André Fazi, Documents D'appoint Au Cours D'introduction
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
André Fazi, documents d’appoint au cours d’Introduction au droit de la décentralisation et des collectivités territoriales, 2020-2021 Série de documents n° 4 Document n° 1 : débats parlementaires sur la loi du 2 mars 1982, Journal officiel de l’Assemblée nationale Séance du 8 juillet 1981, Pierre Mauroy (PS), p. 50 : Vous aurez à discuter dans les prochains mois d’un projet de loi. Tous les problèmes devront être traités dans le souci constant d’une grande liberté mais aussi dans un cadre juridique évitant un développement anarchique qui profiterait en fin de compte, à ceux qui détiennent le pouvoir de l’argent. La liberté, oui, dans un souci de pluralisme, d’équilibre et d’équité. […]. Le Gouvernement souhaite que la loi atteigne trois objectifs : assurer pleinement une autonomie par rapport au pouvoir politique, qu’il soit national, régional, ou local, mais aussi par rapport aux puissances financières ; organiser la décentralisation et favoriser la pluralité des formes d’expression ; enfin, développer les missions de culture, d’éducation, de divertissement et d’information des citoyens dans un souci de qualité des programmes et d’encouragement à la création. Une France responsable, c’est aussi un pays qui doit, désormais, enraciner l’unité de la République dans la diversité et la responsabilité de ses collectivités locales. […]. La suppression des préfets vous sera proposée non par hostilité à un corps qui a constamment témoigné de son sens de l’État mais par volonté de voir disparaître l’image d’une France centralisée à l’extrême, enfermée dans la rigidité de ses textes, de ses règlements et de ses circulaires. 1ère séance du 27 juillet 1981, Gaston Defferre (PS), p. 320 : […] les pouvoirs du commissaire de la République seront – je le répète – beaucoup plus étendus que ceux conférés aux préfets par le décret de 1964. […]. Le commissaire de la République n’interviendra pas dans l’action éducatrice, notamment en ce qui concerne l’organisation des enseignements et la gestion des établissements scolaires. Il n’interviendra pas non plus dans l’exercice de l’autorité judiciaire ni dans les attributions spécifiques des agents chargés des recettes et des dépenses publiques, ni dans les actions de l’inspection du travail dans son rôle de constatation et de répression des infractions à la législation du travail. Il n’aura pas non plus la responsabilité de la préparation de mesures de dépense à caractère militaire. Cela étant dit, dans tous les autres domaines, l’autorité du commissaire de la République sur les services de l’État dans le département sera nettement renforcée par rapport à ce qu’elle était. À titre d’exemple, ses pouvoirs dans le domaine économique en général et dans le domaine de l’emploi en particulier seront beaucoup plus importants. Il dirigera aussi l’ensemble des opérations d’investissement de l’État dans le département. Le commissaire de la République recevra, en outre, au titre de la déconcentration, tous les pouvoirs nécessaires pour décider sur place des actions de l’État. 2ème séance du 27 juillet 1981, Michel Debré (RPR), p. 327-328 : Il y a […] une différence profonde entre une décentralisation conforme à la Constitution de la République et une décentralisation du type de celle que nous présente le Gouvernement. Une décentralisation conforme à la Constitution maintient le principe de la supériorité de l’État sur les collectivités territoriales – communes, départements, régions – qui se situent à l’intérieur de l’État. Ces dernières sont des fractions administratives de la nation alors que l’État est la nation. […]. Or le projet – et l’incompatibilité avec la Constitution me paraît flagrante – permet à une section du peuple de s’attribuer l’exercice de la souveraineté. […]. Dans la conception qui est la vôtre, mais qui n’est plus celle de la Constitution, l’État, d’une part, les collectivités de l’autre, sont des collaborateurs à égalité de droits. Il y a entre eux non seulement une répartition des compétences, mais aussi une égalité de légitimité sans hiérarchie, sinon l’appel à l’ordre judiciaire […]. Mais cette magistrature est liée. Elle ne peut avoir l’appréciation des intérêts nationaux qui est une grande affaire politique. La compétence des organes juridictionnels est limitée à l’application des lois, sans appréciation d’ordre politique, sans responsabilité au regard de la nation. Les articles 2 et 16 du projet de loi affirment un principe d’indépendance qui peut toujours être opposé à un Gouvernement, à un Parlement, à un Président de la République, c’est-à-dire au responsable de la nation. Ces articles, en effet, ne sont pas accompagnés de dispositions susceptibles d’assurer par un représentant de l’État les exigences de l’unité nationale non seulement dans son sens le plus élevé mais aussi dans son sens quotidien d’unité de politique administrative, économique, sociale, éducative. […] André Fazi, documents d’appoint au cours d’Introduction au droit de la décentralisation et des collectivités territoriales, 2020-2021 Élire un conseil municipal, un conseil régional est