Histoire d'Hayange en 4 parties

I. LA SEIGNEURIE D'HAYANGE DANS LE CADRE DE L'HISTOIRE RÉGIONALE II. LE VIEUX HAYANGE AU DÉCLIN DU XVIIIe SIÈCLE III. LA PAROISSE D'HAYANGE IV. L'INDUSTRIE DU FER A HAYANGE

par

l'abbé Pierre-Xavier NICOLAY, curé-archiprêtre d'Hayange IMPRIMATU R , le 26 Octobre 1937

A. LOUIS, provic. cap. HISTOIRE D'HAYANGE

Tome III

LA PAROISSE D'HAYANGE NOTE DE L'ÉDITEUR

M. l'abbé P.-X. NICOLAY est mort en exil pendant l'occupation. Des mains pieuses ont recueilli le manuscrit de l'ouvrage que nous vous présentons aujourd'hui. C'est grâce à elles, et nous les en remercions, que le tome III de l'histoire d'Hayange se trouve maintenant devant vous. C'est aussi grâce à M. le chanoine MORHAIN, supérieur du petit séminaire de Montigny, qui a bien voulu, sans intervenir -sur le fond de l'ouvrage, mettre au point le manuscrit de l'auteur. AVANT-PROPOS

En essayant de ressusciter le passé de notre petite Seigneurie d'Hayange, nous sommes partis de ce principe que la petite his- toire locale ne doit pas se rétrécir à quelques faits locaux isolés et mis en vase clos ; elle doit être reliée à l'histoire régionale qui l'ins- pire, la conduit, l'explique et lui donne l'envergure et l'intérêt qui lui manquent parfois. N'en est-il pas de même de l'histoire de la paroisse ? Ce serait singulièrement rapetisser les choses que de considérer notre paroisse comme un point isolé et indépendant sur le plan religieux et cultu- rel de la région . Qui ne voit que certains faits, certains courants, certaines lois dépassent le cadre de la petite paroisse ? Du reste, une paroisse fait partie d'une organisation plus vaste. Et même si ce n'était pas le cas, elle n'échapperait point à l'esprit de l'époque. Vouloir isoler de tout cela la petite paroisse pour en contempler la vie, le développement, l'activité, c'est comme si nous séparions du tronc de l'arbre telle branche qui nous intéresse particulièrement pour l'étudier à part... Nous n'aurions bientôt devant nous qu'un rameau desséché. Nous suivrons donc pour la paroisse la méthode que nous avons adoptée pour l'histoire de la Seigneurie, méthode qui, du reste, a été appréciée de nos souscripteurs. Nous dessinerons à grands traits, en en relevant les particularités intéressantes, l'histoire religieuse de la région et nous incorporerons, au fur et à mesure, l'histoire religieuse locale. Etait-il indiqué d'écrire cette histoire religieuse ? D'aucuns pourraient objecter que l'histoire religieuse d'une région n'a d'intérêt que pour les gens d'Eglise. Dom Calmet se proposait d'écrire simplement l'histoire de la Maison de Lorraine. Il avoue dans sa préface : « Je me suis trouvé dans l'engagement d'écrire aussi l'histoire ecclésiastique de ce pays, ce qui importe, par une suite nécessaire, les discussions sur l'origine de la religion chrétienne... pour l'information des mœurs et des qualités des peuples qui y demeuraient... » (1). En effet, l'évolution politique et sociale d'un pays avec ses périodes prospères et ses crises, ses conflits et ses guerres et avec tout ce qui constitue les efforts de nos ancêtres pour réaliser le Progrès, ne représente, en somme, qu'un côté de l'Histoire, côté parfois superficiel et certainement incomplet. Le mouvement culturel et religieux est plus profond. C'est là qu'il faut chercher l'élément essentiel de toute vraie civilisation. Je dirai même que pour nous, Lorrains, sans que pour cela nous ayons besoin d'être cléricaux, la religion, ses efforts, ses conflits, son influence, son œuvre civilisatrice, a tout naturellement sa place dans notre pensée, dans nos préoccupations, dans notre vie, comme elle l'a toujours eue dans la vie de ceux qui nous ont précédés dans cette Vallée. Nous ne séparerons donc pas la question religieuse de l'histoire du pays. Certains modernes ont cru devoir s'émanciper de ce prétendu « obscurantisme ». Nous ne perdrons pas notre temps à leur répondre. Les Hayangeois ne considèrent pas comme un signe d'infério- rité de rester fortement attachés à leurs traditions. Notre vieille paroisse existe depuis plus de douze cents ans. Elle a droit au respect. L'intérêt que les chers souscripteurs veulent bien lui témoigner prouve qu'ils savent apprécier à leur juste valeur les grandes forces morales et religieuses qui émanent de la plus humble église de vil- lage, forces dont le monde aujourd'hui ressent plus que jamais la

(1) Préface du tome I. nécessité devant la menace de l'envahissement du matérialisme athée et d'autres poussées qui ne valent guère mieux malgré leurs auda- cieuses prétentions. Tout cela conduit à la ruine de la vraie civilisation et prépare une révolution plus néfaste que celle dont nous retraçons les méfaits. Nous ne saurions que répéter à ceux qui seraient tentés de se laisser prendre par de pareilles chimères : Enlevez à notre cher pays de Lorraine ses églises, ses clochers, ses cimetières... ou encore laissez « le Progrès » affaiblir et briser les liens de la famille paroissiale, faites taire les chants et les prières de la foule, arrêtez l'exode de nos processions, tolérez que des mains sacrilèges et barbares abattent nos croix et nos chapelles rustiques, vous ne priverez pas seulement le paysage de l'élément le plus déli- cat de sa poésie et de son charme, vous tarirez les sources les plus pures de la force et de la vertu de notre peuple. Il est une vitalité profonde et cachée des esprits et des cœurs, nourrie de traditions ancestrales qu'aucun progrès matériel ne saurait remplacer. La fidélité à ces traditions préservera notre bonne Vallée de la de devenir une de ces banlieues qui ne sont plus, hélas ! qu'un corps sans âme.

PREMIERE PARTIE

L'Histoire religieuse jusqu'à la fin de l'ancien régime

CHAPITRE PREMIER

L'Histoire religieuse de notre région avant le christianisme

1. Les Celtes ou Gaulois 2. Les Gallo-Romains

1. LES CELTES OU GAULOIS

Vers l'an 600 avant Jésus-Christ, les Celtes se frayent un pas- sage à travers les forêts et les marécages du centre de l'Europe et franchissent le Rhin. Bientôt, ils occupent toute la Gaule. Dès lors, on leur donne le nom de Gaulois (1). Les Belges, voisins des Germains et quelque peu mélangés d'élé- ments germaniques, habitaient au delà du Rhin, jusqu'au III siècle avant Jésus-Christ. Sous la poussée de leurs voisins, ils occupent la rive gauche du Rhin et se répandent dans la vallée de la . C'est là que nous les trouvons sous le nom de Trévirois, de Médio- matriques et de Leuques. Ils font partie des Gaulois et en parlent la langue. Les Médiomatriques sont nos ancêtres. Une curiosité légitime nous fait poser la question : Quelle était la religion de ces lointains ancêtres gaulois ? Nous savons que leurs dieux étaient plutôt des dieux locaux de tribus ou de clans que des dieux nationaux. Les Gaulois n'avaient pas l'idée d'un Dieu tout-puissant, créa- teur des hommes et des choses. Ils adoraient les forces de la nature. On peut distinguer dans leur polythéisme :

a) le culte des eaux, des sources, des fontaines, des fleuves. La déesse la plus connue était Epona (2), dont les attributs

(1) V. Dom CALMET, Histoire de Lorraine, tome I. — Christus, Manuel d'his- toire des religions, Paris, 1927, p. 371-608. — PARISOT, Hist. de Lorr., tome I, p. 19-20. — Mythologie générale, publiée sous la direction de Félix Guirand, Larousse, Paris, 1935, p. 202-204. — DÉCHELETTE, Manuel d'archéologie préhistorique, tome I.

