Thèse professionnelle MBA Marketing et Commerce sur Internet 2010 - 2011

La révolution mobile, vers le shopping 3.0 ?

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Vincent Tessier Sous la direction de Vincent Montet Avril 2012

Remerciements

Je tiens à remercier les personnes suivantes pour leur inspiration, leur soutien et leur confiance dans la réalisation de cette thèse et durant mon parcours au sein du MBA Marketing et Commerce sur Internet :

 Un grand merci à Vincent Montet pour sa pédagogie, sa bienveillance et son exigence.  Merci à Alexandre Stopnicki pour son enthousiasme, son amour du digital communicatif et ses nombreuses incitations au blogging.  Merci au corps professoral exceptionnel du MBA MCI1 et plus particulièrement à Yann Le Mort, Jonathan Vidor, Jean-Michel Billaut et Eric Briones.  Merci à l’ensemble de mes camarades de la promotion part-time 2010/2011 ainsi qu’à ceux de la promotion full-time, les apéros de fin de séminaire doivent se poursuivre !  Merci à tout le réseau d’anciens MCI qui constitue désormais un formidable tissu de relations potentielles et d’entraide.  Un merci tout particulier à Thierry Pires avec qui les échanges tout au long de l’année ont été un plaisir et une source de motivation continue. J’espère que la Word Press Academy aura une suite !  Un merci tout particulier à ma femme, Tatiana, qui m’a soutenu dans cet exercice d’écriture difficile.  Enfin, merci aux professionnels qui ont pris le temps d’échanger lors d’interviews passionnants, notamment Bertrand Jonquois qui lançait au même moment son agence spécialisée sur le drive to shop : GOSHOP ! La liste de ces interviews se trouve en Annexe de ce document et leur retranscription complète sur le site : http//:vincenttessier.fr.

1 http://vincenttessier.fr/these-professionnelle/intervenants-et-vip-mba/

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« Quand une personne est connectée, sa vie change. Quand tout est connecté, c’est le monde qui change. Nous y sommes » Hans Vestberg

« Le futur est déjà là, il n’est tout simplement pas distribué équitablement » William Gibson

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Résumé

L’écriture de cette thèse professionnelle sur les impacts de la révolution mobile fut un long voyage. Réalisée dans le cadre du MBA Marketing et Commerce sur Internet de l’ILV, elle a commencé par la forte intuition que le mobile était plus qu’un nouvel écran. Au-delà de l’iPhone, du marché des applications et de la masse de chiffres qui abondent dès qu’on s’intéresse un tant soit peu au mobile, il me semblait évident qu’une révolution était en marche. Au fur et à mesure de ma documentation sur ce marché, peuplé d’acteurs puissants venant de bords très différents, j’ai pu préciser mon intuition initiale. Les lignes de force en jeu sont bien plus importantes qu’un énième écran, médias ou même qu’un nouveau canal de vente. Eric Schmidt a annoncé lors de la réunion des actionnaires de Google en 2011 que les deux prochains milliards d’utilisateurs d’internet à venir viendront par le mobile. L’ordinateur personnel n’aura été qu’une parenthèse, une porte d’entrée au réseau internet pour les pays riches et occidentaux. Le reste du monde a déjà sauté ce bref épisode technologique. L’internet fixe bouleverse notre économie depuis une dizaine d’années déjà, supprimant les intermédiaires dans nombre de secteurs. Le mobile ajoute deux nouvelles dimensions à cette révolution digitale, le temps et l’espace. Les consommateurs ont désormais accès à toute l’information disponible sur la toile n’importe où et n’importe quand : ils se transforment en « connected shoppers ».

Comment les marques peuvent-elles réussir leur transformation pour accompagner leurs clients ? Qu’est- ce que le mobile apporte de nouveau en termes de marketing pour les marques ? En quoi l’internet mobile fait-il un pont entre commerce traditionnel et commerce digital ?

J’ai d’abord examiné en profondeur le marché du mobile, son histoire, ses acteurs, ses nouveaux entrants, les plateformes et les agences spécialisées. J’ai ensuite étudié les fondamentaux du marketing mobile : le choix de sa présence mobile, la distribution de son application, son monitoring ainsi que l’éco-système publicitaire mobile en plein essor. Enfin, je me suis intéressé aux leviers mobiles qui permettent aux marques d’accompagner leurs clients à chaque étape de leur parcours d’achat physique. Les enseignements sont à la fois stratégiques et opérationnels. D’un point de vue stratégique, une marque aujourd’hui ne peut plus justifier son absence ou sa présence molle sur le média mobile. Ne pas être présent dans un résultat de recherche mobile d’un client potentiel, c’est se mettre en danger. D’un point de vue opérationnel, plusieurs axes et cas concrets sont détaillés ici et devraient orienter le lecteur sur la bonne voie en fonction de sa problématique métier. Enfin, le shopping 3.0 prend forme avec le mobile et l’e-transformation du point de vente va rapidement devenir une priorité pour le secteur de la distribution.

Cette thèse a pour objectif d’éclairer les professionnels du secteur sur la révolution mobile en cours. Par la nature complexe des questions abordées, qui concernent ce matériau vivant qu’est le digital, ce document est déjà obsolète avant même son impression. J’invite mes lecteurs à poursuivre la réflexion et la conversation sur mon blog2.

2 http://vincenttessier.fr/

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Summary

The writing of this professional thesis on the mobile revolution and its impacts was a long journey. Carried out during my MBA studies, it first started by a strong intuition that mobile was not just another screen. Beyond the iPhone phenomena, the apps tornado and the incredible amount of data you meet when you start to be interested in mobile, it came to me that a revolution was happening. As I was digging this market, crowded by very different and powerful inhabitants, I finally clarified my initial feeling. The lines of force at stake are far more important than just building a new media or even distribution channel. Eric Schmidt announced in 2011 that the next two billions of internet users will come from mobile. The personal computer would have been just an interlude, a door through the Internet for western and rich countries. The rest of the world has already skipped this brief technological episode. Internet changes the face of our economy since more than a decade now, disturbing more than one industry. Mobile is adding two new dimensions to the game, time and space. Consumers have now all the information available on the web anytime, anywhere: they are turning into “connected shoppers”.

How brands can possibly succeed their transformation in order to go with their clients? What does mobile bring new on the table in terms of marketing? How is mobile internet a bridge between e-commerce and traditional distribution?

I first examined deeply the mobile market, its history, its parties involved, its new comers, the platforms and the specialized agencies. Then I studied the basics of mobile marketing: the choice of a mobile presence, the distribution of an application, its monitoring as well as the fast-growing mobile advertising industry. Finally, I highlighted the mobile levers, which enable the brands to help their clients during each step of their purchasing process. The lessons drawn are both strategic and operational. From the strategic point of view, a brand can’t make excuses for its absence or sluggish presence on the mobile medium. Not being present in the searching results on a potential client’s mobile is to put oneself in danger. From the operational point of view, several main lines and real cases are detailed here and should drive the reader on the right way according to his own professional issue. Eventually, mobile is shaping a new way of shopping, the shopping 3.0, and being a connected store will soon be the priority for the retail industry.

The objective of this thesis is to enlighten marketers on the current mobile revolution. Considering the difficulties to deal with digital, which is a living matter, this document is out-of-date before its printing. Therefore, I invite my fellow readers to carry on with these thoughts and continue debating on my personal blog3.

3 http://vincenttessier.fr/

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Mots clés

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Recommandations synthétiques

Le mobile connaît une vitesse d’adoption jamais vue dans l’histoire des technologies. Il y a aujourd’hui 6 milliards de personnes équipées de téléphones mobiles, soit 87% de taux de pénétration. Les cycles d’innovation des terminaux s’accélèrent et la capacité des réseaux augmente à mesure que les usages se développent. Pour beaucoup, avoir internet dans sa poche et être en permanence connecté est devenu naturel. L’usage du mobile en points de vente est une tendance de fond irrésistible. La localisation en temps réel est devenue une réalité. Les marques commencent à peine à intégrer les bonnes pratiques pour s’adresser à leurs clients sur internet que la donne change. L’apparition du mobile rebat les cartes et donne un goût d’obsolescence aux stratégies marketing en place. Quels sont les changements majeurs qu’apporte le mobile ? Comment les marques doivent-elles réagir face à l’intrusion du digital dans le monde physique ? Le rêve de chaque directeur marketing de personnaliser son message à chacun de ses clients est désormais possible.

1/ L’évolution des comportements d’achats

Le mobile apporte deux nouvelles dimensions fondamentales au digital : l’instantanéité et la localisation. Les consommateurs veulent désormais accéder à l’information, aux produits et aux marques de manière instantanée. Le temps de cerveau disponible augmente à mesure que les temps d’attente disparaissent. Etre là quand un client ou un prospect recherche une information, quels que soient le support et le lieu, doit devenir une règle pour chaque organisation. Plus le temps d’attendre qu’il soit revenu derrière son écran d’ordinateur ou qu’il regarde une publicité à la télévision. L’ordinateur fixe est mort et la TV telle qu’on la connaît est en train de mourir. Les écrans ne se cannibalisent pas, ils se superposent. On parle de multitasking pour décrire leur consommation médiatique simultanée. Les consommateurs préparent toujours leurs achats avant de se déplacer. Mais la recherche d’informations ne se fait plus devant son ordinateur mais directement sur le point de vente. Les applications de comparaison des prix et d’avis de consommateurs comme ou Goodguide sont plébiscitées. Ces applications répondent au besoin des consommateurs d’avoir une information immédiate. L’immédiateté et la vitesse deviennent des prérequis. Le chemin le plus rapide aujourd’hui pour toucher un consommateur est le mobile.

La localisation est la deuxième dimension importante à prendre en compte. La notion d’espace est en train d’être bouleversée. Je suis dans les transports en commun et en même temps présent sur avec mon identité numérique. L’ubiquité est désormais une réalité. Le réel et le virtuel se superposent. A mesure que les consommateurs expérimentent l’internet en mobilité, leurs attentes de contextualisation vont grandissantes. Foursquare et d’autres services permettent déjà de pousser des offres promotionnelles ou des publicités en fonction de la position géographique. « Think global, act local », ai-je appris durant mes études en école de commerce. On parlait à l’époque de stratégie internationale et de leur adaptation nécessaire pays par pays. Nous ne sommes plus à ce niveau de vue. Nous sommes désormais au niveau du pixel, c’est-à-dire de la rue. Les marques doivent désormais offrir du contenu contextualisé et géolocalisé.

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Google a récemment proposé la notion de ZMOT en référence au corpus théorique développé par Procter & Gamble pour souligner l’importance du changement de paradigme en cours. Les enseignements sont les suivants : le processus de décision a changé ; ce qui a été un message publicitaire est désormais une conversion. Le bouche à oreille n’a jamais été aussi important. Ce mouvement touche toutes les catégories de produits et enfin le rôle central du mobile aujourd’hui. Le consommateur n’a jamais été aussi versatile et difficile à combler.

2/ Quelle stratégie mobile mettre en place ?

La première chose à analyser est votre présence mobile. Est-ce que ma marque est présente sur le mobile et de quelle manière ? A l’heure de l’expérience d’achat, chaque contact avec la marque est important. Laisser les mobinautes surfer sur un site internet non optimisé pour le mobile est une expérience catastrophique. Une présence mobile est aujourd’hui à la portée de toutes les marques et une redirection simple des utilisateurs venant d’un moteur de recherche sur mobile est la base. Le choix du dispositif à mettre en place dépend de chaque secteur, de la typologie de business et de la cible marketing. Beaucoup d’encre a coulé à propos du choix des plateformes entre iOS, Android ou d’autres, sans parler du HTML5 qui peut rendre un site mobile ou une webapp agnostique aux plateformes. La mode est au responsive design et au mobile first. Soit. Mais les marques ne peuvent refondre tout leur dispositif digital tous les ans. Paul Berney, le CMO de la MMA (Mobile Marketing Association) rappelle que la mission des équipes marketing restent la même : acquérir des clients, les fidéliser et construire la marque4. Résolvez une fois pour toute le débat sur la technologie ou prenez conseil auprès des nombreuses agences spécialisées qui ont essuyé les plâtres depuis des années sur ces questions, et commencer à bâtir votre stratégie mobile. A quel besoin va répondre mon application ou mon site mobile ? Dans quel contexte mes clients vont-ils l’utiliser ? Quels services à valeur ajoutée vais-je pouvoir apporter avec les notions d’instantanéité et de localisation ?

Les solutions pour alimenter une présence mobile sont nombreuses. Un bon référencement dans les stores d’applications commence par le choix de la catégorie, le logo et un nom explicite de l’application. Un plan de mises à jour de l’application doit être établit en amont du lancement. C’est un levier important de récurrence d’usage et de fidélisation. Les services de promotions d’applications sont très efficaces mais ne suffisent pas à soutenir durablement une présence mobile. Pour les sites mobile, une attention particulière doit être apportée au référencement naturel sur le mobile. Google a lancé une version dédiée de son robot et les critères habituels de rapidité d’affichage et d’optimisation du code s’appliquent. Pour les organisations ayant des moyens importants, une campagne pluri-média est la voie royale pour faire connaître l’application et surtout le service inédit qu’elle apporte à leurs clients. Pour les budgets modestes, une campagne sur internet et notamment sur les sites spécialisés dans les applications est un minimum. Enfin, diffuser largement sur les médias Paid et Owned est essentiel. Pour le Paid, il s’agit de mentionner l’application ou de placer un code 2D renvoyant vers la page de téléchargement de l’application sur les

4 Webit Congress, Octobre 2011, Istanbul, Turkey, intervention de Paul Berney : http://bit.ly/yX7sQg

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créations publicitaires des plans médias en cours. Pour le Owned, il s’agit de la même chose mais sur tous les actifs de l’organisation : plaquette, site internet, point de vente, carte de visite des employés…

La conquête : Le mobile devient un média à part entière à mesure que le temps passé dépasse celui d’autres médias. Les applications de jeux sur mobile intègrent de plus en plus de publicités. La start-up Kiip à même pour ambition que les marques récompensent les utilisateurs à chaque niveau passé. Sur la partie display mobile, les régies mobiles sont en pleine phase de maturité technologique et de consolidation d’audience. Les offres branding sont désormais une réalité avec des formats publicitaires faisant la part belle au HTML5 avec par exemple Sprout d’Inmobi et Loodies en France. Les offres à la performance sont nombreuses et le coût par téléchargement se généralise rapidement. Google fusionne sa régie Admob dans Adwords et rend son inventaire disponible sur les adexchanges. L’achat automatisé sur le mobile suit le rythme du display sur internet et sera clairement une réalité d’ici trois ans. Les campagnes mobiles ont des capacités de ciblage jamais vues sur internet. La localisation est bien sûr le ciblage le plus prometteur, certaines régies comme Admoove en ont fait leur spécialité.

Le SMS reste l’arme absolue du mobile. Avec 100% de compatibilité, des capacités nouvelles de ciblage grâce au geofencing et la possibilité de renvoyer vers une application ou un site mobile, ce levier ne mourra pas avec la généralisation des smartphones. Le QR a longtemps déçu mais semble trouver de réelles applications grâce au packaging étendu, à sa capacité à faire du lien dans des dispositifs multi- canaux. Son utilisation dans le cadre de boutiques éphémères permettant aux consommateurs d’acheter un produit en pleine gare ou à un abri bus lui assure de beaux jours. Les mécaniques autour de la gamification sont plus que jamais d’actualité pour tous les dispositifs de drive to store. Un bel exemple en France est la start-up Scanbucks qui permet de gagner des points à chaque manipulation de produit ou de passage en caisse. Incentiver le check-in en magasin avec une offre promotionnelle ou un jeu concours fonctionne très bien. Les dispositifs de réalité augmentée sont encore balbutiants et manquent d’applications concrètes et utiles pour se généraliser.

La fidélisation : Le mobile recèle en lui un atout de premier plan : il est personnel. Les marques sont désormais sûres que leurs messages atteignent les bonnes personnes. L’authentification en point de vente est un axe majeur que les enseignes doivent rapidement adopter dans leur stratégie de relation client. Les applications de dématérialisation de cartes de fidélité commencent à trouver leur public et apportent de réels services aux consommateurs. Les enseignes doivent clairement se positionner et adopter une stratégie exclusive ou s’ouvrir à ces nouveaux acteurs. Le smartphone introduit un nouveau medium, la notification. Il est particulièrement intéressant en termes de relation client et de fidélisation. Une application peut d’ailleurs être considérée comme un simple cheval de Troie permettant à une marque de pouvoir établir une communication plus intime et régulière grâce à ce medium.

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3/ Au-delà du mobile, anticiper la révolution à venir du commerce

L’acronyme SOLOMO a beaucoup circulé pour évoquer le nouveau paradigme digital. Il reflète particulièrement bien l’attitude que les marques doivent adopter aujourd’hui. Elles doivent être sociales, locales et mobile. Par ailleurs, Foursquare est le versant utilisateur de cette nouvelle donne, il y a aura vraisemblablement un versant du côté des marchands. Beaucoup de petits commerces et de magasins de proximité vont commencer à gérer leur affaire de leur smartphone. C’est sans doute la raison pour laquelle Square vient d’être valorisée un milliard de dollars. Mais le mobile n’est que le haut de l’iceberg ; le clairon d’une bataille à venir encore plus importante se fait déjà entendre. La distribution physique ne peut plus se contenter d’être un endroit où l’on vend des produits. L’introduction du digital dans l’expérience d’achat offline pose la question de l’évolution du point de vente. Face à l’utilisation du mobile en points de vente, les enseignes ont le choix de résister ou d’accompagner le mouvement. Il faut qu’elles reprennent la main, ouvrent leurs réseaux Wifi et invitent les clients à utiliser leurs services. Le point de vente se connecte et c’est une chance. La distribution traditionnelle a désormais les moyens d’utiliser les armes qui ont fait le succès des pure players. Le magasin n’est pas mort, il est au cœur de la convergence entre le digital et le physique. Les enseignes ayant un site internet doivent rendre accessible en mobilité leurs fiches produits et les avis consommateurs. Elles doivent faire évoluer leur relation d’une nature purement transactionnelle vers quelque chose de plus expérientiel. L’introduction de bornes interactives ou de tablettes en magasin est une partie de la solution. Ces dispositifs permettent de mettre en pratique les synergies évidentes entre le site marchand et le point de vente. Les magasins peuvent voir leur surface rétrécir, du moins dans les zones de chalandise à forte densité. La transformation du point de vente en showroom est clairement un axe de développement pour certaines enseignes. Les armes de cette futures batailles sont peut-être dans le nouvel acronyme TODACLO, Touch, Data et Cloud. Les interfaces tactiles offrent de réelles expériences en magasin aux consommateurs. Les enseignes commencent à se rendre compte de la fantastique valeur de leurs données, notamment en terme de comportemental et de retail analytics. La somme des données venant des smartphones, des sorties caisse et des cartes bancaires est un gisement d’opportunités. Visa et American Express le font déjà et il y a fort à parier que les initiatives comme Google Wallet n’aient pas d’autres buts. Les données online vont améliorer le service et la personnalisation du commerce physique et inversement. Enfin, les données stockées dans le cloud sont la solution évidente aux exigences nouvelles de l’omnicanal. Les consommateurs ont une expérience d’achat unifiée ; ils veulent des prix cohérent et un service personnalisé, quel que soit le canal.

Le mobile apporte de nouvelles dimensions au marketing, replace le client au centre de la réflexion et challenge les réseaux de distribution. L’internet est enfin arrivé sur le mobile, rendant ce terminal plus intelligent et plus sensible à son environnement, en somme plus connecté. Pour les marques, c’est l’occasion de ne pas rater le départ comme cela a été le cas pour beaucoup au début d’internet. 2012 doit être l’année où le mobile doit prendre dans les stratégies marketing des grandes marques et des enseignes, la place centrale qu’il a dans la vie des consommateurs.

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Introduction

Internet est la 4ème révolution majeure que connait l’histoire humaine. Dire que l’arrivée d’internet bouleverse notre société est une lapalissade. Tous les aspects de la vie sont touchés ou vont l’être : la manière dont on s’informe, on achète, on communique, on rencontre, etc. La grande conversion numérique5, publié par Milad Doueihi, rend parfaitement compte de ce basculement de société dont nous sommes les témoins privilégiés. Notre époque est marquée par un double mouvement. D’un côté, Internet se répand dans tous les aspects de notre vie et séduit toutes les classes d’âge. De l’autre, émergent de nouveaux usages à mesure que se développent des services toujours plus innovants. L’internet mobile n’est qu’une prolongation de cette innovation technologique majeure qu’est Internet. A ceci près que sa croissance se fait huit fois plus vite, nous dit Mary Meeker de la société de capital-risque KPCB6. Nous constatons depuis quinze ans la formidable puissance d’Internet. Or, avoir cette puissance avec soi en mobilité, va accélérer la révolution en cours. La culture numérique s’enrichit de nouvelles dimensions : le corps avec le tactile, la voix grâce à la reconnaissance vocale, l’espace avec la localisation… Les spécificités du terminal créent de nouveaux usages. Pour toutes ces raisons, le mobile va permettre au digital de prendre toute sa mesure dans l’économie et dans nos vies quotidiennes. Certains vont même jusqu’à dire que le futur de l’internet est le mobile. Plusieurs entreprises commencent à appliquer le mantra « Mobile first », c’est-à-dire à penser mobile avant tout chose. Nous entrons dans une ère post-pc. Il y a dix ans, il y avait 700 millions d’abonnements mobiles contre 1 milliard de lignes internet fixes. Nous en sommes aujourd’hui à 5,9 milliards pour le mobile contre 2 milliards pour internet7. Tomi Ahonen prédit qu’il y aura plus de téléphones et d’abonnements mobiles que d’êtres humains sur terre d’ici 2013. Or, comme le dit Hans Vestberg de la société Ericsson : « quand une personne est connectée, sa vie change. Quand tout est connecté, c’est le monde qui change. Nous y sommes. » C’est cette révolution et ses implications marketing que j’ai choisis d’étudier.

Face à cette explosion du mobile, les annonceurs sont-ils prêts ? Après l’avènement du social qui redonne la parole aux clients, assiste-t-on à une révolution mobile qui va leur donner encore plus de pouvoirs ? Par ailleurs, les deux tendances font alliance car le social est un des usages les plus importants sur le mobile. Le terminal mobile est en passe de remplacer notre portefeuille et le succès de Square que le Président Obama s’apprête à utiliser pour sa campagne en atteste. Or, il faut bien constater que les annonceurs ne sont pas prêts voir qu’ils n’ont pas encore pris conscience de l’ampleur du phénomène. Malgré tout, l’essor du marketing mobile va s’opérer plus rapidement que ce que l’on a connu au début d’internet où il a fallu attendre le déploiement du réseau et des ordinateurs. Sur le mobile, tout est déjà là ou presque. En termes d’organisation chez les annonceurs, le mobile est à peine identifié et les stratégies sont encore trop peu nombreuses. La « communication marketing intégrée » est à la fois une tentative de

5 La grande conversion numérique5, Milad Doueihi, paru en Janvier 2008 aux éditions du Seuil 6 Techcrunch, Mary Meeker : smartphones will surpass PC shipments in two years, 26/11/10 : http://tcrn.ch/zePcSX 7 Tomi Ahonen, Almanac 2012 -“The most influential expert in mobile by Forbes” - http://bit.ly/xNcy97

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recentrer les expertises aujourd’hui éclatées dans divers départements8 mais également de mieux mesurer chaque action en fonction de la connaissance clients. Non seulement le mobile doit être intégré à ce mouvement de recentrage mais il a de surcroît la capacité de fédérer tous les canaux autour de lui.

John Donahoe, CEO d’eBay, estime que le shopping et le paiement vont être impactés par la technologie de la même manière qu’elle a impacté les médias depuis cinq ans9. Nous sommes au début d’une révolution de la distribution à la maison, en magasin et entre les deux. Il estime que sur la totalité des transactions du commerce physique, 50% ont été influencées à un moment donné par le digital. Les géants d’internet commencent à entrer dans le monde physique : Google10 et Amazon11 projettent de lancer des magasins physiques ; Facebook, iTunes et Amazon proposent des cartes prépayées en caisse et dans les bureaux de tabac permettant de consommer online. Les distributeurs traditionnels doivent s’approprier les armes du digital pour mener la contre-attaque. Elles peuvent rendre accessible leur catalogue digital sur le point de vente, par des bornes interactives ou en ouvrant le réseau wifi. Un réseau de distribution enregistre des millions de transactions tous les jours, ces données ont une grande valeur et restent inexploitée à ce jour. McKinsey pense que ce levier a un potentiel de 60% de marge opérationnel supplémentaire12. Les marques quant à elle ont aujourd’hui la possibilité de parler directement et de manière instantané à leurs clients et prospects. La distribution n’est plus la seule à être en contact direct avec les consommateurs, les marques peuvent entamer le dialogue et gagner ce « moments de vérité » qui a lieu dans les rayons des grands et des petits magasins.

Catherine Barba a édité un livre blanc sous l’égide de la FEVAD intitulé « la fin du e-commerce » où l’avènement du commerce connecté. Le mobile a la capacité de connecter le monde physique et le monde digital, c’est la réconciliation entre les pages web (URL : lien d’une page web) et la « vraie vie » (IRL : In real life). Certaines marques, accompagnées de leur agence, mettent déjà en place des dispositifs de ROPO, de drive et de Web to store. Il est temps d’arrêter de considérer le digital comme un monde virtuel, détruisant de la valeur et en concurrence avec le commerce physique.

Quels sont les spécificités du marketing mobile ? Sur quels plateforme faut-il se lancer et avec quelle technologie ? Comment optimiser sa présence mobile et surtout comment le faire savoir ? Quels sont les leviers de création de trafic en magasins et d’accompagnement sur le point de vente ? Quels sont les enjeux actuels autour de la sortie caisse, comment ma marque peut-elle en tirer profit?

Ce sont ces questions passionnantes que nous allons maintenant aborder. Une précision d’importance, partant du postulat que leur usage se fait majoritairement à domicile, les tablettes ne font pas partie du périmètre étudié et ne seront que brièvement évoquées. Je vous propose de nous intéresser tout d’abord au marché du mobile, ses acteurs et les nouveaux usages de la mobilité.

8 www.uda.fr, Comment les annonceurs peuvent mettre en place la communication intégrée, 17/03/11 : http://bit.ly/wITXDl 9 Ebayink youtube channel, John Donahoe at CES 2012, 12/01/12 : http://bit.ly/ygkmvL 10 forbes.com, Why is Google opening a retail store in Ireland? 10/02/12 : http://onforb.es/wR5nmQ 11 forbes.com, Amazon reportedly plans to open retail store in Seattle, 06/02/12 : http://onforb.es/yhVE3u 12 Mckinsey.com, Big Data :the next frontier for innovation, competition, and productivity, Mai 2011 : http://bit.ly/JlgicA

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Sommaire

Remerciements ...... 2

Résumé ...... 4

Summary ...... 5

Mots clés ...... 6

Recommandations synthétiques ...... 7

Introduction ...... 11

Sommaire ...... 13

1/ Le marché ...... 15

1.1/ La révolution des smartphones ...... 15

1.1.1/ Le parc mobile ...... 15

1.1.2/ Le terminal ...... 19

1.1.3/ Les plateformes ...... 22

1.3.4/ Les applications ...... 27

1.2/ Les acteurs ...... 30

1.2.1/ Le réseau mobile ou le « data tsunami » ...... 30

1.2.2/ Les opérateurs ...... 33

1.2.3/ Les constructeurs ...... 35

1.2.4/ Les agences ...... 39

1.3/ Les usages ...... 41

1.3.1/ Quels sont les usages du mobile ? ...... 41

1.3.2/ Time saving & Time killing ...... 43

1.3.3/ Les réseaux sociaux...... 44

1.3.4/ La localisation ...... 47

1.3.5/ Le m-commerce ...... 51

2/ Le marketing mobile ...... 55

2.1/ Développer la présence de votre marque sur le mobile ...... 55

2.1.1/ Comment être présent ? ...... 55

2.1.2/ Ergonomie mobile ...... 59

2.1.3/ Quelle distribution?...... 61

2.1.4/ Le search sur mobile ...... 65

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2.1.5/ Mobile Analytics ...... 68

2.2/ La publicité mobile ...... 69

2.2.1/ Les chiffres ...... 69

2.2.2/ Les acteurs ...... 72

2.2.3/ Les formats ...... 75

2.2.4/ La publicité locale ...... 78

3/ Vers le shopping 3.0 ...... 81

3.1/ Le drive to store ...... 82

3.1.1/ Le marketing promotionnel ...... 82

3.1.2/ Le Ropo ...... 88

3.1.3/ Les applications de promotions ...... 91

3.1.4/ Mapper le monde réel ...... 94

3.2/ Une expérience en magasin transformée ...... 100

3.2.1/ La comparaison des prix ...... 101

3.2.2/ Le packaging étendu ...... 104

3.2.3/ Le social shopping...... 108

3.2.4/ Le magasin connecté ...... 110

3.3/ Le check-out ...... 115

3.3.1/ La carte de fidélité ...... 115

3.3.2/ Le paiement mobile ...... 116

3.3.3/ Après l’achat ...... 123

3.4/ Vers l’omnicanal ...... 124

Conclusion ...... 128

Bibliographie ...... 130

Entretiens ...... 131

Annexes ...... 132

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1/ Le marché

Le marché du mobile a son propre écosystème, comprenant des acteurs historiques tels que les opérateurs et les constructeurs mais aussi de nouveaux entrants comme Google et Apple, venant du web. Les chiffres du marché du mobile connaissent des croissances telles qu’ils en deviennent vite obsolètes. Nous tenterons de présenter les plus importants. 2011 a été marqué par des ventes de smartphones record, consolidant ainsi les positions des nouveaux entrants. La bataille des plateformes bat son plein dans le but de séduire à la fois les utilisateurs, les opérateurs mais aussi les développeurs. Enfin, de nouveaux usages liés au mobile apparaissent, en premier lieu le m-commerce, qui est promis à un bel avenir.

1.1/ La révolution des smartphones

1.1.1/ Le parc mobile

Le mobile est un secteur en pleine émulation. Beaucoup de start-ups naissent pour proposer des produits et des services dédiés à ce nouveau support média. Les investisseurs également sont à l’affût des projets innovants qui seront les leaders de demain. Le mobile fait clairement partie des sujets en vogue, au même titre que le social et le real time bidding. La raison de cette soudaine ruée vers l’or est assez simple à comprendre. Le développement d’internet a été relativement lent car intimement lié d’une part à l’équipement des ménages avec des produits relativement chers et d’autre part au déploiement des réseaux de communications, inégales sur la surface du globe. L’Europe culmine à plus de 87 000 bit/s par utilisateur en moyenne (soit moins de 0,1 Mbit/s environ néanmoins) alors que l’Afrique est à 2 000 bit/s. Le décollage du mobile et de son usage media se base quant à lui sur un parc existant important, un cycle de renouvellement plus rapide (18 mois environs) et un coût du terminal bien inférieur. Cette conjoncture favorable ressemble à ce que l’internet a connu dans les années 2000. L’essor du mobile rebat les cartes et bouleverse bon nombre de secteurs et d’acteurs, y compris les sociétés de commerce électronique. Pour comprendre l’ampleur du marché qui se présente, il faut comparer les chiffres du mobile à ceux de l’internet. L’International Telecommunication Union (ITU), une branche des Nations Unies qui s’est donnée pour mission de connecter tous les habitants de la planète, estime à 35% la part de la population mondiale connectée à internet, soit 2,5 milliards de personnes13.

13 itu.int, Dossier Facts and Figures 2011 : http://bit.ly/AfMW2b

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Population connectée :

Aujourd’hui, 6 milliards de personnes sont équipées de téléphone mobile, soit 87% de taux de pénétration. Il y a également des disparités importantes en termes de qualité de réseau mobile : 90% de la population mondiale est couverte en 2G et seulement 45% en 3G. Ceci étant, les projections de l’internet mobile sont de 1 milliard environ en 2013 et de 5 milliards d’ici 201614. Ces chiffres vertigineux expliquent pour une bonne partie l’engouement actuel pour le mobile. Aux Etats Unis, plus de la moitié du parc mobile a accès à l’internet mobile, soit plus de 116 millions de personnes à fin Août 2011. Par ailleurs, dans de nombreux pays en développement, l’accès à internet se fait quasi exclusivement par le mobile, les investissements pour développer les infrastructures fixes n’ayant pas eu lieu.

Nombre d’abonnés à une ligne internet fixe et mobile :

14 Lefigaro.fr, Interview Hans Vestberg, président d’Ericsson, Le Figaro, 14/03/11 : http://bit.ly/rKpAK9

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Taux de pénétration du mobile et de l’internet fixe à haut débit :

Source: itu.int, Facts and Figures 2011 http://bit.ly/AfMW2b

Il faut noter que l’Asie comprend à elle seule la moitié des lignes mobile et que cela s’accélère. La Chine a connu un milliard de souscriptions mobiles en deux ans, mais seulement 18% du marché asiatique supporte le 3G. Dan Shey du cabinet ABI Research estime que d’ici deux ans, les déploiements du réseau 3G mais aussi 4G seront une réalité dans la région15. Ericsson, leader des réseaux mobile, est plus réaliste et évoque le chiffre de 15% de pénétration de la 3G au niveau mondial16. Le niveau du réseau est important afin de pouvoir supporter les besoins et la vitesse des terminaux. Le consultant Tomi Ahonen estime à 19% le taux de pénétration des smartphones et qu’ils devraient dépasser le milliard au cours du premier semestre 2012. Gartner avance qu’il s’est vendu 472 millions de smartphones dans le monde, une croissance de plus de 50% par rapport à 201017. En Europe, le taux de pénétration des smartphones est de 42% et aux Etats Unis de 39%18. La croissance est très forte avec 650 000 nouveaux utilisateurs par semaine environ19. Cela permet de penser que l’année charnière où les smartphones représenteront plus de la moitié du parc mondial ne saurait tarder à venir. Qu’est-ce que cela représente en termes de trafic ? ComScore estime que 8% de l’accès au web 5 se fait à partir du mobile aux Etats-Unis, 5% en Europe20. De manière générale on parle de connexion faite hors ordinateur fixe (non-computer device trafic), le mobile représentant la majorité des terminaux comme le montre le graphique ci-dessous21.

15 Silicon.fr, 6 milliards de téléphones mobiles pour 7 milliards d’humains, 29/11/11 : http://bit.ly/yCy2I2 16 Ericsson.com, Reports fourth quarter and full year, 25 /01/12 : http://bit.ly/wLibYm 17 Gartner, communiqué de presse du 15/02/12 : http://bit.ly/yDwGvx 18 comScore, Mobilens, EU5 and US, 3 month avg : http://bit.ly/xnHUtZ 19 businessinsider, Le graphique que vous devez connaître pour comprendre le marché du mobile, 07/11/11 : http://read.bi/zyLWBQ 20 comScore.com, communiqué de presse du 26/10/11 : http://bit.ly/wxF8Od 21 comScore.com, Etude Digital Omnivores, 16/11/11 : http://bit.ly/xa1tnW

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Bien que possédant une bonne infrastructure mobile, la France n’est qu’en 9ème position des pays les plus connectés à internet via le mobile ou tout autre appareil connecté. Au 3ème trimestre 2011, il y avait 67 millions de lignes mobiles selon l’ARCEP22, soit 103,2% de taux de pénétration. Ce chiffre comprend les 10,6% de parts de marché des MVNO.

Comme on le voit sur le tableau ci-dessus, le marché se divise en deux catégories : les cartes prépayées et les forfaits, payés en amont des communications. La part de marché de ces deux segments est stable. Ces deux offres s’adressent à des cibles différentes et induisent des cycles de renouvellement du terminal différents. Un renouvellement de forfait est souvent lié à un changement de téléphone, alors que les utilisateurs de cartes prépayées ne bénéficient pas des subventions des opérateurs pour changer de terminal.

En France, le taux d’équipement des téléphones mobiles est supérieur à 100%. Cependant, tous ces téléphones n’ont pas accès à internet. Sur ce parc installé, la part de smartphones est estimée selon les sources entre 11 et 18 millions de personnes. Médiamétrie estime à 18,3 millions le nombre de mobinautes et constate une croissance cinq fois supérieure à celle de l’internet fixe qui compte 39,4 millions d’utilisateurs23. Le Credoc et l’ARCEP ont publié fin décembre une étude qui avance le chiffre de 17% de la population française équipée en smartphones, avec de fortes disparités selon la profession et l’âge24.

22 Observatoire des marchés des communications électroniques en France – 3ème trimestre 2011 : http://bit.ly/sQ7JtH 23 Mediametrie.fr, Génération smartphone : Android en tête, 15/11/11 : http://bit.ly/ApbeOm 24 Credoc, Arcep : décembre 2011 http://slidesha.re/wgKv24

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Répartition de du taux d’équipement mobile selon la classe d’âge :

On voit clairement que les plus de 40 ans ne sont pas encore très équipés. En effet, pour 73% des Français, c’est leur premier smartphone et ils le possèdent depuis moins d’un an. Les usages sont bien plus larges dorénavant et 59% des mobinautes se connectent tous les jours25. Cette explosion des usages et leur adoption massive est liée au cycle de renouvellement et aux innovations des terminaux.

1.1.2/ Le terminal

La sortie de l’iPhone en 2007 a été un déclic pour toute l’industrie et ce nouvel entrant a forcé les acteurs traditionnels à accélérer les rythmes d’innovation. Aujourd’hui, les constructeurs livrent tous les trois à six mois des téléphones toujours plus puissants. 2010 a été une année tout aussi importante car c’est l’année où les ventes de smartphones ont dépassé celles traditionnelles des PC26. D’une part les téléphones sont progressivement aussi puissants que les ordinateurs fixes et d’autre part ils embarquent des technologies nouvelles comme le GPS, l’accéléromètre, la reconnaissance vocale ou l’appareil photo. L’intégration d’un disque dur et d’une mémoire vive a été un changement majeur dans l’évolution des terminaux mobiles. Le smartphone remplace notre ancien téléphone mais aussi notre montre, notre PC, notre appareil photo, et bientôt notre portefeuille ou notre télécommande de téléviseur. Le terminal mobile, se rapprochant de plus en plus d’un ordinateur, est la cible de virus, de vols de données et peut servir de preuve dans le cadre d’enquêtes policières. A ce propos, des sociétés comme Cellbrite sont d’ailleurs spécialisées sur l’extraction des données dans le but d’apporter des preuves lors d’investigations légales par exemple. Un sujet intéressant à propos des terminaux et des données utilisateurs est l’authentification. Contrairement aux ordinateurs, un téléphone appartient à une seule personne. C’est ainsi le meilleur moyen d’identifier une personne. Il faut savoir par exemple que sur les téléphones Apple, chaque utilisateur possède un identifiant appelé UDID27. Cet identifiant est important en terme marketing car c’est la data utilisateur qui permet de tracker un consommateur en terme d’analytics. Les marketeurs s’en servent donc à la manière d’un cookie. C’est bien sûr anonyme, tout comme une adresse IP, et seul Apple sait réconcilier ce numéro avec une personne client de sa marque. Apple a clairement exprimé son souhait

25 Thinkmobilewithgoogle, Les entreprises française face au défi du mobile, 2011 : http://slidesha.re/zCqPfc 26 Guardian.co.uk, Comment le smartphone tue le PC, 05/06/11 : http://bit.ly/xU4rVq 27 Atelierdumobile.com, Obtenir d’UDID de votre iDevice, 24/03/11 : http://bit.ly/wPvbeT

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de supprimer cet identifiant ou du moins que les développeurs et régies ne puissent plus y avoir accès. Des solutions comme Secureudid sont disponibles aujourd’hui pour permettre à chaque développeur d’identifier leurs utilisateurs tout en respectant la vie privée et la consigne d’Apple28. Pour revenir au terminal, les smartphones possèdent un certain nombre de fonctions ou de caractéristiques qui en font des objets de haute technologie. Le constructeur chinois Huawei a sorti le téléphone le plus fin au monde avec 6,68 mm d’épaisseur, une prouesse29. Les caméras embarquées concurrencent sérieusement les ventes d’appareils photo numérique. L’autonomie de la batterie était jusqu’ici un point faible mais un certain nombre d’innovations sur le sujet sont à venir. La reconnaissance vocale est une réalité depuis Siri d’Apple. La reconnaissance faciale sera déployée prochainement, permettant de déverrouiller son téléphone avec le scan de son visage30. Samsung a présenté le Galaxy Beam début 2012, un téléphone avec vidéoprojecteur. La technologie AMOLED permet aux écrans de devenir flexibles. Ces écrans de smartphones et de tablettes seront plus légers et surtout incassables. Nokia a présenté son Kinetic Device31, Samsung évoque le lancement d’un Galaxy Skin courant 201232 et Philips a lancé un impressionnant prototype appelé Fluid. On peut même imaginer que le smartphone de demain se résume à un simple écran comme l’a montré Samsung ou Microsoft dans certaines vidéos promotionnelles de prospective33.

Les écrans peuvent devenir flexibles et ils sont de plus en plus grands. Cela a même permis de créer un terminal hybride entre mobile et ordinateur, la tablette. Lancé en Avril 2010, l’objet est encore aujourd’hui en train de créer son propre segment et ses propres usages. Il semble clair que la tablette à un usage fixe, très pratique à utiliser dans le foyer et particulièrement dans le salon, en réseau Wifi. A ce propos, il suffit de regarder le faible succès des offres de clés 3G des opérateurs, la plupart des ventes se sont faites sur des modèles connectés en Wifi uniquement, et cela se confirme dans l’usage de l’accès à internet. Le site getalstic.com a réalisé une infographie intéressante, en partant des données du rapport Nielsen « Mobile Connected Device Report » de 2010, illustrant l’usage de la tablette, du smartphone et de l’e-reader selon les situations (regarder la TV, dans la chambre à coucher, en réunion, dans les transports en commun…)34. Les seuls cas où la tablette surclasse les autres terminaux sont devant la télé et dans la chambre à coucher. Ce nouveau terminal a tout pour préempter la navigation sur internet et éclipser le traditionnel ordinateur, voire le netbook. 72,7 millions de tablettes ont été mises en place en magasins selon l’étude de NPD DisplaySearch en 2011. Ce chiffre est à mettre en comparaison avec les 187,5 millions de notebooks35. 1,5M de tablettes ont été livrées en France en 2011 dont 450 000 tablettes en décembre. Avec un prix moyen de 420 €, les tablettes ont réalisé un chiffre d’affaires de 609 millions d'euros. Un chiffre proche de celui des PC de bureau à 703 millions d'euros et nettement supérieur à celui

28 http://www.secureudid.org/ 29 Mashable.com, Le smartphone le plus fin par Huawei, 09/01/12 : http://on.mash.to/yW1Nr6 30 Readwriteweb.Com, Forget PIN numbers, Apple wants to let you unlock your iPhone with your face, 29/11/11 : http://rww.to/yZ3jGH 31 Gizmodo.fr, Nokia présente le Kinetic Device, un smartphone flexible, 26/11/11 : http://bit.ly/y7Wk9M 32 Pcworld.com, 28/10/11 : http://bit.ly/yfc1GM 33 Youtube, Amazing screen technology, Samsung Flexible Amoled : http://bit.ly/AuK3D6 34 Betelastic.com, How we use the mobile web – infographic, 22/06/11 : http://bit.ly/yhmR98 35 Displaysearch.com, Quarterly Mobile PC shipment and Forecast Report, 04/01/12 : http://bit.ly/z45EYe

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des « netbooks », 291 millions d'euros36. L’iPad est bien sûr la tablette la plus vendue mais d’autres challengers sont apparus comme Samsung, Archos, Sony et Amazon avec le Kindle Fire.

La guerre des chipsets : A un niveau inférieur dans la chaîne de valeurs, nous observons une guerre féroce entre les trois constructeurs de processeurs que sont ARM, Intel et AMD. En 2005, 98% des téléphones étaient équipés de processeurs ayant l’architecture d’ARM37 via des accords de licences avec tous les constructeurs du marché. Même les téléphones les plus récents comme le Samsung Galaxy S II en sont équipés via la carte de la société Qualcomm38. Le PDG Tudor Brown a déclaré vouloir conquérir 50% du marché mobile, tablette et netbook39. L’histoire de la société est intimement liée à celle d’Apple qui équipait déjà les iPhones mais pas la ligne de produit de bureau qui se basait sur Intel. Le lancement du processeur maison A4 qui équipait l’iPhone et l’iPad et bientôt l’A5 pour l’Ipad 2 se base sur l’architecture de ARM. De nombreuses rumeurs de rachat de cette société cotée 8 milliards de dollars circulent depuis longtemps40. Ce rachat serait historique et un mouvement de fond pour toute l’industrie car cette société équipe la plupart des concurrents d’Apple, y compris des consoles de jeux comme la Nintendo DS et la PSP de Sony41. Pour le moins, Apple a la tentation de passer toute sa ligne de produits sur ses processeurs maison en verrouillant ainsi complètement son environnement et en sortant Intel. Au-delà de rendre encore plus indissociable le hardware et le software (beaucoup d’utilisateurs installaient OSX sur des PC Intel), cela permettrait d’étendre aux Macbooks l’expérience de la connexion mobile des tablettes en 3 ou 4G. Intel équipe les ordinateurs depuis 197142 mais a raté l’arrivée des smart/phones. C’est LG qui va lancer les hostilités début 2012 en lançant un téléphone Androïd intégrant le nouveau processeur43 d’Intel, appelé Medfield. Quant à Google, il a discrètement racheté la société Agnilux44, principalement pour son personnel hautement qualifié dans le développement de processeur. Aucune information qui pourrait indiquer des intentions de Google n’a encore filtrée mais ce rachat parait stratégique pour remonter la chaîne de valeurs, comme Apple l’a fait. L’année 2011 a vu la sortie du premier mobile équipé d’un processeur double cœur, le LG optimus 2X. A peine cette génération sortie que les quatre cœurs s’annoncent déjà pour 2012 chez HTC, Sony Ericsson et Asus avec des fournisseurs comme Qualcomm et le Tegra 3 de Nvidia45. Ces rachats illustrent bien la guerre de brevets que se livrent ces acteurs. Les cycles de productions sont de plus en plus rapides mais chaque nouveau produit bénéficie des acquis en terme de savoir-faire et de développement technologique qui sont vitaux et stratégiques dans une guerre plus visible celle-ci, la guerre des plateformes.

