TEST-MILON Commune de Sementron () et ses Seigneurs avec un plan et deux photogravures hors-texte

Etude Historique par R. MOTHU

AUXERRE

IMPRIMERIE MODERNE, 3, PLACE ROBILLARD

1934 LÉGENDE

A — Fossé pratiqué par Monsieur de Champcour pour tirer des pierres dans son allée. B — Allée à Monsieur de Champcour. C — Partie de l'allée B, emblavée en chenevière. D — Puits pratiqué dans l'héritage à Simon Boisseau. E — Crot Regnard. F — Héritage audit Simon Boisseau. G — Maison et Jardin à Etienne Musard. H — Chenevière à Jean Cottard. I — Chenevière à Monsieur de Champcour. K — Chenevière à Pèlerin Puissant. L — Chenevière à Marie Puissant. M — Chenevière à Edme Puissant. N — Maison et Jardin à Juste Roux. O — Chenevière à Claude Allard. P — Chenevière à Antoine Allard. Q — Maison et aisance à Edme Berteau. R — Avant-cour du Château à Monsieur de Champcour. S — Château, Jardin et basse-cour au même. T — Maison et aisance à Jérôme Roux. V — Maison et aisance à Jean Cottard. X — Aisance à Edme Moffron.

PRÉFACE

Il y a déjà plusieurs années que je me proposais d'écrire l'histoire de Test-Milon ; ce petit coin de la qui domine la contrée devait avoir un passé historique intéres- sant à plus d'un titre. Cependant, ma surprise fut grande lorsque je vis apparaître comme possesseur de ce domaine, pendant plus de six siècles, la maison de Prie, illustre famille d'où sont sortis tant de membres distingués: hommes de guerre, diplomates, chambellans, hommes d'église, que sais-je? avant tout serviteurs dévoués du Roi et de l'Etat... Les Archives départementales de l'Yonne m'ont fourni une ample moisson de documents. Mais je ne manquerai pas d'ex- primer ma reconnaissance à M. le Comte de Lambertye, pro- priétaire actuel du domaine de Test-Milon, pour la bienveil- lance avec laquelle il m'a confié les archives de son château Trésor inestimable ! Grâce auquel j'ai pu reconstituer la physionomie de Test-Milon à travers les vicissitudes de son histoire. J'exprime également ma gratitude à M. de Vathaire de Guerchy, l'un des meilleurs historiens de la Puisaye, dont les renseignements m'ont été si précieux pour l'établissement de la généalogie de la famille de Gentil de la Breuille ; à M. le Vicomte Joseph de la Celle, qui, avec une bonne grâce parfaite, m'a apporté sa contribution, riche en documents inédits, sur la famille André de Champcour. M. l'abbé Rouanet, curé de Sementron, avec beaucoup d'amabilité m'a communiqué ses observations sur la chapelle de Test-Milon. Qu'il trouve ici l'expression de mes remercie- ments ! J'ajoute que toutes les pièces qui m'ont passé par les mains ont été soigneusement contrôlées. Puisse ce faible essai, qui sera complété par l'Histoire de Sementron, éveiller le goût des études locales et susciter des imitateurs. René MOTHU. Juillet 1934.

TEST-MILON et ses Seigneurs

CHAPITRE PREMIER TEST-MILON : SON ORIGINE. LE CHATEAU. LA CHAPELLE. LES FOIRES. LE COMMERCE ET L'INDUSTRIE. PROFESSIONS LIBÉRALES. I Test-Milon (1) (48 habitants) est un hameau dont la plus grande partie dépend de Sementron (2). La distance qui le sépare de ce bourg est de 3 kilomètres. Bâti sur une éminence, il domine toute la contrée et de là, par un temps très clair, on aperçoit, s'estompant à l'horizon, les tours de l'abbaye de Véze- lay. Le chemin de grande communication n° 9 le met en rapport avec Lain et Taingy. Au point de vue géologique les terres de Test-Milon appartiennent à l'époque secondaire (oolithe moyenne). La forme du mot Test Milon a subi au cours des siècles quelques altérations: le Testœ Milonis de l'Abbé Lebeuf de- vient Taiz Millon (1519), Etaiz Millon (1561), Temillon ou Themillon (1693), Etais Milon (1780) (3) et enfin Test Milon. L'étymologie de ce nom s'apparente avec celle d'Etais (4) également Testœ et viendrait du latin tectum, toit, maison de Milon. L'origine de cette agglomération est sans contredit gallo- romaine et elle devait même avoir une certaine importance

(1) L'usage se répand actuellement de dire Le Test-Milon. Cependant Test venant de Testœ qui a donné également Etais, l'article n'était pas employé autrefois et nous avons cru être dans la logique en le suppri- mant. (2) L'autre partie dépend de la commune de Lain. (3) Max Quantin. Dictionnaire topographique de l'Yonne. (4) Etais, canton de Coulanges-sur-Yonne. en raison de la proximité de la voie romaine de Bourges à , par Entrains et , appelée, dans les actes, Che- min levé (1). Non loin de cet ancien chemin de communica- tion, existe même un tumulus qui a été ouvert il y a quelques années, malheureusement les fouilles que l'on y a faites n'ont donné aucun résultat. Si l'on s'en rapporte à l'abbé Lebeuf, ce lieu qui, comme nous l'avons vu, était appelé en latin Testœ Milonis, du nom de son possesseur Milon, aurait servi de sépulture aux combattants morts à la bataille de Fontenoy-en-Puisaye (25 juin 841). M. Challe (2), dans son étude si documentée sur la bataille des trois rois, semble partager cette opinion. Qu'il nous soit permis à ce sujet de faire quelques réserves. Test Milon est situé à quatre kilomètres environ, à vol d'oiseau, de Fontenoy et, selon la coutume du IX siècle, dans les mêlées, les combattants étaient inhumés à l'endroit où ils tombaient, et jamais aucune découverte d'ossements ni d'armes n'a été faite pour attester que ce lieu ait été réellement un ossuaire. Son origine est plus ancienne. Bien qu'aucun document ne nous le révèle, il est permis de conjecturer que Test-Milon fut ravagé, sinon anéanti, pendant la guerre de cent ans. Nous savons, en effet, que les bandes du soudard anglais Robert Knolles, dont le quartier général était situé à Malicorne, semaient la dévastation et le pillage de 1358 à 1360 dans nos contrées. Au siècle suivant, la vaillante Lorraine, en chevauchant d'Auxerre à Gien, prit-elle la voie romaine d'Auxerre à Bourges et s'arrêta-t-elle à Test-Milon ? Nous ne le croyons pas, car ce chemin très long était infesté de pillards. Avec le savant abbé Parat, nous pensons que Jeanne d'Arc avait choisi un chemin plus court, celui de Saint-Sauveur, qui était la voie que suivaient les pèlerins anglais en allant

(1) Chemin levé, était le nom communément donné aux voies romaines, à cause de leurs chaussées en élévation au-dessus du sol.

(2) A. Challe. Bulletin de la Société des Sciences Historiques et Naturelles de l'Yonne, année 1860.