ÉCOLE NATIONALE VETERINAIRE D’ALFORT

Année 2007

MALADIE DU DEPERISSEMENT CHRONIQUE DES CERVIDES : ETUDE BIBLIOGRAHIQUE

THESE

Pour le

DOCTORAT VETERINAIRE

Présentée et soutenue publiquement devant

LA FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL

le…………… par Camille VAN LUL Née le 08 mai 1981 à Melun (Seine-et-Marne)

JURY

Président : M. Professeur à la Faculté de Médecine de CRETEIL

Membres Directeur : M. Karim ADJOU Maître de conférences à l’ENVA Assesseur : M. Pascal ARNE Maître de conférences à l’ENVA Invité : M. François MOUTOU Docteur Vétérinaire, AFSSA

LISTE DES MEMBRES DU CORPS ENSEIGNANT Directeur : M. le Professeur COTARD Jean-Pierre Directeurs honoraires : MM. les Professeurs MORAILLON Robert, PARODI André-Laurent, PILET Charles, TOMA Bernard Professeurs honoraires: MM. BUSSIERAS Jean, CERF Olivier, LE BARS Henri, MILHAUD Guy, ROZIER Jacques

DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES ET PHARMACEUTIQUES (DSBP) Chef du département : M. BOULOUIS Henri-Jean, Professeur - Adjoint : M. DEGUEURCE Christophe, Professeur -UNITE D’ANATOMIE DES ANIMAUX DOMESTIQUES - UNITE D’HISTOLOGIE , ANATOMIE PATHOLOGIQUE Mme CREVIER-DENOIX Nathalie, Professeur M. CRESPEAU François, Professeur M. DEGUEURCE Christophe, Professeur* M. FONTAINE Jean-Jacques, Professeur * Mlle ROBERT Céline, Maître de conférences Mme BERNEX Florence, Maître de conférences M. CHATEAU Henri, Maître de conférences Mme CORDONNIER-LEFORT Nathalie, Maître de conférences

-UNITE DE PATHOLOGIE GENERALE , MICROBIOLOGIE, - UNITE DE VIROLOGIE IMMUNOLOGIE M. ELOIT Marc, Professeur * Mme QUINTIN-COLONNA Françoise, Professeur* Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences M. BOULOUIS Henri-Jean, Professeur -DISCIPLINE : PHYSIQUE ET CHIMIE BIOLOGIQUES ET -UNITE DE PHYSIOLOGIE ET THERAPEUTIQUE MEDICALES M. BRUGERE Henri, Professeur M. MOUTHON Gilbert, Professeur Mme COMBRISSON Hélène, Professeur* M. TIRET Laurent, Maître de conférences -DISCIPLINE : GENETIQUE MEDICALE ET CLINIQUE M. PANTHIER Jean-Jacques, Professeur -UNITE DE PHARMACIE ET TOXICOLOGIE Mlle ABITBOL Marie, Maître de conférences Mme ENRIQUEZ Brigitte, Professeur * M. TISSIER Renaud, Maître de conférences -DISCIPLINE : ETHOLOGIE M. PERROT Sébastien, Maître de conférences M. DEPUTTE Bertrand, Professeur

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Mme CALAGUE, Professeur d’Education Physique * Responsable de l’Unité AERC : Assistant d’Enseignement et de Recherche Contractuel

Remerciements

A Monsieur Professeur à la faculté de médecine de Créteil Qui nous a fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury de thèse Hommage respectueux.

A Monsieur Karim Adjou Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort Pour m’avoir proposé ce sujet Pour l’aide et les conseils qu’il m’a prodigués et la rigueur de sa correction Mes plus sincères remerciements.

A Monsieur Pascal Arné Maître de conférences à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort Qui a accepté de participer à mon jury de thèse Pour la rapidité et la rigueur de ses corrections Sincères remerciements.

A Monsieur François Moutou Docteur vétérinaire, unité épidémiologie, AFSSA Qui nous a fait l’honneur de participer à notre jury de thèse Pour l’attention qu’il a portée à ce travail Très sincères remerciements.

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A mes parents et mon frère C’est grâce à vous que j’ai pu accomplir mon rêve, à vos sacrifices et votre soutien. Merci de m’avoir permis de devenir ce que je suis et d’avoir l’envie de découvrir et comprendre le monde.

A ma famille Merci pour votre accueil pendant mes différents stages.

A mon groupe de clinique Avec qui j’ai passé tant de bons moments, celles avec qui j’ai partagé les moments les plus complices (Eléonor, Sabine, Marie Aude et Dorothée) et ceux avec qui j’ai tant apprécié être (Aurélie, Aude, Stéphanie, Claire, Béatrice, Vanessa, Alex).

A mes amis Merci à tous ceux avec qui j’ai partagé plein d’aventures et découvert tant de choses.

A toute l’équipe québécoise Merci à tous ceux qui ont fait que cette aventure ait été aussi riche (Mathilde, nos très chers techniciens Carl, Marco, Nancy et Véronique), à ceux qui m’ont appris tant de choses (David, André, Marie, PYM et Gilles) et à celles avec qui j’ai affronté les difficultés (Marjolaine, Ilonka, Marie-Laure)

La Maladie du dépérissement chronique des cervidés : étude bibliographique

NOM et Prénom : VAN LUL Camille

Résumé

La maladie du dépérissement chronique des cervidés (MDCC) est une encéphalopathie spongiforme subaiguë transmissible (ESST), ou maladie à prion, qui affecte les cervidés présents en Amérique du Nord : le cerf mulet (Odocoileus hemionus), le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus), le wapiti (Cervus elaphus nelsoni) et l’orignal ou élan (Alces alces). Elle provoque chez ces animaux un amaigrissement progressif et des troubles du comportement d’origine neurologique menant inévitablement à la mort. La transmission par voie orale, à partir de l’environnement contaminé, est responsable de la dissémination et de la persistance de la maladie dans la nature. La MDCC touche les cervidés sauvages et d’élevage aux Etats-Unis et au Canada, ainsi que dans d’autres pays suite à l’importation de cervidés d’élevage contaminés. Il s’agit de la seule ESST sévissant sur la faune sauvage de façon naturelle, ce qui rend délicate toute recherche associée. Le dépistage dépend ainsi de la participation des chasseurs. Par ailleurs, on ne peut exclure le risque zoonotique, qui le cas échéant pourrait avoir de graves conséquences sur la santé humaine. Actuellement, il est difficile d’anticiper le devenir de la MDCC. Les facteurs de risque ne sont pas maîtrisés et de nombreux points obscurs relatifs au mode de transmission restent à établir afin de pouvoir développer un programme d’éradication efficace. Le développement du dépistage de routine en ante mortem pourrait permettre un abattage sélectif dans certaines zones périurbaines ou dans les élevages. La connaissance de la physiopathologie de la MDCC participe à la compréhension générale des ESST, notamment sur le mode de propagation de l’agent infectieux et sur son mode de transmission. Le but de ce travail est de faire une mise au point sur la MDCC, en raison de son originalité par rapport aux ESST, surtout au moment où la France démarre une campagne de dépistage de la maladie sur son territoire. D’autres pays d’Europe ont déjà commencé le dépistage de surveillance. Ils n’ont pas mis en évidence la maladie à l’heure actuelle.

Mots clés : PRION, DEPERISSEMENT CHRONIQUE, ENCEPHALOPATHIE SPONGIFORME SUBAIGUËS TRANSMISSIBLE, CERVIDE, CERF MULET, CERF DE VIRGINIE, WAPITI, ORIGNAL, ELAN.

Jury : Président : Pr. Directeur : Dr. Karim Adjou Assesseur : Dr. Pascal Arné Invité : Dr. François Moutou

Adresse de l’auteur : 106 allée des Peupliers 77190 DAMMARIE LES LYS

Chronic wasting disease of cervids : bibliographic study

SURNAME : VAN LUL Given name : Camille

Summary

Chronic wasting disease (CWD) is a transmissible spongiform encephalopathy (TSE), also called prion disease, affecting north american cervids such as mule (Odocoileus hemionus), white-tailed deer (Odocoileus virginianus), Rocky Mountain (Cervus elaphus nelsoni) and now moose (Alces alces). The fatal clinical course include weight loss and neurological signs on this cervids. Indirect oral transmission via environmental contamination may play a role in natural dynamics and persistence of the disease. CWD occurs in both captive and wild ranging in the United States and Canada, but also in South Korea after contaminated captiv elk import. The free-ranging nature complicate the surveillance and control program. Hunters are indeed involved in this program. Although there is no evidence that CWD has been transmitted to humans, it may have the potential to infect humans. The many unknown aspects of CWD transmission prohibit robust prediction of the population impact and limit the development of effective control program. The tonsillar biopsy on live deer for preclinical diagnosis could permit selective eradication especially in urban zone or in wild game farmed. This work is a recent review of the chronic wasting disease and we do because of the specificity of this disease as TSE affecting wild and because France and the European Union began a CWD testing surveillance program.

Keywords : PRION, CHRONIC WASTING DISEASE, TRANSMISSIBLE SPONGIFORM ENCEPHALOPATHY, CERVIDS, MULE DEER, WHITE-TAILED DEER, , MOOSE.

Jury : President : Pr. Director : Dr. Karim Adjou Assessor : Dr. Pascal Arné Guest : Dr. François Moutou

Author’s address: 106 allée des Peupliers, 77190 DAMMARIE LES LYS

Table des matières Liste des figures ...... 4 Liste des tableaux...... 6 Liste des abréviations...... 8

Introduction ...... 9

PREMIERE PARTIE : LES ENCEPHALOPATHIES SPONGIFORMES SUBAIGUËS TRANSMISSIBLES OU ESST ...... 10

I. Définition des ESST ...... 10

II. Un agent transmissible non conventionnel ou ATNC ...... 12 A. La protéine PrP...... 12 B. Caractéristiques biochimiques et propriétés physico-chimiques des ATNC ...... 17 C. Hypothèses sur la nature des ATNC ...... 18

III. Notions de souches et de barrière d’espèces...... 21

IV. Physiopathologie de l’infection...... 23

V. Les ESST humaines...... 25 A. Le Kuru...... 25 B. La maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ)...... 25 C. Le syndrome de Gertsmann-Sträussler-Scheinker (GSS)...... 28 D. L’insomnie fatale familiale (IFF)...... 28

VI. Les ESST animales ...... 29 A. La tremblante des petits ruminants ...... 29 B. L’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB)...... 32 C. L’encéphalopathie transmissible du vison (ETV)...... 33 D. L’encéphalopathie spongiforme féline (ESF)...... 33 E. Cas recensés sur des ruminants sauvages...... 34

DEUXIEME PARTIE : LA MALADIE DU DEPERISSEMENT CHRONIQUE DES CERVIDES OU MDCC...... 35

I. La maladie du dépérissement chronique des cervidés : généralités...... 35 A. Espèces de cervidés présentes en Amérique du Nord...... 35 1) Taxonomie et description des cervidés ...... 35 2) Répartition géographique et habitat ...... 38 3) Densité de population et nombre d’individus ...... 41 4) Biologie et mode de vie des cervidés ...... 41 B. Historique de la découverte de la MDCC ...... 43

1 C. Répartition géographique de la MDCC et évolution ...... 45 D. Incidence et prévalence de la MDCC...... 47 E. Circonstances d’apparition et contexte sanitaire...... 48

II. Nature de l’agent infectieux de la MDCC ...... 51 A. Hypothèses sur l’origine de l’agent infectieux de la MDCC ...... 51 B. Notion de souche...... 51 C. Inoculation expérimentale et barrière d’espèce...... 52

III. Physiopathologie et transmission ...... 54 A. Réceptivité de l’hôte ...... 54 1) Réponse immunitaire...... 54 2) Susceptibilité génétique...... 54 B. Transmission de l’agent pathogène...... 56 1) Transmission verticale ou horizontale ?...... 56 2) Résistance de l’agent infectieux...... 57 3) Voies d’inoculation ...... 57 4) Sources de contamination/matières virulentes ...... 58 C. Propagation de l’agent infectieux dans l’hôte...... 59

IV. Aspects cliniques et lésionnels ...... 63 A. Présentation clinique...... 63 1) Anamnèse...... 63 2) Les symptômes...... 65 3) Caractéristiques hématologiques et biochimiques ...... 68 B. Aspects lésionnels...... 68 1) Lésions macroscopiques...... 68 2) Lésions microscopiques ...... 69

V. Diagnostic de la MDCC...... 76 A. Diagnostic clinique...... 76 B. Diagnostic à l’autopsie...... 76 C. Le diagnostic de laboratoire...... 76 1) Inoculation expérimentale aux animaux de laboratoire ...... 76 2) Diagnostic histologique...... 77 3) Mise en évidence de la PrPres...... 78 4) Développement de tests rapides en routine...... 81 5) Quelques tests d’avenir ?...... 82 D. Le choix du prélèvement...... 83 E. Diagnostic différentiel de la MDCC ...... 85

VI. Gestion et contrôle de la MDCC ...... 91 A. Importance de la MDCC au sein de la faune sauvage ...... 91 1) Prédictions des modèles épidémiologiques pour la population sauvage...... 91 2) Le risque de transmission à d’autres espèces...... 92 3) Importance pour la filière cynégétique...... 92 B. Mesures de lutte et prévention pour la faune sauvage et captive...... 93 1) Mise en place du dépistage...... 93

2 2) Eradication de la MDCC en captivité ...... 96 3) Contrôle en milieu naturel...... 98 4) Recommandations pour les échanges d’animaux...... 99 C. La MDCC et l’homme ...... 99 1) Existe-il un risque pour l’homme ? ...... 99 2) Information et précautions à respecter lors des manipulations ...... 100

Conclusion...... 102 Bibliographie...... 103 Annexes...... 117

3 Liste des figures Figure 1 : conformation tridimensionnelle de la PrPc (A) et de la PrPres (B) à partir de données de la résonance magnétique nucléaire (RMN).

Figure 2 : voie de synthèse normale de la PrP et modifications métaboliques lors de la tremblante.

Figure 3 : représentation des deux principales hypothèses de synthèse de la PrPres à partir de PrPc.

Figure 4 : profil électrophorétique de la PrPc (control) et de la PrPres (scrapie clinical stage) avant (-) et après (+) digestion par la protéase K.

Figure 5 : exemple de profils lésionnels obtenus sur deux lignées de souris (RIII et Tga20) à partir de 3 échantillons d'inoculum : chèvre CH636 souche à identifier, ESB expérimentale sur moutons (ovBSE) et tremblante naturelle chez la chèvre (CH95).

Figure 6 : mécanisme de neuroinvasion dans le système nerveux périphérique (SNP).

Figure 7 : indigènes de la tribu Fores en Papouasie Nouvelle-Guinée en phase clinique de Kuru.

Figure 8 : nombre de cas d’ESB et de nvMCJ au Royaume-Uni entre 1987 et 2004.

Figures 9 et 10 : la tremblante des petits ruminants. Les lésions occasionnées par le prurit provoquent une chute de la toison (8) et parfois des lésions cutanées sévères (9).

Figure 11 : brebis atteinte de tremblante montrant des troubles locomoteurs (tête basse, positions anormales du dos, des membres postérieurs et antérieurs).

Figures 12 et 13 : nombre de cas d’ESB au Royaume-Uni au 6 octobre 2006, et en France au 16 janvier 2007.

Figure 14 : les différentes espèces de cervidés présentes naturellement en Amérique du Nord.

Figure 15 : répartition sur le territoire américain du cerf mulet et du cerf de Virginie (A), et du wapiti des Montagnes Rocheuses (B).

Figure 16 : répartition en Amérique du nord du caribou (A), et de l’orignal (B).

Figure 17 : répartition des cas de MDCC en Amérique du Nord sur cervidés sauvages et captifs.

Figure 18 : distribution de la PrPres dans les nerfs sympathiques, parasympathiques, crâniaux et moteurs chez les Cervidés.

Figure 19 : signes cliniques de la MDCC : émaciation chez le wapiti (A), ataxie chez le wapiti (B), et salivation chez le wapiti (C) et le cerf (D).

Figure 20 : émaciation sévère à l’autopsie sur un cerf de Virginie : on note l’absence de graisse mésentérique.

4 Figure 21 : lésions histologiques en coloration HE : vacuolisation neuronale dans l’encéphale (spongiose) (A) et plaques amyloïdes (B).

Figure 22 : une vacuole autophagique neuronale géante vue au microscope électronique (x 10 000).

Figure 23 : répartition de la PrPres (en immunohistochimie IHC) et des lésions histologiques (SE) chez le cerf mulet sauvage dans l’encéphale.

Figure 24 : représentation des différentes coupes d’encéphale effectuées pour l’analyse histologique ou immunohistochimique.

Figure 25 : dépôts de PrPres dans le cortex frontal (A) et dans deux follicules lymphoïdes (B) en immunohistochimie.

Figure 26 : plaques amyloïdes en immunohistochimie (A) et processus astrocytaire (en rouge) autour d’une plaque de PrPres (en vert) par double marquage immunohistochimique.

Figure 27 : Western blot sur des fragments d’encéphale de cerfs de Virginie positifs et témoins avec ou sans digestion par la protéinase K.

Figure 28 : position de l’obex dans l’encéphale.

5 Liste des tableaux

Tableau I : les encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles humaines et animales et les dates de leurs premières observations.

Tableau II : principales différences physico-chimiques entre la PrPc et la PrPres.

Tableau III : arguments pour ou contre l’hypothèse protéique des ATNC.

Tableau IV : nombre de cas de nvMCJ dans le monde au 1er décembre 2006.

Tableau V : génotype PrP aux codons 136,154 et 171 et sensibilité à la tremblante chez le mouton.

Tableau VI : habitats des 3 principales espèces de cervidés atteintes de MDCC.

Tableau VII : chronologie des événements liés à la MDCC.

Tableau VIII : prévalence de la MDCC sur la faune sauvage : exemples dans quelques Etats.

Tableau IX : transmissibilité de l’agent de la MDCC à différentes espèces après inoculation intracérébrale.

Tableau X : présence dans une population d’élevage ou sauvage de l’homozygotie Met/Met au codon 132 sur 20 wapitis atteints de MDCC et 23 wapitis sains.

Tableau XI : variabilité des allèles chez le cerf de Virginie sur 4 codons (95, 96, 116 et 138).

Tableau XII : proportion des différents allèles au codon 225 dans une population de cerf mulet sauvage chez les individus sains ou atteints par la MDCC.

Tableau XIII : durée d’incubation obtenue expérimentalement, et âge de la mort des animaux captifs et sauvages.

Tableau XIV : tableau récapitulatif de l’influence du sexe et de l’âge des cerfs mulets sauvages.

Tableau XV : comparaison des fréquences d’observation des signes cliniques chez le cerf (cerf mulet et cerf de Virginie) et le wapiti.

Tableau XVI : répartition des lésions observées à l’histologie dans l’encéphale.

Tableau XVII : présentation des catégories regroupant 4 modèles de répartition de la PrPres sur les cerfs mulets sauvages selon T. SPRAKER.

Tableau XVIII : graduation de la sévérité des lésions histologiques d’un échantillon selon le score de HADLOW.

Tableau XIX: gradation des échantillons en fonction de l’intensité et de l’abondance du marquage des tissus en coloration IHC.

6 Tableau XX : sensibilité et spécificité relatives du test immunohistochimique avec l’anticorps MAb F99/97.6.1 chez le cerf mulet sauvage.

Tableau XXI : sensibilité et spécificité du titrage de l’enzyme immunoabsorbante du laboratoire Biorad chez les cervidés.

Tableau XXII : comparaison du nombre de follicules obtenus entre les deux techniques de prélèvements des amygdales chez le cerf mulet et de Virginie.

Tableau XXIII : comparaison des principales affections du diagnostic différentiel permettant de distinguer la MDCC

Tableau XXIV : comparaison des méthodes de dépistages par une surveillance ciblée et par une étude d’ensemble de la population.

Tableau XXV : comparaison des deux procédures de prélèvements.

Tableau XXVI : protocole de décontamination dans le centre de recherche du Colorado.

7 Liste des abréviations ADN : acide désoxyribonucléique APHIS : Service d’inspection de la santé des plantes et des animaux du gouvernement américain ( and Plant Health Inspection Service) ARN : acide ribonucléique ATNC : agent transmissible non conventionnel, se dit d’un agent infectieux différent de tous ceux déjà connus (Bactéries, virus, champignons, ….) dont la nature n’est pas précisément connue ; le prion est un ATNC AZA : association américaine des aquariums et zoo DMNV : noyau moteur dorsal du nerf vague EEG : électroencéphalogramme ESB : encéphalopathie spongiforme bovine ESF : encéphalopathie spongiforme féline ESST : encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles ETV : encéphalopathie transmissible du vison FVO : farine de viande et d’os IFF : insomnie fatale familiale IRM : imagerie par résonance magnétique MCJ : maladie de Creutzfeldt-Jakob MDCC : maladie du dépérissement chronique OIE : Organisation Mondiale de la Santé Animale (ex-Office International des Epizooties) PRNP : nom du gène de la PrP chez l’homme Prnp : nom du gène de la PrP chez les animaux PrP : prion protein PrPc : PrP cellulaire ou normale ; isoforme physiologique de la PrP PrPres : PrP résistante (ou PrPsc pour scrapie) ; isoforme pathologique de la PrP SAF : Scrapie associated fibrils SGSS : syndrome de Gertsmann-Sträussler-Scheinker SNC : système nerveux central Prion : acronyme de proteinaceous infectious particles SRE : système réticulo-endothélial USDA : Ministère de l’agriculture des Etats-Unis (United State Department of Agriculture)

8 Introduction

Depuis la crise de la « maladie de la vache folle » apparue en Europe avec notamment la transmission de l’agent infectieux à l’homme, l’intérêt pour les encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST) ou maladies à prions s’est considérablement accru ces vingt dernières années. Les Etats-Unis jusque là relativement épargné par l’ampleur de ce phénomène (seulement 2 cas d’ESB déclarés) est en passe de connaître une épizootie sans précédent sur son cheptel sauvage de cervidés avec la maladie du dépérissement chronique des cervidés ou MDCC.

La MDCC est une des plus anciennes ESST découvertes, le premier cas a été observé dans les années 1960 sur un cerf mulet captif dans le Colorado. La maladie a par la suite été retrouvée sur des animaux de la faune sauvage : cerf mulet, wapiti, cerf de Virginie et très récemment orignal. Le phénomène est longtemps resté confiné à 3 états des Etats-Unis (Colorado, Wyoming et Nebraska), mais depuis les années 1990 la maladie s’est apparemment étendue de façon considérable d’abord au nord (Canada) puis plus au sud (Nouveau Mexique) et plus à l’Est en dépassant la barrière du Mississipi.

La rapidité de l’expansion de cette maladie sur la faune sauvage, ainsi que sur la faune captive d’élevage, liée à une transmission horizontale, aboutit inexorablement à la mort, ce qui fait redouter le pire pour la population de cervidés, à savoir une diminution importante de la population de ces espèces. Les autorités sanitaires sont en état d’alerte face à la MDCC. En effet la gestion de la faune sauvage est des plus difficiles puisqu’on ne peut ni confiner les animaux, ni les restreindre à un territoire, ni empêcher les contacts, ni même en observer les symptômes. Le risque zoonotique comme pour le nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob avec la « maladie de la vache folle » n’est pas exclu, faisant redouter une anadémie de grande ampleur. En effet, il existe de très nombreux chasseurs aux Etats-Unis. De plus, les chasseurs et les regroupements du gibier d’élevage forment un lobbying très puissant aux Etats-Unis drainant d’énormes fonds dans l’industrie de la chasse ou pour l’échange international d’animaux d’élevage, actuellement très réglementé.

Le but de ce travail est donc de faire une synthèse bibliographique sur la maladie du dépérissement chronique après avoir présenté les généralités sur les ESST afin de mieux situer cette maladie dans le contexte des maladies à prion. Les données ont été collectées en 2006-2007, une mise à jour a été effectuée pendant l’été 2007.

9 PREMIERE PARTIE : LES ENCEPHALOPATHIES

SPONGIFORMES SUBAIGUËS TRANSMISSIBLES OU ESST

I. Définition des ESST

Les ESST forment un groupe de maladies neurodégénératives affectant aussi bien l’homme que les animaux (moutons, chèvres, vaches, félidés, cervidés, visons d’Amérique) dans différentes maladies (voir tableau I). Elles sont induites par un agent transmissible non conventionnel ou ATNC, encore appelé "prion" selon la théorie de la "protéine infectieuse".

L’évolution clinique est toujours précédée d’une longue phase cliniquement silencieuse, puis elle évolue lentement vers une mort inexorable.

Les symptômes révèlent une atteinte limitée au système nerveux central (SNC) : ataxie cérébelleuse, syndrome pyramidal, démence chez l’homme, troubles du comportement chez l’animal. On ne note pas de modifications spécifiques des constantes hématologiques ni biochimiques du sang ou du liquide céphalo-rachidien lors de l’exploration ante mortem. L’infection ne provoque aucune réaction sérologique ou réaction immunitaire détectable.

Les lésions histologiques sont caractérisées par une spongiose des neurones, une mort neuronale et une gliose par hyperastrocytose dans la substance grise du système nerveux central. La spongiose correspond à une dégénérescence vacuolaire du cytoplasme neuronal ce qui donne un véritable aspect spongieux aux faibles grossissements microscopiques (FONTAINE et PARODI, 1991). Il n’y a pas de caractère inflammatoire sur les coupes histologiques, c’est-à-dire pas d’œdèmes cérébraux ni d’infiltrats macrophagiques ou lymphocytaires. Des plaques amyloïdes sont parfois observées.

Il n’existe pas à l’heure actuelle de dépistage non invasif permettant le diagnostic de ces maladies ; l’examen clinique permet dans un premier temps d’orienter le clinicien vers une suspicion d’ESST. Seul l’examen du SNC permet la confirmation d’ESST. L’imagerie médicale comme l’imagerie par résonance magnétique (IRM) ou l’électroencéphalogramme (EEG) sont principalement utilisés chez l’homme pour l’exclusion d’autres maladies du système nerveux central (tumeur cérébrale, maladie d’Alzheimer).

Il existe encore de nombreuses controverses quant à l’étiologie de ces affections, qui ont la particularité de regrouper trois formes différentes : sporadique, génétique et infectieuse. Le point de départ des différentes hypothèses relatives à l’origine de ces maladies est l’accumulation d’une forme anormale d’une protéine de l’hôte, la PrP ou protéine du prion, ne provoquant pas de réaction immunitaire, la PrP étant reconnue comme une protéine du soi par le système immunitaire.

10 Tableau I : les encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles humaines et animales et les dates de leurs premières observations

Hôte Maladie Première observation Mouton Tremblante 1730 Chèvre Tremblante 1872 Homme Maladie de Creutzfeldt Jakob (MCJ) sporadique 1920 Maladie de Creutzfeldt Jakob familiale Maladie de Creutzfeldt Jakob iatrogène 1974 Nouveau variant de la Maladie de Creutzfeldt Jakob 1996 Kuru 1955 Syndrome de Gertsmann-Sträussler-Scheinker (SGSS) 1936 Insomnie fatale familiale (IFF) 1992 Vison Encéphalopathie transmissible du vison (ETV) 1947 Cerf mulet, wapiti Maladie du dépérissement chronique des cervidés 1967 Cerf de Virginie (MDCC) 1982 Elan 2005 Bovin Encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) 1986 Chat, 1990 Guépard, Ocelot, Encéphalopathie spongiforme féline (ESF) 1992 Puma, Tigre Nyala Encéphalopathie spongiforme 1985 Grand koudou Encéphalopathie spongiforme 1986 Oryx Encéphalopathie spongiforme 1990 Mouflon Tremblante 1992 Bison Encéphalopathie spongiforme 1997 Dénomination des espèces :

Mouton (Ovis aries) ; chèvre (Capra aegagrus hircus) ; Vison (Mustela vison) ; cerf mulet (Odocoileus hemionus) ; wapiti (Cervus elaphus nelsoni) ; cerf de Virginie (Odocoileus virginianus) ; élan (Alces alces) ; bovin (Bos taurus) ; chat (Felis catus) ; guépard (Acinonyx jubatus) ; ocelot (Leopardus pardalis) ; puma (Puma concolor) ; tigre (Panthera tigris) ; nyala (Tragelaphus angasii) ; grand koudou (Tragelaphus strepsiceros) ; oryx (Oryx spp.) ; mouflon (Ovis ammon) ; bison ( Bison spp.).

(Sources : ADJOU et al., 2005)

11 II. Un agent transmissible non conventionnel ou ATNC

A. La protéine PrP

En 1982, S.B. Prusiner et son équipe inoculent des hamsters avec l’agent de la tremblante du mouton et isolent, dans les fractions purifiées de cerveaux des animaux en phase terminale de la maladie, une protéine hydrophobe partiellement résistante à l’action de la protéinase K. Aucun acide nucléique n’est isolé de la fraction purifiée (PRUSINER, 1982). La protéine ainsi isolée est la seule macromolécule identifiable dans les préparations purifiées. Elle a un poids moléculaire de 27 à 30 kiloDaltons et est appelée PrP27-30 ; PrP pour "protease resistant protein", c’est le produit de la PrP pathologique d’un poids moléculaire 33 à 35 kiloDaltons, nommée PrPres (res pour résistance) ou PrPsc (sc pour scrapie qui désigne la tremblante chez les anglo-saxons). Ces différentes étapes sont résumées dans la figure 2. Chez les individus non infectés, la PrP est retrouvée sous forme non pathologique dénommé PrPc, c pour "cellular".

1) La protéine PrPc

La PrPc une glycoprotéine soluble localisée essentiellement au niveau membranaire, attachée à la surface externe de la membrane plasmique par une ancre glycosyl-phosphatidyl- inositol (GPI) ; elle subit ensuite une endocytose et totalement catabolisée par l’action des protéases dans la cellule (STAHL et al., 1987). Son temps de demi-vie est de 5 heures (BORCHELT et al., 1990). Elle est ensuite dégradée par le système ubiquitine-protéasome dans les lysosomes (CAUGHEY et CHESEBRO, 1997).

La PrPc s’est relativement bien conservée au cours de l’évolution dans les différentes espèces de mammifères. La séquence d’acides aminés est peu variable d’une espèce à l’autre, les différences sont de l’ordre de 10 à 20 % (OESCH et al., 1991). Chez l’homme elle compte 253 acides aminés, et chez la souris 254 acides aminés avec une homologie de 90 %. Les PrP bovine et ovine comportent respectivement 269 et 256 acides aminés.

