WILWISHEIM @ Editions Coprur, 1992 1, rue Paul Muller-Simonis - 67000 Tous droits réservés, textes et illustrations ISBN 2-903297-70-3 Couverture : Béatrice Wolf Coordination et mise en forme : Guy Trendel Imprimé par "L'Alsace SAP", Mulhouse Dépôt légal n° 3967 - septembre 1992 WILWISHEIM

WELSE, MINI HEIMET

EDITIONS COPRUR

AVANT-PROPOS La parution de "Wilwisheim : Welse, mini Heimet," devait marquer le centenaire de l'existence de notre Caisse de Crédit Mutuel nommée à sa naissance : "Wilwisheimer Darlehens- kassen Verein, Raiffeisen Kasse La fusion des caisses décidée par les organismes de direction du Crédit Mutuel a fait que notre "Kass" n'a plus de fonctionne- ment autonome au moment où elle fêtera ses cent années d'exis- tence. Pour l'événement, les préparatifs étaient néanmoins en cours. La rédaction de "Wilwisheim : Welse, mini Heimet" était déjà très avancée lorsque notre caisse adhéra au groupement des caisses de et environs. On décida néanmoins de marquer la date du centenaire de sa naissance, notamment par la parution du présent volume, rédigé après de nombreuses et parfois longues recherches dans les archives de la commune, dans celles de la paroisse, dans celles de Strasbourg ainsi qu'aux archives départementales. Les cahiers de la Société d'histoire et d'archéologie de ont également été consultés. Des renseignements ont été recueillis parmi les habitants de notre village. Dans ce domaine, le curé Joseph Spitzer me fut d'une grande aide. Je lui dois mes remerciements. C'est d'ailleurs lui qui m'a poussé à rédiger cette histoire. Il s'agit d'un travail qui ne peut prétendre être achevé, tant la matière est inépuisable. Peut-être qu'avec le temps il se trouvera quelqu'un qui complètera ou rectifiera cette œuvre après consul- tation d'autres sources (cadastre, état-civil, actes notariels, etc.). Ce n'est pas la nostalgie du passé qui m'a incité à écrire ces contributions. Comme le présent est la suite du passé, nous devons beaucoup à ceux qui nous ont précédé dans des condi- tions beaucoup plus dures que celles que nous connaissons. Nous avons un devoir de reconnaissance envers nos aïeux. Il faut Au-dessus des toits du vieux village surgit le clocher, symbole de Wilwisheim (tableau du peintre A. Edel). éviter que le sombre manteau de l'oubli jette son ombre sur le passé de notre village. Se souvenir est une nécessité, car l'histoire n'est qu'un éternel recommencement. Le passé est la source du présent et nous com- prendrons mieux le présent si nous connaissons les siècles écou- lés : un village qui ignore son histoire est un village qui perd son âme. Nous ne voulons pas la perdre. Nous voulons savoir qui nous sommes et être fiers de notre "Heimet". Puisse la lecture de ces pages d'histoire mieux faire connaître et encore mieux faire aimer notre village que l'on désigne par le mot "Heimet" ce qui, à mon avis, est intraduisible. Gabriel Keller WELSE, MINI HEIMET Voilà sortie, après de longs et méritoires travaux de recherche, cette anthologie historique de notre village de Wilwisheim. Wilwisheim d'hier, Wilwisheim d'aujourd'hui ! Le présent baigne dans le passé. Pour comprendre la physionomie, l'âme de notre cité, il faut relier le présent au passé, ou plutôt chercher dans le passé la source, les racines du présent. Ce faisant, nous découvrirons la richesse de notre patrimoine et y puiserons tou- jours davantage notre attachement à "Welse mini Heimet". En restituant la petite histoire locale dans le contexte de la grande histoire, Gabriel Keller a montré que le village et ses habi- tants plongent leurs racines dans un passé agité, mais riche et fécond, dans un terroir abondamment arrosé de sueur et de sang de notre Alsace bouleversée par tant de drames, de guerres, de dévastations, mais ressuscitant toujours à une vie nouvelle, comme le phénix surgit de ses cendres. C'est la fidélité à ce passé qui sera le meilleur garant d'un avenir sûr et heureux et que mentWilwisheim alsacien restera et chrétien. ce qu'il a toujours été : un village profondé- Le village n'a pas échappé à l'évolution, à la marche historique du temps et des mœurs, mais il est resté peut-être plus attaché à son passé, plus "conservateur" que d'autres localités des envi- rons. Situé sur un axe de passage, avec la vallée de la Zorn, et plus tard avec le canal et le chemin de fer, il aurait pu subir des transformations importantes, mais il a su garder sa physionomie traditionnelle et son âme. Pour tous ses enfants Wilwisheim est resté Wilwisheim, la "teure