36 Lesechos.fr, Les ménages français ont acheté plus de tablettes que de bons vieux PC, 18/01/12 : http://bit.ly/w16izD 37 Wikipedia : http://en.wikipedia.org/wiki/ARM_architecture 38 Communiqué officielle de ARM : http://bit.ly/uSr8X4 39 Pcinpact, 31/05/11 : http://bit.ly/xFndHl 40 Theregister.co.uk, Les rumeurs d’acquisitions d’ARM par Apple, 21/04/10 : http://bit.ly/vifww5 41 Techcrunch, 21/10/10 : http://tcrn.ch/sgD6ZW 42 Venturebeat.com, Article Les 40 ans d’Intel : http://bit.ly/samg0x 43 Venturebeat.com, Article Intel lance son premier Android avec LG : 30/12/11 : http://bit.ly/ttScOu 44 CNNMoney, Google rachète la société Agnilux, 21/01/10 : http://bit.ly/uvBAN7 45 Nvidia.fr, processeur quatre coeurs Tegra 3, 09/11/11 : http://bit.ly/xMe2Vt

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1.1.3/ Les plateformes

Jusque ici le système d’exploitation de son ordinateur n’était pas un sujet majeur. Depuis la guerre entre Microsoft et Apple, la question était réglée depuis des années. L’arrivée d’iTunes et de l’Apple store dans l’iPhone a ouvert de nombreuses voies rappelant à tout le marché l’importance de l’OS. En effet, Apple a créé un écosystème lui permettant d’offrir plus de services à ses clients, de partager les coûts de développement et de générer des revenus sur toute la vie de ses clients. Sur le mobile, le marché est encombré à la fois de pures players mobiles (Blackberry, Nokia, Samsung, WebOS) et de nouveaux entrants venus de l’internet (Google, Windows, Apple, Opera). Il est fort probable que le mobile ne connaisse pas la domination d’une seule plateforme comme cela a été le cas à l’ère des PC. Nous pouvons classer les fournisseurs de plateformes en deux catégories ayant des stratégies bien distinctes : les modèles fermés et les modèles ouverts. Apple et Blackberry ont décidé de réserver leur plateforme à leurs propres terminaux. Ils maîtrisent ainsi l’ensemble de la chaine de valeur, du hardware au software. Cela permet une meilleure intégration de la plateforme et une meilleure exploitation des ressources physiques au service d’une expérience utilisateur de qualité et commune à tous leurs clients. A contrario, Android et Windows Phone permettent aux constructeurs et même aux opérateurs, de modifier leur plateforme46. Selon comScore, Android est passé de 12% de part de marché fin 2010 en Europe à 31,2% fin décembre 2011, détrônant ainsi Symbian.

En termes d’accès à l’internet mobile (pages vues depuis un navigateur hors ordinateur), iOS domine largement avec 61,1% de part de marché illustrant sa domination du marché des tablettes avec l’iPad. NetMarketshare confirme cette position de leader d’iOS et mesure quant à lui une part de marché de 52,10% en décembre 2011, contre 16,29% pour Android47.

46 Maxisciences.com, De la puissance mais pour quoi faire ? 02/12/11 : http://bit.ly/zwGPRc 47 Netmarketshare.com, Mobile/Tablet Top Operating System Share Trend : http://bit.ly/ADi3W0

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Part de marché smartphones par unités vendues au 4ème trimestre 201148 :

Au 4ème trimestre 2011, un smartphone vendu sur deux était sous Android, malgré les très bons chiffres d’iOS grâce au lancement de l'iPhone 4S. Symbian et RIM sont clairement en perte de vitesse sur la même période. Au-delà des chiffres de ventes, le critère principal de comparaison entre les plateformes est souvent le nombre d’applications disponible dans les stores d’applications.

Nombre d’applications disponibles sur Android et iOS49 :

Android : Le premier téléphone sous Android a été lancé en 2008 par HTC en partenariat avec l’opérateur T-Mobile. Aujourd’hui, Android réalise plus de 850 000 activations par jour, 6 milliards de téléchargement et a désormais 450 000 applications disponibles50. Google a officialisé Android 4.0, appelé Ice Cream Sandwich, le 19 Octobre 2011. L’un des axes majeurs de cette nouvelle version est l’unification entre les smartphones et les tablettes. Les améliorations sont : l’ergonomie, un accès à l’Android market permanent, la NFC, la reconnaissance faciale…51 Son déploiement se fera de manière large et mondiale dans le courant de l’année 201252. A la période de rédaction de cette thèse, c’est la version 2.3 appelée Gingerbread qui est majoritaire avec 55% de part de marché. Cette fragmentation des versions d’Android en circulation est un des points faibles récurrents dans les discussions. En effet, plus il y a de versions, plus le développement est difficile et long afin d’avoir le même rendu et la même expérience pour tous les utilisateurs.

48 Gartner, communiqué de presse : http://bit.ly/yDwGvx 49 Flurry, iOS & Android apps challenged by traffic acquisitions not discovery, 31/10/11 : http://bit.ly/HH4WmU 50 Techcrunch, 850K daily android activations, 300M total devices, says Andy Rubin, 27/02/12 : http://tcrn.ch/AtWEbN 51 Android.com : http://bit.ly/xGdXAL 52 clubic.com, 13/12/11 : http://bit.ly/xgNQWc

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Fragmentation d’Android :

Google est dépendant des constructeurs et des opérateurs pour les mises à jour du parc existant. Et les constructeurs ne communiquent pas forcément l’information à tous leurs clients dans les meilleurs délais. La raison est très simple ; ils préfèrent que l’utilisateur change de téléphone en achetant les nouveautés qui sont équipées des dernières versions des OS. Par ailleurs, sur chaque version d’Android, Google accepte ce que l’on appelle les surcouches opérateurs qui permettent à ces derniers de personnaliser l’expérience pour leurs clients. Cela a été une stratégie importante au lancement de la part de Google afin de séduire les opérateurs. Maintenant qu’Android est en bonne position en termes de part de marché et de notoriété auprès du grand public, il est certain que les négociations avec les opérateurs n’auront pas le même rapport de force et donc que Google souhaitera reprendre le contrôle. Toutefois, il semble que la personnalisation de l’OS selon les spécificités techniques des constructeurs et des opérateurs reste un élément important de cette plateforme. Le CEO de Motorola a été dans ce sens lors du CES 201253 en expliquant que la segmentation de l’offre était nécessaire à la vente des terminaux en magasin. Android est la plateforme la plus ouverte et c’est une des caractéristiques qui attire les partenaires et développeurs. Il est par exemple possible de faire tourner les applications Android installées sur son téléphone mobile sur un PC sous Windows, et ce grâce à un émulateur développé par une société tierce nommée Bluestacks54. Un autre projet, plus ambitieux encore, a été dévoilé lors du CES de Las Vegas début 2012. La société OpenMobile a présenté une solution à destination des fabricants de terminaux qui va leur permettre de rendre compatible la totalité des applications Android, quelle que soit la plateforme choisit, Bada, Windows, Linux, WebOS et même avec les box FAI et les TV connectées55. C’est la parfaite illustration des bénéfices de l’ouverture. Un tiers peut développer une surcouche ou un service qui peut littéralement porter votre projet dans une autre dimension. Cependant, cette ouverture peut avoir des effets négatifs. En Mars 2011, Google a retiré 21 applications malveillantes qui une fois installées dérobaient toutes les informations présentes et installaient d’autres éléments à l’insu du propriétaire56. iOS : Cette plateforme était initialement dédiée à l’iPhone puis s’est élargie à l’iPod Touch et plus récemment à l’iPad. Apple a renommé son système d’exploitation mobile iPhone OS en iOS seulement en 2010. Il est

53 Informationweek.com, Carriers wants Android differentiation, 11/01/12 : http://bit.ly/y6HNMe 54 vincenttessier.fr : Android sur votre PC Windows, 31/10/11 : http://bit.ly/sQfbuJ 55 Prnewswire.com, 300 000 applications Android qui tournent sur n’importe quelle plateforme, 09/01/12 : http://prn.to/zzWZ1x 56 Mashable, Google retire 21 applications par crainte de Virus, 02/11/11 : http://on.mash.to/zlwFxE

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intéressant de noter que le SDK est disponible gratuitement pour pouvoir programmer des applications sur cette plateforme mais que pour pouvoir les publier, il faut adhérer au programme des développeurs d’Apple, moyennant 99 $ par an. La plateforme est ouverte mais Apple reste maître de son store et valide toutes les applications selon des critères strictes. Ce processus de validation d’une application avant sa publication peut prendre plusieurs semaines. Les mises à jour de l’OS sont régulières, la dernière version iOS5 est sortie en octobre 2011 et a apporté un certain nombre d’évolutions notamment le kiosque à journaux, iCloud qui permet de s’affranchir de la synchronisation avec le Mac de bureau et iTunes, et les push notifications qui se trouvent rassemblées dans un bandeau en haut de l’écran. L’ascension de l’iPhone a été fulgurante comme l’illustre sur ce graphique réalisé par comScore.

Depuis son lancement, Apple maintient un cycle d’innovation soutenu afin de tenir à distance ses concurrents. C’est de cette manière que l’engouement pour l’iPhone reste intact et que chaque sortie est un événement que les concurrents redoutent.

Windows phone : Certains analystes pensent que d’ici 2015, Microsoft sera la 2ème plateforme mondiale avec 20% de parts de marché derrière Android, iOS reculant à la 3ème position. Gartner estime que le chemin à parcourir est encore long. Seulement 1,7 million de Windows Phones ont été écoulés au 2e trimestre 2011, contre 47 millions sous Android. Bloomberg estime à 1,3 millions le nombre de Lumia mis sur le marché depuis son lancement en Novembre 2011. Morgan Stanley estime que Microsoft a un potentiel annuel de 37 millions d’unités vendues sous Windows Phone57. Microsoft veut devenir l’alternative aux deux plateformes dominantes et tente de se mettre à niveau. Elle multiplie les lancements : une nouvelle version de son OS avec Mango, la version 7,5 de Windows Phone, le lancement de son store d’application sur internet58, la nouvelle version de Windows, la version 8 sera compatible pour les smartphones, les tablettes et les PC… Laurent Schlosser, Directeur mobilité et opérateur de Microsoft France, estime que quand un distributeur vend un iPhone, il donne son client à Apple, l’opérateur ne devient quant à lui qu’un tuyau59. Quant à Google, ses ambitions sont telles qu’il peut représenter un danger tout aussi important aux yeux des opérateurs. Microsoft a besoin de séduire les opérateurs et les développeurs, la société adopte donc une approche plus collaborative et adaptative que ses concurrents. Les quelques années à venir seront

57 Bloomberg.com, Nokia Lumia sales seen topping 1 million since debut in respite for stock, 23/01/12 : http://bloom.bg/wIP7ls 58 http://www.windowsphone.com/fr-FR/marketplace 59 Businessmobile, Nous voyons Windows Phone bien au-delà de 20% de parts de marché, 13/10/12 : http://bit.ly/HmDYdy

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décisives pour cette nouvelle tentative de Microsoft de rattraper son retard dans un monde désormais « Post-PC ».

Bada : Bada veut dire Océan en coréen, cette plateforme propriétaire a été développée par le constructeur Samsung avec l’objectif de prendre en main la partie service de ses terminaux. Le premier smartphone lancé sous Bada était le Samsung Wave lancé en Juin 2010 en Europe et l’OS est principalement destiné à cette gamme. La première version de cet OS ne gérait pas le flash et le Java, ce qui est corrigé avec la version 2.0 qui supporte le NFC (Near Field Communication), les notifications, le HTML5, la publicité in-app et la reconnaissance vocale. Samsung investit beaucoup pour installer cet OS et fait des mises à jour régulières. Son store d’application est disponible sur le web60 et sur ses TV connectées possédant le Smart Hub. Pour s’imposer comme le leader des Smartphones, Samsung s’est allié avec d’autres OS, notamment Android et Windows. Mais la société a bien conscience qu’avoir son propre OS serait la clé de son indépendance et de la pérennité de sa position actuelle. Par ailleurs, Samsung souhaite que d’autres constructeurs utilisent Bada afin de devenir une plateforme. C’est pour cette raison que la firme a annoncé récemment qu’elle allait passer à une base opensource en fusionnant avec l’ancien OS Tizen / Meego, initialement travaillé par Intel et Nokia61. Nous ne nous étendrons pas sur Nokia en tant que plateforme étant donné le constat d’échec à la fois d’OVI et de Symbian. Ovi était la marque pour les services internet de Nokia et a disparu en 2011 au profit de la marque ombrelle Nokia Services. Quant à l’OS Symbian, il n’a jamais eu le succès escompté et ce malgré la mise à jour récente appelée « Belle » lancée sur les milieux de gamme Nokia 701 et 60062.

Il faut parler ici des ambitions de Facebook sur le mobile. La société est passée de simple réseau social à une plateforme à part entière grâce à son éco-système d’applications et à Facebook connect. Sur le mobile, le graph social est en cours de déploiement. Au-delà des 500 millions de personnes environs qui utilisent Facebook sur leur mobile, il y aurait déjà 60 millions d’utilisateurs sur des applications tierces ayant intégrés Facebook63 selon le directeur des produits Carl Sjogreen. D’ailleurs, beaucoup d’outils sont déjà disponible à destination des développeurs d’applications64. L’éditeur d’application européen Wooga enregistre 64% d’utilisateurs s’étant logué avec Facebook connect pour mobile sur son application Diamond Dash pour iPhone téléchargées 11 millions de fois65.

La course à la plateforme fait des morts, le site vision mobile a publié la liste des plateformes mobiles lancées depuis les années 2000 (voir annexe 1). Meego, WebOS et LiMo sont parmi les plus connus mais il en existe des dizaines d’autres66. Forrester estime dans son étude « Mobile is the new face of engagement », qu’il y aura d’ici 2016 un milliards de smartphones en circulation et que 90% des terminaux

60 http://www.samsungapps.com/ 61 Frandroid.com, Bada va être fusionné avec Tizen anciennement Meego, 16/01/12 : http://bit.ly/wglObl 62 Press.nokia.fr, Nokia lance trois smartphones grand public sous Symbian belle, 24/08/11 : http://bit.ly/HeOTcI 63 Techcrunch, Facebook as a mobile platform, 08/02/12 : http://tcrn.ch/HcImSC 64 https://developers.facebook.com/docs/guides/mobile/ 65 Techcrunch.com, Facebook Wooga Diamond dash mobile, 01/14/12 : http://tcrn.ch/IpddrL 66 Visionmobile.com, The dead plateform graveyard lessons learned, Janvier 2012 : http://bit.ly/HL40te

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fonctionneront sous iOS, Android ou Windows Phone67. L’enjeu majeur des plateformes mobile est de séduire la communauté des développeurs afin qu’ils développent pour leur plateforme et ainsi avoir le plus de services et d’applications de qualité à proposer aux utilisateurs. Les développeurs sont une des clés du marché, pour les plateformes mobiles, comme pour les réseaux sociaux, qui sont devenues de véritables plateformes ouvertes comme Facebook et Google+. La promesse à leur encontre est principalement la taille critique d’utilisateurs et les possibilités offertes de faire du business. On parle parfois de bulle sociale, de petites start-up levant de très gros montant pour développer leur service sur les réseaux sociaux, certains pensent que nous sommes également dans une bulle également sur le mobile. Ce qui est sûr c’est le dynamisme économique et les vocations suscitées, parfois très précoces. On peut citer Thomas Suarez, onze ans, qui a participé à une conférence TEDx en Novembre 201168 afin de présenter son projet avec un aplomb impressionnant. Savoir attirer et animer une communauté de développeur devient essentiel pour qui veut devenir une plateforme. Qui sont les développeurs ?

1.3.4/ Les applications

Il y a eu plus de 24 milliards de téléchargements d’applications sur l’Apple store. La société a même mis en place un compte à rebours et offert 10 000$ de crédits iTunes à la personne qui téléchargera la 25 milliardièmes applications ! Ce succès phénoménal des applications a structuré le marché et beaucoup d’acteurs tentent de reproduire le modèle en lançant leur plateforme, leur store ou tout simplement des applications. Google avec son OS Android a très vite saisi l’opportunité en lançant l’Android Market qui rattrape rapidement l’Apple Store en termes de nombre d’applications présentes sur son store. Le succès de Rovio avec Angry Birds a stimulé tout le marché. L’application a été téléchargée à plus de 700 millions de fois et est passée de 10 à 100 millions de dollars en un an. Elle compte désormais 300 personnes, la licence a lancé plusieurs centaines de produits dérivés et a même déjà inspiré trois parcs d’attractions. Ce succès est révélateur de la typologie d’applications la plus utilisé, le jeu. Flurry estime le temps passé au jeu à 49% du temps passés sur les applications. Angry Birds est en bonne voie pour être le premier jeu à atteindre le chiffre d’un milliards d’utilisateurs69. Il s’est téléchargé 242 millions d’applications le jour de noël 2011 contre 85 millions un an plus tôt. L’étude TNS Sofres Top Consumer nous apprend qu’il y a en moyenne 27 applications par smartphone, certains utilisateurs en ayant téléchargé près de 40070! Le succès des applications sur le mobile a pu être perçu par certain comme un retour en arrière. Le temps des logiciels installées sur sa machine et des jeux préinstallées sur son mobile (rappelé vous le snake des téléphone Nokia) devait disparaître définitivement avec le web et les navigateurs. Apple a remis au gout du jour le modèle à la fois aux yeux des utilisateurs que des développeurs. Une étude de la Global Intelligence Alliance de 2010 indique clairement la préférence des développeurs pour les applications, à la fois en terme d’expérience utilisateur et d’opportunité

67 Nytimes, Get ready for 1 billion smartphones by 2016, Forrester says, 13/02/12 : http://nyti.ms/zWUuHc 68 TEDxManhattan Beach : http://bit.ly/yb4cZa 69 Venturebeat.com, Can a single game reach a billion players, 30/09/11 : http://bit.ly/I9BzHs 70 Tns-sofres.com, Etude Top/Com/Consumer 2011, Le marketing mobile, une réalité? 04/10/11 : http://bit.ly/x0RNtQ

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commerciale71. Il suffit de regarder les sommes payées aux développeurs par Apple depuis son lancement pour s’en convaincre, plus de 3 milliards de dollars.

Malgré tout, après une phase où les mobinautes étaient prêts à payer, la règle de la gratuité semble s’imposer sur le marché des applications. La publicité et le paiement « in-app » sont désormais les deux leviers de monétisation pour les développeurs. Cela donne d’autant plus d’importance aux outils d’analytics et aux régies publicitaires mobiles.

Projection de l’évolution entre application payante et in-app paiement72 :

L’institut ISH estime que le paiement au sein même des applications représentera plus 60% des revenus d’ici 2015. Juniper Research estime que ce marché devrait atteindre 4,8 milliards de dollars en 2016. Cette tendance renforce l’idée que le web et le mobile sont voués au même destin. Malgré des différences technologiques et de comportements utilisateurs entre l’internet fixe et le mobile, le digital impose ses règles de manières uniforme. Au sein des stores d’application, le critère de réussite est le nombre de téléchargement mais l’industrie mobile récompense également ses pairs au travers de prix. Il y a plusieurs concours de la meilleure application de par le monde. Le salon du GSM à Barcelone est sans doute le plus grand salon entièrement dédié au mobile, son classement fait donc autorité. C’est Rovio avec Angry Birds Rio qui a remporté le titre de la meilleure application grand public en 201273. Distimo édite également un TOP est a élu Angry Birds meilleure applications 2011(voir annexe 2). Le Appy Awards organisé par Mediapost à San Francisco a quant à lui élu Flipboard, le social magazine74. Apple félicite également certains éditeurs d’applications avec son « Rewind »75. Il s’organise également beaucoup d’évènement pour fédérer et motiver les développeurs pour tel ou tel plateformes. Les hackatons et Week-end de

71 Mobithinking.com, native vs web apps, what are the pros and cons? : http://bit.ly/ypk5VR – White Paper : http://bit.ly/z7O5cL 72 Isuppli.com, In-app purchases will dominate the smartphone app business, 17/01/12 : http://bit.ly/HRGcIK 73 http://www.globalmobileawards.com/winners2012.php 74 http://www.mediapost.com/appyawards/winners/ 75 Thenextweb.com, Apple store Rewind 2011, http://tnw.co/IUe7jI

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développement intensif sont fréquents, comme les Week-ends « Bemyapp ». Google a lancé le DevFest Paris afin de faire la promotion de l’environnement Android et du HTML5, la présentation était réalisée par Sam Dutton qui a le titre original de « Developer Advocate »76.

Les applications sont des univers fermés et ne permettent pas de naviguer entre plusieurs applications. Les développeurs ne le souhaitent d’ailleurs pas, les utilisateurs chèrement acquis ne doivent pas être encouragés à suivre un lien sortant. C’est la même réticence que les webmasters web ont ressentis il y a quelques années. Or, les utilisateurs ont l’habitude de surfer, de naviguer de sites en sites conformément au principe même d’internet : le lien. Il n’y a aucune raison que la navigation mobile ne suive pas ce chemin à mesure que la frontière entre applications native et site internet mobile s’estompe. Il existe des projets pour construire des ponts entre les applications et dépasser les contraintes techniques77. L’idée est d’utiliser une URL pour ouvrir une application ou lui indiquer à l’ouverture une action, on parle de « app RUL scheme ». Le site onemillionappschemes.com de la société Zwapp s’est donné comme mission d’inviter les développeurs à déclarer et enregistrer un million d’applications ce qui permettra de référencer et donc de connecter les applications ensemble. Le projet a réunis à ce jour 270 développeurs et plus de 20 000 applications, il reste encore du chemin.

Quels types d’applications sont les plus utilisés ?

Ces chiffres sont publiés par la solution d’analytics mobile Flurry, il ne représente donc que l’usage des applications utilisant cette solution. On voit clairement que les jeux et le social représentent à eux deux plus de 80% des usages, et ce chiffre ne prend pas en compte Facebook. Le succès du modèle des applications est tel qu’il va au-delà du mobile. Les navigateurs ont même lancé des stores web pour télécharger des applications et des extensions sur le navigateur fixe, comme le Chrome store par exemple. Pour aller plus loin dans la synergie du mobile et du PC, il s’est même lancé des émulateurs capables de lancer des applications Android installées sur votre téléphone, sur votre ordinateur Windows78. L’organisation open source Mozilla est également convaincue que les applications vont devenir centrales dans l’usage du web. Fidèle à une philosophie de l’ouverture, l’organisation prépare un store d’applications web et mobile, multi-OS, compatibles HTML579 et basé sur le cloud, plutôt que sur un OS particulier ou un

76 Google DevFest Paris 2011 : http://bit.ly/IionOE 77 www.techcrunch.com, A web of apps, 30/12/11 : http://tcrn.ch/x0O69g 78 Android sur votre PC Windows, 31/11/11 : http://bit.ly/sQfbuJ 79 www.lefigaro.fr, Mozilla va lancer une boutique d’applications mobiles et PC, 23/02/12 : http://bit.ly/Aj13Qx

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terminal80. Les applications sont à ce point populaire qu’une polémique est née annonçant la mort du web. Aout 2010, le célèbre éditorialiste Chris Anderson lance ce débat pour souligner l’augmentation de l’accès à l’internet par les applications81. Flurry alimente régulièrement cette polémique en présentant des chiffres comparatif entre les navigateurs web ou mobile et les applications mobile82. Dire que les applications mobiles vont devenir l’accès principal à l’internet est peut être excessif mais permet de prendre la mesure du phénomène. Entre la tendance de vouloir tout mettre dans le cloud et celle de tout installer sur le terminal, une voie du milieu semble se dessiner. George Colony, président du célèbre cabinet Forrester Research, a argumenté en faveur d’un internet des applications, « app internet ». Il compare les vitesses de croissance des capacités des processeurs (loi de more), des capacités de stockages (loi d’hitachi) et enfin celles des réseaux, la plus faible83. Il en déduit que la puissance des terminaux doit être utilisé pour palier à la faiblesse des réseaux. C’est le sens de projets comme Silk, le navigateur pour tablette d’Amazon dont l’objectif est d’être le plus rapide et fluide en combinant ces deux facteurs : terminal et réseau. Quel que soit la forme que prendra le marché, tout applicatif ou hybride, le mobile est son modèle applicatif a apporté quelque chose de nouveau dans le monde du digital et qui rebat les cartes entre les différents acteurs de sa chaîne de valeur.

1.2/ Les acteurs

1.2.1/ Le réseau mobile ou le « data tsunami »

Tout comme les fournisseurs d’accès à internet dans les années 2000, les opérateurs mobile ont une place prépondérante dans l’économie du mobile. Le web s’est progressivement ouvert au fil de son histoire et d’autres acteurs ont su intégrer ce marché en prenant des places importantes comme Yahoo, Google, Amazon…A ses débuts, le web se limitait aux portails internet, pages par défaut de la navigation des internautes. Les FAI en ont profité un temps et ont tout fait pour retenir les internautes dans leur environnement fermé. Au fil du temps, les internautes ont découvert d’autres services, notamment par l’intermédiaire de la recherche et de son champion Google. De la même manière l’univers du mobile a longtemps été confiné aux portails des opérateurs et au service Gallery84, un portail des portails pouvant référencer des sites mobile tiers. La notion de « off portal » a été utilisée pour évoquer l’environnement hors des portails opérateurs, principalement accessible via le WAP. Il s’agit d’un protocole de communication permettant de lire un format dérivé du langage HTML, le WML, laissé de côté depuis peu au profil du XHTML. Ce protocole est administré par l’Open Mobile Alliance depuis 2002. Parler de « off portal » pour désigner le réseau internet mobile était significatif de la mainmise des opérateurs depuis plus de dix ans. La volonté de garder leurs clients au plus près pour en tirer le maximum de revenus est bien compréhensible mais n’a pas favorisé l’émergence d’un usage simple et ouvert du mobile. D’une part, il a

80 Mozilla Labs Apps : http://mzl.la/wrdBb4 81 www.wired, The Web is dead. Long live the internet, 17/08/10 : http://bit.ly/zK8KWO 82 Blog.flurry.com, Mobile app usage further dominates web spurred by Facebook, 09/01/12 : http://bit.ly/xoVfDU 83 Le Web 2011, George Colony, Forrester Research « Three Social thunderstorms », http://bit.ly/A1HiBL 84 Voir le guide du marketing mobile de l’AFMM, édition 2010, page 30 : http://www.afmm.fr/guide-marketing-mobile/ 59 Interview Michel Combes du 21/11/11, Les Echos : http://bit.ly/sdWDKd

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fallu attendre l’arrivée de terminaux technologiquement avancés pour pouvoir proposer des expériences riches aux utilisateurs. D’autre part, il faut avoir en tête que le secteur des Télécom et de la voix bénéficie de très fortes marges, ce qui n’est pas le cas de l’accès à internet. Le responsable des activités de Vodafone en Europe, Michel Combes, explique que l’internet mobile représente 80% du trafic mobile mais ne contribue qu’à hauteur de 20%, les 80% de revenus restants étant réalisés avec la voix, le réseau 3G traditionnel59. Désormais, la consommation data de la base utilisateurs moyenne ne compense pas la forte hausse de consommation des super-utilisateurs. Selon Hans Vestberg, Président d’Ericsson, les 400 millions d’abonnés mobile ayant accès à l’internet mobile consomment plus de réseau que les 4,6 milliards restant85. Il pense que nous atteindrons le milliard de connectés à l’internet mobile d’ici fin 2011. La société Ariose, qui propose des outils de mesure des réseaux aux opérateurs, estime qu’1% des utilisateurs consomme plus de la moitié des capacités des réseaux86. 43,9% des utilisateurs de mobile américains ont utilisé leur téléphone comme un média, c’est-à-dire autrement qu’avec juste la fonction voix et SMS. C’est 102,5 millions de personnes et cela représente une croissance de 20% sur un an87.

Les opérateurs vont rapidement mettre en place une segmentation par le volume de consommation (nombre de Giga par mois) et la qualité de débit (plus ou moins fluide en heures de pointe). En parallèle, le lobby des opérateurs a montré récemment sa puissance88 en garantissant la légalité de l’utilisation du terme « illimité » dans les publicités du secteur.

L’IDATE, société de consulting spécialisée dans les Telecom, l’internet et les medias, constate un doublement du trafic data tous les ans alors que le prix payé par les consommateurs n’a pas évolué. Les consommateurs américains ont utilisé plus de data en 2010 que durant les dix dernières années89. Il en résulte une baisse du coût unitaire illustrée dans le graphique ci-dessus90. La consommation mobile moyenne est aujourd’hui de 7 à 15 gigas par mois. A cela va s’ajouter d’autres terminaux ; on prévoit entre 10 et 50 milliards d’appareils connectés d’ici 202091. Il se lance déjà des réseaux sociaux dédiés aux objets

85 Lefigaro.fr, Interview Hans Vestberg, président d’Ericsson, Le Figaro, 14/03/11 : http://bit.ly/rKpAK9 86 Arieso.com, Etude : Recent Smartphone Trends & the Extreme Data User : http://bit.ly/AaY2wT 87 comScore webinar, Mobile Search : http://bit.ly/yWftbT 88 Article zdnet.fr du 30/09/11 : http://bit.ly/turKfM 89 www.thestreet.com, Mobile-Data crunch to boost Cisco and Qualcomm, 16/06/11 : http://bit.ly/u4t48N 90 Etude Nielsen sur la base de 65 000 terminaux aux Etats Unis : http://bit.ly/sm3loQ 91 Interview de Frederic Pujol lors du DigiWorld Summit 2011 : http://bit.ly/sMkhFS

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connectés comme MyRobots92. La norme 3G a encore une marge de progression mais ne pourra pas supporter une telle charge. Une nouvelle technologie 4G dite de haut-débit mobile, Long Term Evolution (LTE), se déploie déjà et permettra un débit de 100 Mbit/s. Cette technologie cible à terme 1Gbit/s. Verizon aux Etats Unis couvre aujourd’hui 50% de la population américaine. L’opérateur va jusqu’à imposer à ses partenaires constructeurs la norme LTE pour tous les prochains téléphones qu’il commercialisera93. L’opérateur Sprint a annoncé début 2012 l’ouverture de son réseau LTE à quatre grandes régions des Etats Unis94 et rejoint ainsi les 31 opérateurs qui offrent aujourd’hui ce réseau95. L’investissement des opérateurs dans de nouvelles infrastructures réseau s’élève à 42,5 milliards de dollars en 2011 selon la société IHS96. L’IDATE estime à 13 millions les abonnés ayant accès à la LTE aujourd’hui et à 380 millions d’ici 2015. En France, l’ARCEP a attribué97 la licence LTE aux trois opérateurs historiques, rapportant ainsi 2,6 milliards d’euros de recette à l’état. On peut noter que le nouvel entrant Free n’a pas de licence en tant que telle mais passera un accord avec SFR. Ericsson en tant que numéro un mondial des réseaux télécoms avec 40% de parts de marché va profiter directement de la mise en place de ce nouveau réseau.

Akamaï publie régulièrement un état de l’internet mondial, la société confirme que le trafic data a doublé en un an et est désormais deux fois plus important que la voix98.

Les fournisseurs de réseaux auprès des opérateurs sont Sony Ericsson que nous avons cité plus haut, Aclatel-Lucent, Nokia Seimens Networks, ZTE et Huawei Technologies. Il existe une troisième voie à celle du réseau 3G et du réseau haut débit en Wifi, le Web « bypass » dont Deloitte prévoit qu’elle représentera environ 1% de toutes les données sans fil échangées en 2012. Il s’agit de données échangées directement d’un smartphone à un autre, sans passer par internet99. Comme on vient de le voir, il y a une tension importante entre l’appétence des utilisateurs pour l’internet mobile et la complexité et les capacités du réseau en place. Sur le mobile, les opérateurs et les terminaux doivent gérer 3 standards (GSM, la 3G et le

92 20minutes.fr, Les robots ont aussi droit à leur Facebook, 29/12/11 : http://bit.ly/rLC3gM 93 Mobilemarketingwatch.com, Verizon pousse le marché des smartphones à la norme LTE, 12/01/12 : http://bit.ly/AhB260 94 Sprint.com, Sprint annonce l’arrivée de la 4G LTE en 2012, 05/01/12 : http://bit.ly/w6sMQD 95 www.lightreading.com, article Where in the world is LTE?, du 29/12/11 : http://bit.ly/rRU8Wh 96 Etude IHS iSUppli Market Research : http://bit.ly/s99HR4 97 ARCEP, communiqué de presse du 22/12/11 : http://bit.ly/tEAyy7 98 Akamai – Stateofinternet Q2 2011 : http://slidesha.re/sMoOLT 99 Deloitte.com, Tendances Médias et Télécommunications, 03/02/12 : http://bit.ly/zQAvti

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LTE), 14 bandes de fréquences, le Wifi, le GPS et le NFC (voir annexe 3). Nous allons maintenant nous intéresser aux opérateurs telecoms, des acteurs essentiels à l’éco-système mobile.

1.2.2/ Les opérateurs

Orange est le leader historique en France lancé en 1992 et il compte aujourd’hui 27 millions de clients mobile. SFR est le challenger avec 21 millions de clients et Bouygues télécom affiche 11 millions de clients mobile et se positionne comme le 3ème acteur du marché. Free est désormais le 4ème acteur du marché mobile après un lancement remarqué début 2012 et plusieurs années de lobbying pour obtenir une licence auprès des autorités compétentes. Free a proposé un forfait tout illimité à 19,90 € et un forfait d’une heure et 60 SMS à 2€ pour les non-inscrits à l’offre ADSL. L’attaque de Free sur les prix va encore plus loin en faisant le premier forfait à 0€ pour les abonnés à Free ADSL. L’ARCEP indique que le prix à la minute est passé de 0,186€ en 2006 à 0,156€ en 2011, Free la propose à 0,05 € y compris en dépassement de forfait. Le prix du SMS est de 0,10€ chez Orange et SFR, Free le propose à 0,01 €100. Cette pression sur les prix à la baisse est chiffrée par certains à 4 milliards d’euros de recette en moins pour l’état101 et à une baisse d’un tiers de la marge opérationnelle de France Telecom d’ici 2015102. Les fournisseurs d’accès à internet se sont tous fait racheter au fil des années par les opérateurs de mobile. Les opérateurs se sont d’ailleurs rendu ainsi compte que les marges de l’internet étaient bien moindres que celles du mobile. L’arrivée de Free, pure player de l’internet, dans le mobile est comme une revanche de tous les FAI qui n’existent désormais plus. La philosophie d’internet et avec elle la faible marge arrive avec Free qui compte bien bousculer le marché comme il l’a fait sur internet. Le mobile se transformant petit à petit en internet mobile, gageons que cet acteur aidera les opérateurs au sens large à favoriser le déploiement de l’internet mobile. L’augmentation de la limite data des forfaits de 500mo par les opérateurs traditionnels à 3G par Free en est un bon exemple.

Aux côtés de ces quatre acteurs principaux, le marché compte des acteurs sans réseaux appelés MVNO comme Virgin Mobile, NRJ, Coriolis Telecom, Prixtel, La Poste, Numéricable. On peut noter la bonne percée récente de La Poste qui a acquis 250 000 abonnés en 2011, deux fois plus qu'attendu, notamment grâce à son réseau de bureau sur toute la France. La force des MVNO est de proposer des forfaits moins chers et sans subvention de téléphone. Les opérateurs multiplient les stratégies de fidélisation afin de garder leur clientèle chèrement acquise au fil des ans. La segmentation des offres via le lancement de marques dédiées à une catégorie de clientèle s’accélère. Les opérateurs ont lancé leurs offres calibrées pour contrer les MVNO et l’arrivée de Free, qui vise 25% de parts de marché. B&You de Bouygues Telecom, Red d’SFR103 et Sosh pour Orange sont des offres online, sans engagement, sans subvention de téléphones et orientées data104. Les MVNO sont directement menacés par les nouvelles offres de Free qui

100 Iliad.fr, communiqué de presse 10 Janvier 2012 : http://bit.ly/wYQc49 101 Challenges.fr, Free mobile va coûter 4 milliards à l’Etat Français : http://bit.ly/y11cLP 102 Lemonde.fr, Face à Free, les opérateurs mobles cherchent à adapter tarifs et contenus, 12/01/12 : http://bit.ly/yoVapg 103 Lefigaro.fr, SFR dévoile RED, son offre mobile en ligne, 29/09/11 : http://bit.ly/vpj8JT 104 01net.com, les offres anti-free des opérateurs à la loupe : http://bit.ly/tKllPu

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ciblent la même clientèle, sensible au prix. Certains MVNO ont même réagit en dénonçant le prix de la minute vendue par Free comme étant plus chère que leur propre prix d’achat auprès des opérateurs.

Les relations entre opérateurs et constructeurs sont stratégiques. Les opérateurs ont besoin de nouveaux téléphones performants pour attirer et conserver leurs clients et les constructeurs ont besoin de la base de clients et du réseau de distribution des opérateurs pour écouler leurs stocks. Cette relation connaît son paroxysme avec les négociations qui ont eu lieux au lancement de l’iPhone. Orange avait ainsi obtenu l’exclusivité de la commercialisation de l’iPhone à sa sortie et ce pour trois ans, une manne financière et un renfort d’images important. Ce partenariat commercial a été l’objet d’un feuilleton judiciaire jusqu’à la décision des instances européennes de rompre cette exclusivité en 2009 afin de rééquilibrer le jeu concurrentiel. Apple a lancé son iPhone 4S en Chine début 2012 avec l’opérateur China United Network Communications Group, le 2ème acteur du marché. Le smartphone est subventionné à 100% pour un engagement de deux années et pour un montant mensuel de 45 $105. Ce lancement est stratégique pour Apple au regard du potentiel de ce marché et compte ainsi consolider sa part de marché en Asie. Aux Etats-Unis, la marque s’est associée à AT&T pendant quatre ans. Verizon a commercialisé pour la première fois un téléphone Apple avec le lancement de l’iPhone 4 en février 2011. Les Américains ont ainsi pu comparer les deux réseaux comme l’a fait Walt Mosberg du site Allthingsdigital106, et profiter du réseau wifi, d’un forfait data illimité et d’une meilleure qualité voix chez Verizon. Cependant, au même moment la société publiait de nouvelles CGV stipulant que les 5% d’utilisateurs surconsommant de la data verront leur débit ralentir107. Ce lancement aura coûté approximativement 5 milliards de dollars en termes de subventions108.

Les opérateurs mobile règnent sur le marché de la voix mais cela pourrait ne pas durer. Les communications audio peuvent transiter par le réseau web, c’est ce que l’on appelle la « voix sur IP ». Cette innovation technologique a été rendue célèbre par Niklas Zennström qui a fondé Skype à la suite de l’aventure Kazaa, le célèbre réseau peer-to-peer. Skype a été racheté par Ebay dans l’objectif de faciliter les transactions entre particuliers sur la plateforme d’enchères et est passé entre les mains de Microsoft depuis, afin d’aider l’entreprise dans son retour sur le marché des mobiles. Une jeune start-up fondée par Tomaz Stolfa, l’organisateur des MobileMonday en Slovénie, s’est donnée pour ambition de révolutionner la voix sur IP en allant encore plus loin. A l’inverse de Skype, plus besoin d’installer un programme sur votre ordinateur, tout se passe dans votre navigateur. Le numéro de téléphone est mort selon son fondateur, le système se base sur un lien web lui-même lié à un profil. Par ailleurs, vous pouvez louer un lien qui expire après la communication, afin de ne pas donner vos informations personnelles pour une communication avec quelqu’un que vous n’envisagez pas de recontacter à l’avenir. Plus de numéro, plus de frontières géographiques, des appels gratuits, la possibilité de lier plusieurs numéros de téléphone au même profil et lien vox.io, une utilisation 3G ou Wifi… La société vient de s’installer dans la Silicon Valley pour accélérer son développement et vient de sortir son application iPhone. Paul Golding a publié sur le

105 Bloomberg, China Unicom offre l’iPhone 4S pour 45$ par mois : http://bloom.bg/yKIPqs 106 Allthingsd.com, 02/11/11 : http://dthin.gs/vOuH7f 107 Mashable.com, Verizon limite des centaines d’utilisateurs d’iPhone, 04/02/11 : http://on.mash.to/tj6XNC 108 Businessweek.com, l’iPhone pourrait coûter 5 milliards à Verizon, 11/01/11 : http://buswk.co/v9175H

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blog Visionmobile, un article très intéressant expliquant pourquoi ces initiatives venant du monde du software sont de sérieuses menaces pour les opérateurs109. Nous allons voir maintenant qui sont les principaux constructeurs de téléphones aujourd’hui et comment l’arrivée des smartphones a bouleversé ce marché.

1.2.3/ Les constructeurs

Alors que le marché du PC continue sa chute (-11% au 3ème trimestre 2011110), les ventes de mobiles et notamment de smartphones explosent. Le marché des téléphones mobiles représente 335 milliards de dollars en 2011 et devrait atteindre les 500 milliards dans trois ans. Le constructeur Apple a non seulement bouleversé le marché des téléphones portables mais a également changé de visage. A fin décembre 2011, le segment de produits mobiles a réalisé 53% du chiffre d’affaires de la société111. Les acteurs spécialisés sur le segment des smartphones, Apple et RIM, ont ainsi atteint le TOP 5 en quelques années, mais les constructeurs généralistes ont désormais tous lancé leurs modèles haut de gamme. On assiste à une concurrence féroce sur le segment des smartphones et par conséquent à une forte pression sur les prix. Cette baisse des prix va ainsi démocratiser les smartphones dans les années à venir et faire disparaître les feature phones. Nous avons donc aujourd’hui un marché à deux vitesses, les ventes totales de mobile d’un côté et de l’autre les ventes de smartphones.

Part de marché mobile globale, +11% d’unités vendues en 2011112 :

Nokia, le leader historique, voit sa position s’affaiblir avec 23,8% de part de marché sur l’année 2011. N’ayant pas pris à temps le virage des smartphones, le géant finlandais joue clairement sa position en 2012 avec le lancement de sa gamme de smartphones. Le constructeur coréen Samsung est parvenu en quelques années à se hisser à la 2ème position et a fêté ses 300 millions de téléphones vendus sur l’année 2011 notamment grâce à sa ligne de produit Galaxy113. Apple s’est hissé à la troisième position des constructeurs de téléphones au monde. LG passe en 4ème position et se trouve en sérieuse difficulté financière sur sa branche mobile qui est en première ligne des attaques des nouveaux entrants. En effet, il faut désormais compter avec deux constructeurs chinois ambitieux, ZTE et Huawei, qui ont la ferme

109 Visionmobile, The fight of the Voice, 09/02/12 : http://bit.ly/IJZU9N 110 Gartner, Marché européen du PC en déclin de 11%, 14/11/11 : http://bit.ly/vMfaka 111 Businessinsider.com, Apple, the iPhone company, 24/01/12 : http://read.bi/x0BPCA 112 Gartner, communiqué de presse du 15/02/12 : http://bit.ly/yDwGvx 113 Businessnews.com, http://bit.ly/s1tNuE

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intention de remonter la chaine de valeur en pénétrant le marché européen et américain sous leur propre marque. ZTE est le plus important avec déjà 3,2% de parts de marché cette année et a pris la 5ème position. Huawei quant à lui est le 5ème mondial et a commercialisé 18 millions de smartphones sous Android en 2011. Il a pour ambition d’entrer dans le TOP 3 sur cette plateforme114. A cela s’ajoutent des acteurs de l’électronique grand public comme Panasonic qui a pour objectif de vendre 15 millions d’unités d’ici 2016115. Le marché indien est intéressant à observer car il représente à lui seul 12% des ventes mondiales et compte pas moins de 150 constructeurs pouvant commercialiser leurs téléphones sans subventions des opérateurs116. 75% des mobiles sont vendus sous la barre des 75$, ce qui illustre parfaitement la prédominance du segment lowcost. Gartner prévoit un total de 231 millions de mobile vendus en Inde en 2012.

Parts de marché des constructeurs de smartphones117 :

Les constructeurs se livrent à une guerre des chiffres. Samsung est notamment régulièrement cité comme devenant le leader des ventes de smartphones. Certaines voix s’élèvent car aucun chiffre n’a été communiqué par le constructeur, à l’inverse de ses concurrents118. Toujours est-il qu’il suffit de regarder les courbes depuis deux ans pour se rendre compte de la dynamique de chacun des constructeurs, Samsung et Apple dominent le marché aujourd’hui.

Le hardware ne suffit plus : La principale raison de choix de forfait mobile est le téléphone en tant que tel. Les constructeurs de téléphones se sont lancés dans une course à l’innovation sans fin, notamment depuis le lancement emblématique de l’Iphone en 2007. L’émergence des Smartphones a considérablement accru la compétition autour des services entre les constructeurs, appelée aussi OEM pour Original Equipment Manufacturer. « Devices are not enough anymore », c’est Olli-Pekka Kallasvuo, le CEO de Nokia qui l’a formulé ainsi en 2007 à l’occasion du lancement d’OVI, la plateforme de services propriétaires119. Les succès de ces plateformes sont mitigés pour deux raisons : d’une part ce type de diversification entre en concurrence frontale avec leurs premiers partenaires, les opérateurs, qui ont également la ferme intention

114 Latribune.fr : Les chinois ZTE et Huwei se font un nom dans les smartphones, 19/10/11 : http://bit.ly/rYXNSC 115 Lemonde.fr, 09/12/11 : http://bit.ly/tyO6D3 116 Gartner, 22/11/12 : http://bit.ly/uE3Py7 117 Eco-conscient.com, source : IDC, 11/02/12 : http://bit.ly/A3qTTh 118 guardian.co.uk, Dear Samsung : could you have some clarity on your phone sales figures now?, 06/01/12 : http://bit.ly/xBmVSb 119 Businessweek.com, Nokia se lance dans les services mobiles, Août 2007 : http://buswk.co/u6HhpP

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de capter cette valeur. D’autre part, hardware et software restent des métiers différents avec des cycles de vie de produits et des cultures d’entreprises difficilement compatibles, c’est toute la force d’Apple et de RIM d’avoir intégré ces deux univers.