Le gène de la PrP a été isolé chez les mammifères en 1985. Il n’est présent qu’en une seule copie dans le génome : sur le bras court du chromosome 20 chez l’homme, sur le chromosome 2 chez la souris (OESCH et al., 1985). Ce gène, nommé PRNP chez l’homme est composé de 2 exons séparés par un intron. Seul le deuxième exon contient toute la séquence codante en lecture ininterrompue. Il est retrouvé chez tous les mammifères ainsi que chez les nématodes, les drosophiles et certaines levures (OESCH et al., 1985).

a. Localisation

La PrPc est présente chez l’individu sain essentiellement dans les neurones (KRETZSCHMAR et al., 1986), et dans un moindre degré dans les cellules gliales, du système nerveux central, notamment au niveau du cervelet, du cortex cérébral, du thalamus, de l’hippocampe, et de la moelle épinière. Elle est aussi présente au niveau du système immunitaire (à la surface des lymphocytes, des cellules folliculaires dendritiques de la rate (BURTHEM et al., 2001), des noeuds lymphatiques, des plaques de Peyer, et des cellules des îlots de Langerhans du pancréas (MAIGNIEN et al., 1999).

12 b. Hypothèses sur le rôle de la PrPc

Le rôle de la PrP chez les individus sains demeure encore inconnu. La PrPc serait impliquée dans la physiologie du sommeil et l’alternance veille-sommeil, dans les fonctions cognitives et la formation de la mémoire. On lui attribue aussi un rôle dans la transmission synaptique, dans le vieillissement des cellules de Purkinje, et plus récemment dans la transmission de signaux moléculaires à la cellule (MOUILLET-RICHARD et al., 2000). Jusque là des souris "knock-out" pour le gène de la PrP, c’est-à-dire des souris dont le gène Prnp a été délété, sont restées viables et n’ont développé aucun déficit neurologique ou psychophysiologique majeur, suggérant une fonction non essentielle au développement et à la survie contrastant avec sa large présence dans l’organisme et sa conservation au cours de l’évolution (BUELER et al., 1992). La PrPc est indispensable à la neuroinvasion et à la neurotoxicité des agents des ESST (BRANDNER et al., 1996).

2) De la PrPc à la PrPres

La PrPres est une glycoprotéine dérivée de la PrPc. Elle est relativement résistante à la dégradation par la protéinase K (PRUSINER, 1991).

La séquence primaire en acides aminés est identique dans les 2 formes de PrP. La protéine pathologique diffère de la protéine normale par sa conformation secondaire et très probablement tertiaire. Les modifications conformationnelles sont post-traductionnelles. Les techniques de dichroïsme circulaire et de spectroscopie infrarouge ont permis d’estimer les différences de contenu en hélices α et en feuillets β dans les deux formes de la protéine (voir tableau II page 15) : le contenu en feuillets β est nettement plus élevé pour la PrPres (54 % au lieu de 3 % pour la PrPc) et faible en hélices α (30 % au lieu de 42 % pour la PrPc) (PAN et al., 1993). Les techniques modernes ont ainsi permis de représenter la molécule en trois dimensions (figure 1).

Figure 1 : conformation tridimensionnelle de la PrPc (A) et de la PrPres (B) à partir de données de la résonance magnétique nucléaire (RMN). Flèche en rouge : feuillet β Hélice en vert : hélice α

(Source : Fred Cohen laboratory, UCSF, www.cmpharm.ucsf.edu/cohen/) 13 Le passage de la forme physiologique à la forme pathologique de la PrP est à l’origine d’une perturbation du catabolisme cellulaire. Par défaut de digestion enzymatique, la PrPres s’accumule dans la cellule, souvent dans les lysosomes secondaires ou dans l’appareil de Golgi ; elle a la capacité de traverser les membranes. Elle donne après digestion par les protéases, la PrP27-30 qui peut s’agglomérer sous forme amyloïde (figure 2). Elle s’accumule sous cette forme chez l’individu infecté dans le système nerveux central au cours du développement de la maladie, sans qu’il y ait de surexpression du gène (PRUSINER, 1991).

Figure 2 : voie de synthèse normale de la PrP et modifications métaboliques lors de la tremblante

ADN Transcription

ARNm

Traduction PrP Modification post-traductionnelle

PrPc PrPsc=PrP33-35 Digestion par les protéines K Dégradation PrP27-30

Agrégation en plaques amyloïdes

(Source : PRUSINER, 1991)

Son accumulation est proportionnelle au titre infectieux dans les modèles animaux. Elle est indissociable de l’agent transmissible dans les études d’infectiosité (RACE et al., 1998), et est donc recherchée systématiquement comme marqueur de l’infectiosité. Selon S.B. Prusiner, l’état conformationnel de la PrP serait le seul support de l’infectiosité de la maladie (PRUSINER, 1982).

Différentes théories existent au sujet de la synthèse de la PrPsc ; elles sont illustrées dans la figure 3. La théorie de la transconformation dite « autocatalytique » de S.B. Prusiner expliquerait le passage de la PrPc en son isoforme conformationnel : la PrPres. L’association entre la protéine normale et son isoforme mal replié serait à l’origine de la propagation de la PrPres, mais le processus reste à établir.

14 Figure 3 : représentation des deux principales hypothèses de synthèse de la PrPres à partir de PrPc

(Source : AGUZZI et POLYMENIDOU, 2004)

(A) La première hypothèse, « autocatalytique », suppose une interaction entre la PrPres exogène et la PrPc endogène, qui se transforme par la suite elle-même en PrPres. Une haute barrière énergétique pourrait empêcher une conversion spontanée de la PrPc en PrPres.

(B) La deuxième hypothèse, dite de « germination », ou de « nucléation-polymérisation » suppose que la PrPc et la PrPres sont en équilibre thermodynamique réversible. A la condition que plusieurs molécules de PrPres s’agrègent en un noyau très ordonné, d’autres molécules de PrPres peuvent être recrutées et former une substance amyloïde. Avec un noyau de PrPres quasi cristallisé, la PrPres devient stable. Lorsque leur taille est suffisante, la fragmentation de ces amas augmente le nombre de noyaux, qui peuvent à leur tour accumuler de la PrPres et ainsi répliquer le prion.

La conversion in vitro de PrPc en PrPres à partir de composants purifiés confirme l’hypothèse autocatalytique (KOCISKO et al., 1994).

Selon cette théorie autocatalytique, deux solutions existent quant au processus de conversion : - soit la conversion est catalysée par une enzyme de conversion codée par l’hôte et induite par la PrPres exogène, - soit la PrPres est elle-même la molécule chaperonne et après liaison avec la PrPc lui impose sa conformation (LIAUTARD, 1991)

15 3) Différences entre PrPc et PrPres

Les modifications conformationnelles de la PrPres lui confèrent des caractéristiques particulières qui la distinguent de la PrPc. Les protéases digèrent totalement la protéine native alors que l’action n’est que partielle sur la protéine pathologique, d’où le nom de "protease resistante protein". Ces propriétés sont utilisées pour purifier la PrPres sous forme de SAF et pour digérer la PrPc. Sur le plan physico-chimique, la PrPres hydrophobe est insoluble dans les détergents, alors que la PrPc est soluble (PRUSINER, 1991) ; cela entraîne des différences de localisations dans la cellule et modifie le devenir de la protéine, notamment le temps de demi-vie qui passe de 5 h pour la PrPc à 15 h pour la PrPres (BORCHELT et al., 1990). La digestion par la protéinase K est utilisée pour différencier la PrPc et la PrPres. Ces segments sont ensuite analysés en Western blot : on obtient alors différents profils électrophorétiques (voir figure 4).

Figure 4 : profil électrophorétique de la PrPc (control) et de la PrPres (scrapie clinical stage) avant (-) et après (+) digestion par la protéinase K.

Control = témoin Scrapie clinical stage = en phase clinique de la tremblante kD = kiloDaltons

(Source : DORMONT, 2002)

La PrPc présente 3 bandes en Western Blot avant digestion par la protéinase K alors que la PrPres en présente 4 bandes : les fragments de protéine obtenus après digestion par la protéinase K migrent en fonction de leur poids moléculaire et forment les bandes. L’action par la protéinase K digère totalement la PrPc, alors que la PrPres résiste partiellement avec persistance de 3 bandes. Les principales différences d’ordre physico-chimique entre la protéine du prion de l’hôte et la forme résistante sont représentées dans le tableau II.

16 Tableau II : principales différences physico-chimiques entre la PrPc et la PrPres

Caractéristiques physico-chimiques PrPc PrPres

Résistance à la protéinase K - ++

Solubilité dans les détergents ++ -

Hélice α 42 % 30 %

Feuillet β plissé 3 % 43 %

Temps de demi-vie 3 à 6 heures > 15 heures

Profil électrolytique 3 bandes 4 bandes

Du fait des différences physico-chimiques de ces deux protéines, on observe des localisations distinctes dans la cellule : la PrPc est ancrée dans la membrane alors que la PrPres s’accumule dans la cellule et notamment dans les lysosomes.

B. Caractéristiques biochimiques et propriétés physico-chimiques des ATNC

Les caractéristiques très particulières des ATNC en font une catégorie à part des microorganismes. Leur taille a été estimée par des techniques d’ultrafiltration entre 15 et 40 nm (PRUSINER et al., 1978). Il faut toutefois prendre ces données avec précautions car leur hydrophobicité confère à ces agents des propriétés d’auto-agrégabilité qui peuvent être à l’origine de biais expérimentaux.

Les ATNC ont une résistance exceptionnelle à la chaleur : 24 heures à 160°C n’inactivent pas totalement une dose de 107 de la dose létale 50 (DL 50) de l’agent de la tremblante expérimentale (DICKINSON et TAYLOR, 1978), ni un traitement de 1 heure à 360°C (BROWN et al., 1990). Le froid n’a également aucune action sur les ATNC : des échantillons ont été conservés pour une partie pendant 2 ans à 4°C, pour une autre pendant plusieurs années à -70°C sans perdre leur pouvoir infectieux.

Les rayonnements ont également peu d’effet : la dose inactivatrice 37 % est de plus de 100 kGy (kiloGray) (LATARJET et al., 1970). Les doses d’irradiation γ et β de 25 kGy couramment utilisées sont sans effet sur l’infectiosité. Les ATNC sont également très résistants aux ultrasons.

Les ATNC ont aussi une très grande résistance vis-à-vis des procédés de décontamination chimique : l’hypochlorite de sodium (NaOCl) et la soude 1N (NaOH) sont efficaces en réduisant le titre infectieux jusqu’à 99,99%, c’est-à-dire compatible avec un risque résiduel acceptable (BROWN et al., 1982 et TATEISHI et al., 1991).

Les ATNC font preuve d’une résistance exceptionnelle vis-à-vis des procédés de désinfection habituellement utilisés en virologie ce qui a été en partie à l’origine des accidents de contamination, mais on note aussi une grande résistance dans le milieu extérieur, d’où le risque de 17 contamination par l’environnement. Dans le cas de la tremblante il a été ainsi démontré que l’agent infectieux pouvait transmettre la maladie par voie orale après une persistance dans le sol de plusieurs années (SEIDEL et al., 2007).

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) recommande pour la désinfection du matériel médical à un niveau de sécurité acceptable en médecine humaine une des 3 méthodes suivantes : - autoclave à 134-136°C pendant 18 min - traitement à la soude (hydroxyde de sodium NaOH) 2 M pendant 1 heure à température ambiante - traitement à l’eau de Javel (hypochlorite de sodium NaOCl) à 20.000ppm pendant 1 heure à température ambiante.

Des expériences d’inactivation des différents types de molécules ont été appliquées sur les fractions infectieuses, puis évaluées par inoculation à des animaux de laboratoire, afin de déterminer la nature de l’agent infectieux. Ainsi les méthodes de dénaturation ou de digestion enzymatique des acides nucléiques n’ont aucun effet sur le titre infectieux, alors que les procédés modifiants la structure ou la composition des protéines induisent une baisse significative de l’infectiosité (TAYLOR, 2000). Cette extrême résistance est à l’origine des maladies et de leur transmission.

C. Hypothèses sur la nature des ATNC

La transmissibilité de la tremblante a été démontrée pour la 1ère fois en 1936 à l’Ecole Nationale Vétérinaire de Toulouse par les professeurs J. Cuille et P.L. Chelle : ils ont injecté par voie intracérébrale un extrait de cerveau d’un mouton mort de la tremblante à un animal sain ; cet animal a développé les mêmes symptômes quelques mois plus tard (CUILLE et CHELLE, 1936). L’infection expérimentale des rongeurs de laboratoire par l’agent de la tremblante naturelle du mouton est encore aujourd’hui un des modèles les plus utilisés pour l’étude de cette pathologie.

Le fait que ces maladies soient transmissibles expérimentalement démontre l’implication de particules infectieuses. Les lésions du système nerveux central propres à ce groupe et l’absence de réaction immunitaire de l’organisme ne correspondent à aucune forme connue d’infections virales lentes chroniques ou d’atteintes auto-immunes. De plus, aucune particule virale ou acide nucléique spécifique n’a été isolée à ce jour dans les fractions infectieuses. En conséquence la notion d’agent transmissible non conventionnel (ATNC) a été introduite, mais de nombreuses discussions portent sur la nature exacte de cet agent infectieux non encore déterminée avec précision.

Les ATNC étonnent par ses propriétés physico-chimiques exceptionnelles, et par l’association intime entre PrPres et infectiosité. Trois grands modèles de réplications ont été développées à ce jour et se basent sur les principaux faits expérimentaux rappelés par DORMONT (2002) : - la taille de l’agent transmissible est comprise entre 15 et 40 nm (PRUSINER et al., 1978) ; - aucun acide nucléique spécifique n’a été isolé à ce jour dans les fractions infectieuses ; - les procédés de dénaturation des acides nucléiques sont sans effet sur les fractions infectieuses (PRUSINER, 1982) ; - les procédés de dénaturation des protéines induisent une baisse significative de l’infectiosité (TAYLOR, 2000) ; - la protéine PrPres est indissociable du facteur de transmissibilité ;

18 - les souris "knock-out" pour le gène de la PrP ne sont pas sensibles aux ESST après inoculation de l’agent infectieux (BUELER et al., 1993) ; - différentes souches d’ATNC ont été identifiées au sein d’une même espèce.

D’après ces éléments, deux théories s’opposent quant à la nature de cet agent infectieux : la théorie virale, et la théorie protéique.

1) Hypothèses virales

Certains auteurs prônent la théorie du virus conventionnel même si cette hypothèse semble peu probable du fait de l’absence de réactions sérologiques et inflammatoires de la part de l’hôte.

Des ARN spécifiques auraient été identifiés dans les fractions infectieuses copurifiées avec l’infectiosité (MEYER et al., 1991). D’après la théorie du virus conventionnel cela pourrait être un rétrovirus (virus à ARN). La conversion de la protéine PrPc en PrPres in vitro est stimulée par la présence de molécules d’ARN spécifiques, suggérant que ces molécules d’ARN pourraient avoir un rôle dans la pathogenèse des ESST. Il s’agit toutefois d’un ARN de l’hôte (DELEAULT et al., 2003).

Toutefois aucune particule virale n’a été mise en évidence dans les fractions infectieuses jusqu’ici (PRUSINER, 1982). Certains auteurs ont donc émis l’hypothèse d’une particule infectieuse entièrement protéique.

2) Hypothèses protéiques

Stanley Prusiner (PRUSINER, 1982) et son équipe ont défini le terme de prion et émis la possibilité de sa nature entièrement protéique. Ce serait une maladie post-transcriptionnelle transmissible du métabolisme de la PrP, aboutissant à son extrême résistance et donc son accumulation dans l’organisme.

Cela implique que la PrPres est l’agent infectieux. La tremblante a pu être reproduite sur des hamsters à partir de PrPres obtenue par synthèse chimique grâce à un procédé d’amplification protéique appelé PMCA (protein misfolding cyclic amplification), avec les mêmes lésions qu’après inoculation par la PrPres naturelle (CASTILLA et al., 2005). Prusiner sous-entend également que la notion de souche (voir chapitre III) est due à différentes conformations de la PrPres, ce que confirme l’équipe de Weissman (TANAKA et al., 2004). Les arguments en faveur de l’hypothèse protéique sont présentés dans le tableau III.

19 Tableau III : arguments pour ou contre l’hypothèse protéique des ATNC.

Arguments POUR CONTRE Ce sont des maladies Les fibrilles amyloïdes peuvent Les maladies amyloïdes ne sont pas amyloïdes induirent la polymérisation de transmises par les fibrilles amyloïdes précurseurs Conversion in vitro Conversion de la PrPc par la PrPres On ne sait pas si la conversion en milieu acellulaire permet l’induction de l’infectiosité Plusieurs souches S’explique par les différentes Souches trop nombreuses chez la d’agents infectieux conformations de la PrPres souris (> 20) pour être expliqué par les conformations de la PrPres Génétique La PrPres peut expliquer les ESST Les rétrovirus ont un déterminisme à génétiques et les ESST infectieuses la fois génétique et infectieux Les mutations de la PrP pourraient augmenter la réceptivité Souris transgéniques Une surexpression de PrP mutant Chez ces souris, il n’existe : entraîne une encéphalopathie - pas de PrPres en Western blot - pas de transmission à la souris normale - pas de maladie sans surexpression Irradiation Cible trop petite pour être un virus Selon les données d’inactivation de selon les calculs théoriques virus de taille connue, la cible est compatible avec un petit virus Composition de l’agent Les fractions infectieuses isolées Les échantillons infectieux contiennent de la PrPres, et trop contiennent des acides nucléiques peu d’ADN pour un virus Les nouveaux virus sont difficiles à On n’a pas retrouvé de particules trouver (exemple : Bornavirus) virales

(Source : CAUGHEY et CHESEBRO, 1997)

Ces théories n’expliquent pourtant pas toutes les découvertes faites sur les ATNC.

20 III. Notions de souches et de barrière d’espèces

A. Notion de souches

On définit le titre infectieux par inoculation expérimentale par voie intracérébrale à l’animal de laboratoire. Dans la mesure où le temps d’incubation est proportionnel à la charge infectieuse, on peut "quantifier" la charge infectieuse dénommée aussi « titre infectieux » en utilisant des méthodes de dilutions limites.

L’inoculation expérimentale de rongeurs de laboratoire a permis de caractériser les différentes ESST. Dans les cas de l’inoculation par voie intracérébrale d’une lignée de souris avec un inoculum donné, on enregistre la durée d’incubation, les symptômes, puis l’encéphale est analysé en histopathologie. A certains endroits clés de l’encéphale, l’intensité des lésions est notée de 1 à 5, ce qui exprimé sous forme de graphique donne le profil lésionnel (figure 5). La période d’incubation varie en fonction de la voie d’introduction de l’agent infectieux et reste constante pour une voie donnée. Dès lors que l’inoculum de départ est constant, la durée d’incubation et le profil lésionnel sont constants pour une lignée de souris donnée. On définit ainsi la notion de souche d’ATNC lors d’inoculation intracérébrale d’un inoculum de départ constant sur animal de laboratoire par : - la durée d’incubation - le profil lésionnel

Figure 5 : exemple de profils lésionnels obtenus sur deux lignées de souris (RIII et tga20) à partir de 3 échantillons d'inoculum : chèvre CH636 souche à identifier, ESB expérimentale sur moutons (ovBSE) et tremblante naturelle chez la chèvre (CH95)

Lesion intensity score : score de l’intensité des lésions Scoring area : aire notée

(Source : ELOIT et al., 2005)

Dans cet exemple (figure 5) les durées d’incubation sont similaires chez la chèvre CH636 à caractériser et la souche issue de moutons infectés expérimentalement d’ESB, mais diffèrent des résultats obtenus avec la souche de tremblante naturelle de la chèvre (CH95). De plus, le profil lésionnel des chèvres atteintes de tremblantes naturelles diffère des deux autres sur la lignée tga20 : 21 cela permet de conclure que la chèvre CH636 est affectée par l’agent de l’ESB et non par une nouvelle souche de tremblante naturelle.

Dans le cas de la tremblante du mouton, plus d’une vingtaine de souches ont été isolées au Royaume-Uni. Jusqu’à une date récente, l’ESB n’avait été associée qu’à une seule souche d’ATNC. Des études récentes menées sur des bovins français suggèrent que différentes souches pourraient exister chez les bovins (BERINGUE et al., 2006).

L’inoculation sur souris est un procédé onéreux et long. Depuis d’autres procédés sont apparus : on peut se servir de Western blot ou de l’ELISA pour différencier certaines souches, par exemple la tremblante naturelle ou l’ESB sur les petits ruminants lorsque les protocoles sont validés.

Cette notion constitue un véritable problème pour les scientifiques. Il est en effet surprenant qu’une seule protéine, si l’on accepte la théorie de la protéine infectieuse, soit à l’origine de phénotypes infectieux distincts. Selon Prusiner (PRUSINER, 1991), la variabilité au sein d’une même espèce pourrait correspondre à différentes formes tertiaires de la protéine PrP. Des études moléculaires explorent la conformation de différentes souches et comment ces conformations peuvent être à l’origine d’effets physiologiques différents (TOYAMA et al., 2007).

B. Barrière d’espèces

L’inoculation expérimentale par voie expérimentale de l’agent infectieux d’une espèce donnée à une autre espèce est possible mais se traduit par une diminution très importante de l’efficacité de la transmission ; la période d’incubation augmente et le nombre d’animaux infectés est inférieur au nombre d’animaux infectés de la même espèce. Ce phénomène définit le concept de barrière d’espèce.

Chez l’homme, les ESST ont un double déterminisme génétique et infectieux. Le génome de l’hôte a donc une part très importante dans la susceptibilité aux ATNC, voire dans l’expression clinique. Le poids relatif de ces deux paramètres reste à déterminer.

Plus généralement la transmission de l’agent infectieux à un individu dépend de : - la barrière d’espèce donc de la souche d’origine et de l’espèce concernée ; - la réceptivité de l’espèce concernée, notamment la prédisposition génétique ; - la dose inoculée ; - la voie d’inoculation (l’efficacité de la voie intracérébrale et de la voie orale diffère d’un facteur 100.000).

22 IV. Physiopathologie de l’infection

A. Pénétration de l’agent pathogène

La voie de pénétration principale de l’agent des ESST naturelles est la voie orale : la transmission per os de la tremblante ainsi que du Kuru et de la MCJ a été reproduite chez des singes (GIBBS et al., 1980). Chez le mouton, l’infectiosité a été détectée dans le placenta (RACE et al., 1998), probable clé de la transmission horizontale de la tremblante naturelle dans les troupeaux de moutons par ingestion du placenta par d’autres brebis.

Expérimentalement ou accidentellement (lors de cas de MCJ iatrogène) les ESST ont été reproduites par voies intracérébrale, orale, sous-cutanée, intramusculaire, intraoculaire, intrapéritonéale et intraveineuse. La voie d’infection la plus efficace demeure la voie intracérébrale, alors que la voie orale, voie de contamination naturelle, s’avère la moins efficace dans le cadre de l’inoculation expérimental.

B. Dissémination

La pénétration de l’agent infectieux dans l’organisme est suivi par une longue phase d’incubation asymptomatique au cours de laquelle l’infectiosité est détectée dans différents organes.

Lors d’une infection expérimentale per os de la souris par l’agent de la tremblante, la PrPres, utilisée comme marqueur de l’infectiosité, est d’abord détectée dans les plaques de Peyer (iléon) et les nœuds lymphatiques mésentériques 45 jours post-inoculation au cours de la phase muette de l’infection. Un à trois mois après, la PrPres devient détectable dans d’autres organes du système réticulo-endothélial (SRE) tels que la rate et les nœuds lymphatiques, à l’interface neuro-immune permettant le passage de l’agent infectieux dans le système nerveux périphérique. L’agent infectieux se propage après une infection orale à partir des plaques de Peyer jusqu’aux nœuds lymphatiques mésentériques par la voie lymphatique (MAIGNIEN et al., 1999).

L’agent infectieux est détecté dans le système nerveux central (moelle épinière et cerveau) 270 jours après l’inoculation (MAIGNIEN et al., 1999). Le système nerveux entérique (via le nerf vague ou le nerf splanchnique) assurerait le transit de l’agent infectieux des organes périphériques jusqu’au cerveau après accumulation dans les tissus lymphoïdes lors d’une infection par voie orale (BEEKES et al., 1998).

Une seconde voie d’entrée dans le système nerveux central (SNC) consiste en une neuroinvasion directe du système nerveux périphérique, par exemple via les terminaisons nerveuses du péritoine, ou par infection directe des cellules des plexus nerveux autonomes associés au tube digestif (ANDREOLETTI et al., 2000).

Les deux voies d’invasion du SNC sont résumées dans la figure 6.

Dans le SNC, la première cible est le noyau moteur dorsal du nerf vague (DMNV), suivi du noyau du tractus solitaire. Ce n’est qu’après que survient l’atteinte de la moelle épinière.

23 Figure 6 : mécanisme de neuroinvasion dans le système nerveux périphérique (SNP)

(Source : DORMONT, 2004)

C. Mode de propagation

La propagation de l’agent infectieux nécessite un type cellulaire assurant le transport et la réplication de l’agent.

Le lymphocyte B est un point esentiel de la neuroinvasion : les mutations qui empêchent la différenciation ou la réponse des lymphocytes B et des cellules dendritiques présentatrices d’antigène préviennent le développement clinique de la tremblante chez la souris infectée par voie intrapéritonéale avec l’agent de la tremblante (KLEIN et al., 1997). Certains composants du système du complément sont également impliqués dans la capture de l’agent pathogène dans le système lymphoréticulaire (KLEIN et al., 2001). Les macrophages empêchent l’agent pathogène de se propager en le séquestrant (MABBOTT et BRUCE, 2001). La protéine PrPc normal de l’hôte est aussi nécessaire à l’infection par la tremblante. En effet des tissus cérébraux dépourvus de PrPc sont résistant à l’infection (BRANDNER et al., 1996). Les cellules dendritiques produisent elles-mêmes la protéine PrP, et la réplication de la tremblante chez la souris dans la rate dépend de l’expression de PrP par les cellules dendritiques présentatrices d’antigène, et non de l’expression de PrP par les lymphocytes (BROWN et al., 1999).

En résumé, après ingestion orale, l’agent de la tremblante entre dans les cellules M de la muqueuse intestinale. Il est ensuite détecté dans les plaques de Peyer : sur les cellules dendritiques présentatrices d’antigènes, dans les macrophages puis dans les ganglions nerveux entériques (MABBOTT et BRUCE, 2001). 24 V. Les ESST humaines

A. Le Kuru

Le Kuru affecte les Fores, peuplade de Papouasie Nouvelle-Guinée. Il a été décrit en 1957 par D.C. Gajdusek et V. Zigas. Cent soixante neuf villages regroupant une population de 35.000 habitants étaient concernés, avec une incidence de 1 à 2 %, soit 300 à 400 morts par an. La maladie débute, après une période d’incubation de 4 à 40 ans, le plus souvent par une ataxie tronculaire, associée à de fins tremblements des extrémités et de la tête, majoré par l’effort. Une paralysie tronculaire, une dysarthrie, une rigidité de type parkinsonien, une exagération des réflexes ainsi qu’une labilité émotionnelle majeure sous forme d’hilarité viennent ensuite accentuer les signes cliniques. La mort survient au bout d’un an (GAJDUSEK et ZIGAS, 1957).

La transmission de la maladie est essentiellement liée au rite funéraire cannibale alors pratiqué : les cadavres étaient dépecés et consommés. Les femmes et les enfants étaient plus atteints, car le cerveau et les viscères, organes les plus riches en agent infectieux leur étaient attribués, alors que les muscles étaient réservés aux hommes (GAJDUSEK, 1977).

Cette maladie a pratiquement disparu depuis l’arrêt de ces rites funéraires en 1957. Le dernier cas a été recensé en 1999, soit après 44 ans d’incubation. Le Kuru n’a jamais été observé ailleurs dans le monde.

Figure 7 : indigènes de la tribu Fores en Papouasie Nouvelle-Guinée en phase clinique de Kuru.

(A) (B)

(A) D. Gajdusek et S. Zigas examinant une victime du Kuru (B) Une femme en phase clinique de Kuru présentée au milieu de sa famille ; elle présente une ataxie cérébelleuse sévère, une fois assise elle n’est plus capable de se relever seule.

(Clichés : D. Gajdusek)

B. La maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ)

Cette maladie fut décrite avant le Kuru au début des années 1920 par H. Creutzfeldt et A. Jakob. Depuis sa découverte, quatre formes de la maladie ont été décrites : la forme sporadique qui est la plus fréquente, la forme familiale, la forme iatrogène, et le nouveau variant lié à l’épizootie de l’ESB. 25 1) Les formes sporadiques

Cette forme représente 80 à 90 % des cas de maladie de Creutzfeldt-Jakob. Elle atteint majoritairement des individus de 50 à 75 ans des deux sexes sur toutes les parties du monde. L’expression de la maladie commence par des pertes de mémoire, des altérations comportementales et des troubles cérébelleux et visuels, ainsi que des troubles du sommeil, une perte de coordination motrice et un manque d’appétit. L’évolution rapide en 2 à 12 mois se caractérise par un syndrome démentiel. La confirmation se fait par la mise en évidence de la PrP pathologique.

Bien qu’il s’agisse de l’ESST la plus fréquente, son incidence est relativement faible avec environ 1 cas par an par million d’habitants. Une étude rétrospective menée en Europe, au Canada et en Australie entre 1999 et 2002 a recensé 1,67 cas par million d’habitants toutes formes de MCJ confondues, et 1,39 cas par million d’habitants pour la forme sporadique de la MCJ (LADOGANA et al, 2005).

Son origine demeure inconnue, un lien avec la tremblante du mouton a été envisagé mais n’a pas été confirmé.

2) Les formes familiales

La forme familiale représente 5 à 10 % de tous les cas de MCJ ; il s’agit d’une forme génétique.

La clinique est identique à la forme sporadique avec une évolution clinique allant de 1 à 13 mois avant d’aboutir à la mort. Sa transmission se fait selon un mode autosomal récessif, touchant autant les femmes que les hommes. Ces formes familiales sont liées à une mutation du gène PRNP, par exemple au codon 178 (familles finlandaises, françaises, et américaines notamment identifiées), au codon 200 (famille slaves et familles juives d’origine libyennes, grecques et tunisiennes) (BROWN et al., 1991 ; KORCZYN et al., 1991).