(2) Annuaire de la Société d'Hist. et d'Archéol. de la Lorraine, tome XXXXIV. — Une nouvelle Epona du Mont-Hérapel, p. E. BERCTHOL, p. 2. variaient : corne d'abondance, patère ou fruits. Elle peut être dé- signée comme la déesse de l'abondance agricole. Son culte, néan- moins, est intimement lié à celui des eaux, parce que c'est l'eau surtout qui féconde le sol. Plus tard, on en fit la protectrice des chevaux. On la représente accompagnée d'un cheval.

b) le culte des arbres. A cette époque, il y avait dans notre pays d'immenses et belles forêts. Les Gaulois, vivant beaucoup en forêt, avaient le culte des arbres majestueux, dans lesquels ils voyaient les dieux de la forêt. « C 'est dans les bois de chênes que les druides ont leurs sanc- tuaires, et ils n'accomplissent aucun rite sans feuille de chêne. Ils croient que la présence du gui révèle celle du dieu de l'arbre qui le porte... Ils le cueillent en grande cérémonie. Après avoir sacrifié deux taureaux blancs, un prêtre, vêtu d'une robe blanche, monte dans l'arbre et coupe avec une faucille d'or le gui que l'on recueille dans un drap blanc » (3).

c) le culte des animaux. Il n'est pas étonnant que, pour des païens vénérant les forces de la nature, certains animaux aient pu être des symboles vivants de force divine : le taureau, l'ours, le sanglier, le serpent ou certains monstres anguipèdes. Dans les Ardennes aux sombres forêts, on adorait surtout le sanglier. L'épithète qui est encore en usage : « sanglier des Ardennes » remonte donc à une bien haute antiquité. Si nos sources pour cette époque primitive sont excessivement rares, cela vient du fait qu'une littérature gauloise n'existait pas. Les druides, dont les connaissances étaient cependant très grandes et très variées, de sorte que les César et les Cicéron les honoraient de leur amitié, n'écrivaient pas, ils se transmettaient leurs secrets de mémoire, afin de les préserver contre toute indiscrétion et en aug- menter le prestige.

(3) Pline l'Ancien, Histoire naturelle, XVI, 249, cité par F. GUIRAND, Mytho- logie, p. 203. Ceux qui croient encore aujourd'hui au gui porte-bonheur sauront donc à quelle source remonte leur croyance. 2. LES GALLO-ROMAINS

On sait que la Gaule fut conquise par Jules César. En l'an 51 avant Jésus-Christ, elle est déclarée province romaine. Notre région mosellane restera romaine pendant quatre siècles et demi. La domination romaine y amena la religion gréco-romaine avec les divinités connues. Que deviendra l'ancien culte des indigènes ? Les Romains, bons colonisateurs, sont tolérants. Ils n'imposent pas leurs idées par la force. Ils laissent agir naturellement leur civi- lisation, leur religion et les mœurs. Petit à petit, on identifie tout simplement les divinités locales celtiques avec les divinités romaines. Teutatès, le dieu de la guerre, devint Mars. Nous trouvons des inscriptions : « Marti Teutati ». D'après Jullian, Teutatès fut aussi assimilé à Mercure. Lucain (4) dit que les Gaulois «adorent principalement Mercure comme le dieu du commerce, l'inventeur de tous les arts, le guide des voyageurs et le tutélaire des chemins. On en voit beaucoup d'images dans le pays... Ils l'appellent Teutatès. Ils lui immolent des hosties humaines. » On représente Mercure-Teutatès sous l'aspect d'un jeune homme aux chevilles ailées. Ses animaux symboliques sont le bouc et le coq, parfois aussi le serpent cornu. On associe à Mercure-Teutatès la déesse Rosmerta. Le dieu Taran identifié avec Jupiter était le dieu du tonnerre, de la foudre, des orages et de la pluie. D'après Lucain, on lui offrait également des sacrifices humains. Un autre dieu était Belen-Apollon, le dieu guérisseur, dieu des sources bienfaisantes, on lui associe Sirona, la déesse des fontaines On les invoque contre les maladies. B elisana-Minerve, la patronne des industries du feu. Sucellus, sous l'aspect d'un homme hirsute, le dieu au maillet. On l'appelle aussi Silvanus (dieu des bois). On lui associe Silvana ou Nantosuelta. Cernunnos, le cornu ou encore tricéphale, représente probable- ment la force malfaisante des ténèbres.

(4) LUCAIN, Pharsal, 1. 1, v. 446. V. D. CALMET, tome I, p. 12. Dispater, espèce de père commun dont prétendent descendre les Gaulois. Il avait pour compagne une déesse-mère (Demeter ou Cybèle). C'est la déesse de la Terre féconde. On introduira sous l'influence des soldats et des marchands ve- nant d'Orient le culte de Mithra, le dieu du soleil et de la lumière. On l'identifie parfois avec Apollon. On en a trouvé plusieurs statues en Moselle. Mentionnons enfin : les Mères, divinités de second ordre, mais très populaires. C'étaient les protectrices des sources et des humbles fontaines. Puis les nymphes, génies des rochers, des rivières, des étangs; les sulèves, déesses des forêts; les tutèles, fatae ou fées, tantôt bonnes, tantôt malignes. Quant au reste, chaque endroit, chaque vallée, chaque coin avait sa divinité spéciale. « Sylphes, gnomes, feux follets, farfadets, loups garous, écrit Salomon Reinach, sont autant de souvenirs vivants du passé celtique et même préceltique. » A ce point de vue, les vieux contes et tout ce qui fait partie de notre folklore régional est excessivement intéressant. Ils abritent les restes vénérables d'une époque bien lointaine. Jusqu'à nos jours, nous en constatons encore quelques survivances : les feux et les danses de la Saint-Jean (24 juin), les « brûles » (5), en carême, et le culte de la nuit et des morts. Curieuses survivances encore : les guérisons par le «secret », ainsi qu'elles se pratiquent dans certains villages isolés, les histoires de fées et d'animaux mystérieux, que l'on ne considère pas comme de simples contes, mais auxquelles on croit et qui jouent un rôle important dans la vie de certaines familles, ou de certains milieux à la campagne, ne serait-ce qu'à cause des maléfices et des personnes qui auraient le don de nuire aux animaux domestiques.

(5) Comme enfant, je me souviens avoir assisté tous les ans, à Serémange, aux fameuses « brûles ». Les jeunes gens traversaient le village avec un attelage, recueillant, de maison en maison, bottes de paille et fagots qu'ils emmenaient en un endroit bien en vue, au coin du chemin qui monte vers la Longe-Côte, face à l'ancien « trou-de-terre ». C'est là que, la nuit venue, ils en faisaient un grand feu. Et, à la lueur magique de ces flammes dans la nuit, ils proclamaient les futurs mariages aux habitants massés sur la grand'route près du « pont ». Ce vieil usage fut interdit, il y a une cinquantaine d'années, par le Kreisdirektor de . Somme toute c'était innocent, malgré quelques petits abus. Certaines jeunes filles que l'on trouvait trop fières étaient accouplées d'une façon plutôt ridicule avec tel célibataire dévoyé, ou tel garçon bien en dessous de leur rang. De là des rancunes et des colères. Les badauds s'amusaient royalement, tantôt sur une remarque plaisante, tantôt sur des sous-entendus moins innocents. On aurait dû laisser vivre ces vieilles coutumes. L'Eglise, pour ne point heurter la foi naissante de nos ancêtres et tout en rejetant ce qui était de la pure superstition, a agi avec sagesse en conservant certaines coutumes, après leur avoir donné un sens chrétien. Que de pèlerinages rustiques, que de vieilles pra- tiques trouvent ainsi leur explication (6). Les vieilles idées, les anciens usages légués par les ancêtres et ancrés profondément dans les mœurs ne se laissent pas déraciner facilement (7). Au VII siècle, saint Eloi dresse une liste d'étranges supersti- tions qui se maintiennent. Les paysans, même baptisés, « continuent de célébrer la fête de Jupiter et de s'assembler autour des sources et arbres sacrés » (8). , en 802, se plaint qu'on vénérât encore « les arbres, les rochers, les fontaines, etc. ». Qui oserait prétendre qu'aujourd'hui on ne consulte plus les sorciers, les devins et les cartomanciennes ? Si nous voulons y regarder de plus près, si nous penchons l'oreille sur certaines conversations, certains récits, le soir, dans la solitude de nos petits villages lorrains, au coin du feu, çà et là encore autour de la vieille grande cheminée éclairée de lueurs étranges et vacillantes, tandis que le vent gémit mystérieusement et que les bêtes sauvages poussent des cris sinistres dans la forêt voisine, nous constaterons des survivances bien tenaces qui remontent aux âges celtiques et païens. Et ces récits fantastiques sont écoutés dans un religieux silence et par les vieux et par les jeunes, avec une foi à laquelle vous vous heurterez en vain. Tout cela est ancré dans le fond même de leur nature, qui est restée celtique jusqu'à nos jours.

