UFR en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives

UNIVERSITÉ DESCARTES Ecole Doctorale 456 : « Sciences du Sport, de la Motricité et du Mouvement Humain ». Laboratoire GEPECS : Axe 3. Spécialité : Cultures Sportives

TH ЀSE

Pour obtenir le grade de DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ PARIS DESCARTES Discipline : S.T.A.P.S.

Présentée et soutenue publiquement par

Ludovic TEN ЀZE

Titre :

Histoire du football. Le Board et l’analyse des transformations des lois du jeu.

Année 2011

Directeur de thèse : M. Bertrand During, Professeur des Universités, Université Paris Descartes

Membres du jury : M. Pascal Boniface, Maître de conférences H.D.R, Université Paris VIII (rapporteur) M. Luc Collard, Professeur des Universités, Université Paris Descartes M. André Menaut, Professeur émérite, Université II M. Thierry Terret, Professeur des Universités, Université Lyon I (rapporteur)

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A la mémoire de , qui avait ouvert la voie…

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Remerciements ______

A mon directeur de thèse : Bertrand During, Professeur des Universités, Directeur de l’UFR-STAPS de Paris-Descartes. Il fut le premier à me sensibiliser à la transformation progressive « des jeux aux sports ». Sans lui ce projet n’aurait pas vu le jour ; merci de m’avoir incité, guidé et soutenu dans cette recherche historique.

Aux individualités qui ont été sollicitées et mises à contribution :  Marc Batta, Directeur National de l’Arbitrage, pour ses encouragements.  Philippe Collot, Président de la Commission Départementale d’Arbitrage de et Marne Nord, pour son accueil au sein de cette commission.  Paul Dietschy, Maître de conférences à l’université de Franche-Comté. Historien, spécialiste du football, pour ses encouragements et ses conseils.  Paul Filippi, ex Directeur de l’UFR-STAPS de Paris-Descartes, véritable encyclopédie vivante du football, et relecteur infatigable. Le poste que j’occupe, dans la spécialité football, était le sien. La malchance de ne pas travailler ensemble et d’échanger sur l’histoire du football est réparée.  Danièle Goussot, responsable des archives de l’Equipe, pour sa disponibilité.  Jean-Marie Lamwnicsak, Président de l’Amicale Nationale des Educateurs, qui m’a permis de consulter les archives intégrales de la Revue « L’Entraîneur Français ».  Agnes Lecordier, mon amie et ma traductrice préférée.  Michel Platini, Président de l’UEFA pour m’avoir mis sur la piste des archives du Board et pour ses encouragements.  Burnett Scott, membre de la FIFA, qui m’a permis d’accéder aux archives du Board.  Jacqueline Tenèze, relectrice trés attentive, qui a vu jouer le grand Reims des années 50.

Aux différents collectifs qui m’ont soutenu :  Aux professeurs de l’UFR-STAPS de Lacretelle que j’ai questionnés sur divers sujets et notamment sur les règlements des jeux et des sports collectifs.  Aux membres du laboratoire GEPECS, qui m’ont encouragé à suivre ce chemin.  Et surtout à toute ma « tribu », qui m’a soutenu, encouragé, réveillé aux aurores…

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Sommaire ______

Avant-propos …………………………………………………………………. 6 Introduction …………………………………………………………………. 18 Chapitre 1 Loi I : Le terrain ………………………………………….. 26 Chapitre 1 Bis Loi I : La cible ………………………………………….. 41 Chapitre 2 Loi II : Le Ballon ………………………………………….. 50 Chapitre 3 Loi III : Le nombre de joueurs ………………………….. 61 Chapitre 4 Loi IV : Les équipements ………………………………….. 78 Chapitre 5 Loi V : L’arbitre ………………………………………….. 92 Chapitre 6 Loi VI : Les arbitres assistants ………………………….. 114 Chapitre 7 Loi VII : La durée de la partie …………………………... 125 Chapitre 8 Loi VIII : Le coup d’envoi et les reprises de jeu …………… 139 Chapitre 9 Loi IX : Le ballon en jeu et hors du jeu …………………… 150 Chapitre 10 Loi X : Le but marqué …………………………………… 157 Chapitre 11 Loi XI : Le hors-jeu …………………………………………… 170 Chapitre 12 Loi XII : Les fautes et incorrections ……………………. 195 Chapitre 13 Loi XIII : Les coups francs ……………………………………. 247 Chapitre 14 Loi XIV: Le coup de pied de réparation ……………………. 258 Chapitre 15 Loi XV : La rentrée de touche ……………………………. 269 Chapitre 16 Loi XVI : Le coup de pied de but ……………………………. 278 Chapitre 17 Loi XVII: Le corner …………………………………………… 284 Chapitre 18 Les tirs au but …………………………………………… 291 Conclusion …………………………………………………………………... 301 Bibliographie ………………………………………………………………….. 314 Acronymes …………………………………………………………………... 322 Table des matières …………………………………………………………………... 323

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Avant-propos Le Board 1 ______

« The effective gardian of the Laws of the Game ». João Havelange 2

Le Board est une institution traditionnelle, responsable des lois du jeu du football depuis la fin du XIX e siècle. Sa nomination véritable est l’International Football Association Board (IFAB). Notre première préoccupation, avant l’étude des transformations des lois du jeu, est de partager nos connaissances sur cette institution inconnue du grand public.. Les quatre associations britanniques sont créées avant 1880 : la Football Association (FA) en 1863, la « Scottish Football Association » en 1873, la « Football Association of Wales » en 1876, et l’« Irish Football Association » en 1880 3. Le fait que se soit, les plus anciennes associations nationales de football (Association) permet aux Britanniques de revendiquer l'invention du football moderne. L’expression « our game », signifie qu’ils considèrent que le jeu leur appartient, mais aussi qu’ils sont les meilleurs. Les quatre associations se réunissent pour la première fois, en 1882, lors de la conférence internationale de Manchester, dirigée par le commandant Francis Marindin, président de la FA. Il fut décidé d’organiser un championnat international pour la saison 1883/1884, d'uniformiser les règles et de confier à un organisme indépendant le rôle de surveillant des règles du jeu. Ce dernier est créé le 02 juin 1882 et pour Astolfo Cagnacci, il va « accompagner les premiers pas du Home International Championship, compétition regroupant les sélections nationales d'Angleterre, d'Écosse, du Pays de Galles et d'Irlande »4. Il s’agit d’une instance internationale avec une compétence particulière « en charge d'instituer et de dire un droit spécifique qui régit, en dehors du droit commun, les pratiques sportives» 5. Quatre ans plus tard jour pour jour, cet organisme donnera naissance au « Board », qui tiendra sa première réunion à Londres le 2

1 Le Board, l’International Football Association Board (l’IFAB) 2 Cette formule est utilisée lors de la réunion de 1993 par le Dr. Havelange qui met l’accent sur l’importance du travail du Board : il est « le véritable gardien des lois du jeu ». 3 C'est l'association irlandaise historique, aujourd'hui la fédération nord-irlandaise, qui est toujours présente au Board, et non l'actuelle fédération de la république d'Irlande créée en 1921 lors de la partition de l’Île sous le nom de l’Association d’Irlande de Football. 4 Cagnacci, A. (1998) Pays du Foot. Une passion et des styles. Paris, Autrement, p. 28. 5 Chartier, R. (1994) Avant-propos. In Elias, N. & Dunning, E. (1994) Sport et civilisation. La violence maîtrisée. Editions Fayard, p. 17. 6 juin 1886 6. Les Associations Britanniques sont donc les membres fondateurs du Board , et peuvent logiquement revendiquer la paternité des lois du jeu et la poursuite du processus identitaire. Le Board demeure depuis 1886, le seul organe décisionnaire des lois du jeu. Ses statuts de 1993, rappellent que « le but du Board est de discuter et de décider des modifications proposées aux lois du jeu et toute autre question relative au football association. Celles-ci doivent être soumises au Board après avoir été examinées lors des assemblées générales annuelles ou lors d’autres assemblées ad hoc tenues par les associations formant le Board, par les confédérations ou les associations membres »7. L’étude des archives montre que le Board prend des décisions de deux types : changer ou non la loi, expérimenter ou non une nouvelle règle, ou un amendement à une règle. Les statuts du Board fixent le nombre de représentants des associations membres et le quorum nécessaire pour prendre une décision. L’évolution des voix attribuées à chaque association révèle un jeu de pouvoir et d’influences multiples. Cette commission était à l'origine en 1886 8 composée par deux représentants de chacune des quatre associations du Royaume-Uni. Un pouvoir partagé équilibré, avec un fonctionnement à priori démocratique, pour un football joué entre Britanniques. En 1913, la FIFA 9 devient membre du Board. Chacun des 5 membres possède deux représentants et autant de voix. Cette répartition permet aux associations fondatrices de contrôler le Board, et de conserver la possibilité de bloquer à elles seules une proposition de la FIFA. Cette Fédération gère le football mondial et les compétitions internationales, avec notamment l’organisation de la Coupe du monde de football depuis 1930. Son influence ne cessera de croitre au fil du XX e siècle avec notamment l’augmentation des associations nationales affiliées 10 . Ce développement est, en partie, pris en compte dans les statuts du Board en 1967 11 . Les membres possèdent désormais 4 représentants et un nouveau système de vote est adopté : chacune des quatre fédérations britanniques ne dispose plus que d’une seule

6 Cf. annexe n 8, p. 31: 1886 : The first meeting of the International Football Association Board. 7 1993 : Rules of the international Football association. (cf. annexe n°24, p. 96). 8 1886 : The first meeting of the international Football Association Board : Rules of the International Football Association. Cf. annexe n°22, p. 89. 9 FIFA : Fédération Internationale de Football Association 10 Dietschy, P. (2006). Une plongée dans les archives du football mondial: faire l’histoire de la Fédération International de Football Association ( FIFA) , p. 319-332. In le sport de l’archive à l’histoire. Sous la dir. de Bosman, F; Clastres, P & Dietschy, P. Presses Universitaires de Franche-Comté. 11 Statuts du Board : Réunion de 1967. Les dates et les lieux de toutes les réunions du Board sont référencés dans l’annexe n°1, p. 6. 7 voix, et la FIFA se voit attribuer quatre voix. Une majorité de six voix est nécessaire pour l'adoption d'une nouvelle mesure. Les cinq membres du Board sont les seuls habilités à faire des propositions de transformation. La FIFA peut être mandatée par une de ses associations pour questionner le Board . Les seules propositions qui prennent du sens, sont celles qui sont à l’ordre du jour de la réunion annuelle du Board . Il est permis de se regrouper pour faire des propositions sous une confédération qui représente l'ensemble des pays d'un continent, par exemple l’Union des Associations Européennes de Football (UEFA). Une demande qui émane d'un grand nombre de fédérations, a plus de chance de retenir l’attention du Board . Depuis un siècle aucune autre association n’a été admise au Board . Il existe donc 5 membres permanents et toutes les autres associations nationales sont en fait représentées par la FIFA. L’histoire officielle des lois du jeu, est écrite uniquement sous l'influence des acteurs de cette institution, les représentants des associations qui révèlent les forces en présence. Nous pouvons remarquer l’augmentation du nombre de représentants, huit à l’origine et vingt aujourd’hui. Lors de sa création, le Board était composé exclusivement de membres britanniques, ils restent majoritaires avec 80% des sièges. L’influence grandissante de la FIFA est manifeste, elle bénéficie aujourd’hui de 50% des voix, contre 20% entre 1913 et 1967. D’un autre point de vue, la FIFA qui représente plus de 200 fédérations 12 n’a pas plus de poids que les quatre associations nationales. La proportion est inchangée depuis 1967, alors même que les associations affiliées à la FIFA n’ont cessé d’augmenter. En fait, avec 80% des membres et 50% des voix, les Britanniques, au travers de cette institution, gardent la main sur le football. Les inventeurs du jeu peuvent faire barrage à une proposition de la FIFA avec la règle du vote à la majorité des trois-quarts. Les derniers statuts de 1993 13 confirment ces dispositions. Les associations membres choisissent elles-mêmes leurs représentants, qui sont automatiquement cooptés par le Board. Ces représentants sont les membres éminents des associations : président, vice-président, secrétaire,… La stabilité des représentants est la seule exigence du Board , qui a rappelé en 1905 14 , sa volonté de ne pas les changer trop souvent pour faciliter le travail et le rendement de la réunion. Cette demande a été entendue. Stanley

12 203 associations sont inscrites pour participer aux éliminatoires de la Coupe du Monde de 2014 qui se déroulera au Brésil. 13 Statuts de l’International Football Association Board. Approuvés et adoptés par l'International Football Association Board en février 1993. Annexe n°24, p. 96. 14 Annual General Meeting of 1905 : « It is the unanimous opinion of the Board that the representatives of the respective Associations should not be changed more frequently than is absolutely necessary, inasmuch as the work of the Board is facilitaled and rendered more satisfactory by the representatives having knowledge of the various discussions which occur year after year after year... ». 8

Rous 15 a participé pour sa part à plus de trente réunions du Board, et la liste des représentants 16 présents aux assemblées montre que l’on reste « membre à vie » au Board . Ce fait est illustré par les discours d’introduction du Président de l’assemblée qui souhaite un prompt rétablissement à certains représentants qui n’ont pu se déplacer 17 , ou annonce tout simplement la disparition de l’un d’entre eux, encore présent l’année précédente. La date d’application des modifications éventuelles des lois est également définie dans les statuts du Board. Elles entrent obligatoirement en vigueur pour les confédérations et les associations nationales dès le 1er juillet suivant l'assemblée générale. Néanmoins, les confédérations ou les associations nationales dont la saison en cours n'est pas encore terminée le 1er juillet peuvent, en ce qui concerne leurs compétitions, repousser l'introduction des modifications apportées aux lois du jeu jusqu'au commencement de la saison suivante. Il est également impensable de changer les règles du jeu au cours d’une compétition, par exemple pour la finale de la Coupe du monde se jouant au mois de juillet.