Comparatif des services proposés entre OEM et plateformes (Android et Windows phone)120 :

Les constructeurs sont maintenant en compétition avec les entreprises de services. C’est d’autant plus vrai que les plateformes vont vers le hardware. L’année 2011 a été marquée par le rachat de Motorola par Google ainsi que par le rapprochement stratégique entre Microsoft et Nokia.

Nokia : Nokia a perdu sa place de leader sur le segment des smartphones au 2ème trimestre de l’année 2011 selon le cabinet Strategy Analytics121 et a de surcroît abandonné son OS propriétaire Symbian sur les smartphones pour le dédier à ses feature phones. Comment Nokia pourra-t-il reconquérir sa position de leader mondial y compris sur le segment haut de gamme ? L’annonce du partenariat avec Microsoft a été faite en Février 2011 et va permettre un certain nombre de synergies : une meilleure intégration de l’OS dans le hardware, sur la recherche avec Bing, la cartographie avec Nokia Maps, le paiement sur facture opérateurs, le Cloud et le store d’applications de Microsoft122. Il est difficile de ne pas voir dans ce partenariat deux géants qui ont perdu du terrain et n’ont pas d’autres choix que de s’allier contre les nouveaux entrants afin de reprendre des parts de marché rapidement. Cette annonce est importante dans la mesure où cela marque l’échec de Nokia dans le domaine des services et du software, ce qu’avoue le CEO Stephen Elop dans une note interne quelques jours auparavant123. Un constructeur ne peut plus se battre seul dans la guerre des plateformes qui comprend désormais le device mais aussi l’écosystème tout entier de la publicité, aux développeurs, système de paiement, service de géolocalisation…Les constructeurs ne sont pas épargnés par la montée en puissance du monde du software que décrit très bien

120 Visionmobile : http://bit.ly/vLzn54 121 Lemonde.fr, L’accord entre Google et Motorola pourrait renforcer Nokia, 16/08/11 : http://bit.ly/yofaEk 122 Nokia.com, 11/02/11 : http://nokia.ly/whuzmH - http://bit.ly/wnoxJM 123 Thenextweb.com, Le CEO de Nokia parle de plateforme en feu, 09/02/11 : http://tnw.co/xt980q

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Marc Andreessen, le fondateur de Netscape et des investisseurs les plus connus de la Silicon Valley124. L’internet est devenu mobile et les géants du software ont pour ambition de dévorer le mobile et ses acteurs. Dans ce contexte, un constructeur comme Nokia n’a pas d’autres choix que de reconnaître ses limites. Cet accord va permettre une meilleure intégration et personnalisation de l’OS de Microsoft, une interconnexion avec Windows office et la Xbox. Cet accord a pris forme en fin d’année 2011 avec les lancements dans six pays stratégiques de la nouvelle gamme de téléphones Nokia Lumia incluant la nouvelle version de l’OS de Microsoft, Mango. Paul Amsellem, le Directeur de Nokia en France explique très bien que ce lancement est stratégique et devrait permettre aux deux acteurs de revenir dans la course125. La première étape est de reconquérir la confiance des opérateurs et des distributeurs, la deuxième est d’arriver à une part de marché de 25% du marché des smartphones. Nokia a lancé début janvier 2012 son Lumia 710 sur le marché américain où il est encore peu présent, sur un positionnement moyen de gamme à 49,99$ chez T-Mobile, un bon point de départ pour concrétiser cette alliance et aller chercher du volume126. A l’inverse, Nokia va aider Microsoft à pénétrer le marché asiatique. Pour Microsoft, dont les profits viennent du monde du PC, gagner la guerre du mobile est vital. Alors que les revenus sur le mobile seront bien différents, Microsoft gagne 40$ sur chaque PC vendus contre 15$ pour un Windows Phone.

Samsung : La société coréenne qui détenait seulement quelques points de parts de marché en 2009 a fortement attaqué le marché mobile pour progressivement devenir le leader, d’abord du marché des smartphones et probablement à terme du marché du mobile en général. Ses produits Galaxy haut de gamme, sa stratégie d’alliance forte avec Android et une base importante de feature phones ont été la stratégie gagnante pour le groupe. Conscient de la dépendance à Google, Samsung fait des efforts pour développer sa propre plateforme Bada, bien qu’elle n’ait pas encore convaincu les développeurs. La forte croissance du constructeur pourrait seulement être contrariée par la guerre juridique qu’il mène principalement contre Apple. La justice a interdit la commercialisation des tablettes Galaxy tab en Allemagne, le lancement aux Etats-Unis du Galaxy Nexus a été retardé, une vingtaine de procès dans une dizaine de pays sont actuellement ouverts.

Apple : Apple est un constructeur d’ordinateur qui a su innover au-delà des frontières de son marché. L’iPod a réinventé le lecteur de cassettes et est devenu l’emblème des lecteurs mp3. Par la suite, l’iPhone a révolutionné l’industrie de la téléphonie. La firme a seulement 4% de parts de marché en volume mais 52% de la valeur127. Apple a vendu plus d’iPhone en 4 ans que de Mac depuis leur lancement il y a plus de 28 ans128 (voir annexe 4). Apple a été pendant quelques heures la société côtée la plus valorisée durant la journée du 9 Aout 2011, elle a atteint les 347 milliards de dollars129. Il faut savoir que Samsung fournit 26%

124 Thewallstreetjournal.com, Pourqui les software dévorent le monde entire, 20/08/11 : http://on.wsj.com/yrbQB4 125 Businessmobile.fr, Le Lancement de nos Windows phone sera le plus grand jamais réalisé, 26/10/11 : http://bit.ly/x6hywK 126 Latimes.com, Lumia 710, Nokia’s first US Windows Phone, 07/01/12 : http://lat.ms/wWwOAo 127 Businessinsider, Canaccord Genuity analysts, Share of industry profits for leading mobile companies, 07/11/11 : http://bit.ly/Ai8oJR 128 Asymco, Apple sold more iOS devices in 2011 than all the Macs it sold in 28 years, 16/02/12 : http://bit.ly/xWnhPE 129 Economist.com, La pomme contre le pétrole, 10/08/11 : http://econ.st/yWfV7M

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du matériel nécessaire à la construction d’un iPhone 4, qu’il contient 178 éléments et que son prix de revient serait de 178$ pour un prix de vente à 560$130. Ce lien étroit avec Samsung est à l’origine de la guerre juridique que se livre les deux compagnies. C’est la société taiwanaise Foxconn qui assemble tous ces composants, le monde entier a découvert son existence à l’occasion de tragiques événements qui ont exposé au grand jour les conditions de travail des ouvriers qu’Apple faisait indirectement travailler pour produire l’objet le plus convoité de la planète high-tech occidentale. La construction d’iPads en Chine a réactualisé la question du coût humain de la sous-traitance asiatique131. Apple a réagi récemment en publiant la liste de ses 156 fournisseurs132 ainsi que le code de conduite transmis à ses sous-traitants, un bon signe considérant la culture du secret historique dont a fait preuve la société jusqu’ici. Elle est allée plus loin en devenant la première entreprise de technologie à rejoindre des marques comme Nike et Adidas dans la « Fair Labor Association », qui impose un audit indépendant de la chaîne de production.

Motorola : Google a annoncé au cœur de l’été sa plus grosse acquisition, le rachat de Motorola Mobility pour 12,5 milliards de dollars133. Il est important de noter que la valeur de l’entreprise a été majorée de 63% par rapport au cours de bourse de l’époque afin de valoriser son portefeuille de 17 000 brevets. Ce rachat est historique car il représente le mariage du hardware et du software. C’est également le signe que les jeunes entreprises venues d’internet détrônent les géants d’antan comme Motorola qui a été créé en 1928. D’un point de vue stratégique, Google veut renforcer la part de marché d’Android en maîtrisant la partie matérielle, les lancements des premiers Google Phone (Magic, Nexus…) n’ont pas été un franc succès ; protéger juridiquement son système d’exploitation, profiter de l’expertise de Motorola sur des expertises comme la RFID qui vont devenir clés dans les années à venir et mettre un pied dans le marché de la TV connectée en mettant la main sur un décodeur. Ce rachat n’est pas sans conséquences dans le monde des constructeurs pour qui Google passe du statut de partenaire à concurrent direct. Samsung est clairement en position de force vis à vis de Google, vendant à lui seul 55% des téléphones Android134. Google a fait le choix de prendre en main le destin d’Android au lieu de laisser son avenir entre les mains des opérateurs et des constructeurs. Ces derniers ont maintenant trois alternatives : construire leur propre environnement (Bada pour Samsung, Symbian pour Nokia), personnaliser Android comme l’a fait Amazon, ou bien renforcer leurs relations avec Microsoft, ce qu’a fait Nokia.

1.2.4/ Les agences

Au-delà des constructeurs, des opérateurs et des entreprises de service et de plateforme, il faut évoquer le rôle des agences dans cet éco-système. Nous avons en France de nombreuses agences mobile talentueuses qu’il convient d’évoquer ici. Les mouvements en cours sur ce marché rappellent quelque peu ce qu’il s’est passé avec les web agency il y a une dizaine d’années. Les agences mobiles

130 economist.com, Découper une pomme, 10/08/11 : http://econ.st/xO4X4n 131 Nytimes, Le coût humain de la fabrication en Asie, 26/01/12 : http://nyti.ms/yuhlT8 132 Wired, Apple dévoile la liste de ses sous-traitants, 16/01/12 : http://bit.ly/zxQsOP 133 Relation investisseurs de Google : http://bit.ly/vkFlSK 134 Mondaynote.com, Samsung versus Google, 08/01/12 : http://bit.ly/zGgzEt

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aujourd’hui sont des spécialistes de ce canal proposant à la fois du conseil, de la prestation de service et du media. Parmi les pionniers, il faut citer Airweb et Apocope dans les années 2000, Playsoft, Haiku, Adenyo, LDMobile, clicmobile et Nemo Agency créées entre 2002 et 2004. Nexence s’est lancée en 2005 et enfin Backelite135 en 2006. Depuis le lancement de l’iPhone en 2007, de nouvelles agences sont apparues comme Pure Agency, Mobil’factory, Haploid, Les nuages et userADgents. Nicolas Porteix, fondateur et CTO d’Airweb, considère que le secret d’une bonne application réside dans son storyboard, son ergonomie et la capacité à travailler avec une équipe de développeurs locaux. Certaines de ces agences ont été rachetées par des grands groupes de communication. Cela a été le cas de Marvellous créée en 2003, rachetée par la suite par Isobar. Stanislas Coignard, directeur de Marvellous, explique que son approche est tournée sur l’expérience client136. Il estime que les questions technologiques sont trop souvent au cœur des réflexions au lieu de vraiment travailler l’expérience client et le contenu que la marque va souhaiter proposer. Peu importe le point de contact, l’important c’est le message. Phone Valley quant à elle, a été créée en 2001 et rachetée par Publicis six ans après. L’agence rayonne toujours au sein du groupe et s’occupe de la stratégie mobile de ses clients au niveau mondial. M&CSaatchi a racheté en 2010 Inside Mobile pour en faire sa division mobile, l’agence a récemment ouvert un bureau Parisien137. Ces agences travaillent dans l’ombre depuis plus de dix ans à la promotion des outils de marketing mobile, qui se sont longtemps résumés aux SMS, et à l’accompagnement des annonceurs dans la mise en place de leur écosystème mobile. La Mobile Marketing Association et son antenne française regroupe les initiatives et prestataires du mobile, ainsi que l’association « French mobile » qui sort tous les ans un annuaire très complet. Un annonceur a toujours le choix de travailler avec un spécialiste ou un généraliste. Le mobile a pour vocation à rejoindre les équipes digitales à moyen terme, que cela soit chez les agences ou chez les annonceurs. De manière plus générale, le mobile a les atouts pour être au centre de plusieurs champs, la communication, la relation client, la distribution…Certaines agences souhaitent anticiper cela et mettre en place des équipes globales. C’est le cas de l’agence Digitas du groupe Publicis qui a lancé une initiative nommée « Connected commerce for active brands »138 qui réfléchit au futur du commerce avec le mobile en son centre. Son directeur Fernando Nogueira pense que les marques ont avec le mobile l’occasion de se rendre utiles et que le mobile va devenir central dans la relation qu’ont les marques avec leurs clients. Enfin, Bertrand Jonquois, cofondateur de Nemo Agency, a lancé début 2012 une agence entièrement dédiée à la création de trafic en magasins baptisée Go Shop139. Cette initiative illustre bien à quel point le digital s’aventure au-delà de ses frontières pour gagner le commerce physique et que ce mouvement passe par le mobile et ses nouveaux usages.

135 Interview de Sébastien Berten, cofondateur de Backelite : http://bit.ly/ysmoNs 136 vincenttessier.fr, interview de Stanislas Coignard, 16/02/12 : http://bit.ly/w2etX6 137 Mcsaatchimobile.com, M&C Saatchi annouces the acquisition of mobile advetising agency, 25/03/10 : http://bit.ly/yPIz27 138 Aacc.fr, communiqué de presse Digitas, 26/01/11 : http://bit.ly/Ah1rLS 139 Interview Bertrand Jonquois, lancement de l’agence Go Shop, 05/03/12 : http://bit.ly/zMgaaP

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1.3/ Les usages

« Les utilisateurs vont répéter leurs comportements acquis depuis dix ans sur internet. Les particularités du mobile vont irrémédiablement produire de nouveaux usages liés au contexte140 », nous dit Jason Spero, Head of mobile advertising US chez Google. Le mobile change irrévocablement le comportement des consommateurs. Les services et les utilisateurs sont en communication continue et s’ajustent mutuellement. Cela veut dire que l’adhésion à telle ou telle fonctionnalité fait évoluer les services qu’on leur propose et constitue un cercle vertueux. Par ailleurs, il semble clair que le mobile ne cannibalise pas les autres médias. Il est bien souvent utilisé en même temps qu’une consommation media tv, radio ou internet. L’étude Razorfish / Yahoo a montré que 80% des Américains interrogés utilisent le mobile devant leur poste de télévision141. Le mobile prend une place essentielle dans la vie des consommateurs. On entend régulièrement dire que c’est le seul objet pour lequel quelqu’un peut revenir chez soi en cas d’oubli. Trois objets sont indispensables : les clés de maison, le portefeuille et le mobile, jusqu’à ce que le mobile remplisse ces trois fonctions. On a l’habitude de mentionner le sigle ATAWAD (Any Time, Any Where, Any Device) pour décrire les nouveaux usages du mobile. Nous verrons ici les usages concrets que les utilisateurs font du mobile.

1.3.1/ Quels sont les usages du mobile ?

L’usage du mobile explose : nous regardons notre téléphone 150 fois par jour. Mais l’usage mobile est en également en pleine mutation. D’un usage strictement utilitaire pour passer des communications vocales, son usage devient de plus en plus varié et connecté à internet. Toujours est-il que les deux grandes utilisations de l’ensemble du parc de téléphone restent la voix et le SMS. Leur ordre s’est d’ailleurs inversé en 2011, le SMS a dépassé la voix. Nielsen constate une baisse de 12% de l’usage de la voix et une augmentation de 35% pour l’envoi de messages, selon le dernier rapport « State of mobile » publié au 3ème trimestre 2011142. Nous élargissons de plus en plus notre utilisation du téléphone en y ajoutant de nouveaux usages : prendre et télécharger des photos ou des vidéos, écouter de la musique ou des podcasts, poster sur les réseaux sociaux pour citer quelques exemples. Il faut savoir que 27% des photos sont prises à partir de smartphones, selon un sondage réalisé par le cabinet NPD143. Dans la plupart des cas, le téléphone remplace le traditionnel appareil photo pour des prises de vues spontanées de la vie de tous les jours, les réseaux sociaux favorisant fortement cette tendance. Ce n’est pas sans impact sur les ventes d’appareils photos et de caméras d’entrée de gamme qui n’ont ainsi plus d’utilité. Ceux-ci restent privilégiés pour les occasions telles que les vacances. Le centre de recherche PEW a publié en décembre 2011 une étude sur l’usage de la technologie au niveau mondial et notamment sur l’usage du mobile. Il en

140 Youtube, Chaine thinkvoices, Mobile Marketing Revolution by Jason Spero : http://bit.ly/xSkEgw 141 Razorfishoutlook, Forget mobile, think multiscreen : http://bit.ly/wp56Q6

142 Nielsen, The Mobile Media Report – State of the media Q3 2011 : http://slidesha.re/wLEQMJ 143 Businessmobile.fr, 27% des phoytos sont prises à partir de smartphones, 23/12/11 : http://bit.ly/yb3CjA

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ressort également l’utilisation largement répandu du SMS et une utilisation de l’internet mobile inégale selon les pays144. Ces tendances sont confirmées par comScore dans le tableau suivant145.

Usages mobile (feature et smartphone) :

La plus grande enquête sur les comportements des utilisateurs de mobile est publiée par TNS Sofres, un panel de 34 000 personnes à travers 43 pays appelé « Mobile Life ». La 6ème édition a été publiée en mars 2011 et met en lumière deux phénomènes majeurs : 46% des utilisateurs du web mobile utilisent les réseaux sociaux et 18% des utilisateurs téléchargent photos et vidéos sur internet146. L’étude souligne les différences d’usages et d’attentes des consommateurs entre les pays développés et les pays émergeants, notamment vis à vis de la télévision et de la vidéo. En effet, dans beaucoup de pays du monde le téléphone mobile est le seul accès à l’internet. Le taux de pénétration de l’ordinateur fixe est très bas compte tenu de la faible infrastructure réseau et du prix d’équipement. Par conséquent, ces populations attendent du mobile de pouvoir faire tout ce qu’il est possible de faire sur internet et qui leur est aujourd’hui impossible, en premier lieu, l’utilisation d’applications et des réseaux sociaux.

Pour des chiffres plus spécifique au marché français, TNS Sofres s’est joint à l’AFOM (l’Association Françaises des Opérateurs Mobiles) pour étudier l’usage des utilisateurs147. L’utilisation du SMS est l’usage le plus largement répandu à 82%. Par ailleurs, 29% des équipés mobile intérrogés commencent à utiliser leur mobile comme un accès à internet, 60% considèrent que le mobile favorise les échanges et 74% pensent qu’il rend la vie plus facile. Concernant la mobilité, le CREDOC et l’ARCEP ont publié en décembre 2011 une étude sur la diffusion des technologies de l’information et de la communication dans la société Française148. 31% des français se connectent à internet de façon nomade (téléphone mobile, cybercafé et wifi dans un lieu public). L’accès à internet par le mobile connaît une forte croissance depuis

2005 et a connu une croissance de 9 points depuis 2010. Cette proportion de l’accès à l’internet en mobilité

144 PEW Research Center, Global digital communication, 20/12/11 : http://bit.ly/y5Nj0M 145 Comscore.com, 2012 Mobile future in focus, Report, 23/02/12 : http://bit.ly/xygMww 146 Tns-sofres.com, Résultats 6ème édition de TNS Mobile Life, 29/03/11 : http://bit.ly/yZdHdQ 147 TNS Sofres et AFCOM, Observatoire sociétal du téléphone mobile 2010 : http://slidesha.re/xHK8Vc 148 Credoc Arcep, décembre 2011 : http://slidesha.re/wgKv24

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constitue le changement majeur qu’ont apporté les smartphones. Il suffit de regarder évoluer les grandes catégories d’usages de 2008 à 2011. Aujourd’hui, 24% des possesseurs de mobile naviguent sur internet contre 7% en 2008, 19% consultent leurs emails et 17% téléchargent des applications.

Voici illustrée ci-dessous l’évolution de ces usages depuis 2008 :

Il est intéressant de regarder ces usages selon le type de téléphone tant l’usage peut être différent entre les deux grandes catégories de téléphones. On s’aperçoit que les possesseurs de smartphones sont plus nombreux à envoyer des SMS que l’ensemble des personnes équipées en mobile (96% contre 71%).

Combien de SMS sont envoyés en moyenne par personne ? :

Source Arcep Credoc – Décembre 2010

Le nombre moyen de messages envoyés augmente fortement depuis 2008, depuis l’arrivée des smartphones mais aussi avec le développement des envois à de multiples destinataires (75 SMS en moyenne par semaine en 2011, contre 57 en 2010 et 30 en 2009). La nuit du réveillon est par ailleurs toujours l’occasion de battre des records. En 2011, il a été envoyé en France 1 milliard de SMS durant le week-end, en forte hausse par rapport à l’année précédente.

1.3.2/ Time saving & Time killing

Avec l’arrivée des smartphones, les consommateurs ont découvert à la fois de nouveaux moments et de nouvelles fonctionnalités possibles avec leur téléphone. On parle de deux grandes catégories de nouveaux usages : le « time saving » et le time « killing ». Commençons par la notion de « time killing ».

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Elle représente les temps morts de la vie de tous les jours où votre mobile peut vous permettre de « tuer le temps ». C’est-à-dire de s’occuper dans les transports en commun, les salles d’attente, les ascenseurs… Ces moments étaient propices à la rêverie, à l’introspection, la lecture voire au sommeil pour les citadins traversant l’Ile de France en RER. Les temps morts meurent pour se transformer en temps passé sur le mobile, l’inactivité tend à disparaître. Une étude de CA Technologies149 estime le temps passé sur l’internet mobile à 38 jours par an et distingue trois grandes catégories : les pauses publicitaires à la télé, les pauses cafés et les transports en commun. Beaucoup de ces moments étaient « perdus », du moins au sens publicitaire du terme. C’est-à-dire que l’audience n’était pas captive, hormis par le media d’affichage ou la publicité dans la presse. Le mobile permet désormais notamment de jouer à des applications ludiques, consulter les dernières informations, suivre le fils de la conversation en cours sur twitter et bien sûr de garder le contact avec votre réseau via les réseaux sociaux. Durant ces moments d’inactivité et d’attente, l’audience peut désormais devenir captive grâce au mobile et donc susceptible d’être sollicité par une marque. L’autre catégorie de bénéfice pour l’utilisateur est la notion de gain de temps. Les applications dites « utilitaires » sont parmi les plus téléchargées et utilisées. Quand votre mobile vous permet de trouver un lieu autour de vous en consultant un service de cartographie ou lorsque vous consultez votre agenda ou vos mails en déplacement ou même dans la rue. Il s’agit de profiter du contexte de l’utilisateur pour lui apporter plus de valeur ajoutée. De surcroît, le simple fait de ne pas avoir à attendre d’être devant son ordinateur fixe pour pouvoir se connecter à internet via une application ou un navigateur est en soi un gain de temps. L’application « J’aime attendre » par exemple recense les heures d’affluences ou des administrations physiques permettant ainsi à ses utilisateurs d’être informés des meilleurs horaires pour effectuer leur déplacement. Le service chronodrive permettant de faire ses courses sur internet et d’aller les retirer dans un magasin physique est disponible sur ordinateur ou sur son mobile, faire ses courses dans les transports en commun pour gagner du temps est désormais possible. Les exemples sont nombreux et de nouveaux usages de ce type émergent régulièrement. Le gain de temps peut ainsi permettre d’économiser de l’argent ou de passer plus de temps sur d’autres tâches. C’est ce qu’a démontré une étude américaine chiffrant à 4000$ par an le gain pour les entrepreneurs et les petites entreprises par exemple150.

1.3.3/ Les réseaux sociaux

C’est l’usage qui connaît la plus forte croissance sur le mobile, déclare Mark Donovan, Senior VP du mobile chez comScore151. Il y a également des chiffres que tout le monde garde en tête, ce sont des marqueurs parmi le flot d’informations et d’études qui inondent le marché. Pour Benedict Evans du cabinet Enders Analysis152, Facebook aurait 40% de son trafic provenant du mobile avec la répartition par OS et par fréquence suivante153 :

149 Francemobiles.com, Les mobinautes se connectent 38 jours par an sur internet, 08/12/11 : http://bit.ly/ysosky 150 Huffingtonpost.com, Mobile apps save small businesses time and money, 10/02/12 : http://huff.to/x833KP 151 Mobilemarketingwatch.com, comScore higliths growth in mobile social media audience, 21/11/11 : http://bit.ly/yeOAGW 152 Techcrunch.com, 40% des utilisateurs de Facebook se connecte par le mobile, 29/12/11 : http://tcrn.ch/xUdXTy 153 Servicesmobiles.fr, source Facebook et Enders Analysis, 29/12/11 : http://bit.ly/yPgOZF

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L’application iPhone a bien sûr été la première sortie, réalisée par les équipes internes de Facebook. Elle a aujourd’hui 99 millions d’utilisateurs mensuels et 57 millions par jour154. L’application Android a été lancée en septembre 2009, un an après, et elle est en passe de la dépasser. C’est déjà le cas sur le nombre d’utilisateurs par jour. Il faut noter que la nouvelle fonctionnalité de timeline a été rapidement disponible sous Android et sur l’iPhone que fin décembre 2011, que l’application pour l’iPad (5,5M daily active user) a probablement déporté un peu de son audience ainsi que le site mobile en HTML5, m.facebook.com. Quand vous visitez pour la première fois le site mobile, Facebook vous propose de télécharger l’application afin d’offrir une expérience plus riche.

Usage des applications Android et iOS de Facebook :

Le chiffre que seul Facebook connait, c’est la part de son trafic qui ne se connecte que par le mobile… Facebook a bien compris l’importance du mobile mais surtout que son prochain milliard d’utilisateurs viendra par le mobile. C’est pourquoi la firme a passé des accords avec une cinquantaine d’opérateurs et a développé une version spécifique qui sera embarquée dans les téléphones. Cette version appelé « Zero », 0.facebook.com, plus légère donc moins gourmande en bande passante, permettra de rendre accessible le service de manière beaucoup plus large (2G) et sans surcoût additionnel de communication. Par ailleurs, la fonction « connect » a permis à Facebook de déployer son social graph à l’ensemble des sites internet, créant ainsi une surcouche sociale à l’internet tout entier. La firme a proposé dès 2009 une API connect aux développeurs d’iOS, d’Android ou de sites mobile, leur permettant ainsi d’offrir une expérience plus

154 Techcrunch.com, Facebook Android et iPhone, 17/12/11 : http://tcrn.ch/w47C0U

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personnelle et sociale à leurs utilisateurs. Le framework d’applications HTML5 PhoneGap a lui aussi mis à disposition un plugin connect en août 2011155.

L’étude comScore « it’s a social world »156 a dressé un panorama des réseaux sociaux et a notamment montré que 45% des utilisateurs de smartphones européens utilisaient les réseaux sociaux sur leur mobile, au moins une fois par mois. Par ailleurs, les Européens ont une légère préférence pour un accès via navigateur plutôt que par applications. L’usage des réseaux sociaux aux Etats-Unis est globalement plus important qu’en Europe.

L’usage des réseaux sociaux est bien sûr plus faible en considérant le parc total de terminaux mobile et présente quelques disparités selon les pays. En France, 22,8% des possesseurs de mobiles visitent un site ou une application de réseau social au moins une fois par mois.

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Au-delà des réseaux sociaux nés sur le web que les utilisateurs retrouvent sur leur mobile, de nombreux projets se lancent désormais directement sur le mobile, on parle de « mobile first ». C’est le cas de l’emblématique réseau Instagram. Il s’agit d’une application mobile qui vous permet de prendre des photos, d’y appliquer des filtres et de les partager. Lancée en octobre 2010, elle compte désormais 40M d’utilisateurs, disponible uniquement sur le mobile et sur une seule plateforme, iOS. En effet, ce service a détrôné Foursquare au mois de décembre dernier, celui-ci étant pourtant développé sur toutes les plateformes et avec plus d’ancienneté157. Kevin Systram explique lors de la conférence LeWeb qui s’est

155 Techcrunch.com, HTML5 mobile app framework PhoneGap adds Facebook connect plugin, 30/08/11 : http://tcrn.ch/ABhQSG 156 Comscore, its a social world, Top 10 need-to-knows about social networking and where it’s headed : http://slidesha.re/x0e6rw 157 Locita.com, Instagram détrône Foursquare et devient le premier réseau social mobile, 21/12/11 : http://bit.ly/yh1Gbu

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tenue à Paris du 4 au 6 décembre 2011 que son application est bien plus que de simples filtres photographiques ou même un simple service de partage de photos158. Comme beaucoup, il considère que sa plus grande force est d’avoir constitué une communauté. Il explique qu’Instagram permet de capturer des visuels d’événements tout comme Twitter permet de partager des événements sous forme de textes sur le réseau. L’entreprise est à peine constituée d’une dizaine de collaborateurs et leur ambition est de se développer sur toutes les plateformes, Android étant la prochaine étape. Concernant la publicité, il ne semble pas pressé par la question de la monétisation et parle d’intégration de marques plutôt que de bannières publicitaires. Début janvier 2012 a vu l’arrivée sur le service de Barack Obama, le Blog de la société s’en faisant l’écho en rappelant qu’un certain nombre de grands journaux utilisent déjà le service comme NBC News ou le Washington Post159. Facebook a acheté un milliards de dollars Instagram, c’est une valorisation très importante pour une telle taille de start-up. La fonction sociale est liée à la vidéo, qui connaît une croissance très importante sur le mobile. 200 millions de vidéos sont vues tous les jours sur Youtube mobile. L’arrivée de la 4G va permettre à la vidéo de se généraliser et de devenir un des usages majeurs sur mobile, comme c’est le cas sur l’internet fixe aujourd’hui.

Sur l’usage social, George Colony avance que nous entrions dans une ère post sociale (POSO). Il considère que le temps passé sur les réseaux sociaux est en quelque sorte gaspillé160. Les prochaines applications et réseaux sociaux doivent apporter plus de valeur, mieux cibler, recommander. Le mobile apporte un certain nombre de nouvelles possibilités qui peuvent être créatrices de valeur et de plus grande satisfaction. La localisation est une de ces nouvelles fonctions qui apportent une dimension supplémentaire à l’interaction entre utilisateurs et avec les marques.

1.3.4/ La localisation

Les smartphones ont introduit la possibilité de localiser la position d’un utilisateur sur une carte à l’aide de ses coordonnées géographiques via GPS ou Wifi. Le GPS est une initiative américaine utilisant une trentaine de satellites. Deux autres réseaux de satellites existent, le réseau russe Glonass et le réseau européen Galileo. L’utilisation la plus évidente de la localisation est de pouvoir s’orienter géographiquement avec son terminal comme nous le faisions traditionnellement avec un GPS automobile. Le service Google maps disponible sur Android et sur iPhone a popularisé la fonctionnalité. Google avance même que 40% de son audience sur ce produit se fait par le mobile et que 95% des possesseurs de smartphones recherchent des informations concernant des lieux autour d’eux. Le jour de la Saint Valentin, 62% des recherches effectuées sur les restaurants les plus populaires aux Etats-Unis ont été faites à partir d’un mobile ou d’une tablette161. La notion de mobilité est en train de bouleverser les transports et l’urbanisme avec des applications possibles sur les places de stationnement en temps réel, l’information aux voyageurs, la location de véhicules. C’est le service Latitude de Google qui a introduit la notion de partager sa position géographique avec ses contacts. Il permettait ainsi de voir où se situaient ses amis

158 Youtube.com, chaîne LeWeb, 08/12/11 : http://bit.ly/Ajh3S5 159 Blog.instagram.com, http://bit.ly/xOzX1b 160 Blogs.forrester.com, 56% of time spent on social is wasted, 06/02/12 : http://bit.ly/yMf4qK 161 Blog Google mobile ads, Mobile helps cupid ‘s lastminute work, 15/02/12 : http://bit.ly/whwMaS

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géographiquement. Plusieurs services de réseaux sociaux se sont lancés sur ce concept depuis, voir qui est autour de moi, amis ou futurs amis ! L’application Grindr a été une des premières à exploiter la localisation pour proposer de rencontrer des gens autour de soi et plus récemment le service Highlight a beaucoup fait parler de lui au SXSW 2012. Sur cette application, la fonction de localisation est activée en tache de fond toute la journée et vous montre si vos amis Facebook sont non loin de votre position162. Il faut noter que la CNIL regarde de très près ces nouveaux usages et notamment les modes de collectes de la part de Google et Apple. Il arrive en effet qu’un smartphone puisse envoyer le signal de sa position géographique, notamment la borne wifi la plus proche à Apple par exemple, lui permettant ainsi de constituer sa base de données des accès wifi163. Une étude de la Cnil et de Médiamétrie avance que 65% des utilisateurs craignent pour la protection de leurs données. La présidente de la Cnil, Isabelle Falque- Pierrotin, estime que le smartphone devient un terminal très personnel voire intime. Elle constate que les utilisateurs y stockent de plus en plus d’informations personnelles voire secrètes164. Sur la géolocalisation, 97% des utilisateurs jugent importante de savoir comment leurs données sont utilisées. 65% des parents souhaiteraient géolocaliser leurs enfants.

Le récent ouvrage d’Alain Levy « Sur les traces de big brother »165 est intéressant à ce sujet, il rappelle que les données récoltées par la navigation internet via cookie et sur poste fixe restent anonymes. Il souligne également que les utilisateurs qui acceptent de partager leurs données verront leur expérience de l’internet améliorée, car les propositions commerciales seront de fait mieux ciblées. Ce débat sur la donnée privée est d’autant plus vif sur le mobile que nous entretenons un rapport plus intime avec nos mobiles qu’avec nos ordinateurs. L’utilisation de la position géographique évoquée jusqu’ici est plutôt fermée, c’est-à-dire que je ne partage pas ma position géographique à tout le réseau internet mais uniquement avec mes amis. Un autre usage a fait son apparition depuis peu, il s’agit de dire explicitement où je me situe, je réalise un « check-in ». Jiwire, un fournisseur de données de localisation par Wifi, nous apprend dans son rapport Q3 2011 que 35% des utilisateurs de mobiles aiment ou adorent les services leur proposant de notifier leur position géographique, 27% n’en comprennent pas l’intérêt. Un autre enseignement est la proportion plus jeune et masculine à adopter cet usage, les plus de 45 ans comprennent moins bien l’intérêt de partager sa position géographique166.

L’application qui a popularisé cette notion est Foursquare, un réseau social entièrement basé sur la géolocalisation créé par Dennis Crowley en 2009. Le service regroupe environ 15 millions d’utilisateurs et donne la possibilité de notifier à ses amis ses déplacements. On peut se demander quelles sont les raisons qui peuvent amener quelqu’un à partager sa position géographique sur internet? Si certains utilisateurs sont réticents à partager leur navigation sur internet, on peut imaginer leur réticence à partager leur déplacement physique ! En ce sens, Foursquare a été une sorte de laboratoire sur la capacité des utilisateurs à accepter cela et surtout pour comprendre à quelles conditions ils le feraient. L’application a axé sa proposition de valeur sur l’aspect ludique de l’expérience ainsi que sur l’aspect pratique de

162 Businessinsider.com, Here’s Highlight, the iphone app everyone in silicon valley is going nuts, 05/03/12 : http://read.bi/HtmSNi 163 Cnil.fr, l’iphone bavarde pendant votre sommeil, 11/10/11 : http://bit.ly/yW9Pd1 164 Cnil.fr, smartphone et vie privée : un ami qui vous veut du bien ? 13/12/11 : http://bit.ly/zIOvRi 165 Alain Levy, Sur les traces de Big Brother, Edition L’éditeur – Octobre 2010 166 Jiwire.com, Q32011 : http://bit.ly/xCbnVM

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l’information locale. Sur le premier point, la société a beaucoup travaillé son gameplay, comme il est d’usage d’appeler la mécanique d’un jeu dans l’industrie des jeux vidéo. Un système de points plus ou moins complexes vous rétribue à chaque check-in et vous pouvez ainsi entrer en compétition avec vos amis utilisant le service. Beaucoup de règles existent, nous en citerons deux, vous gagnez plus de points si vous réalisez un check-in au même endroit et au même moment qu’un de vos amis, vous êtes au restaurant ou à un concert ensemble. Deuxième règle, la distance géographique entre deux check-ins quand vous êtes en voyage par exemple, peut jouer sur les points que l’application va vous attribuer. Cette « compétition » amicale est couronnée d’attributions de badges, virtuels et sans vrai intérêt jusqu’ici, mais qui sont des signes supplémentaires d’encouragement et de distinctions pour encourager l’usage de l’application. En décrochant le badge de « Maire » d’un lieu, vous en devenez l’occupant virtuel le plus important et on se prend facilement au jeu de vouloir devenir Maire de nos endroits préférés (bar, lieu de travail, centre commercial, banque…). L’application Mayor Maker, développée par la société Location labs, propose même d’automatiser les check-ins (par geofencing) et propose même la possibilité de « check- out » d’un lieu.167

Le deuxième levier est lié l’exploration de lieux autour de soi, sur ce point Foursquare se base sur sa communauté et encourage ses utilisateurs à laisser des commentaires ou des « tips » sur les lieux où ils font leurs check-in, de l’UGC en somme (User Generated Content). Ainsi, Foursquare se transforme en guide touristique et permet à l’utilisateur de découvrir son quartier ou un lieu mais avec le filtre de son réseau d’amis et de connaissances. Vous ne le savez peut-être pas mais un de vos amis a mangé dans un restaurant dans votre quartier et vous le recommande vivement ! Afin de faciliter la localisation de ses lieux préférés, un bouton « save to foursquare » est apparu à disposition des sites éditeurs web168. Les partenariats avec Timeout et CBS ont été l’occasion de ce lancement qui devrait faciliter l’usage de l’application. Foursquare a également annoncé un partenariat avec la start-up Singleplateform qui lui permet d’intégrer jusqu’aux menus de 250 000 restaurants169. L’application propose également des offres de réductions aux utilisateurs se trouvant à proximité d’un point de vente. Ce ciblage permet d’obtenir des taux d’ouverture et de visites bien plus importants qu’une offre envoyée par email. Au regard du succès de cette application, Facebook a rapidement mis à disponibilité de ses utilisateurs une fonction leur permettant de se localiser, Facebook Places. Le nouveau réseau social de Google quant à lui l’a intégré dès sa sortie. Beaucoup de start-up ont rapidement vu le potentiel marketing de cet usage et ont lancés des projets autour de la localisation, le plus souvent dans l’univers de la restauration, du tourisme et des transports. Pour en nommer quelques-unes : Brightkite, Forkly, Shopkick, Forecast, Uber, Gowala rachetée par Facebook170, le service d’avis de restaurants Yelp, Zagat rachetée par Google, les Allemands de Qype, les Français de Plyce et de Dismoioù... La localisation alliée aux petites annonces entre particuliers a donné naissance à Zaarly par exemple. Une sorte d’eBay ou de Bon coin mais géolocalisé, vous pouvez ainsi acheter un objet d’occasion à votre voisin de palier ! Priceminister ne compte pas se laissez doubler par cette tendance et a sorti une nouvelle application « scannez-vendez » afin de permettre aux vendeurs de

167 Venturebeat.com, Mayor Maker lets you automatically check-in and out of locations, 29/09/10 : http://bit.ly/GNm4nw 168 Blog.foursquare.com, Recommendation from your favorite websites, straight to your phone, 30/11/11 : http://bit.ly/GOGs48 169 Blog.foursquare.com, Find what you’re craving, and check out the menu too !18/01/12 : http://bit.ly/yjl9nL 170 Lemonde.fr, Facebook achète le service de géolocalisation Gowalla, 06/12/11 : http://bit.ly/xpR1bl

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profiter du mobile. Il faut également mentionner une tout autre utilisation de la donnée géographique, la sécurité et la lutte contre la fraude. Visa Europe a mis en place dès 2010 un service permettant de vérifier la proximité entre un point de retrait d’argent et le mobile du propriétaire de la carte concernée. En cas de distance trop élevée, une validation par mobile peut être mise en place pour valider le retrait171.

Ces applications offrent de réels services aux utilisateurs de smartphones. C’est bien cela qui fait la différence entre tous les usages rendus possibles par la technique et ceux qui sont adoptés massivement par les utilisateurs, dans une mécanique darwiniste implacable. On voit bien que la donnée géographique est porteuse de grande valeur pour les développeurs d’applications et de services. Or, quelle technologie et quelles sociétés sont les mieux placées pour les aider à tirer profit de la localisation? C’est le combat que mènent les fournisseurs de base de données Wifi comme Skyhook, Navizon ou Jiwire. Ces solutions ont pour avantage de se passer du GPS pour calculer la position géographique. Google mène une guerre froide contre ces services afin de garder un pouvoir total sur le sujet172. Loc-Aid quant à elle et mieux positionné car a passé des accords avec tous les opérateurs mobile pour les proposer leurs données aux développeurs par API173. La société Geoloqi propose une solution permettant également à n’importe quelle application d’exploiter la localisation avec une solution optimisant la consommation de la batterie. Leur application de démonstration permet par exemple de se laisser une note à soi-même dans un lieu. Cette alerte sera alors poussée dès que vous retournerez sur le lieu, quel que soit le délai entre les deux événements.

Sur la localisation, les utilisateurs sont à la fois très enthousiastes et en même temps soucieux quant à leur vie privée. Les marques de leur côté ont bien compris que savoir où allaient leurs clients avait beaucoup de valeur. Ces données de localisation sont comme les cookies déposés sur les machines des utilisateurs. Les cookies permettent de connaître les derniers sites visités, de proposer des publicités mieux ciblées, de les reconnaître lors de leur 2ème visite sur un site internet ou de leur proposer des produits plus adaptés à leurs goûts. Si le ciblage comportemental sur internet porte la promesse d’une plus grande pertinence des messages publicitaires, la localisation porte une promesse encore plus forte. Mais la localisation introduit la notion de contexte dans lequel le consommateur se trouve, et ça change tout. Cela impose désormais aux marques une finesse de ciblage qui n’existait pas avant et dont elles n’avaient pas à se soucier. Si les projecteurs sont aujourd’hui tournés sur les pure players mobile éditant des applications dédiées à la localisation, inclure une fonction locale va rapidement devenir incontournable pour toutes les marques. D’autres usages mobiles sont plus simples d’accès et connaissent d’ores et déjà un large succès, comme par exemple le m-commerce.

171 Fastcompany.com, Visa to use your phone’s location tpo prevent credit card fraud, 30/11/10 : http://bit.ly/IVIsiM 172 Readwirtweb.com, Is Android really open? Skyhook’s battle with google challenges that claim, 06/05/11 : http://rww.to/xcbXp7 173 Readwriteweb.com, Loc Aid the biggest location service provider no one has heard of, 28/11/11 : http://rww.to/HG7huv

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1.3.5/ Le m-commerce

L’e-commerce a mis quinze ans pour avoir 5% du chiffre d’affaires du commerce. Mary Meeker pense que le mobile mettra de cinq à dix ans pour faire la même chose. Selon une étude AFMM/Médiamétrie, 3 millions de Français ont effectué un achat sur leur mobile et près de 71% des mobinautes sont prêts à le faire. comScore a mené une étude montrant que 38% des possesseurs de smartphone avaient déjà effectué un achat sur mobile. 56% des achats se sont effectués au sein du foyer, 37% dans les transports en commun et 36% en magasins. Le fait de pouvoir acheter n’importe où va amener le commerce digital à un niveau bien supérieur à ce que l’on a connu depuis une quinzaine d’années sur internet. Xerfi a estimé la taille du m-commerce à 500 millions d’euros en 2010 et évoque le chiffre de 13 milliards d’ici 2015174. Kelkoo en partenariat avec le Centre for Retail Research prévoit 2,2 milliards d’euros dépensés en France et 14,6 milliards en 2012175. Sur ce marché, Il faut distinguer plusieurs moyens de paiement sur le mobile : les solutions de paiement par carte bancaire, celles liées à un compte (itunes, Paypal, Google Wallet, Amazon…) et les paiements sur facture opérateurs (SMS+, Internet+ et Gallery en France). L’iPhone a créé un nouveau marché en lançant son concept d’applications store et a montré que les utilisateurs étaient prêts à payer pour un service ou de l’information sur mobile, via leur compte itunes. Apple a généré près de 5 milliards de dollars et a reversé 3,4 milliards à ses développeurs en 2011. Les chiffres d’affaire des plateformes mobile vont continuer à augmenter, notamment avec l’essor des achats de biens virtuels au sein des applications, notamment des jeux mobile. Le fait que les achats de contenus sur mobile aient décollé a fait naître de grands espoirs, notamment dans le secteur de la presse en ligne qui s’est lancé dans le développement d’applications mobile ou de tablettes. Pour autant, certains pensent que cela ne se généralisera pas à toute la population et que ce phénomène est fortement lié à la cible d’Apple, réputé CSP+. Par ailleurs, la part des applications payantes téléchargées tend à diminuer et le paiement a tendance à se généraliser au sein même de l’application. Le rapport 2011 d’iSuppli avance que 95% des applications téléchargées ont été des applications gratuites176. Ainsi, Le mobile prend la voie de l’internet et de ses pratiques, les utilisateurs s’orientent majoritairement vers les services gratuits et la monétisation reste difficile. On voit par ailleurs la difficulté des autres plateformes à générer des revenus, Android Market a réalisé 7% des revenus de l’App store d’Apple177. Google a mis en place une feuille de route claire pour améliorer ses revenus et amener ses utilisateurs à consommer plus sur le mobile178. Au-delà des applications payantes sur l’Android Market, le paiement in-app a été introduit en mars 2011, il permettra aux développeurs de proposer de l’achat de biens virtuels au sein même des applications. Google prend la même commission que sur son store à savoir 30%.