(6) V. E. BERGTHOL, Le culte d'Epona dans la cité des Médiomatriques, dans l'Annuaire d'Histoire et d'Archéologie de la Lorraine, t. XXXXIV, année 1935. « La religion chrétienne ne pouvant faire disparaître toutes les coutumes anciennes, les transforma en les christianisant..., p. e. le culte des eaux, des mon- tagnes... Epona fut remplacée par saint Eloi, patron des chevaux... » Un petit village, purement rural, nous en a conservé le souvenir... dans le fameux pèlerinage des chevaux à . Moi-même j'y ai assisté bien souvent. Les cultivateurs y viennent prier pour leurs chevaux. A l'offrande, ils offrent un paquet de crins devant l'image de saint Eloi. Autrefois, ils amenaient leurs chevaux. Aujourd'hui, les bêtes n'y viennent plus, mais la procession autour de l'église se fait encore. (7) Dictionnaire d'Archéologie chrétienne et de Liturgie, fascicule 148-149, p. 2.208: « La religion pouvait être changée : la vie locale ne l'était pas. Et quand on voit avec quel soin l'Eglise a transformé ces usages, sans les détruire, on comprend tout l'intérêt qu'elle avait à les respecter. » (8) Mgr BAUDRILLART, Conférences de Notre-Dame, année 1928, p. 28. — Edi- tions Spes, Paris, 1928. Il était pour le moins intéressant de signaler la source de ces restes de paganisme attardés dans les couches populaires, malgré 1500 ans de christianisme. Nous savons peu de choses sur le culte que rendaient à leurs divinités nos ancêtres gaulois. Le sacrifice en était l'élément essentiel. Les victimes étaient par- fois des victimes humaines. Les Gaulois ne semblent pas avoir eu de caste sacerdotale pro- prement dite (9), le culte était plutôt patriarcal : les chefs de familles ou de tribus ou encore les druides offraient les sacrifices. Qu 'en est-il des druides ? « Ils s'occupent, dit César, des affaires des dieux, veillent aux sacrifices publics et privés et interprètent les matières religieuses. » Strabon affirme que les Celtes « n 'offraient pas de sacrifices sans les druides ». On peut dire que ces druides jouent un rôle prééminent dans la vie publique des Celtes, à cause de la supériorité de leurs connais- sances en tout, « ils étaient experts en droit, éducation, poésie, his- toire, sciences morales et physiques » (10). Dom Calmet exagère sans doute en en faisant les ministres de la religion. Quant au reste, il les dépeint très exactement (11) : « Ils interprètent tout ce qui regarde le culte des dieux. Ils ont toujours un grand nombre de disciples qui viennent à eux, attirés par les honneurs que l'on rend à ceux qui embrassent leur genre de vie, car ils sont juges de presque toutes les difficultés qui surviennent tant pour les intérêts publics de la Nation que pour ceux des particu- liers. S'ils s'agit d'un crime, d'un meurtre, d'une succession, des limites d'un héritage, de peines ou de récompenses, on s'en rapporte à eux et on s'en tient à leur décision. Si quelqu'un, de quelque qualité qu'il soit, refuse de s'y soumettre, il est privé de la participation des sacrifices qui est pour eux la plus grande peine que l'on puisse imposer : car ceux qui sont ainsi excommuniés sont regardés des autres comme des impies et des scélérats. » Nous avons parlé des sacrifices des Celtes. « Une maxime de leur religion est qu'il n'y a qu'une victime humaine qui puisse racheter la vie d'un homme. Il faut donner à dieu âme pour âme, vie

(9) John MAC NEILL, art. Religion des Celtes, dans Christus, Manuel d'histoire des religions, p. 598, (10) Ibid., p. 597. (11) D. CALMET, tome I, p. 10. pour vie. Quelquefois aussi, ainsi que l'a noté César (12), quand le péril regarde toute la nation ou toute la province, ils dressent une figure humaine d'une grandeur énorme, grossièrement composée avec des branches d'osier entrelacées, puis ils la remplissent d'hommes vivants et y mettent le feu et font périr ces malheureuses victimes. » D'après Diodore (13), « lorsqu'il s'agit de quelque entreprise importante, ils immolent un homme, puis ils lui ouvrent la poitrine en travers avec une épée et tirent des présages pour l'avenir, de la palpitation et du mouvement de ses membres et de l'écoulement de son sang. » Lucain nous laisse entrevoir une de leurs forêts sacrées au culte mystérieux : «L'horreur et l'obscurité qui y régnaient inspiraient de la frayeur à tous ceux qui y entraient. On y voyait des autels sur les- quels on immolait des victimes humaines et du sang desquelles on arrosait les arbres des environs. Les figures des dieux, travaillées sans art, étaient placées sur des troncs d'arbres informes, et leur air sombre et négligé inspirait plus de respect que n'auraient fait des statues mieux travaillées (14). Ce n'est pas sans frémir que nous pensons à tous ces horribles mystères de nos forêts aux temps du paganisme. Ces pratiques inspiraient l'horreur même aux Romains païens. L'empereur Tibère abolit les druides, mais ses ordonnances furent mal observées, de même que celles de l'empereur Claude. Strabon dit que les Romains supprimèrent aussi les coutumes cruelles des sacrifices humains. Mais les druides et les mystères se réfugièrent dans les coins solitaires où ils se maintinrent encore très longtemps malgré toutes les défenses (15). La civilisation païenne, avec le vernis brillant qu'y mirent les Romains et le progrès matériel extraordinaire qu 'ils suscitèrent dans les Gaules, n'avait pas réussi à changer le fond des cœurs. Ce fut l'œuvre de la civilisation chrétienne.

(12) CÉSAR, 1. 6, C. 15. V. D. CALMET, tome I, p. 10. (13) DIODORE, 1. 5, p. 308. — V. D. CALMET, tome I, p. 11. (14) LUCAIN, Pharsale, 1. 3, v. 400, cité par D. CALMET, tome I, p. 11. (15) STRABON, 1. 1, p. 198, cité par D. CALMET, tome I, p. 13. V. aussi SUÉTONE, 1. 5, c. 24.

CHAPITRE II

Le Christianisme

1. L'aspect général du pays. 2. Les premières influences chrétiennes. 3. Saint Martin et le christianisme dans les campagnes. 4. Les plus anciennes fondations chrétiennes. 5. Difficultés pendant la période des invasions.

1. L'ASPECT DU PAYS

C'est pendant cette période gallo-romaine que le christianisme pénétra dans notre contrée mosellane. Tout semblait faciliter sa diffusion. Au point de vue matériel, le pays s'était entièrement métamor- phosé. Ce n'était plus un pays sauvage et primitif, c'était un pays hautement civilisé. Un réseau merveilleux de routes facilitait les voyages et le commerce, les mouvements de troupes et les relations avec la capitale. Voici comment un historien dépeint la Gaule de cette époque : « Aux villes de terre et de bois succédaient des villes de pierre et de marbre; de toutes parts s'élevaient comme par enchantement ces forums, ces aqueducs, ces temples, ces thermes, ces cirques, ces amphithéâtres, non seulement au sein de nos cités, mais dans des campagnes aujourd'hui solitaires et jusque dans les vallons les plus retirés de nos montagnes (1). Rome n'a pas besoin d'imposer ses méthodes. Les Gaulois s'em- pressent de les adopter d'eux-mêmes. Il semble bien qu'au second siècle de notre ère, on aurait pu dire de l'ensemble de la Gaule, ce que Pline, au premier siècle, disait de la Narbonnaise : « Par la culture de ses champs, par ses hommes et la dignité de leurs mœurs, par l'abondance de ses ressources, c'est vraiment l'Italie plutôt qu 'une province » (2). Notre région mosellane est toute constellée de belles villas romaines : les unes, maisons de propriétaires ruraux avec vastes dépendances, les autres, somptueux palais. Jusqu'au milieu du

(1) Henri MARTIN, Histoire de , tome I, p. 203. (2) Manuel d'Archéologie préhistorique, celtique et gallo-romaine. Jos. DÉCHE- LETTE, VI. — Archéologie gallo-romaine, p. A. GRENIER, 2 partie, p. 1021. III siècle, les constructions reflètent la prospérité et le bien-être général (3). Pour protéger et maintenir tout cela, Rome implante l'ordre, la discipline, l'esprit administratif et centralisateur, dont nous gardons l'empreinte jusqu'à nos jours.