Heimet", où l'on aime toujours venir et revenir pour se retremper aux sources, pour "se ressourcer". Même les jeunes, auxquels on a pourtant inoculé, dès l'école pri- maire, le virus du voyage, aiment revenir, après parfois quelques aïeux.années d'absence, et planter leurs pénates là où ont vécu leurs Les lotissements, avec inévitablement leurs apports nouveaux, ont amené des idées et des habitudes nouvelles. On vit un peu Pourpour certainssoi, sa vie la àmesse soi. Sur du le dimanche plan humain matin et estsur devenue le plan chrétien. l'affaire des vieux du "vieux village". Sans antinomie mais en toute indé- pendance : les temps changent ! Et le pari semble lancé : est-ce le nouveau qui va absorber l'ancien, ou l'ancien a-t-il assez de res- lesources nouveau profondes, ? de moelle épinière pour accueillir et assimiler En tout cas, puisque le nouveau et l'ancien doivent cohabiter, il faut fraterniser et collaborer pour le plus grand bien de tous. Je souhaite que cette publication apporte à tous un regain d'amour et d'attachement à leur village, à ses habitants, à ses grandes valeurs humaines et chrétiennes. Durant de longs siècles la flèche de notre église a été le point de ralliement pour tous les villageois ; qu'elle continue de l'être, avec la grâce de Dieu. Joseph Spitzer, curé WILWISHEIM D'HIER, D'AUJOURD'HUI, DE DEMAIN Le 21 mars 1991, le Crédit Mutuel comptait un siècle de pré- sence à Wilwisheim. A l'origine nous avions la Raiffeisenkasse. Elle se référait à tra- vers sa dénomination à l'homme qui avait développé dans le monde bancaire l'idée d'entraide mutuelle. Son esprit, son idée avaient été entendus par des habitants de Wilwisheim qui ont pris l'initiative de les mettre en pratique et c'est ainsi que notre localité figure dans le peloton de tête des caisses centenaires. Cette commémoration était une occasion unique de remonter aux sources de la "banque du village". Mais c'était l'occasion aussi de remonter dans le passé de notre village. Cela a été possible grâce à un travail de recherches et de rensei- gnements effectué par Gabriel Keller. Nous devons à sa passion de l'histoire et à sa pugnacité d'avoir aujourd'hui un livre riche en anecdotes, en témoignages, en "vécu" de et sur Wilwisheim. Qu'il soit remercié pour son inlassable travail. Grâce à Monsieur Keller nos habitants se rappelleront mieux certaines années pas- sées. Quant aux jeunes, ils découvriront une partie d'histoire de leur village. Ce passé, il a été fait et vécu, parfois dans des conditions diffi- ciles, par ceux qui nous ont précédés. Jour après jour, mois après mois, année après année ils ont façonné, par leurs décisions et leur travail, le Wilwisheim d'hier. C'était le village où ils vi- vaient, c'était le village qu'ils aimaient. D'autres ont pris la relève. Maintenant dans nos familles, dans nos associations, dans la paroisse et la commune nous vivons le présent. Nous le vivons ensemble : ceux dont les racines remon- tent dans un lointain passé et qui retrouveront dans les chapitres du livre les traces de leurs ancêtres, ainsi que ceux qui sont venus un beau jour à Wilwisheim, s'y sont arrêtés et s'y sont installés. Ensemble, nous formons le Wilwisheim d'aujourd'hui. Et la vie continuera. Hier, aujourd'hui, et puis ce sera demain. Ce demain, c'est à nous tous qu'il revient d'y penser et de le pré- parer au mieux. Il y a cent ans les habitants de Wilwisheim ont adopté l'esprit Raiffeisen pour créer la "Spar- und Darlehnskasse". Sachons per- pétuer l'esprit de cet homme qui, sa vie durant, a su s'attacher aux habitants des villages où les péripéties de sa vie l'ont mené. Partout il a su trouver le temps et l'énergie pour proposer, parti- ciper, aider. Quel que soit notre âge, quelle que soit notre fonction n'ou- blions pas que la vie d'une société a souvent besoin de l'autre. Et l'autre, de temps en temps, c'est nous. Alors, ensemble et si nous aimons notre village, façonnons ce Wilwisheim de demain ! Pierre Fuchs, maire NOTRE HISTOIRE