On constate que le moyen de paiement proposé impacte fortement le comportement des utilisateurs quant à l’achat sur mobile, tout comme la catégorie de produits étudiés. Contrairement à l’e-commerce dont

174 Xerfi.com : http://bit.ly/AncqOV 175 Kelkoo.fr, Etude Centre for Retail Research pour Kelkoo, 31/01/12 : http://bit.ly/JmvA4z 176 HIS iSuppli, In-App purchase to dominate smartphone app business, 2011 : http://bit.ly/yWcpXb 177 CNN.com, Piper Jaffray : Android app revenue is 7% of iPhone’s, 21/11/11 : http://bit.ly/xfuvZX 178 Forbes, 25/01/11, Unhappy with slow growth of Android app purchase, google talks 2011 roadmap : http://onforb.es/x6iboH

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96,7% du chiffre d’affaire est généré par carte bancaire179, le m-commerce est plus enclin à utiliser d’autres modes de paiements. En effet, le paiement par carte bancaire ne concerne qu’une très faible part des achats sur mobiles et ne semble pas adapté de par la taille de l’écran qui ne facilite pas la saisie de son numéro de carte bancaire. Le paiement sur facture opérateur mobile semble plus adapté car plus intégré au terminal et à son opérateur permettant ainsi un parcours d’achat plus fluide.

Modes de paiements opérateurs selon l’AFMM180 :

En France, le chiffre d’affaire réalisé sur factures opérateurs a été de 657 millions d’euros HT. Les paiements mobile ont représenté 83% soit 548 millions d’euros (SMS et l’internet+ mobile). Il faut cependant noter là que 357 millions d’euros sont réalisés en contexte de consommation TV (interactivité antenne, vote…) ou d’internet fixe. Egalement, ces modes de paiements ne sont pas autorisés pour de l’achat de produits physiques et les montants sont plafonnés à 4,5€ sur le SMS, 30€ sur l’internet + et 8€ sur l’internet + mobile. Ce dernier mode de paiement est largement utilisé par les éditeurs de contenus mobile, en off portail et hors des stores d’applications. Ces modes de paiements opérateurs sont très réglementés, l’AFMM a récemment modifié la charte SMS afin de renforcer la protection des consommateurs181. 58,2% des achats de contenus et de services mobile sur l’internet mobile s’est effectué sur facture opérateur mobile (hors store), 34,8% par carte bancaire et 17,8% par Paypal182. De plus en plus de plateformes, excepté Apple, introduisent le paiement sur facture opérateur, AT&T, T-mobile, Sprint et Vodafone en Europe le supportent déjà. Conscients de la difficulté pour un service d’intégrer les spécificités de chacun, 24 opérateurs se sont réunis au sein de la « Wholesale Applications Community », afin de proposer une API de paiement commune183. Beaucoup de solutions dédiées à l’achat de biens virtuels se développent et ont toutes pour vocation d’agréger tous les moyens de paiement existants. Il faut citer Boku, Absolu Payement, Zong (racheté par eBay 240 millions de dollars184), Cashlog, Mopay, M-coin, Fortumo, Buyster…

179 Etude Benchmark group – e-commerce 2011 180 AFMM : Bilan 2011 et perspectives 2012 des solutions de paiements sur facture opérateur, http://slidesha.re/FRRSDY 181 AFMM, Evolution des chartes SMS+ et MMS+, 01/03/12 : http://bit.ly/xCiGNP 182 AFMM Mobile Payment 2011 : http://slidesha.re/zkmmhJ 183 Wholesale Applications Community, http://bit.ly/zjAH81 184 Techcrunch.com, eBay buys Zong for $240 millions in cash, 07/07/11 : http://tcrn.ch/n67UPk

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Quels produits sont achetés avec le mobile ?185 :

On voit dans cette étude comScore le type d’achats réalisés par le mobile. L’achat le plus répandu est encore le bien digital (musique, applications…) mais les biens physiques connaissent une forte croissance. La FEVAD estime à 2% les ventes réalisées sur les smartphones et les tablettes sur un total de 37,7 milliards dépensés en ligne en 2011186. Ce chiffre pourrait rapidement augmenter, le cabinet Gartner pense qu’il atteindra 50% des ventes en lignes d’ici à trois ans187. L’audience mobile explosant, les e- commerçants sont parmi les premiers à lancer leurs sites ou applications mobile. En 2011, 43% des e- commerçants ont un dispositif mobile. En termes d’audience mobile, Amazon est de loin le site marchand le plus visité en France avec 2,6 millions de visiteurs uniques, le Top 5 ayant attiré 8,3 millions de personnes188. eBay a 10% de ses transactions via le mobile et 5 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2011 et projette de faire 8 milliards en 2012189. L’application de Domino’s Pizza, qui détecte automatiquement votre position géographique, représente 13% des ventes au UK190. Fandango, un e- commerçant de places de cinéma, réalise désormais 40% de son trafic et 20% de ses ventes, sur le mobile. Le mobile faisant également office de tickets à l’entrée du cinéma191. En France, Voyages- sncf.com évoque le chiffre de 30 millions d’euros, Vente privée parle de 100 millions d’euros192.

185 comScore.com, Mobile Shopping goes Mainstream, 05/11/12 : http://bit.ly/wZkSGK 186 Fevad.com, 37,7 milliards d’euros dépensés en ligne, 30/01/12 : http://bit.ly/y6AuTf 187 Gartner.com, 50% des ventes digitales via le social et le mobile, 19/10/11 : http://bit.ly/ws24u2 188 Médiamétrie, 4ème triemestre 2011 : http://bit.ly/zhS188 189 Ebay ink blog, John Donaho : « eBay mobile GMV will surpass $8 billion in 2012, 11/01/12 : http://bit.ly/ySEh78 190 Econsultancy, Domino’s pizza réalise 13% de ses ventes sur smartphone et tablettes, 09/02/12 : http://bit.ly/zWBpxx 191 Mashable, Please turn on your cellphone, Fandango embraces mobile movie tickets, 17/11/11 : http://on.mash.to/yc3F4w 192 Frenchweb, vente privée prévoit un CA de plus de 100M d’euros en 2011, 27/09/11 : http://bit.ly/y1YuLq

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Mobile commerce segmentation :

Ces usages sont récents, nés avec le mobile et continuent d’évoluer. Les utilisateurs inventent de nouveaux usages tous les jours et ce faisant, ont de plus en plus d’attentes de la part des marques qu’ils aiment et qu’ils recherchent. La question qui se pose aux professionnels du marketing et à toute marque, n’est donc plus « dois-je avoir une stratégie mobile ?» mais plutôt « quelle stratégie adopter ?» ou alors « comment puis-je améliorer ma présence et mon marketing mobile » ?

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2/ Le marketing mobile

Nous avons vu dans la première partie le marché, les acteurs et les usages, je vous propose ici d’étudier les outils du marketing mobile. Comment et pourquoi lancer une application ? Quels sont les avantages du HTML5 ? Quelles sont les régies mobiles du marché ? Comment intégrer le mobile dans sa stratégie ?

2.1/ Développer la présence de votre marque sur le mobile

2.1.1/ Comment être présent ?

Compte tenu de la masse critique de smartphones en circulation et des usages qui explosent, les annonceurs ne peuvent plus faire l’impasse d’une présence mobile. On compare parfois l’arrivée de l’internet mobile à ce qui s’est passé sur internet dans les années 2000. Il fallait alors évangéliser les annonceurs et leur expliquer pourquoi il leur fallait un site internet alors que le parc installé était faible et le réseau en construction. L’adoption du mobile par les annonceurs devrait être plus rapide, car l’infrastructure réseau est là et les utilisateurs sont déjà équipés. Or, on constate que les annonceurs sont pris de vitesse car beaucoup n’ont ni stratégie mobile, ni présence sur le mobile. Cela s’explique par le fait que le mobile est bien plus qu’un ordinateur de poche : il apporte des dimensions nouvelles qui le placent au centre de la relation client. Par ailleurs, la multiplicité des plateformes impose des choix technologiques. Les questions qui se posent bien souvent sont : faut-il lancer une application, plusieurs applications, une webapp, refondre le site internet pour l’optimiser? Le premier réflexe d’une marque sera de vouloir lancer une application pour iPhone. Beaucoup de marques ont une, voire plusieurs applications et ce sur une ou plusieurs plateformes. Or, les langages de programmation étant différents, cela multiplie d’autant les coûts (voir annexe 5). Selon Distimo, 91% du TOP 100 des marques mondiales sont présente dans au moins un store. Certaines sont même hyperactives, Disney a par exemple 636 applications, Sony 285, BMW 63…193 Les grands annonceurs ont lancé des applications pour de vraies raisons marketing ou parfois pour des raisons de communication corporate, financière, voire de politique interne, de présence sur ce nouveau média. Une étude réalisée en juin 2011 indique que seulement 12% des entreprises françaises interrogées ont déployés un site mobile et 18% une application194. Pour les annonceurs qui n’ont pas encore de présence mobile le choix entre application native ou webapp est une question importante, en termes de stratégie et de budget. Et pour ceux qui ont déjà une application, l’augmentation du trafic par le navigateur pose la question du site mobile. Au Mobile World Congress 2012, Michael Roth, CEO d’Interpublic évoquait que seulement 40% de ses clients avaient un site mobile optimisé et que seulement 14% d’entre- deux permettait de passer une commande. L’arrivée du HTML5 dans le débat n’a fait que rendre la question encore plus épineuse. Il s’agit d’une nouvelle version du langage historique du web créée dans les années 90. Officiellement en version beta, le W3C prévoit une finalisation du langage d’ici 2020, mais peut être utilisé dès à présent. Le cabinet ABI research prévoit que d’ici 2016, 2,1 milliards de terminaux

193 Techcrunch, Majority of top Brands now have a mobile apps, 27/10/11 : http://tcrn.ch/wwEO8O 194 Thinkmobile with Google, Ipsos MediaCT et TNS infratest – 4000 personnes interrogées en mars 2011 : http://slidesha.re/zCqPfc

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mobile auront un navigateur compatible HTML5195. Cette évolution du langage d’internet est-elle suffisante pour se passer des applications natives ? C’est la question que tout le monde se pose et elle mérite d’être posée.

Une webapp est une application mobile accessible depuis n’importe quel terminal, via le navigateur internet et qui présente une navigation tactile. Elle peut être facilement mise en raccourci sur le bureau du smartphone. Or, il existe de vraies différences entre les deux technologies, tant au niveau ergonomique que marketing, mais aussi sur les possibilités de diffusion.

Applications natives ou webapp :

On voit clairement ici les points sur lesquels les deux solutions diffèrent. Les applications ont les avantages de leurs défauts : être liées au terminal et à la plateforme. Cela a pour conséquence, la multiplication des développements, une distribution soumise à l’accord des plateformes, d’être tout le temps accessible et d’offrir une expérience utilisateur plus riche. L’application est un logiciel et a donc des capacités de calcul bien supérieures, ce que les éditeurs de jeux ont bien compris. Si votre choix porte sur l’applicatif, il faut faire attention au poids de votre application. Au-delà de 20Mo, les utilisateurs ne pourront la télécharger qu’en étant en Wifi, ce qui limite grandement les possibilités de diffusion. Le poids idéal étant d’environ 5Mo. Quant aux webapp, elles se basent sur le langage d’internet, c’est-à-dire ouvert et pérenne, et sont dépendantes du réseau et de la capacité des navigateurs. Sur ces points, je renvoie les lecteurs à l’article de Jake Hird, consultant au sein du cabinet econsultancy, publié en juillet 2011196.

195 ABI research, 2.1 billion HTML5 browsers on mobile devices by 2016, 22/07/11 : http://bit.ly/wJmdNy 196 Econsultancy, The fight gets technical : mobile apps vs mobile sites, Jake Hird, 28/07/11 : http://bit.ly/AwEet1

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La réponse habituelle des agences sur cette question importante est souvent qu’il est préférable de partir de la problématique de l’annonceur. En effet, selon le type de secteur, de contenus et d’utilisation du service mobile envisagés, la réponse technologique peut s’imposer d’elle-même. Accès par applications et navigateur selon la tâche effectuée :

Yahoo et Ipsos ont réalisé une étude présentant la préférence des utilisateurs entre application et navigateur selon l’usage. Bien que certains prédisent la mort d’internet, les mobinautes utilisent bien les deux accès, mais pour des usages différents. Néanmoins, le choix entre application ou webapp tend à devenir de moins en moins binaire ; des ponts entre les deux technologies deviennent possibles. On parle désormais d’application hybride. Une page internet mobile peut être ouverte au sein d’une application (Web view). C’est une technique souvent utilisée par les éditeurs de presse. Il est par ailleurs possible de mettre une webapp au sein d’une application native, ce qui permet d’être tout de même présent dans les stores d’applications. A l’inverse, il est possible d’encapsuler une application dans une webapp en HTML5, et ainsi avoir accès à la caméra et aux notifications par exemple. Il existe des frameworks, également appelés convertisseurs, qui permettent de convertir un code web classique en application native. Cela permet de mutualiser les coûts de développement avec un seul code pour plusieurs plateformes. Il existe beaucoup de ces frameworks sur le marché et en choisir un peut rapidement devenir un casse-tête (voir annexe 6). Nous en citerons quelques-uns qui nous sont apparus comme pertinents. Tout d’abord, l’agence Backelite propose une solution appelée BkRender qui propose une structure robuste sur laquelle développer votre projet, que cela soit un site mobile, une web-app ou une application hybride. La solution utilise les langages évolués tels que le HTML5, le Javascript, le CSS3 et l’Ajax. Les clients prestigieux de l’agence tels que voyages-sncf.com, la Fnac ou le Crédit Agricole, ont bénéficié de ce framework. Il faut également citer PhoneGap, rachetée récemment par Adobe, qui supporte une dizaine de plateformes mobiles et Worklight rachetée par IBM. Appcellerator, une autre plateforme ayant reçu des distinctions de Gartner et du GSMA197, a permis quant à elle le développement de 35 000 applications qui ont été téléchargées plus de 40 millions de fois et est utilisée par environ 1,5 million de développeurs198. D’autres frameworks de très bonne qualité existent sur le marché comme Sencha, Mobileroadie ou jQuery. Il faut

197 Appcelerator.com, Award : http://bit.ly/w5Qj4T 198 fr.techcrunch.com, Créez votre application mobile native avec des technologie web, 08/04/11 : http://bit.ly/wZ1BKQ

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également mentionner le projet français Joshfire199, dirigé par Michel-Levy-Provencal, cofondateur de Rue89, qui rassemble autour de lui de beaux noms du web français comme Xavier Niel, Jacques-Antoine Granjon ou Stéphane Distinguin.

Après toutes ces considérations techniques, revenons aux fondamentaux. L’abondance d’applications dans les stores s’explique notamment par le fait que beaucoup de marques lancent leur application par principe, sans lien avec leur stratégie marketing. La première chose à faire est donc de définir un objectif clair et précis à sa présence mobile. On peut même aller au-delà : le dispositif mobile doit s’inscrire dans une stratégie de contacts multicanale. Le mobile est à la fois un média et un canal de vente, tout comme l’est l’internet fixe. Mais le mobile est plus que cela encore, c’est un objet personnel qui ne quitte jamais son propriétaire. Sur internet, on parle de visiteurs uniques par abus de langage. Il ne s’agit en fait que de cookies ou des adresses IP d’ordinateurs, derrière lesquels il peut y avoir plusieurs personnes. Le marketing a pour objectif de parler à chaque client et chaque client à un mobile. C’est pour cette raison que certains vont jusqu’à dire que le mobile doit être au centre de la relation client et du marketing de la marque. Il est évident que la plupart des annonceurs n’en sont pas encore à ce stade. Melissa Parrish du cabinet Forrester a mis en lumière les étapes à franchir pour intégrer le mobile dans sa stratégie marketing.

Etapes de l’intégration du mobile dans le marketing globale200 :

Quelle valeur ajoutée le mobile peut-il apporter à mes clients ? Qu’est-ce que veut dire la mobilité pour mon client ? Comment le mobile peut augmenter l’impact de mes investissements existants ? Comment le mobile peut me permettre de toucher de nouveaux clients ? On s’aperçoit ainsi qu’un projet mobile peut être l’occasion de repenser en profondeur la relation client. De la stratégie mobile choisie découlera des réponses à ces questions et sera différente selon les produits et les secteurs. Paul Berney, le CMO de la MMA (Mobile Marketing Association) rappelle que la mission des équipes marketing restent la même : acquérir des clients, les fidéliser et construire la marque201.

199 http://framework.joshfire.com/ 200 Forrester.com, Mobile for marketing : is it a channel or a device ? Melissa Parrish, 04/03/11 : http://bit.ly/wVTjNt 201 Webit Congress, Octobre 2011, Istanbul, Turkey, intervention de Paul Berney : http://bit.ly/yX7sQg

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2.1.2/ Ergonomie mobile

Le Professeur Jayawardhena, expert du marketing mobile et la société CA Technologie, ont estimé le temps passé par les utilisateurs sur leurs smartphones et tablettes à 38 jours par an202. Au regard de l’enjeu, toutes les entreprises se doivent de prendre au sérieux l’expérience utilisateur qu’ils leur proposent. Les trois éléments à prendre en compte dans la conception de son site ou application mobile sont : la taille de l’écran, la rapidité d’affichage et l’interaction tactile. Premièrement, comment s’assurer que votre site internet est bien optimisé pour le mobile ? Plusieurs outils sont disponibles pour tester votre site, notamment des émulateurs. Google, qui a toutes les raisons à éduquer le marché, propose un outil sur son site www.howtogomo.com. Il permet à chaque directeur marketing de se rendre compte de ce que voient les internautes qui accèdent à leur site par le mobile203. Il est également possible d’utiliser des émulateurs tels que l’addon User Agent Switcher pour Firefox204 ou bien dotmobi205. Le cabinet L2 a récemment proposé un TOP 100 des marques basé sur la qualité de leur présence mobile, principalement des applications. Brian Klais, fondateur du cabinet de consulting Pure Oxygen Labs, va plus loin et a réalisé un test en conditions réelles, c’est-à-dire en scannant toutes les pages des plus gros sites internet. En effet, une chose que nous avons apprise avec internet depuis plus de dix ans, c’est que les utilisateurs rentrent rarement par la porte d’entrée et que chaque page peut être un point d’entrée. Il a trouvé que 81% des pages des cents plus importants sites marchands américains ne proposaient pas de pages pertinentes et adaptées aux smartphones206. L’outil développé pour réaliser ce test est librement disponible sur internet207.

Taille de l’écran : Votre site internet reçoit de plus en plus de trafic venant de terminaux mobile. Il doit s’afficher désormais sur des écrans allant de 240 à 1920 pixels. Vous devez alors prévoir une version mobile de votre site. Pour cela, deux alternatives s’offrent à vous : développer une version mobile avec un sous domaine du type m.monsite.com ou bien refondre totalement votre site internet dans une logique multi-écrans. Cette notion est appelée le « responsive web design » et est une réponse à la multiplication des écrans. C’est le designer américain Ethan Marcotte qui a popularisé cette approche en mai 2010208 et le Boston Globe a rapidement adopté cela sur son site. Le HTML5 permet ce type d’approche désormais, notamment grâce à la technique CSS des media queries qui permet d’appliquer une feuille de style en fonction de la hauteur ou la largeur de l’écran, son orientation, et sa résolution. Dans cette démarche, vous partez d’une version desktop pour l’adapter à une version mobile.

202 Francemobiles.com, Les mobinautes se connectent 38 jours par an sur Internet, 08/12/11 : http://bit.ly/ysosky 203 Google mobile ads, gomo, helping business create mobile friendly website, 01/11/11 : http://bit.ly/AoMaUZ 204 Mozilla.org, add-ons Firefox, User Agent Switcher : http://bit.ly/xEJRS4 205 Emulateur dotMobi : http://bit.ly/xF8q9q 206 Serachengineland : Why mobile is spinning our new invisible web, 24/11/11 : http://selnd.com/zHnNRY 207 www.pureoxygenmobile.com : http://bit.ly/AsbmoW 208 www.alistapart.com, Responsive web design, 25/05/10 : http://bit.ly/wPIyu4

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Le responsive web design :

Frederic Cavazza, un consultant et blogueur célèbre, s’est récemment fait l’écho d’une autre approche, celle d’Amazon en Inde. La majorité des connexions se faisant par le mobile, au lieu de rendre leur site web optimisé pour le mobile, ils ont fait l’inverse. C’est la tendance du « Mobile First », notion créée par Luke Wroblewski209. Amazon a développé un site mobile et l’a adapté au web, il s’appelle Junglee. eBay et Amazon prépareraient de nouvelles versions de leur site et semblent vouloir l’adapter à la mobilité notamment aux tablettes. Frederic Cavazza explique que le couple Responsive Design + Mobile First est la technique de conception la plus efficace et pragmatique pour lancer un site web et mobile210. Il faut ajouter que ces approches sont récentes, que peu de sites les ont réellement mises en œuvre et qu’elles imposent de refondre complètement son site, ce qui peut se révéler lourd et coûteux. Quelle que soit l’approche choisie, il convient de vérifier l’affichage de votre service mobile sur le plus grand nombre de terminaux. Une société s’est spécialisée sur la validation technique de l’expérience utilisateur, il s’agit de la start-up marseillaise Stardust. Au-delà de ces questions techniques, le meilleur conseil est de tendre vers une application simple, voire minimaliste et de hiérarchiser l’information.

Vitesse : Le temps d’affichage des pages mobiles a longtemps été un problème compte tenu du réseau mobile. Dans les années 2 000 sur le WAP, il fallait 2 minutes pour consulter la météo211. Or l’internet fixe a habitué les utilisateurs à une rapidité d’affichage de plus en plus importante. Google a par ailleurs accéléré ce mouvement en intégrant cette notion dans ses paramètres de référencement naturel. Cette rapidité n’est pas encore la règle sur le mobile. Or on constate que 40% des utilisateurs abandonnent purement et simplement un site mobile qui met plus de 5 secondes à s’afficher.

Interface tactile :

209 www.lukew.com, Mobile First, Octobre 2011 : http://bit.ly/yxONWM 210 Simpleweb.fr, L’approche Mobile First adoptée par Amazon en Inde, 10/02/12 : http://bit.ly/zkCBYC 211 www.useit.com, WAP mobile phones field study findings, 10/12/00 : http://bit.ly/zbdJvt

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Miratech est une société française spécialisée dans les questions d’ergonomie. Elle constate que le « tap », le fait de cliquer sur un écran tactile pour déclencher une action, provoque quatre fois plus d’erreurs que la traditionnelle souris. La société est intervenu lors du salon e-marketing et a rappelé les fondamentaux de la conception centrée utilisateur et de l’affordance, le fait que chaque élément doit comprendre son mode d’emploi. Luke Wroblewski a publié en 2010, un catalogue des gestes tactiles en usage sur les interfaces riches212 (voir annexe 7). Il semble d’ailleurs que les prochaines tablettes introduisent de nouveaux gestes de commandes.

Google a rappelé les dix bonnes pratiques que tout site mobile devrait avoir, selon eux, dont la simplicité de navigation, la visibilité et l’accessibilité213. Vous pouvez également vous procurer la 2ème édition du guide « Usability of Mobile Website & Applications » pour des recommandations et des études de cas214 par le célèbre ergonome Jakob Nielsen. Le designer spécialisé en expérience utilisateur sur mobile Josh Clark a quant à lui publié le livre « Tapworthy : designing great iPhone apps » et propose des workshops régulièrement en Europe et aux Etats-Unis215.

2.1.3/ Quelle distribution?

Etant donné les deux catégories de présence mobile possibles (site internet mobile/webapp ou application) nous distinguerons le référencement sur l’internet mobile et le référencement dans les stores d’applications.

Référencement d’un site mobile ou d’une webapp : Pour une webapp, les grands principes du référencement naturel sur internet fonctionnent : la densité des mots clés par page, le poids des pages, la rapidité d’affichage, les liens entrants de références, une actualisation régulière des contenus… La démarche pour l’indexation de son site est la même, il suffit de soumettre un sitmap mobile à Google via le Google Webmaster Tools. Votre site optimisé pour mobile ne sera pas considéré comme du duplicate content. Google a par ailleurs annoncé en décembre 2011 que son robot d’indexation mobile faisait désormais la différence entre feature phones et smartphones. L’objectif est d’améliorer les résultats de recherche effectué sur mobile216, en mettant en avant du contenu optimisé. C’est un signal fort envoyé aux développeurs de site mobile. Par ailleurs, il est recommandé de lier la version mobile à son site internet habituel et d’utiliser des CSS spécifiques afin de redimensionner les images217. Plusieurs outils peuvent être utilisés pour valider votre code, nous citerons celui du W3C218. Bien que moins connus que ceux des applications, il existe également des stores dédiés aux webapps219.

212 www.lukew.com, Touch gesture reference guide, 20/04/10 : http://bit.ly/yyktaf 213 Howtogomo.com, 10 mobiles site best practices, http://bit.ly/yjsR1h 214 www.nngroup.com, http://bit.ly/yyyMxH 215 Globalmoxie.com, Workshop for learning mobile design, http://bit.ly/xAKZ5X 216 Blog Google webmaster tools, Introducing smartphone googlebot mobile, 15/12/11 : http://bit.ly/x5FW1y 217 SEO Campus 2011 218 http://validator.w3.org/mobile/ 219 http://www.apple.com/webapps/ et http://www.microsoft.com/web/gallery/

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Référencement et distribution d’une application : Si vous avez décidé de lancer votre application sur plusieurs stores afin de toucher une audience large, suivre les positions dans chaque store peut rapidement devenir fastidieux. Ce problème est justement ce que la société Distimo a souhaité résoudre. La solution cross-platform de suivi des téléchargements et des revenus publicitaires est proposée gratuitement à tous les développeurs. Elle permet de suivre ces statistiques sur les huit stores majeurs du marché (Apple, Amazon, Blackberry, Android, Nokia, Samsung, Microsoft et Getjar). Nous allons nous intéresser maintenant à un store en particulier et étudier les bonnes pratiques pour optimiser son référencement. Il y a plus de 500 000 applications sur l’Apple store, réussir à émerger dans ce gigantesque magasin peut paraître difficile. Il existe bien des têtes de gondoles comme le Top 25 ou les Tops par catégorie mais il y a très peu d’élus et, comme sur internet, votre application est en compétition avec des acteurs mondiaux très puissants. La première chose à penser avant même de distribuer votre application est la conception de son logo. Ces fameux icônes ont fourni les premières sensations à tout possesseur d’iPhone et c’est l’icône qui déclenche le coup de foudre. On peut tout à fait comparer cela à l’affiche de cinéma d’un film ou la pochette d’un disque. L’identité visuelle doit contenir tous les ingrédients et donner envie d’aller plus loin avec l’artiste, les acteurs ou l’application. Comme le résume le site applicationiphone.com, c’est l’icône qui fait l’application, pas l’inverse220. Certains ont d’ailleurs évoqué le retour de la marque. En effet, internet a amené les annonceurs sur le terrain de la performance grâce à sa mesurabilité, sous-estimant parfois l’importance de la marque dans la relation avec les consommateurs. L’Apple Store a montré que les applications avec des marques fortes étaient clairement privilégiées par les utilisateurs. Qu’en est-il du référencement naturel de l’Apple store ? Apple a clairement une marge de progression dans la découverte des applications afin d‘assurer une meilleure distribution. Un utilisateur a quatre manières de découvrir une application, la sélection éditoriale d’Apple, la recherche par catégories, le Top 25 (qui a été élargi à 300 en 2011) et la recherche par mots clés. Les règles pour remonter dans le Top ou dans les résultats de recherche sont encore aujourd’hui très opaques et changent régulièrement. Il faut tout d’abord choisir avec soin sa catégorie parmi les 21 existantes, cela doit être en cohérence avec ses fonctionnalités mais aussi avec la perception qu’ont vos clients de votre marque. L’application doit également être judicieusement taguée, c’est-à-dire associée à une série de mots clés. Nous ne nous étendrons pas dans cette étude sur la question du prix des applications. Par contre, une baisse de prix est un levier pour augmenter son nombre de téléchargement. fabeNovel a illustré avec l’application de la RATP l’impact d’une baisse de prix. Une baisse de 50% a eu pour impact un triplement des ventes221. Distimo a également réalisé une étude montrant qu’une période de soldes permettait d’augmenter les revenus de 22% dans l’Apple store. L’étude a également calculé le nombre de rangs gagnés dans le classement quand une application est mise en avant par Apple (featured app). Pour l’iPhone, c’est 15 places de gagnées, pour l’iPad c’est 27 et pour Android c’est un bon de 42 places222! Un autre levier intéressant est le cross-marketing entre plusieurs de vos applications ou avec des applications partenaires. Le nombre de téléchargements est bien sûr un facteur important, le positionnement est basé sur les résultats des quatre derniers jours, majoré par ordre décroissant. Pour être en première place il faut 40 000 téléchargements par jours. Pour le Top 10, votre application doit être téléchargée 10 000 fois par

220 www.applicationiphone.com, 27/12/2011 : http://bit.ly/AhWn5N 221 Etude Fabernovel RATP, Janvier 2010 : http://slidesha.re/zLR2Zi 222 Distimo, The impact of app discounts and featured, 26/01/12 : http://bit.ly/IXKjOt

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jour, ce chiffre descend à 1 500 fois si elle est payante. Ce chiffre est bien sûr différent selon les pays, il faut être téléchargé 80 000 fois par jour aux Etats-Unis pour garder sa position223.

Comment les utilisateurs trouvent-ils leurs applications ?

63% des utilisateurs découvrent leurs applications en naviguant dans les stores d’applications. Or les premières places dans les tops sont chères et sans une présence en tête de gondole le nombre de téléchargements est souvent insatisfaisant. C’est ainsi que des solutions alternatives sont apparues afin d’aider les utilisateurs à découvrir de nouvelles applications et les développeurs à les distribuer. Il s’agit de promotion sur le prix d’applications payantes, voire de les rendre complètement gratuites pendant 24h00 sur des magasins d’applications (Appsgratuite ou Appsfire qui a 4 millions d’utilisateurs). Leur offre publicitaire auprès des éditeurs d’applications garantie un volume de téléchargement important en très peu de temps, en la rendant gratuite ou par une promotion flash. Il est également possible de rémunérer des utilisateurs pour qu’ils téléchargent l’application afin de la tester (Surikate). Apple interdit la rémunération du téléchargement ou de l’avis, mais pas le test qui passe obligatoirement par le fait de télécharger l’application… D’après les personnes que j’ai pu interroger sur le sujet, ces méthodes sont extrêmement efficaces et rentables. Pour autant, elles sont très dépendantes d’Apple qui peut du jour au lendemain modifier son store et les rendre inopérantes. Le levier étant si efficace, la régie SFR a lancé une offre similaire appelée Appliscope, un service disponible sur internet et sur le mobile. L’application est préchargée sur les téléphones de l’opérateur et apporte un service de recommandation d’applications gratuites et payantes aux utilisateurs. La régie propose d’envoyer de 200 à 300 000 push notifications pour

223 Distimo, Volume needed to hit the top charts, 12/11/11 : http://bit.ly/xpJOke

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6 000 euros, permettant ainsi de garantir un nombre de téléchargement et ainsi une remontée dans Google Play224. Ces services ont été rappelés à l’ordre début 2012 et en cas d’abus, Apple a clairement indiqué qu’elles perdraient tout simplement leur compte d’éditeur d’applications. Il existe d’autres moyens de distribuer son application bien sûr. Google a fait évoluer son offre Adwords sur le mobile, il est possible de renvoyer vers des annonces textes des résultats de recherche du moteur Google mais aussi des moteurs au sein d’applications tierces (custom search ads), vers les stores d’applications afin de générer des téléchargements. Il est également possible de lancer un plan média display sur le mobile mais ce levier semble aujourd’hui le moins performant en terme de ROI. Enfin, les relations presses digitales afin d’obtenir une couverture médiatique de la sortie de l’application sont fortement recommandées. Il existe plusieurs centaines de sites ou blog consacrés aux applications225.

Pour résumer, des solutions existent afin d’améliorer sa position dans l’Apple store et ainsi de distribuer son application. Apple prévoit une refonte de son store mais a également fait l’acquisition Chomp. La jeune start-up a développé un moteur de recherche social d’applications (iOS et Android), elle répertorie ainsi les applications selon l’avis de sa communauté226. Jean-Louis Gassé, consultant au sein de la société d’investissement Allegis Capital, pense qu’Apple est victime de son succès et devrait proposer un meilleur service de guide dans son store. Dans une de ses célèbres Monday Note, il prend l’exemple de la société de pneus Michelin qui est partie du constat que si leurs clients voyageaient plus, ils consommeraient plus de pneus. Le guide Michelin était né, un bel exemple de brand content utile et vertueux227. Au-delà des stores officiels et des applications proposant la découverte d’autres apps (Appfire, Appsgratuite, Appsteur par la société Surikate, Zwapp), il existe des stores d’applications indépendants comme Getjar (3 millions de téléchargements par jour228), Handango, Mobango, Openappmkt, Quixey...(voir annexe 8). Parmi ces projets dédiés à la découverte d’applications, Mobilewalla a un positionnement particulier. La société ne vend pas d’applications mais propose une classification selon 114 variables afin d’apporter une meilleure notation aux applications. L’ambition de son fondateur, Anindya Datta est d’ajouter une dimension sémantique à la recherche d’applications, afin d’aller au-delà du nombre de téléchargements et du nombre d’avis229. Il faut également mentionner le projet Appstores qui a pour ambition de devenir le Adsense des applications mobile. Le service propose aux développeurs de sites mobile un module HTML5 qui a la capacité de proposer des applications en affinité avec le contenu de la page230.

Les applications remontent en résultats de recherche Google sur les ordinateurs fixes, et redirigent vers les versions PC des stores d’applications, Android, Windows ou Apple. L’internaute peut alors installer son application, gratuite ou payante, sur son téléphone depuis son PC. Au même titre que les pages d’un site web doivent être optimisées pour le référencement naturel, les applications doivent donc également l’être.

224 E-marketing.fr, SFR Régie s’attaque au marché des mobiles sous Android, 17/04/12 : http://bit.ly/JkHP1F 225 Maniacdev.com, 116 sites to promote iPhone and iPad Apps : http://bit.ly/xdcx96 226 Techcrunch, App store search and discovery to be complelty revamped, 23/02/12 : http://tcrn.ch/xH1rgb 227 Mondaynote, Why Apple should foloow Michelin, 22/01/12 : http://bit.ly/xK6N4T 228 Mobithinking, Interview de Patrick Mork, CMO Getjar, http://bit.ly/wHWVFA 229 Lefigaro, EBG : le mobile bouscule la recherché et la découverte de contenus, 22/11/11 : http://bit.ly/wmNQeW 230 BusinessInsider, A network as big as adsense, but for apps, 19/01/12 : http://read.bi/zJ1gAg

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Exemple de résultat naturel sur un moteur de recherche internet :

Enfin, les géants du web comme Yahoo et Microsoft intègrent désormais les applications dans leurs écosystèmes. Yahoo a lancé un moteur d’applications231 sur son Portail, redirigeant vers les stores web et Microsoft va intégrer un store d’applications dans sa prochaine version de Windows. Nous venons de voir les différentes possibilités de distribution des applications mobiles, dont le search mobile fait partie depuis que Google permet de rediriger une annonce Adwords mobile vers l’Apple Store. Le search est centrale dans la navigation de l’internet fixe mais qu’en est-il sur le mobile ?

2.1.4/ Le search sur mobile

La recherche sur l’internet fixe a fait la fortune colossale de Google, il est évident que le mobile représente un axe stratégique majeure pour la firme. Google s’est positionnée sur les applications avec son Android market mais ce n’est qu’une partie de sa stratégie mobile. Pourtant, la recherche reste son cœur de métier et Google met tout en place pour développer l’usage des utilisateurs, le nombre de sites mobile et enfin les budgets dépensés sur le mobile. L’unification de l’expérience utilisateur est en cours avec la fusion des recherches entre fixes et mobiles grâce à l’historique des recherches232. Les recherches sur mobile auraient connu une progression de 400% depuis 2010. Google espère que les recherches sur mobile dépassent celles effectuées sur l’internet fixe d’ici 2013. La logique du search marketing qui était de pousser une offre en fonction de ce que recherchent les consommateurs est agrémentée d’une information d’importance, la localisation de la recherche. Le mariage de la requête et de la position géographique où elle est effectuée ouvre un champ de possibilités encore jamais vu jusqu’ici. Les revenus associés au search mobile ont été de 2,5 milliards de dollars en 2011 et Google prévoit de les doubler en 2012233. Selon l’étude Ipsos OTC Media CT réalisée en janvier 2012 en partenariat avec Google, 95% des possesseurs de smartphones effectuent des recherches sur leur mobile en France234. 21% de ces recherches ont déclenché un achat en magasin physique.

231 http://uk.apps.search.yahoo.com/ 232 Insidesearch.blogspot.com, Introducing a new local search experience across your device, 05/03/12 : http://bit.ly/wY3HVy 233 Techcrunch, Google mobile serach ad requests more than doubled in 2011, 01/02/12 : http://tcrn.ch/yxNlET 234 Our mobile planet : global smartphones users, Google & Ipsos OTX MediaCT, February 2012 : http://bit.ly/xgReam

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Recherche mobile sur les enseignes de distribution américaines :

Source : Google webinar « Going mobile, from why to how » - September 2011

89% des recherches seraient effectués dans des situations « d’urgences » où l’utilisateur attend une réponse rapide et précise235. 90% des personnes ayant effectué une recherche auraient réalisé une action par la suite. Au-delà de l’usage général, on voit sur le graphique ci-dessus que les recherches concernant le commerce et la distribution sont en forte augmentation. Par ailleurs, 30% des recherches seraient locales et donneraient suite à un appel ou à une visite. L’usage est là mais les investissements tardent. Côté annonceurs, le search représente 42% des investissements web et seulement 4% du mobile236. Or les possibilités sont bien plus nombreuses que sur l’internet fixe. Une annonce textuelle peut bien sûr renvoyer vers votre site mobile ou vers votre application au sein d’un store. Elle peut également déclencher un appel (clic to call), créer un évènement dans l’agenda du téléphone, renvoyer vers un point sur Google maps. Le service Google adresse permet aux points de ventes physiques de se référencer sur Google et un lien peut être ajouté à une annonce Adwords (extension d’annonce). La société a également lancé Adwords express, un service qui a pour vocation d’accompagner cette typologie d’annonceurs dans le lancement de campagnes de créations de trafic via Adwords. Par ailleurs, Google réalise également des tests sur un coupon (offer ads) qui serait proposé dans les résultats de recherche, avec un code de promotion valable dans un magasin dont l’adresse et l’itinéraire seraient disponibles avec un clic supplémentaire. En comparaison avec l’internet fixe, la petite taille de l’écran réduit le nombre de positions pour les annonces. Par conséquent, la bataille pour les trois premières places semble encore plus dure sur le mobile.

235 The Mobile Movement Study, Google/Ipsos, OTX MediacT, April 2011 : http://bit.ly/y450uD 236 SRI-UDECAM – Capgemini consulting / Observatoire de l’ePub – 7ème edition –Janvier 2012

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Répartition des clics sponsorisés selon la position de l’annonce :

Jonathan Beeston, Global Marketing Director d’Efficient Frontier, explique que la place à avoir parmi les résultats de recherche, sur la position est encore plus importante sur le mobile. 99% des clics payants se feraient sur les 2èmes positions d’annonces, ce qui semble cohérent avec la taille de l’écran. Les extensions d’annonces sont également importantes sur le mobile. L’agence Performics a démontré leur efficacité avec le cas du constructeurs Toyota.

La campagne référençait les adresses de 267 concessionnaires. Les extensions d’annonces présentaient le numéro de téléphone du magasin le plus proche. Elles ont eu le meilleur taux de clics (9,76% versus 6,24%), n’ont représentés que 5% des clics mais ont généré près de 900 appels.

Part du search mobile dans le budget search total aux Etats-Unisi d’ici fin 2012 :

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Par ailleurs, la société projette à 22% la part des dépenses de search marketing réalisées sur mobile d’ici fin 2012237. Le search étant bien souvent le levier le plus important d’un plan media, cela ajouté aux nouvelles possibilités offertes par le search mobile, les sommes investies sur ce levier seront probablement très importantes. De son côté Google travaille à l’évolution de son produit. Elle commence à référencer les catalogues de marchands comme par l’intermédiaire du moteur Wolfram Alpha238. Par ailleurs, il semble évident que le mobile peut changer la recherche de manière importante, notamment par la recherche vocale, la localisation et la recherche visuelle. Apple compte bien faire de Siri une alternative au moteur de Google, aujourd’hui utilisé sur tous ses terminaux. Siri utilise déjà la localisation géographique où est effectuée la recherche. La reconnaissance d’images popularisée par l’application Goggles a quant à elle de beaux jours devant elle tant l’usage de la photo s’est popularisé sur les smartphones.

2.1.5/ Mobile Analytics

Concevoir et distribuer son application sont les deux premières étapes d’une présence mobile, il reste ensuite à analyser le comportement des utilisateurs et à les fidéliser. La durée de vie moyenne d’une application est de trois mois si ce n’est moins dans le cas où elle est désinstallée juste après son installation. Prévoir un plan de mises à jour à l’avance peut être intéressant, on constate en effet un regain d’usage suite au déploiement des mises à jour importantes. Entre les mises à jour, la notification push est le meilleur levier d’animation et d’engagement avec les utilisateurs. Surikate constate que 60% des utilisateurs ré-ouvrent une application avec avoir reçu la notification, l’outil est encore très puissant. Apple impose un opt-in à l’envoi de notification, sur Android les utilisateurs acceptent par défaut. Au-delà des solutions web comme Google Analytics, Webtrends, AT internet et Omniture qui proposent désormais le tracking des applications, des sociétés spécialisées sont apparues. Parmi les plus connues, citons Appclix, Kontagent, Capptain, Games Analytics, Surikate, Flurry, Distimo… Christophe Leon, le fondateur de Pure Agency, qui propose la solution d’analytics appelée Pure ROI, évoque des taux de transformation sur mobile de 1,5 à 2% contre 0,5% sur l’internet fixe. La solution Keen.io propose un SDK permettant d’enregistrer n’importe quel événement au sein d’une application, notamment les « swipe », ce geste né avec l’écran tactile où l’utilisateur fait glisser une page ou un bouton de gauche à droite par exemple. La solution enregistre les données brutes et permet de les réinsérer dans un outil d’analytics traditionnel. Quel que soit la solution choisie, il est important de définir en amont les indicateurs clés de performance. De la même manière que sur un site web, les données analytics peuvent être nombreuse et ralentir la prise de décision au lieu de la facilité. Par ailleurs, on juge souvent une application qu’à l’aune de son nombre de téléchargements, c’est bien évidemment trop réducteur. Certaines applications de marques n’ont pas pour vocation d’être téléchargées 10 millions de fois et les indicateurs d’engagement sont tout aussi importants.

237 Efficient Frontier Rapport Q4 : http://bit.ly/xitd7o / Conférence EBG, 23/11/11 : http://bit.ly/wQEyJN 238 Thenextweb.com, Apple’s Siri gest a Wolfram Alpha pricing enfin powered by Best Buy, 20/12/11 : http://tnw.co/H83C8e

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2.2/ La publicité mobile

La publicité sur le mobile est en forte croissance. Mais les niveaux d’investissements restent bien en dessous par rapport au potentiel et surtout au temps passé par les utilisateurs sur leur mobile. Beaucoup de facteurs se mettent en place pour un décollage très rapide. Les technologies d’adserving et de tracking se mettent en place, les acteurs de l’internet s’y mettent rapidement, les formats publicitaires innovent et la publicité locale y voit un terrain de jeu jamais vu.

2.2.1/ Les chiffres

Avant de pouvoir parler de marché publicitaire mobile, il faut avoir une mesure d’audience fiable et reconnue sur le marché. Or le marché du mobile est longtemps resté sans mesure officielle, seul les chiffres des éditeurs et des régies existaient. Médiamétrie a lancé en octobre 2010 la première mesure de l’internet mobile en France, trimestrielle et désormais mensuelle. Les débuts de cette étude ont été houleux. Censé être plus objectives que la mesure de l’internet fixe car basée sur les logs des opérateurs mobile et plus seulement sur un panel d’utilisateurs (10 000). Pour autant, plusieurs obstacles techniques sont apparus. La mesure des sites internet est plus aisée que celle des applications, qui nécessitent une mise à jour particulière afin d’intégrer un appel http à Médiamétrie. Par ailleurs, le Wifi n’était pas comptabilisé (bien souvent 70% du trafic) et les terminaux sous Blackberry ne peuvent être mesurés car les opérateurs ne récupèrent aucune données de la part de RIM. Les données du navigateur Opéra, des navigations en https et des MVNO ne sont également pas transmises aux opérateurs mobiles, échappant ainsi à la mesure. Un an après ce lancement, Médiamétrie constate une croissance de 23% des personnes se connectant à l’internet mobile et en tout 19 millions de mobinautes. Pour plus d’informations sur la méthodologie actuelle, voir le guide de l’audience mobile publié par Médiamétrie et l’AFMM239. En 2012, l’audience devrait passer en mensuelle et commencer à intégrer l’audience Wifi.

Sir Martin Sorrell, le CE du groupe de communication, WPP évoquait récemment la déception face à la promesse de la publicité mobile depuis plusieurs années240. L’année du mobile aurait dû avoir lieu six ou sept fois. C’est un peu la mauvaise plaisanterie du marché du mobile, à savoir que tous les ans, on annonce « l’année du mobile ». Alors on a commencé à découper en morceaux cet événement tant attendu. 2010, l’année des usages. 2011, l’année des applications. L’année de la publicité sur le mobile se fait toujours attendre. Comme on l’a fait pendant longtemps avec l’internet, on compare régulièrement le temps passé sur le mobile et la part du budget investi dans les plans médias.

