UNIVERSITE D’ANTANANARIVO Faculté de Droit, d’Economie, de Gestion et de Sociologie DEPARTEMENT DROIT Master II Option science politique

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MEMOIRE DE FIN D’ETUDES DE MASTER II

THEORIES DE COMMUNICATION POLITIQUE ET PAYSAGE ELECTORAL LORS DE LA PRESIDENTIELLE DE 2013 A

Présenté par Ravaka RAZAFIMANOTRONA

Soutenu publiquement le 25 mars 2015 à 14 heures

Dans la salle 301-A, Faculté DEGS

ANNEE UNIVERSITAIRE : 2013-2014

REMERCIEMENTS

Je tiens tout d‟abord à remercier du fond du cœur tous les enseignants au sein du département Droit de la Faculté DEGS de l‟ université d‟Antananarivo ;tout particulièrement ceux du Master II- science politique qui ont fait leur possible pour partager leurs connaissances et leurs savoirs tout en essayant de nous éduquer à la vie durant l‟année universitaire.

Merci aussi à toute l‟équipe administrative et technique du département, sans qui, le bon déroulement des cours et séminaires n‟aurait pas été possible.

Un grand merci à tous ceux qui ont participé directement et indirectement à ce travail à travers leurs conseils, le temps qu‟ils ont bien voulu me consacrer, les divers documents qu‟ils m‟ont prêté ou tout simplement leurs mots d‟encouragement surtout dans les derniers instants mais qui n‟ont pas voulu être cité ici.

Merci à ma famille, mon père et ma sœur, qui m‟ont toujours encouragé à poursuivre mes études et m‟ont appuyé dans cette voie.

Un merci très particulier pour Henintsoa, qui a toujours été là pour moi et me soutient chaque jour.

A vous tous, merci !!!

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LISTE DES ABREVIATIONS

AE : Administration Electorale

APP ACP- UE : Assemblée Parlementaire Paritaire Afrique Caraïbes Pacifique- Union européenne

AREMA : Parti politique l‟Avant- Garde de la Révolution

Art. : Article

AS : Parti politique Les Autres Sensibilités

BU : Bulletin unique

BV : Bureau de vote

BP : Bonne pratique

CAAD ou CADEG : Charte Africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance de l‟UA

CE : Code électoral

CEC : Commission Electorale Communale

CED : Commission Electorale de District

CENI-T : Commission Electorale Nationale Indépendante pour la Transition

CER : Commission Electorale Régionale

CES : Cour Electorale Spéciale

CID : Centre Informatique de District

CIEDR : Convention Internationale sur l‟Elimination de toutes formes de Discrimination Raciale, de1969

CNTDI : Centre National de Traitement des Données Informatiques

CSCA : Commission Spéciale à la Commission Audiovisuelle

DPP : Délégué de Parti Politique

DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l‟Homme

EISA : Electoral Institute for Sustainable Democracy in Africa (Institut Electoral pour la Démocratie Durable)

FdR : Feuille de Route

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FFF : Parti politique Firaisam-pirenena ho an'ny Fahafahana sy ny Fandrosoana

Fokontany : Plus petite entité administrative à Madagascar (Quartier)

HCC : Haute Cour Constitutionnelle

HAT : Haute Autorité pour la Transition

INSTAT : Institut National pour les Statistiques

JO : Journal Officiel

LO : Loi Organique

MAPAR : Plateforme Miaraka Amin‟i Prezida Andry Rajoelina

MBV : Membre de Bureau de Vote

MDM : Parti politique Mouvement pour la Démocratie à Madagascar

MOE : Mission d‟Observation Electorale

MTS : Parti politique Malagasy Tonga Saina

NU (ONU): Nations Unies

OCT (L): Observateur de Court Terme (recruté localement)

OIF: Organisation Internationale de la Francophonie

OMERT: Office Malgache d‟Etudes et de Régulation des Télécommunications

ORTM : Office de la Radio- Télévision Publiques de Madagascar

OSC: Organisation de la Société Civile

OVEC: Organe de Vérification et d‟Enregistrement des Candidatures

PACEM: Projet d‟Appui au Cycle Electoral à Madagascar

PACTE: Projet d‟Appui à la Crédibilité et à la Transparence des Elections à Madagascar

PBV: Président du Bureau de Vote

PIDCP : Pacte International relatif aux droits Civils et Politiques, de 1966

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement

PV: Procès- Verbal

RDB: Radio Don Bosco

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RNM- TVM: Radio et Télévision Nationale Malgache

SADC: Communauté du Développement en Afrique Australe

SAMIFIM: Service de Renseignements Financiers Malagasy

SRMV: Section de recensement des matériels de vote dans le district

TA: Tribunal Administratif TGV: Parti du Président de la Transition Association Tanora malaGasy Vonona

TPI: Tribunal de Première Instance

UA CPLC : Convention de l‟Union Africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption

UE: Union européenne

VPM MMM: Plateforme politique Vondrona Politika Miaradia Malagasy Miasa Mianatra Miaraka

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SOMMAIRE

Introduction générale

Première partie- Communication politique : Essai de typologie et vue d’ensemble de l’environnement.

I-Typologie de la communication politique 1- La propagande 2- Le marketing politique 3- La désinformation 4- La communication de crise

II-Les composantes de l‟environnement de la communication politique 1-la méthode de la communication politique électorale 2-Les outils de la communication politique 3-les acteurs de la communication politique

Deuxième partie- Esquisse du paysage électoral durant l’élection présidentielle de 2013.

I- Les concepts qui agissent sur la communication politique 1- La culture politique 2- La culture informationnelle 3- Les particularités de la société malgache

II- Le contexte de l‟élection présidentielle de 2013 1- Le contexte historique : le système politique depuis l‟indépendance 2- Le contexte politique 3- Le déroulement de la campagne 4- La participation des médias

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III- Le cadre juridique et institutionnel de l‟élection présidentielle de 2013 1- Le cadre juridique 2- L‟organisation électorale

Conclusion

Références

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INTRODUCTION GENERALE

Depuis son indépendance, Madagascar a subi de nombreuses crises politiques cycliques qui ont grandement contribué à la dégradation de sa situation socio-économique. Les mouvements populaires de 1972, 1991, 2002 et 2009 qui ont conduit au départ du Chef de l‟Etat ont chacun ébranlé le système socio-économique malgache. Toutefois, la dernière grande crise de 2009 a mis le pays à genoux jusqu‟à en faire le plus pauvre du monde depuis 2011 selon la Banque Mondiale. Les inégalités sociales n‟ont jamais été aussi prononcées. Une grande partie des Malgaches a perdu confiance envers les institutions. Un sondage politique mené à Antananarivo en août 20131 a montré que 61,2% des enquêtés n‟ont aucune confiance aux partis politiques et que 25,3% disent ne pas leur faire assez confiance. Vers la fin de l‟année 2013, après presque cinq années de transition et de recherches stériles de consensus, beaucoup ont placé leurs espoirs dans les élections pour sortir de cette crise. Celles-ci représentent en tout cas selon les spécialistes « la moins pire des solutions » pour sortir la Grande Ile de l‟impasse dans laquelle elle se trouve. Les élections permettront en effet de mettre légalement en place de nouveaux leaders politiques qui auront à exercer le pouvoir à leurs niveaux respectifs. Cela pourrait constituer un nouveau pas vers la démocratisation de Madagascar ou vers la consolidation de celle-ci selon les points de vue. Les élections constituent un pilier de la démocratie. Elles sont le principal moyen pour les citoyens de prendre part aux décisions. Montesquieu soulignait pourtant dans De l‟Esprit des lois, que « le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie ; le suffrage par choix est celle de l‟aristocratie ». Le régime électif qui revient à sélectionner les meilleurs candidats (ceux que les électeurs estiment les plus compétents à diriger ou les représenter) comporte donc une dimension aristocratique. Il est ainsi obligatoirement jumelé à la notion de « classe politique » dont la compétence s‟avère nécessaire au fonctionnement du système politique, ce qui n‟empêche en rien ce dernier d‟être démocratique. L‟essentiel est que, dans l‟esprit populaire, les élections soient légitimes comme procédure démocratique et leur permette ainsi de reconnaître comme légitime le dirigeant élu. Encore faudrait-il que ces élections soient organisées dans les règles, libres, crédibles, transparentes, justes et équitables.

1 Friedrich-Ebert-Stiftung et _liberty 32, sondage sur la participation politique du citoyen, Antananarivo, 6-17 août 2013

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Les élections se font grâce aux référendums et aux votes des représentants pour une période définie. Depuis l‟indépendance jusqu‟à maintenant, plusieurs élections ont été organisées dans le pays: présidentielle (1965, 1972, 1982, 1989, 1993, 1996, 2001, 2006, 2013) ; législatives (1960, 1965, 1970, 1977, 1983, 1989, 1993, 1998, 2002, 2007) ; communales (1995, 2000, 2003, 2007) ; provinciales (1999) ; référendaires (1972, 1975, 1992, 1995, 1998, 2010). Le fait qu‟il y ait un nombre important de référendums et d‟élections – particulièrement présidentielles – retardées ou anticipées marque l‟instabilité politique ambiante.2 Plusieurs de ces élections ont été suivies de crises post-électorales qui se sont prolongées puis muées en crises politiques et socio-économiques. Ces crises postélectorales trouvent leur origine dans la question de l‟impartialité du processus électoral et celle de la crédibilité des élections. La remise en question de la crédibilité des consultations électorales a contribué à la désillusion des citoyens face au processus électoral, à augmenter les taux d‟abstention et bien sûr à éroder la confiance des citoyens à l‟égard des institutions issues des élections. Dans l’Enquête emploi 1997 réalisé par MADIO, 61,8% des enquêtés pensent que le système électoral ne favorise pas le développement du pays. Selon Roubaud3, en effet, beaucoup de promesses démagogiques sont faites lors des élections, mais une fois au pouvoir le peuple est déçu par le comportement des nouveaux élus qui voient dans la concurrence électorale un moyen d‟accaparer les ressources publiques. André Rasolo, dans « Les questions-clés des élections de Madagascar »4 parle de mascarade électorale avant les élections de 1993 qui ont introduit pour la première fois un second tour lors du scrutin présidentiel. Actuellement, malgré le niveau de conscience citoyenne plus élevé grâce aux actions de la société civile, la pauvreté et l‟analphabétisme sont tels que l‟environnement socioculturel ne peut accueillir une compétition électorale crédible. Pour la sortie de la crise actuelle, les élections sont considérées comme l‟unique voie de légitimation du pouvoir par plus de trois-quarts de l‟échantillon du sondage réalisé à Antananarivo en Août 2013 sur la « Participation et perceptions politiques du citoyen »5. Mais ces élections devront être libres et transparentes. La réélection de Mugabe au Zimbabwe malgré des élections reconnues internationalement comme libres et transparentes montre que

2 In Document de Projet, Projet d’Appui au Cycle Electoral 2012-2013 à Madagascar, République de Madagascar, PNUD. 3 Cf. Démocratie électorale et inertie institutionnelle à Madagascar. 4 RASOLO A., « Les questions-clés des élections de Madagascar », disponible sur http://www.fesmadagascar.org/media/seminaire_parties_prenante_election_2013/Les_questions_cles_des_el ections_de_Madagascar.pdf 5Friedrich-Ebert-Stiftung et _liberty 32, sondage sur la participation politique du citoyen, Antananarivo, 6-17 août 2013

- 9 - l‟organisation d‟élections n‟implique pas toujours plus de démocratie. Nasolo-Valiavo Andriamihaja dit VANF parle « d‟une élection qui peut elle-même devenir source de crise plutôt que sa solution », et affirme que « Le suffrage universel n‟est pas la panacée automatique à tous les maux »6. Tout ceci pour introduire notre thème de mémoire : « théories de communication politique et paysage électoral lors de la présidentielle de 2013 à Madagascar ».

De nos jours, les élections se jouent pour l‟essentiel à travers la communication politique, qui serait pour reprendre la définition de Dominique Wolton « l‟espace où s'échangent les discours contradictoires des trois acteurs qui ont la légitimité à s'exprimer publiquement sur la politique et qui sont les hommes politiques, les journalistes et l'opinion publique à travers des sondages » 7 En ce qui concerne Madagascar, ce pays a assisté à une évolution sans précédent en matière de communication politique électorale depuis l‟élection présidentielle de 2002. Les élections qui l‟ont précédé étaient aussi, certes très importantes et ont constitué un tournant remarquable dans la vie politique malgache; toutefois, l‟élection présidentielle de 2013, des 25 octobre et 20 décembre, revêt un caractère spécial, précisément en communication politique. Notre objet de recherche consistera à étudier le cadre d‟exercice de la communication politique à Madagascar, en prenant pour cas d‟étude les élections présidentielles de 2013.

Nous verrons, dans le cadre de notre travail, quels sont les évènements qui ont fait que les élections de 2013 soient aussi importantes pour l‟avenir de Madagascar; Nous étudierons ainsi le contexte politique en période électorale à travers les acteurs politiques mais aussi le cadre socio-juridique à Madagascar. Il s‟agira, dans notre projet de recherche d‟aborder les théories de la communication politique électorale ainsi que les conditions dans lesquelles elle s‟exerce en prenant en considération les divers encadrements- tant sociaux et juridiques-qui régissent le pays. La question qui paraît donc la plus apte à répondre aux exigences de ce projet de recherche est la suivante : « l’encadrement de la communication politique est-il suffisant pour permettre l’absence d’abus dans son exercice à Madagascar ? » Ainsi formulé, le projet se trouve raisonnablement démarqué. Il s‟ensuit des questions secondaires auxquelles il nous faut tenter d‟apporter une première réponse :

6 In « La théorie du choc psychologique », Chronique de VANF, Express de Madagascar du 28 Octobre 2013 7 Wolton D., Penser la communication, Ed. Flammarion 1997. - 10 -

- Quand et comment est née la communication politique ? Il s‟agira d‟en tracer l‟historique afin de pouvoir maîtriser notre théorie et avoir la capacité de l‟étudier en pratique. - Comment étudie-t-on la communication politique ? La réponse à cette question nous permettra de savoir sur quels critères se baser pour définir la communication politique d‟un pays et d‟établir, par la suite, les grandes lignes du cadre d‟exercice de la communication politique à Madagascar. - Quelles sont les circonstances autour desquelles se déroulent les élections présidentielles malgaches de 2013 ? Il s‟agit ici de reprendre les évènements qui donnent aux élections de 2013 leur importance et leur spécificité.

Il existe plusieurs angles sous lesquels nous pourrons étudier la question de la communication politique et des élections présidentielles à Madagascar, surtout en période d‟élections. D‟ailleurs, la plupart des études se font sous l‟angle socio-historique et/ou socio-juridique comme celle d‟Olivia Rajerison qui étudie « la légitimation démocratique du pouvoir à Madagascar ».Encore, est-il superficielle de le préciser, nous n‟avons pas trouvé d‟étude spécifiquement basé sur la communication politique à Madagascar ; seulement des études parcellaires et thématiques qui peuvent, si elles sont replacées ensembles et dans le même contexte, permettre de schématiser un environnement malgache de la communication politique. Nous n‟échappons pas à une analyse sociologique et juridique de l‟élection; néanmoins, la réponse à la question de recherche passe selon nous nécessairement par une étude des pratiques communicationnelles qui se distinguent de l‟analyse sociologique proprement dite. La question de recherche est ouverte mais bien précise, en ce qu‟elle permet d‟avoir une réponse qui peut être positive ou négative. Nous proposons une étude de l‟environnement de la communication politique durant une période électorale récente à travers notamment des textes juridiques et des données socioculturels.

Cette étude basée sur une méthode analytique des théories communicationnelles d‟un acteur politique lambda et de l‟environnement où va s‟exercer ces théories nous permettra de poser les bases d‟une recherche sur la communication politique à Madagascar à travers l‟étude de son encadrement tant social que juridique.

Ainsi notre problématique, autrement dit l‟angle sous lequel nous choisissons d‟aborder la question de recherche, consiste à identifier et à mettre en évidence les éléments qui soutiendraient l‟existence d‟un environnement réglementé dans lequel se pratiquerait la

- 11 - communication politique électorale et un éventuel régime de sanctions que la notion d‟ « Etat de droit » a tendance à affirmer.

Cette problématique se caractérise par : - une référence théorique aux sciences de l‟information et de la communication ; - un ancrage dans le contexte politique malgache surtout durant la période pré-électorale ; - une étude des pratiques électorales à Madagascar et des finalités de ces pratiques ; - une analyse du régime juridique touchant la politique en général et les élections en particulier. Elle permet de déterminer un cadre de recherche élargi, dont l‟objectif principal vise à montrer, que la connaissance des théories de communication politique électorale permet d‟anticiper sur les règles qui pourraient encadrer et réguler la pratique dans ce domaine.

Notre première hypothèse est que la communication politique se pratique ou est pratiquée par les acteurs de la vie politique à Madagascar. Si notre première hypothèse se trouve être exacte il s‟agira de montrer que ce que nous vivons lors des campagnes électorales peuvent être rattachés à des théories préexistantes. Notre deuxième hypothèse est que, notre droit positif et l‟état de la réglementation en matière de communication politique ne permettent pas de garantir ni même de penser à un exercice loyal, à une « concurrence » entre les divers acteurs et protagonistes de la vie politique, gage de la démocratie. Il s‟agit donc d‟analyser comment en théorie, la communication politique pourrait se manifester et comment notre système (politico-juridique) encadre son exercice dans le cas d‟une élection présidentielle.

Les élections étant un des buts principaux de toute communication politique, la période électorale de 2013 à Madagascar constituera notre cadre d‟étude temporel et notre terrain de recherche. Afin de pouvoir répondre à notre principale question de recherche qui consiste à savoir si oui ou non l‟encadrement de la communication politique est-il suffisant, nous devrons tout d‟abord clairement délimiter le cadre de travail :

- notre étude se concentrant sur la communication politique des élections présidentielles malgaches, il est clair que le lieu de travail principal sera Madagascar, surtout que les acteurs concernés, notamment les groupes politiques, tentent autant que possible de couvrir tout le territoire ;

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- nous nous intéresserons en particulier aux partis politiques, aux médias, à la société civile ainsi qu‟à l‟administration électorale en général ; - pour effectuer notre étude, nous aurons recours aux ouvrages spécialisés, aux études et aux analyses préalablement effectuées à ce sujet ainsi qu‟à des articles scientifiques de communication politique. Les divers textes juridiques, les notes, les décisions et arrêts des juridictions compétentes seront de même indispensables. Des entrevues avec des experts en histoire, en sociologie et en communication ainsi que des scientifiques spécialistes de Madagascar, des campagnes électorales, des journalistes et l‟analyse de divers supports de campagne notamment des discours de candidats et/ou des spots de campagne nous auraient permis d‟approfondir notre recherche, mais malheureusement, cela n‟a pas été possible à cause (i) du manque de disponibilité de notre part,(ii)de l‟indisponibilité chronique de plusieurs des interlocuteurs de notre choix,(iii) de l‟absence de coopération de ceux qui ont bien voulu nous accorder un peu de leur temps et dont on a estimé, de ce fait ,que leur contribution n‟était pas pertinente.

Etant conscients de la montée en flèche de la communication politique dans notre pays et de la capacité de celle-ci à manipuler la foule, nous avons trouvé intéressant de montrer à quel point la connaissance voire la maitrise du concept de communication politique pourrait s‟avérer utile pour tout citoyen. En outre, cette recherche ouvrirait de nouvelles perspectives sur la communication politique électorale à Madagascar et permettrait d‟anticiper sur les lacunes que présenterait notre système en matière de réglementation.

Les questions précédemment posées invitent à un travail en deux parties. La première partie qui traitera de la typologie de la communication politique ainsi que des composantes de son environnement dont le fil conducteur sera l‟exploitation de la littérature et des modèles d‟analyse existants déjà en matière de communication politique. L'émergence de la communication, ainsi que la méthode, les outils, les acteurs de la communication politique récemment développés, seront donc abordés. Dans la seconde partie, nous tenterons d‟établir le contexte de la question de recherche ; donc d‟exposer les circonstances spécifiques des élections présidentielles de 2013. Nous étudierons le paysage électoral en général ainsi que les contextes politiques, les cadres juridiques respectifs des partis politiques, des médias et de la période électorale, le cadre institutionnel à partir de textes et de la réglementation en vigueur. .

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PREMIÈRE PARTIE

Communication politique : Essai de typologie et vue d’ensemble de l’environnement

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I- Typologie de la communication politique

La communication politique fonctionne « selon un système à double flux entre des émetteurs et des récepteurs irrigués par une cotation permanente des valeurs et des personnes et suppose un feedback de l’opinion publique »8. Selon Jean-Paul Gourévitch, les campagnes électorales ont changé de dimension depuis les débuts de la communication politique. Cette dernière tourne autour de la figure du président et de son équipe. On assiste aujourd‟hui à un déclin des idéologies et à une montée en puissance de la personnalisation. Dans son livre Penser la communication9, Dominique Wolton évoque les différentes étapes de ce qu‟a désigné la communication politique depuis la moitié du XXème siècle dans les systèmes démocratiques :

tion de l'opinion publique

Aujourd‟hui, la communication politique englobe « toute communication qui a pour objet la politique », soit l'étude du rôle de la communication dans la sphère politique ; ce qui inclut les médias, les sondages, le marketing politique et la publicité notamment en périodes électorales. Pour définir le mieux possible la communication politique d‟aujourd‟hui, dans les systèmes démocratiques, Dominique Wolton propose la définition suivante : La communication politique est « l’espace où s'échangent les discours contradictoires des trois acteurs qui ont la légitimité à s'exprimer publiquement sur la politique et qui sont les hommes politiques, les journalistes et l'opinion publique à travers des sondages ». Cependant, la communication politique a vêtu plusieurs formes selon les époques, les régimes politiques et les évènements historiques. Il est vrai qu‟elle n‟a été théorisée et étudiée que depuis peu et qu‟elle a connu son essor dans les démocraties modernes d‟après-guerre ; mais elle a souvent été empruntée, notamment durant les guerres mondiales ou régionales, à des

8 Gourévitch J-P., l’image en politique. De Luther à Internet et de l‟affiche au clip, Ed. Hachette 1998. 9 Wolton D., Penser la communication, Ed. Flammarion 1997.

- 15 - fins d‟influence et de mobilisation. Quelles sont donc les principales facettes qu‟a connues la communication politique depuis le début du XXème siècle ?

I-1- La propagande En latin, le terme propaganda est l'adjectif verbal du verbe « propager » désignant les choses à propager. À l'origine, le terme propagande n'évoquait pas la propagation d'une information déformée. Bien au contraire, il s‟agissait de propager la foi chrétienne, notamment dans les pays non chrétiens. C‟est d‟ailleurs dans cette perspective que le pape Grégoire XV fonda en 1622 la Congregatio de Propaganda Fide (Congrégation pour la propagation de la foi), un comité de cardinaux chargé d'observer la propagation du christianisme par les missionnaires envoyés dans les pays non chrétiens. Le sens politique moderne du terme propagande date de la Première Guerre mondiale, c‟est pour cela qu‟il est devenu péjoratif. Plusieurs chercheurs et auteurs ont étudié la propagande durant la Première Guerre mondiale tellement son impact était important. Harold Lasswell, par exemple, publie un ouvrage à ce sujet en 1927, soit moins d‟une décennie après la fin de la guerre, Propaganda Technique in the World War (Mattelard A. et Mattelard M., 1995) qui expose les outils empruntés par les régimes en place pour convaincre les populations des actions entreprises. C‟est d‟ailleurs à travers cet angle, qu‟il établit sa théorie de la communication, tant reprise par de nombreux chercheurs jusqu‟à nos jours. Edward Bernays, neveu de Freud et membre de la Commission Creel - commission qui doit son nom au président qui l'a dirigée: le journaliste George Creel - créée par le président américain Wilson afin de mettre l'opinion de son côté lors de l'entrée en guerre des Etats-Unis le 6 avril 1917 - est aussi parmi les premiers à étudier la propagande, cependant partant d‟une autre problématique : Comment manipuler l‟opinion en démocratie ? Edward Bernays est fier de ses exploits: les américains acceptent désormais de mettre leur neutralité habituelle de côté, selon Bernays (2007) : « il est désormais possible de modeler l'opinion des masses pour les convaincre d'engager leur force nouvellement acquise dans la direction voulue. Etant donné la structure actuelle de la société, cette pratique est inévitable. (…) La propagande est l'organe exécutif du gouvernement invisible ». Son ouvrage Propaganda publié en 1928, fut un outil indispensable, notamment pour les dictatures de la Seconde Guerre mondiale, telle que le régime d‟Hitler et de son ministre de la propagande Goebbels, qui s‟en est servi pour approfondir ses méthodes.

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Nous verrons, ci-dessous que la définition de la propagande s‟est largement développée à travers son histoire, nous étudierons de même les types, les techniques et les principaux outils de la propagande.

I-1-1- Les définitions de la propagande Le terme propagande a eu de nombreuses définitions au fil du temps selon les différentes époques de l‟Histoire. Comme nous l‟avons déjà vu, avant le début du XXe siècle et les Guerres Mondiales qui en ont tracé l‟Histoire, ce terme n‟avait pas de connotation péjorative. Ainsi, la définition de ce terme varie selon les écoles politiques et les chercheurs qui s‟y sont intéressés. Aujourd‟hui, le terme propagande apparaît dans les dictionnaires de la langue française avec les définitions suivantes : Selon le Petit Robert (2007) le terme propagande désigne: n de la foi chrétienne. propager certaines opinions publiques ou sociales. à soutenir une politique, un gouvernement, un représentant. adhésion, un soutien. Le Dictionnaire de la Communication10, propose une définition proche de celle du Petit Robert: « Historiquement, congrégation religieuse catholique militant pour la propagation de la foi, ensemble des actions de communication partisane destinée à influencer les personnes ou les groupes de sorte à faire adopter une idée, un système, une personnalité politique ». Ainsi, dans le concept de la propagande politique, le pouvoir politique ou militaire qui souhaite l‟utiliser, devra établir une stratégie de communication dans laquelle il précisera la cible qu‟il veut influencer dans sa perception des évènements, des personnes ou des enjeux et les actions à travers lesquelles il pourra le faire ; le but étant nécessairement de mobiliser la cible et de l‟amener à avoir un comportement conforme aux demandes du pouvoir politique ou militaire. Très souvent, la propagande cherche à convaincre, étant donné que la conviction permet la mobilisation des personnes à plus long terme. Pour ce fait, elle s‟étale sur une période de

10 Truxillo J.P., Corso Ph., Le Dictionnaire de la communication, Ed. Armand Colin, 1991. - 17 - temps plus ou moins longue et cherche à profiter de tous les outils possibles et imaginables de façon à engloutir la cible et à la matraquer pour que cette dernière n‟ait aucun moyen d‟y faire face. Selon Gourévitch , « l’intervention de la propagande est permanente et multiforme : presse, radio, journaux, tracts, affiches, cinéma. Et toutes les cibles sont visées : les combattants, les civils, les familles et même les enfants »11. D'une manière plus générale, il s‟agit de propager à grande échelle des informations, fausses ou non, mais toujours partisanes. Tous les outils permettant d‟atteindre ce but sont bons ; d‟ailleurs, les techniques de propagande moderne exploitent les connaissances accumulées en psychologie et en communication pour manipuler au grand maximum les émotions, et de réduire à néant les facultés de raisonnement et de jugement.

I-1-2- L’histoire de la propagande Bien qu‟elle ait existé depuis bien longtemps, ce n‟est qu‟au XXe siècle que la propagande commence à se penser comme un ensemble de pratiques et de techniques coordonnées. C‟est notamment avec l‟indispensabilité de convaincre les opinions publiques durant les guerres mondiales, avec l‟importance accordée aux médias de masse nouvellement apparues à l‟époque et avec la nécessité de promouvoir les chefs dans les systèmes politiques, que les recherches s‟intensifient. L'étude des différents types de propagandes connaît alors un grand développement en très peu de temps. La propagande devient un phénomène reconnu, étudié, professionnalisé. Le terme propagande devient donc largement employé au début du XXe siècle. Loin d‟avoir une connotation péjorative à l‟époque, son contenu varie pourtant suivant ceux qui l‟empruntent.

I-1-2-1- Lénine : distinction entre propagande et agitation Lénine étudie le concept de la propagande dans le cadre de son traité politique intitulé Que faire? publié en 1902 dans le but d‟unifier et d‟organiser les actions des cercles ouvriers et de leur proposer une stratégie créant ainsi le parti révolutionnaire. Pour lui, il existe une distinction entre la propagande et l‟agitation : « Le propagandiste inculque beaucoup d’idées à une seule personne ou à un très petit nombre de personnes; l’agitateur n’inculque qu’une seule ou un très petit nombre d’idées mais à une masse de personnes ». Selon lui, ce sont deux concepts différents:

11 Gourévitch J-P., L‟image en politique. De Luther à Internet et de l‟affiche au clip, Ed. Hachette, 1998.

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- la propagande est un travail logique qui consiste à divulguer une doctrine complexe à travers des « écrits » ou de longues séances « d’éducation politique ». - l‟agitation dispense aux masses, toutes classes confondues, par des procédés variés, un savoir simple, relevant du « discours ». D‟ailleurs, les communistes seront les seuls à maintenir la distinction entre «agitation» et « propagande ». Ils « utilisent le mot agit-prop pour désigner ce qui ailleurs est simplement dénommé propagande »12.

I-1-2-2- Les Etats-Unis et la Première Guerre mondiale Pendant la Première Guerre mondiale, Thomas Woodrow Wilson, alors président des États- Unis décide d‟intervenir pour venir en aide à la Triple Entente. Pour modifier l‟opinion américaine qui était largement opposée à cette décision et qui optait traditionnellement pour la neutralité, il fait appel aux Comités pour l'information du public (Commission on Public Information) dirigés par le journaliste George Creel. Le journaliste Walter Lippman et le psychologue Edward Bernays sont alors engagés pour faire partie la Commission Creel. D‟ailleurs, Bernays considère que les gens sont incapables de comprendre ce qui est en jeu et de savoir ce qui est bénéfique pour eux.Seule une élite peut décider pour les autres13. Une « minorité intelligente » doit donc avoir le pouvoir « démocratique » et la masse populaire doit être modelée pour l'accepter à travers les « relations publiques », nom qu‟il a donné à la propagande, un outil qui selon lui est capable d'aider cette élite dans sa mission (Mattelard, 2001). Toutefois, Edward Bernays n‟est pas le seul à en être convaincu, Harold Dwight Lasswell croit aussi en la « gestion gouvernementale des opinions ». Pour lui, les démocraties ont besoin de propagande qui permettrait à l´ensemble des citoyens d´approuver ce que les spécialistes ont déterminé comme étant bon pour eux. (Mattelard A. et Mattelard M., 1995). C‟est donc partant de ce principe que la Commission Creel a travaillé ; le succès de la campagne de propagande de six mois effectuée par cette commission fut tellement intense que les Etats-Unis interviennent dans la Première Guerre mondiale en 1917, ce qui va faire basculer les résultats de cette guerre totale et le cours de l‟Histoire. C‟est ainsi que l‟on découvre les immenses ressources que l'on peut déployer pour influencer l'opinion publique de tout un pays. C‟est d‟ailleurs ce qu‟a fait Staline pour instaurer sa dictature.

12 D’Almeida F., « Propagande, histoire d’un mot disgracié », Mots. Les langages du politique, Éd.ENS Éditions, 2002 http://mots.revues.org/index10673.html. 13 Berneys E., Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie, Paris, Ed. La Découverte 2007, Introduction et bibliographie de Normand Baillargeon. - 19 -

I-1-2-3- La propagande stalinienne Staline s‟empare du pouvoir en 1924, à la mort de Lénine. Il exile directement son principal rival à la succession Trotsky, fondateur de l'Armée Rouge. Staline contrôle alors toute l'URSS. Considérés comme étant des traîtres, tous les opposants aux réformes brutales qu‟il impose sont éliminés. Une réelle terreur s‟instaure en URSS. Le discours politique s‟approprie les thèses du Que faire ? de Lénine en en modifiant profondément l‟esprit14. Conscient de son importance pour endoctriner toute sa population, Staline a utilisé tous les moyens de propagande disponibles à l'époque pour glorifier sa politique ; il est ainsi devenu le « Petit Père des Peuples », une image qu‟il a voulue de lui- même. En commençant par les affiches et les films de propagande, en passant par les parades militaires à la gloire de l'URSS, les manifestations spontanées, l‟utilisation de la presse, de la radio, de la télévision, du cinéma et de la peinture au service du dictateur, et l‟endoctrinement de la jeunesse dans les écoles et les organisations; et arrivant jusqu‟à truquer les statistiques de productions de céréales durant la famine des années 1930, la falsification des faits et la réécriture de l‟histoire ; Staline n‟a rien laissé de côté. Sa propagande était tellement large que la diffusion du régime communiste a aussi atteint d‟autres pays, tels que la Chine, la Corée du Nord et Cuba. Selon Jean-Paul Gourévitch : « avec la propagande soviétique commence ce que Serge Tchakhotine - dans son livre intitulé Le Viol des foules par la propagande politique publié en 1939 - appelle le viol des foules par la propagande politique. Mais ce sont les fascistes italiens et encore plus les nazis allemands qui font de la propagande un véritable système de gouvernement avec ses figures exemplaires, ses repoussoirs démoniaques, son adhésion aux chefs charismatiques et son dénouement moral et précipité »15. C‟est effectivement avec l‟arrivée de la Seconde Guerre mondiale que la propagande « décale vers l’irrationnel ». Les régimes totalitaires l‟emploient à toute fin utile. « Pour Mussolini, elle relève de l’art et de la religion ; pour Hitler de la séduction pure et mécanique »16.

14 Ansart P., « De l’idéologie à la propagande », Les Cahiers de Psychologie politique, numéro 12, janvier 2008 http://lodel.irevues.inist.fr/cahierspsychologiepolitique/index.php?id=580 15 Gourévitch J-P., L’image en politique. De Luther à Internet et de l’affiche au clip, Ed. Hachette1998. 16 D’Almeida F., « Propagande, histoire d’un mot disgracié », Mots. Les langages du politique, Éd.ENS Éditions, 2002, http://mots.revues.org/index10673.html - 20 -

I-1-2-4- La propagande nazie Dans son livre Mein Kampf dont le premier volume fut publié en 1925, Adolf Hitler annonce clairement le programme du parti nazi ; il parle aussi d‟un de ses principaux piliers: la propagande. « La propagande vise à imposer une doctrine à tout un peuple (…). La propagande agit sur l’opinion publique à partir d’une idée et la rend mûre pour la victoire de cette idée ». Pour Hitler, la propagande ne saurait rechercher objectivement les vérités : elle ne doit retenir que celles qui sont favorables à la cause défendue. Ce sont ces quelques idées qui devront être incessamment assénées17 . Après son arrivée au pouvoir en 1933, Hitler nomme trois dirigeants dont les noms rentrent désormais dans l‟histoire de la propagande : Max Amann pour la presse nationale socialiste ; Otto Dietrich pour la presse du Reich et celui qui nous importe le plus pour notre recherche, Joseph Goebbels pour la propagande. En effet, aussitôt au pouvoir, Hitler fonda un « Ministère de la Culture et de la Propagande du Reich » dirigé par Goebbels qui aurait puisé dans les travaux de Bernays pour élaborer sa campagne destructive et user de tous les outils de propagande possibles et imaginables18. Ce ministère avait pour mission de véhiculer la doctrine nazie à travers de nombreux secteurs dont le sport, les arts, la musique, le théâtre, les films, les livres, la radio, les documents pédagogiques et la presse. «L’outil privilégié utilisé dans le cadre de la propagande contre les Bibelforscher (appellation des Témoins de Jéhovah) est le support écrit »19 . Effectivement, la presse fut particulièrement active à diffuser les thèmes antisémites. La propagande nazie travaillait à l‟intérieur, à inculquer aux citoyens allemands l'idée que les Juifs étaient des sous-hommes et que les terres allemandes devaient en être débarrassées, et à l‟extérieur, que l‟Allemagne ne pouvait en aucun cas être défaite. Ils ont, pour atteindre leur but, utilisé la propagande dure qui cherche à terroriser ou à démoraliser l‟adversaire par des « images tragiques d’exécution » ou des « images lyriques de puissance » pour reprendre les termes employés par Jean-Paul Gourévitch (1998). L‟image recherchée est celle d‟une Allemagne incontestablement victorieuse. Par opposition, les pays occupés utilisaient une propagande douce. Cette dernière propose des images « de mains tendues, de sourires du

17 Ansart P., « De l’idéologie à la propagande », Les Cahiers de Psychologie politique, numéro 12, janvier 2008, http://lodel.irevues.inist.fr/cahierspsychologiepolitique/index.php?id=580 18 Bernays E., Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie, Paris, Ed. La Découverte 2007, Introduction et bibliographie de Normand Baillargeon. 19 Chatelain S., Pour en finir avec les camps, l’Harmattan 2006. - 21 - vainqueur et de tartines données aux enfants abandonnés » ; la cible étant traumatisée par l‟ampleur de la défaite. (Gourévitch, 1998).

I-1-2-5- La propagande mussolinienne La Seconde Guerre mondiale a été le théâtre d'une propagande constante, utilisée comme arme de guerre, par tous les belligérants. Benito Mussolini avait, dès la fin de la Première guerre, compris son importance. Dans les années 1920, il créé le Minculpop (Ministère de la Culture populaire) qui fonctionna comme outil de propagande à partir de 1925. Adoptant un programme révolutionnaire mélangeant nationalisme, socialisme et rejet de la démocratie libérale, le mouvement s‟appuie sur les chemises noires qui pratiquent la terreur contre les journaux et les organisations de gauche.

I-1-2-6- La guerre froide Les États-Unis et l'Union soviétique ont tous deux utilisé intensivement la propagande pendant la guerre froide. Les deux camps ont employé les médias de masse (cinéma, télévision et radio) pour influencer leurs propres citoyens d‟une part et les autres nations d‟autre part. C‟est surtout à travers la radio que les deux ennemis se sont affrontés. Le gouvernement américain lance la station de radio « Voice of America » qui a pour but de donner une image favorable des Etats-Unis et de leur système aux populations externes. La radio officielle du gouvernement de l'Union soviétique n‟a pas non plus manqué de diffuser de la propagande.