1 ne nous est pas possible de dire quand a été fondé le village qui aujourd'hui porte le nom de Wil- 1 wisheim. Nous en sommes réduits à des présomp- tions. Wilwisheim fait partie des quelque 250 com- munes d'Alsace dont le nom se termine par heim, ce qui peut être traduit par foyer, résidence, domicile, etc. Les recherches des histo- riens ont permis AUX ORIGINES d'établir que la créa- tion de ces villages DU VILLAGE remonte au Ve siècle, voire au IVe, c'est-à- dire à une époque où les Alamans, une peuplade de la rive droite du Rhin est venue s'établir dans notre région. On pourrait donc supposer que la création de Wilwisheim remonte à cette époque. Il n'est toutefois pas à exclure qu'une agglomération ait déjà existé à l'époque romaine, car à l'endroit où se trouve le village actuel, il y avait un carrefour de voies romaines. Une voie partait de l'actuel lieu-dit Berg (Berri) et passait par l'Altenberg (Steinreben) en direction de Bouxwiller. Une autre voie permettait de joindre Neuwiller (Morlet : Notice sur les voies romaines, cahier 153, Société d'Histoire et d'Archéologie de Saverne). Saverne et (Brocomagnus, capitale des Triboques) étaientcours de reliés la rivière par une Zorn. voie Lors romaine de la constructionqui suivait sensiblement du canal de lale Marne au Rhin, on a d'ailleurs mis au jour une partie de cette voie entre et Waltenheim. Plusieurs auteurs affirment que la dénomination "Herren- weg" de certaines voies actuelles s'applique à d'anciennes voies romaines. Nous trouvons cette dénomination pour une partie de la route menant de Wilwisheim vers Hochfelden et également pour une partie de l'ancienne voie romaine qui partait du lieu-dit Berg vers Bouxwiller. documentLe nom dede notrel'année village 1074 apparaîtsous la dénomination pour la première Wulvenesheim. fois dans un Il s'agit d'une ordonnance de l'empereur Henri IV, par laquelle il faisaitde biens don immobiliers à l'abbaye de situés , à en Wulvenesheim récompense de et fidèles dans lesservices, com- munes voisines : Praeceptum Henrici quarti regis super XXX mansos diversis in locis sitos scil ad Scerlenheim, Mellesheim, Wulvenesheim, Lupfenstein, Mummenheim (Schœpflin : Alsatia Diplomatica p. 175, original aux archives de Heidelberg). La dénomination Wulvenesheim peut être interprétée comme foyer de Wulfo ou de Wulfino, ce dernier pouvant être le fonda- teur du village ou le chef de clan venu s'établir à cet endroit. Ou taireplus simplement,des lieux. il s'agit peut-être du nom du principal proprié- Le nom Wulf ou Wulfo se rencontre très souvent dans l'appel- lation des villages (, Wolfsganzen, , etc.) mais aussi comme patronyme. Il signifie loup. Le nom de cet ani- mal revient très souvent dans les dénominations, car à une certai- ne époque les loups étaient légion dans notre pays. Dans la mythologie nordique ou germanique on constate que avecles Germains le mot Wolf. avaient une prédilection pour les noms composés Pour le père des dieux germaniques, Wotan ou Odin, les deux loups Frecki et Geri étaient des animaux sacrés. Signalons qu'en ce qui concerne Wilwisheim, un canton de notre ban est dénommé Wolfsklamm. Par ailleurs, il existait autrefois dans notre ban une chapelle dédiée à saint Wolfgang, le patron des pâtres, le protecteur des foyers et des biens. Les habitants de Wulvenesheim ont adopté de très bonne heure la religion catholique. La paroisse a pour patron saint Martin de Tours. Selon l'historien Pfleger (Entstehung der elsâs- sischen Pfarreien, pp. 39-40), la christianisation de l'Alsace se serait faite en grande partie sous l'invocation de saint Martin. La création des paroisses ayant ce saint pour patron remonte- rait aux époques mérovingienne ou carolingienne. Toutefois, Pfleger remarque qu'il n'est pas possible d'affirmer que l'origine de l'église Saint-Martin de Wilwisheim puisse remonter à cette époque. Wilwisheim avait d'ailleurs dans ses armoiries saint Martin, cavalier assis sur un cheval couleur d'argent, partageant son manteau avec un mendiant, le tout sur fond bleu. Dans un rôle d'imposition de 1371, Wilwisheim est dénommé Wulfisheim (Médard Barth : Zur Geschichte der elsassischen Pfarreien). Dans un autre document datant de 1419, nous trou- vons Martin Zwecker, "Lütpriester" à Wulfesheim. A partir du XVIe siècle, c'est la dénomination actuelle qui apparaît, dénomination qui a également servi de patronyme. C'est ainsi qu'en 1591, un Philippe Wilwisheim acquiert le droit de bourgeoisie à Strasbourg tout comme Caspar Wil- wisheim de en 1640. La même année, Hans Adolphe Wilwisheim est employé à la Mauresse à Strasbourg. De 1648 à 1650, Johann Philippe Wilwisheim est pasteur pro- testant à près d'. Quant au patronyme Wilfesheim, sans doute une déformation de Wulfesheim, il existe de nos jours dans la région de Wissem- bourg. Sur une carte de l'Alsace, au musée historique de Strasbourg, nous trouvons la dénomination Wiltzen, qui en son temps, faisait partie du "Amt Kochersberg". Dans les œuvres inédites de Ph. Grandidier nous relevons le nom Wilssheim.