Il fut décidé dès l’origine, que les associations assumeraient, à tour de rôle, la responsabilité d’accueillir cette réunion. L’ancienneté de l’association permettait de déterminer l’ordre d’alternance : Angleterre, Écosse, Pays de Galles, puis Irlande. Un ordre immuable… perturbé par l’entrée de la FIFA en 1913, avec un premier meeting tenu à paris le samedi 14 juin 1914. Le tour de la FIFA, dernière association créée en 1904, vient logiquement après celui de l’Irlande, et la réunion se déroule sur le territoire d'une des associations nationales affiliées à la FIFA. Cette nouvelle périodicité de 5 ans sera modifiée dans les années 1950, sous l’influence de la FIFA. L’impact de la Coupe du monde est tel, qu’il fut décidé d’organiser l’Assemblée Générale Annuelle du Board sur les lieux même de la compétition. Par exemple en 1954, elle s’est tenue le samedi 19 juin à Berne en Suisse. Chaque assemblée est désignée par un numéro, la 125ème en 2011. L’assemblée générale annuelle s’est toujours tenue en juin ou en juillet jusqu’en 1992 18 . Depuis 1993, elle a lieu en février ou mars, comme le confirme l’amendement de la 117 ème assemblée en 2003. Cette table ronde n’est pas publique, à l’origine seuls les représentants pouvaient y participer. Pour facilité la diffusion les informations, le secrétaire de chaque association peut assister depuis le début du XX e siècle à l’ « Annual General meeting » (AGM).

15 Stanley Rous : Cet ancien maître d’école devenu arbitre international participe au Board en tant que Président de la FA de 1935 à 1961, puis ensuite en tant que Président de la FIFA de 1962 à 1974. 16 Cf. annexe n°3, p. 10. 17 Réunion du Board de 1953 : Le président Écossais M. Swan déplore les absences pour raisons de santé de M Cochrane (Irish FA) et de M. Delaunay (FIFA). Ce dernier est représentant au Board depuis 1924 ! 18 Annexe sur les dates et lieux des réunions du Board, n°1, p. 6. 9

Chaque année l’association qui accueille la réunion prend en charge, l’organisation, la présidence et la partie administrative en désignant un secrétaire de séance, Le calendrier annuel des propositions est prévu dans les statuts du Board de 1993. Il est précisé que chaque association envoie par écrit, le 1er décembre au plus tard au secrétaire de l'association accueillant la réunion, les suggestions ou les propositions de modification pouvant être apportées aux lois du jeu, les requêtes relatives à l'expérimentation des lois du jeu ou tout autre sujet de discussion. Les textes de ces propositions doivent être adressés aux différentes associations représentées au Board le 14 décembre au plus tard. Ce calendrier suit également le rythme de la plus grande compétition organisée, la Coupe du monde. En effet lors de la réunion du Board de 1974 19 , suite à une proposition de l’Irlande, il est décidé que si le Board envisage de faire des changements majeurs aux lois du jeu, ceux-ci doivent être réalisés en 1975, ou 1976 au plus tard, pour ne créer aucune confusion lors de la prochaine Coupe du monde FIFA, organisée en Argentine en 1978. L’Assemblée Générale annuelle, en présence des délégués des fédérations membres est consacrée à l’étude des lois du jeu. Le compte rendu, le « Minutes of the Annual General Meeting », est rédigé par le secrétaire, et sera à la fois diffusé aux associations membres, et selon les statuts de 1993 20 , consigné dans le livre officiel des procès-verbaux qui sera remis à l’association organisant l’assemblée suivante. Les nouveaux statuts du Board de 1993, imposent en plus de l’assemblée générale annuelle, une seconde réunion nommée « séance de travail annuelle », programmée entre septembre et octobre. Les membres y abordent les questions liées aux intérêts du Board, et précisent les préoccupations du moment, mais elle n’est pas autorisée à modifier les lois du jeu 21 .

Le véritable pouvoir du Board et ses relations avec la FIFA peuvent être questionnés. Des associations nationales se sont progressivement créées et se sont regroupées en une Fédération Internationale. Sous l’influence des Français, sept pays fondent la FIFA 22 en 1904, en charge d’organiser les rencontres et les compétitions internationales. Le CIO déléguera progressivement à la FIFA l’organisation des tournois Olympiques, véritables

19 Réunion du Board de 1974. 20 Cf. annexe n°24, p. 96. 21 AGM of 1993 : Rules of the IFAB, p. 22 : « The Annual Business Meeting… does not have the autority to alter the Laws of the Game ». 22 Eisenberg, C., Lanfranchi, P., Masson , T. & Wahl, A. (2004). FIFA. 1904–2004. Le siècle du football. Paris, Le cherche midi, p. 59 : La , la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas, l'Espagne (représentée par le Madrid FC), la Suède et la Suisse en sont les membres fondateurs. 10 championnats du monde avant la création de la Coupe du monde en 1930. Pour participer à ces rencontres les associations nationales, une seule par pays selon les statuts de la FIFA 23 , doivent s’affilier à cette fédération internationale. Les relations entre la FIFA et les Associations Anglaises sont au départ, tumultueuses24 . Les Anglais refusent dans un premier temps d’y adhérer, et créent en juillet 1907 une ligue amateur dissidente, la Football Amateur Association (AFA). Les adhésions de l’Écosse et de l’Irlande sont rejetées en 1908. Les Associations Britanniques rejoignent finalement la FIFA en 1909 et 1910, même si l’Irlande, l‘Écosse et le Pays de Galles ne forment pas un état reconnu, comme imposé dans les statuts de la FIFA. Cette fédération se développe, avec l'évolution du football et le nombre croissant d'associations membres, et notamment l’affiliation de l'Afrique du Sud (1909/1910), de l'Argentine et du Chili (1912) et des Etats-Unis (1913). Ces adhésions placent la FIFA à la tête d’un « jeu universel »25 , et lui confèrent une véritable dimension intercontinentale. Elle devient force de proposition incontournable. Pendant ce temps le Board n’intègre aucune nouvelle association membre. Cette stabilité du Board pendant plus de trente ans, est en décalage par rapport à la réelle diffusion planétaire du football. La pacification des relations entre la FIFA et les Britanniques au début des années 1910 permet l’entrée de la FIFA au Board en 1913. Il est possible d’affirmer alors, selon le point de vue adopté, que la FIFA s’intègre à l’IFAB, ou que le Board franchit la Manche et sort de son isolationnisme. La FIFA crée en 1923 son propre comité pour examiner les règles du jeu : le Comité Consultatif des règles du jeu. Une de ses principales activités est d’informer les arbitres sur les règles et leur application et de s’assurer que toutes les fédérations appliquent les mêmes lois du jeu. La FIFA joue un rôle majeur dans le processus de diffusion Par le biais de ce Comité, la FIFA participe aussi au processus de réflexion des lois du jeu. La FIFA, installée depuis 1932 à Zurich fait elle-même des propositions, après avis des fédérations affiliées. Par exemple un questionnaire a été envoyé à toutes les fédérations via le Comité des Arbitres en 1955 sur le problème du remplacement des joueurs. Lors de la réunion de 1982, il est précisé que le Comité des arbitres de la FIFA peut toujours donner une orientation pour l’interprétation pratique des lois du jeu, mais le Président de la FIFA réaffirme que le Board a seul la compétence de la « politique » des lois du jeu. Le Board détermine des lois universelles et en fixe les limites. Chaque fédération module le règlement des compétitions ou des matchs amicaux qu’elle organise. Le Board

23 Eisenberg & Co. (2004), op. cit., p. 60. Bulletin officiel de la FIFA du 1 er septembre 1905. 24 Ibid., p. 62-63. 25 Ibid., p. 64. La formule est empruntée à Hirschman, secrétaire général de la FIFA. 11 surveille l’application uniforme dans tous les pays du monde. Le Board est aussi, dans se sens, un organe de contrôle. Par exemple lors de la réunion de 1979, il indique que des entorses aux lois du jeu se répandent (notamment enfreindre la règle des 4 pas du gardien de but). La FIFA est chargée par le Board, d’attirer l’attention des associations nationales et des arbitres FIFA sur ce fait, et d’y remédier. Les associations nationales qui dérogent aux Lois sont rappelées à l’ordre par le Board , notamment dans le cadre des expérimentations « sauvages ». En cas de violation persistante ou d’ « innovations intempestives »26 , il mandate la FIFA pour faire rentrer dans le rang les associations « récalcitrantes » et éventuellement les sanctionner. M. Blatter, lors de l’assemblée générale annuelle de 1993, s’est exprimé sur ce sujet et, souligne le manque de respect montré aux lois du jeu par certaines associations. Le processus de contrôle des lois du jeu, semble à la fois du ressort du Board et de la FIFA, un véritable partage des responsabilités. Les statuts du Board de 1993 27 confirment que les confédérations et les associations nationales ne peuvent pas apporter de modifications aux lois du jeu à moins que le Board les ait approuvées. Les lois du jeu s’appliquent à tous les niveaux du jeu, principe rappelé en 1995 par Sir Bert Millichip 28 , au nom de la Football Association. Il est d’avis qu’il est important de continuer d’en tenir compte pour les évolutions futures. La nouvelle version du règlement de 1997 29 permet seulement aux associations nationales d’adapter les lois du jeu (dimensions du terrain et de la cible, taille du ballon, durée du match et nombre de remplaçants) pour les catégories de jeunes, de vétérans et pour le football féminin.

Il est difficile de mesurer l’influence réelle de la FIFA sur le Board . La FIFA est aujourd’hui une véritable multinationale qui « a connu un développement comparable à celui de l'ONU »30 . Pascal Boniface 31 montre que les effectifs de l’ONU 32 et de la FIFA sont comparables depuis la création de l’ONU en 1920. Elles comptent toutes les deux aujourd’hui près de 200 fédérations ou pays affiliés. Cet auteur compare les structures de ces organisations

26 Cf. à ce sujet « les innovations intempestives américaines » titre du chapitre in Eisenberg & Co. (2004), op. cit., p. 133. 27 AGM of 1993.Rules of the International Football Association Board, proposed by The Scottish Football Association, pp. 20-28. (cf. annexe n°24, p. 96.) 28 Sir Bert Millichip représente la FA au Board de 1982 à 1997. 29 1997 : Minutes of the Annual General Meeting, notes, p. 4. (cf. annexe n°21, p. 76.) 30 Wahl, A. (1990) La balle au pied. Histoire du football. Gallimard, p. 60. 31 Boniface, P. (2006). Football & Mondialisation. Paris. Editions Armand Colin, p. 35. 32 ONU : Organisation des Nations Unies créée en 1945, succède à la SDN, Société des Nations Unies créée en 1919. 12 qui renvoient à des logiques géopolitiques et économiques : « Finalement, la FIFA c’est l’ONU, les fédérations nationales sont l’équivalent des états et les clubs seraient ceux des entreprises ou des sociétés multinationales »33 . Il est permis de penser que cette influence se manifeste jusque dans l’écriture des lois du jeu. La FIFA participe au Board mais rien ne montre dans les archives que son influence est plus importante que celle des autres associations. Elle fait, par exemple, moins de propositions que l’Association Écossaise. Les discours du Président de la FIFA devant le Board ne démontrent pas non plus l’influence supposée de cette multinationale. En 1992 34 , le Président de la FIFA, M. Joseph Blatter rappelle que l’IFAB est une institution importante et que son existence ne pourra jamais être remise en question dans le monde du football. Il semble selon les propos de Joseph Blatter en 2000, que la FIFA fasse allégeance au Board . Il informe les membres, de son plaisir considérable et de sa fierté d’appartenir à l’IFAB, qui existe pour protéger les lois du jeu. A cette fin, il propose que le FIFA Executive Committee et le FIFA Congress soient mis au service du Board et protègent son indépendance. Le garant de cette indépendance semble être le conservatisme de cette institution : moins il y a de membres, moins il y a de représentants, moins il y a de chance de céder aux influences et aux corruptions. Cette dernière peut s’insinuer partout comme le prouve les affaires touchant le CIO, ou même la FIFA en juin 2011. Georges Boulogne précisait déjà en 1988, que face aux pouvoirs des médias et des grands clubs « Il est probablement heureux que les Britanniques gardent le contrôle des lois du jeu »35 . Il est possible de prétendre qu’aujourd’hui la FIFA est en mesure d’exercer un contre pouvoir face à l’hégémonie britannique… mais pour faire changer les choses, et obtenir 6 voix il lui faut convaincre deux Associations Britanniques. En 2002, M. Blatter réaffirme son soutien total à l’IFAB dans la professionnalisation de l’arbitrage et des lois du jeu. Il souligne également l’importance du travail commun réalisé. Ce travail de concert est illustré par la volonté de la FIFA de faire connaitre le Board , une institution puissante, mais pratiquement inconnue du grand public. Lors de la réunion de 1990 36 , le Président João Havelange affirme que la FIFA donnera dans le futur plus de publicité aux activités du Board , dont l’importance est vitale pour le bienfait du jeu. L’entrée

33 Boniface, P. (2006), op. cit., p. 128. 34 Réunion du Board de 1992. 35 Boulogne, G. (1988). Les lois du jeu : genèse, esprit, évolution, interprétation, application. In L’Entraîneur Français, n°240, octobre 1988, p. 2. 36 AGM of 1990, p. 22 : « Dr. Havelange said the FIFA would in future give more publicity to the Board activities, which he himself found to be of vital importance for the benefit of the game ». 13 dans le XXI e siècle coïncide avec une volonté de renforcer cette communication. Lors de la réunion Board 2002, Mr David Martin de l’Irish FA suggère que des informations plus détaillées sur le travail du Board soient diffusées sur le site de la FIFA (FIFA.com). Le Board a donné son aval, et depuis cette date il est possible de connaître les points questionnés avant l’assemblée générale, et d’être informé en temps réel des principales modifications adoptées. Cette communication maitrisée, ne rend pas compte de toutes les discussions ou de tous les résultats détaillés des votes. Mais le Board fait l’effort de motiver ses choix, comme par exemple en 2010, sur la non-introduction de la vidéo.

Cette entente cordiale affichée aujourd’hui peut être questionnée au fil du XX e siècle. Les fédérations britanniques ont quitté la FIFA en mai 1920, suite à la question d’accepter ou non de jouer contre les équipes des puissances vaincues de l’Europe Centrale pendant la guerre 37 . Les relations ne sont pas totalement rompues, car les matchs entre les Britanniques sont autorisés malgré leur départ de la FIFA. Il est possible de faire l’hypothèse que des tensions existaient entre la FIFA et les Britanniques au début des années 1920, mêmes si elles ne sont jamais évoquées dans les archives du Board . Les feuilles de présence permettent de constater que les représentants de la FIFA ne siègent pas au Board entre 1920 et 1923. La FIFA accepte le retour des Britanniques en 1923, mais ceux-ci refusent « de payer le pourcentage des recettes sur les matchs internationaux et récusent toute intervention dans les relations entre leur fédération »38 . Sur ce sujet, nous pouvons préciser qu’en parallèle des réunions du Board ils ont continué à se réunir entre Britanniques pour prendre des décisions concernant leurs rencontres. Ce refus a pour conséquence, leur non participation aux trois premières Coupe du monde de 1930, 1934 et 1938, malgré les sollicitations de la FIFA. Cette tension prend fin après la seconde guerre mondiale, les Associations Britanniques sont de nouveau affiliées en 1946 à la FIFA et jouent pour la première fois en Coupe du monde au Brésil en 1950.