239 Vincenttessier.fr, L’audience de l’internet mobile, http://bit.ly/Halpdd 240 Sir Martin Sorrell at IAB Spain, nov 2011 : http://bit.ly/H5KvAg

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Temps passés et budget investi par média :

Le mobile bénéficie d’un taux de pénétration du mobile important, de l’arrivée massive des smartphones, et d’un temps passé qui dépasse bon nombre d’autres médias traditionnels. Inmobi a même annoncé que les appareils mobiles dans leur ensemble avaient dépassé la télévision241. Pourtant, le constat est sans appel, le mobile ne représente que 0,5 à 1% des investissements. Beaucoup d’instituts et d’organismes tentent de mesurer et de décrire l’évolution de la publicité sur mobile. En effet, les taux de croissance sont les plus importants mais en valeur absolue les chiffres restent très faibles. Le marché nourrit l’espoir qu’avec une cadence pareille, nous atteindrons dans quelques années un marché consistant de plusieurs dizaines de milliards de dollars.

Projection du marché publicitaire mobile américain :

Aux Etats-Unis selon emarketer, c’est 1,45 milliard de dollars qui ont été dépensés en 2011 et la projection est de 10,8 milliards pour 2016242. L’institut d’étude anglais Ovum a réalisé une étude en 2011, à la demande de l’IAB, sur la perception de la publicité mobile auprès de 300 directeurs marketing243. Le budget annuel alloué va de 50 à 300 000 dollars mais la majorité se situe sous la barre des 50 000 dollars.

241 Inmobi, Panel de 20 000 consommateurs mobiles sur 18 marchés, 29/02/12 : http://bit.ly/Im2VX6 242 Emarketer, US mobile ad spending soars past expectations, 25/01/12 : http://bit.ly/HtLAjU 243 IAB, Marketer Perceptions of mobile advertising, Juillet 2011 : http://bit.ly/HtZNgM

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L’Asie reste aujourd’hui loin devant en termes de budget mais les projections font état d’un rattrapage important de la part de l’Europe et des Etats-Unis, comme on le constate dans le tableau ci-dessous.

Projection marché publicitaire mobile selon Gartner244 :

Concernant l’Europe, le marché européen pourrait atteindre le milliard d’ici 2014 selon Adsmobi et MobileSQUARED245. En France, l’observatoire des investissements publicitaires du SRI et de Capgemini a mesuré à 37 millions d’euros d’investissements publicitaires sur le mobile en 2011, soit 1,4% du digital246.

Comment sont investies ces sommes et dans quels objectifs ? Les deux plus importantes régies mobile, Google et Millenial publient régulièrement des études de l’activité de leur réseau.

Les objectifs d’une campagne mobile sur le réseau de Millenial :

Source : SMART Report millenial media, 2011 Year in review

On s’aperçoit ici que les campagnes publicitaires mobile ont majoritairement pour objectif d’interagir avec l’audience. 31% des campagnes ont pour objectif de promouvoir une présence dans un store d’applications et 25% le recrutement de leads qualifiés. Seulement 9% ont un objectif de trafic en magasins physiques. La moitié de ces campagnes oriente vers un site mobile et 25% vers le téléchargement de l’application. L’activité postclick des campagnes est également mesurée et on constate que le « store locator » est souvent utilisé, notamment sur le secteur de la distribution. Il faut noter la variété des redirections possibles

244 Gartner says worldwide advertising revenue forecast to reach $3.3 billion in 2011, 16/06/11 : http://bit.ly/H5meqE 245 Adsmobi.com, The big five will drive European mobile advertising market to a $1 billion industry, 13/09/11 : http://bit.ly/HtwlCB 246 SRI Capgemini Udecam : Observatoire de l’e-pub Bilan 2011

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sur le mobile. Une bannière peut renvoyer vers Google maps, vers l’apple store, déclencher directement le téléchargement d’une application, déclencher un appel (clic to call), ouvrir l’agenda…

Objectif d’une campagne mobile selon Google :

Source : Livre blanc Google / Performics « Mobilization, search des opportunités à saisir »

Google a récemment proposé la matrice ci-dessus concernant les objectifs de search mobile, elle s’applique également au display. Les axes choisis sont d’un côté traditionnel « branding » / performance et de l’autre la notion géographique entre local et national. C’est une des différences majeures du mobile avec l’internet fixe. Certes le ciblage géographique est disponible sur l’internet fixe, en search et en bannière grâce à l’adresse IP. En mobile, cette notion devient encore plus importante compte tenu de l’usage du mobile. Or nous avons plusieurs fois indiqué qu’un des grands changements qu’apporte le mobile en terme marketing est la notion de contexte. Les possibilités techniques de ciblages sont par ailleurs bien plus fiable et précise sur le mobile que sur l’internet fixe.

2.2.2/ Les acteurs

Google est dominant sur le search marketing web et mobile. En matière de bannières publicitaires, Google a toujours eu un retard sur l’internet fixe qu’il tente de rattraper depuis quelques années (Google Display Network). Sur le mobile, Google s’est rapidement positionné avec le rachat de la régie Admob, prenant ainsi de cours Apple qui a lancé sa régie iAd tardivement. Google a réalisé 7% de ses revenus sur le mobile en 2011, soit 2,5 milliards de dollars sur 34 milliards de revenus (97% réalisés par la publicité)247. Convaincu que l’essentiel du trafic internet viendra par le mobile d’ici très peu de temps, Google multiplie les initiatives pour s’imposer. Les projections sont de doubler en 2012 et de multiplier par dix en cinq ans, comme le montre l’analyse de Cowen and Company ci-dessous.

247 Techcrunch.com, Google’s mobile ad revenus could surge to $5,8 billion in 2012, 21/01/12 : http://tcrn.ch/H7RWqR

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Projection des revenus de Google sur le mobile :

Deux événements importants dans l’offre produit de Google sont à noter. Le premier est l’évolution de la régie Admob, qui va progressivement être intégrée au sein d’Adwords. La régie mobile délivre 2,7 milliards d’impressions par jour sur environ 100 00 sites et applications mobiles. La première étape a été d’ouvrir l’enchère (jusque-là le prix du clic était fixe) et d’inclure la notion de quality score, inexistante sur le réseau jusqu’à maintenant. La deuxième étape est de migrer tout simplement les éditeurs et les annonceurs sur Adwords, une plateforme bien plus évoluée et qui réunit bien plus d’acheteurs et de vendeurs. Le deuxième événement important est l’intégration des inventaires d’Admob et d’Adsense sur la plateforme adexchange de Google248. Le display sur internet et sur le mobile est en train de basculer doucement sur ces nouvelles places de marché, c’est 1% des investissements américains aujourd’hui et la projection d’emarketers à 20% à l’horizon 2015249.

Le deuxième géant de l’internet fixe, Facebook, n’est pas encore positionné sur la publicité mobile. C’est étonnant alors que la publicité représente 85% de ses revenus en 2011 et que sa base d’utilisateurs mobile est impressionnante (+ de 400 millions). La société a annoncé début 2012 de nouveaux formats intégrés (sponsored stories) dans les flux de ses utilisateurs, un axe clairement orienté « brand content » et non bannières publicitaires. Yahoo, AOL et Microsoft ont des offres mobiles qui restent très en retard. Un des points bloquants pour ces entreprises du web est la technologie. AOL a récemment établi un partenariat la technologie mobsmith et a investi dans appssavvy afin de pouvoir servir des publicités mobile au standard du marché. Microsoft a racheté screentonic mais est resté centré sur son adserver web Atlas. Quant à Apple qui avait racheté Quattro 275 millions de dollars en 2009250, sa régie iAd n’a pas encore convaincu les agences et les annonceurs. Elle a même baissé son minimum d’investissement récemment de $1 000 000 à son lancement, le seuil est aujourd’hui à $100 000251.

248 Doubleclick advertiser blog, Bringing Admob mobile inventory to the DoubleClick Adexchange, 07/11/11 : http://bit.ly/H87aYx 249 Offremedia.com, En 2015, 20% des revenus display proviendront du RTB, 27/0/11 : http://bit.ly/HJg7pF 250 Businessinsider.com, Apple buying mobile ad network Quattro for $275 million, 04/01/10 : http://read.bi/H788aX 251 Adage.com, Apple Slashes iAd pricing again as mobile ad share declines, 14/02/12 : http://bit.ly/HE0yEl

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Les constructeurs ont toujours souhaité remonter la chaîne de valeur et devenir régie publicitaire. Apple a des difficultés, Nokia a réussi un temps mais s’est retiré, c’est au tour de Samsung de se lancer. Un partenariat a été annoncé entre OpenX et Samsung pour créer un adexchange mobile privé qui sera effectif fin 2012252. Les opérateurs mobiles sont bien sûr positionnés, notamment en France. La régie d’SFR est la plus active, Orange Advertising a une division mobile et Bouygues Telecom est commercialisé par TF1 publicité.

Les autres acteurs de l’écosystème publicitaire mobile sont majoritairement des pure players mobile, il faut citer Millenial, Inmobi, Adfonic, Buzzcity, Yoc, Greystripe, Jumptap, SponsorMob, Smaato, Adsmobi, MBrand, Mobileaddict, Madvertise… Il faut dire ici quelques mots sur les deux plus gros réseaux indépendants qui se positionnent en challengers de Google. Tout d’abord, Millennial Media, acteur américain qui vient de réussir son introduction en bourse ay NYSE. Son action a doublé dès les premiers jours amenant sa valorisation à près de 200 milliards de dollars253. La régie fondée en 2006 a réalisé 104 millions de dollars de revenus en 2011 et estime à 16,7% sa part de marché. Elle vient de lancer sa plateforme de publicité, mMedia, en self-service qui permet à n’importe quel annonceur d’acheter une campagne en toute autonomie254. Le deuxième réseau indépendant majeur est Inmobi. Hors des Etats- Unis où Millennial règne sur son marché, Inmobi gagne du terrain rapidement. Fondée en 2007 par l’Indien Navenn Tewari, la régie se développe à un rythme soutenu, notamment depuis sa levée de fonds de 200 millions de dollars auprès du géant Japonais Softbank, de Kleiner Perkins Caufield & Byers et de Sherpalo Ventures. Depuis le rachat d’Admob pour 750 millions de dollars, cette levée de fonds est une des plus importantes du mobile et illustre parfaitement l’engouement que la publicité sur mobile suscite. La régie est également très active en termes de publications marketing sur l’évolution du marché du mobile, consciente du besoin d’évangélisation de ce marché. Pour plus d’informations sur sa présence sur le marché français, je renvoie les lecteurs à l’interview réalisée avec Alice Henry, Directrice commerciale255. Ces deux régies proposent de l’inventaire premium au CPM ainsi qu’une offre à la performance en « blond » au CPC. Elles se positionnent également sur des formats innovants et rich media afin de pouvoir rivaliser avec les formats brandings des concurrents Admob et iAd. Toutes les régies mobile ont mis en place une communication et des outils spécifiques à destination des éditeurs d’applications. La guerre se situe en effet à la fois au niveau des budgets et de l’inventaire disponible. Enfin, les plateformes d’adexchange spécialisées mobile émergent avec Mobclix, Nexage, Smaato et Mopub. Un acteur comme Fiksu a une position particulière car adresse uniquement les éditeurs d’applications cherchant du téléchargement et propose un DSP (Demand side platform) pour mobile. Malgré toutes ces régies et solutions publicitaires, il y a toujours sur le marché plus d’inventaires que d’annonceurs. Smaato estime le taux de remplissage des applications mobile à 18%256.

252 BlogopenX, Lancement l’adexchange privé de Samsung, 03/04/12 : http://bit.ly/IOdqby 253 Techcrunch, Millennial Media, valued at nearly $2B, 29/03/12 : http://tcrn.ch/HyjSyY 254 http://www.mmedia.com/ 255 Vincenttessier.fr, Interview d’Alice Henry, Directrice commercial Inmobi France, 18/01/12 : http://bit.ly/HwDoRe 256 Smaato, Metrics report Q3 2011 : http://bit.ly/HylE1F

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Dans les acteurs de la publicité mobile, il faut également mentionner les adservers publicitaires. Les spécificités techniques du mobile ont obligé les acteurs à travailler sur des technologies plus adaptées que celles disponibles pour l’internet fixe et les sites internet. Les applications sont des logiciels et nécessitent des outils spécifiques, le réseau mobile est également différent (2G, 3G, Wifi), les formats sont également plus nombreux pour tenir compte des différentes tailles d’écrans. Bien souvent, les développeurs utilisent le SDK de leur régie qui permet parfois d’adserver également d’autres réseaux. Parmi les adservers natifs au mobile, il faut citer Sofialys, Swelen, Adwhirl de Google, Mocean, Motricity, Appspot de Flurry… Par la suite, les acteurs web s’efforcent d’adapter leur technologie au mobile avec plus ou moins de succès et de retard, Smart adserver s’est rapidement imposé, Doubleclick et OpenX également. D’autres sont plus en retard comme Adtech, Atlas, Mediaplex… Certaines agences proposent également leur solution, c’est le cas d’Ad4screen avec son Meta-Adserver qui propose non seulement d’adserver mais également d’optimiser le revenus avec plusieurs adnetworks préalablement intégrés et diffusés selon une méthode de yield management. Les autres acteurs de l’internet, notamment les plateformes d’affiliation opèrent soit des rachats (Netaffiliation / Swelen) soit des évolutions technologiques (Tradedoubler, Zanox…). Malgré tous ces efforts, les technologies publicitaires mobile restent très fragmentées, les régies travaillent trop peu souvent en « redirect » ce qui ne facilite pas le travail des agences et des annonceurs qui ne peuvent pas centraliser leurs informations de campagnes.

2.2.3/ Les formats

Un frein au développement publicitaire a longtemps été la petite taille des écrans. Cette contrainte réduisait les créations publicitaires à de simples timbres-poste. Cela n’encourageait pas les équipes créatives et n’avait pas la capacité d’engager et d’avoir un grand impact sur l’audience. Or, le mobile a bien des avantages par rapport aux autres médias. L’utilisateur est absorbé par ce petit écran, il a un potentiel viral important, il permet la transaction et permet des ciblages d’audience inédits.

Au-delà des simples bannières renvoyant vers un site mobile ou vers l’apple store pour effectuer un téléchargement, des formats immergent existent. La régie iAd n’a pas encore généré beaucoup de revenus mais a montré au marché ce que pouvait être une publicité engageante. L’utilisateur peut découvrir un produit, voire une vidéo ou partager un produit sans quitter l’application qu’il était en train de consulter.

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L’iPhone ne supportant pas le flash, les bannières se sont depuis longtemps limitées à de simples GIF animés. Le HTML5 donne bien sûr des perspectives aux agences de publicité. De leur côté les régies travaillent à développer des formats propriétaires engageants. Google présente régulièrement des cases studies de campagnes publicitaires rich media de marques comme Levis, Best Buy, Warner Bros, HP…257. Inmobi a même racheté une société spécialisé dans les créations de bannières appelée Sprout qui adapte automatiquement le format au terminal, flash ou HTML5. La régie propose cet outil en tant que plateforme à ses partenaires agences afin de faciliter la création et l’intégration dans les outils d’adserving annonceurs. Les formats sont impressionnants et au niveau de ce que propose iAd et Admob, ce sont des mini-sites à part entière, mettant en valeur le produit avec visualisation 360 et des vidéos intégrés258. En France, la société Loodies est une des rares à être spécialisée sur cette problématique. Elle développe et propose des formats riches et engageants aux régies et aux agences. Sa co-fondatrice, Aude Perdriel Vaissière, considère que l’instabilité du réseau et l’impossibilité pour les smartphones à exécuter le javascript sont des freins majeurs aux formats innovants. Un SDK spécifique doit ainsi être installé pour gérer ce type de format, non supporté par le SDK des régies et des adnetworks. La société sœurs Swelen, spécialisée dans l’adserving mobile intègre directement ces spécificités rich media dans son SDK éditeur259. Une autre société française est positionnée sur les solutions interactives, il s’agit d’Adways. L’autre format intéressant du mobile est la notification. Surikate propose une offre publicitaire dédiée à ce format, SK.reach. La solution va même jusqu’à proposer de la notification comportementale. L’application installée qui pousse la notification peut explorer le parc d’installations de l’utilisateur et proposer une campagne qui cible la catégorie des CSP+, des amateurs de sports ou d’applications de news. Aux Etats- Unis, la régie Airpush est spécialisée sur la notification sur les téléphones Android uniquement. Ce format est à utiliser avec prudence et parcimonie car très intrusif.

Au-delà des bannières, des formats rich media et des notifications, il existe également des formats plus intégrés. Le fondateur d’Appssavvy considère que l’internet a changé depuis l’émergence de Facebook et de sociétés comme Foursquare et Zynga, or la manière dont les annonceurs communiquent avec leurs audiences n’a pas évolué. La société propose d’insérer de la publicité dans l’activité des utilisateurs, par exemple au sein des jeux sur facebook ou suite à une action sur une application mobile. L’utilisateur n’est ainsi pas interrompu c’est même la marque qui le récompense pour avoir passé un niveau. Les sociétés Kiip et Tap.me proposent ce type d’intégrations où une marque peut par exemple offrir un bon de réduction à faire valoir en magasins pour créer du trafic par exemple260. D’autres intégrations dans les jeux existent plus orientées monnaies virtuelles comme Sometrics et SponsorPay. Il s’agit alors de proposer à l’utilisateur de réaliser une action pour un annonceur (regarder une vidéo, remplir un formulaire ou même acheter quelque chose) au lieu de payer par exemple en Facebook credits ou Paypal. Selon comScore, sur les 36 millions de joueurs mobile en Europe, 15% effectuent des achats in-app de biens virtuels261. Google souhaite également se positionner également et a développé des formats vidéo, images et textes dédié

257 Chaine Youtube Google Mobile ads : http://bit.ly/H7Wdae 258 http://www.inmobi.com/sprout/ 259 Vincenttessier.fr, Interview Aude Perdriel-Vaissière, Adserving et rich media mobile, 16/01/12 : http://bit.ly/H89rHo 260 WSJ, New approach to ads in game, 24/06/1 : http://on.wsj.com/H9bwPi 261 comScore, Mobile gaming : State of the European market, 25/01/12 : http://slidesha.re/H8lfGa

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aux jeux au sein du programme Adsense262. Microsoft introduit de la publicité dans ses jeux Xbox depuis longtemps déjà, mais la cible du social et du mobile gaming est bien plus large et intéressante pour les annonceurs que les traditionnels jeux vidéo sur consoles. A mesure que le freemium prend le pas sur le premium dans les stores d’applications, les éditeurs se tournent de plus en plus vers les adnetworks et les « in-game advertising platforms ». Il existe un moyen de savoir quelles régies ou solutions de monétisation utilisent telle ou telle application. Des applications comme Airpush detector, Addons Detector et Lookout push ad detector scannent vos applications et vous donne cette information.

L’email sur mobile : La lecture de ses mails se fait de plus en plus sur son mobile. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder l’évolution de l’usage de la lecture des mails sur l’internet fixe qu’illustre le graphique suivant.

Les 12-24 ont vu leur usage du webmail baisser de plus de 30% entre 2010 et 2011. On peut rapidement conclure que l’email est mort ou va bientôt l’être au profit des messageries instantanées et des réseaux sociaux. Pour autant, la lecture des emails sur le mobile connaît une forte croissance. Experian Cheetahmail estime à 29% la part des personnes qui consultent leurs mails sur mobile. La plupart des routeurs du marché proposent aujourd’hui des solutions techniques pour adresser le mobile. L’agence Ad4screen quant à elle propose le tag AD4Tag, capable de détecter que l’email est lu sur un mobile et ainsi d’afficher une bannière mobile renvoyant par exemple sur un store d’applications.

Le Clic to Call : Un numéro de téléphone peut désormais être ajouté en tant qu’extension des annonces Adwords mobile ou en tant que destination suite à un clic sur une bannière. Google a récemment annoncé la mise en place d’un code de conversion spécifique aux clic to call afin de mieux analyser les appels émis sur une page d’un site mobile et connaître leurs sources, notamment les mots clés et annonces adwords263. Le clic to call permet de fournir des prospects en phase finale d’achat au call center d’une marque par exemple. 500 000 annonceurs utilisent déjà cette fonction et cela représenterait 10 millions d’appels par mois264. D’autres outils de search marketing comme Marin Software ont également intégré cette fonction. Les

262 http://www.google.com/ads/games/adformats.html 263 Google mobile ads blog, Optimizing customer calls to your business, 06/10/11 : http://bit.ly/zAu8H1 264 Techcrunch, Google mobile search ad requests more than doubled in 2011, 01/02/12 : http://tcrn.ch/yxNlET

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principaux outils analytics du marché permettent de mesurer par la suite le prix et la rentabilité des campagnes de search marketing265. L’avantage sur le mobile est évident, l’utilisateur n’a pas a tapé le numéro de téléphone pour passer l’appel. Par ailleurs, les publicités contenant un numéro de téléphone auraient un taux de clics supérieur de 10%. Le clic to call n’est pas réservé aux campagnes de search marketing, il est aussi intégré au sein des applications. L’application mobile Yelp a intégré le tracking des appels de la société Telmetrics sur ses fiches de lieux et de recommandations (16 millions)266. Il permet de suivre le nombre d’appels mais aussi, le lieu, la durée et même les mots utilisés par le client durant sa conversation. Cela peut permettre par exemple d’ajuster le ciblage des mots clés ciblés par les annonces Google. Par ailleurs, il n’est plus nécessaire de multiplier les numéros de téléphone pour tracker chaque campagne ou bannière, des solutions existent pour suivre les performances de plusieurs campagnes en utilisant un numéro unique. Parmi les entreprises spécialisées, il faut citer Telmetrics, Mongoose Metrics, Marchex, callbutton, ClickPath et ifbyphone.

En termes de format, il faut mentionner la vidéo qui connaît une croissance importante sur le mobile. Une étude Experian Hitwise indique que les visites de sites de vidéos via smartphone et tablette en Angleterre ont doublé en 2011 et quadruplé depuis 2010. Une progression annuelle de +200% à comparer aux +36% de croissance globale pour la vidéo online. Ainsi, en termes de volume, tablettes et smartphones représentent désormais 10% des vidéos vues sur Youtube. Deloitte prédit une explosion de la vidéo dans les transports en commun en 2012, cinq milliards d’heures267. Enfin sur les formats, il faut rappeler que la MMA a publié des recommandations de formats mobile et que l’IAB fait la promotion de l’API MRAID, « Mobile Rich Media Ad Interface Definitions » afin d’harmoniser les créations publicitaires mobile268.

2.2.4/ La publicité locale

A terme, les communications ciblées géographiquement devraient représenter une part significative des investissements publicitaires des annonceurs. D'ores et déjà, on évalue à environ un tiers le poids des investissements locaux dans les investissements des annonceurs en France. Il s’agit principalement de marketing direct, d’annuaires, des petites annonces et de la presse PQR. Bien qu’internet propose des possibilités de ciblage, la part des campagnes locales dans les investissements online reste faible. Les annonceurs nationaux qui investissent dans les médias locaux ont pour la plupart la préoccupation de soutien de réseau de points de vente. Les annonceurs locaux quant à eux sont sensibles aux nouveaux médias mais n’ont généralement pas de présence online. Quelques acteurs comme Les Pages jaunes et NRJ accompagnent ces annonceurs sur internet. Google a récemment proposé un produit plus adapté appelé « Adwords express » afin de faciliter l’accès à sa plateforme publicitaire. En revanche, les offres d’achats groupés par contre ont très vite séduit cette catégorie d’annonceurs et les acteurs tels que Groupon et Living Social ont l’intention de prendre des parts de marché. Le succès et la menace pour les acteurs locaux est tel que la presse PQR a lancé ses offres. Nice-Matin et La Provence ont par

265 Kaushik.net, Mobile analytics : tracking clic-to-call mobile ad campaigns, 22/02/11 : http://bit.ly/xot5Y0 266 Searchenginewatch.com, Yelp integrates Telmetrics Call tracking, 08/03/11 : http://bit.ly/zKDIqd 267 Deloitte.com, Prédictions mondiales du secteur des Technologies, Médias et Télécommunications, 03/02/12 : http://bit.ly/zQAvti 268 http://www.iab.net/mraid

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exemple lancé i-deals, le NY Times a lancé Times Limited. La régie Com> Quotidiens spécialisées dans la PQR avec 32 quotidiens régionaux a racheté récemment la régie EGS Média. C’est un signe fort qui montre que si la presse n’a pas pris le virage internet, elle ne compte pas passer à côté du mobile. Celui-ci a par ailleurs d’intéressantes synergies possibles avec le papier, peut-être plus que l’internet fixe grâce à la géolocalisation et les WR Codes. Le format bannière sur le mobile est disponible avec des ciblages géographiques, permettant de toucher sa cible en situation. Une étude de JiWire montre que 80% des utilisateurs en mobilité préfèrent recevoir une publicité locale, 75% étant prêts à passer à l’action par la suite269. La société spécialisée dans la localisation par Wifi, estime qu’un milliard de terminaux se connecteront via Wifi en 2012. Il existe plus de 680 000 bornes Wifi publiques dans le monde dont 36 000 en France. JiWire est connecté à plus de 30 000 spots Wifi aux Etats-Unis et 4 000 en Angleterre et propose aux annonceurs des campagnes géociblées sur mobile. Par ailleurs, la société propose une application grand public permettant de trouver les spots Wifi publics les plus proches. La place de marché mobile Nexage constate elle un niveau de prix 3,8 fois supérieur pour de l’inventaire publicitaire local270. Compte tenu des taux de remplissages faibles et du fait que les annonceurs favorisent les modes d’achats à la performance (CPC ou CPD « Coût Par Download »), le ciblage géographique est un levier important pour les éditeurs afin de mieux valoriser leur inventaire. Au-delà des ciblages possibles par les régies mobiles majeures, il existe quelques régies mobiles spécialisées dans le local, c’est le cas de Xad aux Etats-Unis et d’Admoove en France. La régie Localresponse a une approche intéressante entre le local et le retargeting. Un utilisateur qui réalise un check-in et qui le fait savoir sur twitter est automatiquement ciblé par un tweet lui proposant une offre, un lien vers une page internet mobile ou tout autre action engageante. La start-up vient de lever 5 millions de dollars271.

Les actions réalisées après une publicité locale :

On s’aperçoit avec cette étude du réseau Xad que les actions post clics sont différentes en search et en bannière. Le search amène plus spécifiquement à passer un appel, c’est plutôt cohérent avec le contexte de recherche de quelque chose de précis. A contrario, le format bannière amène majoritairement les mobinautes vers un service de cartographies272.

269 JiWire Mobile Audience Insight Q4 2011, http://bit.ly/weUiVA 270 Nexage.com, Nexage delivering significant growth and eCPM value for location-enabled impressions, 02/11/12 : http://bit.ly/HirZyo 271 Adweek.com, Is location based mobile advertising real? 13/11/11 : http://bit.ly/HLdMib 272 Searchengineland.com, 52% of local mobile serach clics turned into calls, 16/02/12 : http://selnd.com/HFAkif

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Aux Etats-Unis, BIA/Kelsey prédit que les recherches locales réalisées sur le mobile vont dépasser celles réalisées sur un ordinateur fixe d’ici 2015. Le cabinet prédit également que la publicité mobile locale représentera 5 milliards de dollars en 2016, soit 70% des investissements mobile273. Le search et le display devraient dominer en termes de levier. Deux types d’annonceurs vont générer ces revenus, les acteurs nationaux ciblant des zones géographiques locales et les acteurs locaux.

Le ciblage local ira bien plus loin dans un futur proche. Google a déposé un brevet récemment lui permettant d’enregistrer le fond sonore des conversations mobiles. Il sera également possible d’analyser l’environnement visuel des photos prises par le terminal. Si Google détecte de la neige sur la photo, il y a de forte chance que l’utilisateur soit au ski et soit intéressé par une publicité en relation. Google pourrait même aller jusqu’à détecter des mots clés dans une conversation et y insérer un spot de publicité audio274.

273 Biakelsey.com, US mobile local ad revenue to grow to $2,8 billion in 2015, 23/06/11 : http://bit.ly/H5v7UG 274 Thenextweb.com, Google wants to serve you ads based on the background noise of your phone calls, 21/03/12 : http://tnw.co/HWc6hG

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3/ Vers le shopping 3.0

Internet a bouleversé la distribution. De nouveaux acteurs dit « pure player » ayant une autre culture ont pénétré le marché il y a dix ans. L’e-commerce représente aujourd’hui 6% des ventes de détail en France275. Au-delà de cette part du gâteau qui échappe aux acteurs historiques, ces nouveaux acteurs ont diffusé une autre culture du commerce, plus rapide et centrée sur le service. La vague sociale du Web 2.0 a transformé le processus d’achat et les consommateurs sont plus que jamais informés. Le site internet est d’abord apparu comme un concurrent par le réseau de distribution, cannibalisant les ventes physiques ou transformant les points de vente en simple showroom. Or, les synergies possibles entre le site marchand d’une enseigne et ses points de vente sont nombreuses. Depuis quelques années, la mention du site est apparue sur les supports publicitaires des marques et des enseignes. Les sites des « brick and mortar » ont intégré des fonctionnalités supplémentaires : le client peut passer commande online mais également contacter le service client, trouver un magasin près de chez lui ou utiliser le service « drive » de retrait en magasin. Le magasin devient un entrepôt et doit préparer des commandes payées à l’avance. En même temps, les magasins deviennent connectés et les clients peuvent passer commande dans un magasin physique de produits qu’il n’a pas en stock.

A la suite d’internet, le mobile s’apprête aujourd’hui à révolutionner à nouveau le commerce. La Fevad estime à 2% la part du e-commerce réalisée par le mobile mais l’essentiel n’est pas là. Marc Andreessen pense que le mobile va mettre une forte pression sur les réseaux de distribution physique, et qu’il va devenir de plus en plus difficile de justifier un business model basé uniquement sur le physique276. Le mobile a la capacité de devenir un outil marketing pour les enseignes et les marques. En France, 42% des mobinautes déclarent utiliser leur smartphone au moins à une des étapes de leurs achats277. Le mobile est présent avant, pendant et après l’achat.

Comment le mobile est-t-il utilisé dans le parcours d’achat? :

Source : Post Holiday Shopper insights – ThinkwithGoogle278

275 Fevad.com, 37,7 milliards d’euros dépensés en ligne, 30/01/12 : http://bit.ly/y6AuTf 276 Cnet.com, Marc Andreessen : Predictions for 2012 (and beyond), 19/12/11 : http://cnet.co/z8s8Qh 277 Thinkmobile with Google, Ipsos MediaCT et TNS infratest – 4000 personnes interrogées en mars 2011 : http://slidesha.re/zCqPfc 278 www.thinkwithgoogle.com, Post Holiday Learning for 2012 : http://bit.ly/xbsdn4

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Cette récente étude réalisée par Google et Ipsos illustre bien les interactions entre les canaux et la place que prend le mobile. On constate que 46% des recherches effectuées sur le mobile se traduisent par un achat en point de vente physique. Nous allons maintenant suivre le client à chacune des étapes de son parcours d’achat en se posant les trois questions suivantes. Comment le mobile peut participer à l’amener à visiter un point de vente ? Comment le mobile modifie l’expérience d’achat dans le point de vente ? Comment le mobile peut devenir essentiel à son passage en caisse ? Enfin, nous verrons dans une dernière partie, pourquoi le shopping 3.0 oblige les enseignes et les marques à envisager des stratégies marketing omnicanal.

3.1/ Le drive to store

Le courrier publicitaire est depuis longtemps le meilleur moyen de faire connaître une promotion et ainsi de créer du trafic en magasin. Le mobile quant à lui a souvent été appelé « média du dernier mètre » grâce à sa capacité à créer du trafic en magasin, notamment via des campagnes SMS. Bien que ce levier soit toujours le plus efficace aujourd’hui, de nouvelles possibilités liées aux Smartphones sont apparues comme la notification géolocalisée, la réalité augmentée, le geo-fencing. Obad Mobile Marketing estime que le taux de retour d’un coupon envoyé par mobile peut atteindre 15% contre 3 à 5% pour les supports paiers. Nous allons voir les différents moyens pour créer du trafic en magasin aujourd’hui.

3.1.1/ Le marketing promotionnel

Selon SymphonyIRI, le choix d’une marque peut être influencé jusqu’à 55% par une promotion sous forme de coupon, qu’il ait été distribué sur papier (boîte aux lettres ou dans un insert de magazine) ou online (site de la marque, de distributeurs ou de sites spécialisés dans l’offre de coupons)279. Alors que le jeu concours est le meilleur moyen de constituer une base de données, le couponing est le meilleur moyen d’augmenter ses ventes en magasin. Selon l’étude conjointe TNS Sofres et Sogec, 73% des Français déclarent utiliser des coupons en 2009. Ils en ont utilisés 331 millions, représentant pour eux une économie de 22 millions d’euros au total280. Il s’agit généralement de bons de réduction immédiats ou à valoir sur un prochain achat.

Le courrier publicitaire : Il y a trois formes de courrier publicitaire : le courrier sur fichier client, le courrier publicitaire adressé et l’imprimé publicitaire sans adresse. Le courrier publicitaire n’était pas considéré comme un média par les instituts d’études. Cela a changé dernièrement et ce support est désormais intégré par l’Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires. En 2011, le marketing direct a représenté 9,1 milliards d’euros soit près de 10% des investissements publicitaires. C’est 4,2 milliards pour le courrier publicitaire adressé et

279 Symphonyiri.com, MArketPulse Survey, December 2011 : http://bit.ly/y0c7c9 280 High Co / Sogec

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2,9 milliards d’imprimés sans adresse281. Cela représente environ 20 milliards d’exemplaires distribués par an dans 23 millions de boites aux lettres. 77% de cet investissement est réalisé par la distribution, le reste par des acteurs locaux pour des ouvertures de magasins, de salles de sports, de restaurants… Certains s’étonnent d’ailleurs de la vivacité de ce levier à l’heure de l’emailing, du CRM digital. De plus le coût de ces opérations est très important, de 1 à 3% du chiffre d’affaires d’une enseigne. Enfin, cette grande consommation de papier se heurte à la tendance de fond de l’entreprise verte et du respect de l’environnement. Une jeune start-up s’est justement donnée pour mission de dématérialiser le prospectus et le catalogue papier, il s’agit de Pubeco fondée en 2007282. Leclerc a soutenu ce projet avec le concept « Zero prospectus » avec comme objectif de supprimer la publicité papier d’ici 2020. Le projet prend actuellement la forme d’un portail web permettant de feuilleter les catalogues des magasins situés dans votre entourage géographique. Le service va rapidement être lancé sur le mobile. Malgré ces initiatives pour répondre aux préoccupations environnementales, 92% des Français continuent de lire les publicités distribuées dans leurs boites aux lettres selon une étude LSA-conso.fr. Ces publicités sont lues mais sont également efficaces : certaines enseignes ont fait le test de réduire leurs investissements sur ce levier et les ventes connaissent alors une baisse mécanique. Certains franchisés d’Intersport ont constaté une baisse de 30% de leurs ventes283. Il permet d’établir un lien de proximité fort et a pour lui la force du papier physique, tout comme le catalogue papier. Il est tenu en main, on flâne un moment dessus, il change de main au sein du foyer. Bien avant de parler de publicité digitale locale ou d’intimité du mobile, le courrier publicitaire travaille déjà ces deux notions fortes. Son efficacité peut être augmentée en inscrivant sa communication dans une logique plurimedia, l’insertion d’un QR code est un bon moyen de poursuivre le lien créé par le papier pour amener son client sur une page ou une application mobile. Plus fort encore, la société française Moodstocks a développé une technologie de réalité augmentée qui permet d’ajouter des couches digitales en survolant un prospectus papier, le transformant ainsi d’une certaine manière en site e-commerce virtuel284. Il est ainsi possible de voir la disponibilité du produit, de promouvoir un coupon, de lire un avis, de partager, d’ajouter au panier et de payer. Plus de 400 développeurs et marques, dont Auchan et Castorama, ont intégré leur solution dans leurs applications. Il faut ajouter que cela fonctionne même en mode déconnecté. Avec ou sans utilisation d’un mobile, le catalogue papier n’est pas prêt de péricliter. Une étude conjointe de comScore et d’USPS, le service postal américain, a montré que les clients qui reçoivent un catalogue papier dépensent plus en ligne285.

281 Source IREP – FRANCEPUB 2011, Le marché publicitaire français en 2011, http://bit.ly/AodcZk 282 Frenchweb, Pubeco dématérialise avec succès le prospectus des boites aux lettres, 01/12/11 : http://bit.ly/yUQVj1 283 Lenouveleconomiste.fr, street marketing – flyer gagnant, 23/02/12 : http://bit.ly/zAXMPF 284 Youtube, Moodstocks transforme le catalogue papier en site e-commerce, http://bit.ly/HxfrIs 285 Comscore.com, Case Study : The US Postal Service, 03/08/09 : http://bit.ly/yUiqZo

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Etude comScore et USPS sur l’impact du catalogue papier :

En France, deux acteurs sont présents sur le marché de la distribution d’imprimés sans adresse, Mediapost, l’entité publicitaire de La Poste dédiée au Home-media et Adrexo, filiale du groupe Spir communication. Le groupe serait en négociation pour la cession de cette activité à Voyageprivé286. Sur le courrier publicitaire adressé, le monopole de La Poste s’est arrêté en 2011 et certains acteurs notamment basés à l’étranger commencent à intégrer le marché. Mediapost réalise déjà un chiffre d’affaires de 430 millions d’euros. La société a de grandes ambitions et souhaite remonter la chaîne de valeur et faire des synergies entre son activité de distribution de courrier publicitaire et le métier du marketing promotionnel. Fin 2010, elle rachète la SOGEC, leader du couponing en France287 avec 38 millions d’euros de chiffre d’affaires et en 2011 la société Médiaprism possédant une base de données de 36 millions de consommateurs. La prochaine étape pourrait être le rachat d’une agence ou d’un service mobile géolocalisé.

Le couponing : Le coupon était habituellement envoyé par courrier publicitaire ou inséré dans un magazine papier sous forme de publicité. Il faut distinguer deux catégories de coupons. Le bon de réduction (BR) propose la réduction immédiate en caisse alors que l’offre de remboursement (ODR) propose de renvoyer la preuve d’achat à la marque afin de se faire rembourser ultérieurement par la marque. Le marché du couponing est dominé par deux acteurs, Highco et Sogec. Une très grosse majorité de leur chiffre d’affaires est réalisée par la grande distribution. Le déploiement de l’e-coupon a été sujet à une bataille juridique, les acteurs ayant mis en place une norme DRM du Webcoupon propriétaire et exclusive. Ils ont finalement accepté son utilisation par d’autres acteurs par respect pour la concurrence, sous certaines conditions288. Les e- coupons ont permis aux marques à la fois de réaliser des économies (l’internaute imprime lui-même son coupon) mais aussi d’acquérir plus de connaissances clients. En effet bien souvent, pour obtenir son coupon, le consommateur doit créer un compte et donner ainsi un certain nombre d’informations qui ont beaucoup de valeur en termes de CRM. Par ailleurs, les utilisateurs d’e-coupons dépensent plus que la moyenne. Une étude réalisée sur 200 000 foyers Américains par Gfk a montré qu’ils dépensaient 23% de

286 Boursier.com, Spir communication négocie la cession d’Adrexo Colis, 08/02/12 : http://bit.ly/x7hPpl 287 Laposte.fr, Mediapost acquiert Sogec, spécialiste du marketing promotionnel, 15/12/10 : http://bit.ly/zr58u9 288 JDN : Le Webcoupon de High Co et Sogec s’ouvre à la concurrence, 29/06/10 : http://bit.ly/yZ7kO1

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plus par achat et 49% de plus par an289. Concernant les offres promotionnelles online, il faut évoquer ici la société Groupon. Créée par un jeune entrepreneur en 2008, elle est aujourd’hui estimée à 15 milliards de dollars et réunit 6,5 millions de Français tous les mois. Le modèle économique n’est pas le couponing, qui est normalement déduit en caisse. Groupon propose une réduction prix mais en demandant à ses clients de payer en avance. Le modèle mélange ainsi l’achat groupé, la vente flash et l’offre locale dans 27 villes de France. Malgré les critiques et les défauts de la mécanique, ce service a démontré d’une part qu’il était possible de créer du trafic vers des boutiques physiques locales et d’autre part la forte appétence de cette catégorie d’annonceurs d’investir online. La société a lancé son application mobile Groupon Now en 2011 qui propose des offres flash de quelques heures, tout comme son concurrent Living Social (1 millions d’utilisateurs en France avec des offres dans huit villes). L’achat est toujours effectué auprès de Groupon et l’utilisateur doit présenter son mobile à la caisse pour se faire scanner un code barre. Plus fort encore, Groupon souhaite mettre à disposition ses bons plans jusque dans la rue ! Le service est disponible dans trente bornes interactives dans les rues de Chicago290. Ce modèle du coupon et de l’achat groupé continue sa croissance mais doit compter avec des alternatives digitales également positionnées sur la promotion et le local, en premier lieu le SMS.

Le SMS : Selon la Direct Marketing Association, les français préfèrent à 49% imprimer leurs bons de réduction pour aller acheter dans le magasin physique et 45% préfèrent recevoir et acheter online. Le mobile est de plus en plus utilisé et 24% préfèrent donc recevoir une offre directement sur leur mobile291.

Sur le mobile, quel est le moyen à privilégier de communiquer une offre commerciale ?

Source : UK Direct Marketing Association292

Le SMS est le canal mobile privilégié pour recevoir une offre commerciale pour 60% des consommateurs français. Ce moyen de communication a fêté ses 19 ans et est toujours le plus efficace outil de création de

289 Etude Gfk Knowledge Networks, 200 000 foyers étudiés sur 52 semaines entre 2010 et 2011, 02/14/02 : http://on.mktw.net/IHwyrn 290 Retailsystems.org, Groupon launches kiosk to provide access to local deals, 25/01/12 : http://bit.ly/HUxjyO 291 Dma.org.uk, Promoting to the mobile consumer Report – 2011 : http://bit.ly/xUsIuY 292 Dma.org.uk, Promoting to the mobile consumer report 2011, 04/01/12 : http://bit.ly/xUsIuY

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trafic. Il a en effet plusieurs atouts de taille qui le place en tête des moyens possibles de toucher un client ou un prospect. Grâce à son ancienneté et sa simplicité technologique, le SMS est compatible avec tout le parc mobile existant. Par ailleurs, son ouverture intervient généralement dans les quatre minutes après sa réception contre 24h pour un email. Malgré tous ces atouts, le SMS est souvent ignoré par les marketeurs dans leur stratégie de communication et de marketing client. Selon une étude de la société e-tailing, 79% des annonceurs n’ont collecté aucun numéro de téléphone sur leur base clients existante293. Or, les moyens sont nombreux pour la collecte : sur un formulaire online, la carte de fidélité, lors d’un call avec le service client…Les possibilités marketing sont nombreuses. Proposer une offre de réduction sur un produit dans la zone de chalandise d’un magasin est la plus courante. Il est également possible de proposer un service de disponibilité de produit par exemple, ce qui permet de fidéliser et d’accroitre la fréquence de visite. Il est toujours possible de louer une base de numéros mobiles mais elles sont en général bien plus coûteuses que les bases emails. Il est par ailleurs rare de trouver des offres proposant la location de la base optin, le routage et la géolocalisation. SFR Régie a une offre de 3,6 millions contacts opt-in adressable avec ciblage géographique. Yves Saint Laurent, Sephora et Marionnaud font partie des références de la régie sur cette offre. Orange propose à ses clients de recevoir des offres par SMS et email, ciblées par centre d’intérêt. Ce produit s’appelle « Actu marque » et compterait un million d’utilisateurs. Le service a récemment pris l’orientation « conversationnelle ». La marque pose une question et l’utilisateur peut y répondre, dans ce cas il recevra ensuite une offre de réduction concernant le produit en question. Le « permission marketing » inventé par Seth Godin prend ici les traits d’un SMS. Mediapost a passé un accord avec Orange et Alcatel afin de proposer cette base d’utilisateurs à ses annonceurs294. Il est également possible d’insérer son message publicitaire au sein d’un SMS d’un partenaire : c’est ce que proposent les sociétés INUVI et Gtext Media. Cela permet à l’annonceur d’éviter les coûts de routage et pour le consommateur de recevoir un seul SMS, d’une société qu’il connait et de laquelle il a accepté de recevoir des messages, mais contenant un message publicitaire. Egalement, cela permet de monétiser d’une autre manière sa base optin. Si la marque a une base client optin, il existe de nombreux outils de routage qui peuvent être intégrés à la stratégie CRM, des facilitateurs comme Netsize, Echovox, Mblox, Sumotext ou des outils développés par les agences mobile. La solution américaine leader Tatango propose par exemple pour 10 000 dollars par mois la possibilité de router de manière illimitée une base de 100 000 abonnés opt-in. Le taux d’ouverture d’un SMS peut aller jusqu’à 90% et le taux de passage en caisse de 1 à 5% selon les offres commerciales. Le ciblage géographique est apprécié des consommateurs car plus en phase avec leur situation d’achat ou le contexte dans lequel ils se trouvent.