Détail de la carte de Cassini (XVIIe siècle) avec Wilwisheim au centre. La vox populi a fait de Wilwisheim, tout simplement par contraction, Wilse, ce qui souvent vaut à ses habitants des remarques non dépourvues d'une certaine ironie. NOTRE SITUATION ADMINISTRATIVE Durant le Moyen Age, Wilwisheim faisait partie du territoire de la Reichsritterschaft. Le lieu était terre d'empire et dépendait donc directement de l'empereur. Pendant la Révolution, Wilwisheim faisait partie du district de Haguenau-. Après la Révolution, Wilwisheim ainsi que le canton de Hoch- felden, font partie de l'arrondissement de Saverne, ce jusqu'en 1870, date de son rattachement à l'arrondissement de Stras- bourg-Campagne.Dans sa séance du 9 juillet 1828, le conseil municipal a voté un crédit de 12 francs pour l'apposition de deux inscriptions (2 Aufschriften) avec le nom de la commune et l'éloi- gnement du chef-lieu d'arrondissement et du chef-lieu du dépar- tement à fixer sur l'immeuble Lorenz Stalter et l'immeuble Mehler, libellées : Dieser Ort liegt 2 Stiinden vom Bezirksort und 6 Stiinden von dem Départementsort Strasbourg, c'est-à-dire à deux heures de Saverne et à six heures de Strasbourg. L'immeuble Stalter se trouvait à l'emplacement de la maison Gérard Bœhm ; la maison Mehler où fut fixée la seconde plaque (am Ausgang lings am Haus Mehler) n'existe plus. Elle a été démo- lie lors de la rectification du tracé de la route principale en 1950. Elle appartenait en dernier lieu à la famille Bœhm Richard. LE BAN COMMUNAL Le ban communal de Wilwisheim a une superficie d'environ 539 hectares. Son tracé est curieux, car à la sortie du village, au sud, après avoir traversé le pont qui enjambe la Zorn, non loin de la gare, l'on se trouve sur le ban de Lupstein. A environ deux cents mètres, légèrement au sud-est de la gare, l'on se trouve sur le territoire d'. A l'est, il touche au ban de , alors qu'au nord-est, le ban s'approche des premières maisons de cette même commune. Au nord il est limité avec le ban de Gottes- heim et approche cette commune d'environ 400 mètres. Du côté ouest, la limite de notre ban se trouve à environ 250 mètres des premières maisons de Dettwiller. La rivière Zorn forme la limite sud du ban. L'on peut être tenté de traduire le nom Zorn par colère. Elle n'aurait pas volé cet épi- thète, car autrefois il lui arrivait souvent d'être en colère et d'inonder non seulement les prairies, mais aussi une partie du village, les eaux remontant en période d'inondation des fois jusqu'à une trentaine de mètres de la mairie, si bien que les habi- tants du bas quartier étaient obligés de trouver refuge avec leur bétail dans les autres quartiers du village. Signalons encore le Lienbach, long d'environ 6 kilomètres et qui vient d'Imbsheim-. Il longe l' Altenberg et se jette dans la Zorn près de la Niedermühle. Quant au Wallbrunne en réalité le Wegbrunnen, il s'agit d'une source qui débouche sur le côté gauche de la route principale si l'on sort du village vers Dettwiller, à la hauteur des maisons actuelles André Schmitt et Albert Willem. Ses eaux, d'une excel- lente qualité, alimentaient les habitants de l' Oberend ou Ewerang. L'eau de la source est recueillie dans une auge, s'écoule finale- ment dans un fossé qui rejoint la Zorn non loin de la gare. Un coin romantique du village, à droite émerge la grange dîmière (tableau de A. Eael). 1

LES MOUVEMENTS DE POPULATION Nous ne disposons d'aucune donnée quant au chiffre de la population du village pendant le Moyen Age. Il est à présumer que la commune comptait environ 400 habitants à cette époque, nombre fortement réduit à la suite des épisodes de la guerre de Trente Ans (1618-1648) et notamment par la peste qui a fait de grands ravages dans toute l'Alsace. A la fin de la guerre, Wilwisheim comptait encore 200 habi- tants répartis dans les 25 fermes qui subsistaient. Des documents conservés aux archives de la commune, il res- sort que Wilwisheim comptait le 5 messidor de l'an 2 de la République, soit le 25 juin 1794,330 habitants, dont 64 hommes, 57 femmes, 92 garçons et 117 filles. Le 8 pluviôse de l'an 3 (1795), la commune avait 336 habitants. Ce n'est qu'à partir du milieu du XIXe siècle que nous dispo- sons de chiffres plus réguliers. En 1865, selon Baquol-Ristelhuber la commune aurait compté 512 habitants, dont 503 catholiques et 9 luthériens. Selon les documents des archives de la paroisse, il y avait : 460 fidèles en 1881 460 fidèles en 1911 490 fidèles en 1882 472 fidèles en 1913 430 fidèles en 1886 457 fidèles en 1914 450 fidèles en 1891 454 fidèles en 1916. 