Les archives du Board ont été rassemblées, et rendues publiques à l’occasion du centenaire de la FIFA en 2004. Notre corpus comprend l’ensemble des ordres du jour et des comptes rendus originaux complets de toutes les réunions de 1886 à 2003, soit 2.000 pages environ. Ces sources sont majoritairement manuscrites au XIX e siècle, puis progressivement dactylographiées. A partir de 2004, le recueil des données n’est possible qu’au travers des

37 Eisenberg & Co. (2004), op. cit., pp. 66-67. 38 Ibid., p. 68. 14 informations parcellaires qui filtrent après chaque réunion du Board . La FIFA diffuse ces informations via son site FIFA.com, avec le résumé des modifications adoptées ou rejetées. Le corpus se constitue de trois types de documents distincts. Le premier porte le nom de « Itinerary of the Annual General Meeting ». Il est adressé aux associations membres et précise le lieu de la réunion et son organisation. Il semble que les organisateurs portent une attention particulière aux conforts des membres de cette institution, autant pour le choix de l’hôtel que pour celui des menus et des vins 39 ! Les séances de travail sont entrecoupées de visites culturelles, ce qui peut expliquer que les réunions se déroulent rarement dans le même lieu. L’étude des dates et des lieux des réunions 40 révèle l’histoire d’une « institution itinérante ». Le second est l’ « Agenda of the International Football Association Board »41 . Ce document envoyé au moins un mois avant la réunion annuelle à tous les membres du Board, par la fédération organisatrice est un ordre du jour très détaillé de toutes les propositions de modification de loi proposées. Il permet de prendre connaissance des sujets qui seront débattus, et à chaque association de mener une réflexion préalable et de préparer son argumentation. Le dernier type de document est intitulé « Minutes of Annual General Meeting ». Il s’agit du procès verbal de chacune des réunions. Il reprend l’ordre du jour en donnant pour chaque proposition, la décision du Board : adoptée, rejetée, retirée avant le vote, soumise à un comité d’étude… Les propositions concernent les transformations de la loi, mais aussi des décisions qui permettent d’interpréter la loi, une forme de jurisprudence. Le Board est aussi questionné sur les sanctions liées à cette loi. Si le joueur enfreint la loi, un dispositif de sanctions techniques (coup franc, penalty) et administratives (cartons jaunes et rouges) est à la disposition de l’arbitre. Les demandes peuvent également concerner les expérimentations, qui sont soit refusées, soit acceptées dans un cadre précis et délimité par le Board. Notre recherche se concentre donc sur cette partie du corpus, qui constitue le socle de connaissances indispensables à une étude qualitative des transformations de chaque loi. Les archives permettent aussi de faire une étude quantitative, et d’établir un ordre des lois les plus discutées, et amendées… des statistiques que nous avons regroupées en annexe 42 . Cette recherche a également rendu possible l’établissement d’un index spécifique aux archives du

39 1929 : Itinary of the Annual General Meeting. L’organisation de la réunion de 1929, illustre en partie notre propos (cf. annexe n°25, p. 102). 40 Cf. annexe n°1, p. 6 : Les dates et les lieux et les réunions de l’international Football Association Board. 41 Un exemple de l’« Agenda of the International Football Association Board » de 2010 est proposé en annexe n°28, p. 111. 42 Cf. annexe n°5 et n°6, pp. 13-21. 15

Board, qui permet de connaitre pour chaque item son année d’apparition, sa fréquence et sa récurrence 43 . Dans chaque compte rendu des 125 réunions étudiées, figure également les « Items of discussions »44 , qui concernent les sujets les plus divers : le pouvoir du Board, ses statuts, le professionnalisme, les primes des joueurs pour les matchs internationaux, les indemnités accordées aux arbitres, les Jeux Olympiques, le problème des deux sélections irlandaises, le transfert des joueurs, la possibilité de jouer avec une autre sélection, le dopage 45 … Les comptes rendus nommés « Minutes of Annual General Meeting » joint en annexe, peuvent donner une idée de la variété de ces thèmes. Toutes les discussions liées aux lois du jeu ou au Board sont intégrées dans la présente recherche. Les autres thèmes sont des éléments de mes études en cours, comme par exemple la monographie concernant Stanley Rous.

L'International Football Association Board est un organe de décision. Son conservatisme peut être mis en évidence en le comparant au Board du Rugby 46 créé la même année en 1886, avec trois membres Irlande, Pays de Galles et Écosse. Progressivement cette institution a intégré de nouveaux pays membres pour en compter en 2011 47 , treize dont la Fédération Internationale de Rugby (FIRA). Les autres nations qui participent aux éliminatoires de la Coupe du monde deviennent automatiquement des membres associés et peuvent donc assister à la table ronde annuelle, mais sans droit de vote. Cette large ouverture du Board de rugby, contraste avec la limitation à cinq membres de l’IFAB. La puissance de la FIFA, est sans aucun doute une hypothèse explicative de cet immobilisme. Il est possible de penser que le Board a fait preuve d’ouverture, et de modernisme en acceptant la FIFA en son sein, néanmoins avec la moitié des voix il conserve son pouvoir. D’un point de vue stratégique, cette cooptation lui procure une dimension internationale. Ce protectionnisme, prouve que les Britanniques sont bien les gardiens des lois du jeu, dans le sens d’un pouvoir de contrôle indiscuté. Le Board joue un rôle important dans l’envieuse sauvegarde des lois du jeu, comme le souligne Mc Ginn de la Scottish FA en 2002 48 .

43 Cf. annexe n°7, p. 22-28. 44 Cf. annexe n°7, p. 29. 45 2002 : Board Mr Zen-Ruffen de la FIFA informe le Board que dans le cadre de la campagne en cours de la FIFA contre le dopage, des tests sanguins (blood testing) seront introduits pour la première fois à la Coupe du monde 2002. Le Board soutien cette mesure. 46 IFRB : International Football Rugby Board. 47 L’Angleterre (acceptée en 1890), Nouvelle-Zélande, Australie et Afrique du Sud (1948), France (1978), Argentine, Canada, Japon, Italie et FIRA (1991). 48 AGM of 2002 : « ... in jalously guarding ». Mc Ginn est représentant au board depuis 1998. 16

Les défenseurs du Board pensent que le succès du football est dû à la simplicité et à la durabilité de ses règles. Le Board est souvent perçu comme « frileux » pour changer la loi, ou autoriser une expérimentation modifiant des « lois universelles ». Ses détracteurs 49 traitent cette institution de rétrograde et l'accusent d'être une chasse gardée des Britanniques. Ils affirment que les règles ont très peu évolué depuis la fondation de l’organisme. Tant et si bien que les membres de l’IFAB sont considérés comme les gardiens du Temple, chargés de vérifier avec vigilance la bonne application des règles qui ont fait du football un sport si spectaculaire. Notre étude questionne cette simplicité et cette stabilité revendiquées, car l’International Football Association Board (IFAB) a la réputation d’avoir su s’ériger en protectrice du jeu, mais aussi paradoxalement d’avoir su faire évoluer les lois du jeu. Lors de la réunion de1992, João Havelange met l’accent sur le fait qu’il est nécessaire de reconnaitre le dynamisme du football des temps modernes. Ce dynamisme est à exploiter lors des meetings pour améliorer la vitesse des prises de décisions, concernant la modification des lois du jeu.

49 En particulier la Presse, sur la non-introduction de la vidéo, et certains entraineurs… 17

Introduction ______

« La vertu des archives est de nous mettre en contact avec la pure historicité ». Lévi-Strauss 1

Notre recherche se concentre sur les lois du jeu du Football et s’intéresse à l’analyse de leurs transformations. La soule, le calcio , mais plus sûrement le folk football , qui opposent, plutôt rudement, deux équipes rivales, sont traditionnellement considérés comme les ancêtres du football moderne et du rugby. Avant le milieu du XVIII e siècle, le mot football est déjà employé, mais comme le souligne, Jacques Ulmann, 2 sous « l’identité trouble des mots » se cachent des réalités différentes. En fait, il est question de jeux différents. Par exemple deux formes de football coexistent dans la seconde moitié du XIX e siècle dans les Îles Britanniques : le Football Association et le Football Rugby. La confusion des règles entre ces deux jeux est une réalité, ce que confirme Roger Chartier « Les premiers matchs, entre l'Angleterre et l’Écosse 3, donnent lieu à d'âpres et longues contestations faute d'une définition claire de la manière de marquer des points »4.

Allen Guttman 5 propose une liste de sept critères 6 pour comparer les jeux primitifs, grecs, anciens, du Moyen Âge et les jeux sportifs. L’ouvrage du « Rituel au Record » traduit par Thierry Terret 7 met en évidence l’absence de critère commun entre les jeux primitifs et les jeux sportifs. Il différencie également le jeu spontané et les jeux organisés : « les jeux symbolisent la volonté d'abandonner toute idée de spontanéité absolue au profit de l'ordre joué »8. Cette organisation est également soulignée par Bertrand During. La distinction entre les jeux traditionnels et le sport, révèle des caractéristiques essentiellement différentes :

1 Levi-Strauss, C. (1962). La pensée sauvage. Paris, Plon, p. 289. 2 Ulmann, J. (1977). De la gymnastique aux sports modernes. Vrin, (3 e éd) p. 316. 3 Premier match international le 30 novembre 1872, entre l’Écosse et l’Angleterre (0-0). L’écosse est représentée par le club de Queen’s Park F.C. (Patrick, Écosse, 2000 spectateurs). 4 Chartier, R. (1994). Avant-propos. In Elias, N. & Dunning, E. Sport et civilisation. La violence maîtrisée. Paris, Fayard, p. 17. 5 Guttmann, A. (1978), From Ritual to Record. The Nature of Modern Sports. Columbia University Press. 6 1/ Sécularisme, 2/ Égalité des opportunités et des conditions de l’affrontement, 3/ Spécialisation des rôles, 4/ Rationalisation, 5/ Bureaucratie de l’organisation, 6/ Quantification, 7/ Quète des records. 7 Terret, T. (2006). Du Rituel au Record. La nature des sports modernes. L'Hamarttan. 8 Ibid., p. 21. 18 d’espace, de temps, de définition de joueurs, d’analyse d’activité, de règles et de degré de violence 9. Il faut envisager le passage des jeux aux sports comme un processus complexe, se réalisant en trois phases entrelacées : l’écriture des règles, l’unification des règles et la création d’une assemblée représentative en charge des lois du jeu. Avant le milieu du XIX e siècle en Angleterre les règles sont, d’une part transmises oralement et d’autre part spécifiques à une école ou à un village. Paul Dietschy 10 nous précise que les grandes écoles privées (Eton, Rugby, Winchester, Harrow…) avaient chacune leur propre football. Les premières traces écrites des règles sont attribuées à Eton dans les années 1820, puis à Rugby dans les années 1840. Selon Adrian Harvey 11 , les public schools rédigent leur propre règlement dans les années 1850. Si des mêlées violentes caractérisent l’ensemble des rencontres, certaines écoles privilégient le jeu à la main et d’autres au pied : les « handlers » s’opposent aux « dribblers ». A cette époque l’unification des règles n’a pas d’utilité car les équipes des public schools ne se rencontrent jamais, excepté le match annuel opposant Rugby et Marlborough 12 . Les anciens élèves, issus des ces écoles, qui désiraient continuer la pratique du Football seront à l’origine des premiers clubs, notamment le Sheffield Football Club en 1857, « dont 30 % des membres avaient fréquenté la prestigieuse Sheffield Collegiate School »13 . Contrairement aux écoles, la volonté des clubs de se rencontrer nécessite l’élaboration d’un code commun. La création de la Football Association (FA) le 26 octobre 1863 14 , par les Anglais, permet progressivement de distinguer le Football (Association) du Football Rugby et marque la naissance des lois du jeu, avec la définition des quatorze premières règles du jeu en football. Cette nécessité s’impose aux différents clubs de Londres qui se réunissent pour adopter une première codification commune. Ces premières règles étaient « assez vagues et on conçoit qu’il ne devait pas être joué en Angleterre un football uniforme »15 . Ce passage des règles aux lois du jeu est progressif, marqué par une lente unification, résultant de concessions et de vives négociations. Ainsi, lors des premières réunions entre les différents clubs de Londres, en 1863, chacun avait ses propres règles. Les discussions furent houleuses, et les

9 During, B. (1990) Des jeux aux sports. Paris, Vigot (2 e ed), p. 58. 10 Dietschy, P. (2010). Histoire du football. Paris, Perrin, pp. 33-38. 11 Harvey, A. (2001). An Epoch in the Annals of national Sport » : Football in Sheffiefd and the Creation of Moder Soccer and Rugby. The international Journal of the History of Sports, vol 18, décembre, n°4, p.54. Cité par Dietschy, P. (2010), op. cit., p. 38. 12 Harvey, A. (2001), op. cit., p. 55. 13 Dietschy, P. (2010), op. cit., p. 37. 14 Annexe 65, p. 167 : Tables de la loi établies en 1863 , parues dans le journal sportif Bell’s Life . 15 Gamblin, L. (1932). Le Football. Tous les sports par les champions n°3. Ed S.Bornemann, p. 7. 19 réunions nombreuses 16 . Selon Stanley Rous 17 , il fut décidé de ne conserver que les règles « practicable, reasonable and fair »18 . Des règles simples et facilement respectables par les joueurs eux-mêmes, en l’absence d’un arbitre. Le jeu est au départ joué par des Gentlemen et comme dans les public schools , les joueurs intègrent des valeurs morales. Ils doivent être fair- play… et les fautes considérées comme involontaires. La frontière entre des règles raisonnables, et déraisonnables semble plus floue. Elle concerne sans doute la limitation de la violence. Avant 1863, il semble autorisé de donner de grands coups de pieds à un joueur impliqué dans la mêlée. Les premières règles d’octobre 1863 ne permettent pas de faire un hacking 19 si le joueur est tenu en même temps. Deux mois plus tard, le hacking est interdit… les règles deviennent encore plus raisonnables. La diffusion du football hors des cercles de proximité nécessite l’adoption de règles communes, à la différence des jeux, où les règles sont par tradition transmises oralement, mais aussi renégociées en début de partie, voire mouvantes au cours du jeu. Le passage à l’écriture et l’unification de la codification, sont deux étapes indispensables au processus de transformation des règles en véritables lois votées, qui remplacent progressivement des usages locaux. La troisième étape du processus est la mise en place d'une assemblée représentative. En effet, pour Roger Chartier « Les règlements sportifs comme toutes les autres codifications juridiques, impliquent l'existence d'un corps de légistes chargés de les fixer, de les modifier, ou de veiller à leur respect »20 . Cette mission est assurée en Angleterre par la FA et l’association de Sheffield, mais l’idée de jouer au même sport hors des frontières, depuis le début des années 1870, impose de s’accorder sur les règles, et devient une nécessité avec les matchs de compétition. La création du Home International Championship, véritable tournoi des quatre nations britanniques en 1882, est à l’origine de la création du Board. Les Britanniques ont donc délégué la responsabilité des lois du jeu à cette institution internationale chargée du processus d'unification des règles et de leur application. La loi est une prescription établie par une autorité souveraine et imposée à tous les individus d’une société. Par extension, une loi du jeu s’impose à tous. Le Board tient premier meeting le 02 juin 1886 à Londres. Notre étude commence précisément à cette date. Notre corpus principal est constitué de l’ensemble des archives du

16 Dietschy, P. (2010), op.cit. 17 Rous, S. & Ford, D. (1974). A history of the laws of . FIFA. Zurich, Suisse, p. 20. 18 Practicable : réalisable, faisable ; reasonable : acceptable, raisonnable ; fair : juste, équitable. 19 Hacking : c'est-à-dire le fait de donner des coups de pied à un adversaire, en général dans les tibias, pour le faire tomber. 20 Chartier, R. (1994) op.cit., p. 17. 20

Board. Depuis la première réunion en 1886 « The first meeting of the International Football Association Board »21 , le Board se réunit chaque année, et rédige un compte rendu détaillé nommé « Minutes of the Annual General Meeting »22 . Le corpus historique, permettant l’analyse des transformations des lois du jeu du Football présente donc une chronologie continue avec une périodicité annuelle. Le monde sportif ayant été longtemps peu soucieux de ses archives, cette belle continuité nécessite d’être soulignée.

