparente à une folie. Les deux pèlerinages auraient ainsi une fonction apotropaïque : il s'agissait par l'in­ termédiaire de rites christianisés de se protéger de maladies graves que l'on attribuait toujours à des influences malignes de créatures ou d'esprits malfaisants. (49) L'autre moment important du pèlerinage de Rabas était la procession circulaire de la chapelle jusqu'à la fontaine. Une fois arrivé devant la fontaine, le célébrant procédait à une aspersion d'eau bénite, comme pour un rite d'exorcisme. (50) Est-il invraisemblable de penser alors que le rabat était un esprit qui hantait les fontaines et que le christia­ nisme s'efforçait d'exorciser? (51) Ensuite la procession se reformait et revenait vers la chapelle. Le rite ambulatoire visait ainsi à neutraliser les effets supposés maléfiques de la fontaine et à mettre celle-ci sous la pro­ tection de la Vierge. L'espace païen est comme annihilé par le rite chrétien. Il est mis sous tutelle, puisque la procession place symboliquement par le mouvement de la marche le lieu païen sous l'autorité de la Vierge. On ima­ gine alors qu'à l'instar de la « colline inspirée » de Sion-Vaudémont (52), cette forêt inspirée qu'est Rabas a probablement vu se succéder des cultes animistes (néolithiques) puis druidiques (celtiques) avant de devenir un lieu de pèlerinage chrétien dédié au culte de la Vierge, héritière de la déesse-mère des cultes préchrétiens.

C'est toutefois une enquête comparée de tous les noms de lieux pho­ nétiquement apparentés à Rabas qui est susceptible de donner les meilleurs résultats. Le nom de Rabas existe en France comme toponyme avec diverses variantes mais avec un environnement légendaire, géographique ou rituel qui rappelle souvent celui de Rabas. Les exemples qui suivent ne sont pas exhaustifs.

REBAIS : « La paroisse de Verdelot, au canton de Rebais, possède aussi sous le titre de la Bonne Dame de Pitié, une Vierge renommée, haute d'un mètre douze centimètres, sculptée dans un seul bloc de noyer, avec le Christ sur ses genoux. Sauf le dos du fauteuil où elle est assise et qui a été brisé, la Révolution l'a respectée. Elle est encore en grand honneur. [...] Les pèlerins y accourent avec confiance, pendant le carême et au mois de septembre ». (53) Notre-Dame-de-Rabas possède également une vierge sculptée en bois. On notera la proximité des noms (Rebais, Rabas) et l'identité des rites autour de la Vierge, en dépit de l'éloignement géogra­ phique des deux sites. L'un n'a pas pu être influencé par l'autre.

RABUT. A Donlieux, en Haute-Loire, existe un lieu-dit Rabut mar­ qué par une croix dont la base est un menhir avec l'empreinte d'un Pied du diable. RABANEL. Près de Saint-Guilhem-le-désert (Hérault) se trouve l'abîme de Rabanel, près de Notre-Dame-du-Suc où l'on rencontre cinq dolmens (dont une Peyre Martine) avec une croix de carrefour plantée sur un ancien menhir.

RABIER. A Magné dans la Vienne existe une Fontaine de Puyrabier qui est la source d'une rivière appelée Belle. Un village de la Charente se nomme Theil-Rabier (où Theil semble en rapport avec le nom du tilleul). En Seine-et-Marne, à Saint-Just, au lieu-dit Plessis-Hénaut dont le patron est saint Hubert, il y avait jadis une chapelle (aujourd'hui disparue) consa­ crée à Notre-Dame-de-chêne-Rabier. (54) On se demande si cette dénomi­ nation n'autorise pas à reconnaître en rabier un ancien nom d'arbre. N'honore-t-on pas sur certains de ces sites une Vierge en bois sculpté ?

On pourrait relever encore bien d'autres exemples. Visiblement, le cas de Rabas n'est pas isolé. Il témoigne d'un contexte et d'un site que l'on pourra qualifier de mythiques dans la mesure où convergent sur un lieu prédestiné des éléments rituels (pèlerinages), légendaires et probable­ ment calendaires (liés à des moments particuliers de l'année) témoignant d'anciennes liturgies païennes plus ou moins christianisées.

La conclusion de cette brève excursion en pays messin pourrait être archéologique. Il semble en effet que le site de Rabas soit ancien, bien plus ancien que le Moyen Age qui le pare d'une chapelle et d'une légende caro­ lingienne. On ne soulignera jamais assez l'importance de la continuité des mythes et des rites sacrés sur des sites prédestinés qui ont généralement représenté à des époques antiques soit des ressources naturelles particuliè­ rement précieuses à la vie collective soit des sites sacrés qui, à l'instar de la colline inspirée de Sion, sont porteurs d'une spiritualité antérieure au christianisme. Autrement dit, la stratigraphie peut s'appliquer autant à la géologie qu'à l'ethnologie ou à l'histoire.