3) Les formes iatrogéniques

Plusieurs cas de contamination iatrogéniques sont répertoriés dans la littérature : - utilisation d’électrodes profondes de stéréotaxie (2 cas), - accidents liés à des instruments de neurochirurgie (5 cas), - greffes de cornée (3 cas), - greffes de dure-mère (plus de 110 cas), - traitement par les gonadotrophines hypophysaires (4 cas), - traitement par l’hormone de croissance extractive (plus de 130 cas).

Tous ces cas sont dus soit à l’utilisation de matériel insuffisamment décontaminé entre deux patients successifs, de procédés de décontaminations alors antérieurs à la découverte de l’extrême résistance des ATNC, soit à l’injection périphérique ou à la greffe d’extraits humains (cornée, hormone de croissance..) provenant de personnes en phase d’incubation de la maladie (BROWN et al., 1992).

26 Les signes cliniques sont typiques des ESST humaines, avec ataxie cérébelleuse et une démence apparaissant en premier lieu lors de forme centrale. La période d’incubation dépend du site d’inoculation : les formes centrales ont une durée d’incubation beaucoup plus courtes allant de 10 à 30 mois, alors que les formes périphériques ont une période d’incubation allant de 5 jusqu’à 37 ans (DORMONT, 2001).

4) Le variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob

Les premiers cas d’une nouvelle forme de maladie de Creutzfeldt-Jakob ont été décrits en 1996 sur 10 patients britanniques âgés de 29 ans en moyenne (WILL et al., 1996). Outre leur jeune âge, ses patients souffraient d’une ataxie et de symptômes psychiatriques plus précoces dans le développement de la maladie, avec une prédominance de la démence au stade tardif de la maladie. L’évolution clinique se fait sur 14 mois en moyenne. Sur le plan neuro-histologique, des plaques de "type Kuru" entourés de couronnes de vacuoles appelé plaques florides représentent la caractéristique majeure et spécifique du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. D’un patient à l’autre les lésions présentent une uniformité inhabituelle qui a interpellé les scientifiques. Aucun de ces patients n’avait été exposé à un risque iatrogène et aucune anomalie du gène de la PrP n’a été signalée.

Le variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob est associé à la contamination de l’homme par l’agent de l’encéphalopathie spongiforme bovine (LASMEZAS et al., 1996 ; BRUCE et al.. 1997). Même si les études épidémiologiques ne mettent pas en évidence de transmission par transfusion sanguine de la MCJ sporadique, une étude suggère une transmission possible dans le cas du nvMCJ (LLEWELYN et al., 2004). Peu de temps après, d’autres travaux ont permis de confirmer la détection de PrPres dans le sang de hamsters infectés par la tremblante en phase présymptomatique (SAA et al., 2006).

Figure 8 : nombre de cas d’ESB et de nvMCJ au Royaume-Uni entre 1987 et 2004.

Année (Source : HILTON, 2006)

Le nombre de cas de nvMCJ diagnostiqués entre avril 1996 et décembre 2006 sont regroupés dans le tableau IV.

27 Tableau IV : nombre de cas de nvMCJ dans le monde au 1er décembre 2006.

Pays Nombre de cas de nvMCJ Royaume-Uni 164 France 23 Rép. D’Irlande 3 Italie 1 Hongkong 1* Canada 1* USA 3 Hongrie 1 cas suspect Rép. Tchèque 1 cas suspect Japon 1* Pays-Bas 2 Portugal 1 Espagne 1 *probable origine britannique

(Source : LAVIE P, site internet)

Le pic d’incidence du nouveau variant de la MCJ semble bien derrière nous à présent ; le nombre de cas ne cesse de diminuer au Royaume-Uni depuis 1999. Parallèlement la France a connu son pic d’incidence il y a 6 ans. L’avenir ne semble donc pas inquiétant (BRANDEL et al., 2006).

C. Le syndrome de Gertsmann-Sträussler-Scheinker (GSS)

Le syndrome de Gertsmann-Sträussler-Scheinker est une affection familiale décrite pour la première fois dans les années 1930 sur une jeune autrichienne. Ce syndrome se caractérise essentiellement par une ataxie cérébelleuse, des troubles de la déglutition et de la phonation. Il évolue vers un état grabataire et une démence après une période clinique variable pouvant excéder 50 mois.

Il s’agit d’une maladie héréditaire extrêmement rare, à transmission autosomale dominante, consécutive à une mutation au codon 102 du gène PRNP. L’incidence est de 1 à 10 sujets atteints sur 100 millions d’habitants.

D. L’insomnie fatale familiale (IFF)

Il s’agit d’une maladie décrite en 1985 aux Etats-Unis par R. Medori, extrêmement rare, répertoriée actuellement sur 5 familles seulement avec 7 cas reconnus et 29 cas potentiels (MEDORI et al., 1992). Sa transmission se fait sur un mode autosomal.

Les patients présentent une disparition du sommeil paradoxal, une insomnie rebelle à tout traitement, et une agitation nocturne avec rêves. L’évolution se fait vers un état stuporeux et un coma consécutif à une phase d’hallucination, puis la mort après une évolution clinique de 13 mois en moyenne.

28 VI. Les ESST animales

A. La tremblante des petits ruminants

La tremblante des petits ruminants a été décrite pour la première fois en 1732 sur un mouton (Ovis aries), il s’agit de la plus ancienne ESST décrite au monde. Elle a été décrite sur les 5 continents. Seules l’Australie et la Nouvelle-Zélande en sont déclarées indemnes suite à des mesures draconiennes d’abattage, d’abandon des pâtures (quarantaines de 3 ans) et de mesures de contrôles à l’importation. La tremblante avait été importée en 1950 ; les derniers cas y ont été décrits respectivement en 1952 et 1954 (et accessoirement sur des animaux importés encore en quarantaine dans les années 1970) (DAVIDSON, 2002). La tremblante des petits ruminants a ensuite été décrite sur des chèvres (Capra hircus) (HOURRIGAN et al., 1969).

Malgré son caractère enzootique, son incidence et sa prévalence annuels sont très mal connues partout dans le monde. En France la maladie des petits ruminants n’est à déclaration obligatoire que depuis juin 1996 et se base sur une déclaration des cas suspects par l’éleveur et le vétérinaire sanitaire. Elle figure également sur la liste des maladies notifiables de l’OIE (Organisation Mondiale de la Santé Animale). Des enquêtes postales ont été effectués au Royaume-Uni et aux Pays-Bas auprès des vétérinaires et ont estimé une prévalence respective de 2,7 et 6,1 % des élevages atteints (HOINVILLE et al., 2000). Parallèlement, en France, les résultats des déclarations obligatoires sont présentés chaque année : en 2006, trois cent quarante deux foyers de tremblante ovine et caprine ont été recensés, dont trois cent vingt sept foyers dans des cheptels ovins, regroupant quatre cent vingt trois cas sur un total de plus de 600.000 animaux testés (site du ministère de l’agriculture).

L’expression clinique de la maladie survient sur des brebis âgées de 2 et 5 ans en moyenne, et aboutit à la mort après 2 à 6 mois d’évolution clinique. En plus de symptômes généraux tels qu’un amaigrissement sans perte d’appétit, on observe des symptômes neurologiques regroupés en 4 groupes : - les modifications du comportement : fréquemment reportées, elles sont visibles lors de la traite pour les brebis laitières ; les animaux sont le plus souvent craintifs mais peuvent être à l’inverse agressives. L’éleveur remarque ainsi souvent une attitude anormale. - le prurit (voir figures 9 et 10) : en région dorso-lombaire, céphalique voire sur les membres. La brebis se frotte contre les barrières ou se mordille les membres et présente une toison ébouriffée. - les troubles locomoteurs (voir figure 11) : l’ataxie apparaît plus tardivement. L’éleveur observe une démarche titubante, hésitante ; la brebis chute au sol et peut même rester en décubitus en phase terminale. Les premiers signes sont parfois difficiles à observer en bergerie. - les mouvements anormaux : tels que tremblements, hochement de la tête et hyperesthésie.

Ces différents symptômes sont diversement associés et peuvent varier en intensité ; ainsi distingue-t-on classiquement la forme prurigineuse (scrapie) et la forme nerveuse (tremblante) (SCHELCHER, 2002).

Le diagnostic de certitude se fait par la recherche de la PrP pathologique dans le système nerveux central, notamment dans des zones bien précises du tronc cérébral (bulbe, pont). Les lésions histologiques sont typiques d’une ESST : spongiose du neuropile, vacuolisation des

29 péricaryons neuronaux et parfois présence de plaques amyloïdes. Il n’existe pas de diagnostic ante mortem à l’heure actuelle.

Le déterminisme de la tremblante du mouton est à la fois infectieux et génétique. Depuis 1991, les modifications du gène Prnp prédisposant les moutons à la tremblante naturelle sont connues et les animaux peuvent être génotypés. Les principaux polymorphismes résistants portent sur les codons 136 (Alanine ou Valine), 154 (Arginine ou Histidine) et 171 (glutamine (Q), Arginine ou Histidine). Seuls les allèles ARR sont qualifiés de résistant, à l’inverse des allèles VRQ, ARQ, ARH, AHQ qualifiés de sensibles. La France s’est appuyée sur ces données pour élaborer un plan de lutte génétique contre la tremblante, où les notions de troupeaux suspects et atteints sont définies par l’arrêté ministériel du 27 janvier 2003 (ANDREOLETTI et al., 2002).

Tableau V : génotype PrP aux codons 136,154 et 171 et sensibilité à la tremblante chez le mouton

Génotype Données scientifiques

VRQ/VRQ Très sensibles

VRQ/ARQ, VRQ/ARH, VRQ/AHQ Très sensibles à sensibles

VRQ/ARR Peu sensibles

ARQ/ARQ, ARH/ARH, Sensibles à peu sensibles AHQ/AHQ, ARQ/ARH, ARQ/AHQ

ARR/ARQ, ARR/ARH, ARR/AHQ Très peu sensibles

ARR/ARR Résistants (résistance partielle possible)

(Source : ANDREOLETTI et al., 2002)

Toutefois on ne sait pas si cette "résistance" est réelle ou correspond à un allongement de la durée d’incubation au-delà de l’espérance de vie du mouton.

Le risque maximal de transmission au sein du troupeau se situe lors de l’agnelage. En effet la matière virulente principale est le placenta, avec un risque de passage de l’agent infectieux aux congénères par ingestion. On suspecte aussi une virulence dans les sécrétions nasales et salivaires puisque l’infectiosité est détectée dans les organes tels que les glandes salivaires, les muqueuses nasales et l’intestin, mais aucune virulence n’est détectée dans les fèces, l’urine, la salive, le colostrum, le lait ou même le sperme. Des cas de transmission iatrogène ont eu lieu : un cas via la vaccination contre le Louping-Ill au Royaume-Uni avec un lot de vaccin vecteur de l’agent de la tremblante, et un cas de vaccination contre Mycoplasma agalactiae en Italie (ROBINSON, 1996 ; CARAMELLI et al., 2001).

La transmission de la tremblante naturelle à l’homme n’a pas été mise en évidence au cours des deux siècles derniers. Les enquêtes épidémiologiques n’ont démontré aucun lien entre la tremblante et la maladie de Creutzfeldt-Jakob, cette dernière affection étant présente avec la même prévalence dans les pays atteints ou indemne de tremblante (Australie, Nouvelle-Zélande).

30 Figures 9 et 10 : la tremblante des petits ruminants. Les lésions occasionnées par le prurit provoquent une chute de la toison et parfois des lésions cutanées sévères (Clichés J. Brugère-Picoux).

(8) (9)

Figure 11 : brebis atteinte de tremblante montrant des troubles locomoteurs (tête basse, positions anormales du dos, des membres postérieurs et antérieurs). (Cliché J. Brugère-Picoux).

Figures 12 et 13 : nombre de cas d’ESB au Royaume-Uni au 6 octobre 2006, et en France au 16 janvier 2007.

(10) (11) FVO RU (encardré rouge) : date d’arrêt d’utilisation des farines animales chez les bovins

(Sources : LAVIE P, site internet) 31

B. L’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB)

Le premier cas d’encéphalopathie spongiforme bovine (connue sous la dénomination de « maladie de la vache folle ») a été diagnostiqué officiellement en 1986 au Royaume-Uni, où l’essentiel des cas est recensé. Le point culminant de l’épizootie fut atteint en 1992 avec plus de 37.000 cas répertoriés officiellement. Cette allure quasi épizootique fut à l’origine de conséquences économiques et sanitaires désastreuses, aggravées par la suite par le caractère zoonotique de l’ESB jusque là non mis en évidence. L’enquête épidémiologique a permis de mettre en cause l’ingestion de farines alimentaires riches en protéines, fabriquées à partir de viandes et d’os provenant de carcasses de moutons et de bovins recyclées (15 %), ainsi que des déchets des ateliers d’équarrissage et des abattoirs. En effet, en 1980, le mode de fabrication de ces farines (aussi appelées FVO pour farines de viandes et d’os) a été modifié au profit d’un traitement impliquant un chauffage moins intense et moins coûteux, encore suffisant pour inactiver les micro-organismes connus, mais devenu insuffisant pour détruire l’agent infectieux de l’ESB alors inconnu. On ignore encore si le point de départ est l’intégration dans ces farines de carcasses de moutons contaminés, ou l’intégration de carcasses de bovins présentant une forme sporadique d’ESST jusque là inconnue avec amplification par le recyclage des carcasses.

La voie orale constitue la principale voie de contamination. On ignore encore s’il existe une autre voie de transmission comme pour la tremblante. A l’issue d’une longue période d’incubation comprise entre 2 et 5 ans, l’ESB provoque chez les bovins adultes des troubles nerveux. Ces animaux présentent des problèmes comportementaux de type anxiété, de l’ataxie et de l’incoordination motrice accompagné d’amaigrissement. Les chutes et le décubitus précèdent la mort.

Grâce à ces données, des mesures ont pu être prises pour enrayer l’épizootie : le Royaume- Uni a interdit l’utilisation de farines d’origine animale dès juillet 1988 dans l’alimentation des bovins et des petits ruminants. Le déclin de l’incidence a été observé 5 ans après, ce qui correspond à la période d’incubation de la maladie. Pourtant leur fabrication ne sera interdite qu’en 1990 ; entre temps le Royaume-Uni a poursuivi l’exportation de ces farines vers les autres pays du monde. Leur utilisation dans l’alimentation des porcs et des poulets a encore été autorisée quelques années. L’arrêt total de l’utilisation des farines animales pour toutes les espèces a commencé en 1996 au Royaume-Uni et en 2000 en France (voir figures 10 et 11). Certains organes considérés à risque pour la contamination de l’homme dans la chaîne alimentaire sont retirés du circuit à l’abattoir (voir annexe 1) L’encéphalopathie spongiforme bovine est actuellement en France une maladie à déclaration obligatoire, avec des mesures de détection à l’abattoir (prélèvement et analyse systématique de l’obex).

Même si les caractéristiques anatomocliniques rapprochent l’ESB et la tremblante des petits ruminants, les souches sont totalement distinctes. Des différences importantes sont notées sur la fréquence, le nombre de souches et la répartition des lésions. La susceptibilité génétique n’a pas été mise en évidence chez les bovins contrairement aux ovins, et le mode d’entretien de l’infection ne suit pas le même schéma (FVO pour ESB) (SCHELCHER, 2002).

Les ovins et les caprins sont toutefois sensibles à l’ESB (ELOIT et al., 2005). Une analyse histologique, par Western blot ou par ELISA peut permettre alors de distinguer une souche d’ESB ou de tremblante, comme cela a été le cas pour l’unique cas de chèvre atteinte d’ESB connu à ce 32 jour (en Ardèche en 2002). La mise en place du système de surveillance de la tremblante des caprins (réseau de surveillance clinique, dépistage à l’abattoir) et les mesures appliquées (retrait des farines animales, destruction des organes potentiellement infectieux), permettent d’anticiper les problèmes de santé publique liés à la présence de l’ESB chez les caprins. La circulation de l’agent infectieux de l’ESB parmi les caprins reste très improbable.

L’agent de l’ESB est à l’origine chez l’homme des cas atypiques de maladie de Creutzfeldt- Jakob relatifs au nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob ; il est également à l’origine de cas d’encéphalopathies félines et de cas chez d’autres espèces de bovidés.

C. L’encéphalopathie transmissible du vison (ETV)

L’encéphalopathie transmissible du vison (ETV) est une ESST sévissant dans les élevages de vison d’Amérique (Mustela vison). Le premier cas d’encéphalopathie du vison a été décrit en 1947 aux USA dans une ferme du Wisconsin ; sa transmissibilité a été démontrée plus tard en 1965 par Hartsough et Burger (BURGER et HARTSOUGH, 1965). L’encéphalopathie transmissible du vison a été décrite par la suite dans des élevages au Canada, en Finlande, en Russie et aux Etats- Unis, mais n’a jamais été recensée sur la faune sauvage libre. Le taux de mortalité pouvait atteindre jusqu’à 70 % dans les élevages infectés. L’encéphalopathie transmissible du vison résulte de l’incorporation dans l’alimentation soit de carcasses de moutons atteints de tremblante, soit de carcasses de bovins atteints d’une forme d’ESST non identifiée. Les études épidémiologiques n’ont pas mis en évidence une origine ovine dans les farines, alors que des bovins ont pu être incorporés dans les farines destinées aux visons, ce qui suggère la présence d’une ESST inconnue sur le territoire américain. Le dernier cas a été recensé en 1985 dans le Wisconsin (WILLIAMS et MILLER, 2003).

La période d’incubation est de 7 à 12 mois ; les premiers signes cliniques sont une hyperexcitabilité, une grande agressivité et de l’automutilation. La maladie dégénère en somnolence accompagnée de signes de cécité, puis en paralysie postérieure précédant la mort en 2 à 7 semaines. L’agent infectieux a été retrouvé dans le cerveau, mais aussi dans le muscle des visons atteints. (WILLIAMS et MILLER, 2003).

Le comportement de cannibalisme existant chez les visons d’Amérique a favorisé la transmission dans les élevages, conduisant parfois à des taux de prévalence de 100 %.

D. L’encéphalopathie spongiforme féline (ESF)

Les premiers cas sont apparus au Royaume-Uni sur des chats domestiques en 1990. Depuis une centaine de cas a été répertorié au Royaume-Uni ainsi que quelques cas isolés en Norvège, Liechtenstein et Italie. Ces cas sont liés à l’ingestion de l’agent de l’ESB suite à l’intégration de carcasses de bovins malades dans l’alimentation pour chat. L’inoculation à des souris de laboratoire de l’agent de l’encéphalopathie spongiforme féline et de l’agent de l’encéphalopathie spongiforme bovine présente les mêmes caractéristiques de souches (mêmes durée d’incubation et mêmes profil lésionnel). Chez ces animaux, les signes cliniques apparaissent après 4 ans d’incubation et conduisent à la mort en quelques semaines. Les chats ont présenté des troubles du comportement, une ataxie, une hyperesthésie et des tremblements.

33 Par ailleurs, des félidés sauvages comme des ocelots (Leopardus pardalis), des guépards (Acinonyx jubatus), des tigres (Panthera tigris), et des pumas (Puma concolor) présents dans les parcs zoologiques ont également contracté une encéphalopathie spongiforme (WILLIAMS et MILLER, 2003).

E. Cas recensés sur des ruminants sauvages

Durant l’épizootie de l’ESB au Royaume-Uni, des ruminants non domestiques vivants dans des parcs zoologiques ont aussi été affectés par la maladie. Le premier cas concernait un Nyala (Tragelaphus angasi) avant la découverte du 1er cas de "vache folle". Ensuite la maladie a été décrite sur : oryx (Oryx gazella, Oryx leucoryx, et Oryx dammah), éland (Taurotragus oryx), grand koudou (Tragelaphus strepsiceros), et bison américain (Bison bison). Les études de typage de souches ont confirmé l’origine bovine, avec une transmission porbable par l’alimentation. (WILLIAMS et MILLER, 2003)

Dans le cadre des maladies à prion citées précédemment, la maladie du dépérissement chronique des cervidés ou MDCC apparue jusqu’à maintenant uniquement en Amérique du Nord, a la particularité de toucher la faune sauvage, avec toutes les conséquences que cela implique quand à l’analyse et à la gestion de cette maladie. En effet, l’étude de cette maladie est rendue laborieuse à cause de l’immensité du territoire nord-américain. Il en est de même pour la maîtrise de la maladie, puisqu’on ne peut ni confiner ni même limiter les déplacements des populations de cervidés lors de leur recherche de nourriture ou lors de leurs migrations saisonnières. La propagation de cette maladie mortelle fait craindre aux autorités sanitaires de graves conséquences sur le cheptel sauvage. La transmission à l’homme n’étant pas exclue, le risque encouru pour les chasseurs et les consommateurs de viande de cerfs, très nombreux aux Etats-Unis et au Canada, est donc pris au sérieux.

Les caractéristiques de la MDCC liées, entre autre, à l’atteinte de la faune sauvage, mais aussi à l’efficacité de sa transmission et son risque zoonotique potentiel, justifient l’intérêt qu’on y porte, même au niveau européen. En effet, le principal facteur de risque dans l’émergence de maladies dans la faune sauvage étant l’homme, on ne peut pas exclure une extension du problème à d’autres pays du monde avec la mondialisation et la rapidité des échanges commerciaux. La Commission Européenne a pour cela imposé aux Etats membres la réalisation d’une étude afin de détecter la présence éventuelle de la MDCC sur son territoire.

Les objectifs de ce travail sont de faire un exposé actualisé de la MDCC destiné à un public francophone, notamment au moment où l’Europe et en particulier la France entament un programme de dépistage sur leur territoire. En effet la MDCC est un sujet sensible, notamment dans le cadre d’un risque de transmission pour la santé humaine ; il est donc nécessaire d’anticiper une éventuelle situation à risque. Pour cela, il importe de présenter dans un premier temps les généralités sur la maladie, son histoire, les espèces concernées, et aussi les hypothèses quant à l’origine de la maladie. Ensuite, la physiopathologie sera expliquée au regard des données actuelles, ce qui permet de développer la transmission de la MDCC et sa présentation clinique et lésionnelle. Cela amènera à présenter les outils diagnostics possibles, et les programmes de dépistage à entamer dans un contexte de contrôle de la maladie.

34 DEUXIEME PARTIE : LA MALADIE DU DEPERISSEMENT

CHRONIQUE DES CERVIDES OU MDCC

I. La maladie du dépérissement chronique des cervidés : généralités

En 1967 un cerf mulet (Odocoileus hemionus hemionus) maintenu en captivité dans le centre de recherche sur la faune sauvage de Fort Collins (Colorado, USA) a présenté un dépérissement progressif le menant à la mort. Les chercheurs avaient alors attribué ces signes aux conditions de captivité telles que le stress occasionné par les manipulations ou l’exiguïté du confinement voire à des déficiences nutritionnelles. Ce syndrome a été par la suite reconnu comme un syndrome clinique distinct touchant plusieurs animaux et ayant une pathogénie commune, nommée maladie du dépérissement chronique (WILLIAMS et YOUNG, 1980). Ce n’est qu’en 1978 que l’analyse histologique des coupes d’encéphale a permis d’apparenter la maladie du dépérissement chronique aux encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST). Les coupes d’encéphales présentent en effet des lésions de spongiose caractéristiques des ESST telles que décrites dans la première partie (WILLIAMS et YOUNG, 1980). D’autres espèces ont par la suite été reconnue atteintes de MDCC en captivité puis en liberté : un hybride cerf mulet/cerf de Virginie (Odocoileus virginianus), le cerf à queue noire (Odocoileus hemionus columbianus, autre sous-espèce du cerf mulet) (WILLIAMS et YOUNG, 1980), le wapiti (Cervus elaphus nelsoni) (WILLIAMS et YOUNG, 1982) et très récemment l’orignal (Alces alces) (KREEGER et al., 2006 ; BAETEN et al., 2007). La maladie du dépérissement chronique touchant alors plusieurs espèces de cervidés a été nommée maladie du dépérissement chronique des cervidés ou MDCC (ou CWD pour Chronic Wasting Disease).

A. Espèces de cervidés présentes en Amérique du Nord

La MDCC touche principalement 3 espèces de cervidés présentes en Amérique du Nord : le cerf mulet (Odocoileus hemionus), le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus), et le wapiti (Cervus elaphus nelsoni). Deux autres espèces de cervidés sont également présentes en Amérique du Nord tels que le caribou (Rangifer tarandus) et l’orignal (Alces alces) ; en 2007 deux cas de MDCC sur des orignaux dans la région enzootique du Colorado ont été confirmés (KREEGER et al, 2006 ; BAETEN et al., 2007), mais jusque là aucun cas sur des caribous n’a été détecté. Les autres ruminants domestiques pourtant sensibles aux maladies à prion n’ont pas été contaminé malgré un contact prolongé étroit avec des cervidés malades (dans des centres de recherches) : mouflon du Canada (ou mouflon d’Amérique) (Ovis canadensis), mouflon d’Europe (Ovis musimon), antilope indienne (Antilope cervicapra), chèvre des Montagnes Rocheuses (Oreamnos americana), et bovins, ovins et caprins domestiques (WILLIAMS et MILLER, 2002).

1) Taxonomie et description des cervidés

Les cervidés sont des ongulés appartenant à l’ordre des Artiodactyles (ordre de mammifères dont le nombre de doigts est pair tels que les suidés, bovidés, cervidés, etc.…). La famille des Cervidés appartient au sous-ordre des Ruminants, au même titre que les Bovidés, et comporte 4 grandes sous-familles, 17 genres, 40 espèces et près de 200 sous-espèces

35 dans le monde (voir annexe 2). La Maladie du dépérissement chronique concerne actuellement 2 sous-familles : - la sous-famille des Cervinés () comprend le wapiti (Cervus elaphus nelsoni) et ses douze sous-espèces ainsi que le cerf rouge ou cerf européen (Cervus elaphus elaphus), ces 2 espèces étant considérées comme conspécifiques selon certains scientifiques. On retrouve aussi dans cette sous-famille le daim ou fallow deer (Dama dama). - la sous-famille des Odocoileinés (Odocoileinae), et plus précisément le genre Odocoileus propre au nouveau monde, comprend le cerf mulet (Odocoileus hemionus) et le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus). Cette sous-famille comprend aussi les 2 autres principales espèces de cervidés présentes en Amérique du Nord : le caribou (Rangifer tarandus) et l’orignal (Alces alces).

Les cervidés sont caractérisés par le port de bois chez le mâle ; il s’agit d’excroissances osseuses fourchues qui tombent tous les ans.

• Le wapiti Le wapiti (voir figure 14, C) est le plus gros des cerfs élaphes. Un mâle adulte peut mesurer 1m 50 et 350 kg. Il est plus gros que son cousin d’Europe. Sa robe est brun rougeâtre en été et brun foncé en hiver. Il est caractérisé par sa ramure très impressionnante. Il fait partie des cerfs dits « nobles ». Le wapiti vit en moyenne 14 ans en nature, et 25 ans en captivité. Il existe une confusion possible concernant son nom en anglais : il est appelé "elk" par les américains et "wapiti" par les anglais, or ces derniers utilisent le terme de "elk" pour désigner l’élan appelé "moose" par les Américains et orignal par les québécois. "Wapiti"vient des langues amérindiennes et signifie « croupe blanche ».

• Le cerf de Virginie Le cerf de Virginie (voir figure 14, B) est le plus petit des 3 cervidés présents en Amérique du Nord ; les mâles adultes peuvent dépasser 1 mètre au garrot et 110 kg. Le pelage est roussâtre en été avec un ventre blanchâtre, et tend vers une teinte grisâtre en hiver. Il est caractérisé par sa « queue blanche » d’où son nom : en effet, lorsqu’il prend la fuite, il relève sa queue dont le dessous est blanc, tout comme ses fesses. Sa durée de vie est de 10 ans.

• Le cerf mulet Le cerf mulet (voir figure 14 A) est un peu plus trapu que le cerf de Virginie. Ses bois comportent plus de subdivisions. De plus, ses oreilles sont plus longues rappelant le mulet d’où son nom. Il peut vivre jusqu’à 16 ans en nature et 25 ans en captivité.

• L’élan ou orignal L’élan ou orignal (voir figure 14 D) est le plus grand des cervidés, il peut atteindre 800 kg, est chaussé sur de longues pattes fines, mais avec un corps très massif. Il est caractérisé notamment par un long museau arqué et un panache de très grande envergure à bois aplati.

• Le caribou Le caribou (voir figure 14 E) est un cervidé de taille moyenne (140-180 kg, 80 à 140 cm au garrot). Il s’agit de la seule espèce de cervidés chez laquelle mâle et femelle portent des bois. Les pieds du caribou ont la caractéristique de s’adapter à la saison, notamment en hiver où le pied l’élargit pour former des « raquettes ». Lorsqu’il se déplace, on entend un cliquetis à plus de 100 m de distance. Cela correspond au glissement des tendons sur les os des pattes. Il peut vivre jusqu’à 15 ans en nature.

36 Figure 14 : les différentes espèces de cervidés présentes naturellement en Amérique du Nord (Photographies personnelles, zoo de St Félicien, Québec (A, C, D, E) et parc du Mont Tremblant Québec (B), automne 2006)

(A) Combat de cerfs mulets (B) Biche de Virginie dit cerf à queue blanche

(C) Wapiti et son harem

(D) Jeune mâle orignal (E) Mâle caribou 37 2) Répartition géographique et habitat

• Le wapiti

Le wapiti est actuellement présent au niveau des Montagnes Rocheuses, à l’ouest des Etats- Unis, d’où son nom américain : Rocky Mountain Elk. Le wapiti a été exterminé dans l’Est de l’Amérique du Nord après l’arrivée des européens (voir figure 15 B). Les populations actuelles sont pour partie les survivantes des destructions passées, mais surtout le résultat de nombreuses réintroductions dans des zones protégées (FELDHAMER et al., 2003 ; MOUTOU, 2005).

Des wapitis nord-américains ont été importés au cours du vingtième siècle en Nouvelle- Zélande (en 1905 à partir probablement du Wyoming) et en Europe (MOUTOU, 2003).