Les tentatives de transformations des lois du jeu se manifestent dans les archives, sous des formes variées. D’abord avec des propositions qui sont soit adoptées, soit rejetées ou tout simplement retirées avant le vote. Ensuite avec des expérimentations qui doivent automatiquement être autorisées par le Board . Enfin, avec des décisions qui précisent les conditions d’application des lois du jeu, car des orientations d’interprétation peuvent modifier l’esprit des textes. Notre objectif est de proposer une histoire réflexive, une tentative de compréhension des transformations des lois du jeu. Pour Pierre Arnaud. « L'histoire n'est pas seulement mémoire. Elle est reconstruction : l'histoire singulière et le témoignage, ne sont que des sources documentaires supplémentaires pour tenter d'approcher une réalité toujours plus complexe »23 . Cette reconstruction nécessite le croisement des données et une véritable recherche d’éléments variés et épars. Elle est confrontée, à l’histoire du football à travers chaque époque. Une histoire événementielle, réalisée à partir des images et des comptes rendus des matchs publiés dans la presse sportive, (l’Auto, Miroir des Sports, L’Equipe…) des témoignages de journalistes, ou d’acteurs du football (France Football, Football magazine…). Une histoire chronologique liée aux compétitions, aux clubs, aux systèmes de jeu… Sur le plan quantitatif, il est possible, de constater une augmentation progressive du nombre des lois : les quatre « Règles de Cambridge » en 1848, les dix retenues pour « The Simplest game »24 en 1862 et les quatorze premières lois originelles de la Football Association en 1863. A partir de 1891, le nombre d’articles est de dix-sept. La nouvelle classification,

21 Annexe n° 8, p. 31. 22 14 exemples en version originale de ces comptes rendus intitulés « Minutes of the Annual General Meeting » sont proposés en annexes : 1886, 1890 , 1892, 1900, 1910, 1920, 1925, 1930, 1940, 1950, 1960, 1970, 1980, 1997. 23 Arnaud, P. (1993). L’intégration du sport dans l’enseignement secondaire public. La voie associative. L’OSSU 1931-1945, in L’identité de l’éducation physique scolaire au XX° siècle, pp. 83-105. AFRAPS, p. 101. 24 J.C. Thring, (1862) maître assistant à l'Uppingham School, publie un code de football en 10 lois intitulé « The simplest game ». 21 toujours en vigueur aujourd’hui, proposée en 1937 25 par Stanley Rous maintient ce nombre. Ce corpus met en évidence un nombre stable de 17 lois.

Plusieurs choix pour rassembler ces différentes lois et proposer un cadre méthodologique à cette étude nous sont offerts. Une classification en deux grandes catégories, comme celle envisagée par Robert Masson26 , qui distingue d'une part les lois préparatoires à la partie (le matériel, les acteurs…) et d'autre part celles liées directement au jeu (durée, buts marqués, remises en jeu, fautes…). Ce regroupement original permettrait d’aborder l’étude du règlement suivant le rythme d’un match : sa préparation, le coup d’envoi… Une autre classification pourrait être retenue correspondant à la logique interne de l’activité, en regroupant les lois dans un système de règles qui permet de définir la spécificité du football, et donne la possibilité de comparer les différents sports-collectifs entre eux. Nous avons également envisagé de créer spécialement une classification fondée sur les dynamiques d’évolution. Certaines lois du jeu peuvent être considérées comme stables, en évolution permanente ou spécialement questionnées au XXI e siècle. Ce regroupement artificiel, forcé est discutable, car une loi stable pourrait un jour être modifiée et changer de catégorie. La classification retenue est donc tout simplement celle de Stanley Rous datée de 1937 27 , qui est toujours en vigueur aujourd’hui. Dans un souci de clarté, ces lois sont numérotées en chiffres romains de I à XVII. Les règles, les articles et les lois antérieurs à 1937 sont référencées en chiffres arabes de 1 à 17. Dans l’optique d’un cadre méthodologique précis, nous avons fait le choix d’étudier l’évolution du règlement en nous focalisant sur la transformation de chacune des lois. Ce plan chrono-thématique s’impose à nous, pour regrouper tout ce qui concerne une même loi dans le même chapitre. Notre recherche nécessite dans un premier temps de décrypter, sérier l’ensemble des archives du Board pour envisager une analyse descriptive de chaque loi de jeu au fil du temps. Les dix sept chapitres sont organisés à l’identique. Des repères sont fournis au départ sur les bornes de cette étude, l’historique du règlement avant 1886 et la loi actuelle en 2011, en tentant également de dégager les principes organisateurs de chacune des lois.

25 Cf. annexe n°4, p. 12 : Les classifications des lois du jeu. 26 Robert Masson ancien membre de la commission d'arbitrage de la FIFA. Cité par Jaques Ferran. Football magazine numéro194, décembre 1975. 27 Cette classification a été présentée au Board en 1937, et adoptée par le Board en 1938. 22

Un second niveau d’analyse permet de déterminer des continuités et des ruptures, des modifications qui répondent à des logiques internes28 ou externes 29 du jeu. En ce sens, l’évolution des lois du jeu est abordée dans une perspective historique au sens de Paul Veyne, l’explication historique est « une intrigue dont il faut montrer le déroulement et le faire comprendre 30 ». Cette étude des transformations rassemble les propositions de modifications, les transformations et les décisions adoptées. Cette dichotomie entre les lois et les décisions engendre une certaine confusion. Ces dernières peuvent être considérées comme des amendements ou des décrets d’application. L’objectif est de mieux harmoniser l’interprétation de la loi, car il existe des différences entre ce qui fait jurisprudence d’un pays à l’autre ou d’un match à l’autre. Dans cette optique le règlement envisage en cas d’infractions les sanctions à appliquer. L’étude met l’accent sur les expérimentations autorisées ou non par le Board, et se poursuit par une analyse systémique, qui permet d’appréhender le règlement comme un ensemble de lois en interaction, avec le souci de restaurer une approche plus synthétique. Notre dernier niveau d’analyse s’appuie sur une étude comparative pour pointer les différences et les similitudes, avec les lois adoptées dans les autres sports-collectifs. Des points de vue différents, constitués par les prescriptions passées et actuelles des autres institutions régissant les règles du jeu, éclairent chaque loi du football. Des propositions concrètes présentes dans les archives du Board, confirment la pertinence de ce « regard croisé » et nous permettent d’envisager des perspectives d’évolution.

Pour répondre à la logique de cette étude, notre choix se porte sur une définition systémique du football, comme recherche d’un rapport de force équilibré entre deux équipes. Ce sport collectif, ne peut se comprendre sans une analyse des interactions entre les attaquants et les défenseurs : « L'un des aspects les plus instructifs de ce schéma est qu'il est formé par les joueurs en mouvement des deux camps. On ne pourrait suivre le match si l'on concentrait son attention sur le jeu d'une équipe sans prendre en compte celui de l'autre équipe….. Il faut se distancier du jeu pour reconnaître que les actions de chaque camp s'imbriquent constamment et que les deux équipes opposées forment donc une configuration

28 « La logique interne représente les traits pertinents permanents de la situation motrice considérée. (…) La logique interne d'un jeu ou d'un sport, c'est sa carte d'identité ». Parlebas, P. (2008). Domaine d’action motrice et socialisations différenciées, in Jeu, Sport & Education Physique, sous la dir. de Dugas, E. Ed AFRAPS. pp.88 29 « La logique « externe », c'est-à-dire aux éléments occasionnels qui sont extérieurs à cette logique interne, tout en pouvant exercer sur elle une influence de grande importance : ainsi par exemple de la présence d'un public, de l'existence d'enjeux politiques ou financiers, de l'intervention de l'âge, du genre ou de la classe sociale des pratiquants ». Parlebas, P. (2008), op. cit., p. 88. 30 Veyne, P. (1971). Comment on écrit l’histoire : essai d’épistémologie. Paris, Seuil. 23 unique ». 31 Cette vision du jeu de Norbert Elias, est corrélée par l'observation d'un match du haut des tribunes, où les déplacements de tous les joueurs sont visibles au même moment. Cette « configuration unique » se modifie à chaque déplacement du ballon, qui provoque nécessairement un ajustement de position de la plupart des joueurs du terrain. Prendre en compte le déplacement de tous les joueurs, oriente la réflexion vers une analyse globale permettant une meilleure compréhension du jeu. Notre étude se situe donc dans ce cadre systémique, car la transformation des Lois de jeu concerne les deux équipes, et donne un nouvel avantage, soit aux attaquants, soit aux défenseurs. Dans cette perspective globale, le football peut se définir comme un sport collectif, interpénétré, et de signes contraires. Pour le distinguer ou le différencier d'autres sports collectifs, de même souche ou non, il est nécessaire d’en préciser les règles essentielles : un grand terrain rectangulaire, une cible limitée en largeur et en hauteur défendue par un gardien de but, un droit de charge limité, l’interdiction de jouer avec les mains, une balle libre pour tous et une libre circulation des joueurs sur tout le terrain. Ces règles permettent de définir la spécificité du football et caractérisent la logique interne de l’activité. Un sport collectif où les jambes sont concernées à la fois par la locomotion et la conduite du ballon.

Le fait d’adopter la classification officielle et d’aborder successivement chaque loi permettra à un autre chercheur, ou à un acteur du football de se repérer facilement, dans les méandres de cette étude. Mais cette rigidité méthodologique, en partie imposée par le traitement d’archives institutionnelles, limite la possibilité de proposer une analyse globale du règlement, reliée à une histoire globale 32 . Néanmoins, notre souci permanent est de l'illustrer. Notre méthode correspond au projet d’étude d’un jeu, de son histoire, à partir des règles, qui lui confèrent son identité. Cette dernière n’est pas insensible au fil du temps à quelques adaptations évoquant d’autres histoires possibles du football, déjà largement étudiées : une histoire héroïque, centré sur les événements et les acteurs, une histoire des compétitions, une histoire géographique 33 , une histoire institutionnelle, une histoire géopolitique, une histoire des systèmes de jeu, des conceptions, des méthodes d’entrainement, de la pensée tactique, des techniques… Notre étude se concentre sur les lois du jeu, mais l’histoire du jeu lui-même est questionné en permanence ; l’analyse systémique et l’étude comparative sont conduites dans cette optique.

31 Elias, N. & Dunning, E. (1994) Sport et civilisation. La violence maîtrisée. Editions Fayard, p. 70. 32 Histoire globale. Un autre regard sur le monde. (2008). Sous la dir, de L. Testot. Éd, Sciences Humaines. 33 Les historiens du football se concentrent sur une ville (un club), une région, un pays ou un continent. 24

Nous tenterons également de dégager les logiques et les tendances lourdes d’évolution du règlement. Notre recherche interroge les différentes influences qui contribuent à modifier ou à tenter de transformer les règles. Les causes de ces modifications sont à rechercher dans la logique interne du jeu, mais également dans des logiques externes, de spectacle ou de professionnalisation des joueurs par exemple. Pour Norbert Elias, les règles déterminent la configuration initiale du jeu 34 , sans pour autant prévoir ou anticiper les modifications du schéma au cours de la compétition. Les règles sont prescriptives, mais ne doivent ni se confondre avec l’interprétation de la loi, ni avec les pratiques. Les lois du jeu constituent uniquement une des clefs essentielles de l’identité du football.

34 Elias, N. & Dunning, E. (1994) op.cit., p. 212. 25

Chapitre 1 Loi I : Le terrain 35 ______

« Le problème est de montrer comment l’espace donne la clé de l’émotion et l’émotion celle du sport ». Bernard Jeu 36

Dans cette étude, pour une plus grande clarté nous traiterons d’abord toutes les modifications concernant le terrain, puis celles de la cible. Mais ces transformations se réalisent dans une dynamique commune et sont indissociables pour la compréhension du jeu pratiqué à chaque époque. Les schémas présentés en annexe 37 permettront de donner au lecteur cette vision d’ensemble. Nous devons signaler que les archives du Board restent silencieuses sur le plan du terrain au XIX e siècle. Il n'est évoqué que dans le compte rendu de 1892, date à laquelle la Football Association a recommandé de dessiner un plan du terrain avec les lois du jeu. M. Crump a produit un croquis qui a été approuvé par le Board 38 , mais l’annexe évoquée reste introuvable. Le premier plan apparait en 1902 39 , avec la création de la surface de réparation rectangulaire et du point de penalty.