I-1-2-7- Les propagandes lors des guerres en Afghanistan et Irak Lors de l'invasion de l'Afghanistan par les États-Unis en 2001, la propagande a été utilisée pour démoraliser les Talibans et pour gagner la sympathie de la population afghane. Les transmissions par radio locales ont été bloquées pour transmettre des messages de propagande de remplacement. Des tracts ont été également lâchés dans l'ensemble de l'Afghanistan, offrant des récompenses pour Oussama Ben Laden et d'autres individus, disant que les Américains étaient les amis de l'Afghanistan et soulignant divers aspects négatifs du Taliban. Durant l'invasion de l'Irak en 2003, le ministre de l'information irakien Mohammed Saeed al- Sahaf a, à plusieurs reprises, clamé que les forces irakiennes gagneraient la guerre. Même lors du renversement du gouvernement irakien à Bagdad, il a maintenu que les Etats-Unis seraient bientôt défaits, en contradiction avec les médias internationaux. Il est rapidement devenu une figure tournée en ridicule. Les Etats-Unis n‟ont pas manqué de faire usage de la propagande

- 22 - en manipulant des nouvelles rapportées dans des médias irakiens dans le but de propager une image favorable sur ses actions et de démoraliser toute résistance comme l'expliquent à ce sujet deux dossiers du journaliste du New York Times David Barstow intitulés « Behind TV Analysts, Pentagon’s Hidden Hand », publié le 20 avril 2008 et « One Man’s Military- Industrial-Media Complex », publié le 29 novembre 2008.

I-1-3- Les types de propagandes Les types de propagandes sont nombreux. Certains considèrent la publicité comme étant un type de propagande. Elle peut ainsi revêtir plusieurs formes : nationaliste, fasciste, nazie stalinienne, militariste, etc. Toutefois, il serait plus adéquat de classer la propagande selon la source. Nous trouverons ainsi les types de propagande suivants : la propagande blanche, la propagande noire et la propagande grise20.

- La propagande blanche provient d'une source ouvertement identifiée et connue. Les gouvernements en sont les principaux utilisateurs. Ce type de propagande est le fait des Etats ou de partis politiques connus et reconnus parce qu‟elle repose essentiellement sur le matraquage, l'adhésion préalable des personnes qui y sont soumises et la censure. La propagande blanche vise principalement à renforcer un sentiment déjà existant dans la population ou à matraquer une pensée unique en ayant exclu toutes les autres par la censure. En effet, la propagande complète la censure dans le sens où celles-ci opère dans le même but, faire parvenir une information précise en omettant d‟autres.

- La propagande noire provient d'une source soi-disant amicale, mais en réalité hostile. Cela se fait en créant des laboratoires de soutien ou en développant des réseaux et en se cachant derrière21. Souvent cette propagande vise à mal guider « l’ennemi », à le tromper afin de gagner un avantage sur lui et repose sur les mensonges, les falsifications, et surtout sur la manipulation d‟image. Comme la propagande noire cache sa source et ses origines, celle-ci est très efficace lors des guerres vu qu‟elle se fait passer pour une source amie et sûre et réussit souvent à gagner la confiance de son destinataire.

20 Belabdi M., Mattelart T. (dir.), « La mondialisation des médias contre la censure », in Communication [En ligne], Vol. 24/1 | 2005, mis en ligne le 25 septembre 2008. http://communication.revues.org/index576.html 21 McClure R., «Policy and Methods of Black Propaganda against Germany», British National Archives, 10 novembre 1944,ref. WO 229/57, http://www.psywar.org/blackpolicy.php - 23 -

- La propagande grise provient d'une source soi-disant neutre, mais en réalité hostile. Cette propagande n‟a pas de source facilement identifiable, en effet, la propagande grise est une technique qui semble provenir d‟une source amie lors d‟un conflit, mais qui s‟avère être émise par la source ennemie elle-même. Les techniques, souvent utilisés sont les rumeurs, les diffamations, les dénigrements etc. La propagande utilise donc des informations pour influer les comportements et les attitudes. Il s‟agit, dans ce cas, de payer des auteurs, des réalisateurs, des journalistes pour faire croire à un élan réel alors que c'est une campagne de propagande. Des statistiques pourraient de même être utilisées pour donner une image plus scientifique aux idées propagées. Selon Guy Durandin : « la propagande blanche est généralement plus efficace en temps de paix, mais en temps de guerre les populations adverses sont plus méfiantes des propagandes provenant d'autres pays. En temps de guerre, la propagande noire est beaucoup plus vraisemblable car la population croit que les messages proviennent de source sure et amie (...). Il est important pour se rendre crédible, dans ce type de propagande, d'affirmer plus de vrai que de faux »22.

Ainsi, en temps de guerre, on préfèrera une bonne campagne de propagande noire à destination de l'ennemi en complément d'une campagne grise à destination de sa propre population.

Cela dit, il serait important de citer aussi la contre-propagande, provenant aussi d‟une source qui est la « victime » de la propagande, soit la partie adverse. Elle a pour but d‟empêcher ou plutôt de réduire les effets d'une propagande. Il existe deux genres de contre-propagande: - La contre-propagande défensive qui est de nature à réduire l'impact d'une propagande ennemie sur sa cible. - La contre-propagande offensive qui cherche à attaquer le groupe auteur d'une propagande pour le décrédibiliser. La contre-propagande utilise les mêmes techniques que la propagande. Elle est donc assez difficilement distinguable. Nous reprendrons, ci-dessous, les techniques de propagande qui ont été les plus répandues au fil de l‟histoire.

22 Durandin G., L'information, la désinformation et la réalité, Paris, PUF, 1993. - 24 -

I-1-4- Les techniques de propagande Dans son livre intitulé Principes élémentaires de propagande de guerre, utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède, Anne Morelli23, reprend les méthodes énumérées par Lord Ponsonby, un aristocrate anglais, socialiste et pacifiste, qui avait résumé les méthodes utilisées pendant la Première Guerre mondiale, les reformule et les explicite chacune dans un chapitre à part. Selon Morelli, en propagande, il faut faire croire que : 1 Nous ne voulons pas la guerre 2 Le camp adverse est le seul responsable de la guerre 3 Le chef du camp adverse a le visage du diable 4 C'est une cause noble que nous défendons et non des intérêts particuliers 5 L'ennemi provoque sciemment des atrocités, et si nous commettons des bavures c'est involontairement 6 L'ennemi utilise des armes non autorisées 7 Nous subissons très peu de pertes, les pertes de l'ennemi sont énormes 8 Les artistes et intellectuels soutiennent notre cause 9 Notre cause a un caractère sacré (Dieu est de notre côté) 10 Ceux (et celles) qui mettent en doute notre propagande sont soit des traîtres, soit des victimes des mensonges adverses (car l’ennemi, contrairement à nous qui informons, fait de la propagande). Pour faire croire ses « dix commandements » à la cible, plusieurs techniques ont été mises en place. Dans un article intitulé « Les méthodes des propagandistes - Persuasion, mobilisation, manipulation : les recettes des professionnels », François Bernard Huyghe24 parle de la création de l‟IPA (Institute for Propaganda Analysis) entre les deux guerres mondiales par des scientifiques américains qui avaient pour but d‟étudier les effets de la propagande et de fournir au citoyen ordinaire des outils d‟analyse pour détecter la propagande en temps de guerre ou en temps de paix et à s'en préserver. Cette institution propose ainsi quelques techniques classiques, dont la plupart reposent sur une bonne utilisation de l'émotivité de l'auditoire :

23 Morelli A., Principes élémentaires de propagande de guerre, utilisables en cas de guerre froide, chaude ou tiède, Labor 2001.

24 Huyghe F.B., « Les méthodes des propagandistes - Persuasion, mobilisation, manipulation : les recettes des professionnels », 15 août 2007 http://www.huyghe.fr/actu_220.htm - 25 -

La peur : un public qui a peur est en situation de réceptivité passive, et admet plus facilement l'idée qu'on veut lui inculquer. L’appel à l'autorité : l'appel à l'autorité consiste à citer des personnages importants pour soutenir une idée, un argument, ou une ligne de conduite. Le témoignage : les témoignages sont des mentions, dans ou hors du contexte, particulièrement cités pour soutenir ou rejeter une politique, une action, un programme, ou une personnalité donnée. La réputation (ou le rôle : expert, figure publique respectée, etc.) de l'individu est aussi exploitée. Les témoignages marquent du sceau de la respectabilité le message de propagande. L’effet moutonnier : cet appel tente de persuader l'auditoire d'adopter une idée en insinuant qu'un mouvement de masse irrésistible est déjà engagé ailleurs pour cette idée. Comme tout le monde préfère être dans le camp des vainqueurs que dans la minorité qui sera écrasée, cette technique permet de préparer l'auditoire à suivre le propagandiste. La redéfinition, le révisionnisme : consiste à redéfinir des mots ou à falsifier l'histoire de façon partisane. L’obtention de la désapprobation : cette technique consiste à suggérer qu'une idée ou une action est adoptée par un groupe adverse, pour que l'auditoire désapprouve cette idée ou cette action sans vraiment l'étudier. Ainsi, si un groupe qui soutient une politique est mené à croire que les personnes indésirables, subversives, ou méprisables la soutiennent également, les membres du groupe sont plus enclins à changer d'avis. Les généralités éblouissantes et mots vertueux : les généralités peuvent provoquer une émotion intense dans l'auditoire. Par exemple, faire appel à l'amour de la patrie, au désir de paix, à la liberté, à la gloire, à la justice, à l'honneur, à la pureté, etc., permet de tuer l'esprit critique de l'auditoire. Même si ces mots et ces expressions sont des concepts dont les définitions varient selon les individus, leur connotation est toujours favorable. De sorte que, par association, les concepts et les programmes du propagandiste seront perçus comme tout aussi grandioses, bons, souhaitables et vertueux. L’imprécision intentionnelle : il s'agit de rapporter des faits en les déformant ou de citer des statistiques sans en indiquer les sources. L'intention est de donner au discours un contenu d'apparence scientifique, sans permettre d'analyser sa validité ou son applicabilité. Le transfert : cette technique sert à projeter les qualités positives ou négatives d'une personne, d'une entité, d'un objet ou d'une valeur (un individu, un groupe, une organisation, une nation, un patriotisme, etc.) sur un tiers, afin de rendre cette seconde entité plus (ou moins) acceptable.

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Cette technique est utilisée, par exemple, pour transférer le blâme d'un camp à l'autre, lors d'un conflit. Elle évoque une réponse émotive qui stimule la cible pour qu'elle s'identifie avec l'autorité reconnue. La simplification exagérée : ce sont des généralités employées pour fournir des réponses simples à des problèmes sociaux, politiques, économiques, ou militaires complexes. Le quidam : pour gagner la confiance de son auditoire, le propagandiste emploie le niveau de langage et les manières (vêtements, gestes) d'une personne ordinaire. Par projection, l'auditoire est aussitôt plus enclin à accepter les positions du propagandiste, puisque celui-ci lui ressemble. Stéréotyper ou étiqueter : cette technique utilise les préjugés et les stéréotypes de l'auditoire pour le pousser à rejeter l'objet de la campagne de propagande. Le Bouc-émissaire : en jetant l'anathème sur un individu ou un groupe d'individus, accusés à tort d'être responsables d'un problème réel (ou supposé), le propagandiste peut éviter de parler des vrais responsables, et n'a pas à approfondir le problème lui-même. Les slogans : un slogan est une brève expression, facile à mémoriser et donc à reconnaître, qui permet de laisser une trace dans tous les esprits. Le glissement sémantique : technique consistant à remplacer une expression par une autre afin de la décharger de tout contenu émotionnel et de la vider de son sens (euphémisme). Le glissement sémantique peut à l'inverse renforcer la force expressive pour mieux émouvoir l'auditoire. Exemples : « frappe aérienne » à la place de « bombardement », « dommages collatéraux » à la place de « victimes civiles », « libéralisme » à la place de « capitalisme », « loi de la jungle » à la place de « libéralisme », « solidarité » à la place d' « impôt », « pédagogie préventive » à la place de « répression policière », « intervention humanitaire préventive » à la place d' « intervention militaire ».

Clyde Miller, un des membres de l‟IPA (Institute for Propaganda Analysis), a synthétisé ces techniques en parlant de quatre leviers : Le levier d’adhésion (virtue device) faire accepter une personne, une idée ou un parti comme « bon » en l‟associant à des mots ou symboles « bons ». Le levier de rejet (poison device) : l‟opération inverse avec des symboles du mal ou de valeurs détestées. Le levier d’autorité (testimonial device) : récupérer le prestige d‟un homme ou d‟une institution ou exagérer la valeur exemplaire d‟un cas pour faire approuver ou rejeter.

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Le levier de conformité (together device) qui fait appel au poids de la masse des partisans ou à l‟appartenance à une entité supérieure, Nation, Église pour obtenir l‟adhésion. Selon François Bernard Huyghe (2007)25, « Ce schéma théorique n’est pas d’un raffinement extrême, mais il décrit assez bien une pratique quotidienne ». La propagande ne se limiterait pas aux régimes autoritaires. Elle s‟est d‟ailleurs le plus développée aux Etats-Unis. C‟est en étudiant les médias à travers un «modèle de propagande» que Edward Herman et Noam Chomsky en arrivent aux conclusions suivantes, dans leur livre intitulé La Fabrication du consentement. De la propagande médiatique en démocratie publié en 198826, concernant les principaux aspects de la propagande dans une démocratie :les deux chercheurs parlent essentiellement de l’influence médiatique qui s‟étale sur tous les genres de médias et outils d‟information (radio, télévision, presse, publicité, Internet, téléphone); et où les détenteurs de l‟information font appel à la confusion volontaire qui consiste à justifier la vente d'un produit par des principes éthiques, ou inversement, à promouvoir une opération humanitaire en usant des techniques de communication des entreprises privées. Pour eux, les démocraties ont tendance à utiliser des grands mots pour rendre l‟information encore plus importante, ce qu‟ils appellent la valorisation sémantique. Sans oublier de manipuler l'opinion publique à l'aide de statistiques ou de sondages biaisés, de falsifier les images à travers des retouches vidéo, des fausses images, et de donner des informations partiales de manière constante de façon à inculquer à la cible, qui est généralement toute la population, les opinions nécessaires.

Les techniques de propagande seraient toujours employées dans les démocraties, sous le nom de communication politique. Dans une dictature, la conservation du pouvoir est assurée par des moyens mensongers ; dans une démocratie, les moyens de conquête ou de conservation du pouvoir sont fondés sur la persuasion. L'art officiel, s'il est « décrété » ouvertement sous des régimes totalitaires, se manifeste subtilement en démocratie.

I-1-5- Les outils de propagande Lorsque le but est de faire de la propagande, il s‟agit de faire appel à tous les outils de communication possibles et imaginables pour encercler la cible et anéantir sa capacité à

25 Huyghe F.B., « Les méthodes des propagandistes - Persuasion, mobilisation, manipulation : les recettes des professionnels », 15 août 2007 http://www.huyghe.fr/actu_220.htm 26 Chomsky N., « Manufacturing Consent: The Political Economy of the Mass Media», Conférence faite à University of Wisconsin - Madison 1989. http://www.chomsky.info/talks/19890315.htm - 28 - penser et à se poser des questions. Nous verrons ci-dessous les outils les plus utilisés pour faire de la propagande au cours de l‟histoire et de nos jours.

I-1-5-1- Les outils traditionnels de propagande Que ce soit dans les régimes totalitaires des deux Guerres mondiales, ou dans les démocraties du XXe siècle, la propagande a fait appel à de nombreux outils intellectuels, médiatiques, artistiques et visuels. Effectivement, la radio, les journaux, les livres, le cinéma, la musique, la peinture, le théâtre ont tous largement été usés. Toutefois, l‟outil le plus « en vogue » était les affiches : l‟imagerie étant un outil qui parvenait à toute la population. Pour Gourévitch27, la propagande développe une « imagerie en négatif ». Les affiches, les caricatures et les photos de presse matraquent la population. Ces dernières « répondent à des codes précis, des symboles, des couleurs, une composition qui, une fois déchiffrés, éclairent le lecteur sur l’intention politique de son commanditaire »28.

I-1-5-2- Les outils modernes de propagande De nos jours et surtout depuis la fin des années 1990, Internet est devenu un outil de propagande très utilisé, notamment en période électorale. En effet, du fait que les candidats aux élections soient soumis à de larges restrictions concernant leurs campagnes dans les lois électorales d‟un grand nombre de pays, les sites Internet leur permettent de diffuser instantanément les informations qu‟ils veulent transmettre à leurs cibles où qu‟elles soient, à des coûts plus réduits que les autres outils de communication. Internet serait aujourd‟hui considéré comme un « média alternatif ». Etant un outil de communication largement utilisé en ce XXIe siècle, ne serait-il pas un outil idéal de propagande ? Benoît Tabaka29 le considère très efficace, sans pour autant rentrer dans les détails de la propagande ; pour lui : « (…) En matière électorale, les pages créées par un candidat ne sont ni plus, ni moins qu’une reproduction sous un format multimédia et interactif des éléments contenus dans les diverses professions de foi. La principale différence réside dans l’accessibilité de ces documents : au lieu d’être disponible sur les marchés moyennant une poignée de mains, le discours électoral l’est au travers des réseaux de télécommunication, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ».

27 Gourévitch J-P., L’image en politique. De Luther à Internet et de l’affiche au clip, Ed. Hachette1998. 28 Passera F., Les Affiches de propagande 1939-1945, Ed. du Mémorial de Caen, 2005. 29 Tabaka B., « Le site Internet, outil de propagande électorale », Juriscom.net, décembre 2001. http://www.juriscom.net/pro/2/adm20011213.pdf - 29 -

Sans nier la richesse et l‟utilité fondées d‟Internet « sur le libre échange d’informations et de connaissances », Franck Bulinge 30 évoque toutefois les intentions qui pourraient se cacher derrière l‟information diffusée sur Internet dans une étude consacrée aux « influences et manipulations sur Internet » (en particulier celles employées par les islamistes) en postulant que « l’on ne peut pas ne pas influencer » et en se posant la question concernant la nature et l‟impact de la manipulation sur Internet. Ainsi, ce « média alternatif » pourrait non seulement échapper aux restrictions de la loi mais être aussi source d‟informations nocives.

I-2- Le marketing politique Le processus électoral représente une mise en œuvre active du choix basé sur la communication politique, parce qu'il faut mesurer les réalités qui sont issues de ce choix. Comme il faut choisir, le scrutin consiste à exclure un candidat, et, ainsi, à donner une consistance réelle à l‟opinion et à l‟engagement de chaque citoyen. Il ne s'agit plus d'un engagement en paroles ou en imaginaire, il s'agit d'un engagement réel, car il a des incidences pratiques sur le réel de la vie politique du pays. Ensuite, comme il faut mesurer, le choix électoral va avoir la consistance effective d'un nombre d'électeurs: les idées et les engagements symboliques énoncés avant l'élection vont, le jour de l'élection, se trouver portés par des électeurs réels, actifs, qui se seront déplacés pour donner une réalité à leurs choix. Enfin, le choix fait va s'incarner dans la réalité d'une vie institutionnelle effective: des mesures vont être prises par les représentants élus, des choix vont être faits au nom de toute la population pour plusieurs années. Le marketing politique est un outil de la communication politique. Il est indispensable car il faut conjuguer le suffrage universel à la démocratie et au développement des moyens de communication. Le marketing politique obéit à la stratégie d‟influence c'est-à-dire que l‟on va utiliser les outils du marketing commercial et on va les appliquer à la politique pour attirer le soutien de la cible (communautés, groupes sociaux, etc.). L‟idée principale du marketing politique est donc la suivante : faire « vendre » le candidat aux électeurs. Le marketing politique pourrait être considéré comme le cœur de la communication politique. C'est par ce biais que le candidat va tenter de convaincre l'électeur de voter pour lui. Cette partie de la communication politique repose essentiellement sur les discours élaborés en fonction de la cible et de ses attentes, elle repose également sur les médias et le rôle qu'ils

30 Bulinge F., « Influence et manipulations sur Internet, Techniques et vulnérabilités, cas des groupes radicaux», novembre 2008. - 30 - jouent dans la transmission du message du candidat, sans oublier les sondages d'opinion qui reflètent ou non le succès de la stratégie marketing du candidat. En d'autres termes, les opinions des trois acteurs ayant « la légitimé à s'exprimer publiquement sur la politique », pour reprendre Wolton31 - soit les hommes politiques, les journalistes et l'opinion publique - constituent les piliers de la communication politique électorale au sein d'une démocratie.

I-2-1- Les définitions du marketing politique Le marketing politique est « un ensemble d’actions ayant pour objectif de favoriser l’adéquation de son candidat à son électorat potentiel ; de le faire connaître par le plus grand nombre d’électeurs et de créer la différence avec les adversaires et d’optimiser le nombre de suffrage qu’il importe de gagner au cours de la campagne »32. François Bernard Huyghe en parle comme étant une technique ; en effet, il définit le marketing politique comme une « Technique de connaissance et d’action sur l’opinion utilisée par des professionnels et destinée à produire à volonté de l’adhésion politique, le plus souvent autour d’une personnalité »33. Quant à Stéphanie Grondin34, elle propose une analogie entre le marketing politique et le marketing commercial : tous deux agissent sur le « candidat-produit » de manière à favoriser son adéquation avec « l’électorat-consommateurs », créer la différence avec le « candidat- produit » concurrent, le faire connaître par le plus grand nombre « d’électeurs-consommateurs », et avec un minimum de moyens optimiser les « suffrages-achats ». Pour Stéphanie Grondin, « le marketing politique emprunte les techniques du marketing commercial, cependant le marketing politique est doté d’une autonomie certaine que lui vaut son domaine d’action ». Pour le définir, elle utilise les définitions des termes « marketing » et « information » dans le secteur commercial et en établit les mêmes différenciations pour avoir ce qui suit : « la méthode globale de communication politique au sein de laquelle la publicité politique que l’on dénommait en général propagande jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale, est la forme payante de l’information unidirectionnelle ».

31 Wolton D., Penser la communication, Ed. Flammarion, 1997. 32 Monin P., Cours « Communication et marketing politique », Cursus du master en Sciences de l’information et de la communication, Université Saint-Joseph, 2005. 33 Huyghe, F.B., « Marketing commercial et politique », Entrevue avec Deborah Dahan, 27 février 2008 www.huygue.fr/actu_517.htm 34 Grondin S., Marketing politique et campagnes présidentielles en France: les enjeux, Mémoire de master en Marketing et communication commerciale, ESC Toulouse, 2002. - 31 -

En résumé, le marketing politique consiste à promouvoir un homme ou un projet politique sur le modèle des techniques de marketing commercial. La logique du marketing est de prendre la société et de la diviser par segments selon des critères distinctifs (socioprofessionnel, démographique, politique, etc.) afin d‟évaluer les demandes et les besoins de la population et d‟apporter les meilleures solutions aux besoins. Il s‟agit de vendre le produit en montrant ses qualités, ou changer l‟avis de la cible si elle n‟aime pas le produit.

I-2-2- L’analyse du marketing Ainsi, nous pouvons analyser le marketing politique sur la base du marketing commercial35, lequel se caractérise par : - Le produit qui est directement issu du marché pour satisfaire un besoin. Dans le marketing politique, le produit à promouvoir est triple : o les idées du candidat, o son appartenance, o le candidat lui-même. Il s‟agit donc de l‟image globale de l‟idée (ou l‟homme-idée). Le produit en lui-même ici est gratuit, mais le choix en marketing politique est un acte qui est gratuit mais qui engage l‟avenir du citoyen et celui de la collectivité. - Le marché est en marketing commercial défini par les études préalables qu‟oriente la conception du produit. Dans le domaine politique, il n‟y a pas de marché au sens commercial. Le marketing politique permet de déterminer le profil du candidat qui correspondrait le mieux. On essaye de répondre aux attentes des électeurs. - Le consommateur est avant tout, en marketing politique, l‟électeur c‟est-à-dire le citoyen. Il faut répondre à ses attentes, le mobiliser, il doit sentir qu‟il a un intérêt à travers ce candidat. La force de la communication politique à travers les politiques de marketing consiste à séduire en informant sans être taxé de mensonges ou de démagogie. Il s‟agit d‟être crédible et de créer la différence par rapport à la concurrence. En marketing politique, il y a des électeurs flottants qui hésitent et qui votent à la dernière minute quelles que soient les idées répandues par le candidat. Leur choix peut s‟effectuer sur des critères irrationnels et subjectifs et peut s‟attacher à de petits détails imprévisibles.

35 Monin P., Cours « Communication et marketing politique », Cursus du master en Sciences de l’information et de la communication, Université Saint-Joseph, 2005.

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Ce choix aura donc lieu même si le candidat éliminé a la meilleure campagne et la meilleure stratégie électorales. - La vente : En marketing politique, il existe une façon d„augmenter le savoir-faire d‟un homme politique, de mesurer sa notoriété et de la lui assurer. L‟idée principale consiste à créer un phénomène d‟adhésion en sa faveur à travers le vote. Le marketing politique devient donc un accélérateur qui déclenche l‟action du citoyen. Parallèlement au marketing commercial, il s‟agira de voter au lieu d‟acheter. Le marketing politique se propose de pousser un engagement, c‟est pour cela que l‟on met en valeur les qualités du candidat tout comme le produit à vendre. - Le profit : en marketing commercial tout est quantifiable pour l‟analyse des ventes. En politique, il est impossible de quantifier le choix collectif. En marketing commercial, on peut vendre le produit, en marketing politique on ne peut pas, c‟est un engagement que l'on cherche à obtenir.

Etant « une discipline à part » comme insiste François Bernard Huyghe36, nous évoquerons dans le point suivant les premiers pas du marketing politique et nous verrons en quoi il consiste exactement.

I-2-3- L’historique et l’évolution du marketing La naissance du marketing politique est contredite. Certains considèrent qu‟elle est née avec Bernays et ses collègues de la Commission Creel en 1917, d‟autres l‟attribuent aux « causeries au coin du feu », les émissions radio du Président américain Roosevelt en 1928 ; d‟autres encore estiment qu‟elle a vu le jour en 1952 avec le candidat Dwight Eisenhower et sa campagne dirigée par le cabinet BBDO qui a adopté le slogan « I like Ike » et fait usage du média le plus répandu à l‟époque: la télévision. Toutefois, l‟évènement qui n‟a pas pu être contesté et qui marque, sinon le début, mais du moins une grande étape dans l‟histoire du marketing politique, reste le face à face des deux candidats aux élections présidentielles des Etats-Unis de 1960. En effet, le duel Kennedy- Nixon à la télévision est un exemple-type de marketing politique. John Fitzgerald Kennedy est le premier candidat à s'entourer de conseillers en communication pour entrer à la Maison- Blanche : Pierre Salinger pour la presse et Léonard Reinsch pour l‟audiovisuel37. Ce sont les

36 Huyghe, F.B., « Marketing commercial et politique », Entrevue avec Deborah Dahan, 27 février 2008 www.huygue.fr/actu_517.htm 37 Grondin S., Marketing politique et campagnes présidentielles en France: les enjeux, Mémoire de master en Marketing et communication commerciale, ESC Toulouse, 2002. - 33 - débats télévisés organisés pour la première fois au monde qui ont permis la victoire de Kennedy aux élections présidentielles. Une étude menée par deux sociologues semble prouver l‟impact de la télévision dans les campagnes électorales: ils ont étudié deux groupes témoins, l‟un suivant le débat à la radio, le second à la télévision. Les auditeurs donnent l‟avantage à Nixon tandis que les téléspectateurs donnent l‟avantage à Kennedy38. D‟ailleurs, « il semble que les lumières du plateau n’avantageaient pas Nixon qui paraissait toujours mal rasé ; le candidat républicain gardait les mains croisées sauf pour s’éponger régulièrement le front, et semblait toujours solliciter l’approbation de ses collaborateurs »39 ; alors que Kennedy était maquillé et à l‟aise. Pour un grand nombre de personnes c‟est « son indéniable séduction plus que ses dons oratoires ou son programme qui lui aurait donné l’avantage sur Nixon »40. C‟est pour cette raison que Nixon s‟est entouré de conseillers en image pour les élections qui ont suivi. De fait, c‟est l‟image qui a remporté la victoire et l‟importance de la télévision est découverte, notamment en matière de marketing politique. En 1965, les conseillers en communication envahissent l‟Europe. Pour la première fois, les Français doivent élire leur président au suffrage universel. Le général De Gaulle refuse pourtant l'aide des conseillers en communication. Face à lui cependant, deux candidats vont mener une campagne électorale très active : Jean Lecanuet qui représente l‟opposition centriste mais jusqu‟alors inconnu par la majorité de la population, et François Mitterrand qui a réussi à se faire accepter par l‟ensemble de la gauche. Le général De Gaulle, persuadé d‟une réélection facile au premier tour, n‟utilise pas tout son temps d‟antenne et ne fait aucune émission télévisée. Par contre, ses opposants s‟emparent du média le plus influent de l‟époque pour diffuser leurs idées. Jean Lecanuet, par exemple, multiplie par cinq les intentions de vote en sa faveur grâce à sa campagne électorale médiatisée. En effet, Lecanuet s‟entoure de conseillers et d‟organisateurs dont la plupart sont des volontaires : que ce soit pour l‟écriture de discours, pour des conseils en politique étrangère ou en économie, pour l‟organisation des déplacements et des grandes réunions ou pour les relations avec la presse ; toutes les ressources du marketing politique sont mobilisées pour faire connaître le nouveau candidat qui « ose » se présenter face au général de la libération. L‟affiche de Lecanuet connaîtra un grand succès dans le monde de la communication.

38 Huyghe, F.B., « Marketing politique : un peu d’histoire », 25 juin 2009 www.huygue.fr/actu_196.htm 39 Thoveron G., La communication politique aujourd’hui, Ed. De Boeck 1992. 40 Huyghe, F.B., « Marketing politique : un peu d’histoire », 25 juin 2009, www.huygue.fr/actu_196.htm - 34 -

Avec l‟aide de la société de publicité « Services et méthodes », l‟image du candidat centriste prend une nouvelle tournure notamment avec le choix minutieux des couleurs et l‟adoption d‟un slogan très étudié: « Demain, Jean Lecanuet, un homme neuf, une France en marche »41. Quant à Mitterrand, il se présente dans les médias comme le principal opposant au général De Gaulle. Il profite de sa jeunesse pour faire le contraste avec le plus grand adversaire. Grâce à cette image d'un renouvellement du personnel politique et à l‟utilisation d‟importants outils de marketing politique tels que l‟affiche et la télévision notamment, Mitterrand bouleverse la campagne. Les sondages le montrent puisque Mitterrand voit le pourcentage de ses chances remonter42. De Gaulle évite la défaite de peu et les sondages d‟opinion montrent clairement l‟impact du marketing politique43. Aux élections suivantes, le général De Gaulle se fera conseiller par l'agence Havas. En 1974, le décès du président Pompidou lance une nouvelle campagne présidentielle. Le candidat Valéry Giscard d'Estaing invite, à Paris, l'Américain Joe Napolitan, qui avait conseillé Kennedy quinze ans auparavant. Le candidat de la droite l'emporte devant François Mitterrand au second tour. En 1981, la publicité prend sa place dans le marketing politique en France : François Mitterrand propose à un publicitaire de prendre en main sa campagne. Jacques Séguéla lui invente le célèbre slogan « La force tranquille ». C‟est avec l‟aide de l‟auteur de Ne dites pas à ma mère que je suis dans la publicité, elle me croit pianiste dans un bordel que François Mitterrand bat Valéry Giscard d'Estaing au second tour de la présidentielle. De campagne électorale en campagne électorale, le marketing politique évolue avec de nouveaux outils à l‟appui. Réalisant l‟importance des médias et leur impact sur l‟opinion publique, Bill Clinton, candidat aux élections présidentielles américaines, crée une cellule de crise, la « war room », pour encadrer sa campagne en 1992. Cette cellule scrute les médias et les opinions publiques 24 heures sur 24 et permet au futur président de réagir instantanément aux interventions du camp de son adversaire, George Bush père. Malgré les grandes victoires des « spin doctors » durant plusieurs campagnes électorales ; certains d‟entre eux s‟engouffrent trop dans des informations faussées, ce qui entraîne leur disgrâce dans l‟opinion publique. En 2003, par exemple, Alastair Campbell, conseiller de Tony Blair en Angleterre, doit quitter son poste, emporté par la polémique autour des armes de destruction massives irakiennes. En effet, ce conseiller a été accusé par la presse

41 Chaline, N-J., Jean Lecanuet, Politiques & chrétiens, Volume 16, Ed. Beauchesne 2000. 42 Brechon P., La France aux urnes, Ed. La Documentation française 2004. 43 Stoetzel J., « Les sondages et l'élection présidentielle de 1965 », Revue française de sociologie, Volume 7, 1966, http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsoc_0035-2969_1966_num_7_2_1112 - 35 - britannique d'avoir alourdi et exagéré des affirmations concernant le dossier sur les éventuelles armes de destruction massive en Irak afin de convaincre le gouvernement quant à la nécessité de renverser par la force Saddam Hussein. Ces affirmations se sont alors avérées une sorte de support pour un rapport des services de renseignement britanniques affirmant l‟existence de ces armes44.

I-2-4- Les « doreurs d'images » ou « spin doctors » «To spin », en anglais, signifie « faire tourner », mais surtout « donner un effet à une balle », pour changer sa trajectoire et déstabiliser l'adversaire au tennis ou au tennis de table. Les «spin doctors » ou « doreurs d'images », sont des experts en communication qui interviennent dans l'ombre pour mener un candidat au pouvoir, ou pour l'y maintenir. La mission et la fonction du «spin doctor» sont simples : elles consistent à « dire et faire dire du bien de… », à adapter le message et l‟image de leur candidat aux attentes supposées des électeurs, à les rendre séduisant et populaires à l‟opinion publique. Pour réussir cette mission, les « spin doctors » mettent alors au service de la communication politique une combinaison de techniques de narration (raconter une « belle histoire ») avec les principes existant de la publicité ou du marketing. Certains « spin doctors » n'hésitent pas à employer des stratégies indirectes parfois même perfides comme par exemple les méthodes de discréditation d‟un candidat, de désinformation, de montage d‟évènements, ou autre. Pendant une campagne électorale, notamment lors des débats des chefs, ils tentent de convaincre les représentants des médias que leur candidat est le meilleur. Leurs armes: tous les outils de la publicité commerciale, mais aussi les sondages d'opinion, et la manipulation des médias. Fredet essaye de définir cette expression anglo-saxonne par « les nouveaux Raspoutine de la démocratie, à la fois faiseurs de rois et conseillers spéciaux, experts en retournement d’opinion, modeleurs d’élection, inventeurs d’images, fabricants de consensus »45. Aussi appelés « docteurs Folamour », « maîtres de la manipulation », « gourous », « conseillers de l'ombre » ou encore « éminences grises de la communication », ils ont pris une « place étonnante, voire inquiétante », à Washington comme dans la plupart des pays de l‟Europe. Fred Martin, ancien speech writer d‟Al Gore, repris par Fredet dans son article du Nouvel Observateur (2003), tente d‟expliquer le phénomène de la montée en puissance des « spin doctors » dans la plupart des démocraties du monde moderne : « La dernière décennie a vu

44 Le nouvel observateur, Monde, « Alastair Campbell démissionne » le 04/09/2003. 45 Fredet J-G, semaine du 23 octobre 2003 « Les maîtres de la manipulation », Le Nouvel Observateur, nº2033, http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2033/articles/a222082-.html - 36 - l’arrivée d’une nouvelle classe politique, des experts dans l’art du sondage d’opinion et du remodelage d’images. Leur virtuosité technique, leur obsession méthodologique, leur capacité à lever des fonds en ont fait des vedettes. Avec la compétition exacerbée régnant au sein d’une presse avide de nouveaux visages et un pays en campagne permanente – élections locales, gouverneurs, juges ou chefs de la police – ces conseillers deviennent souvent eux- mêmes les principaux personnages des articles, volant la vedette au débat politique. En commençant par Karl Rove aux Etats-Unis, passant par Peter Mandelson et Alastair Campbell en Grande Bretagne, arrivant à Gleb Pavlovski en Russie ; ces spin doctors qui ont souvent fait la une des journaux ont beaucoup de pouvoir. Toutefois, ils ont aussi souvent été discrédités, notamment dans des affaires de désinformation et de détournement de l’opinion publique »46. Selon Fredet, les dix commandements du spin doctor seraient les suivants : 1- Centraliser l‟information, un seul chef d‟orchestre étant admis. 2- Ne tolérer aucun incident. 3- Se concentrer sur le message, rien que le message. 4- Nourrir les médias en temps et en heure. 5- Garder les bons morceaux (scoops, fuites) pour les amis. 6- Marteler l‟information, quitte à repasser les plats. 7- Prendre constamment le pouls de l‟opinion. 8- Tester et mesurer chaque décision (groupes témoins). 9- Voler à l‟adversaire ses meilleurs arguments. 10- Enjoliver, menacer, parfois cogner.

En somme, le marketing politique qui a assisté à une nouvelle tournure durant les premières années du XXIe siècle grâce notamment aux nouvelles technologies et aux études qui lui ont été consacrées a évolué remarquablement au cours du XXe siècle. Bien qu‟il soit quelquefois attribué au marketing commercial ou à la publicité, il garde sa particularité et reste très prometteur.

46 Fredet J-G, « Le malheur des spin à la française », Le Nouvel Observateur, nº2033, semaine du jeudi 23 octobre2003 http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2033/dossier/a222083le_malheur_des_spin_à_la_française.ht ml - 37 -

I-3- La désinformation La désinformation, mot apparu dans la langue française au cours du dernier quart du XXe siècle, est construite sur un mot russe: dezinformatsiya. Toutefois, le sens de ce mot n‟est pas encore très déterminé, et il connaît des variantes importantes selon les auteurs qui l'emploient.