L’habitat du wapiti (comme celui du cerf rouge en Europe) est principalement constitué de forêts de type mixte en plaine ou en montagne, plutôt caducifoliées avec chênes et hêtres.

• Le cerf mulet

Le cerf mulet (voir figure 15 A) est présent dans la moitié Ouest de l’Amérique du Nord ; il est retrouvé du nord du Canada jusqu’au Sud au Mexique, le long des Montagnes Rocheuses. Il touche l’océan Pacifique au niveau de la Californie. Au Canada il est présent dans les provinces de Colombie-Britannique, du Saskatchewan et de l’Alberta. Vers l’Est il ne dépasse pas le 100ème méridien. (FELDHAMER et al., 2003).

Le cerf mulet vit plutôt dans les prairies avec peu de relief et peu de végétation. Il se contente de taillis et de jeunes plantations forestières où il peut brouter. Le cerf mulet est adapté aux régions arides (par exemple Arizona) et notamment au manque d’eau ; il est aussi capable d’endurer des climats extrêmes (de -15°C à +30°C).

• Le cerf de Virginie

Le cerf de Virginie (voir figure 15 A) ou cerf à queue blanche, parfois appelé chevreuil au Québec (ou cariacou), se trouve dans toute l’Amérique, du Nord (Canada, Etats-Unis, Mexique) au Sud (Colombie, Equateur, Venezuela, Pérou, nord du Brésil et Guyane) en passant par l’Amérique Centrale. Il est absent de l’ouest de Etats-Unis au-delà des Montagnes Rocheuses. Il a également été introduit en Europe, en Nouvelle-Zélande, à Cuba et dans d’autres îles des Caraïbes. En Europe il a été introduit plus précisément dans la République Tchèque, la Serbie, la Croatie et la Finlande d’où il a ensuite été exporté en Bulgarie et en Union Soviétique. La population la plus importante de l’Europe se trouve actuellement en Finlande (MITCHELL-JONES et al., 1999 ; FELDHAMER et al., 2003).

Le cerf de Virginie se trouve surtout les lisières des forêts peu épaisses. Il aime les taillis et les buissons à proximité de l’eau. En été, à peu près toute étendue boisée ou broussailleuse qui offre une pâture abondante peut leur servir d’habitat. En hiver, ils se rassemblent dans des quartiers d’hivernage (appelés aussi « ravages »). La migration de leur habitat d’été vers leur lieu d’hivernage les oblige parfois à parcourir de nombreux kilomètres.

Ces 3 espèces de cervidés ont des aires de répartition communes, notamment au niveau des Montagnes Rocheuses, principalement dans les états du Colorado et du Wyoming. Il n’y a pourtant pas de compétition entre ces espèces, car elles n’investissent pas le même habitat (voir tableau VI). 38 Tableau VI : habitats des 3 principales espèces de cervidés atteintes de MDCC

Cerf mulet Cerf de Virginie Wapiti

Terrain Montagnes et plaines, Plateau ou riverain des Montagnes et forêts prairies corridors urbains mixtes de feuillus

Alimentation ramilles, écorce, de feuilles, ramilles, plantes plantes herbacées, fruits feuilles et de fruits herbacées, champignons et et champignons fruits

Localisation A l’ouest A l’est et au centre A l’ouest

(Source : FELDHAMER et al., 2003)

Par exemple dans l’aire dite enzootique située à la frontière est du Colorado et du Wyoming se trouvent les 3 espèces des cervidés, mais selon leur préférentiel elles n’utilisent pas forcément les mêmes espaces.

• L’orignal

L’orignal (Alces alces) est présent en Amérique du nord, au Canada et en Alaska (voir figure 16 B), et en Eurasie, dans ce qu’on appelle la Boréalie, sous le nom d’élan. L’orignal occupe la forêt canadienne des frontières de l’Alaska jusqu’à la pointe est de Terre-neuve et du Labrador. Son habitat est la forêt de type boréal ou feuillu en climat sub-arctique à tempéré. L’orignal se nourrit essentiellement d’herbe, mais aussi de plantes aquatiques (de rivière ou de lac), d’écorces, de feuillages, de mousses et de lichens.

• Le caribou

Le caribou (Rangifer tarandus) est présent également dans le nord du Canada (voir figure 16 A) et dans le nord de l’Eurasie sous le nom de renne. Depuis la colonisation, la limite méridionale de l’aire de répartition des caribous a reculé vers le nord, et ce recul se poursuit encore aujourd’hui. Son habitat va de la forêt à la toundra lors des migrations d’été. Il se nourrit de lichens, de mousses, de fruits, d’herbes, de champignons, de racines, d’écorces, de feuilles et de ramilles. Jusque là les analyses n’ont pas détecté de caribous positifs à la MDCC (LAPOINTE, 2002), mais les effectifs testés sont très restreints (95 individus) en regard du nombre d’individus présents au Canada.

• Le cerf élaphe

Le cerf rouge ou cerf élaphe, cousin du wapiti, se rencontre dans toute l’Europe, de l’Europe occidentale (France, Espagne, Royaume-Uni, Corse et Sardaigne etc..) en passant par l’Europe centrale et les pays scandinaves jusqu’à l’Asie mineure (région du Caucase, de l’est de la mer Caspienne et le Cachemire). Une population est même présente au Maghreb à la frontière nord entre l’Algérie et la Tunisie ; il n’y a aucun chevauchement d’habitat entre les wapitis et les cerfs rouges.

39 Figure 15 : répartition sur le territoire américain du cerf mulet et du cerf de Virginie (A), et du wapiti des Montagnes Rocheuses (B)

A B Légende carte A : Légende carte B : en rouge : cerf de Virginie en orange : répartition actuelle du wapiti des en Orange : cerf de Virginie et cerf mulet Montagnes Rocheuses en jaune : cerf mulet en vert clair : répartition antérieure en pointillé : cerf à queue noire (sous-espèce de cerf , Manitoban elk, Tule elk : autres sous- mulet) présent sur la côté ouest espèces de wapitis.

(Sources : www.deer.uk.com.jpg et http://www.rmef.org/pages/elkrange.html )

Figure 16 : répartition en Amérique du nord du caribou (A), et de l’orignal (B)

A B Légende A : en rayure : aire de répartition des sous- Légende B : en gris : aire de répartition de l’orignal espèces de caribou (Sources : http://www.hww.ca/index_f.asp)

40 3) Densité de population et nombre d’individus

Les effectifs sont difficiles à obtenir au Canada et aux Etats-Unis, sûrement à cause de l’immensité des espaces mais aussi car les effectifs de populations animales sont rarement connus avec précision. Voici quelques chiffres à titre d’indication (MOUTOU, 2005): - les cerfs mulets : selon une estimation récente il y aurait 4 à 5 millions de têtes avec un tableau de chasse d’environ 1 à 2 millions par an. La population était plus nombreuse dans les années 1930 avec 10 millions de cerfs mulets, et 3 millions de cerfs à queue noire. - les cerfs de Virginie : il y aurait 20 millions d’individus, avec un tableau de chasse d’environ 2 à 4 millions par an. - les wapitis : ils sont bien moins nombreux avec seulement 500.000 à 1 millions de têtes, avec un tableau de chasse de 100 à 200.000 animaux par an. Selon certains auteurs le nombre de wapitis présents sur le continent américain avant l’arrivée des Européens aurait été de 13 millions. - le caribou : la population est estimée à plus d’un million de sujet dans le nord du Québec et au Labrador (LAPOINTE, 2002) ; il y en aurait plus de 2,4 millions au Canada. - l’orignal : la sous-espèce présente (Alces alces shirasi) dans la zone enzootique de la MDCC (au croisement Colorado, Wyoming, Nebraska) est assez peu nombreuse car elle fait suite à une réintroduction dans les années 70. Au Colorado, la population est estimée à 1 300 individus (BAETEN et al., 2007).

Les densités moyennes sont aussi difficiles à estimer de ce fait : seuls les réserves fauniques à potentiel de chasse ou les grands parcs nationaux ont des données plus suivies (FELDHAMER et al., 2003) : - le cerf mulet : on estime la densité entre 1,5 et 4,5 animaux par km² avec des maximum de 4 à 7 animaux par km² si le milieu est riche, et au contraire si le milieu est pauvre une densité inférieure à 2 animaux par km². - le cerf de Virginie : une densité moyenne de 4 à 7 animaux par km².

On peut donner à titre d’exemple la densité des individus dans quelques zones géographiques : - la zone enzootique « originelle » regroupant le carrefour du Colorado, du Wyoming et du Nebraska regroupe 62.000 cerfs et 13.200 wapitis, soit une densité de 1,9 animaux par km² - dans le Missouri, la densité moyenne en cerfs de Virginie est évaluée à 6 animaux par km², alors que dans le Wisconsin la densité est nettement supérieure avec 30 animaux par km².

4) Biologie et mode de vie des cervidés

• Les bois de cerf

Les cervidés sont caractérisés par le port de bois sur la tête des mâles ; il s’agit de grandes excroissances osseuses caduques. Les bois des cervidés diffèrent des cornes des bovidés qui sont persistantes et creuses, alors que les bois ossifiés tombent et repoussent chaque année. Seules les femelles caribous peuvent également porter des bois. Les bois tombent chaque année, soit vers la fin de l’hiver soit au printemps selon les espèces, une fois que l’os s’est résorbé à leur base. Quand la résorption est assez avancée, il y a

41 formation de tissu cicatriciel et les bois chutent sans provoquer de saignement. Dès leur chute, un flux sanguin important est dirigé vers les pivots, puis irrigue chaque andouiller (les pointes) au fur et à mesure de la pousse. La croissance s’arrête lorsque la durée du jour commence à diminuer. Pendant le développement, les tissus spongieux se minéralisent pour former un os compact. Le tout est jusqu’à la fin de la pousse, recouvert d’une peau rêche à poils ras, appelée velours, très prisée dans la médecine traditionnelle orientale. L’ossification terminée, le velours se détache par lambeaux et le cerf frotte les bois contre les arbres pour en accélérer la chute.

• La constitution de la société

Les cervidés sont en règle générale des animaux grégaires. Cependant la femelle et le mâle ne cohabitent qu’à l’occasion du rut. La femelle se charge seule de l’éducation des petits. La cellule familiale regroupe en principe une femelle, un jeune de moins de deux ans (bichette ou daguet) et un faon (le petit de l’année). En cas de danger la composition du groupe et le comportement se modifie : le petit groupe peut en rejoindre d’autres et dans ce cas la harde est dirigée par une biche meneuse secondée par celle qui la suit dans la hiérarchie. Les biches forment un groupe cohérent où les dominantes ont un rôle de surveillance, de conduite et de protection.

Le clan des mâles est beaucoup plus lâche : il est constitué d’un ensemble d’individus plus ou moins indépendants où le plus fort domine. Un vieux cerf domine un cerf moins âgé qui lui- même domine à un cerf plus jeune et ainsi de suite jusqu’au daguet nouvellement intégré. On observe des combats entre mâles au moment du rut. Le wapiti est un animal social ; on observe fréquemment des groupes de 5 ou 6 individus en moyenne. Au contraire d’autres espèces de cervidés, les cerfs de Virginie ne se regroupent généralement pas en troupeau. Ils vivent de préférence seuls, surtout les mâles qui s’installent en solitaire ou en petits clans. Si la nourriture vient à manquer, ils peuvent se constituer en bandes cohérentes guidées par un chef. L’orignal est aussi un animal indépendant et solitaire, sauf au moment du rut où il vit en couple. Il ne forme toutefois pas de harem.

• Reproduction

La saison de reproduction a lieu à l’automne, c’est la période du rut. Pendant toute cette période, le mâle veille sur son harem de biches et en expulse tout autre prétendant. On assiste souvent à cette période à des entrechocs de bois lors de combat de mâles.

La période des naissances a lieu au printemps environ 6 à 8 mois plus tard selon les espèces. Les femelles ont tendance à s’isoler pour mettre bas. L’introduction du faon au sein du groupe peut se faire une dizaine de jours après la naissance. Le cerf de Virginie peut laisser son petit sans surveillance pendant des heures. Les faons restent calmes et tapis dans les herbes pendant ces périodes en attendant le retour de leur mère ; leur pelage moucheté et leur absence d’odeur les rendent invisibles aux yeux et au nez des prédateurs. Le cerf de Virginie est une espèce particulièrement prolifique. Certaines hardes de caribous ont la particularité de migrer vers des aires de mises-bas traditionnelles dans la toundra. Les plus grosses hardes observées peuvent compter quelques centaines de milliers d’individus (MITCHELL-JONES et al., 1999).

42 B. Historique de la découverte de la MDCC

Les premiers cas de maladie du dépérissement chronique sur des cervidés ont été répertoriés à la fin des années 1970 dans des centres de recherches sur la faune sauvage dans le Colorado et dans le Wyoming. La MDCC a été décrite chez le cerf mulet (Odocoileus hemionus hemionus), le cerf à queue noire (Odocoileus hemionus columbianus), chez un hybride de cerf mulet et de cerf de Virginie (Odocoileus virginianus) (WILLIAMS et YOUNG, 1980), mais aussi sur des wapitis (Cervus elaphus nelsoni) (WILLIAMS et YOUNG, 1982).

Dès mars 1981 les premiers cas de cervidés sauvages (cerfs mulets, cerf de Virginie et wapitis) présentant la MDCC ont été diagnostiqués dans le Colorado et le Wyoming. Aucun cas de cervidés échappés de ces centres pouvant l’expliquer n’a pourtant été documenté (SPRAKER et al., 1997).

Vingt ans plus tard, le premier cervidé sauvage atteint en dehors de la zone endémique à la frontière du Colorado et du Wyoming est déclaré (voir tableau VII) ; en mai 2001 le Nebraska a déclaré un premier cas de MDCC sur un cerf mulet sauvage découvert dans le sud-ouest de cet état, zone frontalière de la zone enzootique. Depuis 2002, des cerfs sauvages positifs auront été découverts dans le sud-ouest du Dakota du Sud, au sud du Nouveau Mexique, au nord de l’Illinois, dans l’Utah et dans le sud du Wisconsin (PRITCHARD, 2005). La MDCC s’est même étendue encore plus à l’Est dans l’Etat de New York (O’ROURKE, 2005).

Les élevages de gibier ont également été touchés par l’épidémie : le premier élevage de wapitis positif à la MDCC aux Etats-Unis a été détecté en 1997 dans le Dakota du Sud. Depuis, au moins 28 autres élevages de wapitis et 5 élevages de cerfs ont été trouvés positifs dans le Dakota du Sud, dans le Nebraska, dans le Colorado, dans l’Oklahoma, au Kansas, dans le Minnesota, dans le Montana, et dans le Wisconsin (PRITCHARD, 2005).

Des cas ont été détectés en dehors des Etats-Unis : au Canada (provinces d’Alberta et du Saskatchewan) d’abord sur du gibier d’élevage puis du gibier sauvage, et en Corée du sud dans un élevage sur des wapitis importés du Canada (SOHN et al., 2002 ; KIM et al., 2005).

La MDCC s’est aussi étendue à une autre espèce de cervidés, en effet en 2005 et 2006 trois orignaux se sont révélés positifs lors d’un test de dépistage de routine dans la zone endémique (BAETEN et al., 2007).

Jusque là, la MDCC n’a été identifiée qu’aux Etats-Unis et au Canada, à part quelques cas importés en République de Corée, mais la surveillance n’a pas toujours été parfaite en Amérique du Nord, et on peut considérer l’absence de la MDCC dans les autres pays du globe comme fictive (BUNK, 2004).

Le site internet ”Chronic wasting disease Alliance” met en ligne dans « News et Update » les derniers résultats du programme de dépistage que mènent les Etats. On a aussi accès au lien pour chaque Etat au site Internet du département responsable de la MDCC.

43 Tableau VII : chronologie des événements liés à la MDCC

Année Evénement

1967 • Première reconnaissance d’un syndrome clinique appelé « dépérissement chronique » chez un cerf mulet captif à Fort Collins au Colorado

1978 • La MDCC est reconnue comme étant une encéphalopathie spongiforme grâce à l’histologie

• Diagnostic de MDCC sur un cerf mulet captif et un cerf à queue noire dans le Wyoming.

• Arrêt des échanges et des mouvements d’animaux dans le Colorado

1979 • Diagnostic de MDCC chez un wapiti captif à Fort Collins au Colorado

• Diagnostic de MDCC chez un cerf mulet dans un zoo en Ontario (la MDCC n’y a pas persisté)

1981 • Diagnostic sur un wapiti sauvage dans la région endémique du Colorado

1985 • Diagnostic sur un cerf mulet sauvage

1990 • Diagnostic sur un cerf de Virginie sauvage

1996 • Diagnostic sur un wapiti d’élevage au Saskatchewan (Canada)

1997 • Diagnostic sur un wapiti d’élevage au Sud Dakota

2000- • Diagnostic de MDCC sur des cerfs mulets sauvages au Saskatchewan, possiblement secondaires aux cas de wapitis atteints dans les élevages 2001 • Diagnostic de MDCC sur des cerfs mulets sauvages au Nebraska dans l’aire contiguë avec le Colorado et le Wyoming

2001 • Diagnostic de MDCC sur un wapiti en Corée du Nord importé du Canada en 1997

2002 • Diagnostic de MDCC sur des cerfs de Virginie sauvages au Sud du Wisconsin

• Diagnostic de MDCC sur des cerfs de Virginie sauvages au Nouveau Mexique

2005 • Diagnostic de MDCC sur un orignal sauvage dans l’aire enzootique du Colorado

(Source : site internet Chronic wasting disease alliance)

44 C. Répartition géographique de la MDCC et évolution

1) Répartition géographique en Amérique du Nord

L’aire enzootique dite "d’origine" correspond à la zone où les premiers cas ont été diagnostiqués : sur des animaux captifs dans les centres de recherche sur la faune sauvage dans le Colorado et le Wyoming, et sur les animaux sauvages dans la même région contiguë du nord-est du Colorado et du sud-est du Wyoming dans des rayons de 50 km autour de ces centres de recherche.

Une vingtaine d’années plus tard, des cas sauvages ont été recensés dans des régions frontalières de la zone endémique : d’abord dans le coin sud-ouest du Nebraska qui est frontalier de la jonction entre le Colorado et le Wyoming, puis la zone s’est étendue plus au nord du Wyoming jusqu’à englober le coin sud-ouest du Dakota du Sud et plus à l’est dans l’Utah le long de la frontière avec le Colorado (voir figure 17).

D’autres foyers ont aussi été recensés le long des Montagnes Rocheuses dans l’Alberta (Canada) et dans le Saskatchewan (Canada) et au sud du Nouveau-Mexique. Par la suite, des foyers ont été signalés également à l’est du Mississipi sans continuité apparente avec les foyers déjà identifiés : un foyer à la limite du Wisconsin et de l’Illinois, en Virginie et dans l’état de New York.

Les foyers de cervidés sauvages et de cervidés d’élevage semblent suivre une évolution parallèle à l’échelle du pays. Cependant les foyers de cervidés sauvages atteints ne sont pas immédiatement autour des élevages atteints, comme par exemple dans le Wisconsin où il y a une distance d’au moins 130 km entre les premiers et les seconds (JOLY et al., 2003). Les cas de cervidés sauvages atteints de MDCC dans le Saskatchewan seraient dus à l’excès de MDCC dans les élevages de wapitis dans cette province (WILLIAMS et MILLER, 2002).

La répartition est plutôt focale, et non homogène sur un territoire, ce qui rend son dépistage d’autant plus difficile au regard des vastes territoires américains.

45 Figure 17 : répartition des cas de MDCC en Amérique du Nord sur cervidés sauvages et captifs (mise à jour le 2/08/2006)

Légende : - En rouge : zone de répartition de la MDCC sur cervidés sauvages - En gris : états où la MDCC a été trouvée sur une population de cervidés captifs - ( ) : nombre de troupeau infecté captif dans l’état en question. La plupart des foyer a été éliminée. (Source : site internet Chronic wasting disease alliance)

2) Répartition géographique mondiale

Du fait de l’expansion importante de la MDCC en Amérique du Nord, et de son importation en Corée du Sud, d’autres pays ont entamé des programmes de dépistage. Ainsi le Japon a mis en place une surveillance passive des espèces autochtones (le cerf sika Cervus nippon), c’est-à-dire sur des animaux accidentés ou cliniquement suspects (KATAOKA et al., 2004). En Europe actuellement, l’Allemagne, la Belgique et l’Italie ont entamé un dépistage de la maladie sur les espèces de cervidés les plus représentées en Europe : le cerf rouge (Cervus elaphus), le chevreuil (Capreolus capreolus), et le daim (Dama dama) ; jusque là aucun cas positif n’a été déclaré (ROELS et al., 2005 ; DE BOSSCHERE et al., 2006 ; SCHETTLER et al., 2006).

En Europe la Commission Européenne impose aux Etat membres la réalisation d’une étude afin de détecter la présence éventuelle de la MDCC sur les cervidés européens (Décision 2007/182/CE). Ainsi la France va-t-elle entamer un programme de dépistage sur son territoire pour l’hiver 2007-2008.

46 D. Incidence et prévalence de la MDCC

L’aspect épidémiologique est encore peu connu chez les cervidés sauvages. Le nombre de cas soumis a tendance à augmenter en passant de moins d’un cas par an à plus d’un par mois depuis les premiers cas en 1981. L’augmentation du nombre de cas positifs par an fait suite à l’intensification des mesures de dépistage. Mais on ne peut cependant pas exclure une incidence et une expansion de la maladie plus importantes. Plusieurs Etats américains ont entamé des programmes de dépistage et de suivi de la prévalence de la MDCC sur leur territoire (voir tableau VIII), soit en effectuant un dépistage systématique circonscription par circonscription, soit en effectuant un dépistage aléatoire à partir d’animaux suspects cliniques (amaigrissement, absence de fuite).

Tableau VIII : prévalence de la MDCC sur la faune sauvage : exemples dans quelques Etats.

LOCALISATION ESPECES PREVALENCE

Colorado Wyoming : Cerf mulet 4,9%

aire enzootique (entre 1996 et 1999) Cerf de Virginie 2,1%

Wapiti 0,5%

Colorado Wyoming : Les 3 espèces 0%

aire non endémique

Wisconsin : Cerf de Virginie 3,2%

foyer endémique (18km²)

Wisconsin : Cerf de Virginie 0,73% (en 2004)

sur l’ensemble du territoire 0,69% (en 2005)

Nouveau Mexique Cerf mulet < 20 cas au 28/08/2007

Nebraska (2006) Cerf mulet 17 / 5841 soit < 0,30%

Illinois (depuis le début du dépistage) Cerf de Virginie 189 cas / 28 000

Utah (2006) Cerf mulet, wapiti 7 / 2387 soit < 0,30%

(Sources : MILLER et al., 2000 ; JOLY et al., 2003 ; BERINGER et al., 2003 ; MISSOURI Department of conservation ; WISCONSIN Department of Natural Resources ; site internet USDA)

Globalement, le wapiti a une prévalence moins importante que le cerf de Virginie : l’espèce est-elle moins sensible ? La transmission est-elle moins efficace (plus faible densité d’animaux, caractère plus solitaire des animaux) ? Ces questions sont encore sujettes à discussion. A titre de comparaison, la prévalence de l’ESB au Royaume-Uni entre 1985 et 2003 était de 1,5 % (180 000 cas positifs sur un cheptel de 12 millions). 47 La prévalence est difficile à estimer sur la faune sauvage. Les prévalences données correspondent au nombre de cas positifs sur le nombre d’animaux testés, mais non sur l’effectif total de la population, qui demeure inconnu. En épidémiologie, une extrapolation peut être effectuée à l’échelle de la population si la taille de l’échantillon est suffisante, à condition que le choix de l’échantillon soit aléatoire. Dans le cadre de la MDCC, il y a des biais réels sur le prélèvement des animaux, ces biais n’étant pas toujours connus il est difficile de les corriger dans les modèles épidémiologiques. En effet, la maladie peut provoquer des baisses de vigilance qui pourrait avoir un impact sur la probabilité d’un animal d’être tué à la chasse.

La MDCC a de plus une répartition focale, et il est possible de manquer un foyer. Les dépistages doivent donc être effectués sur un très grand nombre d’animaux (plus de 70 000 dans le Colorado et le Wyoming) avec un quadrillage structuré du territoire.

Dans les zones suburbaines où les animaux se sont concentrés suite au développement urbain, la probabilité d’observation des cervidés malades notamment par les particuliers augmente, aboutissant à des prévalences plus importantes dans ces zones (SPRAKER et al., 1997). Cette urbanisation influence aussi l’équilibre sauvage, que ce soit en diminuant l’aire habitable et en modifiant les aires de consommations et les trajets de cerfs (grillage, chiens) ou en limitant la chasse ou les prédateurs et donc le ratio mâle/femelle. L’existence de nourrisseurs artificiels peut aussi augmenter les contacts et donc favoriser le taux de transmission (FARNSWORTH et al, 2005).

Dans les élevages atteints, la prévalence dépasse 50 % et peut atteindre 100%. Seul l’abattage total permet d’éradiquer l’épizootie dans ces élevages.

E. Circonstances d’apparition et contexte sanitaire

1) Fonctionnement des centres de recherches

Les centres de recherche sur la faune sauvage ont été créés dans les années 1950/1960, et dirigent des programmes de recherche sur l’alimentation, le métabolisme et les maladies des cerfs et d’autres ruminants non domestiques. Les centres de recherche où ont eu lieu ces découvertes géraient des animaux en majorité nés dans les enclos du centre. Les biches gestantes étaient en effet capturés dans la nature puis étaient séparées de leurs petits après la prise de colostrum avant d’être relâchées. Les autres animaux proviennent soit de biches déjà captives et sont donc issus directement du centre de recherche, ou sont des faons orphelins recueillis dans la nature (WILLIAMS et YOUNG, 1980). Aucune alimentation d’origine animale n’a été donnée aux animaux.

Les contacts avec l’extérieur étaient assez irréguliers et restreints, mis à part quelques cas d’introduction de jeunes cerfs adultes dans les enclos. Des contacts étaient possibles notamment à travers les clôtures avec les espèces suivantes : les ruminants sauvages tels que wapiti (Cervus elaphus nelsoni), cerfs de Virginie (Odocoileus virginianus), antilope américaine (Antilocapra americana), mouflons du Canada (Ovis canadensis) et mouflon d’Europe (Ovis musimon), mais aussi les ruminants domestiques tels que bovins, ovins et caprins, et les petits mammifères comme les petits rongeurs (Peromyscus sp., Mus musculus), les lagomorphes (Lepus sp., Sylvilagus sp.), le raton laveur (Procyon lotor), et la moufette rayée (Mephitis mephitica), et diverses espèces d’écureuil (Citellus sp.), chien, chat (WILLIAMS et YOUNG, 1980).

48 Il y a eu beaucoup d’échanges de cerfs et wapitis entre ces différents centres, notamment entre les centres de recherche, où la MDCC avait été découverte, et des parcs zoologiques du Canada et des parcs de collection zoologique du Colorado (WILLIAMS et YOUNG, 1992). Ces échanges permettent d’expliquer une partie de l’expansion dans les élevages et notamment dans les parcs zoologiques. Les échanges entre parcs animaliers sont maintenant soumis à un contrôle dans le cadre d’une certification.

2) Contexte sanitaire

• Tremblante des petits ruminants

Le premier cas de tremblante aux Etats-Unis a été diagnostiqué dans un troupeau du Michigan en 1947. Le propriétaire avait importé plusieurs années auparavant du Canada des moutons d’origine britannique. Dans le Colorado avant les années 1980, seulement un cas de tremblante a été signalé (en 1966), et dans le Wyoming seulement deux (1959 ou plus tôt), dans des localisations éloignées des centres de recherche (WILLIAMS et YOUNG, 1992).

Le service de l’inspection de la santé des plantes et des animaux du département de l’agriculture (Animal and Plant Health Inspection Service (APHIS)) a déterminé la prévalence de la tremblante sur les moutons adultes à l’abattoir qui est égale à 0,2% soit un cas positif sur 500 moutons abattus en 2002 (site internet USDA).

Le Canada se déclare auprès de l’Organisation International de la Santé Animale (OIE) comme également atteint de tremblante sur son territoire, mais ne fournit pas de prévalence.

• ESB :

La découverte de vaches atteintes d’ESB a été faite très tardivement en Amérique du Nord (en 2003) avec actuellement un total de deux cas natifs aux Etats–Unis et onze cas au Canada (site internet de l’OIE). La rareté des cas sévissant sur ce continent permet de qualifier l’ESB comme étant une maladie sporadique sur ce continent. Le dépistage pratiqué par les Etats-Unis ne permet cependant pas de donner une prévalence exacte (un résultat positif pour 40.000 bovins testés). Un projet de dépistage de 200.000 bovins a justement été proposé par l’USDA (département de l’agriculture) pour 1 à 2 ans. Il y a environ 100 millions de bovins aux Etats-Unis. Mais les Etats–Unis et le Canada avait déjà pris des mesures d’interdiction des farines de viandes et d’os provenant d’autres ruminants et avaient aussi déjà supprimé les tissus à haut risque infectieux de la consommation humaine (CHESEBRO, 2004).

Le premier cas d’ESB indigène au Canada concernait un taureau Black Angus de 8 ans présenté en état de maigreur à l’abattoir. Les tissus nerveux de ce cas ont été comparés aux tissus cérébraux de cervidés atteints de MDCC. Les analyses Western blot et de profil moléculaire ont confirmé que la PrPres du cas canadien de ESB et des cas britannique de ESB avaient des propriétés moléculaires similaires en Western blot mais différaient de part leurs caractéristiques moléculaires et immunologiques des cas de MDCC étudié (STACK et al., 2004).

49 3) Impact économique

L’impact économique a d’abord été très important sur les centres de recherche concernés avec des pertes directes en animaux et des pertes indirectes concernant les recherches engagées alors compromises par manque d’animaux.

Suite à l’importance prise par la MDCC, ces instituts ont dû prendre des mesures de contrôle de la maladie incluant le dépistage, le diagnostic post-mortem, et une conduite d’élevage rigoureuse, contraignante et coûteuse avec un contrôle strict des échanges. Des tentatives d’éradication de la maladie dans ces centres basées sur l’abattage total des cheptels atteints et la non utilisation des prairies incriminées pendant une durée déterminée n’ont pas abouti et ont entraîné des surcoûts (WILLIAMS et YOUNG, 1992).