1. Loi actuelle 40

Le terrain est structuré par des lignes droites, des lignes courbes, des points 41 , des buts à chaque extrémité et des poteaux de corner à chaque coin. Les lignes droites délimitent d’une part le terrain et le demi-terrain, et d’autre part des surfaces spécifiques : surface de but, surface de réparation. Les lignes courbes dessinent le rond central, les arcs de cercle du point de penalty et des points de corner. Le terrain de jeu est donc marqué par des lignes qui font partie intégrante des surfaces qu’elles délimitent. Le terrain de jeu doit être rectangulaire avec des dimensions flexibles, de 90 à 120 m. de long sur de 45 à 90 m. de large. La longueur peut

35 Law I – the fied of play. 36 Jeu, B. (1977). Le sport, l'émotion, l'espace. Paris, Vigot, p. 11. 37 Rous, S. & Ford, D. (1974). A history of the laws of Association Football. FIFA. Zurich, Suisse, pp. 141-144 (cf. annexe n°30, p. 120). 38 Réunion du Board de 1892. 39 Réunion du Board de 1902. 40 Cf. annexe n°32, p. 125. Loi I : le terrain de jeu en 2011. 41 Des points qui servent à poser le ballon pour l’engagement au milieu du terrain et pour tirer le penalty à 11 mètres de chaque but à l’intérieur de chaque surface de réparation. 26 varier de 100 à 110 m. et la largeur de 64 à 75 m. pour les matchs internationaux. Afin d'harmoniser les dimensions des terrains servant de cadre à des rencontres internationales, l'IFAB a décidé de fixer la longueur à 105m et la largeur à 68m en 2008 42 .

2. Principes de cette loi

Un jeu qui se joue dans un espace réservé, constitue le premier principe. Initialement place de village, puis parc et ensuite terrain de cricket, l’aire de jeu s’est spécifiée, et comme au Calcio italien, les joueurs se sont retrouvés séparés des spectateurs, avec pour chacun un territoire précis. Pour Henri De Montherlant « Les lignes droites, blanches et pures des limites tracées à la chaux sur le gazon, et des barrières, qui entourent le terrain, sont merveilleusement excitantes pour un esprit disposé au symbole ».43 . Nous poserons donc comme second principe de cette loi, un terrain identifié pour jouer au même jeu. Le sport peut être considéré comme un jeu d’échecs, dans lequel deux équipes se font face. Pour Schaffhausser, « c'est toujours dans les limites des 64 cases du jeu d'échecs que l'infinité des parties doit avoir lieu. Il en va de même pour les notes de musique et pour les 26 lettres de l'alphabet français. Les règles du jeu impriment à l'espace une restriction dont la combinaison des formes d'occupation devient certes infinie mais moins étendue »44 . Comme aux échecs, pour rencontrer l’autre, se mesurer ou défier l’autre, l’espace va progressivement être délimité et structuré, en conformité avec la loi I. Contrairement aux échecs, le terrain est rectangulaire 45 , et non parfaitement séparé en cases identiques 46 . L’identification spécifique de l’espace va se faire progressivement par le traçage des lignes au sol et l’installation d’une cible caractéristique, le but. Avec par exemple, selon Edouard Pontié 47 « une ligne au centre du terrain, qui sépare le jeu en deux parties égales ». Pour troisième principe, nous retiendrons un terrain praticable. Le ballon doit pouvoir rouler et rebondir. Le football se joue à l’extérieur et quelles que soient les conditions climatiques, sauf en cas d’orage où le match doit être obligatoirement interrompu, pour des raisons de sécurité. Il n’est théoriquement pas possible de jouer dans la neige poudreuse ou

42 FIFA.com : samedi 08 mars 2008. Loi I - L'aire de jeu 43 De Montherlant, H. (1954). Les Olympiques. Gallimard (2 e ed), pp. 224-225. 44 Schaffhauser, P. (2008). Football et Philosophie ou comment joue-t-on au ballon rond ici et ailleurs ? Paris, L'Harmattan, p. 13. 45 Rèunion du Board de 1897 : Les lignes de touches doivent être tracées à angle droit avec les lignes de buts. 46 L’analogie est de portée limitée, car aux échecs, les cases participent à la définition du mouvement des pièces, ce qui n’est pas le cas au football. 47 Pontié, E. (1905). Le football Association, in Les sports modernes illustrés , sous la dir. de P. Moreau et G. Voulquin. Paris, Larousse, pp. 162-164. 27 sur un terrain gorgé d’eau. L’arbitre vient théâtralement lâcher le ballon au dessus de la flaque d’eau et renvoie tout le monde aux vestiaires. Schaffhauser, précise à ce propos, « que tel match sera reporté en Espagne ou en France à cause de la neige, alors qu'il pourra avoir lieu « normalement » en Norvège ou en Russie »48 . La tolérance aux conditions climatiques ne semble pas universelle. Mais il est possible de jouer avec un soleil aveuglant, un vent contraire, sous la pluie de Berne 49 , sous une température de 38°C à Bilbao 50 , ou dans la poussière en Yougoslavie 51 . Il faut accepter de se « rouler dans la boue » et de jouer sur des surfaces différentes : herbe, stabilisé 52 ou synthétique. La tolérance peut aussi être plus ou moins grande de la part des instances internationales du football pour que telle ou telle rencontre puisse avoir lieu sur un terrain homologué localement, mais jugé non conforme (ou peu conforme) au plan international. Le quatrième principe concerne l’équité. Les deux équipes jouent sur le même terrain et doivent bénéficier de ses avantages et subir ses inconvénients pendant la même durée. A la mi-temps les équipes changent de camp pour profiter de la pente, de la partie engazonnée ou de la proximité de la tribune. Il est plus difficile de tenir compte des conditions atmosphériques par définition changeantes, avec un vent qui peut tomber, ou un soleil se cacher, le règlement s’en remet au hasard. Avant le début du match, l'arbitre en présence des deux capitaines effectue le tirage au sort, par tradition en lançant une pièce. Ce tirage semble être une permanence. En 1897, pour Tunmer et Fraysse « On tire au sort, et le gagnant a le choix entre le côté du terrain et le coup d'envoi »53 . Aujourd’hui le capitaine qui gagne le toss 54 choisit seulement le côté du terrain, l’équipe adverse bénéficie de l'engagement. Cette équité est aussi assurée par un tracé du terrain logiquement symétrique. Lucien Perpère 55 rapporte que lors de la finale de la coupe de France entre Sète et le Red-Star le terrain mesurait « 30 mètres d’une touche au centre et … 37 mètres du centre à l’autre touche ».

48 Schaffhauser, P. (2008). Football et Philosophie ou comment joue-t-on au ballon rond ici et ailleurs ? Paris, L'Harmattan, pp. 40-42. 49 Finale de la Coupe du monde le 4 juillet 1954 à Berne. Au nom de l'Allemagne, Sepp Herberger fit l'emplette de crampons de pluie pour la finale de l'après-midi, crampons que les Hongrois ne se donnèrent même pas la peine de chercher de par la ville de Berne, noyée sous le déluge. 50 Coupe du monde en Espagne en 1982. Pour le France-Angleterre à Bilbao le coup d'envoi fut donné avec une température de 38°. Et encore 32° trois semaines plus tard pour la demi-finale contre l'Allemagne. 51 A propos du match Yougoslavie–Tchécoslovaquie de 1931 : « Le terrain, pulvérisé encore par le soleil, était tellement poussiéreux que les joueurs soulevaient des nuages en courant. La poussière était tellement compacte, à certains moments que la balle était invisible à moins de 25 centimètres ». Langenus, J. (1943). En sifflant par le monde. Gand, Snoeck-Ducajou et Fils, p. 44. 52 Le terrain très sablonneux fut utilisé pour les matchs de l’équipe de Malte. Notamment à l'occasion de la rencontre entre Malte et la RFA le 25/2/1979, pour la qualification au Championnat d'Europe des Nations de 1980 en Italie ; il s'agissait de la vétuste enceinte de l’Empire Stadium basé à Gzira et fermé en 1981. 53 Tunmer N.G. & Fraysse, E (1897). Football (Association). Paris, Colin et Cie Editeurs, p. 76. 54 Toss : tirage au sort 55 Perpère, L. (1951). Football ma passion… Ed Football Panorama. 28

Un terrain est donc un espace réservé, structuré au graphisme identifiable, un espace praticable. Il reste aussi un « champ de jeu ». Pour Schaffhausen 56 , au Mexique, le stade où se pratique le football amateur c'est tout d'abord et avant tout le campo 57 , « un domaine où gouverne le football ». « Même au cœur des villes, le « stade » reste un bout de campagne qui défie l'anarchie de l'urbain. Il est la butte témoin qui rappelle au propre comme au figuré que le football est culture ». Le terrain est un espace de culture et peut être perçu soit comme un espace de vie, soit comme un espace aseptisé et clos.

3. Historique de la loi

A l’origine, comme dans nombre de jeux traditionnels, il n'y avait pas d’espace délimité, ni de marque au sol. Pourtant dans le Calcio Florentin selon Breekedam (1990) 58 le terrain de jeu était à peine plus petit que les terrains actuels et déjà rectangulaire, avec ses 172 x 82 brasses 59 (braccie ) florentines. Cette délimitation existe aussi dans les parties jouées par les collèges anglais, et dépend souvent de l’espace disponible, celui de la cour par exemple. Mais l'introduction de règles, à partir de 1863, et de stades dévolus à la pratique exclusive du football rendit nécessaire l'adoption de lignes blanches. A l’inverse des jeux traditionnels installés dans les espaces ordinaires des activités quotidiennes, les duels d’équipes sportives requièrent pour R. Chartier « un espace adéquat, marqué, reproductible ailleurs »60 . Les marquages que nous voyons aujourd'hui sur les terrains du monde entier sont une conséquence directe des lois du jeu adoptées au cours du processus de maturation de la discipline. Ce jeu simple, devenu un sport, demande donc, à partir du moment où les rencontres se déroulent hors des cercles de proximité, un espace réservé sans obstacle. Il nécessite un terrain délimité, marqué et identifié pour jouer au même jeu. Nous n’avons pas trouvé d’allusions au terrain de jeu dans les premières « règles de Cambridge» de 1848, ni dans les règles édictées par Thring en 1862. Les premières indications concernant le terrain de jeu datent donc de 1863, année de création de la Football Association, et de la rédaction des tables de loi inspirées des lois de Cambridge.

56 Schaffhausen, P. (2008), op. cit., p. 67. 57 Le campo : le «champ ». 58 Breedekam, H. (1995). Le Football Florentin. Les jeux et le pouvoir à la renaissance. Paris : Diderot Editeur, arts et sciences. 59 Ancienne mesure valant 1,66 mètre. 60 Chartier, R. (1994), op.cit., p. 15. 29

A l’origine le terrain et la cible sont mentionnés dans l’une des 14 lois du jeu.61 Pour le terrain, la loi qui porte déjà le numéro un 62 précise que « La longueur maximum du terrain devra être de 200 yards (183 mètres), la largeur maximum de 100 yards (91,5 mètres) ». Nous pouvons constater qu’il n’existe pas de dimensions minimales ! Bertrand During 63 a montré que la délimitation de l’espace constituait l’une des distinctions fondamentales entre les jeux et les sports. Une légère confusion subsiste avec les lois du jeu de 1863. Elles semblent indiquer que le jeu ne se joue pas uniquement à l’intérieur du terrain, mais aussi à l’extérieur. Comme le montre Stanley Rous 64 , avant 1874, les lignes ne sont pas tracées, et il est possible de continuer à jouer derrière les limites du terrain, ou tout du moins à lutter pour entrer en possession du ballon. Pour les côtés du terrain ceci est confirmé par la loi 5 des tables de la loi : « Quand le ballon est en touche, le premier joueur qui le touche lui donnera un coup de pied ou le lancera à partir du point de la ligne de limite du terrain où il a quitté celui-ci, dans une direction à angle droit par rapport à la ligne de limite ». Les remises en jeu s'effectuent déjà derrière la ligne de touche et se réaliseront à deux mains à partir de 1882. En ce qui concerne la ligne de fond de jeu, il existe une zone derrière le but, comme au rugby actuellement. Dans cette aire, la loi 5 65 stipule que l’équipe du joueur qui récupère le ballon, bénéficie de la remise en jeu. Il est donc, à cette époque, essentiel de jouer et de récupérer le ballon au-delà des limites du jeu. La date de 1869 est retenue pour que la ligne de but détermine vraiment la sortie du ballon. Une confirmation est donnée avec l’apparition de la règle du coup de pied de but 66 cette même année. Cette période semble donc illustrer le passage des jeux de ballon, au sport moderne appelé Football Association.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

61 Bragg, M. & Charlton, B. (2006). The rules of Association Football 1863.Oxford. Boldeian, Library (cf. annexe n°65, p. 167.) 62 Cf. annexe n°4, p. 12, sur les classifications des lois du jeu. 63 During, B. (1984, op. cit., p. 19. 64 Rous, S. & Ford, D. (1974). A history of the laws of Association Football. Zurich, FIFA, p. 141. 65 Loi 5 des tables de loi de 1863 : « au cas où le ballon irait derrière la ligne de but, si un joueur de l'équipe à laquelle il appartient touche en premier le ballon, un joueur de son équipe aura le droit de faire un coup franc sur la ligne en face du point où le ballon aura été touché. Si un joueur de l'équipe adverse touche en premier le ballon, l'un des joueurs de son équipe aura le droit de faire un coup franc à partir d'un endroit à 15 yards de la ligne de but, en face de l'endroit où la balle a été touchée ». 66 Le coup de pied de but : cette action est surnommée le « 6 mètres » mais la surface ne mesure que 6 yards soit environ 5m50 ! 30

Une première transformation peut être analysée avec le passage d’un champ de jeu à un terrain de jeu délimité, universel et uniformisé. Celle-ci est envisagée suivant trois axes, d’abord la réduction de l’aire de jeu, puis l’apparition de lignes sur le terrain et enfin la modification des surfaces. Le règlement de 1863 précise que « La longueur maximum du terrain devra être de 200 yards (183 mètres), la largeur maximum de 100 yards (91,5 mètres) ». En 1877, la Football Association et la Sheffield Association posent un code unique, et donnent pour la première fois des dimensions minimales au terrain : « le terrain mesure de 100 à 200 yards sur 50 à 100 yards ». La variation acceptée va donc du simple au double. En 1897 67 , les dimensions du terrain sont réduites aux normes actuelles : une longueur entre 90 et 120 mètres et une largeur entre 45 et 90 mètres Les dimensions internationales furent également fixées (100-110, 64- 75). Cette réduction de la surface de jeu s’avère indiscutable. Paradoxalement en 1897 le livre de Tunmer et Fraysse, mentionne que « Les dimensions du terrain ne doivent jamais avoir plus de 180 mètres et moins de 90 mètres de longueur ; sa largeur varie en proportion de la longueur de 90 à 45 mètres. Cet emplacement doit être délimité par des petits drapeaux placés aux quatre coins »68 . Sur le plan du terrain présenté par les auteurs 69 il est précisé que la longueur est deux fois la largeur, mais les dimensions minimales de l’aire de jeu ne sont pas confirmées 70 . Les lois ne sont pas encore universelles, et des graphismes différents se côtoient, sans doute en raison d’un problème de diffusion du règlement. Cet ouvrage rédigé par 2 joueurs, ne représente pas une version officielle du règlement, mais fait pourtant référence, et Armand Colin le réédite en 1902 et 1913 71 ! L’étude de la loi du jeu révèle une permanence de 1863 à 2007 avec la flexibilité des dimensions du terrain. Ces mesures ont été conçues dans l'esprit du législateur comme une sorte de variable d'ajustement, pour pouvoir jouer partout dans le monde. Le Board demande en 1896, que chaque association nationale organisant un match inter-nations, avise avant le match l'association visiteuse du lieu et des dimensions du terrain de jeu. Il nous faut préciser que le jeu n’est pas tout à fait le même selon la dimension du terrain, car l’organisation tactique est différente. Cette variable est intégrée dans l’esprit des entraîneurs. En 1934, pour