2. LES PREMIÈRES INFLUENCES CHRÉTIENNES

Le christianisme, après l'époque apostolique, eut à vaincre d'énormes difficultés en raison des hostilités impériales et des persécu- tions violentes qui s'étaient juré d'exterminer le nom de chrétien. Dans de pareilles conditions, l'apostolat était presque complète- ment paralysé. La première église des Gaules, celle de Lyon, fut fondée vers l'an 160. Les premières inscriptions chrétiennes de Trèves et de Metz sont du IV siècle. Le célèbre Paul Diacre, historien du temps de Charlemagne, faisait remonter les débuts du christianisme « à saint Clément, envoyé directement par saint Pierre ». Il affirmait, en outre, que saint Clément construisit sa première église dans les souterrains de l'am- phithéâtre de Metz. Lorsque, en 1900, les Allemands mirent à nu ces vénérables ruines, on retrouva les substructions d'un assez grand édifice avec ses fûts de colonnes, qui pourrait bien avoir été l'oratoire de saint Clément. L'amphithéâtre ne fut détruit que vers le IV siècle, au moment des invasions. Ce n'est qu'après cela que saint Clément put s'ins- taller dans les ruines. La mission de saint Clément ne remonte donc pas au temps de saint Pierre (4).

(3) Op. cit., p. 935. (4) Sur l'apostolicité de l'Eglise de Metz, voir: V. CHATELAIN, Nouvelles recher- ches sur l'origine de l'Eglise de Metz, dans Rev. eccl., t. XV, 1904, p. 173, 369. — V. PROST, Etudes sur l'histoire de Metz. Les légendes, Paris, 1865. — E. PAULUS, Etudes sur la légende de la venue et du séjour de saint Clément à , Jahrbuch, t. VIII, 1895, p. 30-48. — Hist. eccl. et civ. de la ville et du diocèse de Metz, par le P. BENOIT, Bibl. municip. de Metz, fonds hist., 126 et 127. — CLOUET, Hist. eccl. de la Province de Trèves, Verdun, 1844-1851. — CHAUSSIER, De l'origine apostolique de l'Eglise de Metz, Paris, 1847. — DUCHESNE, Les fastes épiscopaux de la Gaule, t. III, Paris, 1915, p. 44-58. — Dictionnaire d'Archéologie chrétienne et de Liturgie, fasc. 118-119, art. Metz, p. 790. « On peut très bien admettre qu'il y ait eu à Trèves et à Metz, sinon à Toul et à Verdun, des embryons de communautés chrétiennes comprenant quelques dizaines de membres et qui, d'ailleurs, n'ont pas laissé de traces de leur existence... Ce sont des groupes qui avaient à leur tête des catéchistes... ou un diacre... relevant de l'évêque de Lyon, le seul que la Gaule ait possédé pendant une période assez longue...... Vers la seconde moitié du III siècle, au moment où l'on entoura Metz d'une enceinte fortifiée, l'amphithéâtre étant abandonné et en voie de destruction, rien n'empêchait un homme entreprenant, et la petite secte qui s'établit autour de lui, de s'insinuer dans ces ruines, d'y accommoder une église dans les souterrains désormais déserts... » (5). En 313, l'empereur Constantin ayant proclamé par l'édit de Milan la liberté pour les chrétiens, la diffusion de la religion chré- tienne devenait possible, mais encore fallait-il des apôtres et aussi une période de préparation : apprendre la langue du peuple, vaincre les difficultés d'ordre matériel, créer un ordre nouveau. A la fin du IV siècle, l'empereur Théodose-le-Grand (379-395) fit de la religion chrétienne la religion officielle de l'Etat. Dès lors, ce fut la période de diffusion générale.

3. SAINT MARTIN ET LE CHRISTIANISME DANS LES CAMPAGNES

Les villes eurent évidemment les prémices de l'Evangile. Les campagnes suivirent à petits pas et d'assez loin. Dans la Gaule, le christianisme eut surtout deux grands pro- pagateurs : saint Hilaire, l'éloquent docteur, si zélé à garder la pu- reté de la doctrine contre l'hérésie de l'arianisme qui, par les efforts de l'empereur Constance, menaçait de s'implanter dans nos pays, et saint Martin, le grand thaumaturge et apôtre des campagnes gau- loises. Il est né en 317. Un historien dit : « Il joncha la Gaule de ruines, renversant les temples, brisant les simulacres, coupant les bois sacrés » (6).

(5) Dictionnaire dl Archéologie chrétienne et de Liturgie, art. Metz, fasc 118- 119, p. 810. (6) Henri MARTIN, Histoire de France, tome I, p. 316. Il parcourut les campagnes, gagnant tout au Christ. Il était tellement considéré dans tous les milieux, que les empereurs le fai- saient servir à leur table avant eux. Martin fit trois fois au moins le voyage de Trèves, où l'empereur romain avait sa résidence : en 372, 385 et 386. Il passa donc peut-être par notre contrée mosellane en suivant la route de Metz à Trèves. Il n'est pas impossible qu'il ait visité, en la traversant, la vallée de la Fensch. Son souvenir s'est attaché aux églises d'Hayange et de . Nous savons que ses disciples, en élevant des églises, choisis- saient le lieu « illustré par son paysage ou son séjour, ou pour quel- que miracle dû à son intervention. Là s'élevait l'église, le saint en était le titulaire et devenait le patron céleste et le protecteur de la population. Les saints les plus populaires, ceux qui avaient par- couru le pays en missionnaires, donnèrent leur nom à un grand nombre d'oratoires ou d'églises. En France seulement, il y a 3.675 églises paroissiales sous le vocable de saint Martin, et 485 bourgs, hameaux ou villages qui portent son nom » (7).

4. LES PLUS ANCIENNES FONDATIONS CHRÉTIENNES DE NOTRE RÉGION

Il est certain que les plus anciennes paroisses du pays de la Fensch sont et Hayange. La première église de la ville de Metz fut dédiée à saint Pierre. Fontoy est une fondation romaine, « ad fontes » — « aux sour- ces ». Le patron de l'église est saint Pierre, ce qui dénote une fon- dation primitive. Hayange est placé sous le patronage de saint Martin. On sait que les plus anciennes églises rurales sont dédiées à ce saint apôtre des Gaules. Comme nous l'avons dit dans le premier volume, il y avait, dans la vallée, un antique domaine royal. Il existait à l'époque carolin- gienne et mérovingienne. Nous n'en savons pas l'origine, mais sans nul doute continuait-il un état de choses de l'époque gallo-romaine. Plus tard, ce domaine donna naissance aux Seigneuries d 'Hayange, de et de Thionville.