293 E-tailing.com, Marketing Manual Survival, Novembre 2011 : http://bit.ly/z91ac2 294 Lefigaro.fr, Orange s’associe à Alcalet-Lucent, 13/12/12 : http://bit.ly/x6SqDH

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Appétence pour la réception d’offres géolocalisées par SMS :

Selon une étude AFMM / Médiamétrie, 41,2% des équipés mobile sont intéressés pour recevoir des offres géolocalisées par SMS. Au-delà des offres des opérateurs mobiles, d’autres sociétés comme Placecast proposent la mise en place de campagnes ou de programmes de fidélisation par SMS géolocalisé (geofencing). Fondé par Anne Bezancon, le projet a été salué par le « National Retail Federation Gold Racie Award » aux Etats-Unis. L’utilisateur souscrit au service une fois et reçoit par la suite des offres par SMS. Ces offres sont envoyées uniquement si l‘utilisateur se trouve dans une zone géographique définie et sont limitées à trois envois par semaine. Il lui suffit d’envoyer STOP pour ne plus recevoir d’offres. L’Oréal et Starbucks ont testé ces dispositifs en Angleterre295. La plateforme est également disponible en marque blanche. DDR Corp, qui possède 500 centres commerciaux, s’est appuyé sur cette technologie pour son offre ValuTexte. Le service propose à ses enseignes présentes dans ses centres commerciaux cette solution de création de trafic par SMS en temps réel296. La grande force de cette solution par SMS est la compatibilité sur la plupart des téléphones en circulation mais également qu’elle fonctionne sans téléchargement d’application. La société affirme que 35% des utilisateurs qui reçoivent l’offre et vont effectivement visiter le magasin297. Ce type de promotion devrait obtenir plus de succès que Groupon car il n’y a pas d’achat préalable et évite ainsi la déception souvent constatée d’une rupture de stock ou d’indisponibilité du magasin. Par ailleurs, l’achat d’impulsion est d’autant plus favorisé que l’utilisateur est à proximité du magasin. Des offres se lancent en parallèle de ces bonnes pratiques proposant aux utilisateurs une rémunération en échange de la réception de cinq SMS publicitaires par jour. Le recrutement de la base opt-in s’effectue uniquement par parrainage, chaque personne parrainée rapporte également de l’argent à l’utilisateur tous les mois298. Avant d’étudier les nouveaux leviers de création de trafic disponibles liés aux smartphones, nous allons nous attarder sur la notion de ROPO.

295 Mashable, Starbucks and L’Oréal test location-based SMS coupons in UK, 15/10/10 : http://on.mash.to/xP12Bp 296 Mashable, geofencing texts shoppers, 16/12/11 : http://on.mash.to/A5XcEE 297 Internetretailer.com, Retailers drive more traffic and sales with text messages, 12/05/11 : http://bit.ly/w5SzAe 298 Textcashnetwork.com

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3.1.2/ Le Ropo

Le ROPO (Research Online, Purchase Offline), appelé aussi O2O (Online to Offline), est une notion née récemment qui désigne la part du commerce physique influencé par internet. On parle aussi de « Web to Shop » ou de pré-shopping. Les consommateurs préparent leur achat sur internet, cherchent des avis, visitent le site de la marque et termine leur achat offline. La question a souvent été posée depuis les débuts de l’internet. Comment mesurer la valeur créée par internet ? Comment mesurer l’impact d’une campagne de communication online ? Comment mesurer une campagne de branding ou en tout cas dont l’objectif n’est pas de générer des ventes immédiatement, en post-click ? On connaît le chiffre de l’e- commerce mais quel business est vraiment généré par internet ? Le trafic en magasin de la période de Noël aux Etats-Unis a baissé de 3,1%. Malgré cela, le chiffre d’affaires est en hausse de 3,5%. L’impact du digital dans la préparation des achats semble ici incontestable299.

Google, qui a réussi à imposer la recherche dans l’usage internet des consommateurs de manière massive, cherche également à répondre à cette question. Dans cette optique, elle a proposé la notion de ZMOT, en référence au modèle du « Moment of Truth » de Procter & Gamble. La recherche d’avis et la comparaison des prix sur internet a un impact sur les achats, y compris bien évidemment sur les achats que l’on fait en magasins. Désormais les consommateurs ont la possibilité de préparer leurs achats d’une manière qui est sans commune mesure. Internet a redonné du pouvoir aux consommateurs. Il leur a donné accès à un grand nombre d’informations utiles dans la préparation de leurs achats. Les services de cartographies comme Google Maps, Mappy et le projet innovant Urbandive permettent de localiser des points de ventes locaux sur l’internet fixe. Par ailleurs, qu’en est-il de la localisation des magasins d’une enseigne sur son propre site internet ? Les enseignes de la distribution ont lancé leur site internet depuis longtemps maintenant. Auchan a été le premier en 1997 et la Fnac la première des enseignes spécialisées en 1998. La concurrence entre le magasin online et le réseau de magasins physiques a longtemps été un sujet de crispation. Le dialogue entre le commerce immatériel (clic) et le commerce en dur (mortar) est toujours difficile. Les responsables de magasin et les vendeurs commencent à considérer leur site internet marchand comme un allié. Le site permet de préparer la vente, qualifiant le besoin et le client qui entre dans le magasin est ainsi plus précis dans sa demande et son besoin. Par ailleurs, le site internet peut amener de nouveaux clients en points de ventes. En effet, les « click and mortar » ont intégré des « store locator » sur leurs sites marchands permettant aux utilisateurs de trouver le magasin le plus près de chez eux.

Un certain nombre de sites de promotions sur internet référencent les offres des magasins online mais aussi physiques, renvoyant vers le catalogue dématérialisé. C’est le cas de Prixi, Promoalert.com et Cityzen box par exemple. Des campagnes publicitaires sur internet se mettent également en place avec pour objectif de créer du trafic en magasins. L’offre de réduction est valable uniquement en magasins. The Body Shop a lancé une campagne en affiliation avec Netaffilation sur ce modèle300. Des projets

299 Soppertrak.Com, Holiday season saw more retail sales, but fewer in-store shoppers, 16/01/12 : http://bit.ly/J4gsmu 300 Ropo.fr, Exemple d’affiliation pour le client ROPO, 24/02/12 : http://bit.ly/Atike6

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entièrement dédié à la création de trafic offline naissent sur internet. C’est le positionnement du site Weartheshops.com, spécialisé sur le prêt à portée, qui propose aux internautes de consulter les produits et les stocks des points de ventes référencés. L’internaute n’a aucune obligation d’achat et peut demander au point de vente de lui mettre de côté un article. Le business model est à la performance, le site n’est payé qu’au trafic physique envoyé, de la même manière qu’un comparateur de prix ou d’un affilié sur internet. La start-up lance bientôt son application mobile, vise 800 000 visiteurs uniques et 500 points de ventes référencés fin 2012301.

Alors que les pures players ont de faibles marges (Amazon réalise 0,8% de taux de marge après huit ans de pertes) les « click and mortar » ont tout à gagner à jouer la carte de leur réseau physique. La notion de cross canal devient un sujet prioritaire. En effet, au-delà de vendre, le site d’une marque devient le centre de la relation client et permet de renforcer les liens avec ses clients. a ainsi créé 10 000 pages sur Facebook, une par magasin. Le directeur général de Fnac.com nous apprend que ses clients « multicanal » dépensent 30% de plus que ceux qui ne visitent que les magasins302. L’étude benchmark groupe sur le e-commerce de 2011 compare les taux de transformation des sites marchands entre les pures players et ceux qui ont un réseau de distribution. Les pure players ont un taux de transformation supérieur aux « clic and mortar ». Voilà une bonne indication de l’effet ROPO, les visiteurs du site internet d’une enseigne peuvent préparer leurs achats, s’informer sur des produits pour finaliser leur achat en magasin. Sven Lung, président de Brand Alley explique que seulement un internaute sur dix achète sur le site et que le reste va découvrir les produits en magasin physique pour acheter. Le site réfléchit actuellement à mettre en place des dispositifs digitaux et notamment mobile pour accélérer cet effet création de trafic en magasin303. Le centre commercial White Rose à Leeds en Angleterre fait tout pour que l’internaute prépare au mieux sa visite physique. Il peut vérifier les horaires, planifier son itinéraire et faire des recherches de disponibilité de produits sur place via l’application mobile304.

Les acteurs historiques de la vente à distance ont de bons taux de conversion sur internet. On peut y voir là l’impact du catalogue papier. Depuis peu, les enseignes ont mis en place un nouveau service d’achat online mais sans livraison, avec retrait en magasin, une sorte de « Order online, pick-up offline ». CDiscount a 15 à 20% de ses clients qui achètent online et qui vont retirer leurs achats dans les points de vente du Géant Casino (Source LSA Avril 2011). Le concept va être déployé avec toutes les enseignes du groupe pour représenter au total 8 000 points de vente. La synergie entre offline et online a enfin lieu. Auchan a par exemple réalisé une opération intéressante fin 2010. Il s’agissait de promotions disponibles uniquement sur son site internet à partir de 22h00, quand les magasins sont fermés, et le consommateur avait le choix de se faire livrer ou bien de retirer sa commande lui-même en magasin. L’opération a été relayée en radio, par courrier publicitaire et par emailing… On a ici une campagne publicitaire qui renvoie donc sur le site internet de l’enseigne et qui amène ensuite les consommateurs sur le point de vente305.

301 Frenchweb.fr, WeAreTheShops, le pré-shopping d’articles en magasin, 23/04/12 : http://bit.ly/I9DPfG 302 Fevad, La fin de l’e-commerce, page 53 303 Itrtv.com, La guerre de demain, rabattre du trafic vers le physique, 06/04/12 : http://bit.ly/IgJVxi 304 Internetretailing.net, Shoppers can now serach a shopping center online to find product they want, 05/04/12 : http://bit.ly/HR19k3 305 Ropo.fr, Auchan confirme la complémentarité du off et du online, 28/11/10 : http://bit.ly/huE7LO

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Alors que les courses représentent « une corvée » pour 60% des ménages français (source TNS Sofres 2011), le « Drive » connaît un essor certain. Il s’agit d’acheter sur le site internet d’une enseigne et d’aller chercher sur le point de vente sa commande au lieu de se faire livrer à domicile. La livraison à domicile existe depuis plus de dix ans mais reste une niche (0,2% de parts de marché selon Kantar World Panel). En effet, le service est pénalisé par des frais de livraison importants mais est restreint en termes de zone géographiques. Le drive résoud de fait ces deux freins et va très certainement toucher une cible bien plus large. Kantar estime son potentiel à plus de 6% de parts de marché et 4,5 millions de clients d’ici fin 2015 au fur et à mesure que les enseignes mettront en place ce dispositif306. On compte à fin 2011 environ 900 drives installés. C’est Système U qui en compte le plus avec 431 drives, ensuite Leclerc et Casino. Cette nouvelle manière de faire ses courses a tous les atouts pour s’installer durablement. Les avantages sont évidents : faciliter l’achat de produits courants et lourds à porter, mieux contrôler ses dépenses et gagner du temps. Plusieurs panels pour suivre le Drive existent, notamment ceux de la société Parabellum et Lesitemarketing. La société Proxi-Business propose une solution intéressante pour aider les distributeurs dans leur préparation de commandes en points de vente. Le logiciel Proxy-Picking modélise le point de vente, géolocalise les produits par PDA et optimise l’itinéraire à suivre pour les préparateurs de commandes dans les rayons. Le logiciel est interfacé avec la plupart des plateformes e-commerce et Leclerc, Carrefour Market et Intermarché l‘utilisent déjà307. Carrefour a par ailleurs lancé une application mobile « Mon panier Carrefour city » dédiée aux achats online sur mobile avec retrait en point de vente 2h après avec identification par SMS (en test uniquement au magasin de la Gare Saint Lazare). L’enseigne Mc Donald’s vient de sortir son site web et son application de commande intégrant le paiement, GoMcdo, en test dans 30 sites sur 1 200. L’application mobile intègre un lecteur de QR codes pour interagir avec les campagnes d’affiches locales308. Quoi de plus naturel que de commander son menu, dans le bus, 10 minutes avant d’arriver au restaurant pour gagner du temps ?

Certaines enseignes vont plus loin encore. C’est le cas de Casino qui a lancé la plateforme sociale CVOUS309. L’objectif est d’établir un autre type de relation en ligne avec ses clients. Les internautes sont ainsi invités à participer dans le choix d’implantation des magasins mais aussi dans l’achalandage des magasins existants. Cette ouverture aux clients ferait plaisir à Jeff Jarvis qui dans son livre La méthode google incitait chaque industrie à imaginer ce que ferait Google à leur place. Nous avons tous notre magasin de proximité préféré. Or il y a toujours un produit qui n’y est pas référencé. Pouvoir le dire à l’enseigne, le partager avec d’autres acheteurs permettrait peut-être de faire changer les choses. Walmart a réalisé une opération de communication similaire avec le concept « Get on the shelf ». Les internautes sont sollicités pour trouver dix idées de produits nouveaux et poster une vidéo de leur concept. Sur la base d’un voting similaire à l’émission American Idol, les internautes choisiront les dix meilleurs projets et les gagnants se verront attribuer une somme d’argent pour fabriquer et vendre leurs produits sur le site de Walmart et dans ses magasins physiques310. La synergie entre online et offline est ici anecdotique mais l’idée est là. Le site internet génère une différenciation, un lien à la marque et est capable de renvoyer du

306 Emarketing.fr, Le drive booste les achats alimentaires sur internet, 11/04/12 : http://bit.ly/IjrerL 307 Frenchweb, Proxi-Business lance l’aide à la préparation de commande, 16/09/11 : http://bit.ly/zRqIWI 308 Servicesmobiles.fr, GoMcdo, la fonction de paiement sur mobile, 03/04/12 : http://bit.ly/I37aeK 309 Atelier.net, Pour Casino, les leviers d’engagement sont la co-création et le local, 07/03/12 : http://bit.ly/xFab9X 310 E-marketing.fr, WalMart invente la creation participative en magasin, 29/03/12 : http://bit.ly/HNMpFs

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trafic dans les points de vente de l’enseigne. Ce changement d’optique sur les objectifs d’un site internet ne touche pas que les distributeurs. Une étude comScore en association avec Accenture et dunnhumbyUSA a montré l’impact de la présence online sur le comportement en magasin physique pour les marques de CPG (Consumer Packaged Goods). Les consommateurs qui visitent le site régulièrement dépensent 37% de plus que ceux qui ne visitent pas le site internet311.

Qu’en est-il des distributeurs qui n’ont pas de site internet ? La société eBay souhaite devenir leur partenaire et un acteur central du commerce. La société est déjà un poids lourd de l’e-commerce avec son site de petites annonces, son service de paiement Paypal et ses logiciels e-commerce. Elle a racheté la plateforme GSI commerce pour 2,4 milliards de dollars, utilisée par Ralph Loren et Toys’Rus par exemple. Magento a été rachetée pour 180 millions de dollars et est utilisée par plus de 60 000 e-marchands comme Nokia et Lenovo312. Pour se positionner sur le commerce traditionnel, la société a racheté Laser, un service qui permet de scanner des codes-barres. Elle a également acheté la société Milo en 2010 pour 75 milliards de dollars, un service de local shopping qui permet de rendre accessible le stock de produits physiques d’un magasin aux utilisateurs d’ebay sur internet fixe et sur mobile. Milo a des accords avec 140 chaînes de magasins aux Etats-Unis, cela représente 52 000 magasins et 3 millions de produits313. Leur slogan est explicite « find it online, buy it in-store ». eBay souhaite ainsi aider les petits commerces locaux à trouver des acheteurs sur internet. Les recherches effectuées à partir de l’application iPhone RedLaser vont intégrer ces produits dans leurs résultats. Twitter est un service de micro-blogging de 140 caractères et compte à ce jour plus de 465 millions de comptes. La question de sa monétisation s’est longtemps posée et les tweets sponsorisés peinent à décoller. La société a annoncé un partenariat important avec American Express qui pourrait tout changer. Il suffit de connecter son compte Twitter à sa carte Amex pour bénéficier de bons de réduction. Des enseignes comme Best Buy, Mc Donald’s, Zappos.com, Whole Foods Market proposent un bon de réduction à leurs clients ; pour en bénéficier il suffit de Twitter le hastag de l’opération et le montant sera déduit lors du paiement online ou offline314. Ce nouveau levier pour diffuser une offre promotionnelle semble tout à fait prometteur. Le seul problème est que Twitter n’a en France qu’environ 5,2 millions d’utilisateurs et que par ailleurs la France est plutôt utilisatrice de son concurrent, Visa. Nous venons de décrire quelques synergies possibles entre un site internet et la distribution physique. Or, la même chose et peut être plus encore est désormais possible avec le smartphone.

3.1.3/ Les applications de promotions

Briann Dunn, CEO de Best Buy, avance que 77% des acheteurs mobile viennent retirer leur commande en magasin physique315 ! La chaine de pharmacie américaine Walgreens permet à ses clients de renouveler leurs médicaments en les scannant avec une des 5 applications mobiles de l’enseigne selon

311 Comscore.com, Correlation between CPG Brand website usage and in-store purchase behavior, 30/01/12 : http://bit.ly/z8DZci 312 Techcrunch, ebay acquired magento for over 180 millions but not everyone is smiling, 23/06/11 : http://tcrn.ch/z98xsR 313 CNET, eBay buys Milo to unite online, offline shopping, 03/12/10 : http://cnet.co/xvTxts

314 Americanexpress.com, Communiqué de presse du partenariat Twitter, 06/03/12 : http://bit.ly/AnNVUz 315 Fiercemobilecontent.com, eBay : half of all consumers access web durint the shopping experience, 27/12/02 : http://bit.ly/zlANQ0

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le terminal utilisé316. Une fois l’achat réalisé, 2 millions de clients ont souscrit au service de SMS afin d’être informés qu’une commande est prête ou pour recevoir des alertes sur l’épidémie de fièvre317. La plupart des distributeurs ont désormais lancé leur application. L’application Monoprix, qui a été développée par l’agence Marvellous, propose d’acheter directement sur le mobile mais pas seulement. L’application permet une expérience continue entre le mobile et le site internet : une liste de course, des promotions, la validation de l’horaire de livraison préférée. Ces services complémentaires sont autant de manières de fidéliser et d’augmenter le panier moyen de ses clients existants. Le fait de leur proposer une application à télécharger permet également d’établir une relation directe et de pouvoir leur adresser des messages par notification. Leclerc est le plus actif avec 7 applications disponibles, proposant chacune un service différent. Leroy Merlin a lancé une application intéressante qui permet de repeindre virtuellement un mur de son domicile. L’utilisateur prend une photo, navigue dans les 289 couleurs du nuancier, sélectionne une couleur et l’applique sur la photo318. Ce type de service à forte valeur ajoutée est la clé d’une application qui a du sens et renforce le lien à la marque. Par ailleurs, l’application est idéalement intégrée à la stratégie CRM de l’entreprise, notamment au moyen de la notification. Les push notifications sont des messages poussés sur les smartphones des utilisateurs qui en ont donné leur accord en installant une application. Une enseigne peut ainsi mettre en place un programme de push personnalisé (offre promotionnelle, heure de la journée, disponibilité produit, fidélisation…)319. La notification présente de très bons taux d’ouverture et permet un espace d’expression plus riche. Elle peut renvoyer vers un site mobile ou ouvrir une application. Certaines régies publicitaires proposent d’ailleurs aux éditeurs de monétiser leur base opt-in d’utilisateurs en leur poussant des offres tierces. La société Surikate a même développé un système qui pousse une campagne en affinité avec l’utilisateur en scannant son parc d’applications installées, une campagne publicitaire de notification comportementale en somme ! Un autre très bon exemple d’intégration du mobile est Starbucks. L’application permet de localiser le point de vente le plus proche, de personnaliser sa commande, de se renseigner sur les différents cafés proposés. Une 2ème application permet de créditer son compte, de payer en scannant à la caisse et de suivre ses points de fidélité320. La société déclare avoir procédé à 42 millions de paiement sur le mobile en 15 mois321. Au-delà de ce que peut proposer une marque sur son application pour créer du trafic en magasin, elle peut nouer des partenariats avec des applications spécialisées dans les bons plans.

Shopmium a levé 1,6 millions d’euros auprès d’Accel Partners et d’isai avec une offre pertinente à destination des marques ou des distributeurs. Le profil des fondateurs est intéressant car ils viennent à la fois du digital et de l’univers de la grande consommation. Cette application propose la dématérialisation du coupon : le coupon est distribué sur le mobile et n’a plus besoin d’être présenté en caisse. L’utilisateur scan avec son mobile son ticket de caisse où figure le produit sur lequel il a une offre et l’envoi à shopmium qui le rembourse par virement bancaire ou sur son compte paypal dans les 24h. Plusieurs marques comme Michel & Augustin, GÜ ou Nuxe ont déjà lancé des opérations. La typologie de produits

316 Techcrunch, Walgreen’s Refill by sca app makes it easy to get your fix, 23/03/11 : http://tcrn.ch/wytjxG 317 Slideshare, Walgreens’s mobile strategy : http://slidesha.re/zGTPsC 318 Video de l’application Leroy Merlin, realisée par l’agence Keyneosoft, 2010 : http://bit.ly/xRQcE3 319 Techcrunch, Shopping alerts to retailers smartphone apps, 22/08/11 : http://tcrn.ch/AeCY5T 320 Starbucks.com, Mobile applications : http://sbux.co/yipbjD 321 Venturebeat.com, Starbucks apps account for 42M mobile payment, 09/01/12 : http://bit.ly/HQFqde

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concernés est plutôt les produits en lancement afin de faire découvrir, via une promotion, une nouvelle marque, un nouveau parfum ou conditionnement. La seule faille à cette mécanique est l’information de la disponibilité des produits, qui n’est pas communiquée aux utilisateurs. Ceux-ci sont informés des magasins autour d’eux distribuant « théoriquement » le produit en question, mais le produit peut être soit non disponible soit non distribué, en fonction des réseaux de distribution où le référencement est centralisé ou au niveau local. Je renvoie les lecteurs à l’interview d’Aurélie Labonne, community manage, disponible sur internet322.

SoCloz propose un service de localisation et de disponibilité des produits. Elle a déjà passé des accords avec 50 enseignes représentant environ 550 000 références produits uniques dans environ 5 000 points de vente. Pour se faire une idée du marché et de sa concentration, son fondateur estime le nombre de commerces de proximité à environ 300 000, dont la moitié qui référence des produits. 1 112 enseignes représenteraient 84% des ventes de détail dont 700 étant des réseaux intégrés323. L’application Shopping adventure propose la même expérience de trouver un produit disponible près de soi que cela soit via le mobile ou l’internet fixe. Le service se consacre aux vêtements et a noué des partenariats avec Promod, Etam, Bérénice, Best Moutain qui ont accepté d’ouvrir leurs données324. Plyce, qui était positionné à son lancement en 2010 sur le check-in social, s’est repositionné depuis sur la promotion de proximité et le coupon325. Sa fondatrice Sandrine Dirani explique que 90% des check-ins sont masculins et donc difficilement compatibles avec les lieux les plus facilement monétisables, les lieux de shopping. L’offre de coupons géolocalisée est donc maintenant le cœur de métier de Plyce. Une opération exclusive a été réalisée par exemple avec l’enseigne BATA. 16% des personnes qui ont cliqués se sont rendus en magasins. Un couplage de différents leviers a été réalisé pour maximiser l’impact de l’opération avec le blog de Plyce, sa page Facebook et sa newsletter326.

Shopkick est l’application à suivre. Fondée en 2009, elle a déjà 3 millions d’utilisateurs aux États-Unis et des accords avec des enseignes et des marques de renoms (Best Buy, Toys’R’Us, P&G, Kraft, Disney, HP). La société déclare avoir généré 110 millions de dollars en 2011. Elle a enregistré 5 millions de visites en magasin, 12 millions de produits scannés327 dans plus de 3 000 points de ventes aux Etats-Unis. Comment expliquer un tel succès ? Les utilisateurs sont rétribués avec des points (kicks) pour leurs venues et leurs interactions dans le magasin comme le scan d’un produit. Ces points sont bien sur échangeables par la suite contre des réductions en points de vente physiques ou en Facebook crédits. Par ailleurs, ils n’ont pas besoin de réaliser un check-in en arrivant dans le point de vente, ils sont automatiquement reconnus grâce à une technologie installée dans le magasin. Déjà présent dans une dizaine de villes importantes aux Etats-Unis, la société offre son système de tracking aux 1000 premières enseignes qui se présenteront. L’enseigne a une grande liberté pour définir les actions à réaliser pour obtenir des kicks et se voit rétribuer une partie des points que les utilisateurs gagnent328. Un partenariat du

322 Vincenttessier.fr, Interview de Shopmium, 27/02/12 : http://bit.ly/Afk0EE 323 Frenchweb.fr, SoColz, l’assistant shopping 2.0, 25/11/11 : http://bit.ly/xBUaiL 324 Frenchweb.fr, Shopping adventure, le shopping intelligent 2.0, 21/09/11 : http://bit.ly/xnLW19 325 Techcrunch.fr, Plyce tourne le dos au checkin social et se concentre sur les coupons, 28/02/11 : http://bit.ly/zPfw8H 326 Interview de Sandrine Dirani, co-fondatrice de Plyce, http://dai.ly/wiRSSg 327 Techcrunch.com, We helped drived more than $100M in 2011, 31/01/12 : http://tcrn.ch/xaFO9P 328 Openforum.com, How local merchants can use Shopkick to win new customers, 28/02/12 : http://bit.ly/zPWhzG

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nom de « Buy & Collect » a été mis en place avec VISA afin de récompenser les utilisateurs à chaque achat. Toys’R’Us offre 520 « kicks » pour un passage en caisse de 85 dollars329 en payant avec la carte VISA, préalablement liée au compte de l’application. Cet incentive à l’achat ressemble un peu au cashback sur internet mais avec un aspect ludique très fort et le magasin local en plus.

Un point de vente local a désormais des possibilités de créer du trafic sans forcément développer un site mobile ou une application. Promomee par exemple propose aux commerçants de mettre en place des vitrophanies sur la devanture du magasin avec un Code 2D330. L’utilisateur est invité à gratter l’écran avec son doigt pour découvrir une promotion à valoir en entrant dans le point de vente. Pour faire valoir la réduction, le caissier doit scanner à son tour le mobile du client.

3.1.4/ Mapper le monde réel

Internet a bouleversé le marketing. Il informe le consommateur et lui donne plus de pouvoir, forçant les marques à prendre en compte l’avis de leurs clients. D’une part le marketing de grande consommation évolue d’un marketing de l’offre vers un marketing plus orienté sur la demande et d’autre part la publicité elle-même se voit concurrencée dans son influence par les avis des consommateurs. Les marques doivent apprendre à laisser le consommateur venir à elles, virtuellement et physiquement. Les moteurs de recherche ont dominé internet pendant une douzaine d’années. Jusqu’ici, la localisation n’avait que peu de sens. Tout se passait online, quel que soit le lieu de connexion, l’expérience était la même. Le mobile fait sortir le monde digital de la maison pour aller dans le monde réel (IRL : in real life). Les utilisateurs vont de moins en moins devoir consulter un service de cartographie sur internet avant de sortir faire du shopping. La possibilité de se diriger en mouvement grâce au GPS de son mobile fait augmenter les recherches mobiles mais aussi l’usage des services de réseaux sociaux. Il a apporté avec lui ce paradoxe qu’étant connecté, nous étions également quelque part, et pas juste devant son ordinateur. Nous sommes aujourd’hui perpétuellement connectés. Pour déployer le potentiel du « social media 2.0 », le monde réel a besoin d’une contrepartie virtuelle. Le mobile nous fait désormais percevoir le monde réel au travers d’une surcouche digitale. Pour une entreprise aujourd’hui, ne pas avoir de site internet devient handicapant dans les affaires. Multinationales, entrepreneurs ou chercheurs d’emplois, chacun monte un site « carte de visite » ou un profil professionnel permettant d’être trouvé. Il arrive d’entendre que si vous n’avez pas de présence digitale, vous n’existez tout simplement pas. La présence dans les couches virtuelles du monde réelle va devenir un impératif pour tout business local et commerce physique. Etre présent quand vos clients font une recherche sur Google Maps, Mappy ou Viamichelin devient indispensable. Avec la possibilité d’effectuer cette recherche en situation dans le monde réel sur son mobile, ce travail de référencement est d’autant plus crucial. Google Adresses (Places en anglais et anciennement Google Local Business Center) permet de référencer votre magasin physique dans la base d’adresses de Google331. Il est mis à disposition des marchands un suivi statistique des visites sur la fiche du commerce

329 Mashable, Shopkick and Visa to offer retail store purchase rewards, 21/11/11 : ht/tp://on.mash.to/yaWGT3 330 Promomee.tv 331 http://www.google.com/places/

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référencé. Mappy a récemment lancé un service de cartographie gratuit sur iOS et Android (précédemment payant) qui reprend les adresses des entreprises clientes du groupe Pages Jaunes. Le groupe propose un pack référencement à partir de 9,16€ par mois et pour les magasins qui n’ont pas de site internet ou mobile, le groupe propose de palier à cela pour 39€332. ViaMichelin quant à lui propose un référencement pour 49€ par mois333. Plus la recherche se fait proche du point de vente, plus les chances que l’utilisateur s’y rende effectivement sont grandes. Il peut y avoir deux scénarios. Le premier est quand un client recherche un magasin précis, la base de points de vente de l’enseigne doit être parfaitement renseignée dans les services de cartographie du marché. Le deuxième scénario est quand un client se géolocalise dans un lieu qu’il connait, le point de vente le plus proche doit apparaître ou lui être signalé afin de créer une opportunité de visite. Une fois géolocalisé sur le lieu du commerce, n’importe quelle interaction est possible : réaliser un check-in, prendre une photo du lieu, consulter si un ami est passé par là… Les magasins ont désormais des représentations digitales qui sont des balises leur donnant une réalité dans le monde digital.

Pyramide des services de géolocalisation :

Source : The Solomo manifesto by momentfeed

Cette représentation graphique de Momentfeed permet de prendre la mesure des différents acteurs se positionnant sur la géolocalisation et les « LBS » (Location Based Services). Les services se développent mais quand est-il de l’usage ? Le rapport Data Passport de comScore indique que 4,4 millions d’anglais utilisent un service de localisation et de check-in. En France, c’est 1,9 millions d’utilisateurs.

332 Business Center : Boutique.pagesjaunes.fr 333 http://local.viamichelin.com/

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Part des utilisateurs utilisant le check-in :

Source : comScore Data Passport 2011

Jusqu’à présent les check-ins étaient naturels. Il y a un usage naturel et spontané de la base d’utilisateurs (UGC) que l’on peut qualifier de « earned media » : la création des lieux, les check-ins, les avis… La tendance de fond du partage est bien présente : les utilisateurs souhaitent dire à leurs amis qui ils sont en leur communiquant où ils vont. Pour autant, la tendance du check-in peut rapidement s’épuiser et rester l’apanage des « early adopters » si cet effort n’est pas récompensé. Le check-in doit m’apporter quelque chose au-delà de dire où je vais comme par exemple de voir qui est venu au même endroit, quels commentaires ont été laissés ou enfin pour bénéficier d’une promotion. La question à laquelle doivent répondre les marques est : comment faire que mes clients réalisent des check-ins dans mes magasins ? Il s’agit d’encourager leurs clients à réaliser un check-in et par là même à se déplacer dans un magasin ou même dans une zone précise d’un magasin. Ces nouvelles données sont précieuses car elles permettent aux marques de mieux mesurer la fidélité d’un consommateur au regard du nombre et de la fréquence de ses check-ins. Foursquare propose une série de mécanique permettant aux marques d’animer leurs points de vente. Le « loyalty special » permet de récompenser la fidélité des clients. Le « Mayor special » quant à lui récompense spécifiquement le Maire d’un lieu. Enfin, le « Friends special » est une offre qui incite les utilisateurs à réaliser leur check-in entre amis dans un même lieu. Ces offres renforcent la fidélité et l’engagement des clients mais comportent également un volet social et viral important. En effet, chaque check-in ou déblocage de badge est signalé à la base d’amis de l’utilisateur, mais potentiellement sur tous ses réseaux sociaux s’il le souhaite. Pour mettre en place ces opérations, il suffit de revendiquer un lieu sur la page dédié aux marchands « Foursquare for Business »334 (voir annexe 9). Le fondateur Dennis Crowlley avance le chiffre de 600 000 marchants présents sur Foursquare.

Nous allons voir quelques exemples de mécaniques mises en place par les marques pour motiver le check-in. Mc Donald’s a proposé 5 et 10% de réduction aux clients qui réalisaient un check-in dans ses restaurants aux Etats-Unis. L’enseigne a vu le nombre de ses check-ins augmenter avant, pendant (+33%) mais également la semaine suivant l’opération335. Une marque peut également créer son propre badge, embrassant ainsi la tendance du brand content. Audi a proposé un dispositif l’hiver dernier en offrant 20%

334 https://fr.foursquare.com/business/merchants/claiming 335 Foursquare.com, case studies Mcdonalds, 2011 : http://bit.ly/y8hi4N

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de réduction aux personnes ayant débloqué le badge « Audi Winter Ride ». Pour se faire, il fallait réaliser des check-ins dans les 7 lieux de l’opération. Afin d’ajouter un caractère exceptionnel à l’opération, les skieurs de l’équipe de ski américaine ont participé à l’opération en postant des commentaires sur les différentes stations de skis visitées sur la période. Le déblocage du badge de la marque permettait d’obtenir cette réduction de prix sur tous les accessoires de la gamme Audi336. La marque de luxe Hugo Boss a récemment organisé un grand jeu ayant à la clé une journée de shopping dans son magasin de New York, en compagnie d’une star de la mode. Le jeu était ouvert à 4 pays dont la France et les utilisateurs devaient suivre la marque sur Facebook et réaliser un check-in dans une des boutiques participant à l’opération. En France, l’enseigne de restauration Flunch a fortement exploité ces outils. Elle a paramétré son opération sur 3 axes : la création de trafic et la fidélisation de toute sa base tout en récompensant ses clients très fidèles. Le 1er café était offert au premier check-in. Au 3ème check-in, le 2ème plat chaud avait une réduction de 50%. Et le Maire du restaurant bénéficiait d’un tarif préférentiel de 5€ sur tous ses plats. Easy-Jet a réalisé en Janvier 2011 une opération de jeu-concours basé sur la géolocalisation. Pour participer au jeu, il fallait réaliser un check-in Foursquare ou Facebook Places dans des lieux communiqués toutes les semaines dans différentes villes de France. Les interactions et jeux de piste avec le monde réel ne sont pas nouveaux. Les opérations de street marketing existent depuis longtemps mais le smartphone permet d’aller plus loin. Parmi les campagnes virales de 2011, celle de Jay- Z pour la promotion du moteur de recherche Bing a été la plus remarquée. Le jeu de piste imaginé (retrouver des pages de la biographie de Jay-Z, avec des indices à trouver sur bing) a permis d’augmenter l’audience du moteur de 12%337. Foursquare a bien compris la puissance du mobile et a de grandes ambitions. En mars 2011, un partenariat a été annoncé avec American Express. Ils ont lancé ensemble l’opération « Small Business Saturday ». Toute personne qui a réalisé un check-in dans l’un des commerces locaux et dépensé 25$, en payant avec la carte American Express, s’est vu créditer de 25$ sur son compte bancaire338. Le service de carte bancaire a lancé un site appelé « Go Social » afin de permettre à ses clients de relier leurs comptes de réseaux sociaux à leur compte client339. La mécanique supprime tout manipulation de coupons, papier ou digital.

Il existe en Europe, un service bien avancé sur ce sujet avec déjà plus d’un million de téléchargements, il s’agit de l’application Dismoioù fondée en 2007 par Gilles Barbier. L’application est un réseau social qui permet de trouver et de partager les bonnes adresses locales. Racheté fin 2011 par la société Maximiles, spécialiste de programme de fidélisation, le service va ainsi pouvoir rapidement proposer de gagner des points de fidélité en se rendant dans les points de vente partenaires. Cette opportunité de création de trafic a séduit la marque Coca Cola qui a signé un accord structurant avec Dismoioù pour réaliser des opérations de jeux concours ou de coupons régulièrement. Coca Cola va ainsi pouvoir proposer à ses distributeurs des mécaniques supplémentaires de création de trafic et d’animation basées sur le mobile. Une opération a été réalisée avec l’enseigne Subway en Décembre consistant à faire gagner un Pack PlaystationMove

336 Econsultancy.com, Audi Launches Foursquare campaign with US Ski team, 13/01/12 : http://bit.ly/xNEoxf 337 Journaldunet.com, Bing a decodé l’autobiographie de Jay-Z, par Gregory Pouy : http://bit.ly/wRZW41 338 Foursquare.com, Want to get 25$ for spending $25? Of course your do 18/11/11 : http://bit.ly/wdwZx8 339 https://gosocial.americanexpress.com/

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chaque jour aux clients Subway. Pour participer, il fallait être présent physiquement dans le point de vente et gratter une carte virtuelle présente dans l’application mobile Dismoioù340.

Un réseau social Américain est allé plus loin que le simple check-in. Il s’agit de Scavenger « SCVNGR ». Cette plateforme sociale basée sur la localisation propose à ses utilisateurs des challenges à relever. Chaque challenge relevé rétribue l’utilisateur de points permettant d’obtenir des réductions ou des produits gratuits dans les lieux partenaires. Ses fondateurs ont fait le constat que beaucoup d’utilisateurs des services existant alors réalisaient des check-ins incentivés uniquement pour obtenir une promotion et repartaient. L’objectif ici est d’établir un lien plus pérenne et d’augmenter l’engagement. Les utilisateurs sont également encouragés à partager leurs challenges et « rewards » avec leurs amis. Les marques sont encouragées à lancer des challenges à leurs clients. C’est ce qu’ont fait Cathay Pacific ou bien Philips dernièrement. La société a été fondée par un jeune entrepreneur de 22 ans, a levé plus de 20 millions de dollars et compte 120 employés aujourd’hui. En 2011, SCNVGR s’est associé avec le service de paiement mobile par QR Code appelé Level-up et également avec American Express341, très actif sur ce type de partenariat. Le service est encore jeune et d’une taille modeste mais le dispositif mis en place est prometteur.

Deux entrepreneurs Français ont lancé un service proposant également une mécanique de jeu mais orienté découverte produit. L’application Scanbucks propose à ses utilisateurs un tableau de chasse de produit qu’il doit scanner dans un magasin autour de lui, sans aucune obligation d’achat. Un parcours de course de 23 scans fait gagner 177 Scanbucks, permettant d’obtenir par exemple une chanson téléchargeable gratuitement sur Amazon ou de reverser les gains à une association caritative. Le communiqué de presse parle de transformer la grande surface en terrain de jeu. Plusieurs marques se sont associées au service comme L’Oréal Paris, Garnier, Coca-cola, Powerade, Casino, Franprix…

Groupon a racheté en 2011 le service Whrrl développé par la société Pelago, basé également sur l’exploration du monde réel par le check-in, les promotions et le social342. Comme mentionné précédemment, Facebook a racheté le populaire Gowalla mais le service s’est arrêté depuis. Les équipes ont la charge désormais d’introduire ces mécaniques au sein même de Facebook343. Facebook Places a été lancé quelques temps puis arrêté en tant que tel, l’utilisateur n’effectuera plus un simple check-in pour signaler sa position. Par contre, il pourra ajouter sa position géographique à n’importe quel statut, l’idée étant d’enrichir la donnée géographique de commentaires et donc de sens. L’application permet toujours de rechercher des amis, des lieux ou des offres se situant à proximité. C’est bien la force et en même temps la faiblesse des offres localisées aujourd’hui. La découverte d’une promotion est basée sur la sérendipité, un utilisateur ne peut pas prendre connaissance uniquement des offres des enseignes se situant autour de lui. Un utilisateur ne peut donc pas prévoir un déplacement en fonction d’une offre bien précise. Du côté du marchand, il ne peut pas vraiment prévoir la venue de ses clients. C’est la raison pour

340 Dismoiou.fr, Coca Cola et Dismoioù s’associent pour la réalisation d’opérations marketing géolocalisées innovantes, 19/12/11 : http://bit.ly/yRlvlh 341 Allthingsd.com, American Express tests another location-based platform : SCVNGR, 09/05/11 : http://dthin.gs/xgO4ws 342 Techcrunch.com, Groupon acquires Whrrl creator Pelago, 18/04/11 : http://tcrn.ch/A2iaqT 343 Lemonde.fr, Facebook achète le service de géolocalisation Gowalla, 06/12/11 : http://bit.ly/xpR1bl

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laquelle plusieurs services se sont lancés sur le « preemptive check-in ». L’utilisateur réalise un check-in à l’avance et signifie ainsi qu’il s’apprête à se rendre quelque part. Des applications comme Forecast, Uberlife, Ditto, Arrived, hotlist et Crowdbeacon sont basées sur ce concept344. Compte tenu du fait que Google a fait sa fortune sur de la publicité en situation d’achat, la recherche sur internet, le concept a de belles perspectives devant lui. Présenter une bannière ou une notification à un utilisateur qui prévoit de se rendre dans un centre commercial où une marque distribue ses produits semble pertinent. Ces services sont de formidables outils pour les marques qui pourront via des « trend setters », influencer de manière plus sociale et mobile leurs consommateurs.

Au-delà des applications et services indexant les lieux physiques, une autre tendance fait beaucoup parler d’elle : la réalité augmentée. Il s’agit d’enrichir la perception du monde réel en affichant sur l’écran du téléphone des informations en surimpression. En France, la RATP propose avec l’application Metro Paris lancée en 2009 un service innovant proposant d’ajouter des points d’intérêt (POI) à la base de données répertoriant les stations de métro. L’utilisateur peut ainsi brandir son téléphone sur la réalité et visualiser la distance qui le sépare de ses magasins préférés et la direction à prendre pour s’y rendre.

L’application Metro Paris de la RATP :

D’autres projets vont encore plus loin. Booyah, crée par un ancien producteur de World of Warcraft pousse la « gamification » à son extrême : le monde réel. Le service est un monopoly virtuel avec de vrais lieux physiques dans lesquels les utilisateurs peuvent faire des check-ins, réaliser des challenges, inviter leurs amis… Il s’agit de « créer la ville de vos rêves remplie de vos endroits favoris dans le monde réel ». La signature de la compagnie est « Where you play matters ». Les partenariats avec des enseignes importantes comme H&M, Disney, Subway, Adidas sont déjà signés.

Ces nouveaux services vont rapidement produire un nombre de données de localisation très important. Au même titre que les éditeurs web commencent à percevoir la valeur de leurs data et à la monétiser de manière anonyme ou transparente avec des sociétés spécialisées comme eXelate, les enseignes de distribution physique pourront bientôt tirer des revenus des données de sorties caisse. La société Sense Networks, fondée en 2006, s’est donné comme mission de récolter toutes les données de localisation

344 Mashable.com, The rise of preemptive checkin, 17/03/11 : http://on.mash.to/zdTB3H

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partagées par les utilisateurs345. The Weather Channel propose d’optimiser le choix des produits soldés du week-end en fonction des données météo346. Des sociétés comme Kenshoo et Proclivity Media proposent de fusionner les données venant du offline (check-in foursquare, paiement avec Google Wallet, données magasins.) et du online afin d’améliorer les performances des campagnes digitales.

Avec ces nouveaux usages et services, les marques devront considérer comme prioritaire le référencement de leurs points de vente sur les différentes plateformes. Leur réseau de points de vente doit prendre corps dans l’univers digital afin d’être présent là où les consommateurs sont aujourd’hui. Ils étaient hier devant leur poste d’ordinateur, ils sont aujourd’hui dans la rue. Mais un point de vente peut désormais demeurer invisible à leurs yeux s’il n’a pas de présence digitale.

3.2/ Une expérience en magasin transformée

Les clients sont de plus en plus nomades dans leurs équipements, deux chiffres de l’étude Bearing Point / TNS Sofres « La relation client nomade » pour l'illustrer : 21% des équipés smartphone ou tablette numérique l'ont déjà utilisé pour réaliser un achat en ligne et 40% se sont déjà connectés à Internet en magasin pour comparer leurs informations avec celles du vendeur347. Le mobile introduit dans l’expérience d’achat un certain nombre de possibilités nouvelles plus ou moins développées aujourd’hui. Nous allons en étudier quelques-unes dans ce chapitre.

Les différentes interactions mobiles en magasin, vue par GS1 :

345 CNN, interview de David Petersen, CEO, 27/07/11 : http://cnnmon.ie/yPYEd9 346 Mediapost.com, Online, Offline Data Ad Platforms emerge, 21/03/12 : http://bit.ly/GN6iWu 347 Tns-sofres.com, 8ème Edition du Podium de la relation client, 08/06/11 : http://bit.ly/HZoijQ

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3.2.1/ La comparaison des prix

L’institut américain Pew Research a mené une étude sur la période de fin d’année et avance que 52% des possesseurs de téléphone l’ont utilisé en magasin, que cela soit pour appeler un ami, comparer les prix ou rechercher un avis348. En France, ce sont 48% des utilisateurs qui déclarent utiliser leur smartphone en point de vente selon comScore349. Mathieu Morgensztern, Président de Digitas France, a fait remarquer lors de la conférence « Online to Store » organisée par la régie publicitaire d’Orange qu’un consommateur qui rentre dans un point de vente n’est plus acquis. Les clients sont de moins en moins sous l’influence des vendeurs et les taux de transformation pourraient baisser rapidement. David Staas, VP Marketing de Jiwire, pense que les nouvelles manières de communiquer directement entre les marques et les consommateurs présentent un vrai risque de transformer les magasins en showroom350.

Etude Pew Research : 25% des américains comparent le prix des produits en magasins.

L’étude montre que la comparaison des prix en magasin avec l’aide d’un mobile est plutôt réservée aux jeunes hommes urbains. Néanmoins, l’usage a de grande chance de se répandre rapidement à toutes les classes d’âge. On constate que malgré le fait de comparer le prix, 35% ont bien acheté leur produit dans le point de vente contre 19% l’ayant finalement acheté online. En France, Digitas a lancé récemment le baromètre de l’expérience marchande connectée. Cette étude révèle que 50% des consommateurs utilisent leur mobile pour faire leurs courses. Par ailleurs, 70% déclarent se rendre en magasin pour acheter en ligne ensuite, ce qui renforce la crainte de beaucoup de responsables de magasin de devenir de simples showrooms. Pour Vincent Druguet de Digitas : « les marques qui gagneront demain sont celles qui sont actives et qui pensent commerce connecté dès aujourd’hui »351. Le challenge est de taille, surtout quand certaines études montrent également que les consommateurs préfèrent utiliser leur smartphone que

348 Pew research, The rise of in-store mobile commerce, 1 000 personnes interrogées, 30/01/12 : http://bit.ly/w1mElx 349 comScore, MobiLens, three month average ending October 2011 350 Streefight, 34% of in-store consumers compare prices on mobile devices, 15/02/12 : http://bit.ly/yj0ruh 351 E-marketing.fr, 50% des mobinautes font leurs course avec leur smartphone, 26/01/12 : http://bit.ly/H1px1G

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de parler à un vendeur (Etude Nielsen / Yahoo)352. Les applications de comparaison des prix se développent fortement. Nous évoquerons ici seulement les plus importantes.