Le sous-sol de Rabas n'a pas encore livré tous ses mystères. La pré­ sente étude s'arrêtera sur l'hypothèse d'une stratigraphie du site. Les élé­ ments rituels et légendaires autour de Rabas et leur comparaison avec d'autres éléments semblables associés à d'autres sites possédant un nom comparable conduisent à soupçonner plusieurs strates dans l'histoire de Rabas depuis une occupation au moins celtique et peut-être néolithique des lieux. L'ethnologue laisse alors l'enquête à l'archéologue.

Un autre site avec un nom proche de Rabas incite à penser que cette enquête pourrait être fructueuse. Bretteville-le-Rabet se trouve dans le Calvados, dans la plaine de Caen, au cœur de sites néolithiques d'exploita­ tion du silex d'environ 60 hectares. On y a trouvé des pics et des haches ainsi que des résidus de pierre de taille. La fouille du site en 1955 permit aussi de découvrir un puits car les hommes du néolithique exploitaient des mines de silex à environ deux mètres de profondeur. Les puits s'ouvraient à la surface de la terre par une cheminée cylindrique d'un mètre de large. Des pioches en bois de cerf servaient à creuser la terre. Leur datation au radiocarbone renvoie entre 4900 et 3900 avant Jésus-Christ. (55) Par ses éléments traditionnels, le site de Rabas ne serait-il pas, comme Bretteville- le-Rabet, un ancien site néolithique ? Seule, une fouille archéologique méthodique permettra de le dire. Car en ces questions comme en bien d'autres, seule la terre se souvient.