I-3-1- Les définitions de la désinformation Le terme désinformation a largement été employé en URSS dans la première moitié du XXe siècle. En France, Vladimir Volkoff – qui est d‟ailleurs d‟origine russe – en établit, sans le vouloir, les principaux mécanismes dans Le Montage, Grand Prix du roman de l‟Académie française en 1982. En effet, il écrit au début de son roman : « On ne me croirait pas si j’affirmais que Le Montage n’est que le fruit de mon imagination »47. Dans cet ouvrage, il essaie de cerner les principales méthodes pour amener l'opinion publique à agir dans une certaine direction. Il définira le terme désinformation dans Petite histoire de la désinformation une quinzaine d‟année plus tard comme étant : « une manipulation de l'opinion publique, à des fins politiques, avec une information traitée par des moyens détournés»48. Pour cet auteur-chercheur- romancier, le public est toujours « désinformé sur la désinformation » parce que pour lui, la désinformation, ce n'est pas du tout ôter l'information, c'est manipuler l'opinion par des informations quelquefois fausses, mais souvent vraies, cependant présentées d‟une certaine manière qui nie l'information complète initiale et qui bénéficie à une partie déterminée. Le terme employé est très « mauvais », il vaudrait mieux dire mésinformation, ou dysinformation. Selon Volkoff, le terme en lui-même induit le public en erreur. En réalité, la désinformation semble difficile à définir. Pour certains chercheurs, comme Volkoff, c‟est une manipulation, pour d‟autres une technique et pour d‟autres encore un ensemble de mensonges. En effet, Franck Bulinge (2002) rassemble dans sa thèse de doctorat les définitions de la désinformation proposées par plusieurs chercheurs tels que Guy Durandin (1993) qui considère qu‟elle désigne « un ensemble de mensonges organisés, à une époque où les moyens d'information sont fort développés » ; Roland Jacquard (1986), pour qui il s‟agit de « l'ensemble des techniques utilisées pour manipuler l'information tout en lui conservant un caractère de crédibilité, afin d’exercer une influence sur le jugement les réactions d'autrui » et Rémi Kauffer (1999) qui parle d'une « technique d'encerclement mental basée sur le mensonge organisé et le conditionnement psychologique ».

47 Volkoff V., Le Montage, Paris, Ed. Julliard et L'Âge d'Homme 1982. 48 Volkoff V., Petite histoire de la désinformation : du cheval de Troie à Internet, Éd. du Rocher 1999. - 38 -

Quant à François-Bernard Huyghe, il en donne une définition plus précise dans L'Ennemi à l'ère numérique. Pour lui, « la désinformation consiste à propager délibérément des informations fausses en les faisant apparaître comme venant de source neutre ou amie pour influencer une opinion et affaiblir un adversaire »49. Il reste que le terme désinformation n‟a toujours pas de définition claire et universelle. Pour reprendre Franck Bulinge (2002), il s‟agirait tout simplement d‟« une technique complexe de manipulation de l’information destinée à influencer l'opinion ». Selon Philippe Breton, dans La Parole manipulée : « Dans l'acte de manipulation, le message est conçu pour tromper, induire en erreur, faire croire ce qui n'est pas »50. Ce message est donc toujours mensonger. Il serait donc important d'opérer une distinction entre la manipulation et l'argumentation, même si beaucoup de gens n'y voient aucune différence partant du point de vue que pour convaincre il faut s'appuyer sur des procédés manipulatoires et que, en tout cas, « toute communication est influence et manipulation ». Or, « lorsque l'on manipule, on ne cherche pas, à argumenter, c'est-à-dire à échanger une parole, mais à l'imposer ». En effet, il existe une infinité de façons de manipuler, qui, d'ailleurs ne sont pas toutes connues. En premier lieu, la désinformation qui se définit comme étant une « information incorrecte ou tronquée, utilisée volontairement pour masquer les faits » et présentée comme étant sûre et vérifiée. Il serait très difficile de la repérer. En deuxième lieu, la propagande qui est à la base une «action organisée en vue de répandre une opinion ou une doctrine politique» n'a pris son aspect péjoratif que depuis peu de temps. Aujourd'hui, elle a essentiellement pour objectif de supprimer la possibilité de choix entre plusieurs doctrines ou idées. En troisième lieu, la mobilisation des affections qui semble avoir pour objectif de conditionner l'auditoire de façon à lui faire accepter le message sans discussion en jouant sur les sentiments. Il ne s'agit pas ici de plaire pour plaire, mais de plaire pour vendre, pour emporter les élections ou pour commander.

I-3-2- Les types de désinformation Il existe plusieurs types de désinformation, elle pourrait d‟ailleurs être utilisée comme technique de propagande. Ce sont les groupes les plus forts qui exercent essentiellement ce type de désinformation « planifiée » tels que les autorités étatiques, les grands groupes

49 Huyghe F-B., « L'Ennemi à l'ère numérique : Chaos, information, domination », livre publié aux Presses Universitaires de France 2001, http://www.ege.fr/download/11.ennemi_ere_numerique.pdf 50 Breton Ph., La parole manipulée, La Découverte 2004. - 39 - financiers ou industriels et les lobbys, quelques fois en complicité avec des responsables médiatiques. La désinformation peut aussi revêtir d‟autres formes telles que l'autocensure, la promotion d‟hommes politiques et d‟objets commerciaux. Souvent, les chaînes de télévision, média très influent, cherchent à diffuser les sujets les plus populaires pour gagner la plus grande audience possible, quitte à désinformer plutôt que d‟informer. De même, l‟utilisation d‟Internet et des nouvelles technologies de communication multiplie largement l'échange d'informations qui ne sont pas toutes réelles et dont les sources sont quelquefois difficiles à définir. Ainsi, Internet véhicule un large éventail de rumeurs et donne de nouvelles possibilités à différents types de propagande, y compris par des petits groupes politiques51. Quelles sont les types de désinformation les plus répandus?

I-3-2-1- Les « faux » L'utilisation de faux documents aide souvent à semer des doutes ou à accréditer une thèse ; c‟est le type de désinformation auquel ont recours de nombreux gouvernements, notamment des démocraties qui doivent obtenir l‟approbation du peuple qu‟elles gouvernent pour pouvoir appliquer leurs politiques. Ces faux documents sont présentés comme étant authentiques. Ils ont pour but de désinformer leur cible en s'appuyant sur des éléments fictifs ou sur des contrevérités. C‟est d‟ailleurs ce qui a eu lieu dans la plupart des guerres de nos temps modernes. Dans des cas pareils, la cible a tendance à croire puisqu‟il y a des documents à l’appui.

I-3-2-2- La question de l'indépendance des médias La plupart des médias appartiennent, aujourd‟hui, à des groupes industriels, des groupes politiques ou à l'État ; ils sont donc soumis à des pressions de la part de leurs propriétaires ou des groupes qui les financent. Ainsi, de nombreuses informations seraient directement déformées afin de servir les intérêts financiers ou politiques de ces acteurs. Malgré le fait que se soit en totale contradiction avec la déontologie journalistique, nombreux sont les médias qui diffusent de fausses informations. Bien que souvent volontaire, ce phénomène pourrait avoir lieu de manière involontaire dans le but de ne pas rater un scoop (les informations ne

51 Abdoul, I., Internet, outil suprême de la veille ?, Mémoire de Master en Management des organisations en contexte international, http://ismouz.over-blog.com/pages/Memoire_Master_1__Internet_outil_supreme_de_la_veille_- 236717.html

- 40 - sont pas vérifiées) ou de servir le plus rapidement possible le groupe d‟influence sans pour autant se douter d‟information partisane.

I-3-2-3- Les sondages Tous les constitutifs d‟un sondage pourraient être utilisés à des fins de désinformation. Le choix de l‟échantillonnage, la formulation des questions, et l'impossibilité théorique de calculer une précision lorsque l'on ne dispose pas d'une base de recensement rendent en effet non seulement leurs résultats imprécis, mais très manipulables aussi.

I-3-2-4- Les canulars informatiques Ce sont de fausses nouvelles propagées sur Internet. Aussi appelées « hoax » en anglais, elles ont souvent un but mercantile (faux hommes d'affaires prêts à transférer des millions de dollars à « une personne de confiance », enfant à sauver d'une maladie si rare qu'aucun médecin n'en a jamais entendu parler, faux scoop, pièges etc.).. Ils sont si nombreux qu‟ils ont permis l‟apparition de sites spécialisés dans la lutte anti-canulars comme, par exemple, le site http://www.hoaxbuster.com/52.

I-3-2-5- Les rumeurs Certaines rumeurs n‟aboutissent à rien ; cependant d‟autres sont utilisées dans des buts bien spécifiques dont le plus important serait de tromper l'opinion et de l'amener à justifier des actions ou des décisions politiques ou d‟agir en fonction (voter pour tel ou tel candidat, pour telle ou telle résolution, etc.). Dans les milieux économiques, les rumeurs auraient pour but de faire monter ou baisser artificiellement le cours des actions, ce qui pourrait engendrer de grandes pertes. Franck Bulinge définit la rumeur comme étant « l’ensemble des nouvelles et des opinions qui se répandent dans le public »53 sans pour autant s‟attarder sur les buts qui s‟y cachent derrière.

52 Abdoul, I., Internet, outil suprême de la veille ?, Mémoire de Master en Management des organisations en contexte international http://ismouz.over-blog.com/pages/Memoire_Master_1__Internet_outil_supreme_de_la_veille_-236717.html 53 Bulinge F., Pour une culture de l’information dans les petites et moyennes organisations : un modèle incrémental d’intelligence économique, Thèse de doctorat en Sciences de l’information et de la communication, Université du Sud Toulon-Var, 2002.

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La rumeur pourrait être volontaire, donc considérée comme un type de désinformation ; toutefois, Bulinge considère que la rumeur est différente de la désinformation « en ce qu’elle ne cible pas précisément un adversaire, visant un public large ». Le chercheur établit la différence entre ces deux termes à travers plusieurs facteurs : - la cible : très bien ciblée et minutieusement orchestrée pour la désinformation (les décideurs ou les clients d‟une entreprise), vaste et désorganisée pour la rumeur. - les moyens de diffusion : complexes pour la désinformation et simples pour la rumeur (bouche-à-oreille, forums de discussion). - l‟impact : cherchant à nuire durablement pour la désinformation, fort mais ne durant généralement pas longtemps pour la rumeur. - la mobilisation : des spécialistes pour la désinformation, n‟importe quel groupe d‟individus pour la rumeur. - le budget : absolument nécessaire pour une campagne de désinformation alors que la rumeur ne coûte rien. Une rumeur ne pourrait donc être considérée comme un type de désinformation qu‟en mesure où elle a été analysée « en tenant compte à la fois de son contenu thématique et de son contexte psycho-social et historique »54. La désinformation a certes été utilisée par les régimes totalitaires dès le début du XXe siècle ; surtout comme technique de propagande. Toutefois, elle a été encore plus utilisée dans nos démocraties modernes, dans tous ses genres, pour atteindre une multitude de réactions. Cependant, l‟usage de la désinformation, au sens strict du terme, reste une affaire délicate que les spécialistes ne maîtrisent pas toujours. À travers la propagande, la désinformation ou le marketing politique, la communication politique s‟est largement développée à partir du début du XXe siècle.

Théorisée depuis seulement quelques décennies, la communication politique est trop récente pour qu‟on puisse en écrire l‟histoire. Les filières de formation initiale et continue se développent, les guides se multiplient et il y a surtout une transformation du métier politique. En effet, une nouvelle race de dirigeants est née. Selon Jean-Paul Gourévitch: « ce n’est plus le meneur d’hommes qu’on admire mais le patron d’une équipe qui comporte des militants, des conseillers et des techniciens, qui a un objectif (le pouvoir) et des concurrents. La tâche de cette équipe va être de mobiliser ses ressources financières et humaines et ses réseaux et

54 Bulinge F., Pour une culture de l’information dans les petites et moyennes organisations : un modèle incrémental d’intelligence économique, Thèse de doctorat en Sciences de l’information et de la communication, Université du Sud Toulon-Var, 2002. - 42 - de construire, via les médias, une représentation positive de son leader, de son programme et de son style. L’objectif est de faire gagner à son leader des points sur ses rivaux pour franchir un seuil où il va passer de la représentativité à la crédibilité »55. Jean-Paul Gourévitch distingue l‟évolution de la communication politique à travers plusieurs constantes : - La professionnalisation de la communication politique. - La régression du militantisme politique. - L‟effacement progressif des supports images fixe au profit de la télévision, considérée comme le support de référence. - L‟irrésistible montée des sondages. Jamil Dakhlia56 y ajouterait la peopolisation qu‟il définit par : l‟association entre responsables politiques et gens célèbres (les people), soit que les premiers imitent les seconds, soit que, en sens inverse, des stars s‟impliquent en politique, aux côtés de tel ou tel candidat, ou pour leur propre compte ; mais aussi l‟exposition, volontaire ou non, des responsables politiques dans la presse échotière (magazines people) ; la conformation, enfin, des autres médias aux canons de cette même presse échotière, par un traitement de l‟actualité politique fondé sur la vedettisation et le dévoilement de l‟intimité.

I-4-La communication de crise Un rapport étroit relie l‟étude des campagnes électorales des groupes politiques et hommes politiques malgaches lors des élections présidentielles de 2013 qui, rappelons-le se sont déroulés en temps de crise et le concept de communication de crise qui mérite de ce fait d‟être survolé brièvement dans ce qui suit, tout au moins dans sa définition et dans les possibles manières de la prévenir.

I-4-1-Les définitions de la communication de crise Dans deux de ses ouvrages sur la communication, Thierry Libaert 57 rassemble plusieurs définitions de la crise :

55 Gourévitch J-P., l’image en politique. De Luther à Internet et de l’affiche au clip, Ed. Hachette1998.

56 Dakhlia J., « La représentation politique à l’épreuve du people : élus, médias et peopolisation en France dans les années 2000 » - Le Temps des Médias, n°10, Peopolisation et politique, 2008 http://www.lcp.cnrs.fr/pdf/dakh-08b.pdf 57 Libaert Th., La Communication de Crise, Ed. Dunod-Topos 2001. - 43 -

Selon Joseph Scanlon (1982), « toute crise est aussi une crise d’information […]. Qui ne maîtrise pas cette crise d’information ne maîtrisera pas la crise, y compris dans ses aspects directement opérationnels ». Selon Michel Ogrizek dans La communication de crise58, « la crise est un bouleversement, une épreuve, une rupture, une opportunité ». Selon Edgar Morin, « crise signifie indécision : c’est le moment où, en même temps qu’une perturbation, surgissent les incertitudes. […] La crise du concept de crise est le début de la théorie de la crise ». Selon Patrick Lagadec, « la crise est une situation où de multiples organisations, aux prises avec des problèmes critiques, soumises à de fortes pressions externes, d’âpres tensions internes, se trouvent projetées brutalement et pour une longue durée sur le devant de la scène ; projetées aussi les unes contre les autres… Le tout dans une société de communication de masse, c’est à dire « en direct », avec l’assurance de faire la « une » des informations radiodiffusées, télévisées, écrites, sur une longue période ». Ainsi, pour faire face à la crise, la communication de crise a été nécessaire et considérée comme étant une bien meilleure solution que la non-communication. D‟ailleurs, Patrick Lagadec le souligne dans son article « Communication de crise, communication en crise» : « Des échecs, parfois cinglants, avaient souligné une évidence : les organisations, tout particulièrement en situation accidentelle, devaient résolument s’ouvrir à la communication publique »59. Pascal Monin 60 propose une définition plus liée aux crises politiques, pour lui, la crise est une phase grave dans l‟évolution de l‟actualité, des évènements et des idées ; c‟est une rupture et une perturbation, une phase critique dans la vie ou la carrière d‟un homme politique. Pour la partie en crise, c‟est comme un tremblement de terre, tout semble remis en cause, la confiance, l‟image, tout s‟arrête. Une bonne gestion de crise va essayer de limiter le plus possible les atteintes à cette image.

58 Ogrizek M., Guillery J.M., La communication de crise, PUF - Que Sais-je? 1997 59 Lagadec P., « Communication de crise, communication en crise », Armées d'Aujourd'hui, dossier sur La communication en temps de crise, n°216, décembre-janvier 1996-1997, p. 34-37, http://www.patricklagadec.net/fr/pdf/Communication.pdf 60 Monin P., Cours « La communication des entreprises et des institutions appliquées à des situations spécifiques », Cursus du master en Sciences de l’information et de la communication, Université Saint-Joseph, 2006. - 44 -

I-4-2-La prévention de la crise Selon Lagadec61, « il faut éviter de s’enfermer dans une mode, celle de la communication de crise », il serait préférable de s‟en prévenir ; par conséquent, d‟assurer, avant la crise, trois points d‟appui, de nature politique : - « La légitimité quant aux risques engagés » : la communication, en situation de crise, est vouée à l‟échec si elle porte sur des risques qui n‟ont jamais fait l‟objet d‟une procédure ouverte de légitimation. - « La qualité de la prévention » : la prévention est tellement importante qu‟elle permettrait d‟éviter l‟aggravation de la situation de crise. Souvent, lorsqu‟aucune précaution n‟est prise en compte, la gestion et la communication de crise apparaissent suspectes. - « La communication préalable », une communication d‟urgence n‟a de pertinence que si elle vient en rappel d‟une communication développée dans la continuité bien avant l‟évènement. Selon Patrick Lagadec dans son article « Communication de crise, communication en crise», il faut mettre en œuvre des réponses politiques pendant la crise: - Le courage d‟assumer ses responsabilités, sans recherche de bouc-émissaire, sans évitement. - Une explication claire des processus de traitement qui seront suivis : dans l‟inconnu, quand les données manquent ou que leur interprétation est délicate, il ne suffit pas de « lâcher » quelques informations ; il faut aller jusqu‟à clarifier les processus d‟expertise et de décision qui seront suivis. - Des arrangements institutionnels à la hauteur de l‟enjeu : le responsable sera peu crédible s‟il se contente de faire connaître les décisions prises par son état-major particulier ; face à une situation insaisissable, il lui faut mettre en place un groupe de pilotage reconnu comme légitime et crédible par le plus grand nombre. L‟ouverture, là encore, sera un impératif. Les points mentionnés ci-hauts sont essentiels pour toute communication de crise réussie. « Communiquer ne se résume pas à une maîtrise de quelques techniques de marketing social ; ce n’est qu’une des dimensions d’une conduite de crise, d’une politique de choix et de gestion des risques infiniment plus larges »62.

61 Lagadec P., « Communication de crise, communication en crise », Armées d'Aujourd'hui, dossier sur La communication en temps de crise, n°216, décembre-janvier 1996-1997, p. 34-37, http://www.patricklagadec.net/fr/pdf/Communication.pdf 62 Lagadec P., « Communication de crise, communication en crise », Armées d'Aujourd'hui, dossier sur La communication en temps de crise, n°216, décembre-janvier 1996-1997, p. 34-37, - 45 -

Toutefois, pour François Bernard Huyghe, il s‟agit de se préparer à toute crise. Dans un article qui cible essentiellement la communication de crise en politique63, il signale que « faire de la politique, c’est vivre de crise en crise ». Il faudrait donc exceller dans quatre domaines: - l‟oral : l‟homme politique en question devrait à la fois avoir l‟autorité du chef et l‟art de négocier du diplomate. - l‟écrit : une rhétorique très méthodique serait à adopter. Il faut certes qu‟elle soit convaincante, mais aussi tenir compte des risques de l‟interprétation. - l‟image, surtout télévisée : il s‟agit tout simplement d‟être « maître du montage ». L‟homme politique devrait se méfier de son corps qui risque souvent de jouer contre ce qu‟il dit. - Internet : Etant donné que tout pourrait être largement et rapidement diffusé sur Internet, il faudrait « anticiper, repérer, traiter, concurrencer ces courants semi spontanés d’une opinion aléatoire ».

La communication politique a certes beaucoup évolué au cours de la première décennie du XXIe siècle partout dans le monde. Nous verrons un peu plus loin dans notre recherche quel pourrait être le cadre d‟exercice de cette communication politique à Madagascar en s‟attardant sur les particularités des élections présidentielles de 2013.

II-Les composantes de l’environnement de la communication politique

II-1-La méthode de la communication politique électorale La communication politique électorale est différente d'une région à une autre et ceci en fonction de la cible en question car toute communication se fait en fonction de la cible à laquelle elle s‟adresse, qui n'est autre que les électeurs. Dans ce cas-là, le but essentiel de la communication politique électorale est de « gagner » le plus de voix possibles. Une méthode de plusieurs étapes est à suivre, et ceci en dépit de la cible à laquelle nous nous adressons. Ces étapes ne sont pas théoriquement spécifiées et fixes. Pour Stéphanie Grondin64,

http://www.patricklagadec.net/fr/pdf/Communication.pdf 63 Huyghe F.B., « La politique comme communication de crise », 19 janvier 2007, http://www.huyghe.fr/actu_350.htm 64 Grondin S., Marketing politique et campagnes présidentielles en France: les enjeux, Mémoire de master en Marketing et communication commerciale, ESC Toulouse, 2002. - 46 - il existe deux étapes principales, chacune divisées en deux stades. Quant à Pascal Monin65, il divise la campagne en quatre étapes. Toutefois, le même résultat est observé quelle que soit la division des étapes. Il s‟agit, en bref, de déterminer une stratégie et d‟en déduire le plan d‟action.

II-1-1- L’élaboration d’une stratégie de campagne Pour mettre en place une stratégie de campagne, deux étapes sont à suivre : « terrain » que Pascal Monin appelle « le diagnostic » ; en d‟autres termes les cibles, « l’image », et les thèmes de campagne.

II-1-1-1- Le diagnostic La toute première étape de la démarche du marketing politique est l‟analyse du terrain. Elle consiste en la recherche des aspirations de la population, du positionnement initial de l‟homme politique dans le public, des programmes et des débuts de campagnes des autres hommes politiques et ceci à travers les résultats des élections précédentes, les sondages d'opinion et les enquêtes. Le diagnostic est très important car il permet de savoir quel discours le candidat devrait adopter et la réaction des gens à ses discours précédents. La meilleure campagne pourrait échouer si le diagnostic est faux, c'est le point de départ, d'où son importance. En effet, si un discours est très bien fait mais il ne répond pas aux attentes et aux appréhensions des électeurs, son impact est négatif sur le candidat et sur ses chances de gagner les élections. Selon Stéphanie Grondin, deux directions peuvent être empruntées par le marketing politique lorsqu‟il s‟agit de déterminer les axes de la campagne:

II-1-1-2- La détermination de la stratégie a. La détermination des cibles

65 Monin P., Cours « Communication et marketing politique », Cursus du master en Sciences de l’information et de la communication, Université Saint-Joseph, 2005. - 47 -

Il s'agit ensuite d'établir une stratégie de campagne à travers laquelle le candidat va essayer de maintenir les votes des électeurs déjà acquis d'une part (connue sous le nom de communication de maintien), et de conquérir les électeurs indécis d'autre part (connue sous le nom de communication de conquête). Pour cela, il s'agit de déterminer les axes principaux de la campagne électorale du candidat, de définir quelles sont les cibles, de préparer les thèmes qui intéresseraient ces cibles et d'établir une image constante du candidat à leurs yeux ainsi que de présenter une bonne formule, soit un bon slogan cohérent avec le programme électoral et de travailler sur l'impact recherché auprès des électeurs à travers des évènements électoraux spéciaux66. C‟est grâce à des instruments d‟analyse tels que les sondages d‟opinion et les statistiques que les « spin doctors » peuvent déterminer les cibles et les thèmes de campagne. Tout comme en marketing commercial, la détermination de « segments cibles » est indispensable. Quel que soit le type de segmentation retenu, chaque cible, chaque segment, bénéficiera tout de même de la caractéristique la plus précise possible (en fonction de critères déterminés par les enquêtes d‟opinion préalables), et d‟une politique de marketing qui lui aura été adaptée. b. La détermination d’une image et des thèmes de campagne Une fois le diagnostic fait, il s‟agit de fixer les objectifs affichés par l‟homme politique, et donc choisir son image et les thèmes qu‟il va développer. Dans un premier temps, il faut travailler l‟image de l‟homme politique avant même de connaître les objectifs précis de la campagne. Pour construire l‟image d‟un homme politique, il serait primordial de mettre en valeur de façon décisive une caractéristique qui soit véritablement particulière à l‟homme politique, qu‟il s‟agisse de sa jeunesse, de son âge ou expérience, de son aptitude aux affaires économiques ou diplomatiques, etc. Il faut être sûr que le facteur mis en avant est bien propre à l‟homme politique et que les destinataires y verront bien un élément positif, sinon toute la campagne n‟est plus crédible. Il s‟agira, en deuxième lieu, de déterminer le programme électoral, plus particulièrement les thèmes de campagne qui seront en concordance avec l‟image de l‟homme politique préalablement définie. Les thèmes de la campagne devraient être simples et peu nombreux, vu qu‟ils vont être répétés à plusieurs reprises et devant plusieurs catégories de publics. L‟harmonisation de la campagne dans son ensemble est aussi un facteur de grande importance; cela dit, le choix d‟une même tonalité serait efficace. Selon Grondin, plus le

66 Mounzer N., Communication et confessionnalisme au Liban : cas des élections législatives de 2005, Mémoire de Master en Sciences de l’information et de la communication, Université Saint-Joseph de Beyrouth, 2007. - 48 - message est simple, plus il a de chances d‟être transmis avec efficacité. « De même, l’image de l’homme politique aura donc tout intérêt à être la plus simple possible »67.

II-1-2- Le plan de campagne En matière de communication politique, une fois la stratégie de la campagne définie, un plan d‟application de la stratégie devra être mis en place. Stéphanie Grondin et Pascal Monin sont d‟accord sur le fait que le plan de campagne consiste à établir la chronologie des évènements et des discours selon les circonstances des élections. Il comporte aussi un plan média à travers lequel s'organiseront les rencontres médiatiques et les messages à faire passer à travers les médias qui constituent l'outil principal de la communication politique électorale. On y distingue donc deux étapes:

II-1-2-1- La chronologie du déroulement de la campagne Pour mettre en place une chronologie de campagne, il s‟agit de choisir la date d‟entrée en campagne et le rythme de montée en puissance de la campagne ; et ceci en fonction de l‟homme politique à « promouvoir » et de sa situation par rapport aux élections en cours. a. Le choix de la date d’entrée en campagne Si le candidat est inconnu du public ou s‟il est candidat pour la première fois, il faut probablement lui conseiller une campagne précoce et plus longue. S‟il est « sortant », il peut entrer en campagne plus tard, en évitant toutefois de trop laisser de terrain à ses adversaires. b. Le choix du rythme de la montée en puissance de la campagne Le rythme est aussi un facteur très important à ce niveau-là. Maarek68 distingue quatre principaux types de chronologies: la campagne à montée en puissance progressive, le type le plus courant qui a pour but une « occupation du terrain relativement régulière et de plus en plus importante au fur et à mesure que l’échéance électorale approche », une augmentation parallèle à celle de la montée en puissance corollaire de l‟intérêt des médias; on y multiplie donc en toute logique les chances d‟attirer l‟intérêt des électeurs.

67 Grondin S., Marketing politique et campagnes présidentielles en France: les enjeux, Mémoire de master en Marketing et communication commerciale, ESC Toulouse, 2002. 68 Maarek Ph-J, Communication et marketing de l’homme politique, Ed. Litec 2007. - 49 -

la campagne-éclair, vise à obtenir « une saturation des médias grâce à une concentration en un espace très court, où tous les types de supports et de médias sont sollicités simultanément ». la campagne à étapes, « probablement la plus difficile à mettre sur pied, mais qui pourrait se révéler efficace, où l’image de l’homme politique est construite au fur et à mesure que la campagne avance, à coup de « pseudo évènements » soigneusement orchestrés pour focaliser l’attention ». la campagne stop and go, souvent utilisée lorsque l‟homme politique manque de moyens, ce genre de campagne profite d‟une échéance importante pour « repartir », l‟échéance lui permettant de favoriser et de démultiplier son impact et sa visibilité (sondage proche, émission télévisée, etc.). En réalité, de nombreux autres facteurs rentrent en jeu ; le calendrier n‟est donc pas à suivre à la lettre mais devrait plutôt être le plus flexible possible tout en gardant les principales étapes préalablement définies. En effet, une multitude d‟évènements imprévisibles et soudains pourraient entraver la logique chronologique du plan établi. Il s‟agit de savoir modifier ce dernier en répondant aux incidents du moment tels que les conséquences de la campagne d‟autres hommes politiques, les nouveaux évènements nationaux et/ou internationaux etc.

II-1-2-2- Le plan médias Pour obtenir un plan de médias efficace, il s‟agit d‟étudier la particularité de la cible. Une bonne connaissance des caractéristiques des différents médias est aussi indispensable. Selon les choix qui auront été effectués concernant les cibles prioritairement visées par la campagne de communication, et concernant ses objectifs, certains médias s‟imposeront plus que d‟autres. Dans son mémoire de master, Stéphanie Grondin montre les médias les plus utilisés selon les cibles et l‟objectif recherché (figure reproduite ci-dessous). Pascal Monin préfère utiliser le terme « outils de campagne » quand il s‟agit des différents médias. Il distingue ces outils entre moyens classiques (brochures, documents écrits, presse, déjeuners de presse, conférences de presse…) et moyens modernes (affichage, objets promotionnels, publicité audiovisuelle…). C'est suivant ces étapes que le conseiller en communication est censé préparer la campagne électorale de son candidat. Une fois les « outils de campagne » choisis, les spécialistes de la communication doivent déterminer quels supports précis ils utiliseront pour chaque média

- 50 - retenu : quel(s) titre(s) de la presse écrite, quelle(s) chaîne(s) de télévision, quel(s) réseaux de panneaux d‟affichages, etc. Très souvent, les « spin doctors » se servent de l‟expérience du marketing commercial pour déterminer le support le plus adapté à leurs cibles, ce qui fait que la communication politique et le marketing politique deviennent souvent des concepts presque identiques, notamment en périodes électorales. Ainsi, le plan de campagne et le plan média déterminent en grande partie la réussite ou l'échec du candidat.

OBJECTIF MEDIA CIBLE

Sensibiliser les relais Réunions, colloques, public différencié par d‟opinion courriers directs profession des diverses catégories (« mailing »), d‟une façon ou catégorie sociale. générale, socioprofessionnelles. moyens du marketing direct,

Internet.

Mobilisation des militants et Meetings électoraux, spots Public partisan soutiens. audiovisuels, cassettes vidéo,

intranet.

Communication «de Affiche, presse et relations Public général. conquête », publiques, différenciation par rapport radio, télévision. aux autres hommes politiques.

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Figure : Le tableau de distribution des médias selon les cibles et l‟objectif recherché.

Nous verrons, dans la partie suivante, les outils de communication les plus employés dans les campagnes électorales et qui permettent de mettre en œuvre les plans préétablis.

II-2-Les outils de la communication politique Cette partie permet de voir la palette de moyens existants pour communiquer. Toutefois, il faudrait préciser que le choix des outils de communication est très important et dépend énormément du profil des électeurs ciblés.

II-2-1- L’histoire des outils de la communication Dans l’explosion de la communication (2002), Philippe Breton et Serge Proulx montrent que les outils de la communication ont été utilisés au fil du temps en fonction de leur évolution. D‟ailleurs, les auteurs ont commencé par s‟intéresser aux techniques de communication dans l‟histoire et montrent que toutes les techniques d‟expression ont eu pour point de départ le langage, puis l‟écriture, suivie de la rhétorique, et beaucoup plus tard du livre.

II-2-1-1- Le développement technique des outils de communication Breton et Proulx69 observent le fait que la communication sociale va s‟organiser autour du message et de sa circulation. Ainsi, le développement du journal, qui existait mais ne paraissait que ponctuellement, permet une circulation rapide de l‟information. Au XIXe siècle, la presse connaît une évolution remarquable grâce aux progrès techniques, à son intégration dans les circuits commerciaux par la publicité, à la liberté de la presse et au libéralisme économique. Les grandes agences de presse changent ensuite leur style de travail grâce au téléphone. Le XXe siècle sera le siècle de la communication grâce au développement de l‟électronique. La radio est la première application de l‟électronique. La radio devient un loisir incontournable pour les plus défavorisés, surtout après la crise de 1929 où la montée des totalitarismes provoque un immense besoin de communication. L‟évolution électronique se poursuit en plusieurs étapes, notamment avec la télévision et l‟ordinateur qui devient une machine à communiquer.

69 Breton Ph. et Proulx S., L’Explosion de la communication à l'aube du XXIe siècle, Paris, La Découverte 2002. - 52 -

Vers 1950, les médias, les télécommunications et l‟informatique sont envahis par la communication. La différence essentielle entre ces trois techniques réside dans le fait que le mot information n‟a pas le même sens : - Les médias couvrent un champ immense dont le mot clé est l’information qualitative, - Les télécommunications ont pour objet la transmission de messages et les techniciens des télécommunications ont pour mot clé l’interactivité de l’information, - l‟informatique, secteur le plus récent, est une technique de traitement de l‟information sous sa forme numérique, ou digitale ; les informaticiens traitent l’information numérique. À partir des années 1960, la publicité et la télévision s‟imposent massivement, participant au développement de la société de consommation: La publicité devient un mécanisme indispensable au fonctionnement de nos sociétés capitalistes. Il ne s‟agit plus d‟un discours informatif sur les qualités du produit à vendre, mais d‟une action de séduction pour que ce produit devienne « objet de désir ». Les entreprises commerciales font appel à des techniques regroupées sous le terme de marketing afin d‟élaborer une politique de « promotion des ventes », de « relations publiques » et de « publicité ». La télévision est le média le plus répandu. A partir des années 1960, elle a réussi à pénétrer dans tous les milieux sociaux. La télévision est devenue un peu plus tard la première source d‟information quotidienne.

II-2-1-2- Le développement des outils de communication en politique Pour Philippe Breton et Serge Proulx (2002), la communication n‟a pas seulement explosé techniquement au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. Elle a surtout explosé dans le domaine politique. Un des faits marquants de la communication au XXe siècle est la prise de conscience des hommes politiques de la toute-puissance de l‟argumentation dans la manipulation des foules. Avant et pendant les deux guerres du début du XXe siècle, la communication politique, la propagande et la désinformation étaient bien présentes, mais l‟Après-guerre est marquée par l‟irruption des grands médias dans le champ du politique ; notamment avec l‟usage massif des sondages, de la publicité politique et du marketing. L‟idée politique n‟existe que par sa médiatisation.

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II-2-2 Les outils de la communication politique Philippe Maarek70 classe les outils de communication dans trois catégories : - les modes d‟action « classiques » - les moyens d‟action audiovisuels - les méthodes du marketing direct et les « nouveaux médias » Pascal Monin 71 propose, de même, trois catégories d‟outils de communication, à savoir les outils classiques, le marketing direct et les outils qu‟il nomme « sophistiqués »; son énumération reste plus exhaustive que celle de Maarek, nous les détaillerons ci-dessous :

II-2-2-1 Les outils classiques Les outils classiques sont ceux qui ont été utilisés et qui restent de valeur dans le monde de la communication politique aujourd‟hui:

a- Le contact direct signifie les rencontres sur le terrain entre les personnalités politiques et les électeurs. De nos jours, cet outil de communication politique fait l‟objet de grandes rencontres-évènements bien préparées à l‟avance et diffusées sur toutes les chaînes de télévision. b- L’imprimé rassemble toutes les brochures distribuées, notamment le programme politique sur la base duquel l‟homme politique demande le vote des électeurs. c- La presse reste un outil de communication très influent. Pour cela, les hommes politiques y accordent énormément d‟importance et tentent, surtout en temps d‟élections, de se rapprocher des journalistes. En effet, c‟est à travers ces derniers que les hommes politiques vont pouvoir influencer l‟électorat. Ainsi, nombreux sont les politiciens qui ont des conseillers dont l‟unique tâche consiste à s‟occuper de la presse; afin de faire passer, à travers eux, les messages à leur cible. Telle est la fonction principale des communiqués de presse. i. Le communiqué de presse Selon Jean-Paul Truxillo et Philippe Corso72, le communiqué de presse est un « texte parapublicitaire par lequel un attaché de presse fait connaître au public des rédacteurs de presse ou la presse une information partisane culturelle ». Le communiqué de presse est un document court utilisé à destination d‟une population cible de journalistes pour annoncer

70 Maarek Ph-J, Communication et marketing de l’homme politique, Ed. Litec 2007 71 Monin P., Cours « Communication et marketing politique », Cursus du master en Sciences de l‟information et de la communication, Université Saint-Joseph, 2005. 72 Truxillo J.P., Corso Ph.,Le Dictionnaire de la communication, Ed. Armand Colin 1991. - 54 - différents évènements relatifs à l‟homme politique en question. Sa conception et sa diffusion sont le plus souvent assurées par une agence de relations presse. Le communiqué comprend éventuellement des informations, des supports et des coordonnées de contacts permettant d‟aider le journaliste souhaitant réaliser un article. Souvent, il est diffusé gratuitement tel quel. ii. La conférence de presse Dans le Dictionnaire de la communication, la définition d‟une conférence de presse est la suivante : « Rencontre organisée par une instance institutionnelle, publique ou privée, ou par une entreprise à l’attention des membres des médias de sorte à ce qu’ils relaient l’information. Elle s’accompagne de la remise d’un dossier de presse. Outil de prédilection de la publicité corporate ». Il serait important de noter que les conférences de presse détiennent une place très importante en politique, notamment durant les périodes électorales. iii. Le déjeuner de presse Les déjeuners de presse rassemblent les journalistes et ont pour but de rapprocher les gens de la presse avec l‟homme politique en question. d- L’affichage désigne l'application d'une surface de papier script dans un lieu public sur un support destiné à son émission, externe ou interne, ce qui en fait un média à part entière sans contexte rédactionnel. En effet, les gros titres et les slogans attirent l‟attention des passants. La mémoire retient les messages courts à grands formats après un passage de quelques secondes, ce qui permet facilement d‟annoncer un évènement particulier, ou de jouer le rôle de propagande. Aujourd'hui, l'affichage est un média d'information à but essentiellement publicitaire. C'est un media de masse avec une cible urbaine, c'est également le média de la mobilité qui fait partie du paysage naturel de nos vies citadines. « L’affichage fait partie des cinq grands médias » 73(Truxillo et Corso, 1991). e- L’audiovisuel : en communication politique, le poste de télévision permet aux candidats et aux élus de parler directement aux électeurs « d’où l’idée de leur envoyer des messages formatés comme des publicités, testés par des sondeurs, jaugés sur des groupes témoins et sans cesse recyclés par une armée de consultants issus de la pub et brassant de plus en plus d’argent »74 . La personnalité, le style, le caractère du

73 Les cinq grands médias (médias de masse ou mass médias) étant les suivants: La grande presse, la radio, la télévision, le cinéma, l‟affichage et la télématique. 74 Fredet J-G, semaine du 23 octobre 2003 « Les maîtres de la manipulation », Le Nouvel Observateur, nº2033, http://hebdo.nouvelobs.com/hebdo/parution/p2033/articles/a222082-.html - 55 -

candidat sont très importants et permettent de l‟imposer comme « le meilleur produit du moment » à travers plusieurs genres de programmes télévisés: iv. Le journal télévisé C‟est un journal d'information diffusé par une chaîne de télévision plusieurs fois par jour aux heures de grande écoute. Ce bulletin de nouvelles est généralement animé par un présentateur qui introduit les reportages réalisés par les équipes de journalistes de la rédaction de la chaîne ou par des agences de presse extérieures et qui peut également commenter et/ou résumer les informations du jour. Certaines chaînes de télévision invitent des hommes politiques pour des interviews ou des clarifications de petites durées. v. L’interview C‟est un entretien au cours duquel un journaliste interroge une personne sur ses idées, ses projets, afin d'en publier le compte rendu où le diffuser tel quel. « Il se distingue de l’interrogatoire et du dialogue »75. vi. Le débat télévisé Selon Le Dictionnaire de la Communication (Truxillo et Corso, 1991), le débat est une « forme verbale d’examen d’une question entre plusieurs partis ou parties » ou encore un « mode de confrontations des idées adoptées par les partis politiques ». Le débat télévisé est très souvent une émission de télévision animée par un animateur où plusieurs personnes, très souvent ayant des visions différentes ou opposées, débattent ou discutent sur un sujet donné.