(7) LESÊTRE, La paroisse, p. 24. Où pouvait bien être le premier centre religieux de ce domaine ? Ce n'était pas Thionville. L'origine de cette ville ne paraît pas remonter au delà des Carolingiens. était anciennement le cen- tre de l'agglomération romaine et gallo-romaine, ainsi que le centre administratif du comté (comitatus judiciensis). Etait-ce Florange ? Florange n'était pas paroisse à l'époque de Charlemagne. L'église ancienne se trouvait dans le hameau de Harling, le long de la route d' à Hayange. Impossible de fixer l'origine de cette église de Harling. Une église primitive romaine ou gallo-romaine serait plus naturelle à Daspich, station de relais importante sur la voie romaine principale de Metz à Trèves et à l'embranchement d'une route secondaire vers Hayange, Fontoy, Audun-le-Tiche. Har- ling n'est pas sur la voie romaine et n'a jamais été un centre. Au- cune trouvaille à Daspich qui ait un caractère chrétien. Harling est un centre géographique avec les annexes. Florange, même du temps des Carolingiens, était une grande ferme royale. Petit à petit, les esclaves ou ouvriers qui travaillaient dans cette exploitation formè- rent une agglomération, sans qu'on ait songé à en faire le centre paroissial. L'église paroissiale n'est à Florange que depuis la fin du XVIII siècle. Et Hayange ? Le nom nous ramène à l'époque franque « Heyinga Villa » (8). L'église d'Hayange, dédiée à saint Martin, située en bordure de l'ancienne route romaine, est sans contredit un centre religieux plus ancien que Thionville et Florange, avec leurs églises dédiées à saint Maximin (9) et à sainte Agathe (Harling). Nous ne pouvons pas étayer ces assertions sur des inscriptions de l'époque. Mais, dit Camille Jullian, « il ne suffit pas de déchiffrer une charte ou de faire l'index d'un cartulaire, il faut localiser, non seulement en ce sens qu'il faut repérer les substructions d'une villa, d'un fundus, qu'il importe surtout de reconnaître autour de la villa le domaine qui en dépend. » Or, c'est un fait certain qu'anciennement une grande partie de la vallée dépendait d'Hayange. Hayange était un centre de

(8) Hei (hey, hoy, he) veut dire « Bois enclos). Heyingen = le village, situé dans le bois enclos ou aux abords. Où était ce bois enclos? C'était tout simplement la partie boisée du domaine royal, avec ses chasses réservées. Y habitaient les ouvriers occupés dans l'exploitation de ces forêts et probablement déjà des mines, car on a trouvé des « loupes de fer » du temps romain. V. aussi Herapel, p. F. DOSDAT, dans les Cahiers lorrains, 1937, p. 83, 84. (9) Auparavant Sainte-Croix, ce qui nous ramène peut-être aux Croisades. domaine. Nous ne dirons pas: on a créé un centre religieux et, après cela, on y a rattaché toutes les agglomérations dans un certain rayon. Non, ce n'est pas ainsi que l'on procédait. On a tout simplement construit à Hayange la primitive église, à l'époque de la christianisation du pays, parce que Hayange était le centre d'un domaine. « L'église, dit Jullian, est régulièrement le centre du « fundus » (domaine rural gallo-romain). C'est de l'église que le plus souvent rayonnent les chemins, voies privées du domaine....Les premières églises rurales fondées dès le IV siècle, se sont trouvées, en effet, dans la villa ou à ses abords, c'est-à-dire au centre du domaine. L'ora- toire chrétien remplaçait dans le domaine le laraire du maître et, sauf raison particulière, l'église ne changeait pas d'emplace- ment. » (10). L'organisation paroissiale s'est adaptée au régime foncier de la Gaule. » C 'est ainsi du reste qu 'ont procédé saint Martin et ses disciples, les grands apôtres des campagnes gauloises, et le nom du grand saint Martin attaché à notre vieille paroisse ne l'est certainement pas par hasard. Il y a là des raisons historiques qui sont mêlées aux brumes d'un passé fort lointain. Si l'on nous objecte que la première charte mentionnant l'exis- tence de la paroisse d'Hayange, avec ses nombreuses annexes dissé- minées dans un rayon de plus de 10 km., ne date que de l'an 821, nous répondrons que la charte révélant tout simplement l'existence de la paroisse à cette date, ne prouve en rien la non-existence anté- rieure, bien au contraire la présuppose. Quant à fixer exactement le moment de la création de la pa- roisse, nous ne saurions en avoir la prétention. Nous dirons seule- ment qu'après la conversion des Gallo-Romains, vers le IV siècle, au plus tard au début du V ou VI un centre religieux pour une région traversée par la voie romaine et centre d'un domaine, région très avantageuse et très agréable, si rapprochée du centre important de Metz par la grande voie romaine, est probable. Mais aucun texte ne le prouve. Toutefois, la présence du cime- tière mérovingien d'Hamévillers près d'Hayange, qui date de cette époque et dont les tombes sont orientées, semble confirmer notre hypothèse.

(10) Manuel d'archéologie gallo-romaine, DÉCHELETTE, VI, 2 partie, p. 922, 940. Nous avouerons, avec Dom Leclercq, que « malgré le nombre certainement considérable de créations de saint Martin dans les cam- pagnes, on n'est pas autorisé à croire que les innombrables églises qui subsistent sous son vocable aient été élevées par lui et soient d'authentiques témoins de son passage et de sa prédication » (11). Mais nous affirmons par contre que ces églises ont été construites alors que le souvenir du saint était encore très vivant.

5. LES INVASIONS

L'action bienfaisante du christianisme fut certainement boule- versée par les invasions barbares. En 313, les Germains pillent le camp romain de Daspich. Ils n'épargnent, sans doute, pas le reste de la vallée. En 356, ils reparaissent. L'empereur Julien les bat près de . Mais ces premières invasions ne furent rien à côté du cata- clysme que représente la ruée des Huns sur la Gaule. « Au V siècle, les grands mouvements des peuples ne peuvent plus être arrêtés le long du Rhin par une barrière de troupes... Ce fut pour Metz un siècle particulièrement funeste et dont les dé- sastres sont restés fameux... » (12). « On brûle, on tue, on emmène des prisonniers. » Saint Grégoire de Tours, qui relate ces faits, a connu les vieillards témoins de ces horreurs. Nous comprenons dès lors la présence de notre population chré- tienne dans les forêts bordant la petite vallée d'Hamévillers, isolée des routes et à l'abri des visites indiscrètes. Les invasions furent très funestes au développement du christia- nisme. Au vie siècle, nos campagnes étaient en partie retombées dans le paganisme, même à proximité des villes de Trèves et de Metz. Ce n'est qu'au VII siècle que la vie chrétienne reprend (13). Entre-temps, les Francs, nouvellement établis en nos régions et encore païens, se sont mélangés aux anciens habitants chrétiens.

(11) Dict. d'Archéol. et de Liturgie, art. Paroisses rurales, fasc. 148-149, 1938, p. 2206. (12) Dict. d'archéol., art. Metz, fasc. 118-119, p. 811, 812. (13) Dict d'archéol., art. Paroisses rurales, fasc. 148-149, 1938, p. 2204. Cette population renaissante fonde ou relève les villages à la dési- nence « ingen » ou « heim ». Les rois francs embrassent le christianisme et petit à petit se civilisent. Tout en gardant la férocité des mœurs païennes, ils favorisent la diffusion du christianisme. Ils la favorisent surtout dans leurs domaines en fondant des centres paroissiaux, d'où dépendent leurs ouvriers agricoles et les esclaves ou manants qui exploitent pour leurs maîtres ces vastes domaines (14). C'est bien ainsi que nous avons à nous figurer la fondation ou la résurrection de notre centre paroissial de « Heinga villa ».

(14) Dict. d'archéol., ibid., p. 2207. CHAPITRE III

L'Organisation ecclésiastique de notre région

1. La création des diocèses lorrains. 2. Les archidiaconés du diocèse de Metz. 3. Les archiprêtrés. 4. L'archiprêtré de Thionville.

1. LA CRÉATION DES DIOCÈSES LORRAINS

A partir du V siècle et surtout aux temps carolingiens, les dio- cèses de notre région se sont organisés. On a prétendu que les diffé- rentes circonscriptions ecclésiastiques se rattachent aux divisions administratives du pays sous les Romains et les Francs (1). La région lorraine compta très tôt quatre diocèses : 1° l'archidiocèse de Trèves. Trèves devait tout naturellement cette prééminence à sa situation de capitale transalpine de l'Empire Romain; 2° les sièges suffragants de Metz, Toul et Verdun. Ces diocèses se maintiendront, dans la province de Trèves, sans modification notable jusqu'au Concordat de 1801, sauf une réorganisation du diocèse de Toul vers le dernier quart du XVIII siècle, lors de la créa- tion des diocèses de Nancy et de Saint-Dié aux dépens du vaste dio- cèse de Toul (2). Nous n'entrons dans aucun détail de l'organisation de la pro- vince ecclésiastique de Trèves. Rappelons seulement que l'archidia- coné de Longuyon, comprenant le pays de , d', de Longwy, Stenay, Ivoy-Carignan, longeait notre petit pays. Voici les paroisses voisines appartenant au diocèse de Trêves : Sancy, , , , avec , , Crusnes, Villerupt, Audun-le-Tiche, Esch, etc.