480 fidèles en 1900 Il est à noter que dans ces chiffres étaient compris les fidèles habitant entre autres sur le ban de la commune de Lupstein (moulin, canal). Selon les statistiques administratives, Wilwisheim comptait : 518 habitants en 1905 441 habitants en 1921 505 habitants en 1908 479 habitants en 1931 531 habitants en 1910 463 habitants en 1936 454 habitants en 1914 430 habitants en 1946 454 habitants en 1919 Les 430 habitants vivaient dans 107 immeubles. Il existait soixante cinq exploitations agricoles qui nourrissaient 233 per- sonnes, soit 54,2 % de la population (recensement du 10 mars 1946). En 1954, le nombre des habitants était passé à 447. Il existait alors 105 logements dans 100 maisons (recensement de 1954). En 1986, le chiffre de la population de Wilwisheim était de l'ordre de 550. L'augmentation du chiffre de la population est due à la création des lotissements du Sand, du Schwarzen Grund et du Gaenselberg où sont venus s'établir des familles de diverses autres communes de la région. Wilwisheim compte 600 habitants lors du recensement de mars 1990. LES ARMOIRIES DE LA COMMUNE

Le blason de Wilwisheim est coupé, au premier de gueules au lion issant d'argent, au deuxième de sable à la roue d'or (Armorial des communes du Bas-Rhin, 1963). Il rappelle celui des seigneurs du village, les Wangen et les Neuenstein. L'ancien blason, écu d'azur avec saint Martin, le patron de la paroisse, cavalier doré sur un cheval argenté, parta- geant son manteau avec un mendiant, a été rejeté par la commis- sion compétente en raison de sa trop grande utilisation. On ne peut que le regretter. e Moyen Age est pour notre région avant tout une période d'insécurité. Vers la fin de la guerre de L Cent Ans (1337 à 1453) cette situation favorisa l'intrusion ennemie. Des bandes armées parcouraient notre région, la mettaient à sac, pillaient et volaient. Une des plus connues était composée d'Armagnacs, laireque lasurnomma haine popu- très Du MOYEN AGE, vite Arme Gecken, AU SEUIL DE LA ou pauvres gueux. GRANDE GUERRE dansNotre la village, vallée desitué la Zorn, a toujours été un lieu de passage pour les armées et les bandes armées. En 1444 une forte troupe commandée par le dauphin Louis, futur Louis XI, intervint en Alsace. C'était une cohue d'aventuriers de toutes nationalités, traînant à sa suite des milliers de pillards et de femmes de mauvaise vie. Si notre localité a été épargnée par cette bande, il n'en fut pas de même du proche Ingenheim qui fut occupé et le château incendié (1444). Cette bande forte d'environ 16 000 hommes déferla sur l'Al- sace par le col de Saverne et commit dans la plaine les pires exac- tions. Plus de 100 villages furent incendiés. A un homme fut frotté avec du sel puis rôti. Selon le chroniqueur Jakob von Kœnigshoven des membres de cette bande déshonoraient grandement des femmes, même des accouchées et des fillettes, de sorte que beaucoup d'entre elles moururent. D'autres victimes furent décapitées, d'autres encore émasculées. La popu- lation assurait de son mieux sa défense contre ces bandes. On creusait des fossés et réalisait des enclos de haies vives. C'étaient des protections suffisantes contre les rôdeurs isolés, mais non contre des bandes organisées de pillards. Peut-être que la Klamm de Wilwisheim constituait un tel dispo- sitif de protection. C'était un fossé de près de 3 mètres de profon- deur et autant de mètres de largeur, long d'environ 300 mètres qui quittait la route de Gottesheim près de l'actuelle croix rurale de la