II-2-2-2- Les outils du marketing direct a- Le courrier Le publipostage (mailing en anglais) sert à fidéliser l‟électeur. Il est exactement calqué sur le même modèle que les courriers envoyés par les entreprises de presse ou de vente par correspondance : les enveloppes, les textes et la mise en place, tout est fait pour attirer le lecteur et inciter son acquiescement. Souvent, le courrier est accompagné d‟une demande de réponse rapide pour éviter que le publipostage ne sombre dans l'oubli, dans la plupart des cas sous forme de coupon-réponse pré-imprimé avec une enveloppe à l'adresse du parti politique ou du candidat en question pour faciliter la tâche du récepteur. b- Le téléphone L‟utilisation du téléphone en communication politique vient du marketing des entreprises ; en effet, ce que l‟on appelle le télémarketing est une action de terrain et de contact. Il comprend

75 Truxillo J.P., Corso Ph., Le Dictionnaire de la communication, Ed. Armand Colin 1991.

- 56 - l'ensemble des techniques de communication interpersonnelle qui ont lieu à distance à travers le téléphone. Le but du télémarketing serait d‟établir une communication d'humain à humain, utilisée essentiellement pour constituer ou enrichir des données : - sociologiques ou psychosociologiques (sondages), - marketing (évaluation de la concurrence, caractérisation d'une cible, prospection d'une région, fidélisation d‟électeurs), - d‟impact (communication, mesure ou accentuation de la notoriété), - qualité (analyse des besoins, électeur-mystère, traitement des désapprobations). Cette technique, très efficace au niveau du marketing des entreprises, permet d‟établir une relation de confiance. Elle est souvent utilisée pour mobiliser les leaders d‟opinion en politique et pour tester le terrain. Nombreux sont les cas où une ligne téléphonique est mise à la disposition de la cible pour toute remarque ou demande d‟informations. c- Le journal interne et le journal externe Certains partis politiques éditent un journal d'informations destiné aux membres et sympathisants du parti en question. Les partis politiques et certains candidats éditent, de même, des journaux à distribution externe qui prennent souvent la forme d‟une brochure. d- L’événement médiatique Les évènements médiatiques pourraient revêtir plusieurs formes dont les grandes conférences de presse ou les discours où le candidat ou le parti politique fait appel à un grand nombre de sympathisants. Les manifestations et les rencontres régionales sont considérées comme étant des évènements médiatiques. e- L’Internet Selon Jean-Gabriel Fredet (2003) dans son article « Les maîtres de la manipulation » publié dans Le Nouvel Observateur : « Avec Internet et les messages directs, on peut adapter à l’infini l’art de communiquer, atteindre une pléiade de cibles, toujours plus spécifiques, en croisant par exemple données électorales (préférences de vote) et commerciales (montant et nature des achats) et joindre un coupon demandant une contribution financière ». C‟est de cette manière qu‟il définit l‟importance de l‟utilisation d‟Internet dans le monde de la communication de nos jours. Aujourd'hui, de plus en plus de partis politiques et de candidats ont un site. Internet est devenu un outil incontournable de la communication et de la propagande politiques. Il a l‟avantage d‟atteindre les jeunes générations moins concernées par les médias traditionnels.

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Comme le souligne Brigitte Masquet dans l‟éditorial du n° 327 de la revue Regards sur l’actualité: « L’Internet apparaît comme un prodigieux outil de diffusion d’informations qui peut aider les internautes à devenir ces citoyens éclairés qu’une démocratie vivante suppose. Il peut aussi stimuler l’implication des citoyens dans des actions collectives destinées à faire entendre leur revendications, accompagnant la mutation culturelle des formes de militantisme que l’on constate aujourd’hui »76. En effet, les hommes politiques profitent des sites qu‟ils mettent en place pour commenter l‟actualité, expliquer leurs prises de position qui sont souvent mal reprises par la presse, donner de leurs nouvelles. Les sympathisants peuvent adhérer au parti politique sur Internet, exprimer leur support et leurs contestations, etc. Internet est devenu une opportunité pour associer le plus grand nombre au débat public. f- Le spot publicitaire Les Etats-Unis sont connus pour les spots publicitaires que diffusent les médias lors des campagnes électorales. Selon Xavier Mémin et Anne Paillet77, le premier spot publicitaire pour un candidat date de 1952 avec Eisenhower. En général, le spot publicitaire ne dépasse pas une trentaine de seconde et serait de deux genres, soit élogieux pour le candidat, soit dénigrant pour l‟adversaire à l‟image de la publicité comparative. La radio aurait deux avantages par rapport à la télévision en ce qui concerne le spot publicitaire: c‟est beaucoup moins coûteux et demande beaucoup moins de temps pour le réaliser. L‟utilisation des médias pour les publicités politiques a entraîné une augmentation remarquable des dépenses des campagnes électorales.

II-2-2-3 Les outils « sophistiqués » a- Le logo A la base appelé logotype, le logo est définit dans Le Petit Robert (2007) comme étant un « symbole formé d’un ensemble de signes graphiques représentant une marque, un organisme». Dans le domaine des affaires et selon la définition élaborée sur le site http://www.definitionsmarketing.com/Definition-Logo-ou-logotype, le logo est: « une représentation graphique d’une marque ou d’une entreprise qui est utilisé sur les différents

76 Masquet B.,Editorial de « La démocratie électronique », Regards sur l'actualité, nº327, La Documentation française, janvier 2007 http://www.ladocumentationfrancaise.fr/revues- collections/regardsactualite/2007/edito327.html. 77 Mémin X. et Paillet A., « La publicité politique », Conférences des méthodes, 13 janvier 2004 http://librapport.org/getpdf.php?download=133 - 58 - supports de communication ». Le logo renforce (ou en cas de changement aide à modifier) l‟image de l‟entreprise. Il doit donc posséder, entres autres, des qualités d‟évocation sur ce que souhaite paraître l‟entreprise mais également des qualités de lisibilité. Pour éviter un effet de discordance, le logo doit évoluer en même temps que l‟entreprise et ses ambitions. Le logo permet d‟identifier un groupe ayant les mêmes principes et buts ; il est censé représenter ses idéaux à travers le graphisme. Nombreux sont les partis politiques qui ont un logo ; toutefois, peu nombreux sont les hommes politiques qui ont un logo qui les représente à eux seuls. La reconnaissance des logos est importante. Les hommes politiques ont, aujourd‟hui, de plus en plus conscience de l'importance de l'adéquation entre le logo, le nom et le projet. C‟est d‟ailleurs pourquoi les logos en disent long sur les partis politiques. b- Le recours à des consultants Un consultant est un spécialiste extérieur à une organisation à qui l'on fait appel afin d'obtenir un avis au sujet d'une question ou de l'aide pour résoudre un problème précis ou pour élaborer un projet bien spécifique. Par définition, le consultant ne fait pas partie de l‟équipe de l‟organisation et sa mission est déterminée dans le temps. En pratique, il pourrait rester présent dans l'entreprise pour accompagner la mise en œuvre de ces recommandations, soit en tant que superviseur, soit en tant qu'acteur. Les consultants sont souvent regroupés au sein de sociétés de conseil, ou bien ils interviennent de façon indépendante. Il existe des consultants dans de nombreux domaines d‟action. Nous ne nous attarderons, dans notre projet de recherche que sur les consultants en communication. Le domaine du conseil connaîtrait aujourd‟hui « sa plus grave crise depuis l’après-guerre, une crise à la fois financière et de confiance »78, notamment après les évènements du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Selon Isabelle Berrebi-Hoffman toujours, ce serait sans doute en raison du manque de transparence des cabinets de conseil et de l‟image de «profiteurs ou de parasites du corps économique » qu‟ils auraient acquis cette réputation au fil des années. Max Gantenbein79 parle du « charisme de firme » et de l‟importance du recrutement d‟une société de conseil, deux concepts étroitement reliés dans le domaine de conseil. En effet, une société de conseil recrute deux catégories de consultants : les associés et les jeunes consultants.

78 Berrebi-Hoffman I., Avant-propos de « Les consultants font-ils le monde ? », Sociologie Pratiques, nº6, 2002 http://www.sociologieprofessionnels.com/offres/file_inline_src/331/331_P_6052_1.pdf 79 Gantenbein M., « Un métier de rêve : regards dans les coulisses du métier de consultant », Actes de la recherche en sciences sociales, nº98, 1993 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1993_num_98_1_3055 - 59 -

Les associés sont recrutés selon « leur ancrage social dans le monde de l’économie et leur appartenance à la classe sociale dominante », essentiellement parce qu‟ils « offrent la garantie que leur clientèle, dans les milieux de l’économie, acceptera de reconnaître en eux ses interlocuteurs ». Quant aux jeunes consultants, les points importants sont la formation universitaire, les atouts sociaux et les compétences linguistiques. Selon Max Gantenbein (1993), « c’est en grande partie grâce à ce mode de recrutement que rejaillit sur les associés le prestige dont jouissent les milieux dirigeants de l’économie », ce qui constitue en fin de compte le « charisme de firme». Les consultants ne se limitent plus aujourd‟hui aux secteurs économique et financier, ils sont aussi présents en politique. D‟ailleurs, ils prétendent même avoir de l‟impact « sur la réforme de l’État et de la sphère publique en Europe et en France »80 . Parfois seuls, mais souvent dirigeants d‟équipes, les consultants politiques sont très sollicités, notamment lors des campagnes électorales. Le conseil en communication politique voit, de plus en plus, son champ grandir. Selon Philippe Maarek : « L’homme politique a recours à un moment ou à un autre à des consultants spécialisés : soit pour une aide quant au fond même de la communication, soit tout simplement pour pouvoir bénéficier de leur entremise technique. Les hommes politiques peuvent difficilement se passer du recours à ces consultants en communication extérieurs à leur propre parti, ou à leur cercle de conseillers proches. La complexité du marketing politique le leur impose aujourd’hui presque toujours à un moment ou à un autre »81. c- Le sondage « La technique des sondages permet de produire de l’information sur un domaine donné à partir de l’observation d’une partie de ce domaine. Elle s’applique particulièrement à l’étude des populations nombreuses »82. En principe, ce qui caractérise un sondage, c‟est son caractère scientifique qui le distingue d‟enquêtes du type journalistique ou d‟articles de revues qui se bornent souvent à rapporter des faits et des opinions sans s‟assurer de leur valeur statistique ou de leur réalité objective.

La méthode des sondages Selon Fouad Khalifé83, la méthode des sondages est choisie selon le degré de précision des résultats requis :

80 Berrebi-Hoffman I., Avant-propos de « Les consultants font-ils le monde ? », Sociologie Pratiques, nº6, 2002 http://www.sociologieprofessionnels.com/offres/file_inline_src/331/331_P_6052_1.pdf 81 Maarek Ph-J, Communication et marketing de l’homme politique, Ed. Litec 2007. 82 Clairin, R., Brion Ph.,Manuel de sondages (nº3, 2ème éd.), Documents et manuels du CEPED 1997. - 60 -

Le sondage aléatoire ou probabiliste Dans cette méthode de sondage, tous les éléments de la population ont la même chance de faire partie de l‟échantillon. C‟est donc essentiellement un tirage au sort. Ce procédé est le plus scientifique et permet dans les meilleures conditions de déterminer l‟erreur que l‟on peut commettre. Il offre par contre l‟inconvénient de disperser les enquêtes à effectuer et il exige la constitution préalable d‟une base de sondage (un document où se trouvent tous les individus de la population à étudier) dans laquelle sera effectué le tirage au sort. Le sondage au semi hasard Dans ce procédé, on essaye de reconstituer au hasard, au moyen de consignes précises données aux enquêteurs, pour éviter qu‟ils ne soient consciemment ou inconsciemment tentés de choisir la personne à interviewer. Il n‟est guère possible dans ce cas d‟évaluer la précision des résultats, par contre le procédé n‟exige pas la constitution préalable d‟une base d‟échantillonnage, et sous certaines conditions, il permet de concentrer les enquêtes à effectuer. Le sondage par quotas Cette méthode consiste à constituer un échantillon représentatif de la population en donnant encore des consignes à suivre aux enquêteurs qui doivent trouver tant d‟enquêtés de tel sexe, de tel âge, de telle catégorie socioprofessionnelle, etc. On considère souvent que la précision des résultats de ce type d‟échantillon est meilleure que celle des échantillons aléatoires, encore que le choix fait par l‟enquêteur des personnes à enquêter risque d‟introduire un biais. On prend donc pour limite de l‟erreur celle que l‟on commettrait avec un échantillon aléatoire. Ce procédé n‟exige pas au préalable la constitution d‟une base d‟échantillonnage ; il reporte en fait sur l‟enquêteur les difficultés qu‟il y a à créer un échantillon, et il exige de celui-ci la connaissance préalable des caractéristiques des personnes à interviewer. Par ailleurs, la sélection des membres de l‟échantillon s‟opère à partir de caractéristiques limitées : âge, sexe, habitat, catégorie socioprofessionnelle, situation de famille. Rien ne prouve que deux échantillons qui seraient identiques quant à ces caractéristiques, le soient aussi à l‟égard du problème à étudier.

Etudes quantitatives et qualitatives Outre la collecte d‟informations, on voit encore apparaître une distinction entre :

83 Khalifé, F., Cours « Enquêtes, études et sondages d’opinion », Cursus du master en Sciences de l’information et de la communication, Université Saint-Joseph, 2005. - 61 -

mais conclure simplement qualitativement ; en général les raisons qui se cachent derrière tel ou tel fait.

Histoire des sondages politiques Selon Loïc Blondiaux 84 : en juillet 1935 paraît pour la première fois dans le magazine Fortune, luxueux mensuel destiné aux cadres dirigeants de l‟économie américaine, une rubrique intitulée « The Fortune Survey ». Elle se propose de rendre compte, trimestriellement, des résultats d‟une enquête par questionnaire portant sur un échantillon de 3000 Américains adultes et concernant leurs attitudes vis-à-vis de différents thèmes d‟actualité. C‟est ainsi qu‟est né le sondage d‟opinion. La presse américaine avait recours, depuis le début du XIXe siècle, à ce que l'on appelle les « straw votes » (votes de paille). Cette technique consiste, pour les journaux, à demander à leurs lecteurs de renvoyer un coupon mentionnant leur choix concernant tel ou tel sujet. A partir de 1935, les sondages d‟opinion montrent leur supériorité par rapport aux votes de paille; notamment avec l'élection présidentielle américaine de 1936. En effet, Roosevelt, président depuis 1932, se présente pour un second mandat contre London. La presse américaine affirme que London va gagner, à travers les votes de paille. Ainsi, le Literary Digest, un hebdomadaire spécialiste en « straw votes » reçoit près de 2 millions de réponses qui pronostiquent la victoire de London. De son côté, Georges Gallup, qui vient de créer en 1935 l'un des premiers instituts de sondages, pronostique la victoire de Roosevelt, en interrogeant un échantillon représentatif d‟un peu plus de 3000 personnes seulement. L'élection lui donne raison ; essentiellement parce que Gallup s‟est attardé sur l‟échantillon ciblé et ne s‟est intéressé qu‟à ceux qui peuvent réellement voter85. Selon Hélène Riffault 86: Jean Stoetzel a été le pionnier des enquêtes d‟opinion en France. Il raconte, dans un document non publié qui retrace sa vie et ses travaux, comment, en mai 1938, il essaya d‟attirer l‟attention des publicistes et des politiques sur l‟intérêt des enquêtes d‟opinion par sondage. Dès 1938, Jean Stoetzel, créateur de l'IFOP (Institut Français de l'Opinion Publique) importe cette technique en France et la désigne par le mot sondage, à consonance scientifique.

84 Blondiaux L., La fabrique de l‟opinion: une histoire sociale des sondages, Ed. Seuil 1998. 85 Blondiaux L., La fabrique de l’opinion: une histoire sociale des sondages, Ed. Seuil 1998. 86 Riffault H., « La perception des enquêtes d’opinion », dans Les enquêtes d’opinion et la recherche en sciences sociales, textes réunis et présentés par Girard A. et Malinvaud E., Ed. l’Harmattan 1988. - 62 -

Cependant, les journaux ne semblent pas s‟y intéresser. « De 1944 à 1953, à notre connaissance, aucune enquête d’opinion n’est commandée par une organisation politique française, qu’il s’agisse du gouvernement ou des partis politiques »87 . Ce n‟est qu‟en 1965, avec le premier tour de la première élection présidentielle au suffrage universel, que les instituts de sondage réalisent pour la première fois, en France, une estimation de vote le soir de l'élection présidentielle. Cette date marque l'entrée en force des sondages dans le paysage politique français.

Polémique autour de la scientificité des sondages politiques Pour certains auteurs, l‟opinion publique, telle que conçue dans les médias, n‟existe pas, contrairement à ce que voudraient faire croire les spécialistes de la communication et du marketing commercial et politique. Patrick Champagne88, sociologue français, considère que les instituts de sondage prétendent, dans une démarche empruntée à la sociologie, pouvoir mesurer scientifiquement l‟opinion publique alors qu‟en réalité, ils ne font que lui donner, avec la caution de la science, une plus grande existence sociale. Ainsi, les sondages serviraient à donner à un événement la visibilité qui lui est nécessaire pour s‟installer dans l‟opinion des gens. Selon l‟auteur de « Faire l’opinion : le nouveau jeu politique », les sondages sont des stratégies manipulatrices que les professionnels de la politique et les groupes d‟influence biaisent et détournent dans la plupart du temps en fonction de leurs intérêts. Patrick Champagne reprend Pierre Bourdieu dans « L’opinion publique n’existe pas », où il montrait que « les instituts ne mesuraient pas vraiment l’« opinion publique » mais fabriquaient des artefacts et se livraient à une sorte d’« exercice illégal de la science ». Champagne estime que si l‟opinion n‟existe pas, le sondage est une manière de lui donner forme. Dominique Wolton partagerait la même « opinion scientifique » qu‟il étaye à travers la publication de ces recherches dans Penser la communication (1997). Selon lui : on considère les sondages comme des mesures de l‟opinion, alors qu‟il s‟agit de réponses biaisées à des questions orientées, dans une direction qui n‟est pas véritablement informationnelle. Mais comme ils sont répercutés et commentés par les journalistes, on en oublie leur origine. L‟information des sondages a toujours besoin d‟être complétée par d‟autres éléments et restituée par rapport à la commande. Mais cette mise en contexte disparaît dès que les

87 Blondiaux L., La fabrique de l’opinion: une histoire sociale des sondages, Ed. Seuil 1998. 88 Champagne P., Faire l’opinion : le nouveau jeu politique, Ed. de Minuit 1990. - 63 - résultats sont rendus publics. Il ne reste que les pourcentages. Ces chiffres synthétiques, répétés sans cesse un, deux ou trois jours par les médias en concurrence, donnent à un même sondage autant d‟écho que s‟il s‟agissait d‟une batterie de sondages. De plus les médias sont eux-mêmes de gros commanditaires, et se groupent souvent pour les acheter. Le résultat est un effet amplifié du sondage : en effet, chaque média ayant participé à son financement veut se valoriser, et en assure une diffusion très large, augmentant d‟autant l‟impact de ces quelques chiffres. Toujours selon Dominique Wolton, les sondages contribueraient, par leur caractère public, à une certaine ouverture de la société. Toutefois, « le problème vient du déséquilibre actuel né de leur omniprésence bien particulière de la réalité, bruyamment relayée par les médias, et qui accentue cette pression dont il est difficile de voir les conséquences sur les hommes politiques ».89 Malgré tout, les sondages d‟opinion restent très sollicités de nos jours en politique, notamment en périodes électorales. Cette technique aboutit souvent à des résultats qui s‟avèrent vrais en fin de compte, certes à quelques différences près.

d- Le « média social » Le pays le plus avancé en communication politique et média social est sans doute les Etats- Unis. En effet, ce pays a, la plupart du temps, été pionnier en matière de stratégie, de plan de campagne, d‟outils de communication. D‟ailleurs, la campagne de Barack Obama durant les présidentielles de 2008 a été largement innovatrice, une « campagne révolutionnaire », une « campagne de mobilisation ». « Cette victoire, il la doit certes à ses qualités personnelles, son charisme exceptionnel. Il la doit tout autant à une campagne révolutionnaire »90. La campagne d‟Obama marque une rupture, il ne s‟agit plus d‟une campagne politique traditionnelle, de conviction des électeurs, mais d‟une campagne visant à créer un mouvement, une campagne de mobilisation (Rapport Terra Nova, 2009). En effet, l‟objectif même de cette campagne n‟est autre que la mobilisation et l‟outil principal pour atteindre cet objectif: Internet. Obama ne s‟adresse pas à la population de manière traditionnelle, selon Guillaume Debré91.

89 Wolton D., Penser la communication, Ed. Flammarion 1997. 90 Terra Nova, Moderniser la vie politique : innovations américaines, leçons pour la France - Rapport de la mission d’étude de Terra Nova sur les techniques de campagne américaines - Janvier 2009 - http://www.tnova.fr/images/stories/groupes-de-travail/006-mission-us/terranovarapportmissionus.pdf 91 Debré G., Obama: Les secrets d’une victoire, Ed. Fayard, 2008. - 64 -

Son style est très travaillé, et sa rhétorique, parfois trop bien huilée. Ses discours, exempts de toute exégèse programmatique, ressemblent souvent à des séances de thérapie collective. Pendant ses discours, il veut que ses supporters aient la chair de poule. Ils doivent ressortir conquis et prêts à s'engager. Il ne veut pas expliquer ou informer, mais convertir. Pour Obama, ces grands-messes électorales sont une sorte de baptême militant, la réaffirmation quasi sacramentelle d'un désir commun de changer le monde. Dans une entrevue avec Dave Senay, PDG du réseau Fleishman-Hillard et conseiller d‟Obama durant sa campagne électorale de 200892, le conseiller d‟Obama affirme : « Barack Obama est un bon candidat car il est jeune, charismatique, éloquent. Mais il y a aussi une raison particulière pour laquelle son message passe : elle est générationnelle. Aujourd'hui, les enfants des baby-boomers ont du mal à accéder à un niveau de vie supérieur à leurs parents. Ils sont frustrés et se méfient des institutions. Pour eux, le message de changement d'Obama a primé par rapport à celui d'expérience de Hillary Clinton (ou de Mc Cain) – ses concurrents aux élections –. Cette génération utilise abondamment Internet. Elle a donc très bien réagi à cette campagne dont on lui a confié les rênes. Barack Obama est le candidat de son temps. Il a une équipe dédiée de vingt personnes qui gèrent sa présence en ligne et a embauché un des cofondateurs de Facebook, Chris Hughes. Internet peut l'aider à gagner l'élection car il a réussi à enthousiasmer de nombreuses personnes qui ne s'intéressaient plus à la politique. Les nombreux hommages en vidéo sur YouTube témoignent de la profondeur de ces relations avec les internautes. » L‟objectif principal de la campagne étant la mobilisation, une nouveauté a été introduite à la campagne en matière de financement à travers le don en ligne : un système de financement populaire à la manière des organisations caritatives. Les deux tiers du financement de la campagne Obama proviennent de petits dons de moins de 200 dollars américains – plafond légalement permis. Ce financement permet de s‟affranchir des lobbies et des grands donateurs. Il permet également de créer du lien : le don est le signe de l‟appartenance à la communauté. C‟est en donnant à la campagne Obama que l‟on devient acteur du changement; ces petits dons étant collectés quasi-intégralement sur Internet, sur le site de campagne de Barack Obama (mybarackobama.com – MyBO).

92 Denavit C. (propos recueillis par), « Medvedev va chercher à donner son empreinte», Entrevue avec Dave Senay, Le Figaro, 3 mars 2008 http://www.lefigaro.fr/medias/2008/07/02/04002-20080702ARTFIG00609-senay-barack-obamaest- le-candidat-des-reseaux-sociaux.php

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La preuve de la réussite de la stratégie de mobilisation de l‟équipe Obama reste le record absolu de vote populaire ayant atteint les 131 millions de votes. Le taux de participation atteint 63% des électeurs en âge de voter, contre 55% en 2004, et des participations oscillant entre 50 et 55% depuis quarante ans. Il faudrait remonter à la campagne de John Kennedy en 1960 pour retrouver un tel score (Rapport Terra Nova, 2009). Ce nouveau style de campagne qui rompt avec l'image classique du pouvoir et la « cool attitude » du jeune et dynamique candidat auraient largement rapportés ces fruits. Dans sa campagne, Obama a non seulement usé de tous les outils de communication, il a aussi innové. Il a utilisé ces outils dans le but de mobiliser. Avec cette campagne, Internet entre dans un nouveau monde. Les outils Internet sont utilisés avant tout, non plus pour communiquer avec les électeurs uniquement, mais aussi pour recruter les sympathisants et organiser le militantisme. Dans les campagnes traditionnelles, pour participer, il faut prendre contact avec le siège de campagne ou s‟y rendre; alors qu‟avec la stratégie de la campagne Obama, la logique est renversée : il ne faut pas attendre que les supporters viennent à la campagne, il faut aller vers eux. C‟est en suivant cette logique que l‟équipe Obama emploie les réseaux sociaux d‟Internet tels que Facebook et MySpace entre autres. La campagne peut toucher rapidement des millions d‟internautes. Ces derniers n‟ont plus qu‟un simple clic à faire pour faire partie de la campagne, beaucoup moins d‟efforts sont demandés. C‟est pourquoi la campagne d‟Obama a pu mobiliser une large échelle. D‟autres outils, tels que les SMS et les emails sont utilisés ; la campagne Obama aurait collecté un très grand nombre de téléphones mobiles et d‟emails. Elle les utiliserait en abondance, mais essentiellement pour la communication avec les militants et les sympathisants : informations de campagne, annonce des évènements, organisation de la campagne de terrain, etc.

II-3-Les acteurs de la communication politique En 1989, des chercheurs se demandaient déjà quels étaient les principaux acteurs de la communication politique dans un espace de plus en plus ouvert ? En effet, les coordinateurs du nº4 de la revue d‟Hermès parlaient de nouveaux acteurs dans l‟espace public, selon Hermès : « Acteurs politiques, médias, sondages et opinion publique, publicité : tels sont les acteurs identifiables de cet espace. Ce n’est pas leur présence en elle-même qui suscite aujourd’hui nos interrogations car certains étaient déjà constitutifs de l’espace public classique. Mais l’émergence d’au moins trois d’entre eux (médias, sondages et publicité)

- 66 - comme partenaires et intermédiaires du dialogue entre gouvernants et gouvernés est bien au centre des recherches actuelles en communication politique ». Quelques années de recherches plus tard, Dominique Wolton parle, dans Penser la communication (1997), de trois acteurs politiques dans l‟espace politique, qui est selon lui une partie de l‟espace publique, à travers une définition restrictive qu‟il propose de la communication politique. Selon ce chercheur : « La communication politique est l’espace où s'échangent les discours contradictoires des trois acteurs qui ont la légitimité à s'exprimer publiquement sur la politique et qui sont les hommes politiques (partis politiques), les journalistes et l'opinion publique à travers des sondages ». Il ajoute : « Cette définition insiste sur l’idée d’interaction de discours tenus par des acteurs qui n’ont ni le même statut ni la même légitimité mais qui, de par leurs positions respectives dans l’espace public, constituent en réalité la condition de fonctionnement de la démocratie de masse ». Toutefois, Wolton critique en quelque sorte l‟impact de la communication entre ces trois acteurs politiques de l‟espace public. Selon lui, les journalistes profitent de l‟impact des sondages sur les hommes politiques : « Les hommes politiques sont terriblement dépendants des commentaires de cette nomenklatura journalistique, qui a sur l’opinion beaucoup moins d’influence qu’elle ne le croit, mais qui en revanche en a beaucoup sur les dirigeants politiques, fatigués et anxieux, et sur le reste de ce que l’on appelle les « élites ». En définitive, il n’y a qu’une toute petite partie de la population qui vit à ce point sous la pression de la communication ». Aujourd‟hui, nous parlons toujours de nouveaux acteurs. En effet, un colloque sur « les nouveaux acteurs politiques » a été organisé en mai 2008 à l‟Université de Montréal rassemblant plusieurs chercheurs pour étudier la question. Selon ces chercheurs93: « La vie politique est maintenant marquée par une diversité d’acteurs et de formes de participation politique. La prise de décision intègre, en plus des acteurs traditionnels, comme les partis politiques ou l’électeur, différents groupes et associations plus ou moins structurés autour d’enjeux locaux, nationaux ou internationaux. (…) Les problèmes politiques étant complexes et impliquant plusieurs administrations publiques, les individus et les groupes peuvent frapper à plusieurs portes pour finalement faire pression là où leur poids politique est le plus grand. S’ajoute à cette dynamique, le recours plus fréquent aux tribunaux

93 Chercheurs responsables d’ateliers du colloque sur « Les nouveaux acteurs politiques »: Laurie Boussaguet, Pierre Muller, Mathieu Petithomme, Pascale Dufour, Dominique Caouette, Tina Hilgers, Françoise Montambeault, Yves Palau, Pierre Vercauteren, Marc Chevrier, Lucille Beaudry, Lorenzo Barrault, Guillaume Girard, Christophe Le Digol, Maryse Ramambason-Vauchelle, Nicolas Matyjasik, Denis Saint-Martin. - 67 - ou à des organisations internationales. De nouveaux moyens de communication facilitent la mobilisation des groupes (…) ». De nouveaux acteurs sociaux et politiques émergent, coexistant avec les acteurs plus traditionnels comme les syndicats et les partis politiques. D‟ailleurs, le colloque cité ci-dessus évoque des nouveaux acteurs politiques tels que le « profane », un terme qui désignerait « le non-expert, l’usager, le citoyen ordinaire qui prend la parole sur la scène publique et participe aux débats et aux prises de décision sociotechniques aux côtés des scientifiques et des spécialistes, c'est-à-dire des experts ». Les chercheurs parlent aussi d‟autres acteurs politiques, non pris en considération dans l‟espace politique jusqu‟à récemment dont essentiellement la société civile internationale, les mouvements sociaux, les organisations transnationales. Ces nouveaux acteurs ont un rôle de plus en plus important à travers l‟ouverture mondiale des sociétés. Un nouvel acteur politique cité par les chercheurs du colloque de 2008, suscite notre intérêt : le consultant. Effectivement, de nos jours, les consultants sont devenus « des acteurs influents dans la modernisation de l’administration ». En outre, les consultants des hommes politiques et les « spin doctors » auraient, de même, un rôle important à jouer dans cet espace politique, leur avis étant très considéré dans la prise de décision aux plus hauts niveaux.

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Au terme de cette approche théorique, nous souhaitons avoir pu définir et approfondir les concepts de la communication politique à partir d‟une littérature préexistante. Ainsi pourrons- nous entamer notre partie contexte, deuxième partie de notre travail, en tentant d‟y ajouter de nouvelles nuances ou des informations supplémentaires en fonction des résultats de notre travail de recherche. Nous avons ainsi commencé notre partie par le tout début de la théorisation de la communication en exposant différentes théories de ce qui est aujourd‟hui devenu une science à part entière. Nous avons ensuite revu l‟historique de cette science en commençant par son évolution et en reprenant essentiellement les concepts de propagande, de marketing politique et de désinformation. Il était aussi important pour nous de travailler sur les piliers de la communication politique, c‟est-à-dire de voir quels sont les critères sur lesquels nous pouvons nous baser pour étudier la communication politique d‟un homme ou d‟un parti politique. C‟est en partant de cette nécessité que nous avons étudié dans cette partie théorique, la méthode, les outils et les acteurs de la communication politique qui nous permettront d‟évaluer dans notre partie contextuelle, l‟environnement électoral malgache que nous avons choisi d‟étudier. Nous avons enfin trouvé nécessaire d‟évoquer dans ce travail le concept de communication de crise, puisque les élections présidentielles de 2013 ont eu lieu en période de crise. Dans la partie qui suit, il s‟agira de mettre en évidence le paysage électoral à Madagascar à partir de différents aspects qui peuvent intervenir soit directement soit indirectement dans l‟exercice de la communication politique. La partie pratique de notre travail tentera donc d‟apporter plus de détails sur les possibilités de la communication politique à Madagascar en se concentrant sur l‟analyse des contextes juridique et social à cette période.

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DEUXIEME PARTIE

Esquisse du paysage électoral durant l’élection présidentielle de 2013

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Dans son article intitulé « La communication politique : Construction d’un modèle », Dominique Wolton estime que la communication politique apparaît comme un « concept fondamental d'analyse du fonctionnement de la démocratie de masse » ; en d‟autres termes, elle permettrait de rendre la politique « possible » dans un système démocratique à travers la reconnaissance de « l’autre ». Selon cet expert de la communication politique : « le rôle essentiel de la communication politique est d'éviter le renfermement du débat politique sur lui-même en intégrant les thèmes de toute nature qui deviennent un enjeu politique et en facilitant ce processus permanent de sélection, hiérarchisation, élimination, elle apporte la souplesse nécessaire au système politique »94. Dans cette perspective, les élections présidentielles malgaches de 2013 marquent une étape importante dans le renforcement de la démocratie. Nous étudierons, dans cette partie, la culture politique et informationnelle des malgaches et nous essayerons d‟établir le contexte de l‟élection présidentielle de 2013, cas pratique choisi dans notre étude. Sur la base des critères de la communication politique explicités dans la première partie (méthode, outils, acteurs), nous essayerons d‟esquisser le cadre d‟exercice de la communication politique à Madagascar.

94 Wolton D., « La communication politique : Construction d’un modèle », 1989. http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/15353/HERMES_1989_4_27.pdf?sequence=1 . - 71 -

I- Les concepts qui agissent sur la communication politique

Il est important, à ce stade de notre recherche, d‟étudier la culture politique et informationnelle de la société malgache. En effet, l‟histoire de Madagascar et la structure politique qui en a découlé ont eu un impact très profond sur la culture politique et informationnelle des générations malgaches. Nous verrons, dans cette partie, la manière de penser le politique des malgaches ainsi que la façon dont ils perçoivent les informations.

I-1- La culture politique

I-1-1- quelques définitions de la culture politique Pour commencer, il s‟agit de définir la notion de « culture politique ». Après avoir effectué une veille d‟informations sur Internet et une recherche dans plusieurs ouvrages en quête de définitions de la notion de « culture politique », un groupe de chercheurs95 se sont mis d‟accord sur la définition suivante: « ensemble de valeurs, traditions et stratégies liées à la manière d’exercer et de contrebalancer le pouvoir ». Parmi les définitions retenues par ce groupe de chercheurs dans leur rapport concernant « la notion de culture politique »96 pour élaborer la définition ci-dessus, nous pourrons trouver les définitions de Zdenda Vajdova, de Almond et Verba, d‟Iribarne et de Denys Cuche qu‟il serait intéressant de revoir. En effet, selon Vajdova, « la culture politique est considérée dans un sens étroit mais précis comme une coïncidence entre les attitudes politiques des citoyens et des élites politiques locales dans une localité, et comme une prédictibilité des attitudes politiques ». Selon Almond et Verba, « la culture politique est un ensemble de connaissances et d‟aptitudes, d‟orientations émotionnelles et qualitatives quant aux éléments du système politique ». Quant à d‟Iribarne, il considère que la culture politique est « un domaine qui concerne la manière dont les hommes

95 Shi, Stoilova et Rybinsky 96 Séminaire de DREA à l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales (INALCO), 2003, Avec la participation de Shi N., Stoilova A., Rybinsky W., « La notion de culture politique », Communication et formation interculturelles, Paris, http://www.semionet.fr/ressources_enligne/Enseignement/02_03/02_03_oipp/projets/cultpolitique.pdf

- 72 - s’organisent pour vivre ensemble, au sein d’une société nationale comme d’organisation particulière ». Pour Cuche, il s‟agirait de « tout système politique qui apparaît lié à un système de valeurs et de représentations, autrement dit à une culture, caractéristique d’une société donnée ». Nous adopterons donc la définition de Shi, Stoilova et Rybinsky de 2002-2003 issue de leur recherche sur la « notion de la culture politique ». Concernant le cas de notre pays, Madagascar vit actuellement une période difficile. Néanmoins, comme dans bien d´autres pays africains, les dirigeants qui se sont succédé affirment que c‟est un pays «démocratique ». Et on est amené quelquefois à se demander si c‟est vraiment la réalité? Actuellement, on pointe du doigt la culture politique malgache. Cette culture qui se définit comme «l´ensemble des éléments liés à l´univers politique et faisant référence au mode de gouvernance »97 serait maintenant à la base de toutes ces crises politiques à répétition. D‟un point de vue sociologique, la culture politique tient compte des concepts de sociabilité, de démocratie, de citoyenneté et de justice sociale. L‟histoire fait montre que la société malgache s‟attachait justement à divers principes. En premier lieu se place le fihavanana, le socle de l´imaginaire collectif malgache « Aleo very tsikalakalam-bola toy izay very tsikalakalam-pihavanana ». On parle également de l´idée du Consensus ou la recherche du compromis « marimaritra iraisana ». On met en exergue la quête du bien commun : « mikatsaka ny soa iombonana ». On promeut la concertation « Ny hevitry ny maro mahataka-davitra ». On rappelle souvent la conscience de partage d´une unité ou d‟une solidarité « Iray vatsy, iray aina ». L‟Etat et ses dirigeants successifs ont beau se dire que le pays est démocratique! Et pourtant, malgré toutes les valeurs et principes sociaux, le problème de non respect de la diversité, du pluralisme, de la responsabilité et de la liberté, de la justice, de la tolérance, de l‟Etat de droit,…, pèsent encore sue la société malgache. Après plus de 50ans d‟indépendance, le pays du Fihavanana n‟arrive toujours pas à sortir de la crise politique et se perd aujourd‟hui dans un long processus de réconciliation nationale. Force est de constater que les valeurs et les principes qui auraient pu faire de Madagascar le pays modèle tendent à se perdre. Ou est-ce la politique qui ne se conjugue pas en pratique à ces valeurs et principes?