(1) DESNOYERS, Topographie ecclés. de la France, dans l'Annuaire de la Société de l'Hist. de France, 1859, p. 54. — LEPAGE, L'Ancien diocèse de Metz, p. 27. — N. DORVAUX, Pouillés, p. 16, hésite devant toute conclusion un peu précise, faute de documents. (2) L'évêché de Nancy a été érigé le 19 novembre 1777 par le pape Pie VI. Le diocèse de Saint-Dié date du 22 juillet 1776 (v. Atlas historique du diocèse de Metz par G. BOURGEAT et N. DORVAUX, p. III). Un regard sur la carte sera plus instructif et orientera plus rapidement que de longues explications. Nous avons donc cette situation assez curieuse que le diocèse de Trèves, dont la métropole était en même temps capitale de l'Elec- torat de Trèves faisant partie de l'Empire Germanique, s'étendait en même temps sur le duché de Luxembourg, des parties du duché de Lorraine et de la province française des Trois-Evêchés, tandis que le diocèse de Metz englobait des provinces françaises, lorraines et auparavant la prévôté de Thionville, faisant partie du duché de Luxembourg, sans compter les différents Etats situés à l'est, où de profondes modifications furent faites par l'introduction du protes- tantisme. Admirons comment cette organisation de la province ecclé- siastique si ancienne s'est maintenue malgré les changements si pro- fonds que les siècles ont opérés dans les différents Etats sur lesquels s'étendait cette province.

2. LES ARCHIDIACONÉS

Nous ne savons pas exactement quand nos archidiaconés furent institués. Ils existaient certainement au XII siècle, nous savons qu'il y en avait plusieurs au IX siècle. L'organisation, évidemment, n'a pas été coulée d'un jet. Anciennement, l'archidiacre avait une juri- diction réelle et une importance assez grande. Aujourd'hui, c'est un titre plus ou moins honorifique. A l'époque carolingienne, l'archidiacre jouissait « d'attributions très étendues, mais il avait le devoir de parcourir chaque année son district, de visiter titres, chapelles et oratoires. En l'absence de l'évêque, il installait les doyens, examinait les candidats à l'ordina- tion. En somme, il suppléait l'évêque en ce qui concernait le person- nel, l'administration du patrimoine, l'exercice du culte, les correc- tions des livres liturgiques, la réconciliation des pénitents. Toute- fois, leur pouvoir disciplinaire s'arrêtait aux diacres et s'étendait sur les différentes catégories de clercs inférieurs » (3). Dans l'Ancien Régime, les archidiacres avaient leur Curie dis- tincte et parfois rivale de l'évêque et pour cela surnommée « la petite cour » (4).

(3) Dict. d'archéol., 1938, art. Paroisses rurales, fasc. 148-149, p. 2229. (4) Anciens Pouillés, p. XII. « Tout acte concernant une paroisse ne se faisait que du consen- tement de l'archidiacre » (5). Sans entrer dans d'autres détails, rappelons que nos anciens archidiaconés étaient : Metz, Marsal, Vie et . Hayange, jusqu'au Concordat de 1801, a toujours fait partie de l'archidiaconé de Marsal.

3. LES ARCHIPRÊTRÉS

Le diocèse de Metz n'a jamais connu de doyennés. A l'époque mérovingienne, il y avait certainement des archiprêtres. Etait-ce un titre purement honorifique ? Rien ne prouve l'existence d'un district appelé archiprêtré. Mais, petit à petit, l'archiprêtre groupe autour de lui des clercs qu'il détache pour telle ou telle cérémonie sans que cela implique des pouvoirs spéciaux (6). A l'époque carolingienne apparaissent les doyens, qui remplis- sent les mêmes fonctions. Chaque année, le doyen réunit le clergé de son district en synode et lui donne des instructions et veille à ce que les paroisses rurales soient bien administrées. Dans le diocèse de Metz, les archiprêtres se sont maintenus à l'exclusion des doyens, signe que l'institution était solidement ancrée et constituée avant l'apparition des doyens dans d'autres dio- cèses (7).

4. L'ARCHIPRÊTRÉ DE THIONVILLE

Notre paroisse d'Hayange faisait partie de l'archiprêtré de Thionville. Cet archiprêtré, avant la Révolution, comptait vingt-deux pa- roisses, presque toutes très anciennes : , Berg, Bertrange, , , Florange, Fontoy, Guénange, Hayange, Hussange, , , Marspich (8), Œutrange, Reinange

(5) Ibid., p. XIII. (6) Dict. d'archéologie, art. Paroisses rurales, fasc. 148-149, p. 2222. (7) Ibid., p. 2229. (8) Marspich n'ayant été érigé en paroisse qu'en 1753, nous en parlerons sous Hayange. , Soufftgen, Thionville, Uckange, Usselskirch, Volcrange, Yutz. Pour reconstituer l'atmosphère d'autrefois, il nous faut rap- peler certaines institutions caractéristiques qui ont disparu et dont les modernes n 'ont plus qu 'une vague idée. Nous les relèverons dans un certain nombre de paroisses du voi- sinage pour en refaire le tableau si varié et si compliqué et saisir la complexité des situations sous l'Ancien Régime (9). Après Hayange, nous parcourrons les paroisses limitrophes de Fontoy, Angevillers, Volkrange et Florange. Au sud et sud-ouest, la paroisse d'Hayange confinait aux paroisses de Fameck et Neuf- chef, qui étaient de l'archiprêtré de Rombac (). Nous jetterons ensuite un regard sur celles qui bordent l'hori- zon vers la Moselle, à l'est : Thionville, Uckange. Ce coup d'œil rapide suffira pour nous remettre dans l'an- cienne atmosphère.

HAYANGE (Saint Martin)

L'église paroissiale est dédiée à saint Martin. La paroisse, avant la Révolution, était très étendue; elle comp- tait huit annexes : 1. avec la cense de Batzental. Des chartes de 821, 962, 1139, etc., témoignent que cette annexe dépendait d'Hayange. En 1607, nous constatons qu'elle est reliée à Fontoy. Au XVIII siècle, elle dépendait alternativement d'Hayange et de Fontoy, c'est-à-dire elle est administrée par Hayange une année, et l'année suivante par Fontoy, et ainsi de suite. 2. Marspich, annexe d'Hayange jusqu'à la guerre de Trente ans. Nous ne connaissons aucun document qui parle d'une dépendance de Volkrange avant cette date. Depuis, elle est alternativement des- servie par Hayange et Volkrange. Elle devient paroisse en 1753. Elle a l'annexe de Kounacker. En 1802, Marspich redevient annexe d'Hayange. 3. . N'est pas nommé dans les plus anciennes chartes, semble donc être d'origine moins ancienne que les autres annexes.

(9) V. Les anciens Pouillés. Politiquement, le village, jusqu'en 1659, avait une partie luxembour- geoise et une partie barroise; depuis 1659, une partie française et une partie barroise. Depuis 1718, toute la localité est française et fait partie de la province des Trois-Evêchés. 4. . Dès 821, annexe d'Hayange, appartenait à la sei- gneurie de Florange. 5. Erzange fut toujours annexe d'Hayange. Une partie du village appartient à la seigneurie d'Hayange, l'autre à la seigneurie de Florange. 6. Suzange, très ancienne annexe d'Hayange, déjà en 821. Sei- gneurie de Florange. 7. Hamevillers, cité comme annexe d'Hayange dès 821, devient couvent au XIII siècle, dépendant de l'abbaye de Justemont. Hame- villers sera dès lors desservi par Fontoy, dont le service paroissial incombe aux religieux de Justemont. 8. Bellevue, ferme sur la Longe-Côte.

Chapelles :

1. Chapelle Saint-Jean-Baptiste à Algrange. Nous y trouvons un vicaire résident, à partir de 1740; 2. Chapelle Saint-Jacques, à Nilvange. Un garde-chapelle veille à son entretien; 3. Chapelle Saint-Dominique, à Knutange; 4. Chapelle Saint-Sixte, à Marspich; 5. Chapelle Sainte-Trinité, au château d'Hayange. Elle fut auto- risée par Mgr de Coislin et desservie par un chapelain spécial rési- dant au château (avant 1727).