67 Réunion du Board de 1897 : Les dimensions du terrain de jeu doivent être d'une longueur maximum de 130 yards, d'une longueur minimum de 100 yards, d'une largeur maximum de 100 yards, d'une largeur minimum de 50 yards. Dans les matchs internationaux, les dimensions du terrain de jeu doivent être d'une longueur maximum de 120 yards, d'une longueur minimum de 110 yards, d'une largeur maximum de 80 yards, d'une largeur minimum de 70 yards. 68 Tunmer & Fraysse. (1897), op.cit., p.74. 69 Ibid., dessin p. 75. 70 Ibid., p. 75. 71 Ces précisions sont données par Bédarieux Louis. (2008) Le Foot de Papa. Paris, Terres éditions. 31 le France-Italie au « Victorio Pozzo 72 , d’ordinaire si courtois et francophile, n’avait-il pas exigé que la longueur de terrain du Parc fût portée à 105 mètres, pour éviter le jeu défensif »73 . Pour Johan Cruyff, entraîneur légendaire du FC Barcelone, spécialiste du jeu dans les intervalles « Tout est une question de mètres et d’espace »74 . Il explique que si le terrain est moins large, ou si l’équipe n’occupe pas toute la largeur, alors les intervalles entre les défenseurs sont plus réduits et les actions individuelles deviennent compliquées à réaliser. Pour favoriser le jeu offensif il est peut être souhaitable d’agrandir le terrain vers une norme de 120 x 80 mètres, autorisée par le règlement. Dès 1905 75 , Edouard Pontié recommandait de jouer sur le terrain le plus grand possible, pour la beauté du jeu et un jeu continu 76 . Les mesures prescrites pour les matchs internationaux 77 sont plus précises, mais également flexibles. Afin d'harmoniser les dimensions servant de cadre à des rencontres internationales, le Board 78 , lors de sa réunion de 2008, a décidé de fixer la longueur à 105m. et la largeur à 68m.79 . Pour la première fois, la variable disparaît et le processus d’uniformisation des dimensions du terrain commence avec les rencontres internationales. Mais rien ne confirme aujourd’hui dans la réalité cette uniformisation. L’apparition des lignes dans le terrain constitue notre second argument pour envisager la création d’un terrain universel, compartimenté en surface de jeu. Pour S. Rous 80 les lignes extérieures apparaissent en 1883, et la plupart des surfaces à la fin du XIX e siècle. Beaucoup de zones d’ombre existent avant la création du Board en 1886. Selon nos recherches la surface de but apparait en 1871, date de la spécification du rôle du gardien de but. Sa forme est un arc de cercle devant le but. Cette hypothèse n’est pas confirmée par Stanley Rous. Ses schémas du terrain proposent la création d’une surface de but seulement en 1891, constitué de deux arcs de cercles, tracé à partir de chaque poteau. Ce double arc de cercle n’est jamais confirmé par l’étude des archives du Board. S. Rous valide son hypothèse en faisant référence d’une part au « Athletic News Football Annual » de 1891

72 Victorio Pozzo : entraîneur de l’équipe qui remporte la coupe du monde en 1934 et 1938. 73 Cazal, J-M., Cazal, P. & Oreggia, M. (1998). L’intégrale de l’équipe de France de football. First Edition, p. 102. France–Italie du 5 décembre 1937 (match 144, amical. Score 0-0). 74 Film sur l’histoire du FC Barcelone 2007. 75 Weber, E. (1905). Sports Athlétiques. (2e éd). Paris, Garnier Frères, p. 159 : « les joueurs s'ils doivent donner plus d'efforts, y sont aussi plus à l'aise pour faire aboutir leurs combinaisons ; le ballon étant moins souvent hors du terrain, le jeu est continu, plus vif, plus suivi ». 76 Il est possible de prendre l’exemple du club d’Arsenal qui jouait à Highbury de 1913 à 2006 sur un terrain de 105m sur 70m, et aujourd’hui de 113m sur 76m dans son nouveau « Emirats Stadium » d’Arsenal. 77 Pour les matchs internationaux : Longueur : minimum 100 m, maximum 110 m. Largeur : minimum 64m, maximum 75 m. 78 Le « Board » : IFAB : International Football Association Board. Nommé le Board. 79 Réunion du Board de 2008 cité par FIFA.com : samedi 08 mars 2008. 80 Rous, S. & Ford, D. (1974). Op.cit., pp. 141-142. 32 et l’ « History of the FA Cup » rédigée en 1891 par Geoffrey Green. La photo de la finale de la Cup de 1901, nous a également confirmé ce surprenant tracé. Ce qui signifie tout simplement que les Anglais, dans leurs propres compétitions, ne respectent pas totalement les lois du jeu édictées par le Board . La date de 1891, pour l’apparition de la surface de pénalité ne fait aucun doute. Cette création est stipulée dans les archives du Board , la même année que la règle du penalty. Une faute volontaire dans cette surface de pénalité, sera sanctionnée par un coup de pied de pénalité, tiré à 11 mètres du but. Cette surface est une bande de 12 yards qui s’étend sur toute la largeur du terrain devant chaque ligne de but. La diffusion du règlement ne semble pas si simple. En effet le terrain dessiné en 1897 dans le livre de Tunner et Fraysse ne confirme pas la présence de toutes ces surfaces. Il existe uniquement un rectangle et deux buts rectangulaires. La nécessité de maintenir les joueurs adverses à dix yards du point d’engagement donna l’idée de la création en 1891 81 du rond central. En, 1902 toutes les lignes internes du terrain avaient la disposition actuelle. Une seule nouveauté en 1937 82 avec l'arc de cercle situé à une distance de 10 yards (9m15) du point de penalty. Cette ultime courbe arrive 35 ans après les dernières modifications du tracé du terrain. L’observation des extraits de matchs de la Coupe du monde de 1938, qui se déroule en France, nous a permis de vérifier l’existence réelle de ce tracé. Pour la 8 ème de finale à Strasbourg, la marque d’un double arc de cercle est nettement visible. Nous faisons l’hypothèse d’une erreur de mesure pour le premier tracé à 10 m, au lieu de 10 yards (9m15). Le tracé du terrain est donc immuable depuis 1937. Les seules modifications intervenues ensuite concernent les abords du « rectangle vert » avec la surface technique 83 et les publicités 84 autorisées au sol. Enfin, les surfaces à l’intérieur du terrain vont changer de forme et s’agrandir. En 1902, les surface de but et de pénalité, se transforment et deviennent rectangulaires 85 . Une surface de but en forme de rectangle, appelée "petit rectangle" ou « petite surface » mesurant six

81 Rous, S. & Ford, D. (1974), op. cit., p. 142. 82 Réunion du Board de 1937 : Proposition de la FA adoptée : Loi 1 ….. Un arc de cercle, avec un rayon de 10 yards à partir du point de penalty, devra être marqué à l'extérieur de la surface de réparation. 83 Une délimitation d’une surface technique en pointillé autour des bancs de touche apparaît en juillet 2001, mais on est déjà au-delà des limites du terrain de jeu… au contact avec les spectateurs. 84 Lors de sa réunion en 2000, le Board freina les publicités sur les terrains, aux endroits qui pouvaient amener des contestations : « Aucune forme de publicité au sol n’est autorisée dans la surface technique, sur une distance d’un mètre à partir de la ligne de touche et à l’intérieur du terrain. En outre, aucune publicité ne doit être autorisée dans la zone comprise entre la ligne de but et les filets ». 85 Rous, S. & Ford, D. (1974), op. cit., p. 144. 33 yards de largeur et 20 yards de longueur, remplaça le demi-cercle (ou les deux) tracé devant le but. Une ligne de réparation à 18 yards (16,50m.) fut tracée, pour permettre de faire appliquer la règle du penalty. Entre le moment de son apparition en 1891 et 1902, le penalty ne se tirait pas depuis un point précis mais depuis n'importe quel endroit le long de la ligne des 12 yards. On décida en 1902 d'accorder des penaltys pour les fautes commises dans une surface mesurant 18 yards à partir de la ligne de but et des poteaux de but, sur 44 yards de largeur. Cette surface de réparation, ne concernait pas encore la zone d’évolution spécifique du gardien de but, qui jusqu’en 1912, pouvait toucher 86 le ballon de la main dans toute sa moitié de terrain. Une seconde transformation concerne la nature du terrain. Elle est particulièrement visible aujourd’hui avec la création exponentielle des terrains synthétiques en France et devient un sujet d’actualité avec l’autorisation 87 obtenue à partir de la saison 2010-2011 par les Clubs de Lorient et de Nancy de jouer sur cette surface en Ligue1. La nature de la surface de jeu permet de jouer un football un peu différent. Il est possible de comparer avec le tennis où des joueurs sont plus ou moins performants en fonction des surfaces proposées. Le style, les techniques et les tactiques de jeu ne sont pas identiques à Roland Garros sur terre battue, et à Wimbledon sur gazon. En 2001, le Board note que les lois du jeu ne spécifient pas sur quelle surface le jeu devait se jouer. En football, trois surfaces qui apparurent successivement sont aujourd’hui utilisées, l’herbe, le stabilisé et le synthétique. Au niveau international, l’herbe (le gazon) avec parfois beaucoup de boue, est restée la référence depuis 1863. Pour Edouard Pontié 88 « le terrain d'association, comme celui de rugby, doit être gazonné et nivelé avec le plus de soin possible ». Mais les Unes du Miroir des Sports des années 20 montrent des joueurs de rugby, puis de football totalement couverts de boue… des images qui disparaissent. Des arrêtés préfectoraux tendent à fermer les terrains devenus impraticables pour raisons météorologiques afin d'éviter des coûts d’entretien et de réparation très élevés. Des surfaces de jeu synthétiques apparaissent en Angleterre dans les clubs professionnels dans les années 80, puis au début des années 90 en France. Sur ce genre de terrain, le ballon roule plus vite, rebondit plus haut et les tacles sont impossibles pour cause de brûlure aux cuisses. Des surfaces synthétiques de seconde génération sont créées depuis 2000 et les conditions de jeu se rapprochent du jeu sur herbe. Cette surface est aussi envisagée pour

86 Aujourd’hui le gardien ne peut utiliser ses mains que dans la surface de réparation. Mais il pouvait toucher le ballon avec les mains sur tout le terrain jusqu’en 1882 et ensuite dans son propre camp jusqu’en 1912 ! 87 Le Club de Rennes avait aussi obtenu en mai 2008 l'autorisation de jouer sur une surface synthétique en Ligue 1, mais n’avait finalement pas utilisé cette possibilité. 88 Pontié, E. (1905). Le football Association, in Les sports modernes illustrés, sous la dir. de P. Moreau G. Voulquin. Paris, Larousse, pp. 162-164. 34 le niveau international. A partir de 2001 la FIFA attire l’attention du Board sur l’amélioration de la qualité des surfaces artificielles, confirme la possibilité de jouer des matchs des éliminatoires de la Coupe du monde 2002 sur de telles surfaces et approuve l’introduction du « FIFA Quality Concept for Artificial Turf ». Le Board en 2003, reconnait les avancées technologiques des surfaces artificielles et leur utilisation avantageuse dans des régions avec des problèmes climatiques. Il autorise en 2004 89 toutes les compétitions à se dérouler sur ce genre de surface. Le mondial des moins de 17 ans en 2005 au Pérou est la première compétition où l'intégralité des terrains utilisés était en synthétique 90 . Les transformations envisagées peuvent être illustrées par le passage d’un champ de jeu à un terrain de jeu délimité, universel et uniformisé. Le champ de jeu est aussi un espace de culture, un espace de vie pour Schaffhauser : « Le terrain était boursouflé par des trous et des petites crevasses qui rendaient aléatoire la pratique du ballon rond. Tenir debout était en soi déjà une forme d'exploit. Parfois les matches devaient s'interrompre le temps de laisser passer un âne, quelques moutons, ou pour attendre la fin d'un combat de chiens»91 . Le terrain, véritable « champ de patates » se distingue d’un espace aseptisé et clos constitué par les surfaces synthétiques. Cette standardisation du terrain de jeu, évite les faux rebonds, diminue l’incertitude liée au milieu et classe le football comme un sport pratiqué en milieu artificiel (Parlebas 1981) 92 . Cette transformation est sans doute également liée au problème de sécurité. Cette préoccupation est déjà présente en 1938 93 afin d 'éviter les rigoles pour le traçage des lignes du terrain et en 1971 94 , le Board souhaite choisir des matériaux non dangereux pour marquer le terrain de jeu en accord avec la loi 1.