famille Brucker-Ott et qui rejoignait le Obergottesheimerweg. Pendant plusieurs siècles la Klamm donnait passage à un chemin de terre bien abrité. Le passage a été comblé en 1984 avec la terre provenant des travaux de réalisation du lotissement Gaenselberg. Une autre dénomination que l'on trouve dans de nombreux bans communaux de notre région est celle d'Altenberg. Selon cer- tains auteurs, ce terme signifierait : endroit où l'on voit arriver les ennemis, les pillards. Dans notre ban communal, la hauteur Alten- berg est effectivement un endroit d'où l'on jouit d'un vaste pano- rama. LA GUERRE DES PAYSANS Près d'un siècle après les Armagnacs, notre région est ensan- glantée par la guerre des Paysans (1525). Le village de Lupstein est resté tristement célèbre par la bataille que se livrèrent les paysans révoltés et les troupes des duc Antoine de Lorraine et duc de Guise. La bataille se termina par l'incendie de l'église où se réfugièrent les paysans (16 mai 1525). L'ossuaire du cimetière de ce village nous rappelle ce tra- gique événement. Il n'est pas à exclure que des paysans de Wilwisheim aient par- ticipé à cette bataille, car la troupe (der Haufen) de Neubourg- , fortement engagée à Lupstein, avait demandé le 22 avril 1525 aux habitants de notre commune de se réunir sur la place publique pour se rendre en renfort à Neubourg près de Haguenau d'où le même Haufen était parti. LA GUERRE DE TRENTE ANS La guerre de Trente Ans fut un affrontement entre les protes- tants regroupés dans la Ligue évangélique avec Frédéric V le Palatin, et les catholiques rassemblés dans la Sainte ligue de l'empereur de la maison de Habsbourg. La défenestration à Prague de deux des quatre membres du gouvernement des Habsbourg, le 23 mai 1618, mit le feu aux poudres. Le comte Ernest de Mansfeld qui s'était déjà signalé en Alsace en juillet 1610 par sa cruauté envers les habitants des villages protestants de , d'Oberseebach et de , déserta avec 500 mercenaires de la garnison épiscopale de Dachstein pour entrer au service de la Ligue évangélique en Bohême. Il rut vaincu à la bataille de Weisenberg près de Prague le 8 novembre 1620. Avec ses troupes (20 000 hommes), il prit la direction de l'Alsace pour envahir les domaines épiscopaux et ceux de la mai- son de Habsbourg. Il comptait y établir, à son profit, un état mili- taire protestant, espérant à cet effet le soutien de la . Tout d'abord Wissembourg fut occupé, puis Haguenau (20 no- vembre 1621) qui dut payer une rançon de 20 000 florins. Le Stettmeister Philippe Wilwisheim incita la municipalité, dont fai- sait également partie Kaspar Wilwisheim, à payer la rançon demandée. Par la suite il dut rendre des comptes à ce sujet. Mansfeld établit tout d'abord son quartier général à Hague- nau pour se lancer ensuite sur la ville épiscopale de Saverne cou- rageusement et adroitement défendue par le comte de Salm. Il assiégea la ville en janvier 1621. L'hiver était rigoureux. Son quartier général se trouvait à Steinbourg. Des habitants de Wilwisheim, de Lupstein, de et de avaient tout d'abord trouvé refuge à Dettwiller en décembre 1621. Puis beaucoup cherchèrent refuge à Saverne qui accueillit pas moins de 1 531 réfugiés, parmi eux six ménages de Wilwisheim. La veuve de Clauss Kramer et sa fille trouvèrent refuge dans la maison de Hanns Paulus dans la Oberstadt ; la veuve Georg Diebolts fut accueillie chez la veuve Jost Schle- singer dans la Mittelstadt ; Jacob Georg, sa femme et ses deux enfants chez Jacob Wagner ; le prévôt Jacobs Hanns, sa femme et leurs 8 enfants chez Hanns Georg Klen dans la Kleinstadt ; la fille de Hanns Simons chez Peter Bott dans la Mittelstadt ; les trois servantes du curé dans la maison de Hanns Welthauer. Les membres de la chevalerie d'Empire (Reichsritterschaft) qui possédaient des villages dans la région, parmi eux Wilwisheim, payèrent à Mansfeld des Salvagardien que ce dernier encaissait. Leurs possessions ne furent toutefois pas épargnées pour autant. Hochfelden fut pris par Mansfeld ; le château et les moulins furent