Il faut bien évidemment citer en premier Amazon qui est très présent et qui propose une grande souplesse en termes d’option de livraison. L’application permet de scanner le code barre, de prendre une photo ou de faire une recherche par la voix. Fin 2011, une opération de promotion à l’occasion de la sortie sous Android de son application a fait trembler les enseignes. La société a proposé à ses clients une réduction de 5% aux utilisateurs de son application « Price check » pour tout scan d’un produit en magasin finalement acheté dans les 24h sur Amazon. Non seulement l’opération a fait la promotion de l’application mais a permis également de récolter des donnée sur les prix pratiqués par les magasins physiques. Les enseignes ont bien sur vivement réagi car elles ont jugé la pratique anti-concurrentielle, la structure de coût d’un pure player n’ayant rien à voir avec un magasin physique, les prix pratiqués sont très souvent inférieurs. Amazon a eu très mauvaise presse mais son application s’est ainsi fait connaître par des milliers de nouveaux consommateurs…Pendant ce temps-là, une application de recherche par réalité augmentée a vu le jour dans l’Apple store : « Flow Powered by amazon ». Plus besoin de scanner le code barre ou de prendre une photo, il suffit de survoler le produit avec son téléphone pour voir apparaître en surimpression le prix pratiqué sur Amazon353.

L’application shopsavvy est l’une des plus connues. Son CEO Alexander Muse parle d’armer les consommateurs avec plus d’informations afin leur permettre de réaliser plus d’économies. Les 20 millions d’utilisateurs de l’application déclarent économiser 25$ par trimestre. Shopsavvy offre la possibilité de scanner un produit ou de le prendre en photo en magasin afin de lancer une comparaison de prix. Les prix sont comparés avec les distributeurs onlines mais aussi avec d’autres enseignes physiques. L’application permet même de voir si le produit est encore en stock et d’appeler le magasin en question en un clic. La communauté est importante et les utilisateurs créent volontiers la fiche d’un produit pas encore présent ou y ajoute des avis et des commentaires. Mais l’application va plus loin : certaines enseignes (Best Buy, Sears) ont accepté de jouer le jeu de la comparaison et acceptent de baisser le prix si un consommateur trouve moins cher sur l’application. Chaque enseigne peut poser ses conditions. Généralement, la comparaison est acceptée uniquement avec d’autres « clic and mortar » et non avec des pures players comme Amazon. Shopsavvy inclut la liste des enseignes acceptant la comparaison. Le service fonctionnait historiquement comme un comparateur de prix online, elle renvoyait le consommateur vers le site mobile du marchand. Un accord a été passé avec Groupon et l’application propose également des deals locaux. Elle inclut également un mode de paiement pour acheter un produit scanné sur le site d’un marchand ou d’un pure player mais sans quitter l’application354. Shopsavvy Wallet n’est pas un mode de paiement en tant que tel, l’application sauvegarde les informations de paiement et de livraison et les transmet aux marchands. 40 000 enseignes ont déjà référencé leur catalogue, la procédure est simple et disponible sur

352 Source Nielsen / Yahoo « Mobile shopping framework study » January 2011 and lightspeed research for Accenture, June 2010 353 Communiqué de presse, Flow Powered by Amazon App, 02/11/11 : http://bit.ly/H17ryQ 354 Shopsavvy.mobi, Shopsavvy WAllet and Google Wallet compared, http://bit.ly/GOiDAm

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leur site internet355. Le business model de la société est aujourd’hui basé sur de la publicité ciblée. Quoi de plus efficace que de présenter une publicité en situation de recherche mobile avec le produit en main ! eBay avait déjà dans son giron le comparateur de prix online, Shopping.com. L’application Redlaser a été rachetée en 2010. Elle permet d’acheter directement sur le mobile, de cartographier les magasins aux alentours proposant les mêmes produits et de vérifier l’état de leurs stocks. Il est même possible de consulter des informations sur les risques d’allergies des produits. La synergie avec Paypal est également présente, étant donné qu’un produit peut être acheté directement avec son compte Paypal. 15 millions d’utilisateurs ont téléchargé l’application. Redlaser propose même sa technologie en marque blanche à des tiers souhaitant intégrer la comparaison de prix par scan de produits en mettant à disposition son SDK356. C’est ce dont à souhaiter profiter American Express en signant un partenariat avec le groupe eBay. Les clients privilégiés de la marque (Green, Platinum ou Centurion) peuvent télécharger une application embarquant la technologie RedLaser permettant de scanner des codes barre. Le client est renvoyé vers le magasin en ligne d’Amex ShopAmex regroupant de grands noms de marchands comme Target, Saks et Apple357. L’achat sur ce magasin online rapporte des points de fidélité supplémentaire. En France, l’application Prixing s’est lancée début 2011 et a été récemment lauréat lors des « e-marketing Awards ». Avec plus de 300 000 utilisateurs et une base de 7 millions de prix pour 2 millions de produits, l’application propose également de relayer les promotions des magasins sur son site web et son application358. Il faut mentionner également l’application « Qui est le moins cher » de Lerclerc. Elle propose de scanner un produit dans un magasin concurrent et de pouvoir vérifier le prix pratiqué chez Leclerc. Un client en situation ne peut pas commander directement sur le mobile ou voir le prix d’autres enseignes sur l’application. Ainsi, ce n’est pas vraiment une application de comparaison de prix mais plutôt un moyen de renforcer et de prouver son axe de communication. L’enseigne d’électronique Best Buy a investi dans l’application Tecca, spécialisée dans la comparaison de prix de produits high-tech359. Il existe bien sur d’autres applications comme Geocompare , Sentinelo, Bonial, Shopping adventure, Mobiville ou Loopstar que nous nous contenterons de citer.

La bataille historique entre points de vente physiques et e-marchands investit désormais le point de vente. Par le mobile, les e-commerçants espèrent réaliser des ventes supplémentaires quitte à ce que cela soit au détriment des points de vente. De leur côté, les distributeurs physiques ressentent cela comme une intrusion sur leur territoire et considèrent qu’ils ne se battent pas à armes égales. Selon une récente étude de comScore aux Etats-Unis, 52% des « abandons de paniers » physiques seraient dus à un achat du même produit moins cher trouvé sur le mobile360. Mais les consommateurs ne font pas que comparer les prix en magasin. En effet, le mobile peut être un outil de vente notamment en apportant des informations supplémentaires sur les produits.

355 http://shopsavvy.mobi/data-feeds/ 356 http://redlaser.com/developers/ 357 Allthingsd.com, Use your Amex, scan a barcode, get and ipod? 13/12/11 : http://dthin.gs/HoPJRy 358 Techcrunc.com, Prixing, le comparateur de prix nouvelle génération, 22/04/11 : http://bit.ly/GSnTjT 359 Readwriteweb.com, Best Buy funded Tecca launches new comparison shop, 22/09/10 : http://rww.to/H1Qxv2 360 comScore US smartphone user survey, 7/11, cité dans KPCN Internet Trends 2011

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3.2.2/ Le packaging étendu

Le terme de packaging étendu désigne la possibilité que les marques ont aujourd’hui d’apporter plus d’informations aux consommateurs sur la même surface d’emballage du produit. Il y a trois technologies permettant une interaction avec un produit, le NFC (Near Field Communication) avec une étiquettes produits équipés de RFID, les codes 2D et la reconnaissance d’image. Nous traiterons ici uniquement les deux dernières, le NFC sera traité dans cette étude uniquement sur son aspect paiement mobile. Selon l’étude MobiLens de comScore, 2,2 millions de Français scannent des codes 2D. L’action déclenchée peut être de renvoyer vers une URL, de déclencher un appel ou bien d’effectuer un paiement… L’interaction ainsi créée peut avoir plusieurs objectifs : donner plus d’information, illustrer l’utilisation du produit par une vidéo, comparer les prix, récolter des données, offrir une réduction etc Le seul fait de pouvoir donner des informations supplémentaires sur le produit semble en soi une opportunité pour les marques. Les consommateurs souhaitent de plus en plus savoir où sont fabriqués les produits et ce qu’ils contiennent. La mondialisation de la production ainsi que la complexité des processus de fabrication ne facilitent pas la lisibilité des produits aux yeux du consommateur. Expliquer, informer, rassurer sont essentiels pour les marques, les réseaux sociaux le montrent tous les jours. Aujourd’hui, les marques ont la possibilité d’aller au-delà de leurs canaux de communication habituels pour dialoguer avec leurs clients au moment où c’est le plus important, en situation d’achat. Des informations sur l’origine des produits, les valeurs nutritionnelles, allergiques environnementales, d’utilisation (recette de cuisine), des recommandations (« vous aimerez aussi »), et des valeurs de marque (spot tv corporate) sont autant d’éléments qui peuvent convertir une prise en main de produit en passage en caisse. L’avantage majeur pour les marques est finalement la possibilité de présenter une information à jour, comme une page internet qu’elle actualiserait à sa guise. L’inconvénient de ce procédé réside dans le fait que le consommateur doit se connecter à internet. Pour cela le réseau doit être accessible en magasin et de bonne qualité afin d’offrir une telle expérience. Le code à scanner est une mécanique marketing qui a beaucoup d’avenir. Cependant, il faut reconnaître que l’usage peine à décoller notamment en raison d’une bataille technologique pour la maîtrise du marché. De ce fait, il n’y a pas de normes. Il en résulte bien souvent que l’utilisateur ne sait pas avec quel lecteur il peut lire tel ou tel code. Plusieurs types de code 2D existent : des codes ouverts comme le QR code (Quick Response Code) et Data Matrix et des codes fermés comme les Flashcodes.

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Le code propriétaire Flashcode de l’AFMM a un site dédié qui propose de générer son propre Flashcode361. Beaucoup de sites internet offrent la possibilité de créer un QR code en quelques minutes. Nous citerons Unitag.fr que nous avons utilisé pour réaliser le QR code présent sur la première page de ce document.

Le QR Code est le plus répandu et connu du grand public. Il faut mentionner également un le Bleam 3D, crée en 2011, qui a une performance de lecture plus importante et plus de possibilités de personnalisation graphique362. La méthode utilisée n’a pas vraiment d’importance, QR code ou code EAN, l’important est que le consommateur comprenne qu’il y a là une interaction possible. Le pictogramme n’est donc ici qu’un « call to action » que le consommateur doit reconnaître pour déclencher l’interaction. L’agence Bookbeo par exemple parle d’édition augmentée pour illustrer que cette mécanique peut être utile non seulement sur un packaging mais aussi sur une affiche.

Quel usage des QR code? :

Source : comScore Datapassport

La présence d’un QR code sur un produit permet de signifier au consommateur une interaction possible. Plusieurs marques ont réalisé des opérations de communication basées sur les codes 2D. Kronenbourg a ainsi placé la technologie Mobile Tag sur ses cannettes, renvoyant ses consommateurs vers la page Facebook « Pression Live »363. Quant à la marque Total, elle a mis en place des QR codes de manière permanente sur une de ses gammes de produits renvoyant vers une vidéo de démonstration de vidange

361 www.flashcode.fr, Créer mon flashcode : http://bit.ly/zxGj13 362 Servicemobiles.fr, Naissance du Bleam 3D, lisible de 5 fois plus loin qu’un QR code, 24/01/12 : http://bit.ly/ziZ1wg 363 Mobiletag, opération Kronenbourg, nov 2011 : http://bit.ly/H1UxvA

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rappelant les bons gestes notamment concernant l’huile usagée364. Le code peut être placé sur le produit mais aussi sur une PLV ou un stop rayon afin de relayer une opération promotionnelle par exemple. Ces initiatives qu’ont prises les marques ces dernières années ont aidé à populariser les codes 2D et on remarque dernièrement une forte progression de son utilisation.

Le volume de scan de code barre a triplé en 2011 :

Source : Scanlife Trend report Q4 2011365

Les marques et les distributeurs ont désormais l’opportunité d’établir un nouveau dialogue avec leurs clients. De manière générale, on peut distinguer sur le mobile trois types de service de shopping. Un vertical qui propose de l’information sur une enseigne ou une marque, un horizontal qui sera multi-marques et multi-enseignes et enfin un service universel via les moteurs de recherche internet. Dans la première catégorie, les enseignes lancent progressivement leur propre service mobile afin de ne pas se laisser distancer. Franprix a lancé « Franprix Scan » pour l’instant dédié uniquement au rayon du vin. L’application apporte des informations supplémentaires sur les vins présentés en magasin. L’initiative a le mérite d’exister et devrait être étendu à d’autres rayons. D’autres enseignes ou marques vont inclure de plus en plus de services de scan de produits à leurs applications. Ces services apportent des informations complémentaires sur les produits et permettront aux marques de développer un discours plus engageant avec leurs clients.

Dans la deuxième catégorie, l’application d’information produit qui fait beaucoup parler d’elle aux Etats- Unis est Goodguide. Lancé en 2008 par Dara O’Rourke, un professeur à Berkeley, le service a d’abord été lancé sur internet pour ensuite être présent sur le mobile366. Le fondateur est parti du constat que les consommateurs regardaient la composition des produits mais qu’ils ne la comprenaient pas vraiment. Comment juger si le taux d’un composant est élevé ou faible ? Si le produit que j’ai en main en magasin contient un ingrédient nocif ? L’information ici vient d’un site internet tiers et présumé neutre. Une équipe d’ingénieurs note les produits sur 3 critères : la santé, l’environnement et l’impact social. L’équipe a ainsi noté 160 000 produits à ce jour à partir de multiples sources d’informations. La grille peut être adaptée selon les préférences de l’utilisateur : une pondération peut ainsi être effectuée sur tel ou tel critère de la catégorie santé, personnalisant ainsi les résultats futurs. L’objectif du fondateur est d’aider les

364 Kookbeo.Com, Cas client : Total Lubrifiant, 03/11/10 : http://bit.ly/GPMXVG 365 http://www.scanlife.com/pdf/scanlife_trend_report_q411.pdf 366 Nytimes.com, On web and iPhone, a tool to aid careful shopping, 14/06/09 : http://nyti.ms/H7zXvP

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consommateurs à aller au-delà du discours des marques et d’aider les marques à entendre ce que souhaitent les consommateurs, à savoir des produits plus sains et respectueux de l’environnement. Certaines marques commencent à collaborer et à ouvrir spontanément leurs données. En France, deux projets de même nature se sont lancés récemment : Hopscore et Shopwise. Cette dernière application a été élue meilleure application dans la catégorie Forme et Santé dans l’Apple store Rewind.

GS1 est une organisation mondiale, paritaire et à but non lucratif qui gère notamment la norme des codes UPC (Universal Product Code) et EAN (European Article Numbering) en Europe, initialement créée en 1974. Ces codes-barres sont utilisés plus de 10 milliards de fois par jour. C’est une alliance entre distributeurs et fabricants afin de mettre en place des normes communes et mondiales pour faciliter le commerce367. L’organisation travaille sur le sujet du packaging étendu depuis 2007 et propose un certain nombre de ressources sur le sujet368. Un livre blanc dédié au mobile et à la distribution « Mobile in Retail » a été édité en 2010369. Le gouvernement a par ailleurs subventionné le projet Proxi-Produit dans le cadre de l’initiative Proxima Mobile. Il s’agit du premier service multimarques d’information consommateur sur mobile, disponible sur iPhone et Android370. Un portail est en ligne afin d’aider les marques à référencer leurs produits et être ainsi présentes lorsque l’utilisateur du service scan un produit371.

Concernant la troisième catégorie de service, il s’agit de la recherche universelle. Les moteurs de recherches web peuvent tout à fait répondre à une requête réalisée par un scan de code barre ou par une photo par reconnaissance d’image. Les moteurs de recherche Google et Bing sont des moteurs de recherches et proposent des applications de scan ou de réalité augmenté. Google a lancé l’application Goggles et Bing le service Bing Vision. Microsoft qui a d’ailleurs racheté le comparateur de prix Ciao.fr renvoi donc les produits scanné vers ce service. La recherche visuelle et la réalité augmentée permettent de nouvelles interactions avec les produits. Un projet comme Aurasma qui propose du « visual browsing » laisse imaginer des perspectives nouvelles dans l’interaction d’un consommateur avec un packaging en magasin. Il suffit de placer son téléphone devant un produit et le spot de publicité ou bien un objet en 3D apparait. L’application Layar et son application de réseau social en réalité augmentée Stiktu est également parmi les plus remarquables. La technologie Moodstocks, évoquée plus haut à propos du prospectus papier, peut s’appliquer en fait à n’importe quel objet physique 2D, tout comme Blippar. Il y a fort à parier que la possibilité de scanner des produits en 3D, donc des packagings, ne saurait tarder. L’expérience d’un QR code semblera alors bien compliquée. L’enseigne Home plus de TESCO a mis en place un dispositif inédit en Corée. Il s’agit de mettre un magasin virtuel dans le métro et de permettre aux usagers de faire leur shopping avec leur mobile372. La publicité dans le métro se transforme ici en magasin virtuel. Il suffit de scanner les produits souhaités avec son mobile et la livraison est effectuée le jour même à domicile. Le site internet a connu une augmentation de visites de 76% après l’opération. Le succès a été tel que l’enseigne a installé la boutique virtuelle de manière permanente dans le métro Coréen. eBay a également réalisé une

367 GS1, présentation de l’organisation : http://bit.ly/zoMDHx 368 http://www.gs1.org/mobile. 369 http://www.gs1.org/docs/mobile/Mobile_in_Retail.pdf 370 Proxi-produit, Video de demonstration en situation d’achat : http://vimeo.com/10576571 371 http://www.productonline.fr/ 372 Presse-citron.net, un supermarché virtuel à base de qr code, 03/09/11 : http://bit.ly/xfe3pS

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opération dans les rues de Manhattan où des produits à vendre étaient mis en vitrine et disponible à l’achat en scannant un QR code373. Encore plus fort, la société Suédoise Jetshop a mis en place un magasin éphémère du 12 au 18 Mars 2012 à la gare centrale de Stockholm. Les usagers peuvent effectuer un achat en scannant un QRcode d’un produit d’une des vingt enseignes participants à l’expérience374. Au- delà de créer des occasions d’achats supplémentaires, les économies réalisées sont importantes : pas de personnel, pas de produits périmés, pas de vol, pas de locaux…Nous allons maintenant étudier en quoi le partage et le social peuvent faire évoluer l’expérience d’achat en magasin.

3.2.3/ Le social shopping

La première fonction d’un téléphone en situation d’achat est d’appeler un ami. Beaucoup de personnes font même leur shopping entre amis. Les réseaux sociaux étant un des usages les plus importants, il est évident que le partage de l’expérience d’achat va se développer. Que cela soit avant, pendant ou après, les utilisateurs vont partager leurs achats, leurs doutes et leur satisfaction.

L’application Myshopanion permet de donner plus d’informations à ses amis sur ses intentions d’achats. Il suffit de prendre un article en photo ou de scanner son code barre et de l’envoyer par mail, sur Facebook ou par Twitter. Ainsi, je peux interroger en temps réel mon réseau d’amis alors que je suis dans la cabine d’essayage d’un magasin. Ce type d’application marche sur les pas de Shopwithyourfriends qui est un service disponible sur internet fixe permettant de faire son shopping online avec ses amis en les invitant à naviguer et à tchatter tout en visitant un site e-commerce. L’application Yakatag est un réseau social centré sur le shopping offline. Le service permet de partager ses coups de cœurs, il suffit de prendre un produit en photo, de créer une fiche produit géolocalisée et de le partager avec son réseau. Il est ainsi possible de suivre la journée shopping de personnes ayant les mêmes goûts que vous. L’application Wepeek a une approche similaire mais en signant pour sa part des partenariats avec les marques directement qui paie un abonnement mensuel et par la suite à chaque photo prise par les utilisateurs375. Deux jeunes entrepreneurs Français ont également lancé un concept de social shopping appelé Peexter. Le service est à la fois disponible sur le web et sur le mobile. Il est ici possible de « follower » un produit et de signaler à vos amis que vous désirez tel ou tel produit376. Plus un utilisateur est actif et réalise de « peex », plus il monte de niveaux et peu obtenir des réductions sur le site web.

Un lieu particulièrement propice au social est la cabine d’essayage en magasin. C’est ce qu’a mis en place Fullsix Retail pour la marque Diesel en proposant des bornes interactives permettant de publier sur Facebook une photo. Cette expérience sociale également été mis en place dans une optique plus évènementielle pour les Galleries Lafayette et pour Orange377. Une autre initiative sociale intéressante a été lancée par la marque de chaussure Miista, l’opération s’appelait « cheaper with a tweet ». L’idée était

373 Publigeekaire.Com, eBay vitrines réelles achat QR Code, Octobre 2011 : http://bit.ly/Icz9op 374 Le Superstore de Jetshop à Stockholm, Mars 2012 : http://bit.ly/JcwYF0 375 Ecommercemag.fr, Une appli transforme vos clients en ambassadeurs, 02/03/12 : http://bit.ly/IKPpTG 376 Webactus.net, Peexter, une application de social shopping, 05/07/11 : http://bit.ly/jlPo0P 377 Blogmci.com, De l’art de créer des synergies on et off, 02/04/12 : http://bit.ly/HR9HZK

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qu’à chaque tweet sur la marque le prix de ses chaussures baissait. La nouveauté de l’opération était le fait que la réduction était plus ou moins importante selon le score Klout du client. La marque était ainsi prête à baisser son prix, voir à offrir son produit en échange d’un relai important de la part d’influenceurs378. Uniqlo et Gilt ont réalisés des expériences similaires.

American Express a mis en place un partenariat avec Facebook en 2011 lui permettant de proposer des réductions personnalisées en fonction de ses interactions sociales. L’intérêt du dispositif est double. Premièrement, les produits proposés sont choisis en fonction de ce que vous ou vos amis ont aimé sur internet avec le bouton like. Deuxièmement, ce dispositif est idéal pour créer du trafic en magasin physique. Pour bénéficier de sa réduction l’utilisateur doit payer avec sa carte Amex. Quel moyen plus efficace existe-t-il pour inciter l’usage de son outil de paiement que de bénéficier de réduction !379 Facebook pour sa part s’intéresse au commerce local. La société a racheté Tagtile, un système de fidélisation et d’interaction sur le lien de vente380. Un petit terminal en forme de cube est placé sur le comptoir d’un magasin et les clients peuvent, après avoir téléchargé l’application, s’identifier, gagner des points et le faire savoir à leur réseau d’amis. La start-up n’utilise pas le NFC, le parc installé étant encore bien trop faible, elle a développé sa propre technologie

Sur internet, la lecture d’avis consommateurs est devenue une étape importante du processus d’achat. Il n’y a aucune raison pour que cela ne soit pas le cas sur le mobile et de manière plus importante encore en magasin, en situation d’achat. Sephora a ainsi lancé dès 2009 une fonction permettant d’accéder aux avis et commentaires de ses produits depuis le mobile avec la solution MobileVoice de BazaarVoice381. Le social c’est aussi le dialogue entre le consommateur et la marque. Le service Civiliz permet aux utilisateurs de s’exprimer sur un lieu visité. Les commentaires sont transmis au responsable du lieu, inscrits ou non sur le service. Plus l’utilisateur s’exprime et plus il est récompensé. Les enseignes peuvent indiquer par la présence d’une signalétique que leur point de vente est présent sur Civiliz via leur smartphone ou bien mettre à disposition des bornes interactives comme l’a fait la Société Générale382. De la même manière, la start-up Tello propose aux consommateurs de noter un service via une application mobile. Critizr propose de son côté une boite à idée 2.0, à savoir géolocalisée et sur le mobile où chaque consommateur peut exprimer son mécontentement ou bien son souhait d’amélioration du service ou du point de vente. Josh Harris, le créateur de « We live in Public » et de « Wired City », imagine le magasin connecté de demain. Il considère que l’expérience que nous avons aujourd’hui dans un centre commercial est extrêmement pauvre. Nous serions comme des zombies déambulant sans aucun espoir de relation sociale significative. Il imagine une expérience d’achat plus sociale et capable de former des groupes de personnes éphémères intéressé par le même achat au même moment. Chaque enseigne serait capable de vous reconnaître et de vous proposer une expérience personnalisée et à vos goûts…383 Le social a bouleversé l’e-commerce, il n’y a aucune raison qu’il ne bouleverse pas le commerce physique. A mesure que les clients utilisent leur

378 Wallblog.co.uk, Shoe brand lets influential tweets knock down price for everyone, 04/01/12 : http://bit.ly/IYkePb 379 Techcrunch, Amex Facebook deals go social, 18/07/12 : http://tcrn.ch/INsXHu 380 Techcrunch.com, Facebook ups the mobile ante again buys mobile loyalty rewards startup Tagtile, 13/04/12 : http://tcrn.ch/JeUOhx 381 Adage.com, Sephora helps selection process mobile user reviews, 19/01/09 : http://bit.ly/ITRfNr 382 Civiliz.fr, La société Générale engage ses clients à s’exprimer : http://bit.ly/IpKnrj 383 Jeff Jarvis, Tout nu sur le web, Plaidoyer pour une transparence maîtrisée, publié en 2011 aux éditions Pearson

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mobile pour s’informer et partager plus en magasin, les enseignes prennent conscience qu’elles doivent évoluer de même que l’expérience offerte à leurs clients. Ce changement attendu par beaucoup est appelé « magasin connecté » et représente le futur de la distribution.

3.2.4/ Le magasin connecté

Le consommateur se transformant grâce au mobile en « connected shopper », les enseignes doivent réagir et accompagner cette digitalisation de l’expérience d’achat. C’est la digitalisation du point de vente que l’on entend par l’expression consacrée de magasin connecté. Ce sujet a été central lors de l’édition 2012 du Retail Big Show organisé aux Etats-Unis par la NRF (National Retail Federation). Cela a également été le sujet du salon Retail Forum du 29 Mars où ont témoigné des enseignes comme Quicksilver, The Kooples, De Fursca, Naf Naf… Le mobile va profondément modifier les habitudes des consommateurs au sein des magasins. Ce changement d’attitude vient du mobile mais ne restera pas lié à une technologie précise. La personnalisation des offres a depuis longtemps montré son efficacité sur d’autres leviers, il n’y a aucune raison que cela n’arrive pas dans les magasins. IBM parle de « multichannel precision marketing » pour évoquer cela. La publicité sur le lieu de vente existe depuis longtemps dans les enseignes, sous forme de borne interactive, borne d’écoute, tête de gondole, vitrophanie, de totem écran, stop rayon, TV au-dessus des caisses. Ces outils de merchandising se transforment petit à petit. Une société comme Mediavantage propose une palette de média in-store intégrant le digital. Les traditionnelles bornes qui étaient disponibles en grande surface pour scanner un produit vont disparaitre pour faire place à des tablettes tactiles. Proposer des expériences riches, tactiles et simples à utiliser est aujourd’hui possible en équipant les magasins d’iPad ou de terminaux équivalents par exemple. On voit apparaître de plus en plus de larges écrans tactiles à l’entrée des grands centres commerciaux, permettant ainsi de se repérer et de trouver rapidement un magasin. Ce dispositif d’aide à la vente est possible au sein même d’un magasin, pour pouvoir voir rapidement les produits en promotion, regarder les spécificités techniques d’un produit sur un écran…

L’enseigne BUT est parti du constat que 70% de ses clients se renseignaient au préalable sur leur site internet et qu’ils se trouvaient par conséquent souvent plus informés que ses vendeurs eux-mêmes. Après avoir testé plusieurs dispositifs, l’enseigne est désormais convaincue de l’importance de valoriser le rôle de conseil des vendeurs et a donc décidé de les doter d’un outil interactif. Ce nouvel outil génère 13% des ventes du magasin. L’idée que les bornes interactives vont tuer le métier de vendeur n’est donc pas tout à fait vrai. Les consommateurs viennent en magasin pour parler à quelqu’un et viennent chercher du conseil. S’ils n’y trouvent que des bornes pour naviguer au sein du catalogue numérique, autant acheter en Drive et venir retirer ses produits en magasin par la suite. L’objectif est double, au-delà de rendre l’expérience plus riche et de renforcer le rôle de conseil des vendeurs, il s’agit aussi d’envisager des implantations en centre- ville où les mètres carrés sont précieux. En effet, si la borne interactive n’est pas qu’un catalogue interactif, elle permet de référencer tous les produits présents en magasin mais pas uniquement384. L’enseigne

359 Smartshoppingexperience.com, Le cas But, 30/03/12 : http://bit.ly/JsybEV

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d’instrument de musique Milonga a fait part de son expérience de magasin connecté à Marseille. Elle a travaillé avec les sociétés Improveeze et Compario pour mettre au point des bornes interactives de 22 pouces. Les résultats sont concluants et le déploiement sur l’ensemble de ses magasins est désormais en cours385. Surcouf a remporté un le prix « Ecran d’or » pour son flagship de Lille qui comporte désormais 3 bornes interactives de 40 pouces. Les écrans tactiles, réalisés par la société instore solution, permettent de consulter le plan interactif, les produits ou de prendre rendez-vous avec un vendeur386. La société Keyneosoft propose également des dispositifs interactifs en magasin et a travaillé avec Kiloutou, Pizza Paï, Surcouf, Boulanger…387 Adidas a mis en place un dispositif baptisé Adiverse, qui est un mur interactif impressionnant permettant aux clients de rechercher et d’interagir avec les produits. Le dispositif ne prend pas de commande mais l’expérience est très engageante et immersive388. Les tablettes en magasin peuvent également servir aux marques distribuées pour reprendre le dialogue directement avec leurs clients, plutôt que de dépendre du vendeur de l’enseigne où ils sont distribués. Il est même possible d’envisager qu’un client fasse un vidéo tchat avec un conseiller de la marque qui parlera forcément mieux de son produit que le vendeur multi-marque. Wallmart vient de lancer son application iPad et une nouvelle version de son application iPhone qui inclut plusieurs nouveautés intéressantes. L’utilisateur peut désormais rechercher un produit par reconnaissance vocale et une liste de coupons de réduction lui est proposée à côté de son panier d’achat. Le site ne pouvant accepter de coupons digitaux, il est proposé au client de le recevoir par email pour l’imprimer et l’utiliser en magasin physique389. Par ailleurs, en plus d’une liste de shopping pouvant aider à faire ses courses en point de vente, l’application indique le plus court chemin entre les rayons (en test dans quelques magasins seulement).

L’agence Razorfish a présenté sa plateforme appelée 5D agrégeant plusieurs technologies - dont la Kinect, Microsoft Surface, Windows Phone… - permettant une interaction très poussée entre un mobile, une borne interactive et le corps avec la reconnaissance du mouvement. La société de design Frog a travaillé avec Intel à du mobilier numérique destiné aux points de vente390. Le résultat est à la fois beau et innovant : le consommateur peut se regarder comme dans un miroir pour essayer un vêtement par exemple, obtenir plus d’informations et finaliser l’achat directement. Ce type de démonstration reste aujourd’hui de l’ordre du showcase exceptionnel et ne peut pas être déployé à grande échelle en raison du coût391. L’enseigne Sephora a testé différents dispositifs de tablettes en magasin pour finalement équiper ses vendeurs d’iPod touch. L’objectif est d’outiller les vendeuses pour personnaliser la relation et apporter de la pertinence dans le conseil. La vendeuse peut scanner la carte de fidélité de la cliente afin de l’identifier et de voir son historique d’achat. Le déploiement sur les 200 points de vente français va se faire tout au long de l’année 2012392. L’agence Dagobert a réalisé une étude sur les usages des tablettes en magasin couvrant les bénéfices pour les clients ainsi que les différentes manières de les utiliser393. Des dispositifs plus simples comme l’ajout de QR code en rayon sont beaucoup plus abordables et simples à mettre en place.

385 Connected-store.com, Retour d’expérience sur les magasins connectés de Milonga, 2012 : http://bit.ly/J6XyPV 386 Ooh-tv.com, Installation Surcouf par Instore solution, 21/02/11 : http://bit.ly/HNHDCJ 387 http://www.keymap.fr/fr/realisations 388 Fastcompany, Intel Adidas virtual footwear all, 11/01/11 : http://bit.ly/HYS7Ex 389 Internetretailers, Walmart rolls out ipad app, 09/11/11 : http://bit.ly/xCa1ie 390 http://www.frogdesign.com/work/intel-pos.html 391 Emergingexperiences.com, Razorfish connected retail experience platform, 16/01/12 : http://bit.ly/HObsIx 392 Le figaro.fr, Sephora lance le conseil d’achat sur mesure, 17/11/11 : http://bit.ly/JhO1pf 393 Frenchweb.fr, Etude Dagobert :Comment tirer profit de l’usage instore et outstore des tablettes? 09/02/12 : http://bit.ly/JbRqYr

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L’agence Fullsix a mis cela en place pour la marque Diesel dès 2009. L’utilisateur était alors redirigé vers la page produit où il pouvait liker le produit sur Facebook394. Qu’en est-il du caddie ? Beaucoup de projets sont actuellement à l’étude. Microsoft a mis au point un prototype de caddie intégrant le système Kinect395. Le caddie suit le client, lui parle et redonne des compléments d’informations sur les produits. La jeune start-up française Invencia s’est aussi lancée dans ce projet avec le smartKart, un caddie intelligent encore en développement mais qui semble prometteur. Les chinois ont également un projet du même type au Lotus Supermarket, développé par la société SK Telecom.

Vers le retail analytics : Afin d’être à armes égales avec les sites marchands, les points de vente pourraient travailler leur taux de conversion et analyser leur trafic, faire de l’analytics en somme. C’est aujourd’hui possible, la solution Digby Localpoint permet de récupérer des données via les smartphones. Il s’agit d’une plateforme technique dédiée aux marques et aux enseignes qui souhaitent mieux comprendre leurs clients et mieux communiquer avec eux. Il s’agit d’un simple SDK à intégrer à son application et qui mesure la fréquence des visites, la durée, le chemin, les check-ins, le scan de code barre… Elle permet également d’envoyer des messages promotionnels uniquement si le client se trouve dans une zone géographique précise (geofencing).

Information récoltés par Digby sur le parcours physique d’un client en point de vente :

Les études de merchandising en magasin prennent une tout autre dimension avec des données réelles. La solution T-cuento propose de récolter les données de trafic magasin par des capteurs en magasin396. Elle est capable de comptabiliser le nombre de client qui entrent et qui sortent du magasin, le temps moyen passé et les taux de conversion. Les applications sont nombreuses, cela permet d’optimiser le planning des vendeurs de manière plus précise, de calculer les heures où les taux de conversion sont les plus favorables ou bien de consolider le trafic en magasin avec les périodes de promotions ou de campagnes publicitaires. La société Euclid Elements a été fondée par de anciens d’Urchin, la société à l’origine de

394 Opération Like via QR Code de Diesel : http://slidesha.re/HNuFVJ 395 Connected-store.com, Un caddie intelligent équipé de Kinect, 29/02/12 : http://bit.ly/JiBnWM 396 T-cuento.com – euclidelements.com

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Google Analytics. Le système de tracking est ici entièrement basé sur les smartphones des clients. Les données récoltées sont donc partielles pour l’instant compte tenu du taux de pénétration. Il existe d’autres sociétés spécialisées dans le domaine et basé sur la reconnaissance d’image comme Verint et Intelli Vision. D’autres comme Shopper Tracker se basent sur les nouvelles technologies de détection du mouvement qui font le succès de la console de jeux Kinect de Microsoft. Transformer un point de vente pour le rendre plus connecté et intelligent passe par le système d’information. La société anglaise Cybertill propose une solution en cloud de ePoS (Electronic Point of Sale) qui permet d’importante avancée dans la gestion d’un magasin. Le service permet de voir les stocks d’autres points de vente de l’enseigne ainsi que les tendances de ventes globales afin de mieux prévoir les réassortiments. L’outil permet également d’améliorer l’approche CRM397. L’éditeur logiciel Français Cegid propose aussi une approche spécifique au Retail.

La connectivité : Les consommateurs veulent accéder à internet avec leur mobile en magasin pour comparer les prix. Comment les enseignes peuvent-elles réagir ? La première chose à faire est de ne pas rester sur une posture défensive en coupant tous les accès à internet dans les magasins.

37% des consommateurs qui ont essayé d’utiliser une application en magasin n’ont pas pu à cause de problème de réseau. L’étude Store 3.0 de Deloitte réalisée auprès de 39 enseignes Américaine révèle que plus de la moitié n’ont pas ouvert le wifi dans leurs points de vente398. La localisation au sein d’un centre commercial n’est pas encore possible sans un équipement ou un travail spécifique en amont. Les applications Fastmall, PointInside, Aisle411, et Micello travaillent à référencer le plan de chaque centre commercial399. Google s’est personnellement chargé de faire le travail avec le centre commercial « Mall of America » dans le Minesota400, un des plus gros de cette chaîne qui compte 520 centre commerciaux. L’enseigne Nordstorm, qui compte 225 magasins aux Etats-Unis, a en effet constaté que ses clients

397 http://www.cybertill.co.uk/ 398 Deloitte.com, The Next Evolution : Store 3.0 : http://bit.ly/HRcDSQ 399 Nytimes.com, Finding your way through the mall with a cellphone map, 10/10/10 : http://nyti.ms/I4fXwr 400 Video de localisation in store sur Android au Mall of America : http://bit.ly/GO8hk6

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utilisaient l’application de l’enseigne en point de vente. Elle n’a pas hésité à ouvrir le wifi à ses clients afin de leur permettre de se connecter. L’enseigne Tesco a offert le wifi à ses clients en magasin depuis décembre 2011. L’accès est gratuit pendant 15mn, au-delà il suffit de souscrire à la carte de fidélité de l’enseigne401. C’est à la fois un moyen de renforcer la confiance entre la marque et ses clients mais aussi comme on le voit ici de récupérer de la data au travers d’un programme de fidélité. Plus près de nous, le centre commercial des Quatres Temps à la Défense, géré par Unibail-Rodamco, test un réseau de 270 points de contact Wifi permettant de géolocaliser à 2 mètres près. La deuxième étape sera le test de push notification d’offres locales. D’autres solutions que le wifi existent. La société Nextivity propose par exemple des bornes indoor de relais du réseau 3G des opérateurs mobiles. Les possibilités offertes par une localisation « in-store » sont prometteuses.

L’e-commerce ne remplace pas le magasin physique :

22% des personnes intérrogées par Jiwire déclarent préférer faire leur achats en magasin et 63% n’ont pas de préférence. Le magasin physique n’est pas encore déserté par les consommateurs mais ceux-ci prennent de nouvelles habitues d’achat et s’habituent à un certain standard de service sur internet. Les points de vente doivent offrir une interaction avec le mobile, permettre d’acheter sur le site e-commerce de l’enseigne au sein même du magasin des produits non présents en stock, offrir une expérience sociale et enfin s’équiper de système d’information permettant d’avoir un état des stocks en temps réel et de faire de l’analytics. Ces éléments doivent permettre aux enseignes de créer de la différenciation et aux points de vente d’avoir une vraie valeur ajoutée par rapport à l’e-commerce.

Au-delà de la révolution que le point de vente doit faire, les distributeurs physiques repensent l’expérience client global entre online et offline. On parle beaucoup de multicanal ou de crosscanal pour illustrer ce que doit être une distribution unifiée. On va jusqu’à évoquer l’omnicanal pour dépasser les silos de distribution et tenter de penser une expérience client fluide et unifiée, quel que soit son point de contact avec une enseigne. Un client doit pouvoir acheter sur son mobile, se faire livrer à domicile et pouvoir ramener son produit en point de vente. Il doit avoir la sensation de parler à la même société tout du long de sa relation, peu lui importe que cela soit des technologies ou des départements différents du côté de l’entreprise. Deloitte avance l’idée que dans 5 ans, les points de vente passeront d’un rôle purement transactionnel à un rôle d’expérience avec la marque.

401 Tescoplc.com, Tesco rolls out free Wi-fi across the Uk, 05/12/11 : http://bit.ly/H6gv2y

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3.3/ Le check-out

3.3.1/ La carte de fidélité

Le mobile est l’objet personnel par excellence. Quoi de plus naturel que le smartphone remplace les 350 millions de carte de fidélité actuellement en circulation. De manière plus générale, le mobile sert d’outil d’identification client afin d’améliorer la relation client dans son ensemble. A l’avenir, un client en magasin de self-service, ne sera plus un anonyme aux yeux des vendeurs. Cette nouvelle étape de la relation client se fera en deux temps, la première étant la dématérialisation des cartes de fidélité, la deuxième portera sur un enrichissement de la relation client. Les enseignes peuvent proposer la dématérialisation dans leur application principale ou lancer une application dédiée comme l’a fait Carrefour par exemple. Deux acteurs en France sont clairement positionnés, l’agence Snappp avec FidMe et la start- up Fidall. Laurent Bourgitteau-Guiard de l’agence Snapp avance que le taux de consommation des coupons passe de 2% sur papier à 30% sur les smartphones. Yann Casanova, fondateur de Fidall, m’a expliqué lors d’une interview sa proposition de valeur à destination des marques402. L’application est capable de générer du lead de nouveaux adhérents aux programmes de fidélité des marques. Ayant une audience captive en bons plans et ayant une attitude fidèle aux marques, l’application est capable de faire du cross-programme et de pousser une marque auprès de son audience. Enfin, l’application est capable de pousser une offre spéciale aux clients adhérents à un programme par push notification. C’est un moyen très efficace pour une marque de toucher directement son cœur de cible par un levier innovant mais surtout apportant de la contextualité au message. Il s’agit de la même démarche qu’une campagne de courrier publicitaire, en version digitale et mobile. Il faut préciser que la campagne est ici facturée à la promotion vue et non au nombre de push envoyé. Après avoir été téléchargé plus d’un million de fois, FidMe se transforme progressivement en m-wallet en permettant de réaliser des check-ins dans les magasins, postés sur les réseaux sociaux403. Egalement, l’application permet d’ouvrir en un clic l’application d’une marque. L’application qui n’était qu’une vitrine pour montrer son savoir-faire est devenue un succès en tant que tel. Elle a d’ailleurs reçu l’E-commerce Awards 2011 de la relation client404 et a réalisé de nombreuses applications de marques dont celle de « Monoprix et moi ». Aux Etats-Unis, le service le plus important de carte de fidélité est Key ring reward. Il propose également des bons de réduction et une recherche des points de vente. La chaîne abc s’est fait l’écho de la simplicité du service et de la satisfaction de ses utilisateurs405. Le service Coupon Sherpa propose quant à lui tous les coupons possibles, online, à imprimer et via le mobile. Comme vu plus haut dans cette étude concernant le drive to store, les utilisateurs ont encore une préférence pour le canal SMS quand il s’agit de recevoir des offres promotionnelles sur le mobile (source : Direct Marketing Association UK). Les applications ne sont citées qu’en 4ème par les Français, après le SMS, l’email et la voix406. Nous avons déjà évoqué le rachat de Tagtile par Facebook dans la partie consacrée au social shopping. L’application et le terminal de Tagtile

402 Vincenttessier.fr, Interview de Yann Casanova, Fidall, 02/02/12 : http://bit.ly/Ib9EWx 403 E-marketing.fr, La contextualisation est la nouvelle étape de la relation client digitale, 04/04/12 : http://bit.ly/JVPcHR 404 Frenchweb.fr, Le palmarès des e-commerce awards 2011, 14/09/11 : http://bit.ly/oqbhn5 405 Keyringapp.com, ABC News, 10/01/12 : http://bit.ly/yWvt3b 406 Dma.org.uk, Promoting to the mobile consumer report, 04/012/12 : http://bit.ly/xUsIuY

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sont avant tout un formidable outil d’authentification client et donc de fidélisation en caisse. Google n’est pas en reste et s’intéresse beaucoup à ce sujet, elle a racheté la start-up Punchd en 2011, qui sera très probablement intégré dans Google Wallet407.

3.3.2/ Le paiement mobile

Le PDG de Visa, John Partridge a dit lors du MWC 2012 que les enfants nés depuis moins de 5 ans ne connaitront jamais le portefeuille physique. Selon une étude du cabinet KPMG, 66% des personnes interrogées souhaitent pouvoir utiliser leur téléphone portable comme porte-monnaie électronique408. Le marché du m-paiement online et offline est en pleine ébullition ; nous l’avons dans le chapitre consacré au m-commerce. Le smartphone se transforme en terminal pouvant recevoir des paiements par carte bleue. Il permet l’authentification du client en caisse par geofencing, sans aucune action. Le paiement par mobile est désormais possible en caisse de magasin physique grâce à la technologie sans contact, également appelé NFC (Near Field Communication). Le paiement est ainsi le lieu d’une grande bataille entre les opérateurs historiques de paiement (Visa, Atos…), les opérateurs Telecom (ISIS), les géants du software (Google, Apple, Paypal). Les opérateurs de carte de paiement comme Visa, American Express, Mastercard sont également en compétition et ne cesse d’innover pour suivre cette évolution technologique qui peut bouleverser leur marché.