Les élevages atteints de MDCC ont également souffert : l’abattage total du cheptel et la mise en quarantaine des terres occupées par les cervidés sur plusieurs années a un coût énorme pour les éleveurs malgré les aides de l’Etat pour chaque tête abattue. Il y a aux Etats-Unis environ 75.000 propriétaires pour une valeur de 111 millions de dollars US (BUNK, 2004).

La découverte de cas dans ces élevages est de plus un facteur limitant pour l’exportation de cervidés au Canada ; des efforts sont exigés pour rétablir le commerce international. Le contrôle de l’extension de la MDCC au sein des cervidés sauvages requiert alors toute son importance pour la population captive. De même, il faut aussi s’assurer que la MDCC n’entre pas au contact du cheptel bovin. Il est donc essentiel que chaque intervenant du secteur (vétérinaire, garde forestier, techniciens) soit formé à la reconnaissance de la MDCC (BALL, 2002).

50 II. Nature de l’agent infectieux de la MDCC

A. Hypothèses sur l’origine de l’agent infectieux de la MDCC

Plusieurs hypothèses ont été proposées et étudiées pour expliquer l’origine de la MDCC. Cette maladie a été observée pour la première fois dans les années 1960, mais elle aurait été présente depuis au moins deux décennies avant sa première détection (MILLER et al., 2000).

1) Hypothèse d’une mutation spontanée

Il pourrait s’agir d’une mutation somatique spontanée du gène Prnp, en premier lieu chez le cerf mulet, transmis par la suite aux cerfs de Virginie et aux wapitis par contamination de l’environnement. Cependant de telles formes sporadiques n’ont jamais été documentées jusque là chez l’animal, mais seulement chez l’homme (MCJ). La transmission observée chez les cervidés ne s’apparente pas à un mode autosomique récessif, et donc ne correspond pas à cette hypothèse.

2) Hypothèse de l’adaptation de la tremblante

Une souche de la tremblante du mouton pourrait s’être adaptée aux cervidés. La tremblante du mouton a pu être transmise pas voie intracérébrale à des wapitis (HAMIR et al., 2004) : les cervidés sont donc réceptifs vis-à-vis de l’agent de la tremblante. L’homologie du profil lésionnel suggère également une proximité entre l’agent de la tremblante et celui de la MDCC. L’inoculation sur le raton laveur (HAMIR et al., 2003) a permis de distinguer deux souches distinctes, mais des comparaisons supplémentaires sont nécessaires afin d’établir des degrés d’homologie.

Tout du moins il ne semble pas y avoir de lien entre la prévalence de la tremblante et la présence de la MDCC. Par exemple on ne note pas de cas de MDCC au Royaume-Uni, pourtant zone de forte prévalence de tremblante. Mais il peut suffire d’une possibilité de passage.

3) Hypothèse d’une nouvelle souche

La MDCC pourrait aussi être due à une souche de prion jusque là non reconnue et qui se serait propagée chez les cervidés. Cette hypothèse semble difficile à explorer.

L’origine de l’encéphalopathie spongiforme chez les cervidés sauvages, tout comme chez les cervidés captifs, sera en fait impossible à déterminer rétrospectivement (WILLIAMS et MILLER, 2002).

Les deux dernières hypothèses renvoient à la notion de souche.

B. Notion de souche

La notion de souche est définie à partir de deux critères mesurables après inoculation expérimentale de l’agent pathogène à des rongeurs de laboratoire, à savoir la durée d’incubation et le profil lésionnel (voir première partie chapitre III). L’inoculation intracérébrale à des souris faisant office de test de référence.

Le développement de modèles murins exploitables s’est fait récemment dans le cadre de la MDCC. La caractérisation de la ou des souches de MDCC est donc d’actualité. 51 Les premiers essais chez la souris ont permis de distinguer le profil lésionnel de la MDCC par rapport à celui d’autres ESST montrant qu’une souche distincte d’agent pathogène est impliquée (BRUCE et al., 2000). L’inoculation à des ratons laveurs avait notamment permis dans un premier temps de distinguer la MDCC de la tremblante du mouton, les temps d’incubation étant différents (HAMIR et al., 2003).

Des modèles de souris transgéniques pour le gène de la PrP permettent maintenant de comparer les profils lésionnels entre chaque espèce de cervidés : des souris exprimant la PrP du cerf mulet et du wapiti ont ainsi été créées. Ces inoculations ont conclu sur l’existence de l’identité d’un prion cervidé (BROWNING et al., 2004 ; KONG et al., 2005 ; TAMGÜNEY et al., 2006 ; LAFAUCI et al. 2006 ; MEADE-WHITE et al., 2007). Ces études n’ont pas permis de mettre en évidence de façon formelle différentes souches de prion entre cerf et wapiti, ou au sein de chaque espèce mais les résultats tendent à le suggérer. L’analyse du profil moléculaire de la PrPres conclut aussi à l’existence de différentes souches de MDCC (RACE et al., 2002 ; RAYMOND et al., 2007).

Les propriétés spécifiques des souches de MDCC seraient codées par des composants propres à l’agent plutôt qu’à des facteurs endogènes (SIGURDSON et al., 2006).

C. Inoculation expérimentale et barrière d’espèce

L’inoculation expérimentale est le meilleur moyen de savoir si une espèce est réceptive ou non à l’agent d’une ESST. Dans un premier temps, l’inoculation expérimentale par la voie d’inoculation la plus efficace permet de savoir si une espèce est réceptive ou non (voir tableau IX). Cela ne permet en rien d’extrapoler pour la transmission naturelle.

52 Tableau IX : transmissibilité de l’agent de la MDCC à différentes espèces après inoculation intracérébrale.

ESPECES TRANSMISSIBILITE SOURCES

Souris type sauvage Réceptivité limitée, BRUCE et al, 2000

temps d’incubation long (500 jours)

Hamster Réceptivité limitée RAYMOND et al., 2007

Raton laveur Résistance à la MDCC ou période HAMIR et al., 2003 d’incubation très longue

Furet (Mustela putorius furo) Réceptif BARTZ et al., 1998

Singe écureuil (Saimiri sciureus) Réceptif WILLIAMS et MILLER, 2002

Vison (Mustela vison) Réceptif WILLIAMS et MILLER, 2002

Chèvre Réceptif WILLIAMS et MILLER, 2002

Mouton Réceptif HAMIR et al., 2006b

Bovin Réceptif HAMIR et al., 2005, 2006a

Comme c’est le cas avec l’ESB chez les petits ruminants, des tests permettant de distinguer la MDCC de l’ESB sur les bovins ou de la tremblante sur les moutons pourront être développés.

Les études sur la transmissibilité de l’agent de la MDCC consistent aussi à comprendre comment l’agent passe d’un individu à l’autre, c’est-à-dire les modalités de sa transmission, et ce qui se passe dans l’organisme, c’est-à-dire sa physiopathologie.

53 III. Physiopathologie et transmission

La très haute prévalence dans les troupeaux de cerfs et wapitis en captivité et la propagation très rapide dans la nature suggèrent soit une très haute réceptivité des cerfs, soit une transmission très efficace parmi les cerfs avec une agressivité plus importante de cette souche. Ces deux points (réceptivité de l’espèce, et la transmission) seront étudiés successivement.

La nature de l’agent pathogène étant encore sujet à discussion, la progression de l’infection chez l’hôte est étudiée à partir de l’accumulation de la PrPres, dont la présence est fortement corrélée à l’infectiosité dans les autres ESST (RACE et al., 1998).

A. Réceptivité de l’hôte

1) Réponse immunitaire

A ce jour, aucune réaction immunitaire ou inflammatoire n’a été détectée dans le cas d’encéphalopathies spongiformes humaines ou animales ; les cervidés n’y font pas exception. Cela signifie qu’aucun anticorps n’a été détecté. De même la formule numération sanguine n’est pas modifiée sauf par exemple en cas de bronchopneumonie par fausse déglutition, symptôme fréquemment observé lors de MDCC en phase terminale. Dans le système nerveux central, la gliose observée (c’est-à-dire l’activation de la microglie) peut être considérée comme une réaction immunitaire locale.

2) Susceptibilité génétique

Différentes études sur les cervidés ont cherché à déterminer si le génotype des cervidés influence la susceptibilité à la MDCC comme c’est le cas pour la tremblante du mouton ou pour la maladie de Creutzfeldt-Jakob chez l’homme.

• Le wapiti

La séquence du gène de la PrP du wapiti sauvage est hautement conservée, et ne présente qu’un seul polymorphisme au niveau de la séquence des acides aminés au codon 132 (méthionine [Met] ou leucine [Leu]) ainsi qu’une mutation silencieuse au codon 104 (voir tableau X).

Tableau X : présence dans une population d’élevage ou sauvage de l’homozygotie Met/Met au codon 132 sur 20 wapitis atteints de MDCC et 23 wapitis sains.

Type d’animaux Elevage Sauvage

Atteints de MDCC 100 % 74 %

Sains 75 % 47 %

(Source : O’ROURKE et al., 1999)

Ce génotype homozygote Met/Met est surreprésenté de façon significative parmi les wapitis affectés comparés aux individus cliniquement sains dans la nature (p < 0,05).

54 Des hétérozygotes Met/Leu132 ont été trouvés chez des wapitis atteints de MDCC d’élevage, mais pas dans la nature. De même on note l’absence de l’allèle homozygote Leu/Leu132 dans la population atteinte de MDCC. Mais on ne peut pas établir de relation entre l’hétérozygotie ou l’homozygotie Leu/Leu avec la durée d’incubation du fait de notre ignorance de la date d’infection.

La susceptibilité génétique des wapitis n’a donc pu être mise en évidence de façon directe, même si la surreprésentation de l’homozygotie Met/Met au codon 132 pourrait le laisser supposer.

• Le cerf de Virginie

Chez le cerf de Virginie quatre codons variables ont été identifiés, et l’allèle sauvage a pu être mis en évidence (Gln/Gly/Ala/Ser), présent chez 87 % des cerfs sauvages (tableau XI). Des allèles plus rares ont aussi été identifiés.

Tableau XI : variabilité des allèles chez le cerf de Virginie sur 4 codons (95, 96, 116 et 138).

CODON ACIDES AMINES

95 Gln His

96 Gly Ser

116 Ala Gly

138 Ser Asn

Ala = alanine ; Asn = asparagine ; Gln = glutamine ; Gly = glycine ; His = histidine ; Ser = sérine.

(Sources : JOHNSON et al., 2003 ; O’ROURKE et al., 2004)

La surreprésentation d’un allèle dans la population atteinte n’a pas été mise en évidence pas plus que la résistance à la maladie pour aucun des phénotypes majeurs.

Cependant des études menées sur des souris transgéniques montrent une susceptibilité à la MDCC pour l’allèle glycine au codon 96, et une résistance pour l’allèle sérine (MEADE-WHITE et al., 2007 ; TRIFILO et al., 2007).

• Cerf mulet

Le séquençage de l’ADN chez le cerf mulet a mis en évidence un dimorphisme au codon 20 (asparagine [Asp] ou glycine [Gly]) et au codon 225 (sérine [Ser] ou phénylalanine [Phe]) (voir tableau XII).

55 Tableau XII : proportion des différents allèles au codon 225 dans une population de cerfs mulets sauvages chez les individus sains ou atteints par la MDCC.

Allèles Ser/Phe Allèle Ser/ Ser ou Phe/Phe

Animaux sains 9, 3 % 90,7 %

Animaux atteints de MDCC 0,3 % 99,7 %

(Source : JEWELL et al., 2005)

Le génotype Ser/Ser est majoritaire dans la population sauvage, mais aussi dans la population atteinte de MDCC. La probabilité qu’un cerf Ser/Ser225 soit infecté par la MDCC est de 30 fois supérieure à celle d’un 225SF (JEWELL et al., 2005).

En conclusion, on peut dire pour le moment qu’aucune corrélation nette entre le polymorphisme génétique au locus Prnp des trois espèces de cervidés atteintes et la MDCC n’a été mise en évidence. Le développement de modèles murins transgéniques permettra de poursuivre ses recherches plus facilement en permettant des études plus rapides et moins coûteuses, et aussi d’étudier un plus grand nombre d’individus à la fois (TRIFILO et al., 2007).

B. Transmission de l’agent pathogène

En raison des difficultés liées à l’ignorance de la nature exacte de l’agent pathogène responsable et au caractère sauvage des cervidés, le mode de transmission de l’agent infectieux d’un individu à l’autre repose sur des études épidémiologiques réalisées soit à partir des troupeaux d’élevage (MILLER et al., 1998) soit réalisées sur la faune sauvage libre.

1) Transmission verticale ou horizontale ?

L’épidémiologie de la MDCC ressemble très étroitement à celle de la tremblante du mouton et de la chèvre, chez qui la transmission à la fois verticale (maternelle) et horizontale est présente. Il reste toutefois à déterminer l’importance relative de chaque mécanisme pour la MDCC.

Des évidences indirectes en faveur d’une transmission horizontale entre les cervidés ont déjà été présentées (MILLER et al., 1998) à partir de l’étude d’un troupeau de wapitis atteints spontanément dans un centre de recherche.

Une comparaison plus élaborée de deux cohortes de cerfs mulets captifs dont l’une où aucune transmission maternelle ne pouvait avoir lieu montre que la transmission maternelle intervient marginalement, ou pas du tout dans l’apparition de la MDCC dans la cohorte (MILLER et WILLIAMS, 2003). Le caractère solitaire des cerfs et la mortalité élevée à la naissance tend effectivement à diminuer l’importance de la transmission maternelle dans le maintien de la MDCC dans la population. De plus, le contact en peri-partum ne semble pas nécessaire à la transmission de la MDCC. La transmission maternelle pourrait toutefois permettre d’expliquer la récurrence des cas de MDCC dans certains troupeaux de recherche, notamment lors de tentatives d’éradication échouées.

56 La mise en évidence de la PrPres dans les tissus lymphoïdes associés au système digestif, mais pas dans le placenta (SPRAKER et al., 2002b) va dans le sens d’une contamination par voie orale. Si cette maladie est effectivement transmise horizontalement, soit par contact direct soit par contamination de l’environnement, les stations artificielles de nourrissage des cervidés sauvages pourraient avoir contribué à l’augmentation de la prévalence locale par concentration des animaux, notamment dans les parcs du Colorado et du Wyoming (SPRAKER et al., 1997).

La transmission horizontale pourrait être expliquée soit par des contacts directs « mufle à mufle » des animaux, soit par un contact direct via l’environnement même si le prion n’a pu être isolé des déjections ni même du sol (MILLER et al., 1998).

2) Résistance de l’agent infectieux

L’agent responsable des ESST est exceptionnellement résistant à la plupart des agents chimiques, à la radiation et à la chaleur (voir première partie chapitre II. B), l’agent de la MDCC n’y fait pas exception. Cette résistance comprend la résistance aux procédés de désinfection qui sont utilisés dans les laboratoires, salle d’autopsie ou sur le matériel de chirurgie. Les procédés de décontamination doivent donc s’adapter aux nouvelles recommandations de l’OMS.

Les agents responsables de la MDCC sont aussi très résistants dans l’environnement. Dans le cadre de la MDCC, l’agent infectieux peut persister dans le sol et demeurer infectieux plus de 2 ans après le dernier passage de cerfs. La contamination peut avoir lieu à partir d’excréments, d’urine, ou de la décomposition de cadavres, des animaux ayant été mis en contact avec ces différents éléments et ayant développé la maladie (MILLER et al., 2004b). Une étude (JOHNSON et al., 2006) a évalué la capacité de réservoir du sol pour les agents des ESST en étudiant les interactions de la protéine PrPres avec différents minéraux du sol assez communs. Ils ont démontré une adsorption substantielle de la protéine PrPres avec deux minéraux argileux (montmorillonite plus que kaolinite), le quartz et 4 échantillons complets de sol. Ils ont démontré plus particulièrement que l’interaction avec la montmorillonite était très solide, rendant la désorption difficile. Cette adsorption pourrait protéger l’agent de la dégradation du tractus gastro- intestinal chez l’animal vivant, facilitant la transmission. Ils ont notamment fournit l’évidence que les minéraux du sol pouvaient servir de réservoir de l’agent, et que celui restait infectieux (par inoculation sur des souris).

L’extrême résistance de l’agent infectieux pourrait aussi expliquer sa résistance dans le tractus gastro-intestinal dans le cadre d’une transmission par voie orale.

3) Voies d’inoculation

D’autres ESST comme le Kuru, l’encéphalopathie transmissible du vison (ETV), la maladie de la vache folle (ESB) ou la tremblante du mouton semblent être transmis par ingestion de tissus (ou aliments) infectés. Il semble donc que l’agent infectieux soit capable de traverser les muqueuses digestives. Cela fait donc de la voie orale la voie d’accès la plus plausible par laquelle la MDCC serait transmise aux cerfs dans la nature.

Des faons expérimentalement exposés à l’agent de la MDCC par voie orale ont présenté de la PrPres d’abord dans les tissus lymphoïdes drainant les muqueuses orales et intestinales moins de

57 80 jours après l’inoculation. La distribution de la PrPres juste après l’inoculation suggère fortement que l’exposition orale est une voie naturelle d’infection (SIGURDSON et al., 1999). Il semble probable que l’introduction initiale et la propagation de l’agent infectieux puissent se localiser dans les plaques de Peyer et les amygdales, et à l’intérieur des cellules dendritiques migrant via le système lymphatique iléocaecal jusqu’aux nœuds lymphatiques rétropharyngiens (SIGURDSON et al., 1999).

Par extrapolation des expériences d’inoculation de l’agent infectieux de l’Encéphalopathie Transmissible du Vison sur des hamsters, il est probable que la présence de blessures ou éraflures sur la langue permette une infection plus efficace que la voie orale simple. L’agent infectieux se propagerait alors le long du nerf hypoglosse (XII) par transport axonal rétrograde (BARTZ et al., 2003).

4) Sources de contamination/matières virulentes

La contamination à partir d’une source alimentaire commune comme cela a été le cas avec la maladie de la vache folle a été écartée par les études épidémiologiques, autant par celles portant sur les tous premiers cas découverts à Fort Collins (WILLIAMS et YOUNG, 1980) que sur des troupeaux atteints ultérieurement (MILLER et al., 1998). Aucune protéine animale n’a été utilisée pour l’alimentation des cervidés.

Un lien a également été fait dans le cas de la tremblante entre l’infection du système lymphoréticulaire et la haute transmissibilité parmi les moutons. Il est en effet possible que la présence de PrPres dans les tissus lymphoïdes adjacents aux muqueuses favorise la dissémination de l’agent dans l’environnement via les fluides tels que la salive ou les fèces. L’infectiosité pourrait entrer dans le sol via les déjections ou la mue, ou par la décomposition des carcasses. Les cerfs peuvent consommer volontairement ou accidentellement des éléments du sol, à raison de plusieurs centaines de grammes chaque jour (JOHNSON et al., 2006).

Une étude a comparé en environnement clos et indemne 3 modes de transmission sur des cerfs mulets indemnes : - contact avec des cerfs naturellement infectés et encore vivants : il s’agit d’évaluer la transmission par contact direct (salive, mufle à mufle) ou indirecte (fèces, contamination de l’environnement) - carcasse de cerf captif naturellement infecté laissée en voie de décomposition sur place environ 1,8 an plus tôt : il s’agit d’évaluer la contamination de l’environnement des matières virulentes des carcasses (encéphales, etc…) - enclos non nettoyé depuis le passage de cerfs infectés plus de 2 ans plus tôt : évaluation de l’environnement et de la persistance dans le sol de l’agent infectieux malgré les intempéries (pluie, soleil, froid) : fèces, urine etc… . Dans chacun des enclos, des cerfs ont déclaré la MDCC, excepté dans les enclos témoins. Cependant les résultats n’ont pas permis de définir l’importance relative de ces différentes voies d’infection. Il faut toutefois retenir que l’environnement sert de vecteur, et que la concentration d’animaux notamment en période hivernale peut augmenter le taux de contamination (MILLER et al., 2004b).

Il s’avère que la salive transmet l’infectiosité après inoculation par voie orale à des cerfs de Virginie (MATHIASON et al., 2006). Des tests de transmission à des souris transgéniques à partir de salive par morsure ou dans l’eau ont été initiés et sont en attente de résultats (TRIFILO et al.,

58 2007). En effet, la PrPres a été identifiée dans les glandes muqueuses et séreuses en partie dorsale de la langue sur des souris transgéniques infectées oralement par l’agent de la MDCC (TRIFILO et al., 2007). Les interactions cerf/cerf notamment lors de densité élevée de population (comme dans les élevages) pourraient alors expliquer la haute contamination par un contact renforcé avec la salive. Etonnement, ni l’urine ni les fèces se sont révélées infectieux après inoculation par voie orale à l’heure actuelle (MATHIASON et al., 2006). L’infectiosité du sang a également été démontrée après inoculation intraveineuse et intrapéritonéale sur des faons de cerfs de Virginie. Cela pourrait suggérer une possibilité de transmission par les insectes (MATHIASON et al., 2006).

Le mode de contamination des cervidés par l’agent infectieux de la MDCC se fait par voie orale, or comme toute ESST l’accumulation majeure de l’agent infectieux associé aux lésions se fait dans le système nerveux central, il s’agit d’expliquer le passage d’un point à l’autre.

C. Propagation de l’agent infectieux dans l’hôte

1) Propagation dans le système lymphoïde

L’étude de faons inoculés oralement par l’agent de la MDCC permet de détecter les premières cibles de l’agent infectieux dans le système lymphoïde, avant l’infection même du système nerveux central. La PrPres, marqueur de l’infectiosité, est détectée (SIGURDSON et al., 1999) : - dans les centres germinatifs des follicules des nœuds lymphatiques rétropharyngiens, des plaques de Peyer et des nœuds lymphatiques iléo-caecaux dès 42 jours après l’inoculation - dans les amygdales à partir du 78ème jour après l’inoculation - dans le système lymphoïde des muqueuses recto-anales du cerf mulet et du cerf de Virginie (WOLFE et al., 2007).

Les tissus lymphoïdes de cerfs (cerf mulet et cerf de Virginie) ont une plus grande quantité de PrPres que ceux du wapiti et l’incidence de tissus lymphoïdes positifs est plus importante et a une plus large distribution (RACE et al., 2007). Cela influence directement les techniques de dépistage ante mortem de la MDCC chez le wapiti. Ces résultats suggèrent qu’une différence pourrait exister entre la pathogénie de l’infection chez le cerf et chez le wapiti. En effet la faible quantité de PrPres dans les tissus lymphoïdes du wapiti pourrait signifier que l’invasion du système lymphoïde ne précède pas la neuroinvasion, la transmission serait rétrograde (soit par le sang soit par les nerfs). Cette différence observée va de pair avec les études épidémiologiques dans la nature (la prévalence est plus élevée chez les cerfs que chez les wapitis). D’autres facteurs peuvent aussi rentrer en jeu dans la distribution de la maladie comme les différentes interactions sociales, la taille et le type de l’habitat, la densité de population etc….

Les cellules cibles au sein du système lymphoïde sont les cellules folliculaires dendritiques et les macrophages à corps tingibles, notamment au niveau du tractus digestif. Il semblerait que ces cellules soient un lieu de réplication de l’agent infectieux, tout au moins de conversion de la PrPc en PrPres menant à son accumulation (SIGURDSON et al., 2002).

59 Dans le cadre de la maladie du dépérissement chronique des cervidés, l’infection est donc suspectée de survenir après une exposition orale à l’agent causal. Chez les cerfs infectés oralement, la PrP est détectée en premier dans les tissus lymphoïdes associés au tractus alimentaire (SIGURDSON et al., 1999), et par la suite dans le noyau moteur dorsal du vague dans la moelle allongée (SPRAKER et al., 2002b).

2) Propagation dans le système nerveux périphérique

Au niveau des ganglions nerveux et des nerfs, la PrPres a été trouvée en abondance dans (SIGURDSON et al., 2001) : - le tronc vago-sympathique (il inclut les fibres nerveuses vagales du système parasympathique, qui possèdent des corps cellulaires dans le noyau moteur dorsal du nerf vague (ou DMNV) et a des synapses avec le plexus monde de l’intestin grêle), - le plexus myentérique - le tronc sympathique - le ganglion inférieur du nerf vague - la colonne intermédiolatérale de la moelle épinière thoracique

La PrPres n’est pas présente (ou très peu) dans le nerf sciatique, dans le plexus brachial ni dans les ganglions cervicaux crâniaux.

Ces découvertes suggèrent que l’agent infectieux circule par un transport nerveux centripète ou centrifuge : il peut circuler des sites d’entrée digestifs vers le système nerveux central par un transport axonal soit par le système nerveux parasympathique (par exemple du nerf vague au noyau dorsal moteur du vague), soit par le système nerveux sympathique (par exemple du nerf splanchnique à la colonne intermédiolatérale de la moelle épinière). L’arrivée initiale de la PrPres dans le noyau dorsal du vague présente le nerf vague comme une route potentielle pour le transit de la PrPres du site présumé d’exposition dans le tractus alimentaire jusqu’au système nerveux central (SIGURDSON et al., 2001). En revanche l’inaptitude à trouver de la PrPres dans les nerfs périphériques et notamment dans le nerf vague (X) est surprenante. Il se peut que la PrPres y soit en trop faible concentration pour y être détectée (SPRAKER et al., 2002c).

Cependant d’autres routes de transit de la PrPres, comme le sang, les nerfs crâniaux innervant la muqueuse orale (IX, X) ou les nerfs splanchniques, ne peuvent pas être exclus. Dans le cas d’une dissémination hématogène, on attendrait une amplification initiale de la PrPres dans les domaines neuronaux richement vascularisés comme l’area postrema de la moelle allongée. Avec une dissémination à travers les nerfs IX et X pourrait survenir une amplification initiale dans le noyau solitaire.

60 Figure 18 : distribution de la PrPres dans les nerfs sympathiques, parasympathiques, crâniaux et moteurs chez les Cervidés.

Légendes : • → les flèches représentent les sites échantillonnés • Les étoiles indiquent l’incidence de la PrPres positif à l’IHC sur les 6 cerfs étudiés, définis comme le pourcentage de tissus positifs (0=0% ; *=1-50% ;**=51-75% ;***=76-100%) • Abréviations : b = cerveau (brain) ; gg = ganglion de Gasser ou ganglion du nerf trijumeau ; pi = glande pituitaire ; vs = tronc vagosympathique ; n = ganglion inférieur du nerf vague ; cr = ganglion crânial cervical ; bp = plexus brachial ; sy = tronc sympathique ; sp = moelle épinière (spinal cord) ; a = glande surrénale ; c = ganglion coeliaque ; sc = sciatique ; p = pancréas ; i = intestin/plexus monde • Sympathetic = sympathique ; parasympathetic) parasympathique ;motor= moteur ; cranial= cranial ; CNS = système nerveux central

(Source : SIGURDSON et al., 2001)

3) Propagation dans le système nerveux central

L’accumulation de la PrPres dans l’encéphale précède toujours l’apparition des lésions histologiques et des signes cliniques, même si ceux-ci ne sont pas corrélés à l’importance des lésions histologiques (SPRAKER et al., 2002b). La PrPres est détectée dans les racines nerveuses du noyau du tractus sympathique (soit le DMNV) au niveau de l’obex, puis dans le noyau solitaire dans l’obex, suivi de l’hypothalamus, et enfin du mésencéphale, du métencéphale et du télencéphale (SPRAKER et al., 2002b).

Tardivement dans l’évolution clinique, la PrPres a été détectée dans le nerf optique, et dans la rétine, ce qui pourrait affecter la vision des cerfs (SPRAKER et al., 2007).

61 4) Propagation dans le système endocrine

En dehors des nerfs et ganglions, la PrPres a également été retrouvée au niveau du pancréas, confinée aux îlots de Langerhans, dans l’hypophyse au niveau de la pars nervosa et de la pars intermedia, et dans la médullosurrénale. Ces découvertes inattendues suggèrent qu’un transit vectorisé par les nerfs peut aussi survenir jusqu’aux glandes endocrines. Les cellules des îlots pancréatiques sont innervées par le nerf vague, les îlots contenant de la PrPres y sont souvent adjacents, ce qui pourrait suggérer une infection à partir d’un nid commun, comme une innervation avec une branche commune (SIGURDSON et al., 2001). La détection de PrPres dans la médullosurrénale pourrait provenir d’un transport de la PrPres via le nerf splanchnique venant des corps cellulaires de la colonne intermédiolatérale de la moelle épinière. Potentiellement la PrPres peut transiter via les fibres nerveuses de l’hypothalamus jusqu’à la pars nervosa de l’hypophyse. En effet les cerfs ont un dépôt important de PrPres dans l’hypothalamus.

5) Propagation au niveau musculaire

L’infectiosité a également été détectée dans des muscles squelettiques (muscle semi- membraneux et muscle semi-tendineux) de cerfs mulets infectés par la MDCC, grâce à des expériences d’inoculation intracérébrale de muscles à des souris transgéniques. La mise en évidence directe de PrPres dans les muscles squelettiques n’a pas abouti. Toutefois le titre en PrPres dans le muscle est inférieur à celui de l’encéphale (ANGERS et al., 2006). Dans le cas de la tremblante du mouton l’infectiosité dans le muscle a été estimée 5 000 fois inférieure à celle de l’encéphale (ANDREOLETTI et al., 2004).

Les muscles semi-tendineux et semi-membraneux pourraient être une source majeure d’infection. Il semblerait que l’infection des muscles serait secondaire à l’infection du système nerveux. Il reste à déterminer par quelle voie a lieu l’invasion musculaire, avant ou après l’invasion du système nerveux central, via par exemple le système nerveux périphérique ou d’autres systèmes comme le système lymphoïde ou le sang.

La PrPres a également été retrouvée dans le muscle cardiaque (ventricule gauche) chez les cerfs de Virginie et chez les wapitis, mais pas chez les cerfs mulets ni chez les orignaux (JEWELL et al., 2006). Il reste toutefois à déterminer dans quel type sous-cellulaire de myocyte ou fibre nerveuse se trouve accumulée la PrPres, sachant qu’elle n’a pas été trouvée dans les tissus conducteurs ni dans les ganglions nerveux. Cette découverte inattendue pourrait suggérer une dissémination secondaire à partir du SNC vers le cœur, par les nerfs sympathiques et parasympathiques qui innervent le coeur. L’effet de l’accumulation de la PrPres sur le fonctionnement du cœur reste inconnu ; jusque là aucune lésion macroscopique n’a été observée à l’autopsie dans le cœur (WILLIAMS et YOUNG, 1980).