Droit de patronat : appartient de toute ancienneté à l'abbesse de Sainte-Glossinde, à Metz. Décimateur :

1. d'Hayange. — L'abbesse de Sainte-Glossinde pour 3/4 des dîmes, le curé pour 1/4, 2. d'Algrange. — Dans la moitié: l'abbesse de Sainte-Glossinde 3/4, le curé d'Hayange 1/4, dans l'autre: l'abbé de Villers-Bettnach, 3/4, le curé de Fontoy, 1/4. Pour les autres annexes, la même situation qu'à Hayange. 3. de Marspich — anciennement ne dépendait que d'Hayange. Patron: l'abbesse de Sainte-Glossinde. Décimateur: l'abbesse pour 3/4, le curé d'Hayange pour 1/4. Après la guerre de Trente ans, nous trouvons que Marspich est annexe alternativement d'Hayange et de Volkrange. Les Jésuites de Trèves deviennent patron avec l'abbesse. Les Décimateurs se partagent alors la dîme de la façon suivante : Dans une moitié: l'abbesse a 2/3, le curé d'Hayange 1/3, dans une autre moitié : les Jésuites de Trèves 2/3, le curé de Volkrange 1/3. Cette situation dure jusqu'en 1753. Les droits des curés d'Hayange et de Volkrange passent alors au curé de Marspich.

FONTOY (Saint Pierre) Annexes : 1. Algrange avec Batzental [Batzeler] (voir sous Hayange). 2. Ermitage Sainte-Geneviève (10), situé dans les bois. Il y avait une chapelle avec ermitage et jardin. 3. Une maison-hospice au-dessous de Fontoy, pour y loger une nuit les pauvres mendiants; cette maison dépendait de la ferme que possédait, à Fontoy, l'abbaye de Marienthal (Luxembourg). 4. Gustal, moulin. Wirric de Valcourt, en 1206, donna le moulin de Godestal à Vivin II, abbé de Justemont, pour servir de prébende aux sœurs d'Hamevillers, à condition que l'abbé fournira un prêtre pour desservir la chapelle castrale de Fontois. Cette donation fut confirmée par Wirric, son fils, en 1224. Celui-ci donna encore à l'abbé de Justemont le patronage de la cure de Fontoy. (Cf. Hame- villers. — La donation de Gustal au profit d'Hamevillers explique comment Fontoy fut chargé de desservir Hamevillers.)

(10) Situé sur la côte de Sainte-Geneviève, près de Gustal, couronné d' un plateau nivelé de main d'homme, d'une surface de 10 à 12 hectares, séparé du bois de Fontoy par un large fossé. La chapelle, en forme de rectangle, est longue de 18 m., large de 14. Chapelles : 1. Saint-Nicolas, du château de Fontoy; 2. Saint-Jean-Baptiste, d'Algrange; 3. Sainte-Geneviève, ermitage.

Droit de patronat : L'abbé de Justemont, depuis la fête de saint Martin 1228, au- paravant le seigneur de Fontoy.

Décimateurs : Le seigneur de Fontoy (11) pour 2/3 de la grosse et menue dîme sur les terres de roture, excepté la dîme sur le chanvre et le lin, qui revenait à l'hôpital de Fontoy. Le curé a la dîme sur les terres seigneuriales avec 1/3 des menues dîmes sur les terres de roture, le chapelain du château : 1/3 dans la grosse dîme.

ANGEVILLERS (12) (Saint Michel)

Le territoire de cette paroisse était limitrophe de celui d'Hayange. Appartenait à la prévôté de Thionville, duché de Luxembourg jusqu'en 1659, depuis fait partie du bailliage de Metz, province des Trois-Evêchés.

(11) Fontoy a donné son nom à une ancienne famille de chevalerie qui paraît issue de celle de Sierck et qui en portait les armes primitives avec changement de couleurs et brisure d'un lambel, c'est-à-dire d'or à l'aigle de gueules brisé d'un lambel à quatre pendants d'azur. Plus tard siège d'une baronnie qui mouvait du roi de France à cause de sa châtellenie de Briey et était le siège de haute, moyenne et basse justice (dénombre- ment de 1681). V. BOUTEILLER. Le nom de Fontoy: ad fontes, 959; Fontoys, 1178; Fontos, 1264; Fontois, 1280; Fontayes, 1297; Fontoix, 1307; Fonthois 1357; Fonts, 1358; Fenschen, 1403; Fensch. 1433; Flensch ou Fontoy, 1606; Vennschen, Wennschen, Fensch, XVI s.; Fench, 1702; en patois: Fonteu; en allemand: Fentsch. (12) Anshervilla, 926; Antweiler, 975; Ansieviller, 1236; Anscivillers, 1345; Enchevilleir, 1360; Anxvilleir, 1380; Anenviller, 1544; Answeiler, 1572; Answiller, 1607; Ancerviller, XVI s.; Angeville, XVII s.; Angeviller, 1693; Answeiler. Plus tard Arsweiler et Angevillers. Patron :

La cathédrale de Metz et le concours (13).

Décimateurs : La cathédrale pour 2/3, le curé 1/3.

Chapelle : Chapelle domestique au château du seigneur depuis 1770.

VOLKRANGE (Wolkrange) (Saint Jean-Baptiste) Siège d'une ancienne seigneurie, fief du comté de Luxembourg, a donné son nom à une ancienne famille de chevalerie dont les armes sont : d'argent à la face de gueules au chef fretté de même. Cette famille s'éteignit au XVI siècle. Devint fief du duché de Lorraine. De cette seigneurie dépendaient : les villages de Wolkrange, Metzange, sept voueries à Weimerange, la rue du Moulin et le moulin à Knutange, des censes à Algrange et Guentrange.

Annexes : 1. Weimerange, siège d'une seigneurie foncière, érigée en haute justice, en 1754. (Wemeringas, 926; Wimeringas, 977; Wimeringes, 977; Wimeranges, 1284; Weineranges, 1294, etc.). 2. Elange, village du marquisat de Rodemack. 3. , siège d'un fief de haute justice, est une seigneurie foncière appartenant à l'abbé de Bonnevoye, appelé Terven en 1282 ; Thervern, en 1544; Therville, XVIII s.; « Le quartier du roi », en 1756, parce que le prince de Condé y avait son quartier général lors de la prise de Thionville, en 1643. 4. Beuvange-sous-Saint-Michel (Bovenges, 1128; Bovingen, 1131; Bicevenges, 1213; Bovanges, 1223; Bivange-soubs-saint-Michel, 1718).

(13) Le concours est un examen que les candidats à un bénéfice ecclésiastique (paroisse, chapellenie, canonicat, etc.) doivent subir pour prouver qu'ils sont idoines. Quand il y a plusieurs candidats, le plus qualifié obtient le bénéfice. Cet examen, en principe, doit avoir lieu pour tous les bénéfices relevant du patronat ecclésiastique comme du patronat laïc. V. Kirchenlexikon, art. Concurs, vol. III, p. 845-851. Sous l'Ancien Régime, l'archiprêtré de Thionville connaissait le concours pour les paroisses d'Angevillers, Escherange, Florange, Reinange. Le concours, toutefois, ne jouait qu'alternative- ment avec la nomination par le patron. De nos jours, le concours n'existe plus dans le diocèse de Metz. La nomination se fait partout par l'évêque. 5. Saint-Michel, ermitage sur la montagne, côte Saint-Michel. 6. Metzange, forme une communauté avec Volkrange, (Mes- lange, 1681). 7. Marspich, avant 1753, dépendant alternativement de Vol- krange et de Hayange (depuis la fin de la guerre de Trente ans).

Chapelles : 1. Saint-Pierre, à Weimerange, vicaire résident pour Weime- range, Elange et Terville; 2. Saint-Isidore, à Elange, érigée en 1726; 3. Saint-Sébastien, à Terville; 4. Sainte-Vierge, à Beuvange; 5. Sainte-Michel, au sommet de la montagne, avec ermitage (14).

Droit de patronat : Les Jésuites de Trèves; depuis leur suppression, l'évêque de Metz.