97 Propos de Andrianasolo L. et Ranaivomiadana A., « Madagascar et la culture politique » in Courrier des jeunes leaders n°02 – semestre 2, 2009. - 73 -

Il serait important, pour comprendre «l’ensemble des valeurs, traditions et stratégies liées à la manière d’exercer et de contrebalancer le pouvoir » du peuple malgache, de se pencher, à notre avis, sur quelques points essentiels, notamment : - les partis politiques à Madagascar ; - la participation citoyenne des malgaches.

I-1-2-Les partis politiques malgaches

I-1-2-1- Emergence Les premiers partis politiques à Madagascar firent leur apparition à la lutte de libération nationale avec la création du VVS en 1913. Les organisations politiques ont peu à peu évolué avec la naissance des organisations syndicales des ouvriers et paysans vers 1936, des mouvements secrets PANAMA et JINY vers 194298, du « Comité de Salut Public » et du PDM vers 1946, qui avaient progressivement réclamé l‟indépendance du pays. Le MDRM fût aussi créé en 1946. Cinq mois après, en juin 1946, le PADESM vit le jour. Avec la dissolution prématurée du MDRM, le PADESM était devenu le principal parti politique de Madagascar. Des partis locaux firent progressivement leur apparition dans le paysage politique du pays99. A partir de là, l‟on assiste à la multiplication des partis et organisations politiques. Parmi la première vague des partis politiques créés à Madagascar dans les premières années de l‟indépendance, figuraient les partis dits « partis historiques »100.

I-1-2-2- Caractéristiques du parti politique malgache La lecture de l‟étude menée par Rindra Hasimbelo RABARINIRINARISON et Jean-Aimé A.RAVELOSON intitulée « Les partis politiques malgaches à travers les régimes et gouvernements successifs » au mois d‟aout 2011 nous permet de relever plusieurs caractéristiques du parti politique malgache à savoir : -la place prépondérante du fondateur ou du leader. A Madagascar, l‟histoire d‟un parti politique est généralement liée au cheminement politique, voire à la personnalité de son

98 Rajaoson F., cours de « société et politique », cursus du Master II en science politique du département Droit de l’Université d’Antananarivo, 2014. 99 Ce fut le cas, entre autres, du parti UDC dans les pays Sakalava, Antanosy et Antandroy. 100 Il s’agissaient notament du PSD (1956) auquel appartenaient les membres des gouvernements successifs de la première République, du MONIMA (1958) du leader de la lutte anticoloniale Monja Jaona, de l’AKFM (1959) regroupant les anciens MDRM, et du MFM (1972) de Rakotonirina Manandafy, un des leaders du mouvement de 1972.

- 74 - fondateur. Il est considéré et/ou se considère comme un « ray aman-dreny » et non comme un leader : il a souvent le dernier mot, malgré le statut et les règlements intérieurs du parti. Son retrait du pouvoir, sa démission ou son décès est souvent à l‟origine d‟un déclin, d‟un effacement de la scène politique ou d‟une scission du parti, à l‟exemple du PSD, de l‟AREMA et du TIM101. Dans la plupart des cas, les dirigeants à la tête des partis demeurent inamovibles. Les relèves se font à l‟intérieur de la famille du chef décédé102, comme montre l‟exemple des partis PSD et MONIMA. Même si le « père » fondateur du parti se retire, il reste président d‟honneur et/ou reste le « bailleur » du parti. -Les problèmes liés à la question du financement. Le manque de financement constitue une des caractéristiques principales des partis politiques malgaches. Aucune loi ne régit le financement des partis politiques103. L‟Etat ne leur accorde aucune forme d‟aide ni de subvention, alors qu‟ « ils sont sensés accomplir une mission de service public, du moins à travers leurs rôles et fonctions au sein des institutions de l‟Etat et dans la société en générale »104. Lors des débats dans le cadre de l‟élaboration d‟une règlementation du financement des partis, les partis des présidents comme l‟AREMA et le TIM, disposant de ressources pour financer leurs activités, s‟étaient montrés peu enthousiastes à l‟idée de mettre en place un système de financement des partis politiques par l‟Etat. Malgré leur envergure nationale, leur large implantation territoriale, leurs efforts de structuration et de démocratisation louables, certains partis ont du mal à gagner les élections en raison du manque de financement. Ils restent ainsi des éternels partis d‟opposition ou extra- parlementaires. L‟inexistence de source de financement handicape en même temps l‟émergence d‟une relève au sein de ces partis. Les jeunes qui débutent à peine dans leur vie professionnelle ayant du mal à trouver des financements se désintéressent des activités au sein d‟un parti politique. Le manque de financement « explique aussi en partie la tendance facile des partis politiques à s‟unir dans des plateformes dans des situations politiquement bien déterminées. Souvent des partis ou des leaders de parti en quête permanente de financement se laissent facilement recruter par des leaders politiques disposant de sources de financement,

101 RABARINIRINARISON Rindra Hasimbelo, RAVELOSON Jean-Aimé A., « Les partis politiques malgaches à travers les régimes et gouvernements successifs », Etude FES-Aout 2011. 102 Rajaoson F., cours de « société et politique »,cursus du Master II en science politique du département Droit de l’Université d’Antananarivo,2014. 103 Et cela, malgré l’entrée en vigueur de la loi 2011-012 relative aux partis politiques. 104RABARINIRINARISON Rindra Hasimbelo, RAVELOSON Jean-Aimé A., « Les partis politiques malgaches à travers les régimes et gouvernements successifs », Etude FES-Aout 2011. - 75 - par exemple dans le cadre de plateformes électorales ou de mouvements de contestation »105. Les partis qui disposent de moyens financiers pour leurs activités sont surtout des partis fondés par des (futurs) présidents de la république ou des partis dirigés par des patrons d‟entreprise (AREMA, Leader-Fanilo, TIM etc.). - Le changement de couleur politique ou de camp ou le « mivadika palitao » qui est devenu une habitude pour les politiciens. Ceci se manifeste à travers soit d‟un changement de parti et de coalition soit de création d‟un nouveau groupe de coalition. Durant par exemple le mandat 1993/1997, le Leader-Fanilo faisait partie des groupes les plus stables, suivi du FAMIMA, tandis que l‟AKFM-Fanavaozana, le MFM/FVR et le RPSD des groupes les plus instables106. - L‟absence de « congrès » périodique dans les faits. Les partis politiques prévoient rarement un congrès ou une réunion élargie dans le cadre du processus de désignation (ou non) de candidats ou de soutien des candidats d‟autres partis. Ce furent le cas des partis « présidentiels » TIM, UNDD et AREMA lors de l‟élection présidentielle de 2006. - La faiblesse voire meme l‟absence de la représentativité. En effet elle peut différer à l‟échelon national et local d‟un parti à un autre. Un parti faiblement implanté au niveau national mais disposant d‟une forte représentativité locale peut peser lourd lors des élections locales. Comme il peut également y avoir des partis fortement structurés et d‟envergure nationale mais qui n‟ont cependant pas les résultats qu‟on attend d‟eux dans les élections nationales. - La faible participation des femmes au sein des partis politiques. Jusqu‟en 2009, par rapport au nombre de partis politiques officiellement enregistrés, les femmes chef de parti constituent une exception. La plupart des femmes actuellement chef de parti107, le sont devenues en tant que fondatrices de leurs partis. Jusqu‟ici aucune alternance interne au parti n‟a permis à une femme d‟accéder au poste de président de parti.

Après avoir fait ressortir ces quelques spécificités du parti politique malgache, l‟étude citée ci-dessus en est arrivé à la conclusion que : « La plus grande majorité des partis politiques enregistrés officiellement au Ministère de l‟intérieur depuis la libéralisation politique de 1990

105 RABARINIRINARISON Rindra Hasimbelo, RAVELOSON Jean-Aimé A., « Les partis politiques malgaches à travers les régimes et gouvernements successifs », Etude FES-Aout 2011 106 Cf. François Roubaud : Identités et transition démocratique : L’exception malgache ?, L’Harmattan, Tsipika, 2000, p. 99. 107 Entre autres Elia Ravelomanantsoa de Madagasikarantsika, Brigitte Rasamoela de AMP, Yvette Sylla de MAMAN, Saraha Georget Rabearisoa de Hasin’i Madagasikara.

- 76 - ne sont ni actifs ni visibles, donc de facto inexistants. En réalité, le Ministère de l‟Intérieur ne disposait et ne dispose d‟aucun outil ou moyen qui lui permet d‟actualiser, par exemple chaque année, son registre de partis politiques. De là découle le nombre élevé de parti politique souvent cité afin de dénigrer les partis politiques et les politiciens en général. En réalité, ces chiffres ne correspondent pas du tout au nombre de partis politiques réellement existants, actifs et essayant de réaliser avec volonté et insistance tant bien que mal les fonctions qui leur échoient malgré les problèmes et blocages auxquels ils font face ».Elle préconise plutôt de faire une sélection basée sur «leur participation aux diverses activités communes des partis politiques, entrant dans le cadre de leur structuration, professionnalisation et démocratisation, indépendamment de leurs idéologies ou tendances politiques ».Grace à cette première sélection, il a pu en ressortir un nombre plus raisonnable de partis, qui d‟après donc le raisonnement suivi par les auteurs de ladite étude, peuvent vraiment être qualifiés de « parti politique » ;ils sont au nombre de 35 partis qui seraient donc : AKFM, AKFM-Fanavaozana, AME, AMF/3FM,AREMA, AVAMAMI, AVI, DHD, FARIMBONA, FIDEM, Fihavanantsika, GRAD-Iloafo, HVR, LEADER-Fanilo, Madagasikarantsika, MASTERS, MATSILO, MFM,MONIMA, MTS, PFDM, PFM,PRM, PSD, PSDUM, RPM,RPSD, RPSD-Vaovao, Tambatra, TEZA, TIM, UNDD,USDM, VVSV. Il n‟est pas nécessaire de noter que plusieurs des partis cités sont inconnus du grand public voire même de la majorité de la population. Selon toujours l‟étude sur « Les partis politiques malgaches à travers les régimes et gouvernements successifs », La restructuration du monde des partis politiques et la professionnalisation des partis politiques est nécessaire et exigent «l‟adoption d‟une nouvelle loi sur les partis politiques adaptée aux conditions de travail politique dans le pays, favorisant un pluralisme fonctionnel, facilitant l‟émergence d‟un système de partis stable et stabilisateur, promouvant des partis démocratiques pouvant jouer leur vrai rôle dans la société et au sein de l‟Etat à travers divers mécanismes de fonctionnement et de financement » ainsi que de « la préparation de la relève et de la promotion de la participation des femmes au sein des partis ».

- 77 -

I-1-3-La participation citoyenne à Madagascar Notre étude de la participation citoyenne des malgaches s‟est basée sur les rapports d‟étude qui ont été mené respectivement par la FES108 et AFROBAROMETRE109 en Aout et Octobre 2013. Le sondage sur la participation politique du citoyen a été réalisé dans la perspective de l‟après crise, mais dans le contexte de la crise politique, sociale et économique que Madagascar traverse depuis 2009. Des élections devront bientôt se tenir pour élire un nouveau dirigeant. Mais les électeurs sont-ils prêts ? Feront-ils encore confiance aux politiciens ? Quelles séquelles la crise a-t-elle laissées dans leurs vies ? Le sondage a été mené auprès de 1472 citoyens âgés de 18 ans et plus résidant dans les six arrondissements de la commune urbaine d‟Antananarivo (CUA). C‟est une enquête statistique par échantillonnage à deux niveaux auprès de 19 Fokontany, suivi par le choix des 647 ménages (dans chacun des Fokontany). La collecte des données s‟est déroulée du 12 au 17 Août 2013.

La troisième enquête (round 5) d‟Afrobaromètre a, quant à elle, été menée à Madagascar du 11 mars au 7 avril 2013. L‟enquête a touché un échantillon de 1 200 individus âgés de 18 ans et plus, réparti sur tout le territoire national et représentatif de l‟ensemble des citoyens malgaches. Afrobaromètre est une série comparative d'enquêtes d‟opinion menée dans 35 pays africains et visant à mesurer et à analyser l‟évolution du point de vue des citoyens sur la gouvernance, la démocratie, la société civile, les performances économiques et la qualité de vie, à travers une série d‟enquêtes auprès des ménages, représentatives au niveau national. Pour pouvoir aborder objectivement la question de la participation citoyenne des malgaches en général, il nous faut d‟abord aborder certains point qui déteignent soit directement soit indirectement sur cette participation ; il s‟agit de l‟intérêt que le citoyen porte à la politique et de la confiance qu‟il porte aux institutions du pays.

I-1-3-1- Politisation et intérêt politique Dans la capitale, selon le sondage du FES, le citoyen malgache s‟intéresse à la vie politique car :

108 Friedrich-Ebert-Stiftung et liberty 32, sondage sur la participation politique du citoyen, Antananarivo, 6-17 août 2013 109 Rapport « Afrobaromètre 2013 » à Madagascar, Le rapport à la politique à Madagascar : politisation et participation citoyenne, octobre 2013 - 78 -

- 27,8% des personnes interrogées déclarent ne s‟intéresser que rarement aux questions politiques ; - 60,2% s‟intéressent à la politique nationale ; - 45,8% déclarent s‟intéresser plus à la politique internationale qu‟à la politique au niveau de proximité (Fokontany, commune, région)110. Selon l‟enquête d‟Afrobaromètre, par contre, qui a touché une plus grande partie de la population au niveau national, on a constaté un « recul très important de la politisation » ou de l‟intérêt envers la chose politique ; le rapport déclare que : En 2005, lors de la première enquête, les Malgaches étaient les moins intéressés par les affaires publiques des 18 pays d‟Afrique Sub-saharienne interrogés (avec le Cap Vert) et ceux qui parlaient le moins souvent politique avec leurs proches. La politisation s‟était néanmoins accrue en 2008 (les intéressés ou très intéressés passant de 50 % à 59 % des enquêtés) dépassant alors celle constatée en Afrique du sud, au Nigéria et au Libéria. En 2013, le recul de la politisation est en revanche très important : seuls 40 % des Malgaches se déclarent désormais intéressés ou très intéressés et 60 % d‟entre eux disent ne jamais parler politique avec leurs amis ou les membres de leur famille.

I-1-3-2-La confiance envers les institutions Les résultats du sondage de la FES montrent clairement que les institutions (de l‟époque) sont les plus décriées. Le parlement arrive en dernière place, précédé par les partis politiques, les tribunaux ou plus globalement la justice, le gouvernement d‟union nationale, l‟Armée et la CENI-T. Le classement semble nettement se scinder en deux avec d‟un côté, les institutions étatiques et de l‟autre les entités sociales, techniques, civiles et religieuses. D‟après ce classement, les medias sont les institutions auxquelles les Tananariviens auraient le plus confiance. Le rapport ose même parler de « désaveu total des institutions de l‟Etat » qui est toujours selon ce dernier est un signe significatif du désir des personnes interrogées pour un changement de fond, au-delà d‟un simple changement de régime. Afrobaromètre, dans un autre rapport, « Gouvernance, corruption et confiance à l‟égard des institutions à Madagascar : Expérience, perception et attentes de la population » de 2014 cette fois-ci, note une « dégradation de confiance des citoyens à l‟égard des institutions » causée sans nul doute par un niveau élevé de corruption. Ce rapport affirme que d'un point de vue

110 Tous les chiffres sont tirés du sondage de FES-LIBRETY 32 d’aout 2013 - 79 - général, le degré de confiance de la population à l'égard des institutions est globalement faible. En effet, on peut lire que : - la moitié de la population déclare faire entièrement ou partiellement confiance au Président, à la police ou à l'armée ; - ils sont 40% concernant la Commission électorale et les tribunaux ; - moins de 30% font entièrement ou partiellement confiance à la direction des impôts et aux partis qu'ils soient dans la mouvance présidentielle ou dans l'opposition ; - enfin, les membres des deux Congrès (CST et CT) sont ceux qui inspirent le moins confiance. On constate que parmi toutes les institutions mentionnées dans l'enquête, seuls les conseillers communaux échappent à ce verdict sans appel avec une majorité significative (61%) déclarant leur confiance (entière ou partielle)111.

I-1-3-3- La participation citoyenne proprement dite Au niveau national, les enquêtes menées par Afrobaromètre montrent une « participation citoyenne atone et en recul ». Le rapport montre qu‟au cours des 12 mois ayant précédés les enquêtes : - Seuls 35 % des Malgaches ont participé au cours des 12 derniers mois à une réunion locale (quartier, village), - 46% se sont réunis pour régler un problème local, spécifique et ponctuel, - concernant la participation associative, Seuls 17 % des Malgaches sont adhérents d‟une association ou d‟un groupe communautaire, - quant aux mobilisations protestataires, elles sont encore plus rares : moins de 10 % des Malgaches y ont eu recours au cours de l‟année précédente les enquêtes. Concernant la participation aux élections de 2013, pour la capitale, le sondage de la FES révèle que : - 71,9% des personnes enquêtées ont déjà vécu au moins une expérience de vote et pour la prochaine élection, - il y aurait 27% de nouveaux électeurs pour la capitale, - 28,3% des personnes enquêtées ne savent pas encore si elles iront voter ou pas. Ce pourcentage est très élevé dans la catégorie « sans instruction » (45,3%) et légèrement moindre dans la catégorie « instruction primaire » (23%).

111 Cf. Afrobarometer Briefing Paper No. 140, « Gouvernance, corruption et confiance à l’égard des institutions à Madagascar : Expérience, perception et attentes de la population », Mars 2014 - 80 -

- s‟agissant des intentions de vote, plus de la moitié des enquêtés (54,7%) pense aller voter en privilégiant le critère « parti politique, idéologie, programme du candidat ». Par contre, il faut noter que les catégories « instruction primaire » (43%) et « sans instruction » (38%) accordent plus d‟importance au critère « argent/cadeau offerts par le candidat durant les propagandes ».Pour la catégorie « instruction universitaire » la proportion de personnes enclines à se laisser acheter est de 1,2%, et elle est de 2,8% dans la catégorie « instruction secondaire ». Il faut enfin souligner que « ce constat global de faiblesse des différentes formes de participation sociale et politique à Madagascar semble résulter plus de la déliquescence des structures, des instances de représentations sur lesquelles les citoyens peuvent s‟appuyer que d‟une véritable démobilisation »112. Toujours d‟après Afrobaromètre : comparé aux 30 pays analysés, Madagascar fait notamment partie de ceux où la revendication du rôle du citoyen dans le suivi des actions des dirigeants est la plus forte. Par exemple, la majorité (respectivement 60%, 53% et 58%) considère que ce sont les électeurs qui doivent s‟assurer que le Président, les députés ou les conseillers communaux fassent correctement leur travail (contre 38%, 36% et 36% en moyenne pour les pays d‟Afrique enquêtés).

I-2- La culture informationnelle

I-2-1- quelques définitions de la culture informationnelle Dans son article intitulé « Maîtrise de l'information? Éducation à l'information? Culture informationnelle ? », Sylvie Chevillotte113 (2007) reprend quelques définitions de la notion de « culture de l‟information » aussi nommée « maîtrise de l‟information ». En effet, dans le Grand dictionnaire terminologique, la « culture de l‟information » est définie comme suit : « Ensemble de compétences permettant de reconnaître l’existence d’un besoin d’information, d’identifier l’information adéquate, de la trouver, de l’évaluer et de l’exploiter en relation avec une situation donnée, dans une perspective de résolution de problème ». Selon Claire Panijel-Bonvalot (2005) « on appelle « maîtrise de l’information » un ensemble de compétences intellectuelles et instrumentales permettant, dans un objectif de connaissance,

112 Rapport « Afrobarometre 2013 » à Madagascar, Le rapport à la politique à Madagascar : politisation et participation citoyenne, octobre 2013 113 Chevillotte S., 2007, « Maîtrise de l'information? Éducation à l'information? Culture informationnelle? », Les dossiers de l'ingénierie éducative, n° 57. h ttp://www.cndp.fr/archivage/valid/89404/89404-14460-18270.pdf

- 81 - de mettre en œuvre un processus de collecte, d’évaluation, de traitement, de production et de communication de l’information ». Pour l‟American Library Association114, « Être compétent dans l’usage de l’information signifie que l’on sait reconnaître quand émerge un besoin d’information et que l’on est capable de trouver l’information adéquate, ainsi que de l’évaluer et de l’exploiter ». Selon Chevillotte, cette dernière définition serait la plus connue et la plus utilisée dans le monde. Afin de comprendre comment les citoyens conçoivent les informations et selon quels critères ils considèrent l‟information importante ou pas, il serait important d‟abord d‟évoquer le recours des malgaches aux moyens d‟information et ensuite de comprendre le paysage médiatique du pays en question.

I-2-2- l’accès à l’information des malgaches En 2010, selon le rapport du Baromètre des médias africains concernant Madagascar115, une « large gamme de sources d’informations (écrites, audiovisuelles, Internet) est disponible et est financièrement accessible aux citoyens ». Le rapport affirme que : dans le domaine de la presse écrite, le prix d‟un journal va de 100 AMG (0,05USD) à 600 AMG (0,28 USD). On trouve aussi quelques titres gratuits. Il existe une quinzaine de journaux disponibles dans les kiosques mais en général, les journaux d‟expression malgache sont les plus lus et les plus abordables. C‟est le cas de « Taratra », « Ao Raha » et « Gazetiko », quotidiens en malgache vendus à 200 Ar. Ces mêmes titres ont aussi les plus gros tirages, avec une moyenne de 30 000 exemplaires annoncés, bien qu‟il soit fort possible que ces chiffres soient gonflés. Aucun organe indépendant ne peut en assurer le contrôle. Quoi qu‟il en soit, aucun journal ne dépasse pour le moment les 50 0000 tirages quotidiens. Ces journaux sont disponibles à Antananarivo où la plupart est imprimée. Par contre, ils arrivent avec un retard de quelques heures à quelques jours dans les grandes villes, hors capitale. Enfin, la plupart ne sont pas disponibles dans les campagnes et les zones reculées. Les panélistes sont d‟avis que les prix des journaux ne sont pas abordables, compte tenu du faible pouvoir d‟achat de la majorité des Malgaches. Ils estiment aussi que ces journaux ne sont pas toujours disponibles, dans la mesure où leur diffusion est largement tributaire des moyens de transport et de la qualité des voies de communication. 256 stations de radios sont répertoriées dans toute l‟île. Huit chaînes privées de télévision émettent à Antananarivo et deux à trois chaînes dans les grandes localités.

114 Traduction par P. Bernhard de la définition de l’American Library Association. 115 Rapport du Baromètre des médias africains- Madagascar 2010 - 82 -

Seules la radio et la télévision nationales (RNM/TVM) sont légalement habilitées à émettre sur tout le territoire national. Mais techniquement, la RNM et la TVM ne couvrent pas tout Madagascar, constatent les panélistes. En effet, dans les régions éloignées ou enclavées, il est pratiquement impossible pour la population de capter les deux chaînes publiques. Par ailleurs, le signal est disponible par satellite, à travers le faisceau hertzien, mais la répartition n‟est pas intégrale. Pour le cas d‟Internet, le prix-plancher d‟une minute connectée est de 15 AMG à Antananarivo, où l‟on dispose d‟un nombre assez conséquent de cybercafés et où la connexion privée est de plus en plus recherchée. Ce prix-plancher peut atteindre 100 AMG dans certaines villes. Madagascar s‟essaie actuellement au haut débit avec la mise en place de la fibre optique, à l‟initiative de sociétés privées de téléphonie mobile. Mais pour l‟instant, le haut débit n‟est pas techniquement accessible, admettent les panélistes. Ils constatent que la connexion est relativement rapide à Antananarivo mais lente dans les grandes villes et localités. En 2012, soit 2ans après, Baromètre des médias africains concernant Madagascar116 dessine un tableau plutôt enthousiaste concernant l‟accès à l‟information à Madagascar en notant : -concernant les journaux, une prolifération des journaux à Madagascar s‟est faite sentir. En effet, on peut voir aujourd‟hui une large gamme de sources d‟information avec une trentaine de journaux paraissant régulièrement à Antananarivo, dont moins d‟une dizaine sont dispatchés dans les régions, et quelques journaux régionaux ; - concernant l‟audiovisuel, de nouvelles stations émettent depuis la province, avec des radios évangéliques comme la radio Miara-manompo et la radio Soleil à Fianarantsoa. Les radios privées Taratra et Free Fm émettent aussi dans les régions, à côté des radios d‟Etat, tout comme les télévisions privées TNTV et Dreaming ; - près de 30% des ménages possèdent un poste de télévision, mais les chaînes câblées payantes restent encore peu accessibles car les prix des décodeurs sont inaccessibles à près de 80 000 Ariary ; - la téléphonie mobile jouit d‟une assez bonne couverture avec des prix très abordables, même les cultivateurs en disposent. Ainsi avec 15 000 Ariary on peut disposer d‟un téléphone mobile, la qualité du réseau n‟est cependant pas toujours satisfaisante.

116 Rapport du Baromètre des médias africains- Madagascar 2012 - 83 -

En 2013, toujours selon le rapport Afrobaromètre117 sur la politisation et la participation citoyenne à Madagascar, on note un recul du suivi des informations dans les médias et un faible recours aux divers moyens d‟information, particulièrement en zone rural118. D‟après les données du rapport : Les ruraux n‟ont en effet quasiment jamais accès aux journaux ou à la télévision et ne sont que 56 % à écouter les informations à la radio au moins quelques fois par semaine, contre 70 % en moyenne dans les pays d‟Afrique couverts par l‟enquête Afrobaromètre, alors même qu‟ils ne possèdent qu‟à peine moins fréquemment de radio (63% des ruraux Malgaches en possède une contre 67% des Africains). Cette couverture médiatique marque par ailleurs un net recul par rapport à 2008.

I-2-3- le paysage médiatique malgache Dans cette partie de notre travail, nous ferons référence au rapport du Baromètre des médias africains-Madagascar119 2012 publié par la Friedrich-Ebert-Stiftung (FES). Le Baromètre des Médias Africains (AMB) est une description en profondeur et une évaluation compréhensive de l‟environnement médiatiques sur le continent africain. À la différence d‟autres enquêtes de presse ou des médias, l‟AMB est un exercice d‟auto- évaluation effectué par des Africains et selon des critères et déclarations africains comme la «Déclaration des principes de la liberté d‟expression en Afrique» (2002) de la «Commission Africaine des Droits de l‟Homme et des Peuples». En collaboration avec l‟Institut des Médias pour l‟Afrique Australe (Media Institute for Southern Africa, MISA), le projet „médias‟ de la Friedrich-Ebert-Stiftung en Afrique (fesmedia Africa) a créé le Baromètre des Médias Africains (AMB) en 2004. Le Baromètre des Médias Africains (AMB) est une analyse qui permet d‟évaluer l‟environnement médiatique d‟un pays tout en servant d‟instrument de lobbying pour les réformes dans le secteur des médias. Tous les deux à trois ans, une commission de 10 à 12 experts se réunit pour évaluer la situation des médias dans leur pays respectif. Le panel est composé à part égale des représentants des médias et de la société civile au sens large.

117 Rapport « Afrobaromètre 2013 » à Madagascar, Le rapport à la politique à Madagascar : politisation et participation citoyenne, octobre 2013 118 Qui regrouperait 77% de la population, toujours d’après Afrobaromètre. 119 Déjà mentionné comme référence plus haut. - 84 -

Dans son analyse, le Baromètre des médias africains aborde plusieurs aspects du monde médiatique tout en leur portant son appréciation. On peut noter que, pour Madagascar, en 2012 : - l‟accès des citoyens aux médias nationaux et internationaux n‟est pas restreint par les

pouvoirs publics ; les chaines câblées et sur internet telles que la Radio France Internationale (RFI), la Voix de l‟Amérique (VOA), la British Broadcasting Corporation (BBC), sont bien reçues ; - des efforts sont entrepris pour élargir le champ de diffusion de la presse écrite, particulièrement dans les communautés rurales bien que les rares initiatives de diffusion de la presse en milieu rural relèvent, non point de l‟Etat, mais de l‟église catholique : à travers des publications comme Lakroan‟i Madagasikara et Isika Mianakavy, ou des projets de développement communautaire, comme le projet PROSPERER financé par le FIDA120 dans les 5 régions121 de Madagascar ; - il n‟y a pas de journal publié par une autorité publique122, d‟où l‟impossibilité d‟apprécier l‟indépendance éditoriale de la presse écrite publiée par une autorité publique ; - Madagascar ne dispose pas encore d‟un cadre légal couvrant la concurrence visant à empêcher la concentration des médias et les monopoles. Les patrons de presse qui en ont les moyens peuvent acheter ou créer plusieurs supports médiatiques. Par exemple, le groupe Ultima Média édite quatre journaux (Les Nouvelles, Taratra, Courrier de Madagascar, Journal de Madagascar-JDM) et une radio (alliance Fm92) ; le groupe Prey dispose de trois journaux (L‟Express de Madagascar, Ao Raha, L‟Hebdo), de deux stations radio (Radio Tana et Radio Antsiva) et de la télévision RTA123 ; - aucun effort particulier n‟est mis en œuvre par le gouvernement pour promouvoir un paysage médiatique diversifié, mais laisse plutôt faire les opérateurs privés comme ils l‟entendent. Il se contente de faire de la régulation ; - les médias ne font pas d‟efforts particuliers pour refléter de façon équitable les voix de la société dans sa diversité. La preuve, le peu d‟intérêt noté pour les questions qui touchent aux personnes handicapées ou au milieu syndical. En revanche, pour ce qui concerne l‟information politique, les médias de diverses tendances relayent les opinions de leurs

120 Ou Fonds International de Développement Agricole 121 Région Haute Matsiatra, Analamanga, Vatovavy Fitovinany, Itasy, Sofia 122 Il existe seulement une agence nationale (ANTA) qui diffuse un bulletin mensuel aux institutions sur abonnement. C’est un Etablissement public industriel et commercial (EPIC) sous tutelle du ministère de la communication. Cette agence est subventionnée annuellement par l’Etat. 123 C’est la raison pour laquelle les politiciens n’hésitent pas à bâtir des conglomérats de média.

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partisans. Malgré l‟hétérogénéité ethno-régionale de la population malagasy, Madagascar ne dispose que d‟une radio à caractère ethno-régional, le Feon’Imerina. La radio et la télévision nationale proposent cependant des programmes en dialectes régionaux en plus de la langue officielle qui est le malagasy ; - le cadre réglementaire pour le développement des technologies de l‟information et de la communication (TIC) n‟existe pas à Madagascar124 ; - le gouvernement exerce son influence sur une dizaine, voire une quinzaine d‟organes de presse qui ont conclu avec lui des contrats publicitaires. Les autres organes qui sont plutôt critiques sont systématiquement privés de la manne publicitaire, sans même passer par un appel d‟offres. Un panéliste relève même que « Certaines radios se plaignent de l‟utilisation de leurs ondes pour des raisons de service public (par exemple : les campagnes de vaccination) alors qu‟elles ne reçoivent pas de subvention de l‟Etat ». Voilà pour ce qui est du paysage médiatique en général ; mais quand est-il de la régulation de la communication audiovisuel dans notre pays ? Le Baromètre des médias africains pose comme objectif : « La régulation de la communication audiovisuelle est transparente et indépendante, le diffuseur public est transformé en véritable service public ».Or la réalité est tout autre car à travers plusieurs critères d‟évaluation, le rapport avance que : - concernant la législation sur l‟audiovisuel, elle existe. Mais l‟ordonnance N°92-039 du 14 Septembre 1992 en ses articles 21,22, 23 et suivants ne fait pas de distinction entre ces

trois catégories (public, commercial, et communautaire). Du point de vue quantitatif, l‟adoption de l‟ordonnance de 1992 sur la communication audiovisuelle a engendré de nouvelles créations d‟entreprises audiovisuelles à Madagascar en plus des antennes régionales du service public audiovisuel. En effet, l‟article 25 de l‟ordonnance est très clair et favorable à la liberté de création. Le Haut Conseil de l‟Audiovisuel (HCA) qui est saisi de la demande de creation se prononce obligatoirement dans un délai de 60 jours, faute de quoi l‟autorisation est réputée « accordée ». Mais en pratique, le ministère de tutelle ne joue pas le jeu car depuis juin 2010 aucune nouvelle autorisation n‟a été délivrée. Par conséquent, la loi est là mais elle n‟est pas appliquée. Concernant la liberté d‟expression en général, le rapport relève les points suivants : - la liberté d‟expression est garantie par la Constitution de la République de Madagascar suite au référendum de Novembre 2010125 ;

124 Toutefois, Au niveau régional il existe aussi des initiatives visant la mise en place d’un Centre Informatique Régional (CIR) pour connecter les régions autour d’un dispositif central sur l’état civil par exemple. De même pour assurer la rapidité et la fiabilité des opérations électorales la Commission Electorale Nationale Indépendante pour la Transition (CENI-T) a créé un Système d’Information Technologique (SIT). - 86 -

- la liberté d‟expression bénéficie en outre d‟une protection légale, notamment à travers les dispositions de la loi N°90-031 du 21 Octobre 1990 sur la communication126, - dans la même foulée, le projet de loi en cours d‟élaboration portant Code de la communication, se veut être plus précis concernant les médias. Elle s‟inscrit dans une dynamique de dépénalisation des infractions en matière de presse. - cependant, la liberté d‟expression dans le sens du droit de manifester ses opinions dans la rue n‟est pas explicitement visée. Elle relève des dispositions de l‟Ordonnance N°60-082 relative aux réunions publiques et aux manifestations, et de l‟ordonnance N°60-104 relative aux attroupements qui soumettent ce genre de libertés à l‟autorisation préalable des maires et préfets et donc à d‟éventuels abus. - la liberté d‟expression est effective en ce sens que la presse aborde tous les sujets et que les citoyens s‟expriment également à la radio, avec une grande liberté de ton, et dans les journaux, à travers les pages dédiées aux « courriers des lecteurs». De même, la société civile, à l‟exemple du SeFaFi ou Sehatra Fanaraha-maso ny Fiainam-pirenena (Observatoire de la vie publique), exerce assez librement son droit de critique et publie des communiqués sur la situation du pays sans menace apparente. Cependant, l‟effectivité de cette absence de crainte est à relativiser selon les sujets qui sont traités et selon le contexte. En effet, on peut relever des cas d‟autocensure à cause du contexte de crise qui sévit dans le pays actuellement et qui fait naître en eux des craintes de représailles127. Le spectre de la crainte va de la simple peur de représailles aux menaces ouvertes128.

125 L’article 10 de la Constitution dispose en effet que « Les libertés d'opinion et d'expression, de communication, de presse, d'association, de réunion, de circulation, de conscience et de religion sont garanties à tous et ne peuvent être limitées que par le respect des libertés et droits d'autrui, et par l'impératif de sauvegarde de l'ordre public, de la dignité nationale et de la sécurité de l’Etat» ; L’article 11, quant à lui, va plus loin en indiquant que « tout individu a droit à l'information». Il précise en outre que « l’information sous toutes ses formes n’est soumise à aucune contrainte préalable, sauf celle portant atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs. La liberté d’information, quel que soit le support, est un droit. L’exercice de ce droit comporte des devoirs et des responsabilités, et est soumis à certaines formalités, conditions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique». Enfin, l’article 11 énonce clairement que «Toute forme de censure est interdite» 126Dont les articles 1 et 2 indiquent respectivement que : « La présente loi garantit la liberté d’expression et de presse conformément à la Constitution », et que « Toute personne a le droit d’exprimer son opinion et ses idées par voie de presse quel qu’en soit le support matériel ». 127 Pour illustrer cela, on cite le cas des journalistes de la radio Free Fm, une station réputée très critique vis-à- vis du régime, qui ont été appréhendés par la police et retenus en garde à vue pour un temps. De même, les journalistes du quotidien Courrier de Madagascar ont subi de fortes pressions pour avoir publié en septembre 2011 le mandat d’arrêt authentique lancé à l’époque contre l’ancien président . 128 Par exemple, une autre journaliste qui a voulu faire une enquête sur les dahalo (voleurs de zébu),notamment sur les évènements se déroulant au sud du pays où sévit un conflit, ayant fait une dizaine de morts, a reçu des menaces d’un officier de l’armée, et a dû renoncer à faire son travail - 87 -

Concernant l‟entrée dans, et l‟exercice de la profession de journaliste, aux termes de l‟article 41 de la loi N°90-031 du 21 Décembre 1990, seules peuvent exercer la profession de journaliste à Madagascar, les personnes énumérées à l‟article 40 de la même loi129, et titulaires de la carte d‟identité professionnelle. Cette carte n‟est délivrée qu‟aux titulaires d‟un diplôme, d‟un brevet de qualification ou d‟un certificat délivré par un établissement de formation professionnelle de journalisme agréé par l‟État. A défaut, l‟article 41 exige de pouvoir justifier d‟une expérience professionnelle continue de 3 années. Outre ces conditions d‟accès à la profession, il est bon de noter que les conditions de travail du journaliste sont précaires130, que le contexte légal de la liberté de presse, bien que défini tant par les textes nationaux qu‟internationaux131, ne suffit à affirmer l‟effectivité de cette liberté et que le journaliste jouit de certains droits et est soumis à certaines obligations et interdictions132 133. Un Code d‟éthique et de déontologie a été mis en place par l‟Ordre des journalistes (ODJ) en 2004134. On peut tout de même noter l‟initiative des journalistes malgaches de se doter d‟un outil d‟autorégulation, telle que la Charte d’engagements pour la couverture de la période électorale135, à laquelle ils ont massivement adhéré136. Cependant, aucun mécanisme de régulation et sanction contre les dérapages des signataires n‟a été mis en place.