Conclusion : L’accumulation de l’agent infectieux dans l’organisme a d’abord lieu dans les amygdales et les nœuds lymphatiques rétropharyngiens 1,5 mois après inoculation, puis dans l’obex plus de 6 mois après, les lésions histologiques de spongiose n’apparaissent qu’après 15 mois (SIGURDSON et al., 1999).

62 IV. Aspects cliniques et lésionnels

A. Présentation clinique

1) Anamnèse

• Durée d’incubation

On considère que l’âge minimal de mort d’un individu correspond aux durées d’incubation et d’évolution clinique les plus courtes jusque là identifiées : en captivité l’individu le plus jeune mort de la MDCC était âgé de 18 mois, ce qui suggère une durée d’incubation minimale de 18 mois (voir tableau XIII). Dans la nature il est impossible de savoir à quel moment un cervidé a été infecté. La durée d’incubation est donc estimée par la durée s’écoulant entre l’infection par voie orale et l’apparition des signes cliniques lors de l’inoculation expérimentale (voir tableau XIII).

Tableau XIII : durée d’incubation obtenue expérimentalement, et âge de la mort des animaux captifs et sauvages

Cerf mulet Cerf de Virginie Wapiti

Moyenne : 23 mois Infection expérimentale : Min : 15 mois de l’infection orale au Min : 16 mois Min : 12 mois début des signes cliniques Max : > 30 mois Max : > 34 mois

Moyenne : 3-4 ans Moyenne : 4-6 ans Moyenne : 3-5 ans

Age de la mort en Min : 18 mois captivité Max : 9 ans Max : 15 ans

Age de la mort dans la nature 2,5 à 7,5 ans 1,8 à 10,5 ans

L’âge des animaux sauvages est estimé à partir de la dentition.

(Sources : WILLIAMS et YOUNG, 1992 ; SPRAKER et al., 1997 ; WILLIAMS et MILLER, 2002 ; MILLER et WILD, 2004a)

Entre le moment de l’infection et l’expression des symptômes cliniques, il y a une période d’au moins 15 mois sans aucune manifestation clinique. 63 • Influence de l’âge de l’individu

Des individus de tous les âges sont affectés par la MDCC avec une majorité des cas vers 3 ou 4 ans. Dans la nature, la prévalence augmente avec l’âge chez les mâles ; cette tendance n’est pas observée chez les femelles (voir tableau XIV) (MILLER et CONNER, 2005 ; GREAR et al., 2006). Quelques cas ont également été décrits sur des faons : le plus jeune animal sauvage positif en phase d’incubation clinique à la MDCC était âgé de 5 mois (GREAR et al., 2006).

La classe d’âge recensé pour les animaux sauvages atteints de MDCC correspond à la classe d’âge des animaux captifs, il n’y pas de différences notables entre les deux groupes d’animaux (SPRAKER et al., 1997).

• Influence du sexe de l’individu

En captivité, la prévalence de la MDCC est identique chez les mâles, les femelles ou les individus castrés (WILLIAMS et MILLER, 2002). Toutefois, dans la nature, les mâles sont deux fois plus affectés que les femelles chez le cerf mulet, le cerf de Virginie, et le wapiti (voir tableau XIV) (MILLER et CONNER, 2005 ; GREAR et al., 2006).

• Influence de la saison

On observe des cas quelle que soit la saison mais on note malgré tout une mortalité plus importante en hiver probablement due aux conditions climatiques plus stressantes. La prévalence ne semble pas non plus dépendre du cycle sexuel (saison de reproduction ou période de gestation) (WILLIAMS et YOUNG, 1992).

Tableau XIV : tableau récapitulatif de l’influence du sexe et de l’âge des cerfs mulets sauvages

Importance de la prévalence

Critères Importance de la prévalence Par rapport aux :

Mâles (3 à 7 ans) 2,4 fois plus atteints Femelles du même âge

Mâles jeunes (1 à 2 Autant atteints Femelles du même âge ans)

Mâles âgés (5-7 ans) 1,7 à 3,2 fois plus atteints Jeunes mâles

Femelles âgées Autant atteints Jeunes femelles

(Source : MILLER et CONNER, 2005)

Il peut donc s’agir d’individus mâles ou femelles généralement entre 3 et 4 ans, captifs ou sauvages, qui peuvent ne présenter aucun signe clinique particulier si la mort (chasse, abattage) a lieu pendant la période d’incubation de la maladie.

64 2) Les symptômes

Les animaux en captivité peuvent être plus facilement observés que les animaux sauvages : en effet en captivité leur comportement et notamment leurs interactions avec l’environnement (homme, congénères, enclos) peuvent être suivis quotidiennement, alors que les animaux sauvages sont évalués à un moment donné, souvent juste avant la mort (par exemple lors de la chasse).

a. Les symptômes observés en captivité

Les symptômes les plus marquants sont la perte d’état et les changements de comportement. Ces symptômes apparaissent de façon lente, progressive et insidieuse par poussées ; après apparition des symptômes, la mort survient en quelques jours à un an, la majorité des cas survenant entre quelques semaines et 4 mois (WILLIAMS et YOUNG, 1992 : WILLIAMS et MILLER, 2002).

• Les symptômes généraux

Les symptômes généraux incluent la perte de poids menant inévitablement à une cachexie (voir figure 19) puis à la mort. Les animaux maigrissent progressivement, ils conservent un appétit normal pour le grain, mais rechignent à consommer du foin. Le pelage est souvent de mauvaise qualité, la mue ne se fait pas bien, mais on n’observe pas de prurit.

Une majorité d’animaux présente des signes de polyuropolydipsie (PUPD, on les observe souvent le nez dans l’eau) et une salivation excessive (=sialorrhée) (voir figure 19), mais aussi des grincements de dents, une hypotonie des muscles de la face, un port de tête bas, des oreilles tombantes et une anorexie terminale. Sur la plupart des individus affectés, on note une dilatation de l’œsophage et une hypotonie, des difficultés à avaler, des régurgitations du contenu ruminal et un appétit dépravé. Les difficultés apparentes à maintenir le tonus de l’œsophage sont responsables d’une fausse déglutition provoquant une pneumonie (WILLIAMS et YOUNG, 1980 et 1982 ; WILLIAMS et MILLER, 2002).

• Les symptômes comportementaux

Les symptômes comportementaux sont caractéristiques d’une atteinte du système nerveux central. Les observateurs les plus expérimentés peuvent voir relativement précocement des modifications telles que l’apathie, accompagnée d’une dépression. Des symptômes plus subtils peuvent commencer avec en isolement social, des périodes de somnolence où le cerf atteint apparaît pendant quelques minutes debout avec un perte de conscience, le regard fixe, la tête basse avant de reprendre son état de conscience normal ; l’animal marche de façon automatique le long des clôtures.

Au sein du troupeau, les interactions avec les congénères non affectés sont diminuées, de même que les réactions face à des stimuli comme la contention sont anormales, et de l’hyperexcitabilité voire de la nervosité peuvent être notées. Mais malgré ces atteintes du comportement, aucune anomalie du système neurologique sensitif ou moteur n’est observée. Aucun déficit auditif ou visuel n’est relaté (WILLIAMS et YOUNG, 1980 et 1982).

65 • Causes de la mort

La MDCC est inévitablement mortelle, toutefois d’autres éléments peuvent précipiter la mort, secondairement aux symptômes dus à la MDCC. La mort peut survenir soit par une fausse déglutition suivie d’une bronchopneumonie, soit par une déshydratation ou par une hypothermie lors des périodes de froid notamment en hiver. En captivité des morts subites inhabituelles à la suite des manipulations ont souvent été reportées. En fin de parcours, la maladie est souvent interrompue soit par une euthanasie, soit par des complications secondaires comme les bronchopneumonies (WILLIAMS et YOUNG, 1980 et 1982 ; WILLIAMS et MILLER, 2002).

Globalement, chez le wapiti, les symptômes sont plus frustres que chez le cerf (voir tableau XV), l’amaigrissement correspond plutôt à une non reprise de poids après une période d’amaigrissement saisonnière. Le dépistage des wapitis est de ce fait plus difficile à réaliser (WILLIAMS et YOUNG, 1992).

Tableau XV : comparaison des fréquences d’observation des signes cliniques chez le cerf (cerf mulet et cerf de Virginie) et le wapiti

Signes cliniques Cerf (%) Wapiti (%)

Perte de poids/émaciation 100 100

Modification du comportement 100 83

Polyuropolydipsie 77 10

Grincement des dents 58 67

Sialorrhée 50 50

Régurgitation du contenu ruminal 15 0

Dilatation de l’œsophage 13 0

Ataxie 3 10

(Source : WILLIAMS et YOUNG, 1992)

Les deux principaux signes cliniques (amaigrissement et modifications du comportement) sont également des constantes chez le wapiti même si les modifications du comportement demandent plus d’expérience de la part de l’observateur, mais les autres symptômes comme la polyuropolydipsie sont moins prononcés. L’évolution clinique avant la mort est globalement plus longue chez le wapiti que chez le cerf (WILLIAMS et MILLER, 2002).

Dans la nature, les symptômes sont plus subtils.

66 b. Les symptômes observés en liberté

Les animaux en phase clinique de la maladie présentent aussi un amaigrissement sévère avec un poil terne et des modifications comportementales. Les animaux se laissent plus facilement approcher par l’homme (chasseurs, photographes..), et ont un réflexe de fuite diminué face aux prédateurs. Les animaux errent souvent les oreilles tombantes à la recherche de nourriture ou d’eau. Certains chasseurs ont aussi rapporté une salivation excessive.

La mort survient en moyenne plus précocement au cours de l’évolution clinique par rapport aux animaux en captivité. En effet les cerfs sauvages doivent aller à la recherche de leur nourriture, de leur eau ; ils deviennent également plus sensibles à la prédation, et sont confrontés aux situations qui diminuent la longévité des animaux sauvages. Ils meurent souvent de déshydratation (WILLIAMS et MILLER, 2002).

Figure 19 : signes cliniques de la MDCC : émaciation (A), ataxie (B), et salivation chez le wapiti (C) et sialorrhée chez le cerf (D).

(A) (B)

(C) (D)

(Photos : Dr T. Kreeger, Wyoming game and fish department ; Dr E. Williams, University of Wyoming; Dr T. R. Spraker, University of Colorado, USA)

67 3) Caractéristiques hématologiques et biochimiques

Aucune modification significative des constantes hématologiques et biochimiques du sang ou du liquide céphalo-rachidien par rapport aux valeurs de références n’a été relevée, sauf pour les animaux présentant des maladies intercurrentes non reliées à la MDCC (typhlite, arthrite septique, fausse déglutition, abcès, entérite, ulcères abomasaux) (WILLIAMS et YOUNG, 1980 et 1982 ; WILLIAMS et MILLER, 2002).

Les animaux malades en captivité présente une baisse significative de la densité urinaire (entre 1,002 et 1,018 dont 3 inférieurs à 1,006 sur 6 prélevés). Il s’agit de la seule anomalie paraclinique significative. Les animaux sauvages ne présentent pas systématiquement de baisse de densité urinaire. N’ayant pas accès libre à l’eau, ils peuvent mourir en état de déshydratation (WILLIAMS et YOUNG, 1980 et 1982 ; WILLIAMS et MILLER, 2002).

Les analyses sérologiques (toxoplasmose, leptospirose, Brucella arbortus, rhinotrachéite infectieuse bovine (IBR), diarrhée virale bovine (BVD), fièvre catarrhale ovine) ainsi que les analyses des minéraux (sélénium, plomb, cuivre, mercure, molybdène) n’ont donné aucun résultat significatif.

Les signes cliniques et les résultats des examens complémentaires ne sont pas pathognomoniques de la MDCC. Les lésions caractéristiques sont localisées dans le SNC.

B. Aspects lésionnels

1) Lésions macroscopiques

L’autopsie met en évidence un état d’émaciation et les signes de polydipsie. Les cadavres sont classiquement extrêmement maigres, avec une déplétion des réserves de graisse corporelle, une atrophie du tissu sous-cutanée et du tissu adipeux viscéral (voir figure 20) ainsi que des muscles sévèrement atrophiés en toute fin d’évolution (WILLIAMS et YOUNG, 1992). Les cervidés sauvages présentent, malgré une émaciation très marquée, un développement statural et des bois normaux (SPRAKER et al., 1997).

Chez le cerf mulet captif, le contenu du rumen est extrêmement liquide ou mousseux, reflet d’une consommation excessive d’eau. Ces anomalies du contenu ruminal sont moins apparentes chez le wapiti (WILLIAMS et YOUNG, 1992).

Quelques cerfs mulets ont présenté une importante dilatation de l’œsophage rempli de liquide. Cette lésion n’a jamais été observée chez le wapiti.

Une aspiration pulmonaire fatale arrive souvent en fin d’évolution clinique. Parfois on constate aussi des lésions consécutives à un processus secondaire tels que des abcès, une pneumonie, une entérite, un parasitisme compliquant le diagnostic clinique ou pathologique (WILLIAMS et YOUNG, 1992).

Aucune lésion macroscopique du système nerveux central n’est observée.

68 2) Lésions microscopiques

a. Les lésions histologiques

Les lésions histologiques sont observées au niveau du système nerveux central en microscopie optique après fixation des échantillons dans du formol puis coloration hématine-éosine (HE). Les lésions sont décrites chez le cerf mulet, le cerf de Virginie et le wapiti, les lésions de l’orignal n’ont pas encore été décrites.

• La triade lésionnelle des ESST

Les caractéristiques neuropathologiques de la MDCC comprennent des lésions bilatérales symétriques typiques des ESST (FONTAINE et PARODI, 1991 ; WILLIAMS et YOUNG, 1993 ; SPRAKER et al., 2002a) :

- une dégénérescence spongiforme de la substance grise ou vacuolisation du neuropile (spongiose). Les lésions de spongiose sont définies par la formation de vacuoles dans le prolongement cytoplasmique des neurones. Elles apparaissent alors au microscope optique sous la forme d’une vacuolisation du neuropile. Les vacuoles ont un diamètre moyen de 5 à 25 μm, même si certaines peuvent atteindre 70 μm de diamètre. Elles sont souvent multiples, et regroupées en grappe. Leur forme est circulaire, avec un contour régulier et lisse (voir figure 21). - une hypertrophie et une hyperplasie des astrocytes ou hyperastrocytose. Une prolifération de la glie sous forme d’hyperastrocytose accompagne les lésions dégénératives des neurones. L’hyperastrocytose n’est pas utilisé comme critère pour évaluer la sévérité des lésions en routine.

- une perte neuronale.

- une absence d’inflammation ; il n’y pas de signe d’encéphalite.

• La présence de plaques amyloïdes

Il s’agit de plaques irrégulières et éosinophiles ayant les propriétés tinctoriales, immunocytochimiques et ultrastructurales des substances amyloïdes (BAHMANYAR et al., 1985). Au fort grossissement, ces plaques prennent l’apparence de cavités centrales pleines de filaments agencés radialement (voir figure 21). Elles ont une taille d’environ 30 à 100 μm de diamètre ; les diamètres les plus larges sont trouvés dans le cortex cérébral. La grande majorité des plaques est incluse dans des zones où le neuropile contient un certain nombre de vacuoles. Aucune cellule microgliale n’est retrouvée dans les plaques (BAHMANYAR et al., 1985).

Ces plaques sont présentes dans les trois espèces de cervidés atteintes par la MDCC (cerf mulet, cerf de Virginie et wapiti) au niveau de la substance blanche, de la substance grise et dans toutes les couches du cervelet (GUIROY et al., 1991a et 1991b). Pourtant tous les individus ne présentent pas ces plaques ; environ 62% des cerfs mulets captifs présentent des plaques amyloïdes (BAHMANYAR et al., 1985). Chez les souris transgéniques infectées oralement par l’agent de la MDCC, les plaques amyloïdes n’ont pas été observées ; elles n’ont pas semblées indispensables à la maladie (TRIFILO et al., 2007). 69 Figure 20 : émaciation sévère à l’autopsie sur un cerf de Virginie : on note l’absence de graisse mésentérique

(Photo : Dr T. R. Spraker, University of Colorado, USA)

Figure 21 : lésions histologiques en coloration HE : vacuolisation neuronale dans l’encéphale (spongiose) (A) et plaques amyloïdes (B).

(A) (B)

Les plaques amyloïdes sont indiquées par les flèches (B)

(Sources : Dr T. R. Spraker, University of Colorado, USA et WILLIAMS, 2005)

• Topographie des lésions histologiques

Les lésions histologiques sont globalement réparties dans toutes les régions de l’encéphale, mais plus marquées dans certaines zones (tableau XVI).

70 Tableau XVI : répartition des lésions observées à l’histologie dans l’encéphale.

Localisation Types de lésions et particularités Différences cerf/wapiti

TELENCEPHALE : score moyen = faible (1)

Neopallium Lésions spongieuses dans la couche RAS moyenne et profonde

Plaques amyloïdes visible en coloration HE

Rhinencéphale : Bulbe olfactif et tractus olfactif plus Cortex olfactif plus atteint chez sévèrement atteints, vacuolisation du le cerf (sévère) que chez le neuropile (légèrement modéré à sévère) wapiti (légèrement modéré)

DIENCEPHALE : score moyen = faible à modéré (2 à 3)

Thalamus Hyperastrocytose, perte neuronale Noyaux rostraux ventraux et dégénérescence spongiforme ventraux plus sévèrement atteints chez le wapiti

Methalamus : Dommages considérables des noyaux RAS géniculés latéral et médial

Hypothalamus Noyaux supraoptiques et paraventriculaires Lésions sévères chez le cerf plus sévèrement atteints : modérée à sévère (modérée à sévère), plus modérée chez le wapiti

MESENCEPHALE : score moyen = faible (1)

Mésencéphale Colliculi rostraux et caudaux légèrement Dégénérescence spongieuse de involués la substantia nigra chez le cerf

PONT ET MOELLE ALLONGEE : score moyen = faible à légèrement modéré (1 à 2)

Noyau dorsal du nerf vague sévèrement Noyau dorsal du nerf vague plus atteint (modéré à sévère) comparé au noyau atteint chez cerf (sévère) que hypoglossal adjacent faiblement atteint chez wapiti (légèrement (faible) modéré)

CERVELET : score moyen = faible (1)

Lésions plus nombreuses au lingula, uvula RAS et nodulus

MOELLE EPINIERE : score moyen = faible (1)

Vacuolisation des neurones dans la corne dorsale

(Sources : WILLIAMS et YOUNG, 1993) 71 Les lésions les plus sévères sont dans : - le noyau dorsal du nerf vague (DMNV), situé dans le tronc cérébral au niveau de l’obex ; - le noyau solitaire dans le myélencéphale ; - le cortex olfactif ; - l’hypothalamus ; - le thalamus.

D’autres régions sont également affectées plus faiblement : le mésencéphale, la protubérance annulaire et le bulbe rachidien, le cervelet, le cortex cérébral, l’hippocampe et e noyau basal. La durée des signes cliniques ne semble pas influer sur la répartition des lésions ou leur sévérité.

Aucune lésion n’a été trouvée dans les autres organes du corps (SPRAKER et al., 2002a).

b. Lésions ultrastructurales neurologiques

Le système nerveux central peut aussi être observé en microscopie électronique avec des agrandissements de X 10 000 à X 20 000 permettant de voir l’aspect des organites. On observe ainsi les lésions suivantes (GUIROY et al., 1993) :

• vacuoles de spongiose

Les vacuoles spongiformes sont les observations les plus frappantes en microscopie électronique. Elles sont de tailles et de formes variées et localisées à l’intérieur du neuropile. Ces espaces, entourés par des membranes, contiennent entre autre des vacuoles secondaires. Les vacuoles sont prédominantes dans les éléments neuronaux. Elles sont parfois engainées à la fois par des astrocytes et par les macrophages.

• gliose par astrocytose

On observe des astrocytes proliférants et hypertrophiques avec un cytoplasme rempli des filaments intermédiaires : cela forme des paquets de fibres gliales parallèles les unes aux autres.

• dystrophie des neurites

On remarque la présence de neurites dystrophiés contenant de nombreux organites, plus particulièrement des mitochondries montrant des signes de dégénérescence. Les neurites dystrophiés sont soit des dendrites, soit des axones terminaux ou préterminaux (non myélinisés), soit des segments axonaux (myléninés) adjacents aux vaisseaux sanguins ou aux processus astrocytiques.

• vacuoles autophagiques

Des petites ou grandes vacuoles autophagiques sont observées principalement dans le cortex cérébral (voir figure 22). Le cytoplasme séquestré contient des ribosomes, des lysosomes secondaires, des mitochondries, des vacuoles et des vésicules.

72 Figure 22 : une vacuole autophagique neuronale géante vue au microscope électronique (x 10 000)

(Source : GUIROY et al., 1993)

Les changements ultrastructuraux décrits ci-dessus contribuent à la perte neuronale. Mais le mécanisme de dégénerescence neuronale n’a pas été élucidé clairement. Les vacuoles intraneuronales et la dystrophie des neurites pourraient intervenir dans ce processus. Les vacuolisations pourraient être issues d’un nettoyage focal du cytoplasme transformé en vacuole (GUIROY et al., 1993).

c. L’accumulation de PrPres

Lors d’encéphalopathie spongiforme, la PrPres s’accumule dans certaines parties du système nerveux central.

La répartition de la PrPres est détectée grâce à des techniques d’immunohistochimie (voir deuxième partie chapitre V. C. 2), la quantité de PrPres est alors proportionnelle à l’intensité de la couleur obtenue.

La répartition de la PrPres est présentée dans la figure 23 en suivant l’avancement chronologique de la MDCC au niveau de l’encéphale. Il semble que les animaux au stade terminal de la maladie présentent une accumulation plus importante de PrPres dans l’encéphale que les animaux en stade subclinique (PETERS et al., 2000).

73 Figure 23 : répartition de la PrPres (en immunohistochimie IHC) et des lésions histologiques (SE) chez le cerf mulet sauvage dans l’encéphale.

Les différentes tons de gris indiquent la sévérité, plus le gris est foncé plus les modifications sont intenses. (Source : SPRAKER et al., 2002b)

74 Dans ce modèle de répartition de la PrPres et des lésions histologiques, Terry Spraker distingue 4 niveaux de distribution de la PrPres dans l’encéphale chez le cerf mulet sauvage (SPRAKER et al., 2002b) (voir tableau XVII) et cinq presque identiques chez le wapiti (SPRAKER et al., 2004). Ces différents niveaux traduisent l’évolution de l’accumulation de la PrPres dans l’encéphale.

Tableau XVII : présentation des catégories regroupant 4 modèles de répartition de la PrPres sur les cerfs mulets sauvages selon T. SPRAKER.

Age moyen du Localisation de la PrPres groupe Catégorie 1 1,5 à 2, 5 ans Quelques follicules des amygdales seulement Pas de PrPres au niveau de l’encéphale Catégorie 2 1,5 à 5 ans Amygdales Noyau moteur du nerf vague Catégorie 3 3,5 à 5 ans Amygdales Noyau moteur dorsal du nerf vague Noyau solitaire Hypothalamus Catégorie 4 Non Amygdales significatif L’encéphale (télencéphale, mésencéphale, métencéphale, moelle épinière)

(Source : SPRAKER et al., 2002b)

La PrPres est principalement retrouvée dans la région du noyau dorsal moteur du nerf vague et dans le noyau solitaire du myélencéphale, qui sont les premières régions affectées. La PrPres est aussi retrouvée dans le reste du myélencéphale, le diencéphale et le rhinencéphale. La raison pour laquelle le noyau moteur dorsal, le diencéphale, et le cortex olfactif sont les localisations les plus souvent sévèrement atteintes est inconnue. Une hypothèse est que ces aires spécifiques de l’encéphale pourraient être le reflet d’une vulnérabilité sélective des cellules de ces noyaux en particulier à la PrPres.

La PrPres n’est pas retrouvée dans le système nerveux périphérique que ce soit dans les ganglions mésentérique, trijumeau, ou les nerfs périphériques tels que le plexus brachial, le nerf vague. Les follicules lymphoïdes des amygdales, des nœuds lymphatiques viscéraux et périphériques ainsi que et les plaques de Peyer sont fortement positifs à l’IHC. De même, les follicules lymphoïdes situés dans le septum nasal postérieur sont fréquemment fortement positifs. En revanche la moelle osseuse et le thymus sont négatifs.

Il y aurait une progression dans le dépôt de la PrPres depuis les tissus lymphoïdes jusqu’à l’encéphale, suivi du développement des lésions histologiques (SPRAKER et al., 2002b).

Le diagnostic de la MDCC se fait à partir de la mise en évidence des signes cliniques et des caractéristiques lésionnelles. Il s’agit ensuite de développer des tests permettant un diagnostic fiable, rapide et peu coûteux et adaptable à un dépistage de grande envergure.

75 V. Diagnostic de la MDCC

A. Diagnostic clinique

Les signes cliniques décrits précédemment (deuxième partie : chapitre IV. A.) ne permettent pas un diagnostic ciblé et univoque de la MDCC. Il s’agit de signes trop généraux et souvent non spécifiques comme l’amaigrissement. Le signe clinique le plus facile à observer, notamment dans la nature, est la perte de condition, mais le diagnostic différentiel de ce symptôme est délicat car impliquant une multitude d’autres maladies infectieuses sévissant chez les cervidés.

D’autres signes cliniques comme les modifications du comportement sont plus subtiles à repérer et leur détection nécessite une compétence en comportement animal. La plupart des signes cliniques ne sont pas évaluables sur la faune sauvage ; il s’agit donc pour les chasseurs de signaler tout animal abattu en mauvaise condition afin de mettre en œuvre les analyses nécessaires pour le dépistage.

B. Diagnostic à l’autopsie

Les signes cliniques permettent d’inclure la MDCC dans le diagnostic différentiel. L’autopsie fait alors suite à l’examen quand celle-ci est possible. Les signes nécropsiques ont été décrits précédemment (deuxième partie : chapitre IV. B.). L’autopsie permet aussi de mettre en évidence d’autres causes de mort, tels que des traumas (accidents de circulation), les maladies infectieuses (tuberculose, BVD….). Même si une autre cause est découverte, un prélèvement systématique du SNC peut permettre un dépistage précoce de la MDCC à des fins d’épidémiologie.

L’autopsie seule ne permet pas le diagnostic de certitude, et doit conduire à réaliser les prélèvements nécessaires pour les analyses complémentaires. A ce stade il est important que la conservation du cadavre soit correcte, notamment le système nerveux ; il est donc important de pouvoir réaliser l’autopsie dans de brefs délais après la mort, ou tout du moins après la découverte du cadavre.

C. Le diagnostic de laboratoire

1) Inoculation expérimentale aux animaux de laboratoire

L’inoculation intracérébrale à des animaux de laboratoire est une méthode de référence pour le diagnostic des maladies à prion. Le modèle murin sauvage n’est pas sensible à l’agent de la MDCC et aucun autre modèle animal n’a été développé en routine jusque là (WILLIAMS et YOUNG, 1992 ; BRUCE et al., 2000). Le développement récent de souris transgéniques produisant la PrP des cervidés a permis de rendre sensibles les souris à l’infection (BROWNING et al., 2004 ; TAMGÜNEY et al., 2006 ; MEADE-WHITE et al., 2007).

L’inoculation à l’animal de laboratoire, lorsque celui-ci a été développé pour l’espèce concernée, est un outil très intéressant dans le cadre de la recherche et notamment l’identification de souches et l’étude physiopathologique de la maladie. Mais l’analyse est très longue (plusieurs mois) et coûteuse, et comme la microscopie électronique elle n’est donc pas utilisable en routine ; il s’agit donc d’utiliser d’autres méthodes diagnostiques. 76 2) Diagnostic histologique

Lors de l’analyse histologique, les tissus sont fixés dans une solution de formaldéhyde diluée à 10 %. Ils sont ensuite inclus dans des blocs de paraffine, à partir desquels des sections de 5 μm sont obtenues. Les tissus sont colorés en routine à l’hématoxyline et à l’éosine (coloration HE). D’autres colorations peuvent être utilisées à des fins de recherche (acide périodique Schiff (PAS), rouge Congo, bleu de Crésyl etc…). Toutes les localisations anatomiques de l’encéphale sont examinées (environ 90 coupes) au microscope optique (voir figure 24).

Figure 24 : représentation des différentes coupes d’encéphale effectuées pour l’analyse histologique ou immunohistochimique.

(Source : SPRAKER et al., 2002b)

Les lésions histologiques sont notées en fonction de la sévérité des lésions sur chaque coupe d’encéphale. La graduation couramment utilisée est le score de HADLOW (voir tableau XVIII).

Tableau XVIII : graduation de la sévérité des lésions histologiques d’un échantillon selon le score de HADLOW.

Score Signification

0 pas de modification

1 faible

2 faible à modérée

3 modérée

4 sévère

(Source : WILLIAMS et YOUNG, 1993)

77 Le diagnostic histologique peut être parfois ambigu dans les stades précoces de la maladie ou lors d’autolyse des tissus ce qui est fréquent pour les animaux prélevés dans la nature (10 % des prélèvements), ce qui conduit entre autre à une mauvaise sensibilité (30 % de détection des malades) (PETERS et al., 2000). Ce test est lourd à mettre en œuvre et à analyser ; il n’est donc pas effectué en routine. La détection directe de la PrPres dans les tissus peut alors s’avérer être un moyen diagnostique utile.

3) Mise en évidence de la PrPres

L’accumulation de la PrPres dans le système nerveux central est un marqueur fiable de l’infectiosité. Différentes techniques de détection de la PrPres ont ainsi été développées.

a. Mise en évidence de la PrPres par immunohistochimique (IHC)

La mise en évidence de la PrPres peut se faire sur des coupes de tissus fixées au formol grâce à l’immunohistochimie (ou IHC).

On obtient une immunoréaction colorée permettant d’observer la répartition de la PrPres en microscopie optique. Les lésions du tissu nerveux en IHC apparaissent sous la forme de dépôts granuleux ou de plaques entourant des neurones (voir figure 25A). Cela permet aussi d’observer les plaques amyloïdes et la réaction astrocytaire par double marquage (voir figure 26).