NOTES

1. Cette frontière coupe en deux le département de la Moselle. Autour de Rabas se trouvent des toponymes d'origine romane (suffixe -acu: Vigy, Béfey) et des topo- nymes d'origine germanique (en -ach : Bettnach ou en -ing : ). 2. La chapelle est à mi-distance des deux villages et à 300 mètres environ (en direc­ tion de Béfey) de la Fontaine de Charlemagne. 3. Charlemagne serait effectivement passé à en 772, 782, 783 et 806 mais on ne possède aucune preuve historique de sa venue à Rabas. 4. WESTPHALEN (R. de), Petit dictionnaire des traditions populaires messines, Metz, Le Lorrain, 1934, col. 625-632. 5. SAINTYVES (P.), Corpus de folklore préhistorique, Paris, Nourry, 1934-1935 (2 volumes). 6. Elles portent aussi le nom de pierres à écuelles, pierres à fossettes, à bassins ou a cupules. Voir REINACH (S.), Cultes, mythes et religions, Paris, Leroux, t. 3, 1913 : « Terminologie régionale et scientifique des monuments mégalithiques » (p. 434- 448). Du même auteur dans le même volume voir aussi: « Les monuments de pierre brute dans le langage et les croyances populaires » (p. 364-433). 7. Pour le domaine alpin: Rupestres. Roches en Savoie. Gravures. Peintures. Cupules (catalogue d'exposition), Chambéry, Musée savoisien, 1990. 8. CAZIN (Abbé), La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice histo­ rique, Metz, Béha, 1884 (lre édition), p. 12. L'abbé Jean-Pierre-Désiré Cazin (1840-1926) fut archiprêtre de Vigy et, à ce titre, eut la charge d'organiser le pèle­ rinage de Rabas. 9. WESTPHALEN (R. de), Petit dictionnaire des traditions populaires messines, Metz, 1934, col. 626. 10. Sur la chapelle: P. Lesprand, La chapelle de Rabas, Etudes d'histoire ecclésias­ tique messine offertes à Monseigneur Willibrord Benzler, Guénange, 1902, p. 65- 119. 11. CAZIN (Abbé), La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice histo­ rique, Moulins-lès-Metz, chez l'auteur, 1924 (2E édition), p. 12. 12. Histoire de Metz par les Bénédictins, t. 2, p. 139. 13. WALTER (Ph.), Géographie et géopolitique dans la légende d'Hervis de Metz, Olifant, 13, 1988, p. 141-163. 14. Il n'existe plus de document original sur cette fondation. Toutefois, une bulle papale qui existait encore en 1405 attribuait bien la consécration de Rabas à Léon IX. Elle fut transcrite en 1603 par un moine de Saint-Arnould. Voir Abbé Cazin, La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice historique, Moulins- lès-Metz, 1924 (2E édition), p. 28-29 (avec la transcription du document). 15. DROCHON (J. E.), Histoire illustrée des pèlerinages français de la Très Sainte Vierge, Paris, Pion, 1890. Pour le diocèse de Metz, p. 1179-1188. 16. Journal de Jehan Aubrion, éd. Loredan Larchey, Metz, Blanc, 1857, p. 198-199. 17. Reproduction de cette Madone de Rabas dans la revue Nos Traditions, t. 1, 1938, p. 131 ainsi que dans: Le chemin des reliques (catalogue d'exposition), Metz, Musée municipal, 2000. Sur les statues médiévales de la Vierge en pays messin, voir aussi le catalogue de l'exposition du Musée de Metz (1ER juillet - 18 septembre 1983): Sculptures religieuses régionales du Moyen Age et de la Renaissance, Metz, Musée d'art et d'histoire, 1983, 18. CAZIN (Abbé), La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas. Notice histo­ rique, Moulins-lès-Metz, chez l'auteur, 1924 (2E édition), p. 63-64. 19. WESTPHALEN (R. de), Petit dictionnaire des traditions populaires messines, Metz, 1934, col. 629-630. 20. SÉBILLOT (P.), Le folklore de France. T. 4. Les eaux douces, Paris, Imago, 1983, p. 76-82. 21. SÉBILLOT (P.), ibid. 22. SAINTYVES (P.), « Le transfert des maladies aux arbres et aux buissons », Bulletin de la société préhistorique française, 15, 1918, p. 296-300. 23. VEBER (E. L.), Villers-Bettnach, Metz, sans éditeur ni date, p. 37. La tradition décrite ici est celle des croisettes qui ont lieu, autour de la fête de la croix (3 mai), du dimanche des Rameaux à la Pentecôte: VAN GENNEP (A.), Le folklore français. Cycles de mai, de la Saint-Jean, de Vété et de Vautomne, Paris, Laffont, 1999, t. 2, p. 1346-1369. Pour des attestations médiévales: WALTER (Ph.), La mémoire du temps, Paris, Champion, 1989, p. 315. 24. WALTER (Ph.), Mythologie chrétienne. Fêtes, rites et mythes du Moyen Age, Paris, Imago, 2003. Traduction espagnole: Mitologia cristiana. Fiestas, ritos y mitos de la Edad Media, Buenos Aires, Paidos, 2005, 204 p. 25. Sur Charlemagne mythique: DONTENVILLE (H.), Histoire et géographie mythiques de la France, Paris, Maisonneuve et Larose, 1973, p. 158-164. 26. MAUD'HUY (R.), La Lorraine des légendes. Contes, croyances et légendes de la Lorraine, Paris, France-Empire, 2004, p. 291. 27. MAUD'HUY (R.), La Lorraine des légendes. Contes, croyances et légendes de la Lorraine, Paris, France-Empire, 2004, p. 295. 28. Cicéron, La nature des dieux, trad. de C. Auvray-Assayas, Paris, Les Belles Lettres, 2002, livre 2, chapitre 2 et livre 3, chapitre 5. 29. SAINTYVES (P.), « Le thème de l'eau jaillissant du rocher dans le culte de Mithra », Revue des traditions populaires, 24, 1909, p. 401-406. 30. DONTENVILLE (H.), Les dits et récits de mythologie française, Paris, Payot, 1950, p. 203. 31. Béfey pourrait s'expliquer alors par *bel -fagu (le beau hêtre). C'est déjà l'étymo- logie proposée par H. Hiegel, Dictionnaire étymologique des noms de lieux du département de la Moselle (en collaboration avec Ch. Hiegel), , 1986, p. 53. 