La guerre du portefeuille électronique : Cette technologie sans contact a été lancée en 2004 au Japon et permet de transmettre des données sur une distance maximum de 10 centimètres. Le fait d’approcher son téléphone d’une cible (un tag) est communément appelé un tap. Il y aurait un million de téléphones compatibles en France. La technologie est standardisée au niveau international par le NFC Forum et l’ETSI. Plusieurs groupes de travail réunissant les banques, les opérateurs, les transporteurs publics et les pouvoirs publics sont à l’œuvre depuis 2007 en France, l’AEPM, ULYSSE et ERGOSUM notamment. Les opérateurs ont créé l’Association Française du Sans Contact Mobile (AFSCM). Suite au projet pilote Cityzi sur quelques villes en France, en partenariat avec l’agence connecthings, l’Etat s’est engagé lors d’un appel à projet à 17 collectivités en débloquant 20 millions d’euros409. A Nice, le projet a consisté à équiper les citoyens de téléphones spécifiques, à placer des tags NFC à différents endroits publics et des terminaux de paiement électronique sans contact dans les commerces. Toute entreprise souhaitant s’intégrer dans ce projet est la bienvenue et son service sera embarqué dans la carte SIM, permettant aux utilisateurs d’interagir avec. En effet, les opérateurs téléphoniques souhaitent embarquer ce nouveau service sur la carte SIM, afin de garder la relation client et d’avoir les mains libres vis-à-vis du terminal utilisé. Apple et Blackberry notamment ne l’entendent pas de cette manière et veulent embarquer ces informations à même le terminal. Aux Etats-Unis, ISIS est un consortium réunissant les plus grands opérateurs Telecom

407 Techcrunch.com, Google to buy mobilke loyalty card start-up Punchd, 08/07/11 : http://tcrn.ch/HZBvxo 408 KPMG, Etude « The converged Lifestyle » : http://slidesha.re/GYC3SQ 409 SMSC, Apple à projet projet ville intelligente, 23/12/11 : http://bit.ly/HOGY5b

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Américains, AT&T, T-Mobile et Verizon410. L’idée est d’intégrer ce portefeuille électronique dans le téléphone, doté de la technologie NFC, dans les applications de bases. Au-delà de conserver les informations bancaires pour pouvoir procéder à des paiements avec son téléphone et sans contact, l’application fera également office de carte de fidélité et d’offre de coupons de réduction. L’utilisateur pourra consulter son historique d’achat facilement dans l’application. Pour être tout à fait précis, ISIS n’effectue pas le paiement, mais transmet les informations à la banque. La plupart des tentatives de portefeuille électronique sur le mobile pour le commerce physique impliquent de négocier avec les distributeurs afin qu’ils installent ou remplacent leur terminaux de paiement. Or une vingtaine de distributeurs américains dont Walmart et Target ont annoncé qu’ils étudiaient la mise en place d’une solution411. Pour l’instant, les observateurs ne savent pas si ces initiatives annoncent un nouveau type d’acteur dans la course ou bien s’il s’agit juste d’un levier de négociation. Il y a plusieurs applications possibles au NFC, une des plus évidentes et attendues est la possibilité de payer avec son mobile mais elle fait beaucoup de déçus. Le déploiement tardant à arriver, le NFC s’oriente de plus en plus vers d’autres usages, notamment l’authentification, ou le packaging étendu (jouant le rôle ici d’un QR Code ou du Bluetooth). Le NFC permet surtout de régler le problème de la communication entre deux smartphones et c’est déjà beaucoup ! Par ailleurs, le paiement mobile n’est pas forcément lié à la technologie NFC. C’est ce que tente de démontrer la start-up Skimm qui vient de lever 300 000 € pour son développement412. Le paiement se fait en scannant un QR code généré par le terminal du commerçant à l’aide de l’application grand public Skimm. Le téléphone de l’utilisateur est renvoyé sur une page mobile où il doit rentrer son code pin pour valider l’achat. L’application permet également du transfert entre particulier et le paiement en ligne. Skimm veut dire survoler, ce qui décrit parfaitement le mouvement à réaliser avec son smartphone. Enfin, il faut mentionner Moneo, initiative lancée en 1999 par les banques françaises pour cibler les achats physiques inférieurs à 30 €, destinée en premier lieu aux étudiants. La solution n’a pas vraiment décollé et est essentiellement basée sur une carte supplémentaire à porter avec soi.

Les acteurs du software : Google a lancé sa solution Google Wallet en septembre 2011, sur les bases de Google Checkout413. Les mots sont importants et le mot portefeuille était surement plus adapté à l’ambition d’être une solution online et offline. L’application permet de payer online et dans les magasins physiques en NFC via la solution de Mastercard Paypass. Elle fait également office de carte de fidélité dématérialisée et permet de faire valoir ses coupons en formats digitaux, notamment Google Offers. Google est en phase de négociation avec les opérateurs Telecom pour embarquer son Wallet dans les téléphones directement414. La négociation semble difficile et bloquée depuis quelque temps, Google envisage donc de partager les revenus avec eux. Cela concerne bien sûr en premier lieu les téléphones Android, mais Google envisage d’être présent sur d’autres OS. Le projet est stratégique pour Google car elle a très bien compris la valeur des données et sait les faire fructifier. En effet, avoir les données de consommation offline de ses internautes permettrait un bien meilleur ciblage. Toutefois, avec un lancement de produit difficile (seulement deux téléphones

410 Forbes.com, How AT&T, T-Mobile and Verizons mobile payment app will work, 17/05/11 : http://onforb.es/JbrZag 411 Nfcworld.com, Top US retailers to develop their own NFC mobile wallet, 02/03/12 : http://bit.ly/HYB02I 412 Frenchweb.fr, Skimm finalise une levée de 300 000 euros, 13/04/12 : http://bit.ly/JpW28O 413 Video Youtube, Introducing Google Wallet, 12/08/11 : http://bit.ly/Ia9gsF 414 Nfcworld.com, Google in talks with carriers to take google wallet global, 02/03/12 : http://bit.ly/HWjsaY

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Android compatibles et une seule banque), un certain nombre d’ingénieurs de haut niveau ont été débauchés par la jeune start-up Square. Le deuxième géant est Facebook. En Juillet 2011, Facebook a imposé aux développeurs d’applications d’utiliser exclusivement sa monnaie virtuelle, les Facebook crédits. La société a de forte ambition sur le mobile et sur le commerce physique également. La commercialisation de cartes prépayées en points de ventes physiques, commercialisé par la société Topps n’est qu’une étape vers un portefeuille électronique Facebook. Apple est pour sa part plus réservé sur le mobile paiement, au- delà du fait bien sûr que le modèle iTunes a fait ses preuves et que la société a ainsi dans ses bases des millions de numéros de cartes bancaires à sa disposition. La firme a lancé récemment l’application EasyPay, uniquement disponible pour acheter dans ses propres magasins. L’expérience est très intéressante et facilite clairement l’expérience d’achat au point qu’aucune interaction avec un vendeur n’est nécessaire. Il suffit de se connecter au réseau wifi du magasin où l’on se trouve, de télécharger l’application appelée « Apple Store », de scanner le produit, de rentre son ID Apple puis le code de vérification à 3 chiffres de sa carte bleue et l’achat est effectué415. L’expérience se limite aux magasins d’Apple pour l’instant. Par contre, la société Acclivity propose un terminal de paiement avec scanner, du nom « Checkout » pour les magasins physiques utilisant des ordinateurs Mac comme caisse416.

Les acteurs du paiement traditionnel : Les fournisseurs de TPE (Terminaux de Paiement Electronique) et de système de paiement de carte de crédit ne sont pas en reste. Le mobile représente pour ces acteurs un risque de désintermédiation important. Ces acteurs régnaient en maître sur les systèmes de paiements dans le commerce physique. Le mobile peut changer la donne car il amène avec lui les géants du software et de l’internet qui y voient un cheval de Troie idéal. VeriFone est installé dans 70% des enseignes Américaines. Il a fait évoluer son matériel pour s’adapter aux nouvelles solutions de paiement. Il a développé le produit PAYware Mobile, intégré à une tablette ou un iPod Touch, permettant de procéder à des paiements en NFC par Google Wallet, ISIS et par Paypal417. La société VISA propose Paywave, il s’agit d’un nouveau terminal compatible NFC permettant aux marchands de recevoir des paiements par NFC, par carte bancaire compatible ou par smartphone. En parallèle, elle a commencé à distribuer ses nouvelles cartes bancaires intégrant le NFC. Le client n’a qu’à approcher son téléphone d’un terminal compatible pour payer, aucun besoin de code pin ou de scanner. Le terme Wave se réfère à ce mouvement que le client effectue pour réaliser son paiement. L’entreprise n’en reste pas là et souhaite également se positionner sur le portefeuille électronique, web et mobile, avec la solution V.me418. Mastercard a lancé pour sa part PayPass qui est une application smartphone liée à son compte bancaire permettant de payer par NFC, sans carte bleue, pour les achats en dessous de 25 dollars. Côté marchand, un terminal spécifique fourni par Mastercard est à prévoir. American Express est également actif en termes d’innovation produit. La société a bien lancé le service appelé Serve, un parfait concurrent à Paypal. Serve permet de payer online avec son email ou offline avec une carte prépayée. Une application mobile est également disponible pour le transfert d’argent entre particulier419. Les opérateurs Telecom Sprint et Verizon ont intégré Serve dans leur offre420. Il semble

415 Businessinsider.com, Apple’s Easy Pay makes it easy to spend money in the Apple Store, 02/04/12 : http://read.bi/Jess72 416 http://acclivitysoftware.com/products/ 417 Gigaom.com, Verifone equips retailers for the future of shopping, 16/01/12 : http://bit.ly/JoS6YF 418 Nfcworld.com, Visa unveils V.me wallet brand,16/11/11 : http://bit.ly/HXyZGT 419 http://www.serve.com/how-serve-works.html

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pourtant que la société soit bien plus intéressée par le social shopping et les offres personnalisées de coupons. Son accord avec Facebook et sa plateforme Go Social sont les premières étapes de cette stratégie. Elle a lancé une application Facebook pour transférer de l’argent avec son service Serve sans quitter Facebook421. Les banques réagissent aussi. En France BNP Paribas est la plus active en termes de service mobile et notamment de mobile banking. J’ai pu interviewer Magalie Zafimehy422 qui a travaillé sur les divers projets applicatifs de la banque, juste avant le lancement officiel de l’offre « BNP Paribas mobile ». Les 2 250 agences de la banque vont commercialiser des offres mobiles Orange incluant un choix parmi 8 smartphones dont 3 Cityzi, équipés de la technologie NFC423. Barclay a lancé une application appelée Pingit qui permet le transfert d’argent jusqu’à £300 en quelques clics vers n’importe quel terminal424. C’est début, le paiement de commerçant pourrait suivre.

Les initiatives de ces acteurs historiques sont nombreuses et ils ont bien compris l’urgence de la situation et son enjeu. Le problème majeur au développement du paiement sans contact par le mobile est double. Il faut à la fois attendre le renouvellement du parc de smartphones en place mais également remplacer tous les terminaux de paiement présents aujourd’hui en caisse. Deloitte évalue à 300 millions le nombre de téléphones supportant cette technologie d’ici 2013. En outre, la question de la sécurité des données se pose. Les portefeuilles électroniques sont généralement verrouillés par un code pin pour des raisons de sécurité. Les cartes bancaires NFC quant à elles sont encore faillibles. L’ingénieur Renaud Lifchitz a récemment démontré quelques failles de sécurité425. Contrairement au bluethooth, le NFC n’est pas crypté par nature. Son avantage est par contre de pouvoir être intégré à la carte SIM, ouvrant des perspectives que le bluetooth n’avait pas. Afin de relever le défi de la sécurisation des transactions par le mobile la société GenMsecure propose une solution. Fonctionnant sur tous les terminaux et quel que soit l’opérateur, il suffit à l’utilisateur d’associer son mobile à son compte bancaire ou à sa carte bancaire. A chaque opération, un mot de passe d’authentification sera automatiquement demandé à l’utilisateur. L’enjeu selon Annie Gay, CEO de la start-up est d’équilibrer entre simplicité et sécurité afin de permettre un déploiement grand public rapide des opérations monétaires sur mobile. La société américaine Payfone est également spécialisée dans la sécurité des transactions mobiles, elle travaille en outre avec Verizon et American Express.

Mobile as the POS (Point of sale) : Le smartphone devient ici un moyen de recevoir des paiements sur le point de vente. Une jeune start-up fait beaucoup parler d’elle depuis quelques temps, il s’agit de Square. Elle s’est donnée comme mission de réinventer le commerce, des deux côtés du comptoir. La société, créée en 2010 par Jack Dorsey, un des fondateurs de Twitter, procède à 4 milliards de dollars de paiement par an et compte 250 salariés. Richard Branson, KPCB et Visa ont investis dans la start-up valorisée à 1,6 milliards de dollars426. L’application permet à l’utilisateur de savoir quel commerçant autour de lui accepte le paiement par

420 Nfcrumors.com, Verizon and American Express integrate Serve on mobile and tablets, 01/08/11 : http://bit.ly/HNWZZj 421 Gigaom.com, Amex launches serve facebook app for personal payments, 28/02/12 : http://bit.ly/JkCKWV 422 Vincenttessier.fr, Interview de Magalie Zafimehy, le cas BNP Paribas, 13/11/11 : http://bit.ly/sqK6ul 423 Bnpparibas.net, la première offre bancaire mobile en France, 23/11/11 : http://bit.ly/IXaiEK 424 Guardian.co.uk, Barclay launches Pingit money-sending service for smartphones, 16/02/12 : http://bit.ly/I8JDax 425 Korben.info, Les cartes bancaires sans contact NFC ne sont pas sécurisées, 19/04/12 : http://bit.ly/HXBO6g 426 Mashable, Square raises $100 million, now worth more than $1 billion, 29/06/11 : http://on.mash.to/I7bLuu

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Square. Le client paie par carte bleu mais le magasin procède à l’opération sur un smartphone ou une tablette ayant téléchargé l’application Square en y ajoutant un simple lecteur appelé « card reader » (appelé également dongle). Il suffit de glisser la carte bleue et de réaliser une signature électronique. Ce type de solution rend obsolète les terminaux de carte bleue qui prennent de 2,5 à 5% de commission plus des frais de location du matériel. Les acteurs historiques vendent du matériel, Square vend un service. L’application permet même de se passer de la carte bleue avec « Pay with Square » ou également appelé « pay with your name » qui détecte un client ayant un compte square dans les 10 mètre. La fiche du client apparait ainsi que son historique, avant même d’avoir procédé au paiement (geo-fencing). Cela permet notamment au vendeur d’entamer un dialogue et d’être force de proposition. Square apporte l’expérience de recommandation d’Amazon dans le magasin physique. Pour régler un achat, le client n’a qu’à donner son nom et l’opération peut être réalisée en un clic. C’est clairement le système le plus simple jamais vu et le plus prometteur dans l’univers du paiement. Square retient un montant fixe de 2,75% et le lecteur et l’application sont gratuits. Le magasin récupère toutes les données de ses opérations et peut les consulter grâce à un tableau d’analytics. 1 million de marchands utilisent déjà la solution et Obama a retenu la solution pour sa campagne de récolte de fonds. La cible des petits commerçants comme les livreurs, les conducteurs de taxi, ou des particuliers comme les babysitteurs, a tout de suite adopté ce produit. Faire payer par carte bleue devient accessible à tout le monde. Une solution française se positionne pour développer un produit adapté au marché local et sur la même cible. Il s’agit de Cellfony qui proposera également un lecteur de carte bleue pour smartphone, la confirmation de la vente se fera ici par code pin, comme c’est le cas sur le marché Européen.

En 2011, Paypal a réalisé 118 milliards de dollars de paiement dont 4 milliards sur le mobile. C’est encore minoritaire mais la nomination récente de David Marcus, le fondateur du service mobile Zong est un signe fort que le groupe considère le mobile comme stratégique427. La société est très active dans le m-paiement et souhaite fermement prendre pied dans le monde réel. La solution Paypal Here, lancé en mars 2012, à destination des petits commerces n’ayant pas de lecteur de carte bleue est basée sur le même modèle que Square. N’importe quel commerçant peut télécharger l’application, insérer un lecteur de carte pour pouvoir se servir de son smartphone comme d’un terminal de paiement à carte bleue. Le client peut ajouter un pourboire, signe avec l’écran tactile et reçoit sa facture par SMS. A noter qu’il est également possible de payer en mentionnant simplement son nom au caissier, tout comme avec Square, en ayant téléchargé l’application Paypal qui permet d’être reconnu automatiquement, sans aucune action428. Paypal retient 2,7% de commission sur chaque transaction429. Elle innove sans cesse dans le domaine et travaille à un pilote avec l’enseigne Home Depot sur un projet permettant soit de payer avec une carte éditée par Paypal soit sans rien, ni téléphone, ni carte, juste en rentrant son numéro de téléphone sur le terminal430.

427 Thepaypalblog.Com, David Marcus is paypal’s new president, 29/03/12 : http://bit.ly/HCddWC 428 Businessinsider.com, Paypal showed the future of retail today, 15/03/12 : http://read.bi/Jqt4Wn 429 Thepaypalblog.com, Mars 2012 : http://bit.ly/J5ZbeL 430 Allthingsd.com, Paypals first mobile payments pilot is with Home depot, 06/01/12 : http://dthin.gs/HTCNpL

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Paiement en ligne par le mobile : Alors que le portefeuille électronique sur mobile pour le commerce physique fait de plus de plus parler de lui, il faut online, web et mobile. En effet, le portefeuille online existe depuis longtemps pour les paiements sur internet et le secteur du paiement en ligne est en pleine mutation depuis quelques temps. Le cabinet ADNco estime que les paiements alternatifs pourraient représenter 25% des transactions online d’ici 2015431. En France, les trois opérateurs historiques se sont associés avec Atos (50% des transactions sur internet) pour lancer Buyster. La solution permet le paiement online et offline. Il suffit à l’utilisateur de créer un compte en rentrant une fois pour toutes ses coordonnées bancaires ainsi que son numéro de mobile. L’objectif affiché est de remplacer le numéro de carte bancaire par le numéro de portable. En effet, les achats sont réalisés sur les sites partenaires en tapant son numéro de téléphone comme identifiant ainsi que son code Buyster à 6 chiffres. L’authentification se fait ici en recevant par un SMS un code unique à rentrer sur le site internet. Sur les achats effectués sur le mobile, il n’y a que la deuxième étape, étant donné que l’opérateur est à même d’identifier le client. Tout comme la solution Paypal, l’avantage pour le consommateur est de ne pas avoir à communiquer ses informations bancaires à tous les sites marchands auprès desquels il réalise ses achats. Sur internet, Paypal à un parc de 22 000 sites utilisant sa solution, Buyster en est encore loin mais a l’ambition d’atteindre les 30 000. Deux autres acteurs Français sont présents depuis longtemps, les sociétés Hi-Media et Rentabiliweb. C’est la filiale Hi-Media Payments qui a remporté le contrat avec le GIE ePresse pour effectuer les paiements de magazines sur iPhone et tablette par exemple. Rentabiliweb est actif depuis 2002 sur le micropaiement avec des offres de paiement par le mobile (SMS, Audiotel…) et vient de l’offre Be2Bill. Cette solution regroupe les services d’une banque et d’un prestataire de paiement avec une approche marketing. L’offre concerne pour l’instant uniquement la carte bancaire sur internet. Le crédit Agricole a également lancé son portefeuille électronique online en 2011 : Kwixo. La différence et l’intérêt majeur pour le Crédit Agricole est que le compte permet de réaliser des achats à crédit et le transfert d’argent entre particuliers, sur lequel il prélève une commission de 0,49 €. C’est ce que propose également la start-up LemonWay. Pour envoyer de l’argent à quelqu’un ou réaliser un paiement, il suffit de rentrer son numéro de téléphone. Le destinataire est invité à créer un compte LemonWay et reçoit son paiement sur son compte bancaire. La société cible également les vendeurs itinérants qui n’ont pas de lecteur de carte bancaire ou sur les marchés par exemple. Selon La Fevad, le paiement par carte bleue est majoritaire en France mais perd doucement du terrain à 83%. Le portefeuille électronique sur internet représente 21%.

On voit bien que le paiement digital aiguise les appétits de bon nombre d’acteurs. La Commission européenne a publié un livre vert sur le marché européen du paiement par carte, par internet et par téléphone432. La commission veut accroitre la transparence et la sécurité des paiements. Elle craint la multiplication de solutions propriétaires qui pourrait ralentir fortement la dynamique en train d’émerger.

431 Frenchweb.fr, Les paiements alternatifs representeront 25% des transactions online, 03/04/12 : http://bit.ly/ItkZSs 432 Livre Vert de la commission européenne sur le paiement par carte, internet et par téléphone, Janvier 2012 : http://bit.ly/IXw6QJ

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Pour comprendre ces initiatives, il est utile d’en dégager trois tendances fortes :

 Mobile AS the point of sale” : le mobile devient une caisse enregistreuse (Square, PAYware, Paypal Here…)  “Mobile AT the point of sale” : le mobile comme moyen de paiement par NFC ou QR Code  Le portefeuille électronique : o Le portefeuille électronique mobile (Google Wallet, ISIS, V.Me, Serve…) online et offline o Les portefeuilles uniquement online pour l’instant (Buyster, Kwixo, Hipay…).

Les 3 modèles de paiement :

Note : TPE = Terminal de paiement électronique

Malgré les déceptions que la technologie sans contact a générées depuis le temps qu’elle est annoncée, les initiatives ne cessent pas. Après des siècles d’utilisation de la monnaie et un ancrage de plusieurs décennies du chèque et de la carte bancaires, l’e-transformation des modes de paiement est en voie. L’argent a besoin de matérialité. Nous allons vivre le même choc que nos ancêtres qui sont passés du troc à la monnaie puis à la lettre de créance. L’être humain reste attaché au monde physique et a besoin de voir et de toucher. Quelque chose d’aussi essentiel que l’argent sera long à dématérialiser. Par ailleurs et comme souvent, l’adoption d’une innovation technologique ne se fait pas sans que les consommateurs y trouvent un réel intérêt. Certains pensent donc que la fidélisation et le couponing seront les deux leviers qui amèneront progressivement les consommateurs au paiement. Le transactionnel doit aller de pair avec le marketing, c’est pourquoi les entreprises du software rodées au service client ont des cartes à jouer pour pénétrer ce marché. Par ailleurs, la bataille est tellement difficile compte tenu des enjeux que la standardisation des technologies n’arrivera pas avant quelques temps. Brian Dunn, CEO de Best Buy et John Donahoe, CEO d’eBay ont fait passer le message lors du Mobile World Congress de 2012. Leur message s’adressait aux opérateurs mobiles en leur priant d’ouvrir plus le marché en termes de technologie et de capacité de réseau433.

433 Cnet.com, Best Buy and eBay CEOs tell mobile operators they need to change, 27/02/12 : http://cnet.co/JdBbtH

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3.3.3/ Après l’achat

Une fois le paiement effectué en magasin, le mobile a encore son rôle à jouer. On a évoqué le social shopping avant et pendant l’achat mais il est également présent après l’achat. Dire à ses amis ce que l’on vient d’acheter est tout aussi essentiel que de leur demander de qu’ils pensent d’un produit avant de l’acheter. Pour autant, le partage c’est bien mais s’il fallait que j’ouvre une application à chaque fois que j’achète quelque chose, l’usage serait long à déployer. Philip Kaplan a trouvé une solution radicale en 2009 avec Blippy. Le concept est : « What are your friend buying? » L’idée est de lier sa carte bancaire à son compte Blippy pour qu’à chaque transaction réalisée, un post sur facebook ou sur twitter soit émis. Si vous ne souhaitez pas twitter chacune de vos transactions, il suffit d’avoir deux cartes bancaires dont une dédiée à cela. C’est ce qu’on appelle le « passive sharing », l’action est réalisée automatiquement. Le projet était ambitieux, révolutionnaire voir choquant pour certain. Il faut croire que certaine idée arrivent trop tôt. Les fondateurs ont jeté l’éponge au bout de deux ans, faute d’adoption des utilisateurs434.

Un autre service intéressant se positionne post-achat, il s’agit de Eyeona anciennement appelé Savvy. Il nous est tous arrivé d’acheter un produit et de constater quelques jours après que son prix avait baissé, rien de plus énervant. L’application en question vous propose de prendre en photo votre ticket de caisse et de l’envoyer au service qui est connecté avec plus de 110 distributeurs américains. Si votre produit connait une baisse de prix par la suite, Eyeona vous préviendra afin de vous permettre d’aller réclamer une compensation. L’application permet également de surveiller un produit avant de l’avoir acheté, en fixant un prix cible auquel vous souhaitez être informé de la baisse par le distributeur. L’objectif de la start-up est de recréer du lien entre les consommateurs et les distributeurs et d’aider ces derniers à apporter plus de service à leurs clients435. L’enseigne de High-Tech Best Buy a montré une autre manière d’être présent après l’achat. Elle a mis en place un dispositif particulièrement important en place autour de Twitter. Elle a formé 2 100 vendeurs dans ses points de vente, identifiable avec un badge « Twelp Force ». L’objectif est de connecter ses vendeurs et de connecter ses vendeurs avec leurs clients. Une fois la vente réalisée, le vendeur donne leur adresse Twitter afin de rester en contact. Lors de l’installation d’un produit arrivé chez soi, le client peut twitter le vendeur qui pourra le renvoyer vers la bonne page d’aide à l’installation ou du FAQ du site Best Buy par exemple436.

Enfin, le mobile permet de scanner ses produits pour passer commande juste avant de les jeter à la poubelle. N’importe quelle application de votre distributeur préféré permettant le drive ou la livraison fait l’affaire ! Le bénéfice consommateur est clair, éviter de faire une liste de course et de retourner en magasin.

434 Techchrunch.Com, The end of Blippy as we know it, 19/05/12 : http://tcrn.ch/JrFU6z 435 Gigaom.com, Savvy rebrands as eyona to help retailers fight amazon, 23/02/12 : http://bit.ly/JlolKc 436 Video Best Buy, Twelp Force : http://bit.ly/JcPbns

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3.4/ Vers l’omnicanal

Réfléchir au bouleversement qu’amène le mobile dans la distribution amène forcément aux réflexions en cours sur le cross-canal. Cette notion est apparue depuis quelques temps pour évoquer les synergies et la réflexion globale que les marques et les enseignes doivent avoir dès qu’elles ont plusieurs canaux de distribution. On parle alors de distribution multicanal. Selon l’enquête “Baromètre UDA MD Expo”, le multicanal est plébiscité par les directeurs marketing, et 19% font déjà des actions de marketing directe incluant le off, le online et le mobile437. Arnaud Wielgus, directeur internet chez Conforama indique que 40% des visiteurs du site de l’enseigne préparent leur achat sur internet avant de terminer l’achat en point de vente physique. Neuf cyberacheteurs sur dix recherchent au moins un type de produits en ligne avant de l’acheter en magasin et plus d’un acheteurs sur deux a tendance à rechercher au moins un type de produit en magasin avant de l’acheter sur internet438. Le mobile renforce ces synergies de manière évidente. Or ces différents silos ont des organisations et des contraintes différentes qui ne facilitent pas la mise en place de synergies. La situation est d’autant plus compliquée pour les enseignes ayant un réseau de franchises. Le site internet et le mobile dans ces cas précis peuvent s’avérer de vrais outils de communication produits et d’aide à la vente pour l’intégralité du réseau. Tout un chacun a probablement déjà vécu l’expérience désastreuse d’acheter un produit dans un point de vente et de vouloir effectuer un échange dans un autre point de vente de la même enseigne. Cette expérience détruit la relation client et la fidélité à une marque. La notion de cross canal désigne les synergies possibles entre les canaux et il y a encore beaucoup à faire. L’enjeu est important car avoir une présence à la fois online et offline est justement ce que n’ont pas encore les pure players. Ils y réfléchissent bien sûr. Au-delà d’ouvrir des points de vente, ces acteurs sont déjà présents dans la poche des consommateurs mais ne se contentent pas de cela. Amazon a annoncé qu’il lançait des chèques cadeau dans 4 000 points de vente en France, bureaux de tabac et commerces de proximité439. La société Topps s’apprête à commercialiser en France les Facebook crédits aux caisses des grands magasins. Les distributeurs traditionnels n’ont pas le choix et doivent trouver ces synergies. C’est la première étape.

Le mobile et les profonds changements d’attitudes chez les consommateurs qu’il amène avec lui, repose la question de la synergie des canaux de manière plus forte que ne l’a fait internet depuis 10 ans. La convergence du commerce traditionnel et du e-commerce passe par une transformation des acteurs de la distribution. La fevad, avec le soutien du Ministère de l’économie, a publié un livre blanc intitulée « 2020, la fin de l’e-commerce ». Le titre volontiers provocateur met bien en évidence l’enjeu. « La fin de l’e- commerce, c’est donc aussi celle du commerce physique tel qu’on le pratique aujourd’hui » nous dit Catherine Barba. Comment mettre en œuvre une telle mutation ? Comment les enseignes et les marques peuvent-elles répondre au besoin d’expérience unifié des consommateurs ? Le transcanal ou l’omnicanal est cet horizon vers lequel les marques doivent aller qui permettra aux consommateurs de vivre une expérience riche et unifiée quel que soit le canal d’interaction : point de vente, média et digital. Le mot d’etailing a été évoqué pour décrire l’alliance du commerce et de l’e-commerce. On entend également

437 Baromètre UDA MD Expo 2011, http://slidesha.re/zli3cG 438 Kantar, Online shopper intelligence, 4ème trimestre 2011, http://bit.ly/I2Zae6 439 Frenchweb.fr, Up&Net lance le chèque cadeau Amazon dans 4000 points de vente, 16/02/12 : http://bit.ly/IdUujk

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parler de « seamless marketing » pour désigner une approche sans rupture de canal. L’idée reste la même : mettre le client au centre, car lui ne fait pas de différence entre les canaux. Un bel exemple de la magie que ce type d’expérience fait vivre est la synchronisation entre desktop et mobile que Google et Apple s’efforce de faire depuis quelques années. L’iOS 5 permet la synchronisation sans câble, les photos prises avec un Android de dernière génération se retrouvent automatiquement dans Google+. Il s’agit de simplifier la vie du client et de lui donner l’impression qu’il parle à une seule et même marque. Peu importe les barrières technologiques à passer, le gain en termes d’expérience client a beaucoup de valeur.

Quelques exemples d’expérience omnicanal :  Continuité de l’expérience  Cohérence entre les prix offline et online  Commander sur mobile et retirer en magasin  Commander en magasin un produit en rupture de stock sur le site internet de l’enseigne  Suivi de commande sur le mobile  Retour d’achats effectué online en point de vente physique  Reciblage publicitaire online sur la base d’achats effectués online

Cas pratiques : Nous avons évoqué Leroy Merlin dans la partie drive to store avec son application permettant de repeindre virtuellement les murs de sa maison à partir de l’application mobile. L’enseigne a organisé un Jeu concours à l’occasion d’un évènement en point de vente, le « Festival de ma maison », du 30 mars au 8 mai 2012. Le QR code est utilisé ici pour unifier l’ensemble des médias utilisés : courrier publicitaire, affiche abribus, PLV en magasin et page Facebook. Le fait de scanner le QR code amène vers une page mobile où a lieu un jeu de grattage permettant de gagner 50€440. Ikea a fait une campagne de publicité mobile renvoyant vers un mini-site permettant de parcourir l’intégralité de son catalogue. L’application ne permettait pas d’acheter directement mais de trouver le point de vente le plus proche441. La société Merlinmobility spécialisée en réalité augmentée propose une application de réalité augmentée permettant d’accompagner un client IKEA dans le montage de son meuble442. Il y a fort à parier que ce type de service après-vente renforce la fidélité à la marque ! Le géant Wallmart teste la voie des boutiques éphémères dont le seul but est de renvoyer du trafic sur son site internet et de finaliser online, tout en étant dans la boutique physique. Deux magasins ont été ouverts fin 2011 pendant une période d’un mois afin de proposer à leurs clients d’éviter de longues queues ou de porter leurs courses443. L’enseigne pharmaceutique Walgreens, déjà évoquée pour ses applications mobile permettant de commander ses médicaments de chez soi est un très bon exemple de synergie entre ses points de vente, son site internet et sa présence mobile. Les expériences évoquées plus haut de magasins virtuels et éphémères présents dans les gares et les centres villes sont de parfaits exemples. Tesco et Jetstore qui vendent des produits dans les transports en commun. eBay dans des vitrines éphémères en plein centre-ville. HMV a réalisé une belle opération dans

440 E-marketing.fr, Leroy Merlin invite à jouer sur mobile, 27/03/12 : http://bit.ly/JWM5PP 441 Mobilecommercedaily.com, Ikea drives consumers in-store via targeted mobile ads, 23/01/12 : http://bit.ly/IHjTl2 442 MerlinMobility IKEA demo : http://bit.ly/Jwrz8W 443 Huffingtonpost, Walmart tests web-driven Walmart.com stores, 11/10/11 : http://huff.to/GPBhIB

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les abris bus en novembre 2011, permettant aux passants de découvrir le catalogue de la Fox et de réaliser leur achat directement en scannant un code 2D avec l’application de l’enseigne444. Le code joue parfaitement son rôle de pont entre les canaux. Le digital permet de créer de nouveaux espaces de vente et ce au plus près des consommateurs.

La valeur des données : La guerre des prix que se livrent les e-commerçants et les points de ventes physiques n’est que le début. Ces derniers doivent trouver des solutions non seulement pour garder le niveau de trafic en magasins mais aussi pour préserver leurs marges. L’enjeu est également d’augmenter le panier moyen, le taux de conversion et la fidélité. Toutes les données récoltées notamment par les applications d’enseignes peuvent être utilisées pour proposer des expériences d’achat plus riches et personnalisées. Si je scanne mes produits ou que je paie avec mon mobile, je peux recevoir une alerte de la part de mon magasin habituel me proposant un coupon pour racheter ma marque de yogourt préférée au bout de 15 jours. Si je laisse un commentaire négatif sur une borne interactive après identification par NFC avec mon mobile, l’enseigne peut m’offrir 10 € de réduction sur mon prochain passage en magasin.

Source : econsultancy / Adobe445

90% des entreprises interrogées pensent que les données online seront importante pour optimiser l’expérience d’achat offline. Certains acteurs du digital se positionnent clairement du côté des retailers. C’est le cas de Shopkick évoqué dans la partie drive to store. Son partenariat avec Visa qui permet de gagner des points à chaque achat réalisé avec la carte Visa, donnant droits à des réductions par la suite, est extrêmement intéressant. Paypal souhaite aider les marchands à affronter les géants de l’e-commerce à du mobile et de la data. L’objectif est la personnalisation de l’expérience d’achat grâce aux informations de localisation et d’achats. Amazon a montré la voie à tout l’e-commerce avec les recommandations et les suggestions de produits, le commerce physique à de grande chance de répliquer le modèle également446. Walmart a récemment racheté plusieurs start-ups (kosmix et oneRiot) dans le domaine du mobile, du social et de la publicité ciblée qui ont rejoint le projet Walmart Labs. L’objectif est de proposer des

444 Thedrum.co.uk, Twentieth Century Fox launches virtual shop with Fox, : http://bit.ly/I2UPrj 445 Marketingcharts.com, Online data seen key to optimizing offline experience, 15/02/12 : http://bit.ly/I09p14 446 Techcrunch, How physical retailers can fight back against Amazon, 26/12/11 : http://tcrn.ch/GzBTvp

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recommandations par alertes mail ou mobile, mais aussi par geofencing au sein du magasin dans les rayons. Les outils internes que Walmart est en train de construire pour fusionner ses données onlines, les données sociales et les données de ses magasins offlines, vont bientôt être proposés en open source447. Les opérateurs de paiement comptent bien profiter également des données d’achats qu’ils enregistrent tous les jours. Visa teste d’ores et déjà des offres envoyées par SMS ciblées de manière comportementale. L’opération réalisée avec Gap en 2011 ciblait des utilisateurs qui effectuaient des paiements ou des retraits non loin d’un magasin de l’enseigne. Le dispositif n’utilise ni le NFC, le check-in sur un smartphone, il suffisait au client de montrer le SMS reçu en caisse pour profiter de la réduction448.

Les tendances à suivre dans le secteur de la distribution en 2012 :

Source : Forrester – European Online Retail – Five trends to Watch in 2012

Cette matrice du cabinet Forrester est intéressante pour tous les marchands car permet de mettre en évidence les priorités. Le multicanal est l’axe de développement au plus fort impact, avec les améliorations de livraison. Le mobile, les marketplace et l’enjeu des données viennent ensuite. Le sujet de transformer les points de vente en magasins connectés étant selon Forrester le sujet le plus discuté mais avec le moins d’impact business à court terme.

447 Gigaom, Wallmart labs is building big data tools and will then open source them, 23/03/12 : http://bit.ly/GPjNMp 448 Readwriteweb.com, Visa launches real-time, location-based discounts for Gap customers, 21/04/11 : http://rww.to/JX2dk8

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Conclusion

Nous sommes à un moment clé de l’e-transformation de la société. L’invention du réseau internet a posé les bases d‘une ère nouvelle. Depuis la création du premier navigateur en 1993 permettant l’essor du web, internet ne cesse de transformer notre manière de consommer, de s’informer et de socialiser. La vitesse est une des obsessions de Google qui travaille d’arrache pieds pour répondre le plus vite possible à nos demandes. Les relations sociales sont les fondements de l’ascension fulgurante de Facebook qui en fait son modèle économique. Après un web centré sur l’indexation de pages, le graph social a remis l’internaute au cœur du web. Depuis le premier mobile grand public le Bi-Bop lancé en 1991 et le lancement de l’iPhone en 2007, il ne s’est passé qu’une quinzaine d’année. Apple a accéléré de manière phénoménale l’essor des smartphones sur le marché. Nous sommes désormais dans une ère Post-PC où le mobile est le cheval de Troie du monde digital dans le monde physique. Après avoir longtemps été en opposition frontale, le monde virtuel et le monde réel se réconcilie grâce au mobile. L’engouement et l’adoption massive des consommateurs pour les smartphones est le moteur de ce mouvement. Le marketing est né du passage d’un marché peu concurrentiel basé sur l’offre à un marché basé sur la demande où le besoin de différenciation des marques est devenu vitale. Depuis lors, les marques sont sommées de s’adapter à leurs clients, à leur demande et d’être présent là où ils se trouvent. Ils se trouvent aujourd’hui sur leur mobile. Le taux de pénétration des smartphones commence à dépasser les 50% selon les pays et de plus en plus de sites internet voient la part du mobile dans leur trafic passer la barre des 10%. Le marché des applications a ouvert une brèche et a éduqué les consommateurs à payer sur le mobile. Mais cela n’a été que la première étape d’un mouvement plus large. Le commerce de biens physiques sur le mobile et l’utilisation du mobile dans les points de ventes est déjà une réalité.

La révolution en cours est bien plus importante que les 2% de chiffre d’affaires du e-commerce réalisés par le mobile (source : Fevad). Les changements de comportement et d’habitudes que le mobile induit chez les consommateurs sont profonds. La notion d’ATAWAD reflète bien cette attente forte de pouvoir communiquer avec les marques de manière fluide et sans frontière. Le mobile apporte la localisation et l’instantanéité, en d’autres mots, l’espace et le temps. Francis Pisani parle mobiquité pour évoquer ce sentiment d’ubiquité et d’immédiateté qu’apporte le mobile. Le mobile rend caduque la distinction entre le commerce offline et online. Les marques et les enseignes ont le choix d’investir aujourd’hui pour être acteur de cette transformation de notre économie. Il s’agit d’accompagner leurs clients dans leur mobilité pour d’un part saisir de nouvelles opportunités de business et surtout ne pas subir les effets de bords négatifs de l’entrée du digital dans les points de vente. Si elles laissent les start-ups et les géants du web prendre cette place, elles seront relayées au simple rôle d’annonceurs comme c’est le cas aujourd’hui sur internet sur les forums, les médias et les comparateurs de prix. Une fois convaincu de cette réalité, comment le digital peut-il être intégré dans ma stratégie marketing et commerciale? John MacCarthy, analyste chez Forester, évoque l’importance d’intégrer le mobile dans sa stratégie marketing mais aussi au cœur du système d’information. Les DSI devront renforcer la sécurité des données récoltées et les équipes marketing s’assurer de leur bon usage. La confidentialité des données est un élément central de l’essor des services mobiles. La publicité comportementale sur internet connait une forte croissance mais est régulièrement contesté, voir menacé. Facebook repousse petit à petit les limites de la vie privée, avec

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parfois des allers et retours. Le mobile a la capacité d’amener la personnalisation et le comportementale à un niveau jamais vu grâce aux données de localisation et de transactions monétaire. Le marché dans son ensemble doit s’autoréguler. A chacun d’être responsable afin d’éviter un scandale de trop qui freinerai ce formidable potentiel pour plusieurs années, voir décennies. John Donahoe, le CEO d’eBay, estime que le shopping et le paiement vont être impactés par la technologie de la même manière qu’elle a impacté les médias depuis 5 ans449. Il estime que sur la totalité des transactions du commerce physique, 50% ont été influencés à un moment donné par le digital. Tim O’Reilley a formulé la notion de Web 2.0 en 2004 pour décrire l’émergence de la voix de l’internaute et de la vague social. Il semble évident que le Web 3.0 n’aura pas lieu. Pour la simple et bonne raison que la prochaine rupture aura lieu dans le monde réel. Un mélange de web sémantique, de big data, d’intelligence artificielle et d’objet connecté. En 2009, le Web 2.0 Summit parlait de web squared (le web au carré ou augmenté). D’un point de vue business, après l’avènement du commerce sur internet, l’arrivée du digital dans le point de vente pousse les marques et leurs agence dans leur retranchement. Les synergies entre les métiers et les silos jusque-là imperméables deviennent vitales pour les marques et attendues par les consommateurs. Le mobile est un des éléments centraux de cette nouvelle réalité économique que nous appelons le shopping 3.0. Dans ce nouveau monde le mot même de digital va devenir obsolète tout comme le mot électricité, nous dit Mainardo De Nardis, CEO d’OMD450. La réalité augmentée, les lunettes Android de Google et le projet de commande vocal SIRI d’Apple en sont de belles illustrations. Sans clavier et sans écran, on interagit avec le monde sans avoir à penser la notion de digital. Ces évolutions majeures sont les prochains défis que les marques devront à relever, dans un avenir proche. Le mobile et l’omnicanal sont les portes d’entrées de ce nouveau monde.

449 Ebayink youtube channel, John Donahoe at CES 2012, 12/01/12 : http://bit.ly/ygkmvL 450 Interview de Mainardo de Nardis, CEO d’OMD par INfluencia, 2011 : http://bit.ly/I4FIdB

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Bibliographie

Source littéraire :

 Comment le web change le monde, Francis Pisani et Dominique Piotet, 2011, Pearson  La longe traîne : La nouvelle économie est là : Chris Andersen, mai 2007, Village Mondiale  La neutralité d’internet, Nicolas Curien et Winston Maxwell, Février 2011, La découverte  La méthode Google, Jeff Jarvis, Juillet 2009, Editions Télémaque  La grande conversion numérique, Mila Doueihi  Le marketing mobile de Fabien Liénard et Florence Jacob, 2009, Editions Dunod  Permission Marketing, Seth Godin, 2ème édition 2011, Maxima Laurent du Mesnil éditeur  Relever le défi du web mobile : François Daoust et Dominique Hazaël-Massieux, Janvier 2011 Editions Eyrolles,  Sur les traces de Big Brother, Alain Levy, 2010, L’éditeur  Tout nu sur le web, Jeff Jarvis, 2012, Pearson

Revue et publications professionnelles :

 Internet Marketing 2012, EBG  Le marketing mobile, IAB France, Janvier 2012  Le Guide du marketing mobile, AFMM, Edition 2010  Services mobiles, la rupture ! ACSEL, 2012  La fin du e-commerce, Fevad 2011

Principales sources d’études de marché et de statistiques: IDC, Gartner, IDATE, Internet World Stat, GFK, iSuppli, Forrester, KPMG, Deloitte, comScore Datamine, TNS Discover Mobile Life, Ourmobile Planet, Asymco, BusinessInsider, Google, Distimo, Flurry, econsultancy, Pew Research, Centre for Centrale Research, AFMM, Direct Marketing Association…

L’intégralité de mes sources d’informations est disponible à l’adresse suivante : http://vincenttessier.fr/these-professionnelle/sources/

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Entretiens

J’ai eu le plaisir d’échanger sur ce sujet passionnant avec les professionnels suivants :

 Alice Henry, Sales manager Europe, Inmobi  Aurélie Labonne, Community manager, Shopmium  Aude Perdriel-Vaissière, Co-fondatrice de Loddies et Swelen  Bertrand Jonquois, fondateur de l’agence GO SHOP, administrateur à la MMA et co-organisateur des Mobile Monday  Florence Jacob, auteur du livre Marketing Mobile aux éditions Dunod  Hervé Parienti, Fondateur de l’agence Les Nuages  Gilles Barbier, fondateur de Dismoioù  Magalie Zafimehy, Chef de produit mobile BNP Paribas, aujourd’hui webmarketing manager chez Alain Ducasse  Marc Benhaim, Chef de projet mobile, GS1  Nicolas Porteux, CTO de l’agence Airweb  Olivier Raussin, Head of Youtube Displau, Google.  Renaud Menerat, co-fondateur de l’agence UserADgent  Stanislas Coignard, Directeur associé de Marvellous / Isobar  Yann Casanova, Fondateur Fidall

La retranscription de l’ensemble des entretiens est disponible à l’adresse suivante : http://vincenttessier.fr/category/these-mba/interviews/

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Annexes

Annexe 1 : Le cimetière des plateformes

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Annexe 2 : Top 10 2011 by Distimo

Annexe 3 : Réseaux téléphonique

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Annexe 4 : Le succès fulgurant de l’iPhone

Annexe 5 : Les plateformes et leurs langages

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Annexe 6 : Framework les plus utilisés

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Annexe 7 : Le référentiel de gestuelles à deux doigts de Luke Wroblewski

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Annexe 8 : App store by Distimo

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Annexe 9 : Tableau de bord analytics d’un lieu sur Foursquare

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