incendiés. Ne réussissant pas à prendre Saverne, ses troupes dévastèrent la région, pillant et incendiant Saint-Jean, , . L'église de sera dévastée, mais comme par miracle, la statue de la Vierge du pèlerinage fut sauvée. Et les destructions s'accumulèrent. Les villages tout autour du Scharrach furent incendiés, Ingwiller connaîtra, le 10 mai, le même sort tragique. Les habitants d' et de seront rançonnés tandis qu'une quinzaine de villages du Kochersberg sont réduits en cendres. Mansfeld assiégea Saverne une deuxième fois du 21 au 24 juil- let, cette fois encore sans succès. Lorsqu'il se retira, la misère régnait dans la région. Les champs étaient devenus des friches lorsque les réfugiés purent regagner leurs villages. Finalement Mansfeld quitta l'Alsace et mourut. La région ne retrouva pas la paix pour autant, car le roi de Suède Gustave Adolphe, secrètement soutenu par le roi de France Louis XIII vint au secours de la Ligue évangélique. Après le départ de Mansfeld, les Habsbourg n'étaient pas ras- surés en ce qui concerne leurs possessions en Alsace. Ils crai- gnaient une immixion de la France. Dès 1627 ils firent stationner des troupes dans les villes et villages d'Alsace qui devaient sub- venir à leurs besoins, ce qui devint de plus en plus difficile, le pays étant très appauvri à la suite de la campagne dévastatrice de Mansfeld. De plus, la peste causait des ravages. Pour permettre le retrait éventuel des troupes impériales, le colonel Ossa, commissaire impérial, décida d'ériger entre Dru- senheim et Gravelsbaum un pont de bateaux, tout en fortifiant les alentours. Le pont ne sera jamais construit. Par contre, les tra- vaux de fortification furent entrepris dès octobre 1629. Les sol- dats et des centaines d'hommes de corvée durent participer à ces travaux. La noblesse d'Alsace (Reichsritterschaft) dut fournir 14 atte- lages avec véhicules. Deux étaient de Wilwisheim. Par la suite, elle dut encore fournir 500 hommes de corvée qui étaient obligés de travailler 5 jours à , moyennant une rémunéra- tion de 5 schillings. Parmi eux se trouvaient 4 habitants de Wil- wisheim. Deux attelages avec voitures devaient également se rendre de Wilwisheim à Drusenheim. Les hommes désignés devaient se munir de pelles, de bêches et de pics. Le lieu de ras- semblement était . Plus tard les villages de la Reichsritterschaft allaient assumer 500 journées de corvées et 100 journées avec attelages et véhi- cules. Toute absence sans excuse valable était sanctionnée d'une amende de 15 livres. Au premier tour de corvée les villages de la noblesse d'empire participèrent avec 300 hommes. 15 étaient de , 15 de , 10 de , 5 de Mutzen- house, 15 de , etc. Les ouvrages si péniblement édi- fiés furent démolis en février 1632. En décembre 1632, l'armée du général suédois Horn s'établit en Alsace, dans la région de Haguenau. Fin décembre il était à Saverne, le 25 décembre il prit Haguenau, ville qui fut toutefois reprise par ruse dès le 3 janvier 1633. Début de l'année 1633, les Suédois étaient pratiquement maî- tres de toute l'Alsace où ils étaient accueillis avec soulagement dans les villages protestants, le contraire étant le cas dans les vil- lages catholiques. La prise de Haguenau mérite d'être contée. Le 12 janvier 1633, Mathis Schwarz, un paysan d'Eschbach, se présenta au gouver- neur de Saverne et évoqua la possibilité de reprendre la ville au Suédois. Sur sa proposition, une douzaine de soldats furent déguisés en paysans, portant sur leur dos des bottes de foin dans lesquelles étaient cachés des pistolets. Ils accompagnèrent un chariot. Armés de haches, ils se présentèrent ainsi le samedi 15 janvier, un jour de marché, devant les portes de Haguenau. Un détachement de 1 200 soldats et 140 cavaliers les suivaient. Entre 10 et 11 heures, les paysans déposèrent leurs bottes de foin devant la porte de l'hôpital. Un lourd chariot de foin s'arrêta devant le pont levis. Deux paysans de Lupstein, Vix Menius et Klaus Maeder firent semblant de vérifier le chariot de foin pour découvrir l'avarie immaginaire du