129 Ce sont ceux qui ont une occupation principale et régulière, l’exercice pour son compte ou pour celui d’autrui, de l’une des activités intellectuelles que comporte la confection d’une publication quotidienne ou périodique, écrite, radiodiffusée, télévisée, filmée ou photographique, et qui en tire l’essentiel de son revenu. Le correspondant de presse étranger qui remplit ces conditions, est considéré comme journaliste au même titre que les rédacteurs et rédacteurs-traducteurs, reporters, reporters-photographes, secrétaires de rédaction, reporters cameramen, preneur de son. 130 Notamment en ce qui touche son contrat de travail, sa rémunération et les avantages normalement prévus par la loi, le manque de moyen et les contraintes de temps, les diverses pressions et les pièges inhérents à la profession 131 Notamment au niveau national : la Constitution de 2010, la loi 90-031 sur la communication, la loi 92-039 sur la communication audiovisuelle, le code de procédure pénale ;au niveau international :la Déclaration universelle des droits de l’homme, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le Pacte international relatif aux droits civiques et politiques, la charte de Munich 132 Notamment les droits d’informer, à la protection des sources et au secret professionnel mais également les obligations de respecter la présomption d’innocence, de respecter le secret de l’information, de rectification ainsi que les interdictions suivantes : induire le public en erreur ou le manipuler, le plagiat 133 Les notes de bas de pages n° 130,131, 132 sont tiré de l’étude de Rakotondramboahova Philippe D. intitulée « La protection du journaliste », FES 2013. 134 Quotidiennement remis en cause, notamment par le fait de demander des « enveloppes » pour couvrir une information ou pouvoir accéder aux médias. 135 Conçue le 21 février 2013, lors d’une table de concertation organisée par le PNUD, l’OIF, avec la participation active des Directeurs de publication et rédacteurs-en-chef des principaux organes de presse malgaches. 136 500 journalistes avaient signé la Charte à la veille des élections du 25 octobre 2013 d’après l’association Médias en Action pour la Formation (MAF). - 88 -

S‟agissant de l‟accès à l‟information publique, il n‟existe pas de lois sur l‟accès à 137 l‟information. En l‟absence d‟une telle loi, l‟accès à l‟information est très difficile .Les citoyens eux-mêmes n‟ont pas accès à l‟information, car leur principale source d‟information qu‟est le journal officiel est reçue avec beaucoup de retard138. Au total, pour l‟écrasante majorité des médias et des citoyens, l‟accès à l‟information relève du parcours du combattant.

Voilà en ce qui concerne le paysage médiatique malgache avant l‟élection présidentielle de 2013 ; nous verrons plus loin quel serait l‟impact des médias au cours d‟une campagne électorale. Mais d‟abord quelles seraient les particularités de la société malgache ?

I-3- Les particularités de la société malgache : Parmi les concepts sociaux qui peuvent influer sur la communication politique, on peut évoquer dans notre travail « l’ethnicité » et « la religion ».

I-3-1- La question de l’appartenance ethnique face à la citoyenneté139 Le mot ethnie dérive du grec « ethnos » qui signifie « peuple, nation ». Une ethnie ou un groupe ethnique est un groupe humain partageant un héritage socioculturel commun, comme une langue, une religion, des traditions communes. L‟ethnisme est l‟ensemble de liens qui réunissent des groupes d‟individus ayant un patrimoine socioculturel commun, particulièrement la langue. Il fut et reste le mobile qui pousse à la création de partis ethniques qui visent à représenter dans une entité politique donnée et par la suite dans des parlements nationaux et dans diverses assemblées élues, les intérêts de minorités ethniques140 Depuis la proclamation du retour à l‟indépendance en1960, le Malgache jouit du statut de citoyen alors qu‟il était sujet au temps des Royaumes et du Royaume de Madagascar, et indigène sous la Colonisation. Or, la perception de l‟État par les Malgaches n‟est toujours pas homogène. D‟une part, l‟on note ceux qui n‟assument pas leur citoyenneté et qui attendent tout de l‟État : ils occupent des postes de responsabilité au nom de leur famille ou de leur groupe ethnique ; en quelque sorte, ils usent des réseaux familiaux et ethniques bien établis pour prôner ouvertement le

137 Par exemple, pour connaitre le nombre de partis politiques à Madagascar, il a fallu à un journaliste une journée de tracasseries administratives pour obtenir le chiffre de 384 (en 2013) 138Près de 4 mois dans une grande ville comme FIANARANTSOA située à 400 Km d’Antananarivo. 139 Inspirée par l’étude réalisée par Ramandimbilahatra Raymond A., Etat et Ethnicité à Madagascar, FES octobre 2010. 140 Wikipedia, l’encyclopédie libre. - 89 - népotisme. D‟autre part, on peut aussi voir ceux qui se comportent en citoyens responsables et qui agissent dans le sens de la consolidation de l‟État républicain démocratique. Jusqu‟à nos jours, des débats interminables sur l‟unité nationale, L‟État unitaire, l‟instrumentalisation de l‟ethnicité dans la lutte pour le pouvoir et la distribution du pouvoir au sein de l‟État et de l‟appareil administratif, le rôle des associations ethno-régionales dans la distribution du pouvoir alimentent le quotidien de la population. Des Malgaches continuent à se demander si la distribution ethnique du pouvoir au sein des institutions de l‟État et des organisations sociopolitiques reste toujours d‟actualité à Madagascar. Des politiciens et idéologues, nationaux et étrangers, continuent à instrumentaliser des ressentiments passionnels fondés sur l‟histoire pour des intérêts personnels. Certains partis politiques, arguant de l‟existence de déséquilibres régionaux ont tacitement accepté la proposition des colonisateurs de ne faire élire à la tête de l‟État républicain démocratique que des présidents côtiers. A cela, on peut encore ajouter l‟imposition de quotas ethniques dans l‟administration. Il est intéressant de souligner que ces représentations ethno nationalistes tournent autour du pouvoir et que ce sont les faits des couches dominantes au sein des groupes de population régionale et non ceux de l‟ensemble de la population.

I-3-2- La question de la religion face à la laïcité de l’Etat141 L‟Eglise est une composante incontournable de la société malgache. Ayant accompagné la « modernisation » de la Grande île du XIXème siècle, l‟Eglise a été aux côtés de Madagascar durant les heures « noires » de la colonisation, militant parfois pour la tutelle « civilisatrice » de la métropole, soutenant souvent le combat nationaliste des Malgaches. Quand la Grande île accède à l‟indépendance et acquiert le statut d‟Etat, l‟Eglise continue à avoir un rôle politique important, « tantôt comme recours en face de pouvoirs oppressifs, tantôt comme alliés inconditionnels du pouvoir en place »142. La laïcité, dans la définition proposée par les auteurs de la fin du XIXème siècle, était d‟ailleurs définie comme étant la neutralité de l‟Etat par rapport aux religions. Comme le rappelle Maurice Barbier dans son ouvrage sur la laïcité, « cette neutralité implique non seulement que l’Etat ne professe ou ne privilégie aucune religion particulière, mais qu’il ne

141 Inspirée de l’étude réalisée par Rabary Lova, église et Etat dans le nouveau contexte de démocratisation, FES octobre 2013 142 URFER, Sylvain, « Eglises et politique à Madagascar, un éclairage historique », www.doctrine-sociale- catholique.fr - 90 - se prononce pas en matière religieuse et qu’il n’apporte aucune aide, financière ou autre (…). Il faut préciser que la neutralité n’est pas seulement l’impartialité, celle-ci signifie que l’Etat accorde un traitement égal aux diverses religions, par exemple en leur apportant un soutien financier semblable. La neutralité va plus loin et exige que l’Etat n’aide ni ne gêne aucune religion »143.La question se pose si la religion ne doit en aucune manière être associée à l‟exercice du pouvoir ? L‟histoire a montré que lorsque la religion est liée à l‟exercice du pouvoir, les tendances à la discrimination existent toujours. Et même si les discriminations ne viennent pas toujours des tenants des deux pouvoirs, elles peuvent venir des fidèles eux-mêmes. Si l‟Etat et l‟Eglise ne sont pas séparés, le risque que les principes d‟égalité et de liberté soient violés en faveur des groupes religieux proches du pouvoir est grand. L‟association d‟une religion à l‟Etat et à l‟exercice du pouvoir peut entraîner une inégalité de traitement de toutes les croyances existant au sein d‟un pays. Ce fut également le cas à Madagascar à l‟époque monarchique, lorsque craignant pour la sacralité de leur pouvoir, Radama I et Ranavalona I ont contrôlé, voire interdit le christianisme. Et quand sous Ranavalona II le protestantisme est devenu la religion officielle du Palais, le catholicisme en particulier a connu un certain nombre de difficultés, difficultés souvent imposées par l‟administration elle-même. Et même lorsque l‟Etat se veut neutre, comme cela a été le cas sous les premières années de l‟administration coloniale, l‟association imaginaire d‟une confession au pouvoir politique peut conduire à des sociétés. Sous le régime de Marc Ravalomanana, les liens particuliers unissant le président de la République, et dans son sillage l‟ensemble de l‟appareil d‟Etat, aux Eglises du FFKM, en particulier à la FJKM, ont créé des inégalités flagrantes entre les religions. C‟est ainsi que les organisations de développement rattachées aux églises membres du FFKM, et en particulier à la FJKM, ont pu bénéficier d‟un certain nombre de contrats de marché public, et ont même pu obtenir des financements publics pour la construction ou la réhabilitation de certains de leurs édifices cultuels ou bâtiments rattachés. Les églises membres du FFKM se sont toujours défendues d‟être instrumentalisées par Marc Ravalomanana, mais comment interpréter autrement les discours politiques prononcés par celui-ci au pupitre des enceintes destinées aux cultes. Sans parler des propagandes politiques à peine voilées en sa faveur faites par certains responsables cléricaux. Que dire également de la présence d‟hommes politiques du pouvoir, à

143 Barbier Maurice, La Laïcité, L’Harmattan, Paris, 1998. - 91 - commencer par le chef de l‟Etat et ses ministres, au sein des organes de direction de certaines églises144. Le fait est que dans un sondage réalisé par l‟association Liberty 32 avec la FES, les entités religieuses constituent la seule catégorie d‟institution accrochant la confiance de la majorité des personnes auprès desquelles l‟enquête a été effectuée. « 32,2% des personnes interrogées déclarent faire suffisamment confiance aux entités religieuses, et 25,5% leur feraient totalement confiance », indique le rapport du sondage. C‟est dire de l‟importance du religieux dans le quotidien du Malgache. Les auteurs du sondage émettent néanmoins certaines réserves par rapport à ce résultat, le Malgache accordant beaucoup d‟importance à la spiritualité et ne se permettant pas de trop dénigrer les entités religieuses145. Mais ne serait-ce que pour cette considération que le citoyen a du religieux, ni l‟Etat ni les politiciens ne peuvent en ignorer ni l‟existence et ni l‟influence qu‟il peut avoir sur le citoyen.

Après avoir abordé les diverses notions „qui à notre sens pourraient influer sur la communication politique à Madagascar lors de l‟élection présidentielle de 2013, continuons sur cette lancée et essayons de mettre en exergue le contexte de cette dernière.

II- Le contexte de l’élection présidentielle de 2013 Dans cette sous-partie, nous allons essayer de mettre en avant le déroulement même de l‟élection après l‟avoir replacé dans son contexte historique et politique.

II-1-Le contexte historique : Le système politique depuis l’indépendance Madagascar a accédé à l‟indépendance le 26 juin 1960. La Première République, qui s‟inspire grandement des Institutions de la Cinquième République en France, est animée jusqu‟en 1972 par le Président Philibert Tsiranana qui mène une politique économique libérale. A la suite de troubles et de grèves, Tsiranana doit se retirer, donnant le pouvoir à l‟armée pour une période de Transition. « Depuis, la vie politique malgache s‟est développée dans le cadre d‟une

144 Marc Ravalomanana avait été élu vice-président de la FJKM en 2000. Il avait été réélu à ce poste en 2004 et en 2008. Certains de ses ministres ont également eu des responsabilités au sein des structures « laïques » de la FJKM, tels Hajanirina Razafinjatovo, ministre de l’Education puis ministre des Finances, ou encore Ivohasina Razafimahefa, ministre du Commerce, ou encore Benjamin Andriamparany Radavidson, ministre des Finances puis ministre de l’Education. Jean Lahiniriko a également été elu trésorier du bureau central de l’Eglise luthérienne de Madagascar (FLM) alors qu’il était encore président de l’Assemblée nationale dominée par le parti fondé par Marc Ravalomanana, le Tiako i Madagasikara. 145 Friedrich-Ebert-Stiftung et Liberty 32, sondage sur la participation politique du citoyen, Antananarivo, 6-17 août 2013

- 92 - succession de périodes d‟avancées et de régression politique, débouchant sur des crises à caractère cyclique »146. De 1975 à 1992, l‟Amiral Didier Ratsiraka dirige la Troisième République. Il crée un parti unique, l‟avant-garde de la révolution (AREMA147), et met en place un régime socialiste. Vers le milieu des années 80, parallèlement à une phase de libéralisation économique et d‟ouverture diplomatique, Didier Ratsiraka instaure un pluralisme encadré. A partir de 1991, une série de mouvements institutionnels et révolutionnaires le poussent à l‟exile, cédant la place à Albert Zafy, élu président en février 1993. La Troisième République marque le passage réel au multipartisme, et commencement d‟un libéralisme politique et économique sans précédent dans l‟histoire malgache. Le Président entre en conflit avec l‟Assemblée Nationale suite à sa volonté de réviser la Constitution pour lui donner le pouvoir de nommer le Premier Ministre. Il est destitué en septembre 1996. Les élections de décembre 1996 ramènent au pouvoir le Président Didier Ratsiraka. Les élections présidentielles de décembre 2001, qui opposent le président sortant au maire de la capitale, Marc Ravalomanana, sont marquées par une grave crise politique, sur fond de contestation des résultats électoraux. En effet, le maire revendique la victoire sur la base des résultats publiés par son quartier général. Le pays se scinde en deux, des affrontements armés poussant l‟OUA148 à intervenir, en vain. En mai 2002, la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) déclare Marc Ravalomanana vainqueur au premier tour avec plus de 51% des voix. La même année, la communauté internationale le reconnaitra président. En 2006, Marc Ravalomanana est réélu pour cinq ans dès le premier tour avec 54,80 % des suffrages, contre plusieurs candidats qui se présenteront en 2013. Toutefois, sa décision de modifier la Constitution par voie référendaire, en avril 2007, en faveur de pouvoirs présidentiels renforcés, marque le début d‟un mouvement de contestation, « reprochant au président sa main mise sur l‟économie malgache et une mauvaise protection des intérêts économiques du pays à l‟international »149. Le mouvement s‟amplifie et débouche sur la crise de 2009. La contestation se cristallise autour de Andry Rajoelina, maire récemment élu de la capitale. Les émeutes et manifestations qui s‟en suivent pendant les mois de janvier et février faisant plusieurs dizaines de morts et centaines de blessées forceront le président Marc Ravalomanana, avant de partir en exil, à dissoudre le gouvernement et sans respecter les

146 Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives » Madagascar 2013. 147 Andry sy Rihana Enti-Manavotra an'i Madagasikara. 148 OUA : Organisation de l’Union Africaine. 149 Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives »Madagascar 2013. - 93 - dispositions constitutionnelles afférentes, à conférer par ordonnance les pleins pouvoirs à un Directoire militaire, qui à son tour transfèrera les pleins pouvoirs à Andry Rajoelina le 17 mars 2009, avec l‟aval ultérieur de la Haute Cour Constitutionnelle. En 2010, le nouveau pouvoir fait approuver par référendum la Constitution de la Quatrième République.

II-2-Le contexte politique : On distinguera le contexte avant le commencement du processus électoral mais également avant les élections jumelées lors du second tour. Depuis l‟exil en Afrique du Sud de Marc Ravalomanana et la prise de pouvoir de Andry Rajoelina, le 17 mars 2009, la Communauté du Développement en Afrique Australe (SADC), en tant que médiateur effectua plusieurs tentatives de négociation entre les deux protagonistes150. Face à l‟échec des négociations et à la dégradation rapide de la situation politique et économique et sous la pression de la communauté internationale, la SADC propose une Feuille de Route (FdR) engageant les différents acteurs politiques du pays. Signée à Antananarivo le 16 septembre 2011, la FdR a pour but d‟enclencher un processus inclusif et consensuel reposant sur le maintien du Président Andry Rajoelina dans ses prérogatives; la mise en place d‟un Gouvernement de Transition d‟Union Nationale et l‟élargissement des Institutions à l‟ensemble des signataires de la FdR. Ce processus a buté sur divers obstacles : les élections prévues le 24 juillet 2013 ont dû être reportées après la validation de candidatures illégales, en particulier celles du Président de la Transition Andry Rajoelina, de l‟épouse de l‟ex- Président Lalao Ravalomanana, et de l‟ex- président Didier Ratsiraka, en violation des lois malgaches, le 3 mai 2013. Les conditions du « ni-ni »151 souhaitées par la communauté internationale et agrées par les parties prenantes à la FdR ont permis de relancer le processus, élargissant le spectre politique avec, au total, 33 candidats validés152 153 pour se présenter au premier tour de la présidentielle. Une dizaine de candidats

150 Notamment les rencontres de Maputo I (les 8 et 9 aout 2009), Maputo II (le 25 aout 2009), d’Addis Abeba (du 3 au 6 novembre 2009), Maputo III (du 3au 8décembre 2009 mais sans la mouvance Rajoelina) 151 Le « ni – ni » : Ni Andry Rajoelina ni Marc Ravalomanana ne devaient se présenter aux élections présidentielles de 2013. 152 Notamment RAVALISAONA Clément Zafisolo, RAJAONARIMAMPIANINA RAKOTOARIMANANA Hery Martial, RABEHARISON Roland Dieu Donné, RATSIRAKA Iarovana Roland,ANDRIANAINARIVELO Hajo Herivelona, RAKOTO ANDRIANIRINA Fetison, RABEMANANTSOA Brigitte Ihantanirina,RADAVIDSON ANDRIAMPARANY Benjamin, VITAL Albert Camille, RAKOTO Jean Pierre, RABEHARISOA Saraha , DOFO Mickaël Bréchard, RANDRIAMAMPIONONA Joseph Martin, RAJAONARY Patrick Ratsimba, TINASOA Freddy, RAZAFIARISON Laza, MONJA Roindefo Zafitsimivalo, TEHINDRAZANARIVELO Djacoba Alain, RAJEMISON RAKOTOMAHARO, LAHINIRIKO Jean, VONINAHITSY Jean Eugène, RAJAONARIVELO Pierrot Jocelyn, RANDRIAMANANTSOA Tabera, RATREMA William, JEAN-LOUIS Robinson Richard, RAZAFINDRAVAHY Edgard Marie Noé, RAHARIMANANA - 94 - seulement étaient représentatifs des forces politiques nationales ou régionales. Les deux mouvances principales restaient représentées : la Mouvance Ravalomanana par Robinson Jean Louis, un de ses ex ministres et le Président de la Transition avec son candidat officieux Hery Rajaonarimampianina, Ministre des Finances de son Gouvernement pendant la période de Transition, dont la candidature a été approuvée tardivement suite au rejet des candidatures de Kolo Roger et Jules Etienne. La participation au premier tour de l‟élection se résume comme suit154 : Inscrits 7 839 268 Votants 4 826 156 Taux de participation 61,56% Blancs & Nuls 335 609 Suffrages exprimés 4 490 547

Le premier tour s‟est tenu le 25 octobre. Les candidats des deux principales mouvances sont arrivés en tête, Robinson Jean Louis obtenant 21,16% des voix contre 15.85% pour Hery Rajaonarimampianina. Le taux de participation a été plus élevé qu‟anticipé, avec 61,56% de participation.Les cinq candidats ayant reçus plus de 4% des votes et jouissant d‟une assise politique nationale ou régionale seront les pivots de toute alliance. Il y a d‟une part, Roland Ratsiraka (9%) et Camille Vital (6,85%) et, d‟autre part, Hajo Andrianainarivelo (10,54%), Saraha Georget (4,52%) et Edgard Razafindravahy (4,34%)155. Suite à ce résultat, les deux candidats ont pris les engagements suivants : celui d‟un gouvernement d‟union nationale et d‟une large coalition pour Robinson Jean Louis et, celui d‟un front anti-Marc Ravalomanana pour Hery Rajaonarimampianina. La réconciliation nationale est très vite devenue, au cours de leurs meetings de campagne, l‟axe de leur stratégie de ralliement. Le front du « ni-ni », constitué quelques jours avant le résultat des élections, s‟est très vite disloqué. Quatre candidats étaient concernés : Hajo Andrianainarivelo, Joseph Martin Randriamampionona, Camille Vital, et Roland Ratsiraka. Seul Hajo Andrianainarivelo a campé sur sa position du « ni-ni », qui n‟a d‟ailleurs pas été toujours acceptée par sa base. Les ralliements se sont succédés. Avant la campagne du second tour, la dynamique a été en faveur de Robinson Jean Louis avec des alliances de poids, dont, notamment, le Parti Vert de

Venance Patrick, RATRIMOARIVONY Guy, RAZAFIMANAZATO Julien, FAHARO RATSIMBALSON, RABETSAROANA Willy Sylvain, NOELSON William, LEZAVA Fleury Rabarison. 153 Cf. Décision n°11-CES/D du 21 août 2013 154 Source : site web de la Haute Cour Constitutionnel- Cour Electorale Spéciale 155 Source : site web de la Haute Cour Constitutionnel- Cour Electorale Spéciale Cour Electorale Spéciale - 95 -

Saraha Georget et celui de Camille Vital, ainsi que le soutien de nombreux petits partis et de multiples associations. Mais au fil des semaines précédant le scrutin, Hery Rajaonarimampianina a renforcé ses soutiens. Il a bénéficié du ralliement de deux personnalités de la côte Est, Roland Ratsiraka et Pierrot Rajaonarivelo ainsi que celui de candidats ayant reçu peu de voix au premier tour mais bénéficiant parfois d‟un ancrage régional certain, tel que le président du parti Autres sensibilités(Les AS), Jean Eugène Voninahitsy qui avait d‟ailleurs remporté la région de Melaky (côte Ouest) ou le leader du parti FFF 156(Benjamin Andriamparany Radavidson). Pour gagner les élections, les deux candidats à la présidentielle ont choisi la même stratégie. D‟une part, ils ont visé à réunir une majorité à l‟Assemblée Nationale, grâce au soutien affirmé du parti du Président de la Transition pour Hery Rajaonarimampianina qui n‟a pas de parti et via la coalition de partis alliés à l‟AVANA parti de Robinson Jean Louis. D‟autre part, ils ont fait référence à l‟ancien Président en exil pour Robinson Jean Louis et au Président de la Transition pour son concurrent, même si dans leurs déclarations, ils cherchaient à afficher une certaine autonomie. La concomitance des scrutins présidentiels et législatifs a entrainé la constitution de deux blocs, s‟affrontant pour les élections, représentant plus de vingt partis et plus d‟un tiers des candidats aux législatives. Le dernier tiers des candidats est constitué d‟indépendants dont le rôle sera important pour constituer une majorité à l‟Assemblée Nationale. Le paysage politique s‟est durci au cours des semaines précédant les élections, avec plusieurs décisions, perçues comme une certaine volonté de contrôle du pouvoir : le remplacement de dix chefs de régions dont huit dirigés par des militaires ; des manoeuvres allant à l'encontre du principe de neutralité (articles 2 et 15 de la FdR) des autorités politiques de la Transition par la réactivation d‟un Décret du 6 août 2013157 les autorisant à participer à la campagne; et la tentative d‟interprétation de l‟article 54 de la Constitution relatif à la nomination du Premier Ministre, dans un communiqué du 27 novembre 2013158. Alors que le paysage politique se durcissait, les deux dernières semaines de campagne ont été marquées par un ralentissement de la dynamique du candidat Robinson Jean Louis, qui a commis plusieurs erreurs. Ainsi, en contradiction avec sa déclaration répétée de personnalité

156 Parti politique Firaisam-pirenena ho an'ny Fahafahana sy ny Fandrosoana. 157 Tout de même annulé par le Cour Electorale Spéciale. 158 Un communiqué de presse du Conseil des Ministres, daté du 27 novembre 2013, se rapportant à la mise en oeuvre de l’article 54 de la Constitution et de l’article 9 du Décret n°2013-057 du 29 janvier 2013, qui fixe les conditions d’application de l’article 24 de la Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011, donne une interprétation erronée des conditions de nomination du Premier Ministre pouvant s’opérer par une majorité nouvellement constituée, à l’issue des résultats définitifs des élections législatives. - 96 - autonome, le candidat est apparu constamment accompagné de l'épouse du Président en exil Marc Ravalomanana, répétant à plusieurs reprises qu'il en ferait son Premier Ministre. Or ces initiatives ont ravivé la crainte d'une partie des Malgaches (les côtiers et les représentants du pouvoir économique) du retour en politique du couple Ravalomanana. Sa performance moyenne lors des trois débats télévisés avec son concurrent l'avait aussi desservi. Enfin, la campagne médiatique menée contre lui dans la capitale sur son appartenance au parti socialiste français et à la franc-maçonnerie159, avait joué en sa défaveur. Au second tour, Le taux de participation est inférieur de près de onze points (50,70% contre 61,56% au premier tour). Cette baisse importante de la participation semble traduire un certain désabusement vis-à-vis de la représentation politique d‟autant que les conditions climatiques étaient favorables le jour de ce scrutin jumelé. Les résultats officiels de ce scrutin présidentiel publiés le 17 janvier 2014 confortent la position du Président de la Transition. Hery Rajaonarimampianina l‟emporte avec 53,49% des suffrages exprimés contre 46,51% des suffrages exprimés pour Robinson Jean Louis. Robinson Jean Louis a contesté ce résultat160 et revendiqué la victoire, tout en appelant ses partisans à des manifestations pacifiques. Hery Rajaonarimampianina l‟emporte dans dix-sept régions contre cinq pour Robinson Jean Louis. Les alliances et le report de voix n‟ont pas systématiquement fonctionné, à l‟exception des quatre régions de la côte Est et Nord, remportées au premier tour par Roland Ratsiraka, qui avait appelé à voter pour le candidat du Président Rajoelina. Il en est de même pour la région de Melaky (côte Ouest) dont le leader local et Président des Autres Sensibilités, Jean Eugène Voninahitsy, qui avait emporté très largement cette région au premier tour, avait aussi appelé à voter pour le candidat du Président de la Transition. La Région du Grand Sud-Ouest, Atsimo Andrefana, fief de Camille Vital, allié de Robinson Jean Louis, va également à Hery Rajaonarimampianina, ainsi que les trois régions que son adversaire avait remportées au premier tour, à savoir Menabe, Boeny et Alaotra Mangoro, terre natale de Robinson Jean Louis.

159 Evoqué lors du débat du mercredi 18 décembre 2013 160 Cf. « des fraudes massives durant les élections », extrait du Madagascar-Tribune.com http://www.madagascar-tribune.com/Des-fraudes-massives-durant-les,19490.html ou encore Arrêt n°03- CES/D/AR.14 du 07 janvier 2014 relative à des requêtes en disqualification.

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II-3-Le déroulement de la campagne La campagne électorale a été lancée officiellement le 25 septembre 2013, bien que des actes de précampagne électorale aient, dans les faits, commencé une dizaine de jours avant la date officielle. La campagne s‟est déroulée dans une ambiance festive et un climat serein. Plusieurs évènements sont toutefois à signaler: manifestations estudiantines; vindictes populaires à Nosy Be; et, actes habituels de banditisme dans le Sud. Ceux-ci n‟ont cependant pas affecté de manière significative le bon déroulement de la campagne électorale. Les incidents sont restés limités et isolés. Les critiques des partis sur les défaillances techniques, supposées ou réelles, du processus électoral ont pris de l‟ampleur, relayées par les médias, sans pour autant affecter le bon déroulement de la campagne. Les partis ont reproché à la CENI-T son absence d‟intervention en qualité d‟organe régulateur, notamment sur la question de l‟affichage sauvage. Les thèmes de campagne des candidats, sous forme de slogans non développés, se recoupent: lutte contre la pauvreté ; emploi ; sécurité ; bonne gouvernance ; état de droit . Le candidat Roland Ratsiraka, a développé un programme de décentralisation très poussé, et le Parti Vert a présenté un programme structuré et de protection de l‟environnement. L‟implication du pouvoir sur le terrain est restée discrète au niveau des régions161. La campagne du second tour a été marquée par la présence du Chef de la Transition et autres Autorités de l‟Etat. La campagne électorale s‟est déroulée du 29 novembre à 6h au 19 décembre à 6h, raccourcissant d‟une journée la période légale de campagne de façon discrétionnaire. Bien qu‟intense, surtout les dix derniers jours, elle s‟est déroulée dans un calme émaillé de quelques incidents mineurs. Les campagnes présidentielle et législative ont répondu à des objectifs différents, les candidats aux législatives menant des campagnes de proximité et les candidats à la présidentielle menant des campagnes de visibilité, plus accentuées en particulier pour Hery Rajaonarimampianina162 Les candidats à la présidentielle ont pu exposer leur projet de société à l‟occasion de trois débats télévisés organisés à l'initiative de la CENI-T. Lors de leurs meetings de campagne, ils ont axé leur programme sur des problématiques régionales concrètes, tout en manifestant leur attachement à la réconciliation nationale et à une décentralisation effective. Les candidats aux législatives ont, quant à eux ciblé leur campagne sur des problèmes propres à leur

161 Faits relatés par des observateurs de la MOE UE sur le terrain. Ces derniers n’ont en effet pas observé directement de pression manifeste des chefs de région, mais des pressions verbales notamment sur les fonctionnaires leur ont été rapportées. 162 Comme l’ont relaté les observateurs de la MOE UE déployés sur le terrain. - 98 - circonscription électorale. Les membres de partis alliés à l‟un des deux candidats à la présidentielle ont fait une double campagne. Dès lors que le ralliement était confirmé au niveau local et surtout que les financements étaient assurés, ils ont mené une campagne individuelle en tant que candidat aux législatives, tout en faisant également campagne pour le candidat à la Présidence soutenu par leur parti. Il a été observé la participation de différentes autorités à des meetings électoraux, tels que le Président de la Transition, le Président du Conseil Supérieur de la Transition, certains chefs de région, de district ainsi que des hauts fonctionnaires des autorités administratives mais également une disproportion de moyens entre les différents candidats, ainsi que des activités expressément interdites par la loi électorale, parmis lesquelles la MOE UE insiste sur les suivantes : - Dans les districts III, V, et VI de la région de la capitale, la Mission a constaté que des candidats aux législatives163 ont promis et distribué des cadeaux de campagne, dont un a été élu en tant qu‟indépendant164. - Dans la région d‟Ambositra, il y a eu utilisation de biens publics à des fins de campagne. - Dans la région d‟Antsiranana, des pressions ont été faites par le Chef de région sur les fonctionnaires, les enjoignant à venir accueillir le Président de la Transition et le candidat à la présidentielle Hery Rajaonarimampianina. - Un cas de distribution de cadeaux et d‟argent par le candidat MAPAR, dans le district de Morondava. - Des cas de corruption signalés par la société civile, et notamment la KMF-CNOE à Mahanoro (Itasy)165. - L‟interdiction de toute inauguration officielle en période électorale, n‟a pas été respectée comme ce fut le cas dans le district de Miarinarivo (Itasy) dans la commune d‟Analavory.

II-4- la participation des médias durant la campagne électorale de 2013 Selon le Rapport final de la Mission d‟Observation Electorale de l‟Union Européenne (MOE UE) à Madagascar166 durant l‟élection présidentielle de 2013 , une unité de monitoring des médias composée de six moniteurs, mise en place par la MOE UE elle-même, a analysé un

163 Dadafara Raharijaona; Dadou, le fils du propriétaire de Midi Madagasikara, Malaza et Gazetiko; et, Anyah, chanteuse. 164 Candidat Dadafara Raharijaona. 165 La KMF- CNOE et d’autres sources ont informé la MOE UE que des sommes d’argent auraient été distribuées à certains chefs de Fokontany de Toamasina I. 166Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives »Madagascar 2013 - 99 -

échantillon de médias en vérifier l‟accès des candidats aux médias et le respect des réglementations et lois des organes de presse. Le panel de médias observés a inclus quatre chaînes de télévision, deux radios et dix quotidiens167. Selon encore ce même rapport : -durant la campagne du premier tour de l‟élection : -La presse malgache a couvert la campagne électorale sans entrave à la liberté d‟expression. -La réglementation des médias publics, élaborée par la CENI-T, a garanti un accès à tous les candidats, quoi que réduit dans la deuxième partie de la campagne : l‟espace de débats gratuits offert aux candidats dans les deux premières semaines a été remplacé, dans la deuxième partie de la campagne, par un espace d‟interview payant. Cela a limité l‟accès des candidats aux médias publics et réduit la possibilité pour les citoyens de connaître les candidats et leur programme. -Les médias publics nationaux, TVM et RNM, ont assuré un accès gratuit et égal à tous les candidats. Les émissions d‟information ont également offert une couverture équilibrée des différentes campagnes. Ces médias ont suivi toutes les étapes de préparation des élections dans les journaux télévisés et à la radio. Par ailleurs, la CENI-T a bénéficié d‟espaces gratuits à des plages horaires de grande audience pour diffuser des spots d‟éducation civique et d‟information électorale. -Les médias audiovisuels privés ont largement couvert la campagne électorale du premier tour à travers différents formats. TV PLUS a été la seule à organiser des débats entre les principaux candidats. Toutefois, la majorité de la couverture médiatique assurée par les médias privés (audiovisuel et presse écrite) était payante, ce qui a engendré un déséquilibre de la couverture médiatique en faveur de certains candidats, notamment Hery Rajaonarimampianina. Par ailleurs, les médias privés ont souvent présenté comme information éditoriale, sous forme de publi-reportage, de la propagande électorale. Cela s‟est produit au détriment d‟informations factuelles transmises aux citoyens. -durant la campagne du second tour de l‟élection168 : -Les médias ont porté une attention constante au processus électoral, entre les deux tours, pendant la campagne, et jusqu‟au jour du scrutin.

167 Télévisions : TVM (publique), TV PLUS, MA TV et VIVA TV. Radios : RNM (publique) et Radio Don Bosco. Quotidiens : Midi Madagasikara, L’Express, Malaza, La Gazette de la Grande Ile, Les Nouvelles, La Vérité, Ino Vaovao, Gazetiko, Taratra, Ao Raha. 168 Jumelée avec les élections législatives, rappelons-le. - 100 -

-La CENI-T a élaboré une règlementation visant à garantir un accès gratuit et payant aux médias publics pour les candidats169. L‟initiative d‟organiser trois débats entre les candidats à la présidentielle170 durant la campagne a été bien reçu par la population car elle a permis aux citoyens de profiter d‟un réel débat contradictoire. -Les médias privés ont, quant à eux, comme lors de la campagne présidentielle du premier tour, surtout offert des espaces de communication payante, au détriment de l‟information. Ils ont également continué à présenter à titre d‟information éditoriale, sous forme de publi- reportage, de la propagande électorale. La disparité de moyens entre candidats a donné lieu à une visibilité inégale de ces derniers. Seul un nombre limité a profité d‟une couverture notable171 172.

Ainsi avons-nous vu le contexte dans lequel l‟élection s‟est déroulée tant durant le premier tour que le second ; abordons tout de suite la dernière sous-partie de notre travail de recherche qui consistera en la mise en avant du cadre institutionnel et juridique de cette élection présidentielle des 25 octobre et 20 décembre 2013.

III- Le cadre juridique et institutionnel de l’élection présidentielle de 2013 Nous allons aborder successivement le cadre juridique de l‟élection en général et ensuite l‟organisation électorale.

III-1-Le cadre juridique Il s‟agira ici de dresser un portrait de l‟ensemble des moyens juridiques à disposition pour réglementer la période électorale et donc par extension, la communication politique qui va de pair avec elle. Nous allons essayer d‟approfondir successivement, grâce à une lecture soutenue des textes malgaches y afférentes : le cadre institutionnel du pouvoir politique durant la période électorale à savoir la transition, le cadre juridique de l‟élection, le cadre juridique

169 La MOE UE constate néanmoins les limites de la réglementation pour l’accès gratuit aux médias publics des candidats aux législatives. 170 Mercredi 4 Décembre 2013 (20h à 21h30) : débat sur la situation économique et les problèmes de société ; Mercredi 11 Décembre 2013 (20h à 21h30) : La place de Madagascar dans le concert des Nations ; Mercredi 18 Décembre 2013 (20h à 21h30) : débat politique 171 Les candidats du parti MAPAR et le candidat présidentiel Hery Rajaonarimampianina, soutenus par le Président de la Transition, ont ainsi bénéficié d’une couverture majeure dans plusieurs médias audiovisuels et quasi exclusive dans VIVA TV, propriété d’Andry Rajoelina, selon la MOE UE. 172 Toutefois, La MOE UE salue l’initiative de Radio Don Bosco (RDB) d’avoir organisé une interview avec les candidats présidentiels et d’avoir diffusé gratuitement, en direct et en simultané, avec toutes les stations de son réseau, les débats présidentiels organisés par la CENI-T, l’ORTM et le Ministère de la Communication. - 101 - régissant les partis politiques, le cadre juridique des médias ainsi que le cadre juridique de la campagne électorale.