32. GUYONVARC'H (C), « Nemeton, la forêt sanctuaire », dans: Brocéliande ou l'obs­ cur des forêts, La Gacilly, Artus, 1990, p. 35. 33. DELAMARRE (X.) {Le vocabulaire indo-européen, Paris, Maisonneuve, 1984, p. 168) note toutefois que le grec phegos est « une sorte de chêne » car le hêtre n'existe pas en Grèce, ce qui met le hêtre dans le voisinage mythique du chêne. 34. COLLE (R.), Nouveaux contes d'Aunis et de Saintonge, La Rochelle, Rupella, 1992, p. 119-120. 35. SÉBILLOT (P.), Le Folklore de France, Imago, 1983, p. 24 et suiv. 36. Sur la mythologie de la canicule : WALTER (Ph.), Canicule. Essai de mythologie sur Yvain de Chrétien de Troyes, Paris, SEDES, 1988. 37. Monographie d'Ancerville par l'instituteur, 1889. Cité par Maudhuy, p. 204. 38. SÉBILLOT (P.), Le Folklore de France. T 7: Les monuments, Paris, Imago, 1983, p. 25. Du même auteur: Le Folklore de France. T2: La terre et le monde souter­ rain, Paris, Imago, 1983, p. 195-246 (Les empreintes merveilleuses). 39. « In illius enim fontis ore est lapis in testimonium, qui vestigium retinet aselli huius super quem sanctus sedit antistes » Grégoire de Tours, De miraculis sancti Martini, livre 4, ch. 31 dans Migne, Patrologie latine, t. 71, p. 1003. 40. BOUTEILLER (Ch. J. E. de), Dictionnaire topographique de l'ancien département de la Moselle, Paris, Imprimerie nationale, 1874, notice Rabas. 41. L'abbé Cazin {La chapelle et le pèlerinage de Notre-Dame de Rabas, Metz, 1884, p. 3 et 4) cite des étymologies encore plus incroyables proposées avant lui. L'étymologie en Rehbach est reprise par H. Hiegel, Dictionnaire étymologique des noms de lieux du département de la Moselle (en collaboration avec Ch. Hiegel), Sarreguemines, 1986, p. 276 et l'article du même auteur: Les lieux-dits sur les mammifères sauvages dans le bailliage d'Allemagne, Annuaire de la société d'his­ toire et d'archéologie de la Lorraine, 1973, p. 22-23. On notera que la forme sup­ posée du XIIe siècle (Rebach) qui sert de base à cette explication est d'authenticité douteuse (germanisation artificielle ?) et elle est totalement atypique par rapport à la série des formes romanes qui lui succèdent. 42. Œuvres de François Rabelais, édition d'A. Lefranc, tome troisième, Pantagruel, Paris, Champion, 1922, ch. VII, p. 94. La note 194 cite un texte d'époque où il est question d'un « rabat que toutes les nuicts rodoit par les rues qu'ils appelloient le roy Hugon ». Le mot était encore usuel dans les patois d'Anjou et de Poitou au début du XXe siècle. Il a parfaitement pu exister dans d'autres régions. 43. HUGUET (E.), Dictionnaire de la langue française du seizième siècle, Paris, Didier, 1965, p. 302. Voir aussi: F. Godefroy, Dictionnaire de l'ancienne langue fran­ çaise et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle, t. 6, p. 527-528. 44. EDEINE (B.), La Sologne. Documents de littérature traditionnelle. T3. Paris, La Haye, Mouton, 1975, p. 57. 45. BIOCH (O.) et WARTBURG (W. von), Dictionnaire étymologique de la langue fran­ çaise, Paris, PUF, 2002 (collection Quadrige), p. 528. 46. BIOCH (O.) et WARTBURG (W. von), Dictionnaire étymologique de la langue fran­ çaise, p. 530. Le latin classique donne la forme rabies. 47. VORAGINE (J. de), La Légende dorée, trad. de J. B. Roze, Paris, Garnier- Flammarion, 1967, t. 1, p. 328-329 (Vie de saint Pierre, martyr). 48. GAIDOZ (H.), La rage et saint Hubert, Paris, Picard, 1887. 49. On notera le parallélisme de dates entre les deux saints : Hubert est fêté le 3 novembre et Willibrord le 9, six jours plus tard. 50. Le pèlerinage est aujourd'hui appauvri dans ses rites essentiels mais l'auteur de ces lignes a encore pu assister aux derniers feux de cette tradition pluriséculaire. 51. L'hypothèse serait d'autant plus séduisante que la rage suscite des réflexes d'hy- drophobie. Sur les êtres féeriques qui hantent les sites portant le nom de Rabas, on pourra par ailleurs mentionner cette tradition normande. Dans le bois de Rabey, près de Quettehou, il y avait un grand chêne surplombant le ruisseau de Morsalines. « Pendant la nuit de Noël, le tronc de l'arbre s'ouvre, une dryade apparaît et distribue des pièces d'or à pleines mains » (E. Colin, Légendes de Basse Normandie. Inventaire communal, Condé-sur-Noireau, Corlet, 1992, p. 141. 52. BARRÉS (Maurice), La colline inspirée, édition critique de J. Barbier, Sarreguemines, Pierron, 1985. 53. DROCHON (J. E.), Histoire illustrée des pèlerinages français de la Très Sainte Vierge, Paris, Pion, 1890, p. 1257. Voir aussi: LECOTTÉ (R.), Recherches sur les cultes populaires dans Vactuel diocèse de Meaux (Seine-et-Marne), Paris, Mémoires de la Fédération folklorique d'Ile-de-France, 1953, p. 82. Verdelot, archiprêtré de Coulommiers. 54. LECOTTÉ (R.), Recherches sur les cultes populaires dans l'actuel diocèse de Meaux (Seine-et-Marne), Paris, Mémoires de la Fédération folklorique d'Ile-de-France, 1953. 55. Etudiant le culte de saint Guinefort, guérisseur d'enfants depuis le XIIIe siècle, en région lyonnaise, J. C. Schmitt conclut son étude par une étude topographique où est émise l'hypothèse d'une présence humaine très ancienne sur le site du pèleri­ nage médiéval: SCHMITT (J. C.), Le saint lévrier. Guinefort, guérisseur d'enfants depuis le XIIIe siècle, Paris, Flammarion, 1979.