Décimateur : Anciennement les Jésuites pour 2/3, le curé 1/3, auparavant le marquis de Bade. Dans la grosse dîme : portions à Saint-Maximin, à Sainte-Glos- sinde et au curé d'Hayange (pour Marspich), la cathédrale, le curé de Florange et la chapelle castrale de Florange. Dans les menues dîmes : le curé 1/3; dans le reste : 1/3 aux Jésuites et 2/3 à la primatiale de Nancy.

FLEURANGE (Florange) (Sainte Agathe) L'église paroissiale Sainte-Agathe se trouvait à Harling, village qui fut détruit pendant la guerre de Trente ans et qui se trouvait le long de la route d'Hayange à Uckange, à l'endroit indiqué par une croix entre deux peupliers. Après la destruction de Harling, c'est-à-dire après la guerre de Trente ans, le curé, pour ne pas rester isolé de sa paroisse, transporta sa résidence à Florange et laissa la garde de l'église paroissiale à un ermite. En semaine, la messe se

(14) Le baron E. D'HUART, dans l'Austrasie, 1853, art. Volkrange, p. 121 à 132. disait dans la chapelle Saint-Thomas. En 1777, l'église paroissiale fut transférée à Florange. Annexes : 1. Ebange; 2. Daspich; 3. Schrémange (moins Suzange, qui était de tout temps annexe d'Hayange et la partie sur la grand 'route qui relevait de Fameck) ; 4. (château) ; 5. Magdebourg (cense).

Chapelles : 1. Saint-Thomas, autrefois chapelle castrale, anciennement nom- mée chapelle Saint-Gaspard. Elle était située dans Florange, où on en voit encore les restes ; 2. Saint-François et Saint-Bonaventure, sur le chemin d'Ebange à Harling, construite vers 1720; 3. Sainte-Marguerite, à Ebange. Patrons : Le roi, la cathédrale et le concours. Pratiquement, le roi alter- nait avec la cathédrale. Pour la chapelle Saint-Thomas, les seigneurs. Décimateurs : Pour les grosses dîmes : la cathédrale 2/3, le curé 1/3. Pour les menues dîmes : à Florange et à Schrémange, les sei- gneurs de Florange 2/3, le curé 1/3; à Bettange, le curé seul (15).

(15) Floringas, curia regia, 893; Florengis, 1147; Floreengens, 1206; Flor- chenges, 1236; Florangis, 1282; Florchange, 1320; Florchingen, 1384; Florchanges, 1393; Florhange, 1513; Florhengia, Forhengia, Florhangia, 1544; Floringia, 1544; Florenges, 1572; Fleuranges, XVII s.; Florenge, XVII s., Harling vulgo Fleurange, 1606; Fleurange ou Sainte-Agathe, XVIII s. Serémange: Sckramange, 1686; Skrémange, 1686; Scheremange, XVIII s.; Seré- mange, après la guerre de 1914-1918. Ebange: Hebingen, 1169, Ebangis, 1236; Ebbingen, 1572; Ebbange, 1667; He- bange, 1756; Ville-aux-Noyers, XVII s.; aujourd'hui: Ebange — Ebingen. Daspich: Aspicium, station romaine; Daspit, 1639. Bétange: Château et ferme; Baitanges, 1352; Baitenges, 1363; Bettingen, XVII S. Il y avait une famille de Bétange, d'ancienne chevalerie. Elle portait: de sable au lion rampant d'argent. Fief relevant du roi et jouissant du droit de château, fossés, pont-levis et colombier à six piliers. Magdebourg : Medebourg en 1686. THIONVILLE (16) (Saint Maximin)

chef-lieu de la prévôté luxembourgeoise. Après 1659, chef-lieu de bailliage dépendant de la province des Trois-Evêchés et régie par les coutumes thionvilloises, peu diffé- rentes de celles de Luxembourg. Au IX siècle, villa regia et résidence des Carolingiens. Au X siècle, seigneurie de la maison de Thionville. Châtellenie des comtes de Luxembourg. La ville, prise par les Français en 1558, est rendue aux Espa- gnols par le traité du Cateau-Cambrésis, revint à la France par le traité des Pyrénées, en 1659.

Patron de l'église : Saint Maximin. Thionville appartenait dès avant 990 à l'ab- baye de Saint-Maximin de Trèves, abbaye qui y a sans doute cons- truit l'église. Annexes : 1. Neuerburg (Neurbourich) ou Gassion, appartenant au sieur Wolter, 1711; 2. Waunershof, aux religieuses de Marienthal; 3. Schadebourg, Chaudebourg, cense; 4. Haushoff, aux héritiers du S Larminat; 5. Guentrange, vicaire résident (Gantringas, 1147; Gunitringen 1575); 6. Beauregard, hameau extra muros (Borggart, XV s. ; Borgard, 1733); 7. Le Cavalier d'Ordonnance, moulin; 8. La Malgrange.

Chapelles : 1. Saint-Jean, dans l'église paroissiale; 2. Sainte-Croix;

(16) Dietenhoven, 707; Theodonis villa, Theudonis villa, 772; Theodone ville, 783; Didenhowen, 962; Duodenhof, XI s.; Ditdenhof, 1033; Tyonville, 1239; Dyden- howen, 1346; Dutenhofen, 1357; Thionville, Diedzhofen, 1431; Diedenhoven, 1449; Théonville, 1542; Thyonville, 1552; Dietenhoben, 1576; Dudenhoffen, 1606; Dieden- hoben, 1612; Diedenhofen. 3. Sainte-Vierge, à laquelle sont unies celles de Saint-Jean- Baptiste, de Saint-Jean-l'Evang., Saint-Sébastien, Sainte-Catherine; 4. Sainte-Anne; 5. Saint-Pierre, chapelle en dehors de la ville; 6. Saint-François, près du cimetière; 7. Chapelle de l'hôpital ou Sainte-Elisabeth; 8. Saint-Jean-Baptiste, chapelle domestique, à Guentrange, 1750; 9. L'église Saint-Maximin, à Guentrange, construite vers 1700, vicaire résident; 10. Chapelle de l'hôpital militaire.

Couvents :

1. des Augustins, 2. des Capucins, 3. de Sainte-Claire.

Hôpitaux : 1. Hôpital civil avec chapelle et chapelain; 2. Hôpital militaire.

Patron : L'abbé de Saint-Maximin, de Trèves.

Décimateurs :

L'abbé pour la grosse dîme, seul et la moitié des menues dîmes, le curé pour le reste. Ce dernier avait sur la grosse dîme un fixe de 25 maldres de méteil, 10 de froment, 6 d'avoine, 1 foudre de vin pour les messes et le vin de Pâques. Il partageait avec l'abbé le reste de la dîme des vins ainsi que les autres menues dîmes. Pour les foins, il n'avait la dîme que de quelques prés.

UCKANGE (Saint Jean-Baptiste)

On citait aussi, après la reconstruction de l'église, en 1750, sainte Barbe. Annexe : Brouch ou , moulin et cense, sur le ruisseau de Brouck, qui prend sa source à Budange et se jette dans la Moselle.

Patronat :

Alternativement les, seigneurs de Pépinville et de Meilbourg.

Décimateurs : La cathédrale de Metz 1/6, l'abbé de Villers 1/18, l'hôpital de Thionville 1/6, les héritiers de Mme Bonjean 1/6; chacun pour une portion dans les 2/3, moins 1/18 qu'a le curé, ainsi que l'autre 1/3, 1/18 à M. de la Roche. Le 1/18 que le curé recevait en plus était à charge d'une messe par semaine à l'autel de Saint-Jean. Il avait une petite dîme sur le ban de Florange.

Chapelle : Dans la maison des Jésuites de Trèves.

Nous y ajoutons les deux paroisses limitrophes de l'archiprêtré de Rombas : Fameck et Neuf chef.

FAMECK (Saint Martin) Annexes : 1. Morlange, centre de la Mairie; 2. Rémelange-la-Haute; 3. Rémelange-la-Basse; 4. Edange; 5. Budange-sous-Justemont; 6. Schrémawge (quelques maisons sur la route nationale); 7. .

La paroisse était en partie Lorraine et en partie des Trois- Evêchés (autrefois duché de Luxembourg). Achevé d'imprimer le 24 AOUT 1951 sur les Presses des Editions « Le Lorrain » METZ (Moselle)

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