un acte d’administration démocratique, non un acte de souveraineté. Des compétences étendues sont accordées aux représentants des citoyens dans leur ville, dans leur canton, dans leur département, en fonction d’une conception très juste et très logique : qui délègue son droit de gouverner a le droit d’élire ses gestionnaires directs ; qui exerce le droit de citoyen, membre de la nation, mérite de l’exercer en tant qu’administré à l’échelon des fractions de la nation. C’est une légitimation de l’autorité administrative ; ce n’est pas l’affirmation d’une souveraineté. Paris, Marseille, Bordeaux ne sont pas des villes souveraines. Pas plus les départements ; par plus les régions. La réunion des présidents des conseils généraux, l’assemblée des maires ne forment pas des assemblées de représentants du peuple. Ce sont des assemblées d’élus locaux. Supprimer cette hiérarchie, c’est donner la même valeur à tous les élus du suffrage universel. C’est là une tentative qui peut être assimilée à la constitution d’apanages sous la Monarchie ; c’est une reconstitution des féodalités par une mauvaise connaissance du double sens que présente le suffrage universel. […] Ici ou là, certaines apparences ne peuvent dissimuler une rupture, dont d’ailleurs, en termes politiques, vous affirmez le caractère capital en déclarant : c’est beaucoup plus qu’une réforme de l’État. C’est, en effet, une conception non unitaire, mais fédérative de la France. 1ère séance du 1er août 1981, Michel Noir (RPR), p. 673 : Le deuxième alinéa de l’article 1er, modifié par l’amendement du Gouvernement, place sur un pied d’égalité les trois collectivités territoriales et définit un principe d’indépendance susceptible d’être opposé à l’intérêt national. Il met ainsi en cause la définition d’unité et d’indivisibilité de la République. Mais, au-delà des mots, c’est-à-dire de la suppression de la tutelle a priori sur les actes d’autorité des collectivités territoriales, il y a la réalité, c’est-à-dire la création de deux nouvelles tutelles : l’une politique par la création d’une hiérarchie entre communes, départements et régions, l’autre financière avec le système retenu des comptables et des chambres des comptes. Du fait de l’autorité politique conférée par l’ensemble des dispositions proposées, les petites communes seront placées sous la suzeraineté des présidents des conseils généraux. Le maire d’une petite commune, qui était jusqu’à présent assuré d’une égalité de traitement par le préfet ou le sous-préfet, sera désormais soumis à la volonté toute-puissante du président du conseil général. Et malheur à lui s’il n’a pas la bonne couleur politique ! En guise de liberté, il ne restera plus aux maires des petites communes qu’à se soumettre ou à se démettre. […]. En plus de cette tutelle politique en cascade du président du conseil général sur le maire et du président du conseil régional sur le président du conseil général, s’exercera, comme nous le verrons à l’article 56, la tutelle financière des chambres régionales des comptes, véritable résurgence des chambres des comptes de l’ancien régime. 3ème séance du 11 septembre 1981, J. Toubon (RPR), p. 1020 : Vous avez prévu et voté la décentralisation politique : nous n’en voulons pas. Votre texte diminue l’autorité de l’État et constitue un risque pour l’unité nationale : nous le combattons. Il entraînera un alourdissement du coût de l’administration, une prolifération des fonctionnaires ; il créera un étage supplémentaire de l’administration : nous n’en voulons pas. Vous mettrez en place des potentats régionaux et départementaux : nous n’en voulons pas. Il n’y aura plus d’arbitrage entre les collectivités et entre les autorités de ces collectivités, sinon celui du parti : nous ne le reconnaissons pas. […] Le parti socialiste et le gouvernement ont eu pour objectif d’organiser le pouvoir politique, de répartir les fiefs, de reconstituer de nouvelles féodalités. Ce projet est au sens propre du mot réactionnaire. Il porte atteinte à notre conception de la République une et indivisible. Document n° 2 : Conseil constitutionnel, décision n° 82-137 DC, 25 février 1982 Loi relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions Le Conseil constitutionnel, […] 1. Considérant que, pour contester la conformité à la Constitution de la loi soumise à l’examen du Conseil constitutionnel, les auteurs des saisines soutiennent que ses articles 2, 3 et 4 relatifs aux communes, 45, 46 et 47 relatifs aux départements, et 70 relatifs aux régions seraient contraires à l’article 72, alinéas 2 et 3, de la Constitution, en ce qu’ils ne confèrent au délégué du Gouvernement dans les départements et régions, à l’égard des délibérations et des actes illégaux des autorités territoriales, d’autre pouvoir que celui de les déférer au tribunal administratif , au terme d’un délai d’attente, sans que ce recours ait de plein droit effet suspensif et qu’ainsi le délégué du Gouvernement ne pourrait plus exercer le contrôle administratif, assurer le respect de la loi et préserver la liberté des citoyens ; André Fazi, documents d’appoint au cours d’Introduction au droit de la décentralisation et des collectivités territoriales, 2020-2021 2.