III-1-1-Le cadre institutionnel de la Transition La transition politique a débuté au mois de mars 2009. Néanmoins, il a fallu attendre deux ans pour qu‟une Transition inclusive soit instituée par la Feuille de route, en application d‟un document établi par la mission ministérielle de la Troïka de l‟organe de la SADC, et soit signée par dix protagonistes de la vie politique le 16 septembre 2011. Ce document définit un calendrier précis des échéances173 à tenir et désigne les organismes devant en assurer le suivi. Le refus des principaux candidats déclarés en poste à des fonctions politiques, dont le Président de la Transition, de démissionner 60 jours avant le scrutin du 24 juillet a finalement conduit au report des élections. Cette étape constitue la base-même de la transition inclusive. A ce titre, elle représente la première étape des réalisations de la transition, visant à installer tout d‟abord l‟Exécutif, puis à redessiner la composition du Parlement d‟Union Nationale. La désignation du premier ministre s‟est effectuée conformément aux dispositions du paragraphe 5 de la FdR et, le 28 octobre 2011, le Président de la Transition a nommé Jean Omer Beriziky, seule personnalité proposée par l‟opposition, aux responsabilités de Premier Ministre de consensus. Cette nomination s‟est faite en présence de l‟ensemble des groupes politiques signataires de la FdR ainsi que de l‟ensemble du corps diplomatique accrédité à Madagascar. Sur proposition du premier ministre de consensus, la mise en place du gouvernement d‟union nationale, par la nomination de ses 35 membres, est réalisée le 21 novembre 2011. La collégialité et la solidarité gouvernementales s‟installent, même si ces principes sont parfois malmenés. Pour la mise en place des deux chambres du Parlement de la transition, conformément aux dispositions du paragraphe 7 de la Feuille de route, le président de la transition a procédé, le 5 décembre 2011, à la nomination par décret des 189 membres du Conseil Supérieur de la Transition ainsi que des 417 membres du Congrès de la Transition. En cette période de transition, elles ne peuvent pas censurer le gouvernement par un retrait de confiance et, en contrepartie, ne sont pas susceptibles d‟acte de dissolution de la part de l‟Exécutif. Les députés de transition peuvent ainsi se prévaloir de la «garantie constitutionnelle». En revanche, ils ne bénéficient pas de l‟immunité parlementaire. La mise en place du Parlement

173 Il est à relever, que l’échéancier du cadre n’a pas été respecté dans la mise en œuvre de la FdR - 102 - de la Transition a permis de conforter le caractère inclusif et consensuel de l‟exercice du pouvoir politique dans cette période de transition.

III-1-2- Le cadre juridique de l’élection Le cadre juridique régissant l‟élection du premier Président et les premières élections législatives de la Quatrième République, propose une base adéquate pour l‟organisation obligations et engagements régionaux et internationaux auxquels Madagascar a adhéré174. A cet effet, l‟insertion des dispositions de la FdR175 dans l‟ordonnancement juridique interne s‟est avérée indispensable, pour instaurer les institutions et organes de la Transition inclusive et consensuelle. Grâce à la Loi n°2011-014 du 28 décembre 2011, le Code électoral176 a pu être révisé. Cela a également permis la mise en place d'un nouvel organe de gestion électorale177 (CENI-T) et de la Cour Electorale Spéciale178 (CES), chargée d‟accompagner le processus et responsable de la gestion du contentieux et de la proclamation des résultats définitifs. Néanmoins, des dispositions, qui par ailleurs présentent parfois des contradictions, ont un caractère transitoire et tomberont en désuétude à l‟issue de la transition, avec le retour à l‟ordre constitutionnel. Si le cadre en vigueur régissant la tenue des élections constitue une base légale adéquate et globalement conforme aux normes permettant la tenue d‟élections compétitives, libres et crédibles, les modifications apportées par le Décret n°2013-593 du 6 août 2013 ont dérogé au respect du principe de neutralité de la part des autorités politiques de la Transition en période électorale. En revanche, l‟accès du citoyen et des acteurs politiques aux lois, décrets et arrêtés relatifs aux élections n‟est pas garanti. « La difficulté d‟accéder au Journal Officiel en période électorale a affecté l‟Etat de droit et n‟a pas permis de garantir de façon absolue le principe de

174 Pacte international aux droits civils et politiques de 1966 ; Convention internationale sur l’élimination de toutes formes de discrimination raciale en 1969 ; Convention internationale sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes en 1979 ; Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et son protocole sur les droits des femmes en 1981 ; Déclaration de Bamako, de l’Organisation Internationale de la Francophonie en 2000 ; Protocole genre et développement de la Communauté de développement de l’Afrique australe en 2007. 175 Loi n°2011 014 du 28 décembre 2011 portant insertion dans l’ordonnancement juridique interne de la Feuille de Route signée par les acteurs politiques malgaches le 16 septembre 2011. 176 Loi n°2012 005 du 22 mars 2012 portant Code électoral. 177 Loi n°2012 004 du 1er février 2012 fixant l’organisation, le fonctionnement et les attributions d’une structure nationale Commission Electorale Nationale Indépendante pour la Transition. 178 Loi n° 2012 014 du 1er février 2012 portant création de la Cour Electorale Spéciale. - 103 - sécurité juridique, conformément auquel la loi doit être connue, visible et prévisible pour tous les citoyens »179.

III-1-3- Le cadre juridique régissant les partis politiques La Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011 relative aux partis politiques, adoptée au titre des mesures de la transition inclusive180, s‟est donnée pour objectif d‟encadrer la création et l‟organisation des partis et des organisations politiques. Cette Loi a mis un certain nombre de conditions à la création et à l‟organisation des formations politiques, afin de réduire le nombre des partis et d‟organiser une « professionnalisation de la vie politique ». La contrepartie des obligations pesant sur les partis politiques consiste en une subvention de l‟Etat octroyée à trois conditions liées à la participation, aux résultats aux élections, et aux contributions aux activités de l‟éducation citoyenne. Cette contrepartie demeure néanmoins non applicable car des modalités et conditions requises pour en bénéficier restent ni spécifiées, ni définies dans les textes. Quant au concept d‟opposition, il est reconnu par la Loi n°2011-013 du 9 septembre 2011 portant statut de l‟opposition et des partis d‟opposition. Aux termes de ces dispositions, le chef de l‟opposition bénéficie, de droit, d‟un poste de Vice-président de l‟Assemblée Nationale. Ce droit, reconnu à l‟opposition politique, était déjà annoncé dans la Constitution de 2010. L‟absence de réglementation, dans le Code électoral, en matière de financement des campagnes électorales, ainsi que les dispositions de la loi organique relative à l‟élection du premier président de la Quatrième République, entretiennent l‟inégalité entre les acteurs de la compétition électorale, au détriment des petits candidats, formations politiques et courants d‟opinion minoritaires. La Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011, relative aux partis politiques dans ses articles 33 à 38, prévoit que les partis financent leurs activités à partir de leurs ressources propres ou externes181, exige la transparence dans la gestion de ces ressources, à travers une comptabilité

179 Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives »Madagascar 2013. 180 Cette Loi a repris l’essentiel de la Loi précédente n°2009-002 du 15 janvier 2009 sur les partis; qui a été adopté pour réguler l’inflation des acteurs du champ partisan dû aux conséquences de l’Ordonnance n°90-001 du 9 mars 1990 portant régime général des partis ou organisation politiques. 181 Le service de renseignements financiers Malagasy (SAMIFIN), créé par le Décret n°2007-510 du 4 juin 2007, est une entité indépendante qui reçoit et traite les Déclarations d’Opérations Suspectes (DOC). Il révèle que seuls 4 des 33 partis politiques, ou associations, engagés dans l’élection présidentielle au premier tour sont en règle avec l’article 37, alinéa 1er de La Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011. Il s’agit respectivement des partis - 104 - simplifiée, et la présentation d‟un rapport annuel faisant l‟objet d‟un contrôle par le biais d‟une juridiction financière. Cette loi s‟illustre par l‟absence d‟identification de la juridiction compétente et de sanction en cas de violation de ses dispositions. Par contre, la loi susmentionnée et son décret d‟application182 n‟évoquent ni l‟exigence de traçabilité des recettes et dépenses engagées pour la promotion d‟un candidat, ou de son programme politique en vue de son élection, ni le plafonnement des dépenses électorales comptabilisées dans un compte de campagne déclaré. L‟inégalité de moyens et de chances des candidats aux élections présidentielles et législatives est flagrante étant donné que la durée de la période de campagne électorale est relativement courte183 par rapport à l‟immensité des circonscriptions électorales au niveau régionale et nationale184. L‟absence de dispositif juridique et réglementaire sur le financement et le plafonnement des dépenses de campagne, a engendré une disproportion des moyens mis à disposition des candidats, et a entretenu l‟inégalité des chances entre les acteurs de la compétition électorale. L‟impossibilité d‟établir une traçabilité de la provenance des fonds destinés aux activités électorales est un élément affaiblissant la transparence nécessaire à la crédibilité de l‟élection.

III-1-4- Le cadre juridique régissant les médias La liberté d‟expression et de la presse sont garanties par des obligations internationales et des engagements non contraignants ratifiés par Madagascar, ainsi que par la Constitution issue du référendum de novembre 2010, qui y consacre ses articles 10 et 11. Le cadre juridique régissant les médias malgaches185 date du début des années quatre-vingt- dix. L‟ordonnance de 1992 a permis la libéralisation du secteur audiovisuel. Le projet de loi

et associations suivants (selon leurs numéros sur le bulletin unique): AME « 1 », MTS « 5 », le Parti Vert « 16 » et ENINA « 22 ». 182 Décret n°2013- 057 du 29 janvier 2013, fixant les conditions d’application de certaines dispositions de la Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011, relative aux partis politiques. 183 L’article 41 du CE prévoit un délai de 30 jours de campagne pour le premier tour l’élection du président de la République ; et l’article 47 de la Loi n°2012-016 relatif aux premières élections législatives de la Quatrième République, prévoit 21 jours de campagne pour les deux scrutins jumelés. 184 La MOE UE a constaté que pendant les quatre semaines de campagne présidentielle du premier tour, une différence flagrante de moyens existait entre les 33 candidats. Huit seulement ont couvert l’ensemble du territoire, en utilisant avions, hélicoptères, véhicules et médias. Cette mobilisation est d’une grande envergure pour les candidats suivant (par ordre d’importance des matériels déployés): Hery Rajaonarimampianina, Hajo Andrianainarivelo, Robinson Jean Louis, Edgard Razafindravahy. Et d’une envergure importante pour : Camille Vital, Pierrot Rajaonarivelo, Roland Ratsiraka, Sahara Georget. Pour le second tour, le soutien affiché du Président de la Transition et du parti MAPAR au candidat Hery Rajaonarimampianina, dans neuf districts chefs- lieux de régions, a engendré une disparité manifeste de moyens et d’atouts entre les deux candidats au second tour. 185 Les deux textes de loi de référence sont la Loi n°90-031, du 21 décembre 1990, et l’Ordonnance sur la Communication. - 105 - pour un nouveau code de la communication n‟ a jamais été soumis au vote de l‟Assemblée Nationale durant la Transition. L‟organe de régulation des services et licences audiovisuelles est représenté par l‟Office Malgache d‟Etudes et de Régulation des Télécommunications (OMERT). Les licences sont attribuées par le Ministre de la communication après avis de l‟OMERT. Depuis la crise de 2009, aucune licence n‟a été octroyée. L‟organe de coordination et contrôle des activités des médias audiovisuels est la Commission Spéciale à la Communication Audiovisuelle (CSCA)186. Cette dernière manque cependant d‟indépendance, car sous le contrôle du Ministre de la communication, qui en est le Président. Le comportement des médias durant la période électorale est régi par les dispositions du Code électoral, et des lois relatives à l‟élection du premier Président et des premières électives de la Quatrième République. L‟article 48 du CE exige une couverture équitable des candidats et partis politiques par les médias audiovisuels publics. Le même article délègue à la CENI-T la répartition et la programmation du temps d‟antenne, ainsi que la supervision de ladite réglementation. A ce titre, la CENI-T a élaboré une réglementation pour l‟accès aux médias publics pendant les campagnes électorales du premier et second tour de l‟élection présidentielle, ainsi que pour celle des élections législatives.

III-1-5- Le cadre juridique régissant la campagne électorale et les activités y afférentes Le cadre juridique pour les élections prévoit la réglementation, l‟organisation et la régulation des espaces prévus pour l‟affichage électoral187. Il incombe à la CENI-T et ses démembrements, avec le concours des collectivités locales décentralisées, la tâche de mettre à la disposition des candidats des emplacements spéciaux pour l‟apposition des affiches électorales. Ces emplacements doivent notamment obéir aux exigences de proximité avec les électeurs. Le CE précise que d‟autres modalités d‟affichage peuvent être définies par voie réglementaire188.

Audiovisuelle n°92-039, du 14 septembre 1992. 186Au début de la campagne électorale pour le scrutin du 25 octobre le Ministre de la communication annoncé le lancement d’un monitoring des médias par la Commission Spéciale à la Communication Audiovisuelle. Cependant au cours de la période électorale la CSCA n’a communiqué aucun rapport de ses activités. 187 L’article 39 du Code Electoral évoque la réglementation de l’affichage, et les articles 50-51 et 53 détaillent la durée et le mode d’organisation et de mise en œuvre du droit d’affichage reconnu à tout candidat en période de campagne électorale. 188 En outre, l’article 15 du Décret n°2013-154 du 12 mars 2013, fixant les conditions d’application des dispositions de la Loi Organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l’élection du premier président de la Quatrième République, précise que la mise à disposition des espaces pour l’affichage se fait à titre gratuit, et - 106 -

La CENI-T, dans sa Lettre d‟instruction n°2640/13/CENI-T envoyée à tous ses démembrements, le 28 novembre 2013, et portant sur la gestion de la campagne électorale pour les scrutins présidentiels et législatifs du 20 décembre 2013, a réitéré les dispositions susmentionnées en donnant la possibilité aux candidats d‟apposer leurs affiches sur d‟autres espaces, en dehors des interdictions prévues par la loi et sous réserve d‟autorisation émanant des propriétaires de ces lieux privés. Il a été noté que : (i) les lieux interdits pour l‟apposition d‟affiches électorales sont énumérés par la législation et les autorités électorales ont un rôle de régulation et de sanctions en cas de violation des textes réglementaires ; (ii) la législation interdit l‟utilisation de panneaux publicitaires fixes (à vocation commerciale) pour des fins électorales ; (iii) la note officielle, portant forme d‟instruction de la CENI-T, confirme la possibilité pour les candidats, sous certaines conditions, d‟apposer des affiches sur des espaces privés mais non publics ; (iv) le cadre légal garantit un minimum d‟égalité de traitement et de visibilité aux candidats, par la confection d‟un panneau d‟affichage avec une superficie égale pour tous. Néanmoins, l‟interdiction limitative prévue par les textes permet le recours à des moyens privés, privilégiant les candidats disposant de plus de moyens. Le cadre légal est assez flexible en matière d‟affichage, tout en le règlementant afin d‟éviter les amalgames avec les événements publiques, culturelles ou commerciales. Néanmoins, il a été observé, dans la totalité des régions, que les affichages étaient largement non conformes à la réglementation en vigueur. S‟agissant du principe de neutralité en période électorale, L‟article 15 de la FdR exige le respect du principe de neutralité de la part des autorités politiques de la Transition en période électorale. Cette neutralité est confirmée et consolidée par une norme juridiquement supérieure, avec une portée normative d‟interdiction, à travers l‟article 45 du Code électoral189(CE). Or, le Décret n°2013-270 adopté le 16 avril 2013, qui fixe les conditions d'application de certaines dispositions de la loi sus- citée, spécifie le contraire190, autorisant les autorités politiques non candidates à assister aux manifestations de campagne. Il maintient néanmoins que ces derniers sont d’une dimension égale à 1,20m x 1,20m par candidat. Pour plus de détails sur les lieux d’affichage interdits cf. articles 18 et 20 du même Décret. 189 L’article 45 de la Loi Organique n°2012-005 du 22 mars 2012 interdit : « à tout fonctionnaire non candidat, autorité civile ou militaire, autorité politique ou religieuse de faire une propagande en vue de voter pour une option, un candidat ou une liste de candidats, sous peine de sanctions pénales et disciplinaires». 190 Article 2 : « les ministres, chefs ou membres de partis ou organisations politiques, à l'exclusion des chefs d'Institution, ont le droit d’assister aux manifestations de campagnes électorale à condition de s'abstenir de prendre la parole durant ou de faire des déclarations d'opinion sur les candidatures en concurrence sous quelques formes qu'elles soient ». - 107 - cette interdiction pour les chefs d‟institutions, qu‟il définit en son article 11, et qu‟il nomme dans son annexe (citée à l‟article 12). De plus, le Décret n°2013-593 du 6 août 2013 renforce encore la contradiction191, en supprimant l‟interdiction exceptionnelle faite aux chefs d‟institutions, et en autorisant l‟utilisation des photos des autorités politiques et des effigies (alinéas 1er et 2 de l‟article 2 nouveau). Ces modifications apportées par le dernier décret, à dix semaines du scrutin du 25 octobre 2013, ont annihilé la conformité partielle préservée par le Décret n°2013-270 du 16 avril 2013 vis à vis de l‟article 45 du CE. Cette dernière révision a, d‟une part, vidé l‟article 45 du CE de sa substance en matière d‟interdiction faite aux autorités politiques et aux chefs d‟institution de la transition de prendre part à la campagne électorale, et, d‟autre part, neutralisé définitivement l‟article 15 de la FdR. Certes, dans sa forme, en termes de hiérarchie des normes, l‟article 15 est inférieur à la loi organique portant Code électoral mais, dans le fond, il s‟agit d‟un engagement international de toutes les autorités et institutions de la transition Malgache, pris lors du sommet de la SADC à Sandton, et réitéré à Luanda les 17 et 18 août 2011. Cette suprématie est confirmée par la Constitution de la Quatrième République du 11 décembre 2010192 et a fait l'objet d'un contentieux durant le cycle électoral de 2013193. Les deux décrets cités ci-dessus ne respectent pas l‟esprit de la Loi, cette dernière prohibant l‟utilisation des biens publics par des personnes détentrices de puissance publique en faveur de quelques candidats. Or l‟objectif des dispositions légales existantes est notamment d‟éviter toute interférence des autorités publiques dans le domaine politique. Ces incohérences entre la loi et les décrets susmentionnés ont pour conséquence de fragiliser le principe de sécurité juridique, pourtant indispensable pour protéger les citoyens et les candidats de changements trop fréquents de la loi en période de précampagne, conformément aux normes et obligations internationales, qui exigent que la loi ne soit pas modifiée dans les six mois précédant le scrutin. Concernant les infractions électorales, L‟article 162 du CE, portant sur les infractions constitutives d‟entrave à la liberté et à la sincérité du scrutin et du vote, prévoit que tout vendeur et tout acheteur de suffrage sont condamnés à une amende égale au double de la

191 Article 2 (nouveau) alinéa 1er: « les autorités politiques non candidates, citées en annexe du présent décret, les ministres, chefs ou membres de partis ou organisations politiques, peuvent assister aux manifestations de campagnes électorales pendant la campagne à condition de s’abstenir de prendre la parole durant lesdites manifestations ou de faire des déclarations d’opinions sur les candidatures en concurrence sous quelques formes qu’elles soient. » 192 L’article 137, alinéa 4 stipule que « les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont dès leur publication une autorité supérieure à celle des lois sous réserve pour chaque accord ou traité de son application par l’autre partie». 193 Relève de la compétence de la CES. - 108 - valeur des choses reçues ou promises. En outre, toute personne qui, à l‟occasion d‟une élection ou d‟une consultation référendaire, a acheté ou vendu un suffrage à un prix quelconque, est privée de ses droits civiques et déclarée incapable d‟exercer toute fonction publique ou interdite de mandat public électif pendant cinq à dix ans. En revanche, le code électoral souffre d‟imprécisions et de lacunes substantielles, portant sur les infractions constitutives d‟entrave à la liberté et à la sincérité du scrutin et vote. Si le CE prévoit des sanctions contre l‟achat éventuel de suffrage à l‟occasion d‟une élection ou d‟une consultation référendaire, il a été constaté néanmoins qu‟aucune disposition légale ou réglementaire du CE, ni aucune des lois organiques relatives à l‟élection du président et des députés, ni aucun décret d‟application de ces dernières, ne précisent ni n‟encadrent les infractions à la sincérité du scrutin en période de campagne électorale.

III-2- L’organisation électorale Il s‟agira ici de brosser les différentes facettes de l‟organisation électorale tant dans les institutions chargées de sa bonne marche que de son contentieux, en passant par opérations relatives au scrutin lui-même.

III-2-1- L’administration électorale

III-2-1-1- La Commission Electorale Nationale Indépendante pour la Transition (CENI_T) La CENI-T est une structure spécifiquement établie pour les élections de sortie de crise à Madagascar. Elle a été créée en février 2012194 et inclut, outre l‟administration de l‟Etat et la société civile, les dix partis politiques signataires de la Feuille de Route195. Son rôle est d‟organiser et superviser les opérations électorales, de traiter et publier les résultats provisoires, de faire respecter la législation électorale, de coordonner l‟éducation électorale et de contribuer à l‟élaboration du cadre juridique des élections. La CENI-T compte 22 conseillers regroupés au sein de six directions196, chacun étant également responsable d‟une des 22 régions du pays. La composition des démembrements de la CENI-T (Commission Electorale Régionale - CER,

194 La Loi n°2012-004 du 1er février 2012 fixe l’organisation, le fonctionnement et les attributions de la CENI-T. 195 Article 22 du CE. 196 Cabinet du Président, Secrétariat Exécutif, Opérations Electorales, Affaires Financières, Système Informatique, Sécurité. - 109 -

Commission Electorale de District - CED, Commission Electorale Communale - CEC) suit la même structure que celle de la CENI-T, intégrant des représentants de l‟Etat, de la société civile et des partis signataires de la FdR. Son mode de travail basé sur le consensus s‟est avéré un facteur clef pour la tenue des élections, après plus de quatre ans de transition, même si cela a parfois conduit à limiter la transparence du processus. Au cours du processus électoral de 2013, la CENI-T, dans sa pluralité, a joui d‟une plus grande confiance des acteurs politiques que le Ministère de l‟Intérieur auquel revenait la tâche d‟organiser les élections avant 2010. Sa présidente, Béatrice Atallah197, est un magistrat issu de l‟administration. Par ailleurs, concernant la communication interne de la CENI-T, le rapport de la MOE UE a relevé les points suivants : - elle n‟a pas toujours fonctionné de façon cohérente. Il a été constaté que des informations importantes198 étaient transmises par voie orale seulement, laissant ainsi un espace trop large à diverses interprétations ou encore que le suivi des instructions, même quand elles sont données par écrit, est variable, donnant lieu à des modalités de vote différentes dans le pays199. - la CENI-T n‟a pas toujours su communiquer aux citoyens des informations électorales importantes de façon cohérente.200 Toutefois, une amélioration est survenue entre les deux tours grâce à l‟utilisation accrue des radios locales. Le cadre juridique201 et les termes de référence202 des démembrements de la CENI-T attribuent un rôle primordial aux CED quant à la mise en œuvre des différentes étapes le du processus électoral. La MOE UE soulève cependant que les CEC n‟ont été mobilisées que partiellement pour le premier tour de l‟élection présidentielle et que 28% des CER sont restées peu actives durant tout le processus.

197 Avant d’être plus tard nommé Ministre(le 25 janvier 2014) 198 Par exemple, l’introduction de lignes supplémentaires dans les PV pour le second tour, devant permettre d’identifier la situation des bulletins uniques restants. 199 A titre d’exemple, aucun état des lieux des bulletins uniques restant du premier tour n’a pu être établi ; la compilation de la liste additive par les CID a été tardive ou ignorée (un district de la région Diana) ; aucun contrôle de quantité du matériel reçu n’a été observé au niveau des CEC lors du déploiement. 200 Par exemple, les conditions et démarches précises à entreprendre pour être inscrit dans la liste additive n’ont pas été diffusées. De même, une fois établie, il manquait une disposition pour rendre la liste additive disponible aux électeurs de façon systématique. Ou encore, la nécessité d’émarger sur deux listes électorales pour les deux scrutins n’avait pas été comprise dans 2% des BV. 201 Articles 55-71 du CE. 202 Cf. règlement interne de la CENI-T. - 110 -

III-2-1-2- La Cour Electorale Spéciale (CES) La Cour Electorale Spéciale (CES) est une juridiction électorale exceptionnelle et provisoire, qui a été créée au sein de la Haute Cour Constitutionnelle (HCC), conformément aux dispositions de la FdR (article 11) et à la suite d‟un réajustement de l‟encadrement juridictionnel du processus électoral de sortie de crise. Par conséquent, la HCC ne saurait s‟ériger en juridiction de second degré par rapport à la CES203. La crise politique et l‟impasse juridique, provoquées par l‟acceptation des 44 candidatures pour l‟élection présidentielle204 prévue initialement le 24 juillet 2013, a conduit à modifier la composition de la CES205. La réforme institutionnelle et consensuelle de la CES a permis aux acteurs nationaux et internationaux impliqués dans le processus électoral de contourner le principe d‟irrévocabilité des décisions de justice en matière électorale, explicitement inscrit dans la Constitution (article 120)206.

III-2-2- les opérations électorales

III-2-2-1-Les préparatifs pré-électoraux et la sécurisation du processus électoral Pour les deux tours des élections, la CENI-T a bénéficié du soutien du programme PACEM207, géré par le PNUD. Ce programme met à disposition le matériel électoral et la logistique électorale, le paiement des membres de bureau de vote (MBV) dépendant de l‟Etat appuyé éventuellement par des financements étrangers.208

203 Dans sa Décision n°11-HCC/D3 du 28 août 2013 concernant une demande du requérant Franklin James Rakotomahanina, « pour annulation et sursis à exécution de la décision inconstitutionnelle de la CES », la HCC a jugé la requête irrecevable. 204 Lors de la première décision de la CES, en date du 3 mai 2013, portant validation des 44 candidats à l’élection présidentielle, onze candidatures sont déposées avec des vices de formes. 205 La Loi n°2013-008 du 1er août 2013, modifiant la Loi n°2012-014 du 26 juillet 2012, a permis le remplacement et l’augmentation du nombre des juges de la CES. Suite au Décret n°606 du 9 août 2013, les 18 nouveaux magistrats ont remplacé les neuf anciens juges. Ils sont issus des milieux professionnels et politiques suivants: six magistrats élus par leurs pairs, un administrateur civil, un professeur de la faculté de Droit, et dix magistrats désignés, représentants les partis politiques signataires de la FdR. 206 La Loi n°2012-014 portant création d’une Chambre spéciale dénommée « Cour Electorale Spéciale » (CES) au sein de la Haute Cour Constitutionnelle, accorde à la CES la substitution du HCC en matière électorale (article premier). Et l’article 120 de la Constitution de la Quatrième République, stipule que : « les arrêts et décisions de la HCC sont motivés ; ils ne sont susceptibles d’aucun recours (…) ils s’imposent à tous les pouvoirs publics ainsi qu’aux autorités administratives et juridictionnelles ». 207 Le Projet d’Appui au Cycle Electoral à Madagascar a été signé le 24 octobre 2012. Son financement provient essentiellement de l’Union Européenne, mais aussi de la Norvège de la Suisse. 208 Une partie de ce paiement provenait du soutien supplémentaire de la SADC qui a permis d’augmenter l’indemnité de 6000 à 15 000 Ariary pour le deuxième tour. - 111 -

Les faiblesses organisationnelles du PACEM et son déficit de coordination avec la CENI-T pour l‟élaboration et la mise en œuvre d‟un plan unique de déploiement et de ramassage, n‟ont pas empêché la distribution du matériel aux 20 001 BV, à l‟exception de soixante pour le premier tour et seize pour le second de l‟élection présidentielle et treize pour les législatives. Etant donné l‟état des routes et l‟insécurité de certaines zones, cette entreprise a été un succès. Souvent, un retard dans le déploiement pesait sur la distribution précise du matériel électoral et sur la tenue de la formation des MBV, organisée en fonction de l‟arrivée du matériel. L‟effectif et le schéma de formation des MBV ont été renforcés pour les scrutins du 20 décembre; les membres suppléants ont été également mobilisés afin de faciliter le processus. La qualité de la formation a été évaluée plus positivement. La CENI-T a suivi les recommandations du premier tour formulées par certaines missions d‟observation électorale. Les mesures correctives ont notamment visé : le remplacement des membres des bureaux de vote (MBV) manquants ou n‟ayant pas accompli leur mission ; le renforcement des formations des membres de BV ; la mobilisation des deux suppléants pour le scrutin jumelé, portant le total des équipes de BV à sept ; l‟augmentation des allocations des membres des BV ; l‟obligation pour les BV d'indiquer dans leurs PV le nombre de bulletins utilisés et non utilisés, dans le but de renforcer la transparence ; une meilleure coordination du ramassage des plis électoraux ; le renfort du matériel dans les BV ; et, la définition des taches des SRMV selon l‟élection visée209. Concernant la sécurisation du processus électoral, Le Code électoral stipule que des représentants des forces de l‟ordre doivent toujours accompagner le matériel électoral, lors de son déploiement et de son rapatriement. Cependant, les forces de l‟ordre210 ne comptent que 22 000 éléments pour 20 001 BV à sécuriser. Les effectifs de sécurité ont été davantage mobilisés dans les zones présentant des risques sécuritaires. Selon la CENI-T, la sécurisation a pu être assurée à 100% jusqu‟aux districts. Au niveau des CED, le matériel électoral était stocké dans des bâtiments administratifs ou dans les localités de la CED. Dans d‟autres cas, il se trouvait dans un bâtiment de la gendarmerie. Des éléments de sécurité de fokontany, les « quartiers mobiles », ont été mobilisés de façon non systématique pour contribuer à la sécurisation au niveau local. Ces derniers étant choisis par le chef de fokontany, la question de leur indépendance se pose en

209 Cf. Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives »Madagascar 2013. 210 Police, gendarmerie et armée. - 112 - cas de volonté de manipulation par leur supérieur, seul responsable pour la sécurisation du matériel de vote au niveau des BV avant le scrutin.

III-2-2-2-Enregistrement des candidatures et listes des candidats La révision constitutionnelle de 2010 a abaissé l‟âge requis pour la candidature à l‟élection présidentielle de 40 à 35 ans (Article 46 CE). Les conditions d‟éligibilité et de dépôt des candidatures font l‟objet de dispositions en matière de cautionnement (exigence d‟une caution de 54 millions d‟Ariary), d‟inscription sur les listes électorales, de quitus fiscal, et de résidence depuis au moins six mois sur le territoire national. La candidature est réservée aux citoyens malgaches de naissance. Les dossiers doivent être transmis pour enregistrement au greffe de la CES, lequel délivre le récépissé définitif au plus tard cinq jours après la date limite pour l‟enregistrement des candidatures. Le rejet d‟une candidature doit être motivé. Les candidats à la présidentielle devaient déposer leurs candidatures auprès de la CES entre le 8 et le 28 avril 2013 pour l‟élection présidentielle prévue initialement le 24 juillet 2013 (Décret n°2013-0154 du 12 mars 2013). La publication des 41 candidatures validées par la CES première version dans sa décision n°01-CES/ D du 3 mai 2013 a conduit au blocage du processus électoral de sortie de crise. Ce n‟est qu‟avec la nouvelle CES qui a pris la décision d‟éliminer toutes les candidatures présentant des vices de forme et de fond, réduisant ainsi le nombre de candidatures validées à 33211 que le processus électoral a repris son cours. Ce changement du nombre de candidats n‟a pas eu d‟impact négatif sur les préparatifs des candidats qui ont été, à la suite de leur demande, autorisés à garder leur numéro respectif attribué lors du tirage au sort organisé par la CENI-T avec les 41 candidats.

III-2-3- L’observation électorale par la société civile S‟agissant des observateurs nationaux, 10 154 ont été déployés lors de l‟élection en octobre, représentant 35 Organisations de la Société Civile (OSC) nationales accréditées et 10 183 observateurs nationaux pour le scrutin jumelé. Les OSC les plus visibles en régions, avant les deux journées électorales, étaient Justice et Paix, avec 4403 observateurs, et celles regroupées dans les plateformes Mahitsy Fijery, avec 1538 observateurs, et SOCLE, avec 2499. Le jour des élections, la MOE UE a observé la présence des observateurs de Mahitsy Fijery dans 29% des BV au premier tour et dans 26% d‟entre eux au second et celle des observateurs de SOCLE dans 29% des BV au premier tour et dans 15% d‟entre eux au second. Ces

211 Cf. Décision n°11- CES/ D du 21 août 2013. - 113 - plateformes, formées et encadrées par le projet PACTE212, sont les seules à avoir présenté, à l‟occasion des deux scrutins, des déclarations préliminaires et des recommandations pour le processus en cours. Il faut rappeller leur rôle de garant de la crédibilité et de la sincérité des scrutins. S‟agissant des observateurs internationaux, au second tour, la CENI-T a accrédité 1163 observateurs de 36 organisations d‟observation internationale, dont des observateurs diplomatiques, contre 884 observateurs de 33 organisations pour le premier tour.213

III-2-4- Le contentieux électoral La Cour électorale spéciale (CES) est chargée du contentieux électoral et de la proclamation des résultats définitifs des présidentielles et des législatives. Elle statue sur la régularité des opérations électorales et peut procéder à l‟annulation ou à la rectification des résultats provisoires proclamés par la CENI-T, dans un délai de quinze jours pour les présidentielles.214. Le droit de recours est accordé aux électeurs, candidats, délégués de candidat et observateurs nationaux présents dans le BV. Dans un délai de dix jours francs après le scrutin, la requête peut être déposée directement au greffe de la CES ou indirectement au Tribunal de Première Instance (TPI) ou au Chef d‟arrondissement administratif. La décision de la CES n‟est susceptible d‟aucun recours. A la date du 4 novembre, date butoir fixée pour le dépôt des recours215 relatifs aux opérations préélectorales et électorales, la CES avait reçu 101 requêtes. Treize requêtes supplémentaires, dont elle s‟est autosaisie conformément à la législation électorale, sont toutefois arrivées hors délai, portant le nombre total des saisines avant la proclamation des résultats définitifs, le 22 novembre, à 114 requêtes216. La plupart des recours déposés par les requérants éligibles aux contentieux ne contiennent pas assez de preuves et de moyens conformes aux exigences des dispositions217 légales et réglementaires en vigueur. Parfois, certaines requêtes sont même fournies sans preuves

212 PACTE : Projet d’Appui à la Crédibilité et à la Transparence des Elections à Madagascar. Ce projet, financé par l’UE, a contribué à la formation et au déploiement des deux plateformes avec 400 000 €. 213 Soit une augmentation d’effectifs de plus de 30%. 214 Trente jours pour les législatives 215 Article 132 de la Loi n°2012-005 portant Code électoral. 216 Parmi les saisines reçues, neuf recours émanent de huit candidats, dont un collectif au nom de quatre candidats et huit autres candidats individuels. Les autres requêtes émanent de leurs délégués, du personnel de campagne électoral et de simples citoyens. 217 Article 136 alinéas 3 et 4 du CE : « Toutes les pièces produites au soutien des moyens doivent être annexées à la requête. Celles-ci peuvent être soit des documents authentiques ou officiels, soit des témoignages sous forme de déclaration écrite et collective dûment signée par les trois témoins présents au moins avec leur nom». - 114 - matérielles tangibles. Enfin, dans la majorité des cas, les moyens évoqués ne correspondent pas à l‟objet de la requête; à la qualité du requérant ou au domaine de compétence de la juridiction218. Lors du traitement des requêtes, et afin de pouvoir vider le contentieux dans le délai légal avant la proclamation des résultats définitifs219, la CES a procédé à une jonction des objets des 114 recours en quatre types de griefs. Elle s‟est parfois autosaisie du fond des réclamations présentant des vices de formes. Dans son arrêt n°01-CES/AR du 22 novembre 2013 portant proclamation des résultats définitifs du premier tour de l‟élection présidentielle du 25 octobre 2013, la Cour : -s‟est déclarée incompétente des réclamations relatives aux anomalies de l‟inscription sur la liste électorale, à l‟annulation des actes administratifs et à l‟application des dispositions pénales réprimant les infractions prévues par le code électoral ; -a déclaré irrecevables les trois groupes de requêtes à cause du non-respect des formes requises ou du défaut de moyen et argument qui conditionnent la recevabilité220 ; -a rejeté la demande d‟annulation du scrutin du premier tour jugée non fondée, faute de preuve suffisante ayant un impact sur le plan national221 ; -a rejeté la demande de disqualification au motif que le candidat incriminé en la personne de Hery Rajaonarimampianina, démissionnaire de sa fonction de ministre, ne peut plus être tenu responsable des faits reprochés222 . La CES a décidé dans son arrêt n°01-CES /AR, du 22 novembre 2013, d‟annuler les résultats des 111 BV totalisant 21 474 voix au titre du contrôle de légalité, et d‟amputer les 5 774 voix obtenues par le candidat Hery Rajaonarimampianina dans cinq communes, au motif de l‟usage justifié de biens publics à des fins de propagande électorale. Cette décision constitue une jurisprudence, malgré son impact limité sur le résultat du scrutin. En effet, la saisine, en sa forme, faite par un simple citoyen votant dans une circonscription autre que celle où se sont déroulés les faits caractérisant l‟infraction, a été jugée recevable par la CES, et sur le fond, les arguments caractérisant la demande de disqualification pour usage de prérogatives de

218 Les dispositions de l’alinéa 4 de l’article 35 de l’Ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 relatives à la HCC : «la Haute Cour est habilitée à procéder à l’annulation des opérations électorales dans les cas suivants : altération de la sincérité du scrutin, modification du sens du vote émis par les électeurs, violation flagrante des dispositions légales ou réglementaires ou de prescriptions d’ordre public. » 219Article 27 de la Loi organique n°2012-015 relative à l’élection du premier Président de la Quatrième République. 220 Article 132 et 136 du CE. 221 Décision de la CES n°22-CES/D en date du 15 novembre 2013. 222 La CES a évoqué la lettre n°161-13/MFB/Mi du 23 août 2013, notifiant sa démission de ses fonctions par le candidat Hery Rajaonarimampianina. - 115 - puissance publique ont été retenus partiellement et limité territorialement en terme d‟infractions, même si la requête de base a été rejetée. Pendant la période de campagne des élections jumelées, le Décret n° 2013-593 du 6 août 2013, ayant permis aux chefs d‟institution d‟assister aux manifestations de campagne électorale, a fait l‟objet de trois types de requêtes déposées auprès du Conseil d‟Etat. Deux pour un sursis d‟exécution et une pour annulation. Lors des audiences des 4 et 6 décembre 2013, le Conseil d‟Etat a rejeté les requêtes portant sur un sursis d‟exécution du Décret pour forclusion, étant donné que l‟objet incriminé avait été inséré et publié dans le Journal Officiel de la République n°3505 du 15 août 2013. En revanche, le recours pour annulation du Décret, déposé le 14 novembre 2013, par la Mouvance Ravalomanana répondait au délai de trois mois exigé par la Loi à compter de sa publication au JO. La MOE UE, dans son rapport,« regrette que le Conseil d‟Etat n‟ait pas traité cette requête en annulation dans un délai raisonnable et à un moment opportun ».223 La Mouvance Ravalomanana a opté également pour une autre voie, en déposant un recours, le 4 décembre 2013, auprès de la CENI-T224. Le 5 décembre 2013, la CENI-T a transmis à la CES l‟objet de la requête, sans se substituer au requérant, pour une demande de contrôle de légalité. Le 18 décembre 2013, la CES s‟est déclarée compétente de pleine juridiction et a exercé un contrôle de validité et de régularité sur les actes administratifs non détachables à l‟élection. Elle a décidé l‟annulation du Décret n°2013- 593 du 6 août 2013 précité. Par cette décision, la CES a élargi sa compétence et s‟est octroyée un droit sur le contrôle de la légalité des opérations électorales, y compris pendant la phase d‟organisation de l‟élection, de façon à ce que les actes préparatoires ou périphériques de l‟élection fassent partie du champ de sa compétence. Ce jugement de la CES225 constitue une première, voire une jurisprudence, en matière de contentieux électoral malgache. Le 28 décembre 2013, la CES a rejeté la requête du candidat Robinson Jean Louis, datée du 23 décembre 2013, ordonnant la suspension de la publication des résultats partiels, la confrontation des PV, la vérification et le recomptage des bulletins de manière

223 Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives »Madagascar 2013. 224 La demande visait deux objets : le constat d’écart juridique entre les textes régissant la neutralité des autorités politiques pendant la campagne électorale, et le soutien officiel du Président de la Transition au candidat Hery Rajaonarimampianina. 225 Le contrôle de légalité des actes règlementaires et administratifs, relevant normalement de la compétence du juge administratif dans le cadre d’un contentieux pré-électoral (Conseil d’Etat). - 116 - contradictoire226. Ainsi, il découle de ce jugement, qu‟il est à charge du candidat de relever les irrégularités ou les violations de dispositions légales concernant les préparatifs et le déroulement du scrutin. La MOE UE, dans son rapport, comme au premier tour, n‟a observé aucune réclamation ou de plainte notifiée dans les procès- verbaux (PV) par les délégués ou observateurs présents dans les bureaux de vote (BV) le jour du scrutin. En outre, la MOE UE a relevé que les vacances judicaires pour les Tribunaux de Première Instance (TPI) coïncident avec le délai de recours de dix jours prévu dans le CE, qui est trop bref pour un scrutin jumelé. De facto, cela prive l‟accès aux juridictions de proximité pour les candidats aux législatives et a fortiori limite le droit de recours pour les petits candidats auprès de la CES. Au 31 décembre 2013, date butoir pour le délai légal de recours, la CES a enregistré une liste de 50 requêtes concernant l‟élection présidentielle du second tour227. Chacune des 119 circonscriptions électorales, réparties dans les 22 régions du pays, est concernée par au moins une plainte. La MOE UE a relevé dans son rapport que deux requêtes pour les présidentielles et onze requêtes pour les législatives ont été déposées de façon «prématurée », c‟est-à-dire avant l‟ouverture du délai de recours au lendemain du jour du scrutin. A partir du 4 janvier 2014, la CES a entamé le traitement du contentieux portant sur les élections présidentielles. Dix arrêts ont été rendus à l‟occasion de sept audiences tenues par la Cour228, permettant de vider l‟ensemble du contentieux et de se prononcer sur les 51 requêtes, avant la proclamation des résultats définitifs du 17 janvier 2014229.