véhicule. D'autres paysans arrivèrent sur ses entrefaits, se massant autour de l'attelage bloqué. A un signal rent.donné, tous se précipitèrent sur la garde suédoise qu'ils maîtrisè- Les troupes du duc de Lorraine (1 200 soldats et 140 cavaliers) sous le commandement du capitaine Louis Zorn de Bulach, sur- venues entre-temps firent leur entrée à Haguenau. La surprise fut entière. En moins de trois heures plus de cent soixante-dix Suédois furent massacrés, d'autres faits prisonniers. Haguenau était libéré des hommes du nord ! Le paysan Schwarz d'Eschbach fut récompensé. Vix Menius et Klaus Maeder seront dispensés de corvées par les autorités de Saverne, dispense transmissible à leur descendance, ceci pour perpétuer le souvenir glorieux de leur fait d'armes et en signe de reconnaissance (zum ewigen Ruhm met Dankbarkeit). Les cruautés commises par les Suédois entrèrent rapidement dans la tradition alsacienne et symbolisent encore aujourd'hui le comble de l'horreur. En ce qui concerne les atrocités commises, nous nous référons à ce qui nous a été rapporté par Jean- Christophe de Grimmelshausen de Renchen (pays de Bade) dans son Simplizissimus. Les soldats tuaient, faisaient rôtir les personnes, violèrent femmes et filles, saccagèrent tout dans les maisons, se servant des débris des meubles pour se chauffer. Le valet de la famille fut couché à terre, les mains liées, sa bouche fut ouverte et on lui versa dans la bouche un seau de purin. Ce fut le fameux Schwedentrunk, supplice dont les mémoires se souvenaient enco- re à Wilwisheim après la Première Guerre mondiale. C'est un nommé "Schwewels Hans", qui ne voulut ou ne put indiquer la cachette de son argent, qui en fut la malheureuse victime. Quant au père de l'écrivain, il fut lié et placé à côté d'un feu sans pou- voir remuer. On lui frictionna les pieds avec du sel humide et on amena leur chèvre qui lui lécha les pieds, si bien qu'il éclata de rire et indiqua la cachette de son argent et de ses bijoux. Des otages furent pendus aux arbres. On brûla les moissons encore sur pied. La famine régna, si bien que la peste finit par causer d'énormes ravages parmi la population. Les champs restèrent en friche, sans propriétaire. Wilwisheim ne compta plus que 25 fermes. A Hochfelden l'herbe poussa dans les rues. n petit village sur la grande route de Saverne à Brumath, les pieds dans u l'eau de la Zorn et la tête perchée sur r Altenberg. Depuis le vieux vignoble, la vue découvre le canal de la Marne au Rhin et voit passer les rapides sur la ligne de chemin de fer. Les maisons, elles se ser- rent autour du vieux clocher qui conserve des vestiges gothiques alors que la sil- houette du château rappelle les riches heures d'antan des grandes familles nobles qui vécurent ici. Jamais encore ce lieu dis- cret n'avait fait l'objet d'une publication. Grâce à Gabriel Keller, ancien commissaire de police, l'enquête à été rondement menée. Avec l'aide des gens de Wilse il a pu reconstituer les grandes étapes de l'histoire, de la naissance au seuil du XXI" siècle. Nous découvrons la grande lignée des Wangen-Geroldseck qui imposa ses coutumes, forgea des traditions. Le XIXe siècle fut celui des grands chantiers : route, canal, voie de chemin de fer. Mais tou- jours Wilwisheim fut une terre de meunerie avec les aubes des roues de moulin tournant dans les flots de la rivière. C'est un plaisir què"de lire ces textes collectés avec amour. Gabriel Keller n'a pas vu l'aboutissement de ses efforts. Il est allé, le 21 février 1992, de la mort à la vie comme le disent si bien les religieux. Il avait 78 ans. La Caisse de Crédit Mutuel, à l'occasion du cente- naire de sa création, a voulu achever l'oeuvre en publiant ce tra- vail, fruit de tant d'efforts. Ainsi une nouvelle page est tournée, la mémoire des anciens est fixée sur ces pages, elle restera, nous l'espérons, un témoignage d'espérance en ces temps de grands bouleversements.

Couverture : Aquarelle de Béatrice Wolf

Prix : 250 francs ISBN 2-903297-70-3

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