89 Réunion du Board de 2004 : Les matchs peuvent être disputés sur des surfaces naturelles ou artificielles, conformément au règlement de la compétition en question. Lorsque des surfaces artificielles sont utilisées dans des matchs de compétitions entre les équipes représentatives des associations membres de la FIFA ou dans des matchs de compétitions internationales de clubs, les surfaces doivent correspondre aux exigences du Concept qualité de la FIFA pour le gazon artificiel ou de l'International Artificial Turf Standard, sauf en cas de dérogation exceptionnelle accordée par la FIFA. 90 Chacune des 10 pelouses a coûté 448.000 €, dont 100.000 à la charge de la FIFA. 91 Schaffhauser, P. (2008), op.cit., pp. 65-66. 92 Parlebas P, (1981) Contribution à un lexique commenté en sciences de l'action motrice. Paris, INSEP, pp. 131- 132 : «Le règlement définit un lieu d'action pouvant être la pleine nature ou un milieu artificiel plus ou moins aménagé. Il prédétermine par là une certaine utilisation de l'espace et un certain type de rapport avec l'environnement marqué de façon capitale par la présence ou l'absence d'incertitude ». 93 Réunion du Board de 1938 : Proposition de la FA adoptée : Le terrain de jeu doit être marqué avec des lignes distinctes et non pas par des rigoles en V, en accord avec la loi. 94 Réunion du Board de 1971 : Proposition soumise par le Pays de Galles. Le Board est d’accord pour que les critères suivants soient retenus : Les matériaux ne peuvent être dangereux (c'est-à-dire chaux ou créosote) ; ils ne doivent pas dépasser au dessus de la surface ; ils ne devraient pas être placés en ornière ou en creux ; ils doivent être facilement visibles en fonction de la nature de la surface du terrain ; ils doivent avoir un haut degré de stabilité. 35

Nous avons relevé différentes transformations de la loi numéro 1, sur le terrain de jeu, mais nous pouvons aussi insister sur des permanences, comme la forme rectangulaire du terrain, les marges de flexibilité concernant les dimensions de l’aire de jeu, le centre du terrain et le rond central 95 .

5. Décisions du Board liées à cette loi

Depuis 1950 96 , les lignes appartiennent aux surfaces de jeu qu’elles délimitent et il n’est plus possible à partir de 1975 97 de tracer des lignes discontinues ou interrompues.

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

La première proposition de modification date de 1900. M Reid, pour Ireland FA propose de tracer une nouvelle ligne en pointillé de 18 yards pour indiquer la position que les joueurs doivent respecter quand un penalty est en train d'être tiré. S. Rous 98 précise que cette ligne théorique est déjà présente, même si elle n’est pas spécifiée dans les lois du jeu. La loi sera modifiée en 1902 avec la création de la surface de réparation rectangulaire comprenant effectivement une ligne à 18 yards du but. La fédération écossaise a proposé en 1947 et en 1949 99 de remplacer cette surface de réparation par un demi-cercle d’un rayon de 22 yards. Cette proposition semble judicieuse pour deux raisons. D’une part le tracé serait simplifié, un seul demi-cercle remplacerait la surface de réparation et l’arc de cercle de penalty apparu en 1937. D’autre part, toutes les fautes commises à 21 yards par exemple, seraient sanctionnées de la même façon, ce qui n’est pas le cas actuellement. En 1971 100 , le Pays de Galles propose d’élargir la surface de but et de réduire la surface de réparation. Des nouvelles lignes seraient tracées qui partiraient à 10 yards des poteaux pour remplacer celles des 6 yards et de 18 yards. Elles seraient connectées avec les lignes de 6

95 Réunion du Board de 1891 : Le centre du terrain sera indiqué par une marque, et un cercle avec 10 yards de rayon sera fait autour d'elle. 96 Réunion du Board 1950 : Les surfaces intérieures du terrain de jeu comprennent la largeur des lignes qui les délimitent. 97 Réunion du Board de 1975 : Le Board décide que les lignes discontinues ou interrompues ne répondent pas aux critères de la loi 1, et ne seront pas utilisées pour tracer le terrain de jeu. 98 Rous, S. & Ford, D. (1974), op. cit., p. 142. 99 Réunions du Board de 1947 et 1949 : A chaque bout du terrain de jeu, il y aura une aire appelée surface de réparation, celle-ci sera formée par le tracé d'un demi-cercle avec un rayon de 22 yards à partir d'un point sur la ligne de but situé au centre du but. 100 Réunion du Board de 1971. 36 yards et de 18 yards parallèles à la ligne de but. Il s’agit donc de tracer un premier rectangle de 20 yards sur 6 yards puis une surface de réparation trois fois plus grande de 20 yards sur 18 yards. Cette proposition de réduire la surface de réparation, qui aurait constitué une véritable rupture, ne sera pas adoptée par le Board. Les propositions les plus nombreuses concernent le tracé de lignes parallèles à la ligne médiane pour réduire la zone d’application du hors jeu : des lignes à travers le champ de jeu situées soit, à 25 yards (1920) 101 , soit à 35 yards (1980) 102 , soit à 40 yards (1920 à 1925) 103 de chaque ligne de but. L’Écosse a proposé, sans résultat, en 1913 104 d’augmenter la largeur minimum du terrain de 50 à 55 yards. La flexibilité des dimensions reste inchangée depuis 1897.

7. Expérimentations

La modification des lois du jeu est parfaitement illustrée par la volonté de la Fédération Netherlands FA de faire respecter la distance des 10 yards aux adversaires quand une équipe bénéficie d’un corner. Dans un premier temps, l'Écosse propose au Board en 1973, 1975 en 1977 de tracer à chaque drapeau de coin un quart de cercle ayant 11 yards de rayon à l'intérieur du terrain. Le Board refuse avec comme argument de ne pas surcharger le tracé du terrain. Dans un second temps, la Netherlands FA demande et obtient l’autorisation de conduire une expérimentation de 1977 à 1980. Une marque est tracée à 10 yards du poteau de corner à l’extérieur des lignes de buts et de touche pour s’assurer que les adversaires soient à la bonne distance du poteau de corner. Dans sa réunion de 1981, le Board informe que les expérimentations faites par la Netherlands avec les marques à 10 yards du poteau de corner donnent d’excellents résultats. Mais il faut attendre, 1995 et une nouvelle décision 105 du Board pour que cette marque soit adoptée dans les lois du jeu. Cette mesure correspond parfaitement au fait que le marquage du terrain est défini dans un but constructif depuis 1990 106 . La Netherlands FA a donc patienté 22 ans entre sa première proposition et l’adoption de cette mesure.

101 1920 : Proposition écossaise. 102 1980 : Proposition de la NASL : North Américan Soccer League. 103 1920 : Proposition de la FA : 1921, 1922 et 1923 par l’ Écosse ; 1924, 1925 par l’Écosse et la FA 104 Réunion du Board de 1913. 105 1995 Board Décision 1.13 : Il est possible de tracer une marque à l’extérieur du terrain de jeu, à 10 yards (9m15) du drapeau de coin et à angle droit avec la ligne de but afin de faciliter le travail de l’arbitre quand il doit veiller à ce que la distance lors d’un coup de pied de coin soit respectée. 106 1990 : recommandation du Board publiée par la FIFA. 37

Le graphisme du terrain peut être considéré comme une marque déposée par le Board. En 1979 le Board et la FIFA attirent l’attention des Associations Nationales et des arbitres FIFA sur les entorses des lois du jeu, qui se répandent. Le Board insiste, notamment, sur le fait de rajouter illégalement des marques sur le terrain. Cette surveillance et ce contrôle du Board sont illustrés par la ligne de hors jeu aux 35 yards (32m) tracée par la NASL ( North Américan Soccer League) en 1980. La FIFA a refusé cette demande faite à posteriori, mais a cependant accordé une dérogation, pour la saison 1980-1981, qui était déjà commencée.

8. Analyse systémique

Le football est considéré comme un sport collectif de grand terrain, dans lequel les joueurs (loi III) se disputent un ballon unique (loi II) et disposent d’une certaine surface de jeu (loi I). Le graphisme du terrain laisse apparaitre un ensemble de signes remarquables. Les lignes dessinent les contours d’un terrain où le ballon est soit en jeu, soit hors du jeu (Loi IX). D’autres lignes partagent ce champ de jeu et délimitent également des surfaces précises, qui sont liées à des lois spécifiques. La surface de réparation est prépondérante pour le coup de pied de réparation (loi XIV), la surface de but pour le coup de pied de but (Loi XVI), le rond central pour le coup d’envoi (loi VIII) et l’arc de corner pour le coup de pied de coin (loi XVII). La ligne médiane est utilisée pour le coup d’envoi et pour le hors-jeu (loi XI), car les joueurs qui sont toujours dans leur propre moitié de terrain au départ du ballon envoyé par un de leurs partenaires ne peuvent être sanctionnés pour leur position de hors-jeu.

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Les terrains délimités et rectangulaires semblent une norme majoritairement adoptée dans bon nombre de sports collectifs. Pourtant des formes ovoïdes existent également pour la pratique du football australien, du football gaélique ou de hockey sur glace. Ces terrains sont découpés par des lignes et compartimentés en zone de formes variées. La ligne de partage, appelée ligne médiane au football, signifie que chacun possède un camp, dans ces sports collectifs de signes contraires où le jeu est orienté vers la cible adverse. Ainsi contrairement au football, la zone des six mètres au handball est inaccessible aux joueurs (excepté le gardien de but), et dans la « raquette » au basket-ball, la règle des « 3 secondes » limite la présence des adversaires.

38

La stabilité des tracés reste une constante au fil du XX e siècle et l’apparition de la ligne des trois points au basketball reste l’exception qui confirme cette règle. La surface du terrain est en relation avec le nombre de joueurs, même si comme l’a montré Pierre Parlebas (1998) l’espace de jeu effectif est différent dans chaque sport collectif. Ceux de « petits terrains » acceptent moins de joueurs que ceux de « grands terrains ». Le handball qui se jouait à 11 contre 11 avant la seconde guerre mondiale se transforma, avec simultanément une réduction du terrain et le passage de onze à sept joueurs. En football, nous pouvons remarquer le synchronisme entre les dimensions du terrain réduites aux normes actuelles en 1896 et le nombre de onze joueurs fixé en 1882.

Synthèse Le terrain de jeu, dont le graphisme a subi de nombreuses modifications jusqu’en 1937, présente depuis une remarquable stabilité. Les seules modifications à noter, sont les petites marques à 10 yards du point de corner et la zone technique qui apparaît en 1994 107 . Le Board recommandera en 1895 108 d’utiliser la signalisation pour délimiter cette zone. Cette loi paraît primordiale, puisque le football en tant que sport nécessite un espace réservé et délimité. La surface de jeu détermine également des modalités de pratiques différentes. Pour Philippe Villemus 109 , la distinction entre le rugby et le football est née de la variété des terrains sur lesquels on pratiquait le dribbling game. Quand il y avait des pelouses gazonnées, les placages, les corps à corps individuels ou les mêlées étaient presque « sans danger ». Mais dans les cours d'école, pavées et murées, le dribbling game, qui consistait à pousser la balle avec les pieds, l'emporta comme à Westminster, Eton, Windres, Shrewsbury ou Chaterhouse. Il s'agissait donc de donner la priorité à l'adresse et à l'habileté sur la force. Le même genre de constat pouvait être réalisé avec les terrains synthétiques de première génération, où les tacles provoquaient systématiquement des brûlures aux jambes suite au frottement sur la surface de jeu. La flexibilité remarquable des dimensions du terrain, permet de jouer partout dans le monde et évite d’invalider certains terrains existants. Cette tolérance laisse place, peu à peu, à

107 Réunion du Board de 1994 : Proposition de la Scottish FA adoptée. Le Board propose un texte et un diagramme inclus dans the Universal Guide for Referees pour clarifier davantage la définition de la surface technique ( The technical Area ). La surface technique désigne le banc de touche pour le staff technique et les remplaçants. 1/ La surface technique sera considérée comme s’étendant à 1 m de chaque coté du banc et peut s’étendre vers l’avant à une distance de 1 mètre de la ligne de touche. 2/ … (cf. annexe n°33, p. 126). 108 Réunion du Board de 1995 : Proposition Scottish FA adoptée. Il est recommandé d’utiliser la signalisation pour délimiter cette zone. 109 Villemus, P. (2006). Le Dieu du football. Ses origines - Ses rites - Ses symboles. Eyrolles, p. 62. 39 des dimensions de plus en plus précises notamment pour les matchs internationaux. La surface de jeu semble s'universaliser avec un terrain de plus en plus lisse grâce à l'évolution des matériaux. Des surfaces synthétiques de seconde génération sont créées depuis 2000 permettant des conditions de jeu proches du jeu sur herbe. Pour Georges Vigarello 110 cette « homogénéisation » de l'espace n'impose pas nécessairement une transformation des techniques corporelles. Les mouvements, les déplacements y gagnent une efficacité mais non une organisation nouvelle. Ils sont plus puissants ou rapides mais non nécessairement différents. Cette homogénéisation participe selon nous, à la disparition de l’aléatoire, et notamment des faux rebonds. Nous pouvons chercher à envisager les évolutions futures à travers les propositions ou les expérimentations des acteurs du football. Les dimensions du « rectangle vert » se sont réduites et semblent s'uniformiser. Les surfaces de réparation se sont agrandies et il est envisageable de prolonger cette surface jusqu'à la ligne de touche, ou de tracer une ligne plus éloignée du but. Cette ligne pourrait également être utilisée pour limiter la zone de hors-jeu. Il existe dans les archives du Board également de nombreuses autres propositions pour tracer une ligne spécifiquement destinée à l’application de la loi du hors-jeu 111 .

110 Vigarello, G. (1988). Une histoire culturelle du sport. Techniques d'hier… et d'aujourd'hui. Paris, Robert Laffont SA et Revue EPS, p. 99. 111 Cf. Chapitre 11 : loi XI le hors jeu. 40

Chapitre 1Bis Loi I : la cible, les buts ______

« En ce temps-là, les poteaux n'étaient pas arrondis : les balles tangentes n'entraient pas. Mais comme les gardiens se blessaient souvent aux arêtes, on a fini par les arrondir. Je suis contre les poteaux arrondis, les carrés sont bien plus intéressants. Le gardien doit bien réfléchir avant de plonger ». Vladimir Dimitrijevic 1

1. Loi actuelle

Des cibles rectangulaires et verticales appelées « buts » sont placées au centre de chaque ligne de but. La distance séparant les deux montants est de 8 yards (7,32 m.), et le bord inférieur de la barre transversale se situe à 8 pieds (2,44 m.) du sol. La dimension des buts est donc de 8 yards x 8 pieds 2 (7,32 sur 2,44 m.) Des filets doivent être attachés aux buts et au sol. Les montants et la barre transversale sont de couleur blanche.