226 La Cour a considéré que le recomptage des voix par BV au niveau national échappe à sa compétence, tout en reconnaissant son droit d’exercer, soit par saisine d’office, soit par requêtes introduites, un contrôle de légalité sur les PV des BV et des SRMV, et procéder au redressement, à la rectification ou à l’annulation partielle ou totale des résultats des opérations électorales. 227 Parmi les recours, 27 émanent d’électeurs et 21 des deux candidats, le reste des recours ayant été déposés au nom d’un délégué de candidat et au nom de la Primature. Concernant l’objet des requêtes, 40 sont relatives à l’annulation, 5 à la disqualification, 3 à la confrontation, 2 à la vérification et 5 autres pour diverses doléances. 228 Arrêt n°1-CES/AR du 4 janvier 2014, avant de dire droit. Arrêt n° 2-CES/D/AR.14 du 7 janvier 2014 relatif à une requête en disqualification. Arrêt n°3-CES/D/AR.14 du 7 janvier 2014 relatif à des requêtes en disqualification. Arrêt n°4-CES/AR.14 du 8 janvier 2014 relatif aux demandes d’annulation du scrutin du 20 décembre 2014. Arrêt n°5-CES/AR.14 du 8 janvier 2014 relatif à une demande d’annulation du scrutin du 20 décembre 2014. Arrêt n°6-CES/AR.14 du 10 janvier 2014 relatif aux demandes d’annulation des voix obtenues par un candidat à l’élection présidentielle du 20 décembre 2013 formulée par des électeurs. Arrêt n°7-CES/AR.14 du 13 janvier 2014 relatif à une demande d’authentification des bulletins uniques et de recomptage systématiques des voix obtenues par chaque candidat lors de l’élection présidentielle du 20 décembre 2014. Arrêt n°8-CES/AR.14 du 13 janvier 2014 relatif à une demande en rétractation. - 117 -

La Cour a inséré le contenu synthétisé de l‟ensemble des neuf décisions prononcées entre les 4 et 15 janvier, dans l‟arrêt final du 17 janvier 2014, portant proclamation des résultats définitifs du second tour de l‟élection présidentielle. Dans cet arrêt n°10-CES /AR du 17 janvier 2014, portant sur les résultats définitifs des présidentielles du 20 décembre 2014, la Cour : -a déclaré irrecevable les requêtes : en disqualification du candidat Robinson Jean Louis ; les demandes d‟annulation du scrutin ; les requêtes en annulation des voix obtenues par le candidat Hery Rajaonarimampianina et la demande d‟authentification des bulletins uniques et de recomptage systématique des voix. Les motifs de l‟irrecevabilité des requêtes sont dus soit à l‟absence de la qualité pour agir du requérant ou le dépôt hors délai de la saisine. Quant à l‟irrecevabilité tenant à l‟objet de la requête, la demande en rétractation de l‟arrêt n°3- CES/AR du 7 janvier 2014, du candidat Robinson Jean Louis s‟est heurtée au principe de l‟irrévocabilité de la décision de la CES. -s‟est penchée sur le bien– fondé des demandes introduites en son sein. A ce titre, les magistrats ont rejeté comme non fondée la demande d‟annulation du second tour introduite par le candidat Robinson Jean Louis, au motif que la liste électorale a été manipulée et modifiée dans neuf districts.230 Elle a également rejeté les recours mutuels des deux candidats, demandant l‟annulation réciproque des voix obtenues par chacun sur le plan national, ainsi que la disqualification des deux candidats. La CES a considéré que le moyen tiré de la participation des autorités publiques à la campagne électorale ne saurait prospérer et que le motif relatif aux manœuvres frauduleuses de l‟Administration évoqué n‟est pas fondé et qu‟enfin, le moyen tiré de l‟effet de l‟annulation d‟un acte administratif en l‟occurrence le décret n°2013-593 est inopérant. Quant à la demande de Robinson Jean Louis visant la confrontation, la vérification et le recomptage contradictoire des bulletins de vote utilisés, la Cour a rappelé que lors du contrôle effectué par elle, aucune anomalie n'a été relevée, rejetant ainsi les requêtes formulées par le requérant. -a décidé, dans le cadre du contrôle de légalité, d‟annuler les résultats des opérations électorales dans 27 bureaux de vote totalisant 8.601 voix pour violation de formalités

Arrêt n°9-CES/AR.14 du 15 janvier 2014 relatif aux demandes d’annulation des voix obtenues sur le plan national par les deux candidats à l’élection présidentielles du 20 décembre 2013. Arrêt n°10-CES/AR.14 du 17 janvier 2014 portant proclamation des résultats définitifs du second tour de l’élection présidentielle du 20 décembre 2013. 229 La CES a procédé, comme au premier tour, à une jonction des objets des 51 recours, en fonction des différents griefs invoquées et de la qualité des requérants. Cependant, contrairement au premier tour, la CES a rejeté ou déclaré irrecevable toutes les requêtes présentant des vices de forme. 230 Les neufs districts concernés par les requêtes sont les districts de Sonierana Ivongo, Ambanja, Ambovombe, Bekily, Tuléar II, Amboasary Sud, Betroka, Majunga I et Marovoay. - 118 - substantielles, d‟annuler les résultats des opérations électorales dans 3 bureaux de vote totalisant 1.154 voix pour rajout excessif d‟électeurs et d‟annuler les résultats des opérations électorales dans 13 bureaux de vote pour absence de documents électoraux. Enfin, la CES a pris a acte de la carence de résultats électoraux dans 22 bureaux de vote signalée au préalable de la déclaration des résultats provisoires par la CENI-T. La CES a proclamé Président de la République le candidat Hery Rajaonarimampianina, élu avec 2.060.124 voix, soit 53,49 % des suffrages contre Robinson Jean Louis qui obtient 1.791.336 voix soit 46,51% des suffrages.

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CONCLUSION GENERALE

Madagascar est une démocratie ruinée, divisée et appauvrie, prise dans un « cycle de crises, avec un temps de plus en plus court entre chaque crise ». La dernière s‟est montrée particulièrement intense, longue et néfaste sur le plan politique, diplomatique et économique.231

« En 2009, un directoire militaire a renversé le président Marc Ravalomanana et a confié le pouvoir à Andry Rajoelina, le maire d’Antananarivo. Ravalomanana a été contraint à l’exil et Rajoelina est devenu président de la Haute autorité de transition (HAT).232 En réponse, la communauté internationale, menée par l’Union africaine (UA) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), a adopté une attitude ferme : les gouvernements issus de coup d’Etat ne doivent être ni reconnus, ni soutenus financièrement. Madagascar est ainsi devenu un paria international, privé d’un important soutien financier étranger.

La communauté internationale, unie, a averti que seules des élections démocratiques permettraient à Madagascar de réintégrer le concert des nations. Cependant, Rajoelina refusait que son rival déchu revienne d’exil, alors que Ravalomanana et ses millions de partisans rejetaient la participation à des élections qui excluent leur mouvement. Aucun des deux camps n’a voulu céder, faisant sombrer Madagascar encore un peu plus dans l’immobilisme.233 La communauté internationale, menée par le Groupe international de contact pour Madagascar (le GIC-M, composé de gouvernements étrangers et de bailleurs de fonds), a exercé de nombreuses pressions pour que des élections inclusives se tiennent rapidement,234 conduisant à l’élaboration d’une feuille de route en 2011. Celle-ci n’a cependant pas permis de véritables avancées.235

231 Entretien de Crisis Group, journaliste malgache, Antananarivo, 22 juin 2012 ; voir les rapports Afrique de Crisis Group N°156, Madagascar : sortir du cycle de crises, 18 mars 2010 ; et N°166, Madagascar : la crise à un tournant critique, 18 novembre 2010. 232 Le mot « transition » est issu de l’ordonnance 2009-002 du 17 mars 2009 qui a transféré le pouvoir à Rajoelina et prévoyait une transition de 24 mois. 233 L’économie est au point mort : le revenu par habitant a diminué, la pauvreté est endémique, les finances publiques sont en crise et les infrastructures se dégradent. « Madagascar : chiffrer les coûts de la crise politique », Banque mondiale, 5 juin 2013. 234 Le Groupe international de contact pour Madagascar (GIC-M) comprends : l’UA, les Nations unies, les membres permanents et les pays africains qui siègent au Conseil de sécurité (Rwanda, Togo,Chine, France, Russie, Royaume-Uni et Etats-Unis), le Mozambique, la Tanzanie, l’Afrique du Sud, l’Allemagne et le Japon, ainsi que la Commission de l’océan indien (COI), le Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Comesa), - 120 -

Après presque cinq années de querelles, les élections présidentielles et législatives ont eu lieu à la fin de l’année 2013. Le vote a été rendu possible grâce à un accord selon lequel Rajoelina et Ravalomanana ne seraient pas candidats et présenteraient d’autres candidats à leur place. Avec 53,3 pour cent des voix, Hery Rajaonarimampianina, a battu Jean-Louis Robinson, lors du second tour le 20 décembre 2013. Le nouveau président a été investi le 25 janvier 2014.

Une élection « démocratique » a fini par être organisée. Malgré des irrégularités, le scrutin n’a pas été invalidé. Cependant, les institutions malgaches restent faibles, et le pouvoir et l’influence priment souvent sur les lois et les règles.236 Les politiciens se concentrent rarement sur la politique, et nombre de partis représentent un homme politique plutôt qu’un ensemble de candidats et d’idées.237 Lorsqu’une impasse politique se présente, ce qui arrive assez fréquemment à Madagascar, l’armée, par la force ou la menace, devient bien trop souvent l’arbitre inconstitutionnel.238 L’optimisme post-électoral a conduit de nombreux observateurs à estimer qu’une intervention militaire n’est plus à craindre. Cependant, le risque persiste, comme le montre la tentative avortée de coup d’Etat de juillet 2012.239 »

Ce paragraphe tiré du Rapport Afrique de Crisis Group N° 218 du 19 mai 2014 résume certainement la situation politique à Madagascar entre 2009 et 2013 ; toutefois, le pays n‟est pas pour autant sorti d‟affaire car comme le dit encore ce même rapport, « Une transformation politique profonde est nécessaire : les remèdes superficiels ne peuvent guérir des plaies profondes ». l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), la SADC et l’Union européenne (UE). Le GIC-M s’est réuni neuf fois entre 2009 et mars 2014. Cependant, dans un premier temps, la communauté internationale a été plus divisée qu’unifiée. Les acteurs politiques ont adopté des positions différentes, jusqu’à la signature de la feuille de route en septembre 2011 et sa consolidation au cours de 2012-2013, lorsque la plupart des acteurs internationaux se sont associés aux efforts de médiation de la SADC. 235 Comme pour de nombreuses feuilles de route et accords, il manque un mécanisme effectif de suivi et les parties ne sont pas tenues responsables lors de retards dans la mise en oeuvre. 236 Pour une analyse des causes sous-jacentes des précédentes crises et de la faiblesse des institutions, voir le rapport de Crisis Group, Madagascar : la crise à un tournant critique, op. cit. 237 Par exemple, 42 nouveaux députés, soit 29 pour cent de l’Assemblée nationale, ont leurs propres partis ou sont enregistrés comme « indépendants ». « Madagascar: Time to Make a Fresh Start », Chatham House, janvier 2013 ; Juvence Ramasy et Olivier Vallée, « Transition électorale à Madagascar et enjeux sécuritaires », Fondation pour la recherche stratégique, no. 1, 20 janvier 2014 ; rapport de Crisis Group, Madagascar : sortir du cycle de crises, op. cit. 238 Il y a eu au moins huit tentatives de coup d’Etat, d’importance variable, entre 1974 et 2012, en plus du putsch de 2009. Les tentatives échouées ont eu lieu en 1974, 1982, 1989, 1990, 1992, 2006, 2010 et 2012. La crise de 2001-2002 s’est produite lorsque le président en exercice Didier Ratsiraka et son opposant Marc Ravalomanana se sont déclarés tous deux présidents après une élection contestée. Il y a eu deux gouvernements parallèles jusqu’à ce que la pression militaire joue en faveur de Ravalomanana et force Ratsiraka à s’exiler à Paris. 239 Prise de l’aéroport international Ivato d’Antananarivo par un contingent de soldats. - 121 -

La question de la légitimité a été récurrente durant notre travail ; en effet comme nous l‟avons évoqué plus haut dans notre développement, quel pourrait être le but premier d‟une élection si ce n‟est la légitimation du pouvoir –légitimation démocratique !-.

Rappelons que comme moyen de sortir le pays de la crise dans laquelle elle s‟est trouvée depuis presque cinq années, les élections présidentielles de 2013 ont été considérées comme l‟unique voie de légitimation du pouvoir par plusieurs des citoyens240. Pour répondre à notre question de recherche que nous avons présentée dans l‟ l‟introduction de notre mémoire et qui consiste à se demander si l‟encadrement de la communication politique est suffisant pour permettre l‟absence d‟abus dans son exercice à Madagascar ou pas; nous avons proposé un plan en deux partie, chacune divisée en plusieurs chapitres : - La première partie, consacrée à la théorie, consistait à exploiter la littérature et les modèles d‟analyse en communication politique. Dans cette partie, nous avons exploré l‟historique de la communication politique et les études qui l‟ont approfondie depuis son émergence, ce qui nous a permis d‟en ressortir les critères de base sur la base desquels la communication politique devra être étudiée. - La deuxième partie, consacrée au contexte de la recherche, consistait à étudier le contexte électoral malgache afin d‟en ressortir « un environnement » ou plutôt un champ d‟exercice de la communication politique propre à Madagascar. Dans cette partie, nous avons cherché à mettre en relation les critères de base de la communication politique étudiés dans la première partie au contexte malgache en particulier durant la période électorale de 2013. Nous ne nous sommes pas limité à la campagne mais avons ensuite approfondi notre recherche dans le cadre institutionnel et juridique des partis politiques, des médias et de l‟administration électorale.

A ce niveau de notre recherche, nous sommes aptes à répondre à notre question de recherche et à vérifier nos hypothèses exposées dans l‟introduction générale.

Ainsi, notre première hypothèse de recherche selon laquelle la communication politique se pratique ou est pratiquée par les acteurs de la vie politique à Madagascar s‟avère vraie notamment en matière de discours politiques. En effet, notre recherche montre que les événements relatés lors de la campagne peuvent effectivement être rattachés aux théories

240 Plus de trois-quarts de l’échantillon d’un sondage réalisé à Antananarivo en 2013 concernant la participation et les perceptions politiques du citoyen - 122 - préétablies de communication politique (cf. thème de campagne, plan média, les outils de campagne notamment le média social, les acteurs en communication politique). Malheureusement, notre travail a été stoppé dans son élan du fait pour nous de n‟avoir pas pu accéder à des documents officiels de partis politiques (procès-verbaux) faisant état d‟une éventuelle stratégie de campagne ou d‟un plan de campagne. Quant à notre seconde hypothèse selon laquelle notre droit positif et l‟état de la réglementation en matière de communication politique ne permettent pas de garantir, ni même de penser à un exercice loyal, à une « concurrence » entre les divers acteurs et protagonistes de la vie politique, le fait que les élections présidentielles bien qu‟entachées de plusieurs irrégularités241, aient été quand même validé, semble encore nous donner raison. Toutefois, force est donc de constater que c‟est surtout au niveau de la volonté d‟agir ou ne pas agir, de punir et de sanctionner que le problème ne trouve pas de solution, en tout cas jusqu'à maintenant.

Quoi qu‟il en soit, à notre problématique selon laquelle il existerait un environnement réglementé dans lequel se pratiquerait la communication politique électorale, nous dirons que oui, sauf que cet environnement n‟est pas bien délimité, n‟est pas bien distingué parmi tous les autres environnements que contient le système politique malgache. La raison nous est apparue évidente : la communication politique n‟a pas encore été légitimée ; légitimé par la société, légitimé par le droit. Ce fameux concept de légitimité revient encore !

Par « légitimité »Max Weber242 entend, « l'état de ce qui est justifié d'exister »243 et qui est admis comme tel. Ce sens très général permet de distinguer deux types de légitimité. Est d'une part légitime une activité qui est a priori considérée soit comme « naturelle », c'est-à-dire conforme à la nature des choses, soit comme « normale », c'est-à-dire conforme aux normes sociales en vigueur, qu'elles soient ou non codifiées par le droit. Est d'autre part légitime un pouvoir qui est a posteriori accepté, reconnu comme valide par la plupart de ceux sur lesquels il s'exerce, quels que soient par ailleurs les motifs de cette reconnaissance. En ce sens, est légitime « ce qui est tenu pour tel par le système de valeurs établi dans la société considérée »244.

241 Cf. à ce sujet : Mission d’Observation Electorale de L’Union Européenne, « Rapport final : élection présidentielle et élections législatives »Madagascar 2013 ainsi que Rapport Afrique de Crisis Group N° 218, « Madagascar : une sortie de crise superficielle ?»,19 mai 2014. 242 Economie et Société, Plon, 1971, pp. 30 ss. 243 D. Gaxie, « Sur quelques concepts fondamentaux de la science politique », Mélanges Duverger, P.U.F., 1987, p. 611. 244 M. Duverger, Dictatures et légitimité, P.U.F., 1982, p. 7. - 123 -

En démocratie, l'élection libre et disputée constitue la source principale, mais non exclusive, de légitimité. La légitimité se manifeste ensuite pour l'élu par la reconnaissance de sa capacité à parler et agir au nom de l'ensemble des électeurs de la collectivité qu'il représente. Or parler et agir, c'est communiquer. On comprend par-là pourquoi l'élection est une condition nécessaire mais non suffisante de légitimité. L'élection ne suffit pas à rendre légitime un nouvel élu, encore faut-il qu'il parle et agisse de manière telle que ses électeurs soient après coup convaincus d'avoir eu raison de voter pour lui. La communication assure, selon le mot de G. Burdeau, « une sorte de confirmation quotidienne de la légitimité du pouvoir »245. La communication politique ne cesse pas le lendemain de l'élection, le nouvel élu devant au contraire très vite rassurer ses électeurs en leur expliquant pourquoi ils ont eu raison de voter pour lui, faute de quoi ses concurrents malheureux se chargeront de leur suggérer les raisons pour lesquelles ils ont eu tort. Rassurer ou insinuer le doute constitueraient ainsi des stratégies de communication plus efficaces, ou du moins plus courantes, que celles visant à convaincre. Si cette hypothèse se vérifiait, elle permettrait de dénouer quelques-uns des liens étroits qui relient la légitimité, question centrale de la politique246 , à la communication. Il n'y a pas de politique sans légitimité, aucun pouvoir n'échappant tôt ou tard à l'exigence de justification247; il n'y a pas non plus de légitimité sans communication puisque l'une et l'autre se situent dans le champ de représentations symboliques et relèvent de l'ordre de la croyance248. Comme la communication, la légitimité est une croyance partagée : est légitime le pouvoir qui communique avec succès les raisons de le croire tel. La communication politique n'est certes pas un phénomène récent; en revanche le développement des techniques importées de la publicité et du marketing, le recours des élus aux professionnels de la communication et la décentralisation récente du marché de la communication politique apparaissent comme les évolutions les plus caractéristiques d'une pratique en quête de légitimité.

245 G. Burdeau, Traité de science politique, T. X, LGDJ, 2è éd. 1977, p. 98. 246 Voir J. Lagroye, "La légitimation", in M. Grawitz, J. Leca, Traité de science politique, P.U.F., 1985, t. 1, pp. 395-467. Les principes de légitimité sont "les génies invisibles de la Cité et les fondements de l'ordre universel", G. Ferrero, Pouvoir, Le Livre de Poche, 1988, pp. 135-136. 247 "L'expérience, dit Max Weber, montre qu'aucune domination ne se contente de bon gré de fonder sa pérennité sur des motifs ou strictement matériels, ou strictement matériels, ou strictement rationnels en valeur. Au contraire, toutes les dominations cherchent à éveiller et à entretenir la croyance en leur légitimité", op.cit., p. 220. 248 "Aucune société, constate G. Balandier, ne peut échapper à la nécessité de sa propre théâtralisation", « Le politique des anthropologues » in M. Grawitz, J. Leca, op.cit., pp. 327-328. Voir aussi, du même auteur, Le pouvoir sur scènes, Balland, 1980, pp. 145 ss. - 124 -

La communication est consubstantielle à la politique. Pour autant cela ne semble pas avoir suffi à lui conférer une légitimité indiscutable. Depuis Platon, la communication politique a toujours suscité la méfiance. Les sophistes, ancêtres de nos actuels conseillers en communication, enseignaient contre rémunération l'art oratoire et la rhétorique aux enfants des bonnes familles athéniennes tentés par une carrière politique. Platon dénonce la démagogie de ces orateurs qui, « entreprenant de faire plaisir aux citoyens ...ont avec le peuple les mêmes façons de faire qu'avec les enfants »249. En même temps, il a toujours été admis que l'activité politique ne va pas sans communication et que la démocratie implique plus que tout autre régime une communication libre et ouverte, la démagogie étant somme toute préférable à l'absence totale de communication.

Nous allons donc clore ce travail, en posant une autre question ouverte à discussion : Dans quelle mesure la communication politique est-elle aujourd'hui reconnue comme une activité légitime à Madagascar? Question qui nous pousserait à nous pencher sur les motifs qui mettraient en question la légitimité de la communication politique mais aussi et surtout, les mécanismes par lesquels elle serait susceptible d'acquérir cette légitimité qui lui est indispensable.

249 Gorgias 502 e, trad. L. Robin (Platon, Œuvres complètes, La Pléiade, t. 1, p. 454). - 125 -

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8- Documents juridiques :

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- 132 -

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Déclaration universelle des droits de l‟homme

Charte des Nations Unies

Pacte international aux droits civils et politiques de 1966

Convention internationale sur l‟élimination de toutes formes de discrimination raciale en 1969

Convention internationale sur l‟élimination de toutes formes de discrimination à l‟égard des femmes en 1979

Charte africaine des droits de l‟homme et des peuples et son protocole sur les droits des femmes en 1981 ;

Déclaration de Bamako, de l‟Organisation Internationale de la Francophonie en 2000 ;

Protocole genre et développement de la Communauté de développement de l‟Afrique australe en 2007

 Lois :

Loi Organique n°2012-005 du 22 mars 2012 portant code électorale

Loi organique n°2012-015 relative à l‟élection du premier président de la quatrième république

Loi n°90-031, du 21 décembre 1990 sur la communication

Loi n°2011-014 du 28 décembre 2011 du 28décembre 2011 portant insertion dans l‟ordonnancement juridique interne de la Feuille de Route

Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011 relative aux partis politiques

Loi n°2011 014 du 28 décembre 2011 portant insertion dans l‟ordonnancement juridique interne de la Feuille de Route signée par les acteurs politiques malgaches le 16 septembre 2011.

Loi n°2011-013 du 9 septembre 2011 portant statut de l‟opposition et des partis d‟opposition.

Loi n°2012 004 du 1er février 2012 fixant l‟organisation, le fonctionnement et les attributions d‟une structure nationale Commission Electorale Nationale Indépendante pour la Transition.

- 133 -

Loi n°2012-014 portant création d‟une Chambre spéciale dénommée « Cour Electorale Spéciale » (CES) au sein de la Haute Cour Constitutionnelle

Loi n°2012-016 relatif aux premières élections législatives de la Quatrième République

Loi n° 2014-006 sur la lutte contre la cybercriminalité

 Décrets :

Décret n° 2004-937 portant création du Bureau Indépendant Anti-Corruption

Décret n° 2004 – 983 abrogeant et remplaçant le décret n° 2002- 1127 du 30 septembre 2002 instituant une obligation de déclaration de patrimoine par certaines catégories de hautes personnalités et de hauts fonctionnaires

Décret n°2007-510 du 4 juin 2007, relatif au Le service de renseignements financiers Malagasy (SAMIFIN)

Décret n° 2008 – 176 abrogeant le décret n° 2004-937 du 05 octobre 2004 et portant réorganisation du Bureau Indépendant Anti-Corruption

Décret n°2013- 057 du 29 janvier 2013, fixant les conditions d‟application de certaines dispositions de la Loi n°2011-012 du 9 septembre 2011, relative aux partis politiques.

Décret n°2013-154 du 12 mars 2013, fixant les conditions d‟application des dispositions de la Loi Organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l‟élection du premier président de la Quatrième République

Décret n°2013-156 fixant les modalités de versement et de remboursement de la contribution des candidats aux frais engagés par l‟administration pour l‟élection du premier président de la quatrième République

Décret n°2013-157 fixant les modèles de certaines pièces à fournir par tout candidat à l‟élection du premier président de la quatrième République

Décret n°2013-270 du 16 avril 2013 fixant les conditions d‟application de certaines dispositions de la loi organique n°2012-005 du 22 mars 2012 portant Code Electoral durant les campagnes électorales

- 134 -

Décret n°606 du 9 août 2013 abrogeant le Décret n° 2012-978 du 7 novembre 2012 et constatant la nomination des nouveaux membres élus et désignés au sein de la Chambre spéciale dénommée « Cour Electorale Spéciale » (CES) au sein de la Haute Cour Constitutionnelle

Décret n°2013-593 du 6 août 2013 modifiant certaines dispositions du Décret n° 2013-270 du 16 avril 2013 fixant les conditions d‟application de certaines dispositions de la loi organique n°2012-005 du 22 mars 2012 portant Code Electoral durant les campagnes électorales

Décret n° 2013 - 689 portant convocation des électeurs pour l‟élection du premier Président de la Quatrième République et les premières élections des membres de l‟Assemblée Nationale de la Quatrième République

 Ordonnances :

Ordonnance sur la Communication Audiovisuelle n°92-039, du 14 septembre 1992

Ordonnance n°2001-003 du 18 novembre 2001 relatives à la HCC

Ordonnance n°2013-002 portant Loi organique modifiant et complétant certaines dispositions de la Loi organique n°2012-015 du 1er août 2012 relative à l‟élection du premier Président de la de la quatrième République

 Jurisprudence de la CES :

Décision n°01-CES/ D du 3 mai 2013

Décision n°11-CES/D du 21 août 2013

Décision de la CES n°22-CES/D en date du 15 novembre 2013

Arrêt n°01-CES /AR, du 22 novembre 2013

Arrêt n°1-CES/AR du 4 janvier 2014, avant de dire droit

Arrêt n° 2-CES/D/AR.14 du 7 janvier 2014 relatif à une requête en disqualification.

Arrêt n°3-CES/D/AR.14 du 7 janvier 2014 relatif à des requêtes en disqualification.

- 135 -

Arrêt n°4-CES/AR.14 du 8 janvier 2014 relatif aux demandes d‟annulation du scrutin du 20 décembre 2014.

Arrêt n°5-CES/AR.14 du 8 janvier 2014 relatif à une demande d‟annulation du scrutin du 20 décembre 2014. Arrêt n°6-CES/AR.14 du 10 janvier 2014 relatif aux demandes d‟annulation des voix obtenues par un candidat à l‟élection présidentielle du 20 décembre 2013 formulée par des électeurs.

Arrêt n°7-CES/AR.14 du 13 janvier 2014 relatif à une demande d‟authentification des bulletins uniques et de recomptage systématiques des voix obtenues par chaque candidat lors de l‟élection présidentielle du 20 décembre 2014.

Arrêt n°8-CES/AR.14 du 13 janvier 2014 relatif à une demande en rétractation.

Arrêt n°9-CES/AR.14 du 15 janvier 2014 relatif aux demandes d‟annulation des voix obtenues sur le plan national par les deux candidats à l‟élection présidentielles du 20 décembre 2013.

Arrêt n°10-CES/AR.14 du 17 janvier 2014 portant proclamation des résultats définitifs du second tour de l‟élection présidentielle du 20 décembre 2013.

- 136 -

ANNEXES

(Source : rapport MOE UE : élections présidentielles et législatives de 2013)

MEDIAS AUDIOVISUELS PUBLICS- 1er TOUR

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- 138 -

MEDIAS AUDIOVISUELS PRIVES- 1er Tour

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- 140 -

MEDIAS AUDIOVISUELS PUBLIC-2d Tour

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MEDIAS AUDIOVISUELS PRIVES- Second Tour et Elections Législatives

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TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS ...... - 2 - SOMMAIRE ...... - 6 - INTRODUCTION GENERALE ...... - 8 - PREMIÈRE PARTIE- 14 -Communication politique : Essai de typologie et vue d’ensemble de l’environnement ...... - 14 - I- Typologie de la communication politique ...... - 15 - I-1- La propagande ...... - 16 - I-1-1- Les définitions de la propagande ...... - 17 - I-1-2- L‟histoire de la propagande ...... - 18 - I-1-2-1- Lénine : distinction entre propagande et agitation ...... - 18 - I-1-2-2- Les Etats-Unis et la Première Guerre mondiale ...... - 19 - I-1-2-3- La propagande stalinienne ...... - 20 - I-1-2-4- La propagande nazie...... - 21 - I-1-2-5- La propagande mussolinienne ...... - 22 - I-1-2-6- La guerre froide ...... - 22 - I-1-2-7- Les propagandes lors des guerres en Afghanistan et Irak ...... - 22 - I-1-3- Les types de propagandes ...... - 23 - I-1-4- Les techniques de propagande ...... - 25 - I-1-5- Les outils de propagande ...... - 28 - I-1-5-1- Les outils traditionnels de propagande ...... - 29 - I-1-5-2- Les outils modernes de propagande ...... - 29 - I-2- Le marketing politique ...... - 30 - I-2-1- Les définitions du marketing politique...... - 31 - I-2-2- L‟analyse du marketing ...... - 32 - I-2-3- L‟historique et l‟évolution du marketing ...... - 33 - I-2-4- Les « doreurs d'images » ou « spin doctors » ...... - 36 - I-3- La désinformation ...... - 38 - I-3-2- Les types de désinformation ...... - 39 - I-3-2-1- Les « faux » ...... - 40 - I-3-2-2- La question de l'indépendance des médias ...... - 40 - I-3-2-3- Les sondages ...... - 41 - I-3-2-4- Les canulars informatiques ...... - 41 -

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I-3-2-5- Les rumeurs ...... - 41 - I-4-La communication de crise ...... - 43 - I-4-1-Les définitions de la communication de crise ...... - 43 - I-4-2-La prévention de la crise ...... - 45 - II-Les composantes de l‟environnement de la communication politique ...... - 46 - II-1-La méthode de la communication politique électorale ...... - 46 - II-1-1- L‟élaboration d‟une stratégie de campagne ...... - 47 - II-1-1-1- Le diagnostic ...... - 47 - II-1-1-2- La détermination de la stratégie ...... - 47 - a. La détermination des cibles ...... - 47 - b. La détermination d’une image et des thèmes de campagne ...... - 48 - II-1-2- Le plan de campagne ...... - 49 - II-1-2-1- La chronologie du déroulement de la campagne ...... - 49 - a. Le choix de la date d’entrée en campagne ...... - 49 - b. Le choix du rythme de la montée en puissance de la campagne ...... - 49 - II-1-2-2- Le plan médias...... - 50 - II-2-Les outils de la communication politique ...... - 52 - II-2-1- L‟histoire des outils de la communication ...... - 52 - II-2-1-1- Le développement technique des outils de communication ...... - 52 - II-2-1-2- Le développement des outils de communication en politique ...... - 53 - II-2-2 Les outils de la communication politique ...... - 54 - II-2-2-1 Les outils classiques ...... - 54 - II-2-2-2- Les outils du marketing direct ...... - 56 - a- Le courrier ...... - 56 - b- Le téléphone ...... - 56 - c- Le journal interne et le journal externe...... - 57 - d- L’événement médiatique ...... - 57 - e- L’Internet ...... - 57 - f- Le spot publicitaire ...... - 58 - II-2-2-3 Les outils « sophistiqués » ...... - 58 - a- Le logo ...... - 58 - b- Le recours à des consultants ...... - 59 - c- Le sondage ...... - 60 - d- Le « média social » ...... - 64 -

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II-3-Les acteurs de la communication politique ...... - 66 - DEUXIEME PARTIE- 70 -Esquisse du paysage électoral durant l’élection présidentielle de 2013 ...... - 70 - I- Les concepts qui agissent sur la communication politique ...... - 72 - I-1- La culture politique...... - 72 - I-1-1- quelques définitions de la culture politique...... - 72 - I-1-2-Les partis politiques malgaches ...... - 74 - I-1-2-1- Emergence ...... - 74 - I-1-2-2- Caractéristiques du parti politique malgache ...... - 74 - I-1-3-La participation citoyenne à Madagascar ...... - 78 - I-1-3-1- Politisation et intérêt politique ...... - 78 - I-1-3-2-La confiance envers les institutions ...... - 79 - I-1-3-3- La participation citoyenne proprement dite ...... - 80 - I-2- La culture informationnelle ...... - 81 - I-2-1- quelques définitions de la culture informationnelle ...... - 81 - I-2-2- l‟accès à l‟information des malgaches ...... - 82 - I-2-3- le paysage médiatique malgache ...... - 84 - I-3- Les particularités de la société malgache : ...... - 89 - I-3-1- La question de l‟appartenance ethnique face à la citoyenneté ...... - 89 - I-3-2- La question de la religion face à la laïcité de l‟Etat ...... - 90 - II- Le contexte de l’élection présidentielle de 2013 ...... - 92 - II-1-Le contexte historique : Le système politique depuis l‟indépendance ...... - 92 - II-2-Le contexte politique : ...... - 94 - II-3-Le déroulement de la campagne ...... - 98 - II-4- la participation des médias durant la campagne électorale de 2013 ...... - 99 - III- Le cadre juridique et institutionnel de l’élection présidentielle de 2013 ...... - 101 - III-1-Le cadre juridique ...... - 101 - III-1-1-Le cadre institutionnel de la Transition ...... - 102 - III-1-2- Le cadre juridique de l‟élection ...... - 103 - III-1-3- Le cadre juridique régissant les partis politiques ...... - 104 - III-1-4- Le cadre juridique régissant les médias ...... - 105 - III-1-5- Le cadre juridique régissant la campagne électorale et les activités y afférentes ... - 106 - III-2- L‟organisation électorale ...... - 109 - III-2-1- L‟administration électorale ...... - 109 -

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III-2-1-1- La Commission Electorale Nationale Indépendante pour la Transition(CENIT) ...... - 109 - III-2-1-2- La Cour Electorale Spéciale (CES) ...... - 111 - III-2-2- les opérations électorales ...... - 111 - III-2-2-1-Les préparatifs pré-électoraux et la sécurisation du processus électoral .... - 111 - III-2-2-2-Enregistrement des candidatures et listes des candidats ...... - 113 - III-2-3- L‟observation électorale par la société civile ...... - 113 - III-2-4- Le contentieux électoral ...... - 114 - CONCLUSION GENERALE ...... - 120 - REFERENCES ...... - 126 - ANNEXES ...... - 137 -

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