Dans les tissus lymphatiques, un animal est considéré comme positif dès que quelques follicules lymphoïdes sont colorés, sachant qu’il y a entre 50 et 200 follicules sur une section médiale (voir figure 25).

La gradation subjective de la sévérité des lésions est à la fois basée sur l’intensité du marquage et sur l’extension des tissus affectés (voir tableau XIX) (PETERS et al., 2000).

Tableau XIX: gradation des échantillons en fonction de l’intensité et de l’abondance du marquage des tissus en coloration IHC.

Score Signification

0 pas de coloration

1 faible

2 modérée

3 sévère

78 Figure 25 : dépôts de PrPres dans le cortex frontal (A) et dans deux follicules lymphoïdes (B) en immunohistochimie.

(A) (B) (Sources : SPRAKER et al., 2006 ; TRIFILO et al., 2007)

Figure 26 : plaques amyloïdes en immunohistochimie (A) et processus astrocytaire (en rouge) autour d’une plaque de PrPres (en vert) par double marquage immunohistochimique.

(Sources : WILLIAMS, 2005 ; TRIFILO et al., 2007)

La PrP pathologique a la même séquence d’acides aminés que la PrP physiologique : il n’existe encore aucun anticorps disponible sur le marché capable de distinguer les 2 formes. La PrP physiologique est détruite des tissus à analyser avec un traitement par les protéases. Il ne reste alors plus que la PrPres dans les préparations et l’immunomarquage peut être effectué (SPRAKER et al., 2002a).

Différents anticorps monoclonaux (MAb) peuvent être utilisés : - le F89/160.1.5. Cet anticorps réagit avec un épitope conservé dans la PrP normale aussi bien que dans la PrP pathologique : il n’est donc pas spécifique de la protéine anormale (O’ROURKE et al., 1998 ; SPRAKER et al., 2002b). - le F99/97.6.1. Cet anticorps a récemment été approuvé pour le diagnostic de la MDCC. L’épitope avec lequel il réagit n’a aucune variation chez les cervidés. Ce test de détection est à la fois sensible et spécifique (voir tableau XX) pour la détection de la PrPres dans les amygdales et l’encéphale des cerfs mulets (SPRAKER et al., 2002a). 79 Tableau XX : sensibilité et spécificité relatives du test immunohistochimique avec l’anticorps MAb F99/97.6.1 chez le cerf mulet sauvage.

Prélèvement Sensibilité relative (%) Spécificité relative (%)

(intervalle de confiance 95%) (intervalle de confiance 95%)

Amygdales 97,3% (90,6 à 99,7%) 100%

Nœuds lymphatiques 98,6% (92,7 à 99,9 %) 100% rétropharyngiens

(Source : MILLER et WILLIAMS, 2002)

Le diagnostic par IHC est un outil fiable de diagnostic en phase subclinique, notamment par sa capacité à mettre en évidence des individus positifs ne présentant alors qu’une accumulation de PrPres au niveau des tissus lymphoïdes et de la moelle allongée. L’utilisation sur le terrain du diagnostic par IHC a accru les capacités de diagnostic, surtout en ce qui concerne les prélèvements autolysés.

b. Recherche de la PrPres par Western Blot

La technique du Western blot permet de séparer les protéines selon leur poids moléculaire à l’aide de l’électrophorèse : il s’agit d’une migration des macromolécules chargées placées sous l’influence d’un champ électrique. La reconnaissance des bandes d’électrophorèse ainsi obtenues se fait grâce à des anticorps spécifiques (voir figure 27).

Figure 27 : Western blot sur des échantillons d’encéphale de cerfs de Virginie positif et témoin avec ou sans digestion par la protéinase K.

Cerf positif : lignes 2 et 3 Cerf négatif : lignes 4 et 5 Marqueurs moléculaires : ligne 1 PK : protéinase K ; (-) sans digestion de la PK, (+) avec digestion de la PK CWD : chronic wasting disease = MDCC ; (-) animal négatif, (+) animal positif

(SOURCE : MATHIASON et al., 2006)

80 On obtient un résultat caractéristique constitué de 3 bandes incluant des composants diglycosylés (masse moléculaire élevée), monoglycosylés (masse moléculaire moyenne) et non glycosylés (masse moléculaire la plus faible), qui peuvent être séparés et détectés par des anticorps dirigés contre la protéine PrP (HUANG et al., 2005)

La sensibilité du test par Western blot varie en fonction de l’espèce, du site prélevé et de la méthode de préparation des tissus. Elle peut être améliorée par des prétraitements qui concentrent la PrPres, comme l’ultracentrifugation recommandée par L’OIE. La technique de précipitation par le phosphotungstate de sodium (PTA) permet d’atteindre une sensibilité de 100 % (au lieu de 83 % avec une méthode brute) avec une spécificité de 100 % (HUANG et al., 2005).

La mise en évidence de PrPres par Western blot ou par immunohistochimie offre l’avantage de ne pas être affectée par l’autolyse du prélèvement. Cependant le test par IHC est coûteux et laborieux (3 à 5 jours) et nécessite un personnel qualifié pour obtenir la certification, et l’analyse en Western blot est limitée par la quantité d’échantillon qui peut être chargée sur le gel pour électrophorèse, alors que l’on s’oriente vers un dépistage de masse avec automatisation des méthodes diagnostiques.

4) Développement de tests rapides en routine

Les tests rapides permettant d’analyser une grande quantité d’échantillons sont la solution la plus pratique pour répondre à la demande croissante. Le principe est fondé sur la détection immunologique de la PrPres, seul marqueur spécifique des ESST à ce jour.

Le laboratoire BIORAD a étudié la sensibilité et la spécificité de son test à base du titrage d’une enzyme immunoabsorbante (brELISA) (tableau XXI).

Tableau XXI : sensibilité et spécificité du titrage de l’enzyme immunoabsorbante du laboratoire Biorad chez les cervidés.

Tissu Espèces Sensibilité relative (%) Spécificité relative (%)

(95% IC) (95% IC)

NL rétropharyngiens Cerf mulet 98,3 (91,1 à 99,9 %) 100 (99,7 à 100 %)

Wapiti 100 (84 à 100 %) 99,9 (99,3 à > 99,9 %)

Cerf de Virginie 100 (28,9 à 100 %) 100 (97,2 à 100 %)

Obex Cerf mulet 92.1 (78,5 à 98,4 %) 100 (99,6 à 100 %)

Wapiti 93,3 (67,9 à 99,8 %) 100 (99,6 à 100 %)

Cerf de Virginie Non déterminé 100 (69,1 à 100 %)

NL : Nœuds lymphatiques IC : Intervalle de confiance

(Source : HIBLER et al., 2003) 81 Le titrage de l’enzyme immunoabsorbante (brELISA) du laboratoire BIORAD s’avère être un outil diagnostique rapide et efficace pour le dépistage à partir des nœuds lymphatiques rétropharyngiens et de l’obex : les résultats sont obtenus en 5 heures et l’automatisation permet d’analyser jusqu’à 1000 échantillons par jour (HIBLER et al., 2003)

Il existe d’autres plateformes d’IHC automatisées validées par les autorités sanitaires et commercialisées dans les laboratoires d’analyses. Il y a notamment une concordance parfaite entre le Ventana NexES et le DakoCytomation Autostainer Universal Staining System (BASZLER et al., 2006).

Il s’agit d’obtenir une purification de la PrPres afin de la détecter en utilisant le kit antigène ELISA. Le traitement à la PK associé à la centrifugation assure la sélectivité du test. Un anticorps monoclonal dirigé contre la PrPres, par immunisation de souris permet la détection de la PrPres. Un logiciel est utilisé pour l’analyse des résultats : il calcule la principale densité optique (OD ou absorbance reading) (HIBLER et al., 2003).

5) Quelques tests d’avenir ?

Une technique de Dot blot (transfert en point) a été développée chez les cerfs mulets à partir de lysat brut d’amygdale. Ce test semi-quantitatif semble suffisamment sensible, rapide et abordable, mais il reste à valider pour la faune sauvage (O’ROURKE et al., 2003).

Un procédé d’amplification protéique appelé PMCA (protein misfolding cyclic amplification) a été très récemment développé dans le cadre des ESST (CASTILLA et al., 2005). Il s’agit d’une amplification cyclique de la PrPres du type de la réaction en chaîne Polymerase Chain Reaction (PCR). C’est un test de très haute sensibilité et spécificité, qui permet de détecter la PrPres dans des organes où elle est en très faible quantité. En revanche l’analyse est très longue (deux semaines pour 2 cycles complets).

Cette technique pourrait peut-être permettre à terme la détection des individus positifs à partir du sang (SUPATTAPONE et al., 2006). La PMCA est déjà testée chez le cerf (KURT et al., 2007).

Mais quel que soit le test utilisé, la détection des animaux en début de phase d’incubation au stade préclinique reste problèmatique : la difficulté est alors liée à la quantité minimale de PrPres que le test peut détecter ; cela dépend aussi de la quantité d’échantillon analysé (180 à 220 mg nécessaire pour le kit Biorad BrELISA), le risque étant que l’échantillon prélevé ne soit pas encore contaminé.

82 D. Le choix du prélèvement

• Obex

Sur un animal mort, on peut prélever l’encéphale et plus précisément l’obex dans la moelle allongée. L’obex a été choisi car la PrPres s’y concentre dans le noyau dorsal du nerf vague et il est facile à prélever (voir figure 28). La technique de prélèvement se fait à l’aide d’une cuillère par le trou occipital comme pour les prélèvements à l’abattoir de l’échantillon à tester pour l’ESB. La sensibilité du test obtenue avec le prélèvement l’obex est au moins deux fois supérieure à celle des autres parties du SNC (mésencéphale, cervelet et hémisphères cérébraux).

Figure 28 : position de l’obex dans l’encéphale

L’échantillon prélevé est situé entre les pointillés.

(Source : UNIVERSITE DU NEBRASKA-LINCOLN)

Avec ce prélèvement, on peut faire une analyse immnunohistochimique, Western blot ou ELISA (Biorad). Le prélèvement de l’obex ne permet pas d’identifier les individus à un stade plus précoce (en début de phase d’incubation par exemple). D’autres échantillons sont donc recherchés pour ce faire, mais aussi pour effectuer des dépistages ante mortem.

• Les tissus lymphoïdes

L’accumulation de la PrPres dans les amygdales intervient dès 78 jours après inoculation expérimentale (SIGURDSON et al., 1999) et précède l’apparition des signes histologiques dans le cerveau (SPRAKER et al., 2002b). Il en est de même pour l’accumulation de la PrPres dans les nœuds lymphatiques rétropharyngiens (FOX et al., 2006).

Le prélèvement des nœuds lymphatiques rétropharyngiens se fait en post mortem notamment sur les animaux issus de la chasse. Il s’avère être un prélèvement de choix permettant le dépistage 83 d’animaux avant l’invasion du SNC au même titre que les amygdales (HIBLER et al., 2003). L’analyse associée de l’obex et des tissus lymphoïdes permet de détecter 88 % des cas, car l’analyse des tissus lymphoïdes donne un résultat négatif pour 12 % des cas qui ne présentent la PrPres que dans l’encéphale (SPRAKER et al., 2004).

La biopsie des amygdales pour l’immunohistochimie est un prélèvement de choix pour le diagnostic ante mortem chez le cerf (mulet ou de Virginie) avant même l’apparition des signes cliniques (il s’écoule en moyenne plus d’un an entre la positivité de l’amygdale et l’apparition des signes cliniques) (WILD et al., 2002 ; WOLFE et al., 2002), bien qu’il existe quelques rares cas où il n’y a pas d’accumulation de PrPres dans les amygdales (SPRAKER et al., 2002a),

Lors du prélèvement, l’animal doit être anesthésié en cas de dépistage ante mortem. La technique utilisée pour la biopsie requiert l’emploi d’une pince endoscopique de Jackson. En augmentant le diamètre de la pince à biopsie, on accroît les chances de récupérer des follicules (WOLFE et al., 2002). Deux techniques de prélèvement des amygdales ont été développées (tableau XXII) : - une approche ventro-médiale où les mors du forceps sont positionnés dans la crypte des amygdales puis pressés contre la paroi ventro-médiale (WILD et al., 2002 ; SCHULER et al., 2005) - une approche dorso-latérale (SCHULER et al., 2005).

Tableau XXII : comparaison du nombre de follicules obtenus entre les deux techniques de prélèvements des amygdales chez le cerf mulet et de Virginie.

Nombre de follicules Nombre de follicules obtenus en moyenne requis minimum pour analyse

Approche ventro- 5,5 médiale 9 Approche dorso- 19 latérale

(Sources : SCHULER et al., 2005)

L’approche dorso-médiale est donc conseillée pour le prélèvement des amygdales. Ce test ne semble pas applicable aux wapitis. Il existe en effet des différences interspécifiques : les wapitis ne présentent pas d’accumulation de PrPres dans les amygdales au même degré que les cerfs.

• Muqueuses recto-anales

L’analyse du système lymphoïde des muqueuses recto-anales permet de détecter une grande proportion d’individus infectés notamment ceux aux stades les plus avancés, mais la sensibilité du test par rapport au prélèvement des amygdales est inférieure. De plus, chez le wapiti, le nombre de follicules lymphoïdes dans la muqueuse recto-anale est inférieure à celle des cerfs (WOLFE et al., 2007).

84 • Prélèvement de la troisième paupière

L’utilité de la biopsie des tissus lymphoïdes de la troisième paupière a été démontrée chez le mouton naturellement infecté (VARGAS et al., 2006). Cela ne semble pas applicable concrètement, car la plupart des troisièmes paupières de cerfs et wapitis n’ont pas l’air de contenir de centres germinaux, même si de nombreuses cellules lymphoïdes diffuses sont présentes.

Aucun test ne permet de détecter tous les cas de MDCC, en effet chaque test a un seuil minimal de détection de l’accumulation de PrPres dans les tissus.

E. Diagnostic différentiel de la MDCC

1) Principales affections à considérer dans le diagnostic différentiel de la MDCC

Elisabeth Williams (WILLIAMS, 2005) a rassemblé différents syndromes présents en Amérique du nord appartenant au diagnostic différentiel de la MDCC.

• La maladie épizootique hémorragique des cervidés

Il s’agit d’un syndrome qui peut être causé par deux agents appartenant à la famille des Reoviridae: - le virus de la fièvre catarrhale ovine (BTV), principalement chez les ovins et bovins - le virus de la maladie épizootique hémorragique (EHDV), spécifique des cervidés.

La transmission est indirecte par l’intermédiaire d’insectes du genre Culicoides. D’autres modes de transmissions sont possibles mais occasionnels (transmission vénérienne) (SAVARY, 2000). Les symptômes faisant penser à la MDCC sont l’apathie, une hypersalivation et parfois des complications nerveuses avec ataxie et torticolis. La forme aiguë est caractérisée par une hyperthermie importante (42°C), une dyspnée, une congestion et un œdème au niveau de la tête (oreilles, museau, lèvres). Les larmoiements, le jetage et la salivation observés sont liés à une inflammation des muqueuses buccales, nasales et oculaires (stomatites, conjonctivites). On peut même parfois observer une "langue bleue". Des complications peuvent apparaître comme une pneumonie, de la diarrhée, des boiteries consécutives à une atteinte podale (coronite, pododermatite) ou à une myosite. Des avortements et des malformations fœtales peuvent également se manifester. La mort survient en 8 à 10 jours (SAVARY, 2000).

Lors de l’autopsie, l’animal atteint de maladie épizootique hémorragique des cervidés présente des lésions congestives, œdémateuses, hémorragiques et ulcéreuses des muqueuses digestives et respiratoires. Un diagnostic de laboratoire est possible soit par la recherche directe du virus, soit par la mise en évidence des anticorps (SAVARY, 2000).

La maladie hémorragique causée soit par le virus de la blue tongue soit par le virus de maladie épizootique hémorragique est une maladie importante sévissant chez le cerf de Virginie dans une grande partie de son aire de répartition. Le taux de mortalité peut atteindre 84 %, et le taux d’infection basé sur la présence d’anticorps peut approcher les 100 % dans beaucoup de populations (BERINGER et al., 2000). Cette maladie n’existe pas en France chez les cervidés à l’heure actuelle.

85 • La parélaphostrongylose

Dans l’est de l’Amérique du Nord sévit une parasitose du système nerveux central : la parelaphostrongylose. Il s’agit d’une affection causée par un ver Nématode : Parelaphostrongylus tenuis également appelé "ver des méninges".

Le cerf de Virginie est l’hôte définitif de ce nématode. D’autres espèces peuvent également être parasitées sans que le cycle soit complet (mort de l’hôte avant la fin du cycle) comme l’orignal, le caribou, le wapiti, le cerf mulet, le mouton, la chèvre et le cochon d’Inde. Les vers adultes se logent dans l’espace dural et les sinus veineux crâniaux et y pondent les œufs (BEFORT, 1994). Les nématodes migrent à travers la moelle épinière et l’encéphale, ce qui provoque un traumatisme local et une inflammation.

Chez le cerf de Virginie, les symptômes sont moins marqués que chez les autres espèces. On observe même rarement des signes cliniques : atteinte locomotrice qui se traduit par des boiteries et paralysies de la région postérieure. Les autres espèces, chez qui les dommages du canal de l’épendyme sont plus importants, présentent une incoordination motrice, une faiblesse généralisée, des pertes de vision avec marche en cercle et positions anormales de la tête et des oreilles (BEFORT, 1994).

L’identification des nématodes adultes dans le système nerveux central est la seule méthode fiable pour le diagnostic.

• L’intoxication à l’Oxytropis sericea (locoïsme)

Oxytropis sericea est une plante indigène de l'ouest du Canada et des Etats-Unis appartenant à la famille des Astragales (Leguminosae).

L'intoxication par cette plante ("locoïsme") est une affection chronique nécessitant une ingestion répétée de la plante avant de déclarer des signes de maladie. Elle se manifeste par la dépression, l’apathie, l’anorexie, l'incoordination et la nervosité en cas de stress et elle peut être mortelle. On observe aussi une faiblesse musculaire, des trémulations intentionnelles, un déficit proprioceptif et des modifications comportementales (STELGELMEIER et al., 2005). Les lésions histologiques incluent une large vacuolisation neuronale et une dystrophie axonale dans le neuropile, la glie et les neurones, aussi bien qu’une vacuolisation du rein, du foie et de diverses cellules endocrines (STELGELMEIER et al., 2005). Les effets sur la faune sauvage sont très peu connus. Des cas d’intoxication ont été reportés sur les wapitis. Une étude récente vient d’établir la sensibilité du cerf mulet (STELGELMEIER et al., 2005).

2) Autres affections à considérer dans le diagnostic différentiel

Il existe d’autres affections du système nerveux central ou provoquant une mort subite notamment lors du stress de la manipulation.

86 • L’élaphostrongylose

L’élaphostrongylose est due à un nématode du genre Elaphostrongylus appartenant à la même sous-famille que Parelaphostrongylus. Ce ver est originaire d’Europe et est spécifique des cervidés. Des cerfs d’élevage parasités ont été importés au Canada, où le parasite a été depuis identifié chez le caribou et le wapiti (BEFORT, 1994). Elaphostrongylus sp. ne présente aucun danger pour l’animal lorsqu’il se loge dans les muscles. En revanche l’atteinte du système nerveux central est grave et se termine par la mort du cerf. Au début, l’animal a la tête basse. Il semble affaibli, s’isole du reste du troupeau et manifeste progressivement des paralysies diverses, de l’ataxie et de l’anxiété (BEFORT, 1994). Les lésions au niveau du système nerveux central sont marquées par des hémorragies leptoméningées, une méningoencéphalite non purulente, une pachyméningite et une démyélinisation (BEFORT, 1994).

• Autres affections nerveuses

La listériose est due à un bacille de petite taille Gram positif (Listeria monocytogenes) présent dans le sol. Il est susceptible de contaminer l’alimentation des cervidés comme celle des autres ruminants domestiques par l’affouragement. Il s’agit d’une affection d’élevage. On peut rencontrer des formes cliniques de méningites, même si la forme septicémique est la plus fréquemment rencontrée chez les cervidés (PEYRE-MANDRAS, 1990).

La nécrose du cortex cérébral (NCC) ou polioencéphalomalacie (PEM) est due à une carence en thiamine (vitamine B1) et à un excès de soufre dans la ration. L’animal présente une marche en cercle, des poussers au mur, une ataxie, un strabisme dorso-médial, une amaurose constante et bilatérale, et un opisthotonos décrit sous le nom de « signe de l’astronome ». A l’autopsie on observe des lésions de nécrose du cortex d’aspect jaunâtre. Cette affection touche toutes les espèces de ruminants domestiques ou sauvages dans le monde entier (SAVARY, 2000).

Le Louping Ill est une arbovirose due à un Flavivirus transmis par les tiques (Ixodes ricinus) et s’exprime principalement l’été. La première phase est dominée par une hyperthermie, suivie par une phase nerveuse dominée par une méningoencéphalomyélite (apathie, tremblements, ataxie, immobilité, paralysie et parfois tourner en rond). Le diagnostic se fait par une mise en évidence du virus ou des anticorps spécifiques (SAVARY, 2000).

La maladie d’Aujeszky aussi dénommée pseudo-rage est due à un Herpesvirus. La source de contamination est d’origine porcine. On observe une encéphalomyélite avec désorientation et paralysie, associées ou non à un prurit intense avec automutilation. Le diagnostic se fait à partir d’un isolement du virus (SAVARY, 2000).

• L’ataxie enzootique du cerf

Il s’agit d’une affection qui frappe essentiellement le cerf ; elle est actuellement associée à une carence en cuivre, mais est sûrement d’étiologie multifactorielle. Cette affection se manifeste par une faiblesse de l’arrière-train et évolue progressivement vers la parésie puis la paralysie complète du sujet ; le cerf adopte alors la position du "chien assis" caractéristique de l’ataxie enzootique. L’état général, l’appétit et l’instinct de fuite de l’animal sont toutefois conservés (PEYRE-MANDRAS, 1990). 87 On observe dans le système nerveux central un œdème périvasculaire au niveau de la moelle allongée et du cervelet. Les lésions de la moelle épinière sont pathognomoniques de l’ataxie enzootique : ce sont des phénomènes de démyélinisation extensive, sévère, bilatérale et symétrique (PEYRE-MANDRAS, 1990).

Cette affection a été décrite au Royaume-Uni dans des hardes d’élevage, en Allemagne (où elles touchent aussi les cerfs sauvages), en ex-Tchécoslovaquie, et en Nouvelle-Zélande (PEYRE- MANDRAS, 1990).

• Cas d’intoxications végétales diverses de cervidés américains

Les Senecio, Heliotropium et les Crotalaria possèdent des alcaloïdes hépatotoxiques. On observe après ingestion régulière de ces plantes un amaigrissement avec des signes d’hépatites (muqueuses ictériques, hémoglobinurie) et d’encéphalite (incoordination motrice, convulsions, cécité). La lésion caractéristique observée est une cirrhose hypertrophique avec mégalocytose. Il s’agit d’une maladie anecdodique faisant suite à une période de sécheresse (PEYRE-MANDRAS, 1990).

• Le diagnostic différentiel des morts subites à la manipulation

Lors de la capture il existe deux syndromes causant la mort suite au stress occasionné : la myopathie de capture et le choc de capture.

La myopathie de capture est présente sous deux formes cliniques : - le syndrome ataxique myoglobinurique : les symptômes s’observent plusieurs heures à plusieurs jours après la capture. L’animal peut présenter une ataxie, un torticolis et de la myoglobinurie. On peut observer des morts subites si le myocarde est atteint. - le syndrome de rupture des muscles : on observe des signes de boiterie dues à la douleur musculaire.

Le choc de capture est consécutif à un stress extrême et brutal. Il s’agit d’une exacerbation du processus de stress. Le choc se produit durant ou immédiatement après la capture. Ce syndrome correspond à une détresse respiratoire sévère accompagnée de dyspnée et tachypnée. A l’autopsie, on observe une congestion et un œdème pulmonaire associés à des lésions congestives et hémorragiques de tout l’intestin ainsi qu’une congestion hépatique (SAVARY, 2000).

88 Tableau XXIII : comparaison des principales affections du diagnostic différentiel permettant de distinguer la MDCC

(A) principales affections infectieuses

Maladie Etiologie Espèces affectées Principaux symptômes Principales lésions Diagnostic MDCC Prion Cerf mulet, cerf de Amaigrissement, ataxie, Spongiose du SNC, Mise en Virginie, wapiti, dépression, hypersalivation hyperastrocytose évidence de la orignal PrPres Maladie épizootique Virus de la fièvre Cerf de Virginie Apathie, hypersalivation, ataxie, Lésions congestives, Sérologie ou hémorragique des catarrhale ovine et principalement, torticolis, hyperthermie œdémateuses, isolement viral cervidés virus de l’EHDV cervidés et hémorragiques et ulcéreuses (Amérique du Nord) (Reoviridae) ruminants des muqueuses digestives et domestiques respiratoires Louping Ill Virus transmis par Ruminants Hyperthermie, apathie, Méningoencéphalomyélite Sérologie ou les tiques domestiques et tremblements, ataxie, paralysie isolement viral (Flavivirus) sauvages et tourner en rond Maladie d’Aujeszky Virus Ruminants Désorientation et paralysie, Encéphalomyélite Isolement viral (contamination (Herpesvirus) domestiques et associée ou non à un prurit avec d’origine porcine) sauvages automutilation Listériose Bactérie Listeria Cervidés d’élevage Tête penchée, symptômes de Méningites, septicémies. Fourrage monocytogenes méningites, septicémies contaminé Parelaphostrongylose Parasite nématode Cerf de Virginie = Boiteries et paralysies de la Inflammation de la moelle Identification (Est de l’Amérique du du SNC hôte définitif région postérieure épinière et de l’encéphale des adultes par Nord) Traumatisme dû aux trajets un examen Orignal, caribou, Incoordination motrice, migratoires parasitologique wapiti, cerf mulet, faiblesse, pertes de vision avec mouton, chèvre marche en cercle Elaphostrongylose Parasite nématode Caribou, wapiti Tête basse, affaiblissement, Hémorragies méningées, Parasitologie (présent en Europe, des muscles et du s’isole du reste du troupeau et méningoencéphalite non importation en SNC paralysies, ataxie et anxiété purulente, pachyméningite et Amérique du Nord) démyélinisation

89 (B) Autres affections du diagnostic différentiel

Maladie Etiologie Espèces affectéesPrincipaux symptômes Principales lésions Diagnostic Intoxication à Plante appartenant Cerf mulet, wapiti Dépression, apathie, anorexie, Vacuolisation neuronale et Autopsie, Oxytropis sericea à la famille des incoordination et nervosité, dystrophie axonale histologie du (locoïsme) Leguminosae faiblesse musculaire, Vacuolisation du rein, du rein, présente en trémulations intentionnelles, foie et de diverses cellules encéphale, Amérique du Nord déficit proprioceptif endocrines pancréas. Intoxication à : Plantes possédant Cervidés Amaigrissement avec signes Cirrhose hypertrophique Autopsie- Senecio des alcaloïdes américains d’hépatites (muqueuses avec mégalocytose histologie du Heliotropium hépatotoxiques ictériques, hémoglobinurie) et foie Crotalaria d’encéphalite (incoordination motrice, convulsions, cécité) Nécrose du cortex Carence en Ruminants Marche en cercle, pousser au Lésions de nécrose du Autopsie- cérébral thiamine domestiques et mur, ataxie, strabisme dorso- cortex d’aspect jaunâtre histologie du sauvages médial, amaurose, SNC opisthotonos Ataxie enzootique Origine Cerf de type Parésie puis paralysie du train Oedème périvasculaire au Histologie du du cerf multifactorielle, élaphe arrière (position de "chien niveau de la moelle SNC (décrit en Europe et probable carence en assis") allongée et du cervelet Nouvelle-Zélande) cuivre Myopathie de Stress suite à la Cervidés Ataxie, torticolis, Rien de spécifique Mort quelques capture capture myoblobinurie jours après la morts subites si le myocarde est capture atteint, boiteries dues à la douleur musculaire Choc de capture Consécutif à un Cervidés Détresse respiratoire sévère Congestion et œdème Mort stress extrême et accompagnée de dyspnée et pulmonaire, congestion et immédiate brutal tachypnée hémorragies de l’intestin, après la congestion hépatique capture

90 VI. Gestion et contrôle de la MDCC

A. Importance de la MDCC au sein de la faune sauvage

1) Prédictions des modèles épidémiologiques pour la population sauvage

Les épidémiologistes tentent de prédire la dynamique de la maladie à long terme afin d’en évaluer les effets sur la population sauvage et par la même développer des stratégies de prévention.

Les modèles mathématiques de prédilection dépendent des données de départ, comme la prévalence. Or la prévalence est déjà incertaine (voir deuxième partie chapitre I.D.) du fait des biais de prélèvement des échantillons de populations. L’établissement de modèles mathématiques nécessite aussi d’analyser les facteurs de transmission de la maladie au sein d’une population, il s’agit de savoir de quoi dépend la transmission au sein de la population. Cela dépend aussi du passé de la maladie : depuis quand existe-t-elle, sa vitesse de progression (spatiale et quantitative) ente autres. Autant de questions sans réponses à ce sujet. Pour ce faire, il y a peu de données complètes, et le plus souvent sur une période très courtes, la plupart des études ayant commencé dans les années 1990.

Gross et Miller ont basé leurs modèles sur l’hypothèse que la transmission de la MDCC dépend du nombre de contacts effectifs entre les individus infectés et les autres individus par unités de temps. C’est ce qu’on appelle un modèle de transmission dépendant de la fréquence (des contacts). Ils sont partis du principe que la fréquence des contacts est indépendante de la taille de la population et de sa densité : les cerfs formant des groupes sociaux, l’augmentation de la population ne modifie pas la nature des contacts entre groupe. A partir des données obtenues sur les cerfs mulet du Colorado 1996-1997, ils ont développées plusieurs modèles. Aucun ensemble de paramètres réalistes n’a abouti à un état d’équilibre de la MDCC et de la population. Plusieurs de leurs simulations n’ont abouti qu’à l’augmentation de la prévalence et au déclin voire à la disparition de la population (GROSS et MILLER, 2001).

Ce modèle de transmission est discutable (SCHAUBER et WOOLF, 2003) : le fait que la transmission puisse se faire à partir des fluides corporels soit directement soit indirectement avec persistance dans l’environnement de l’agent infectieux rend improbable une transmission uniquement fréquence-dépendante. De plus, les élevages de cervidés, où les animaux étaient maintenus à de plus hautes densités, avaient des prévalences de MDCC plus importantes, ce qui suggère une part non négligeable d’une transmission dépendante de la densité.

Tant que ces paramètres ne seront pas établis avec certitude, il sera impossible d’établir des modèles de prédilection. Dans l’hypothèse d’une persistance de l’infection dans le sol, les tentatives de contrôles de la MDCC dans le Wisconsin, basées sur une diminution de la densité de la population, ne pourront se concrétiser. Les résultats visibles ne se verront pas avant une dizaine d’années.

Quoi qu’il en soit, la MDCC est une maladie qui a de graves conséquences pour la population animale avec peut-être une persistance à long terme dans les populations touchées et dans le sol contaminé. Le risque de transmission à l’homme ne peut pas non plus être éliminé.

91 2) Le risque de transmission à d’autres espèces

Il n’y a pas de transmission naturelle à d’autres espèces que les cervidés qui ait été détectée à ce jour que ce soit sur la faune sauvage ou le cheptel domestique.

Toutefois, la chèvre (WILLIAMS et MILLER, 2002), les bovins (HAMIR et al., 2005 et 2007) et les moutons (HAMIR et al., 2006b) sont réceptifs à l’agent de la MDCC après inoculation par voie intracérébrale. Il y a également une adaptation de l’agent de la MDCC chez les bovins (HAMIR et al., 2006a). La transmission naturelle par voie orale est nettement moins efficace que la voie intracérébrale. On ne peut donc prédire la réceptivité de ces espèces dans un contexte naturel.

En effet, dans les centres de recherche où ont été diagnostiqués les premiers cas de MDCC sur cervidés, le cheptel domestique (bovins, ovins et caprins) en contact étroit avec les cervidés n’a jamais développé la maladie (WILLIAMS et YOUNG, 1992). De même dans le Colorado, zone enzootique pour la MDCC, une étude menée sur 22 troupeaux de bovins n’a pas révélé de cas de maladie à prion (GOULD et al., 2003).

D’autres animaux de la faune sauvage sont aussi en contact avec les cervidés dans leur milieu naturel. Les rongeurs, carnivores et autres espèces nécrophages comme le raton laveur sont exposés aux déjections (urine, excréments) et carcasses des cerfs morts. Ils pourraient être à l’origine de la dissémination de la maladie, d’où leur suivi. Des expériences d’inoculation expérimentale ont montré que le furet (BARTZ et al., 1998) et le raton laveur (HAMIR et al., 2003) sont réceptifs à l’agent de la MDCC après inoculation intracérébrale.

3) Importance pour la filière cynégétique

L’Amérique du Nord, qui ne compte pas moins de 11 000 fermes de cerfs et wapitis, a dû répondre aux inquiétudes des éleveurs en débloquant des fonds pour la recherche sur la MDCC. Le marché de l’exportation notamment vers l’étranger (essentiellement vers la Corée du Sud, la Russie, et la Nouvelle-Zélande) est depuis lors fermé.

En 2001, le département de l’agriculture des Etats-Unis (USDA : United States’Departement of Agriculture) a décrété l’état d’urgence après la détection de la MDCC à l’est du Mississipi. Cette année-là, l’USDA a développé un programme de certification des troupeaux pour prévenir les mouvements d’animaux infectés dans le secteur de l’élevage de gibier. Cela a permis d’augmenter la surveillance dans chaque état, en plus de l’examen post mortem de tous les animaux abattus à la chasse ou lors d’opération d’abattage en masse (BUNK, 2004). En 2003, l’USDA a reçu 14,8 millions de dollars US pour surveiller et gérer la MDCC. A cela s’ajoute les 42,5 millions de dollars US reçus par le département de la défense pour lancer un programme de recherche national sur le prion (BUNK, 2004).

C’est aussi un enjeu économique pour le monde de la chasse ; en effet les chasseurs auraient dépensé plus de 10 milliards de dollars US en équipement et déplacements. La chasse est aussi une culture aux Etats-Unis et le lobbying des chasseurs est très important. Il faut ajouter à cela les 12 millions de naturalistes qui se déplacent chaque année pour observer la faune (BUNK, 2004).

92 B. Mesures de lutte et prévention pour la faune sauvage et captive

Le service de la santé des animaux et des plantes (APHIS) du département de l’agriculture des Etats-Unis (USDA) a lancé un programme d’évaluation et de gestion de la transmission de la MDCC dont le but est d’étudier l’écologie de la MDCC, d’estimer le potentiel de transmission à l’interface entre population sauvage et captive et de développer des méthodes qui réduiraient ou élimineraient la transmission de la MDCC et son expansion.

Six objectifs ont été définis (Site internet de l’USDA) : - objectif 1 : déterminer l’étendue des interactions entre les cervidés domestiques et sauvages et développer des moyens rentables de réduire ces interactions. - objectif 2 : rechercher des stratégies vaccinales. - objectif 3 : développer des méthodes de détection du prion de la MDCC et de décontaminer les sites infectés. - objectif 4 : estimer le rôle des prédateurs et des charognards dans l’épidémiologie de la MDCC. - objectif 5 : réaliser un recensement amélioré des cervidés et améliorer les techniques de capture. - objectif 6 : évaluer l’écologie du cerf de Virginie et du cerf mulet dans les aires péri- urbaines influençant la transmission et l’expansion de la MDCC.

Avant d’entamer un programme d’éradication, il est nécessaire de connaître les populations atteintes par la MDCC, leurs répartitions exactes et la prévalence de la MDCC pour chaque localisation géographique. Cela nécessite des programmes de dépistage, organisés par les agences de chaque état (agence type département des ressources naturelles dans le Wisconsin, ou division de la faune sauvage du Colorado par exemple).

1) Mise en place du dépistage

• Méthodes de surveillance

Il existe deux techniques principales de recherche d’une maladie dans un territoire sauvage (tableau XXIV) : - la surveillance ciblée : les prélèvements se font sur des animaux malades ou victimes d’une collision avec une voiture car ceux-ci sont plus vulnérables (KRUMM et al., 2005). Cette méthode permet surtout de détecter un nouveau foyer, mais n’est pas un bon outil pour évaluer l’évolution de la maladie à cause de ses nombreux biais.

- une étude d’ensemble de la population, c’est-à-dire un testage aléatoire au cours de la chasse en quadrillant le territoire en zones. Cette méthode permet surtout d’étudier la maladie dans une zone réputée atteinte.

93 Tableau XXIV : comparaison des méthodes de dépistages par une surveillance ciblée et par une étude d’ensemble de la population.

Surveillance ciblée Etude d’ensemble

Avantages Permet de dépister des animaux dans Exprime mieux la réalité de la une zone où la chasse est interdite prévalence sur chaque parcelle (parcs nationaux, zones urbaines par exemple) Permet d’évaluer l’évolution de la maladie dans le temps et l’espace

Inconvénients Pas un bon outil prédictif pour la Coûteux prévalence Laborieux Pas un bon outil pour évaluer l’évolution de la maladie Nécessite l’investissement des chasseurs (souvent la tête est un Dépend de la sensibilisation du public trophée)

Dépend de l’intérêt local

(Source : KRUMM et al., 2006)

Lors de la mise en place d’une surveillance générale de la population, se pose aussi la question du mode de prélèvement et du choix de l’analyse.

• Choix du prélèvement

Pour les études post mortem, il existe deux types de procédures qui peuvent être utilisés pour le prélèvement des échantillons sur les carcasses issues de la chasse (tableau XXV) : - prélèvement sur place du tissu au point de contrôle si les animaux y sont enregistrés (NB : les points de contrôle sont les centres où les chasseurs, les pêcheurs, les touristes ou autres visiteurs sont comptés, enregistrés, et informés, et où les permis et prises de pêches ou les tableaux de chasse sont délivrés ou enregistrés). - extraction des tissus dans une structure de recherche centralisée.

La deuxième procédure semble plus appropriée pour de grandes campagnes de dépistages.

94 Tableau XXV : comparaison des deux procédures de prélèvements.

Prélèvements au point de contrôle Prélèvements dans un centre agréé

Avantages Accès plus facile pour les chasseurs La spécialisation des postes permet une meilleure utilisation des Moins onéreux qualifications et compétences de chaque participant

Supervision des équipes de prélèvements d’où un meilleur contrôle de qualité

Inconvénients Nécessite un personnel qualifié sur Nécessite un prélèvement des têtes au place pour l’extraction des tissus point de contrôle

Mauvaises conditions climatiques Transport altèrant les tissus si gênant parfois le prélèvement températures >16°C

Effort plus important surtout au laboratoire

(Sources : BERINGER et al., 2003)

Dans les zones où la chasse est impossible (zones suburbaines ou parcs nationaux), le dépistage peut se faire en ante mortem avec prélèvement des amygdales sous anesthésie (WOLFE et al., 2002). Le coût, assez conséquent financièrement et en moyens humains (presque 300 $US par cerf, et 5 personnes par cerf) semble pouvoir être assumé par les structures (WOLFE et al., 2004).

Le contrôle et l’éradication de la maladie nécessitent aussi la maîtrise des points critiques de transmission sur lesquels on peut agir: pour cela il faut explorer les modes de transmission de la maladie, mais aussi les comportements de la faune sauvage.

• Connaissance des facteurs de risques

Les études de transmission de la maladie ont été présentées dans le chapitre III. Parallèlement, le comportement de la faune sauvage est étudié afin d’évaluer les facteurs de risque potentiellement impliqués dans la transmission de la MDCC.

On sait par exemple que le cerf de Virginie tend à avoir un groupe social, ce qui favoriserait la transmission de la maladie au sein du groupe. Les mâles favoriseraient la transmission de la MDCC lors de changement de groupe. L’APHIS a aussi étudié des lieux de rencontre naturels des cerfs sauvages : à savoir les points d’eau, comme les mares, et les sites de dépôt des pierres à lécher. Ils ont pour cela observé les interactions à l’aide de caméra et de colliers émetteurs posés sur les cerfs, en notant le nombre d’animaux, le nombre de contacts à un moment donné, la distance entre les individus, et les comportements associés.

95 Ainsi les mares ne sont fréquentées qu’un petit nombre de fois par jour par un petit nombre d’individus de la même espèce ; ce point ne semble donc pas critique pour la transmission de la MDCC. En revanche, les pierres à lécher sont très fréquentées, regroupant toutes les espèces sensibles à la MDCC (y compris l’orignal), avec des comportements de consommation du sol et de défécation. Ces suivis en milieu naturel permettent aussi d’enquêter sur le rôle des rongeurs et des charognards dans la dissémination de la maladie.

Malgré tout, il est plus difficile d’intervenir sur des animaux sauvages sans interférer avec leur mode de vie et leur écosystème, comme peut l’être l’implantation de grillages hermétiques aux rongeurs.

2) Eradication de la MDCC en captivité

Il n’existe pour le moment aucun vaccin ou traitement pour prévenir ou éliminer la MDCC, des recherches menées par les chercheurs du National Wildlife Research Center (NWRC, APHIS) sont actuellement en cours sur des souris transgéniques sur 5 vaccins. Il s’ensuit que les options pour contrôler la MDCC sont actuellement peu nombreuses.

a. Elimination du troupeau

Pour les élevages, la seule option est l’élimination totale du cheptel, en espérant ainsi, après décontamination du milieu, devenir indemne de la maladie. Quelques 12.000 à 14.000 wapitis d’élevage et plusieurs milliers de cerfs mulets et cerfs de Virginie ont dû être éliminés lors de programme d’éradication de la maladie dans les élevages en 5- 6 ans (WOODBURY et al., 2005).

Le gouvernement a lancé un programme soutenant les éleveurs et proposant une certification des élevages. Ainsi, tous les animaux sont testés à l’abattage. Aux Etats-Unis le département de l’agriculture offre des indemnités pour la dépopulation et le dépistage des animaux. Le remboursement couvre 95 % de la valeur estimée avec un maximum de 3.000 $US par animal. Environ 12.000 à 15.000 animaux sont testés chaque année.

b. Décontamination du milieu

Du fait de l’extrême résistance du prion (voir chapitre 1.2.5) il est assez difficile de trouver un protocole d’assainissement du milieu, surtout lorsqu’il s’agit d’un parc contaminé. Voici l’exemple de la décontamination d’un centre de recherche dans le Colorado qui n’a pas abouti (tableau XXVI) : les cerfs réintroduits sur les terrains ont développé la MDCC (MILLER et al., 1998).

96 Tableau XXVI: protocole de décontamination dans le centre de recherche du Colorado

DECONTAMINATION

Les animaux Abattage de tous les cervidés présents sur le site

Traitement du sol Passage d’une solution d’hypochlorite de calcium 1.000 ppm (65 %) par pulvérisateur ou hélicoptère

Labourage de la terre sur 30 cm

Deuxième traitement des sols à l’hypochlorite de calcium

Traitement du Nettoyage des abris, mangeoires et systèmes de matériel distribution d’eau avec une solution d’hypochlorite de calcium

Prévention Clôture étanche de 2,5 m

Séparation tampon d’un mètre pour éviter tout contact avec d’autres espèces ou des cervidés sauvages

Vide sanitaire de 12 mois

(Source : WILLIAMS et YOUNG, 1992)

L’APHIS teste l’inactivation potentielle du prion CWD par des enzymes en collaboration avec deux partenaires du secteur privé (Prion Tech, Ltd et Novozymes Biotech, Inc). Deux des enzymes testées semblent neutraliser l’infectiosité du prion dans les tests de laboratoire (sur souris). Ces recherches permettraient de développer une méthode d’inactivation par les enzymes, ce qui fournirait un outil de décontamination polyvalent à la fois pour l’environnement, les laboratoires, les installations animales, les chaînes d’alimentation et tout autre situation médicale. [http://www.aphis.usda.gov/ws/nwrc/research/cwd/accomplishments.html]

La décontamination de l’environnement passe aussi par la gestion des déchets et principalement des cadavres. En effet, dans les campagnes d’éradication, seul la tête et quelques autres prélèvements sont envoyés pour analyse. Les cadavres laissés sur place doivent donc être éliminés afin de ne pas être la source d’une nouvelle dissémination. Pour le moment les cadavres sont incinérés ou enfouis.

97 c. Prévention pour les élevages

Il s’agit de protéger les cervidés d’élevage et de parcs zoologiques de la MDCC : il y a deux types d’introduction possible de la maladie, soit par introduction d’un animal malade, soit par contact avec l’extérieur.

L’APHIS a analysé la hauteur minimale pour qu’aucun cervidé ne puisse sauter la clôture. Avec une hauteur de 7 pieds (2 m13) 10 % des cerfs de Virginie sont capables de sauter, à 8 pieds (2,43m) plus aucun cerf n’est capable (site internet USDA). Ainsi le département de l’agriculture et celui des ressources naturelles du Michigan ont édité un guide pour les clôtures. L’APHIS teste un grillage empêchant les wapitis de pénétrer dans ces zones sans nuire à la petite faune, notamment à l’intention de parcs nationaux.

L’association des aquariums et zoo (AZA), association américaine, recommande vivement dans son guide pour l’obtention de l’accréditation de ne pas permettre le contact des animaux de zoo avec des animaux de la faune sauvage en établissant des clôtures de périmètre (site internet AZA).

Pour les troupeaux, l’APHIS a publié le 21 juillet 2006 dans les registres fédéraux un programme de certification des troupeaux (Herd Certification Program : HCP). Ce programme a été développé en collaboration avec les Etats et l’industrie cynégétique. Ainsi les élevages auront un statut qui pourra progresser si les règles sont respectées (clôtures, dépistage des cervidés morts sans raison …). Un tel programme existe aussi au Canada. Les pouvoirs publics ont même obligation de diffuser la liste des statuts pour chaque élevage.

3) Contrôle en milieu naturel

Quel que soit le modèle envisagé, la diminution de la prévalence de la MDCC ou son éradication nécessitent un engagement à long terme dans la gestion des populations sauvages.

Jusque là les efforts pour contrôler la MDCC se sont limités à piéger et éliminer les animaux manifestement malades (quand ceux-ci sont observés et signalés). Des mesures ont aussi été prises pour empêcher les transferts d’animaux d’une aire enzootique à une aire encore considérée comme indemne.

L’Etat du Wisconsin tente de réduire la densité des animaux dans les zones où la MDCC est présente. En effet, la MDCC s’étend plus facilement dans les zones de fortes densités. Or dans le Wisconsin, la densité est de 50 à 100 cerfs par miles2, soit 5 fois plus que la moyenne (JOLY et al., 2003). L’objectif initial du Wisconsin était de pratiquer une éradication massive sur l’aire géographique atteinte (15.000 cerfs), afin d’enrayer la maladie (NOLEN, 2002), mais cela n’a pas été suffisant car la propagation était trop avancée. Il s’agit maintenant de contrôler la maladie ; les effets ne seront pas visibles avant une dizaine d’années.

Les modèles épidémiologiques suggèrent que l’abattage sélectif des animaux malades est plus efficace que l’abattage aléatoire, à condition de pouvoir tester un minimum de 50 % de la population et d’éliminer rapidement les individus malades (GROSS et MILLER, 2001). Des tests sur animaux vivants ont été développés sur un petit nombre d’individus (voir deuxième partie, chapitre V) : il s’agit du prélèvement des amygdales sous anesthésie.

98 Les structures qui s’engagent dans cette voie doivent pouvoir assumer les coûts (anesthésie des cerfs, personnel) sur une large population (WOLFE et al., 2004).

4) Recommandations pour les échanges d’animaux

L’association des aquariums et zoo (AZA) a régi les déplacements d’un établissement à l’autre en fonction du statut de l’établissement donneur face à la MDCC (TRAVIS et MILLER, 2003). Ce guide s’applique aux cervidés et autres ongulés comme suit : espèces à haut risque (espèces identifiées comme réceptives), espèce à risque (espèces dont la réceptivité est inconnue), espèces de risque faible ou nul (ongulés non cervidés).

Les mouvements d’une institution non accréditée par l’AZA vers une institution accréditée sont possibles à condition que les cervidés viennent d’une zone non enzootique (selon les critères de surveillance émis par l’AZA) et que les cervidés et ongulés ne présentent pas de signes ou antécédents de maladie neurologique ou débilitante.

Pour les échanges entre élevages, ce sont les états qui gèrent les autorisations. Par exemple, le Canada avait interdit l’importation de cervidés vivants entre 1990 et 1999. Ces règles sont amenées à changer régulièrement.

Les méthodes de dépistage de routine par prélèvement d’amygdales sous anesthésie pourraient s’ajouter aux mesures décrites ci-dessus.

C. La MDCC et l’homme

Suite à la découverte de cas de nouveau variant de la MCJ, il est naturel que la découverte de la MDCC puisse faire craindre une zoonose, soit par la consommation directe de venaison, soit par une transmission au cheptel domestique.

1) Existe-il un risque pour l’homme ?

• Etude des cas de MCJ

Des enquêtes de terrain sur des patients atteints de MCJ avec une forme inhabituelle ont été effectuées ; jusque là, aucun lien entre la MDCC et ces cas de MCJ n’a été mis en évidence (BELAY et al., 2001). De même, la mort de 3 chasseurs du Wisconsin, atteints de maladie du système nerveux central et qui participaient souvent à des repas de chasseurs avec des animaux provenant potentiellement du Colorado (zone enzootique de la MDCC) n’a pu être reliée à la MDCC (HOEY, 2003 ; Centers for Disease Control and Prevention, 2003 ; BELAY et al., 2004).

Depuis 2001, l’état du Colorado, zone originelle de l’enzootie de MDCC, a mis en place un programme de surveillance qui identifie les patients présentant une atteinte neurologique atypique associée à des éléments épidémiologiques inhabituels tel qu’un jeune âge ou une exposition potentielle à la MDCC. Depuis, 5 à 10 cas sont examinés chaque année (ANDERSON et al., 2007).

A l’échelle nationale, aucune augmentation des cas de MCJ n’a été relevée depuis 1996 (BELAY et al., 2001) ; de même dans le Colorado, une étude portant sur les certificats de décès entre 1979 et 2001 n’a révélé aucune augmentation des cas de MCJ, ni d’augmentation du risque entre les zones enzootiques et non enzootiques de MDCC (MAWHINNEY et al., 2006).

99 • Etudes expérimentales

Des études comparatives chez des modèles transgéniques de souris exprimant la PrP humaine n’ont pas mis en évidence de transmission de la maladie en inoculation intracérébrale. A défaut de résistance absolue de l’homme à l’agent de la MDCC, on peut néanmoins conclure à une plus grande résistance de l’homme vis-à-vis la MDCC que de l’ESB (KONG et al., 2005).

L’insuffisance de transmission de l’agent aux souris transgéniques humanisées après inoculation intracérébrale suggère un risque faible de transmission à l’homme, surtout dans la mesure où la transmission naturelle se ferait par voie orale.

Les modèles de conversion en milieu acellulaire de PrPc humaine en PrPres en présence de PrPcwd montrent que l’efficacité de cette conversion est 14 fois inférieure à la conversion entre cervidés ; cela indique que cette transmission est limitée par l’incompatibilité des protéines PrP (RAYMOND et al., 2000).

La transmission à l’homme par consommation de venaison ou par contact avec des animaux malades n’a pas été démontrée à ce jour. Néanmoins le risque zoonotique ne peut être exclu de façon définitive, mais parait très peu probable en l’état des connaissances.

2) Information et précautions à respecter lors des manipulations

Toutes les personnes amenées à manipuler des cervidés qui auraient pu contracter la MDCC doivent prendre des précautions, que ce soit les chasseurs et les consommateurs associés, les gardes de la faune susceptibles de manipuler des cadavres, les techniciens et vétérinaires qui réalisent les autopsies et les prélèvements.

• Précautions pour le personnel de laboratoire

Pour le personnel de terrain et de laboratoire, la recommandation de base est le port de lunettes et de gants lors de la manipulation des cervidés de MDCC, d’autant plus que la salive s’est révélée infectieuse.

Chaque état est responsable de ses lois. Par exemple l’agence canadienne d’inspection des aliments a établi des normes portant sur l’organisation des installations (organisation des salles, type de revêtement, le périmètre de confinement, le recyclage de l’air, l’espace de confinement), la gestion du personnel (port de protection, blouse spéciale, pas de bijou….) et les règles de confinement et d’isolement des animaux. Il fixe aussi les règles de la décontamination tout en rappelant que ces normes sont très évolutives du fait des découvertes scientifiques régulières.

• Information des chasseurs

Les chasseurs sont les premiers concernés par la MDCC, car même si la transmission à l’homme n’a pas été mise en évidence, la prudence est conseillée par les autorités. Les chasseurs ont aussi un rôle très important dans le fonctionnement du dépistage et de l’éradication.

Un site internet (Chronic wasting disease alliance) a été crée en 2002 par l’Alliance de 3 associations d’amateurs de cervidés : Boone and Crockett Club, Mule Deer Foundation, et Rocky Mountain Elk Foundation .

100 Ce site destiné aux chasseurs, mais aussi à un public plus large, concentre les informations concernant la MDCC, les nouveautés, la mise à jour des découvertes de cas, les liens vers les sites de chaque état et les recommandations principales ainsi qu’un accès aux différentes réglementations.

Les offices de santé publique et de faune sauvage conseillent aux chasseurs de prendre de simples précautions lorsqu’ils manipulent un animal qui pourrait avoir été exposé à la MDCC :

- ne pas tirer, manipuler ou consommer un animal qui agit anormalement ou semble malade. - porter des gants en latex ou en caoutchouc lors de la préparation du cerf sur place. - désosser l’animal, éviter de couper les os, l’encéphale ou la moelle épinière. - minimiser les manipulations du cerveau et de la moelle épinière. - ne pas utiliser un couteau de cuisine, ou alors réserver l’utilisation de celui-ci pour la section des régions à risques. - désinfecter le couteau avec de l’eau de javel. - se laver les mains et laver les instruments après la préparation du cadavre. - éviter de consommer les organes classés infectés comme le cerveau, la moelle épinière, les yeux, la rate, les nœuds lymphatiques d’animaux chassés, même si la découverte récente de l’infectiosité du sang suggère qu’aucun tissu ne peut être considéré comme indemne. Enlever tous les tissus graisseux afin de retirer les nœuds lymphatiques restants. - si vous faites appel à un professionnel pour la préparation de l’animal, vérifiez qu’il sépare bien les carcasses. - Eviter de consommer la viande de tout animal testé positif à la MDCC.

Le dernier conseil semble évident, mais il arrive fréquemment que les chasseurs consomment la viande avant d’avoir les résultats, l’animal ayant l’air en bonne santé. En effet, les chasseurs associent la MDCC à un état de maigreur, et ne réalisent souvent pas que l’animal peut être en état d’incubation.

La crainte de la transmission à l’homme demeure une priorité sanitaire, d’autant plus à cause de l’organisation à caractère familial de la filière. Par exemple dans le nord du Canada, la consommation de caribou fait partie de l’alimentation de base des autochtones ; or, ce circuit est quasiment impossible à contrôler. La crainte d’une enzootie est donc prédominante. De même d’après une enquête menée par les banques de sang, 40 % des donneurs américains ont déclaré avoir mangé ou du cerf ou du wapiti issu de la faune sauvage (BELAY et al., 2001).

101 Conclusion

La maladie du dépérissement chronique des cervidés (MDCC) est une maladie du système nerveux central appartenant au groupe des encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST), dont la pathogénie est encore mal connue, tout comme l’agent infectieux responsable de la maladie. La transmission se fait à partir de l’environnement, et est à l’origine de l’extension importante de la maladie à travers le continent nord-américain et en Corée du Sud suite à l’importation d’animaux captifs contaminés. L’incertitude quant au devenir de la MDCC dans la population animale, ainsi que le risque potentiel de transmission à l’homme inquiètent fortement les autorités sanitaires nord-américaines qui sont mobilisées pour combattre cette maladie émergente. Les connaissances sur la maladie et sur les cervidés doivent être approfondies avant de pouvoir développer des programmes d’éradication efficaces. Jusque là les principales mesures prises visent à prévenir l’extension de la MDCC à de nouvelles régions. La diminution de la densité des cervidés ainsi que la mise en place de dépistage ante mortem dans certaines zones urbaines avec des abattages sélectifs sont en attente de résultats effectifs. La MDCC, pouvant décimer la population de cervidés et étant une zoonose potentielle, doit donc être prise au sérieux par les autorités sanitaires ; il s’agit dans un premier temps de repérer les territoires contaminés afin d’en évaluer l’étendue et la portée en Amérique du Nord, mais aussi en Europe, aujourd’hui indemne a priori, où vit une population importante de cervidés.

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Annexe 1 : la liste des Matériaux à risques spécifiés en France

Annexe 2 : taxonomie des Cervidés

117 Annexe 1 : la liste des matériaux à risques spécifiés en France

Matériels à risque spécifiés retirés des circuits Espèce bovine Espèces ovine et caprine alimentaires

CERVELLE ET YEUX le crâne, à l'exclusion le crâne : de la mandibule, y - y compris les yeux mais à l'exclusion de la compris la cervelle et cervelle, des ovins et caprins âgés de moins de 6 les yeux, des bovins mois ; âgés de plus de 12 - y compris les yeux et la cervelle, des ovins et mois. caprins âgés de 6 mois et plus, - y compris les yeux et la cervelle, des ovins et caprins nés ou élevés au Royaume-Uni, quel que soit leur âge.

AMYGDALES bovins quel que soit ovins et caprins quel que soit l'âge, y compris ceux l'âge. nés ou élevés au Royaume-Uni.

MOELLE EPINIERE bovins âgés de plus ovins et caprins âgés de plus de 12 mois. de 12 mois. (Bien qu'elle ne soit pas classée MRS, la moelle épinière des ovins et caprins de moins de 12 mois doit également être retirée avant la remise au consommateur final (à l'exception de la moelle épinière des ovins et caprins d'un poids net carcasse inférieur à 12 kg.)

RATE ovins et caprins quel que soit l'âge.

INTESTINS du duodénum au uniquement l'iléon des ovins et caprins, quel que rectum, y compris le soit l'âge. mésentère, des bovins quel que soit l'âge.

COLONNE VERTEBRALE bovins âgés de plus y compris les ganglions de 24 mois rachidiens, mais à l'exclusion (dérogation des vertèbres caudales, des permettant la sortie de apophyses épineuses et l'abattoir en vue du transverses des vertèbres retrait dans les cervicales, thoraciques et ateliers de découpe lombaires et de la crête agréés ou dans les sacrée médiane et des ailes boucheries du sacrum autorisées).

(Source : site internet du ministère de l’agriculture [www.agriculture.gouv.fr] mise à jour du 1er décembre 2006)

118 Annexe 2 : taxonomie des Cervidés ™ Sous-famille ¾ Genre ƒ Espèces • Sous-espèces ™ Cervinae ¾ Cervus • Cervus elaphus - Cervus elaphus canadensis (extinction de l’espèce) - Cervus elaphus nelsoni (wapiti des montagnes Rocheuses, Rocky mountain elk ou American elk) - Cervus elaphus mannitobensis - Cervus elaphus elaphus (cerf rouge ou d’Europe, red deer) - Cervus elaphus corsicanus (cerf rouge de Corse) - Cervus elaphus scoticus (cerf d’Ecosse) - Etc… • Cervus nippon (sika deer) • Cervus sp. ¾ Dama • Dama dama (daim ou fallow deer) ¾ Etc....

™ Odocoileinae ¾ Alces • Alces alces (orignal) ¾ Capreolus • Capreolus capreolus ( chevreuil ou western roe deer) ¾ Odocoileus • Odocoileus hemionus (cerf mulet ou mule deer) - Odocoileus hemionus columbianus (cerf à queue noire ou black-tailed deer) - Odocoileus hemionus crooki - Odocoileus hemionus hemionus - Odocoileus hemionus sitkensis • Odocoileus virginianus (cerf de Virginie ou white-tailed deer) - Odocoileus virginianus dakotensis - Odocoileus virginianus texanus - Odocoileus virginianus virginianus • Odocoileus sp. ¾ Rangifer • Rangifer tarandus (caribou ou reindeer) - Rangifer tarandus caribou - Rangifer tarandus dawsoni - Rangifer tarandus groenlandicus - Rangifer tarandus pearyi ¾ Etc… ™ Etc… (Source : site internet du National Center of Biotechnology Information )

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