2. Principes de cette loi

Les buts sont situés à chaque extrémité du terrain, au milieu de la ligne de but. Chaque équipe défend une cible et attaque l’autre. Le jeu est donc, de signe contraire et interpénétré, avec des joueurs des deux camps sur le même espace. La cible est petite verticale limitée en hauteur et en largeur. Elle est défendue, d’abord par le gardien qui peut utiliser ses mains, mais aussi par les autres joueurs qui peuvent facilement se mettre en barrage en se situant entre la cible et le ballon. Il est difficile de marquer un point, ce qui est parfaitement imagé par Henri De Montherlant 3 « Au milieu le seuil du Sort, la chose qui n'est fait que pour être vierge : les poteaux de but et leur filet goudronné ». Cette difficulté est une permanence et le premier match international s’est soldé par un score vierge. Le point est marqué uniquement si le ballon pénètre entièrement dans le but, en général les « filets tremblent » et le ballon reste, comme prisonnier, « au fond des filets ». Un but est « obtenu lorsque le ballon aura passé entre les montants et sous la barre transversale du

1 Dimitrijevic, V. (2006). La vie est un ballon rond. Paris, La table ronde, p. 104. 2 Les deux montants doivent avoir les mêmes largeur et épaisseur sans excéder 12 cm. La ligne de but a la même largeur que les montants et la barre transversale. 3 De Montherlant, H. (1954), op. cit., pp. 224-225. 41 but »4. Dans les règles du jeu parues en 1905 en France, il est précisé que la traverse du but doit être absolument horizontale, faute de quoi l'arbitre peut accorder un but s'il estime que la barre étant bien placée le but aurait été marqué. Il en est de même si le gardien de but pour arrêter le ballon, se suspend après la traverse et la fait fléchir! Pour ces raisons, il est conseillé qu’elle soit de substance rigide et non remplacée par un ruban. Le principe de sécurité doit être respecté. Il est abordé par le Board concernant la barre transversale dès 1961 5 et pour les buts amovibles en 1993, 1994 6 et 1996.

3. Historique de la loi

La largeur des buts est spécifique à chaque public school . Dans le code de Cambridge d'octobre 1848, celle-ci avait été fixée à 15 pieds (4m57). Plus surprenant, dans le règlement de Harrow au début des années 1860, la largeur des buts varie d’un jour à l’autre 7. En effet, les poteaux sont séparés de 12 pieds (3,66 m), le premier jour, mais en cas de résultat nul, cette distance est doublée le lendemain. Cette augmentation de la surface de la cible permet aux équipes de marquer plus facilement et de se départager. C’est cette dimension « élargie » de 24 pieds ou 8 yards (7,32 m) qui fut conservée dans les tables de la loi de 1863 : « La longueur et la largeur seront marquées par des drapeaux et les buts seront définis par deux poteaux dressés, séparés de 8 yards (7m32) sans ruban pour les relier ». Il s’agit donc, d’une cible verticale, uniquement délimitée en largeur ! Les poteaux ressemblent à ceux encore visibles au rugby aujourd’hui, mais sans la barre transversale. Il est surprenant de noter que les dimensions universelles de la cible ne sont pas confirmées par Tunmer et Fraysse en 1897. Les auteurs signalent dans cet ouvrage de référence en France, que : « Les buts placés au centre des lignes (de buts) … sont formés de poteaux plantés en terre à 7 m l'un de l'autre et reliés par une barre transversale à de 2m 40 du sol »8. Il est également possible de faire l’hypothèse du nationalisme des auteurs qui privilégient le système décimal aux mesures anglaises, en modifiant les dimensions de la cible.

4 Réunion du Board de 1890 : Art. 4 : Un but sera obtenu lorsque le ballon aura passé entre les montants et sous la barre transversale du but sans avoir été jeté, frappé de la main ou porté par aucun joueur du camp attaquant. 5 Guide Universel des arbitres et Réunion du Board de 1961 : Dans le cas où la barre transversale est déplacée, ou brisée et s'il n’est pas possible de la remettre en place, ou de la remettre en état sans constituer une source de danger pour les joueurs, dans un match joué selon le Règlement d'une Compétition le match doit être abandonné. 6 Réunion du Board de 1994 : Proposition de la FA adoptée : Pour des raisons de sécurité, les buts, notamment ceux qui sont amovibles, doivent être fixés au sol de manière sûre. 7 Cf. annexe n°63, p. 165. The Harrow School Rules of 1860-63. 2. The goals are 12 ft. in width (3.66 m)… Note : If the result of the first day's play is a tie, the distance between the poles shall be doubled to 24 ft. (7.32 m). 8 Tunmer & Fraysse. (1897). op, cit,. pp. 74 et 76. 42

En 1863, comme au rugby, pour marquer un but, il suffisait d’envoyer le ballon entre les poteaux, peu importe la hauteur. Dans ces conditions la présence d’un gardien de but n’est pas indispensable, et devient inutile dans le cas d’un tir à plus de 3 mètres de hauteur ! La première transformation s’opère en 1866 avec pour la première fois, l’apparition d’un ruban entre les poteaux, pour délimiter verticalement la cible. Il semble à cette époque possible de marquer au dessus ou en dessous de ce repère, avec des modalités différentes. A partir de 1875, les deux grands poteaux sont supprimés, le but devient rectangulaire. La gravure présentée par Louis Bédarieux 9 concernant le match, Angleterre-Écosse en 1875, confirme la présence du ruban et du but rectangulaire. La cible est donc délimitée en hauteur, et il devient possible d’envisager une spécification du rôle du gardien de but. La seconde transformation est marquée par l’apparition de la barre transversale. En 1877 la Football Association et la Sheffield Association, sous la pression de cette dernière, posent un code unique qui précise que les buts mesureront 8 yards sur 8 pieds 10 , et qu’une barre horizontale remplacera le ruban qui en fixait jusqu'alors la hauteur. Cette mise en place sera progressive. Pour Louis Bédarieux en 1891 « le fil horizontal n’est toujours pas remplacé par une barre »11 . Il se réfère à une publicité, concernant les clients potentiels des pharmaciens intéressés par ce jeu rugueux, où l’on aperçoit un morceau de but dessiné. La hauteur de la cible est donc fixée en 1877, et le Board n’apportera qu’une seule précision en 1939 12 avec une hauteur de 2,44 m. mesurée entre le sol et « le bord inférieur » de la barre transversale.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

Les deux premières transformations se sont donc déroulées avant la création du Board. Le passage d’une cible verticale à une cible délimitée en hauteur, puis une cible devenue rectangulaire avec une barre transversale. Une troisième transformation s’opère à la fin du XIX e siècle. Les filets de buts firent sans doute leur apparition vers 1885, mais plus sûrement en 1889. 13 Leur usage se généralisa très vite et ils furent obligatoires en 1893 pour la coupe d'Angleterre. Ce n'est pourtant qu'en

9 Bédarieux, L. (2008). Le foot de papa. Terres éditions, p. 21. 10 Les buts mesureront 8 yards sur 8 pieds soit 7m32 sur 2m44. 11 Bédarieux, L. (2008), op. cit., p. 21. 12 Réunion du Board de 1939 : Proposition de la FA : Ils seront reliés à leur sommet par une barre transversale dont le bord inférieur sera à 8 pieds (2 m 44) du sol. 13 L’histoire a retenu comme inventeur Mr Brodie de Liverpool. 43

1895 14 que les lois du jeu les mentionnent, lorsque le Board affirme que « les filets doivent être utilisés ». Il s’agissait de filets en chanvre ou en jute. Ensuite les filets de but en nylon furent autorisés sous réserve que les fils en nylon ne soient pas plus minces que ceux en chanvre ou en jute. Le « filet goudronné » de Montherlant, n’est pas évoqué dans les archives du Board. Il est précisé, en 1967 15 , que les filets doivent être fixés convenablement de telle sorte « à ne pas gêner le gardien de but », et en 1995 16 qu’ « aucun support publicitaire ne peut être placé à quelque endroit des filets de but ». Une dernière transformation s’opère avec l’évolution des matériaux. A l’origine les tables de la loi mentionnent que « … les buts seront définis par deux poteaux dressés ». Ni la forme ni les dimensions des poteaux, ne sont spécifiées. Le Board va progressivement règlementer cette question à l’aide de toute une série de décisions.

5. Décisions du Board liées à cette loi

Le Board » indiqua avec précision dès 1895 17 l'épaisseur maximum des poteaux de but et de la barre transversale : 5 pouces (12 cm). Une tolérance est apparue en 1966 18 : les poteaux et la barre doivent être compris entre de 4 pouces et 5 pouces. En apparence, une première transformation semble se dessiner avec des poteaux carrés et en bois jusque dans les années 70, puis ensuite ronds et métalliques. Dans la mémoire collective il est évident qu’en 1976, les montants et la barre transversale des buts étaient carrés à Glasgow pour la finale de la coupe d’Europe entre St Etienne et le Bayern de Munich ! Les 2 tirs sur la barre des Stéphanois avaient fait couler beaucoup d’encre « Si les poteaux étaient ronds, les buts seraient peut être rentrés ». D’un point de vue scientifique et balistique, cela n’a jamais été démontré, mais pour la finale suivante, en 1977 entre Liverpool et Mönchengladbach les poteaux étaient devenus ronds. Une analyse plus fine, avec l’observation des photos ou des gravures laisse apparaître une réalité beaucoup plus

14 Annual General of Meeting (AGM) of 1895: proposal of FA : « It was decided that goal-nets to use internationals matches ». 15 Réunion du Board de 1967 : Des filets pourront être attachés aux montants, à la barre transversale et au sol derrière les buts. Ils devront être soutenus de façon convenable et être placés de manière à ne pas gêner le gardien de but. 16 Réunion du Board de 1995 : Proposition de la FIFA amendée par FA et par Scottish FA. Adoptée. 17 Réunion du Board de 1895. 18 Réunion du Board de 1966 A condition que la largeur et l'épaisseur des montants de but et de la barre transversale soient compris entre 4 pouces (10 cm) et 5 pouces (12 cm). 44 complexe, et une alternance de la forme des poteaux 19 . Par exemple en 1938, l’année de la Coupe du monde à Paris, ils sont ronds au Parc des Princes et carrés à Saint-Ouen et à Colombes 20 . L’étude des archives du Board confirme cette hypothèse sur la forme. En effet, le Board en 1966 précise que « les poteaux et la barre transversale doivent être de forme carrée, rectangulaire, rond, demi-rond ou elliptique ». Aujourd’hui la forme reste libre : carrée, ronde ou ovoïde. Pour la matière, les archives ne permettent pas d’affirmer que le métal a remplacé le bois, mais plutôt que ces matériaux sont utilisés alternativement. A partir de 1967 21 , d’autres matériaux peuvent être employés à condition d’être approuvés par le Board. Cette même année, le Board inspecte et accepte un échantillon de poteaux de but en fibre de verre, utilisés en Norvège. Aujourd’hui, pour des raisons de sécurité la résistance des buts est testée, les ancrages vérifiés et dans la pratique les structures en bois disparaissent au profit du métal. Les autres décisions concernent la barre transversale déplacée ou brisée 22 . La poursuite ou non du match est envisagée dans le cas de son non-remplacement ou de l’utilisation d’un ruban. En 1896 le Board décide que « si pour n'importe quelle cause, pendant le déroulement du jeu, la barre viendrait à être déplacée, l'arbitre doit avoir le pouvoir d'accorder un but si dans son opinion le ballon serait passé sous la barre si elle n'avait pas été déplacée 23 . Cette décision sera seulement retirée en 1958 ! A partir de 1949, le règlement distingue les matchs amicaux et les matchs de compétition. Par exemple, il 24 décide que pour un match joué sous les règles d'une compétition internationale, la partie doit être abandonnée s’il n’est pas possible de replacer correctement une barre transversale déplacée. Le Guide Universel des arbitres en 1957 précisera que le remplacement de la barre transversale par une corde pour finir le match ne peut être autorisée. En ce qui concerne les matchs amicaux, il est de nouveau possible, à partir de 1966 25 , d’utiliser une corde pour remplacer la barre transversale. Les poteaux peuvent aussi casser, comme par exemple le 3 avril 1971 lors d'un match entre Möchenglabach et Brême, mais ce cas n’est pas abordé par le Board .

19 Bédarieux, L. (2008) Le Foot de Papa. Terres éditions. Photos et gravures. Poteaux ronds : 1868, 1890, 1924, 1930, 1938, 1958, 1966, 1970, 1982, 1984. Poteaux carrés : 1892, 1906, 1921, 1929, 1930, 1936, 1937, 1838, 1940, 1950, 1955, 1969. 20 Bédarieux, L. (2008). op. cit., pp. 178-179. 21 Réunion du Board de 1967 : Décision 1.10. Les montants de but et la barre transversale peuvent « être en bois, en métal ou en une autre matière approuvée ultérieurement par l'International FA Board ». 22 Le terme « brisée » est ajouté dans le texte à partir de 1961 dans le Guide universel des arbitres et dans le compte rendu du Board de 1964. 23 Réunion du Board de 1896. 24 Réunion du Board de 1949 : Décision suite à une question du Pays de Galles. 25 Proposition étudiée par le Board en 1964  Comité d’étude : Reportée en 65  Décision adoptée à la réunion du Board de 1966. 45

La cible peut donc revêtir des formes et des natures de matériaux différentes conformes aux règlements. Par contre la couleur des poteaux est impérativement blanche depuis 1988 26 . Cette décision fut adoptée pour réagir contre les demandes d’utilisation de poteaux jaunes.

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

Entre 1967 et 1974, nous avons retrouvé en France quatre propositions différentes pour agrandir la cible et permettre de marquer plus de buts. Cette période correspond à l’avènement d’un football ultra défensif et performant mis en pratique par les Italiens portant le nom de Catenaccio 27 . Cela explique, sans doute, que ces propositions émanent des éducateurs. Les effets recherchés concernent le nombre de buts marqués, mais en agrandissant la cible, le Board prendrait le risque de changer le jeu et de renforcer les systèmes défensifs donc d’obtenir l’effet inverse. Cette problématique sur les dimensions d'un but est relevée par Georges Boulogne 28 en 1968 : « Il faut les augmenter considérablement, car il s'agit de faire basculer le jeu défensif en offensif. Une augmentation minuscule ne servirait qu'à durcir et épaissir les défenses. Je propose donc 10m sur 3m ». Le débat fut aussi relancé en 1990 en raison de la plus faible moyenne de buts marqués en Coupe du monde. La dimension de la cible est identique depuis le XIX e siècle montrant ainsi l’extraordinaire stabilité des lois du jeu. Ces propositions vont donc toutes dans le même sens. Elles émanent des fédérations, sont souhaitées par certains éducateurs, font toujours l’objet d’un débat dans le football moderne, mais étrangement aucune de ces propositions n’a réellement été soumise au Board.

7. Expérimentations

Les demandes d’expérimentations en 1973, 1974 et 1975 de l’United States Soccer Federation et de la North Américan Soccer League ont été refusées par le Board . Elles concernaient une augmentation de la largeur de la cible de 2 pieds 29 (environ 60 cm) et de la hauteur d’un demi-pied 30 (environ de 15 cm). Cette mesure se proposait aussi de reculer la

26 AGM of 1988 : « The goal-posts must be of white color ». 27 Catenaccio : le cadenas, la chaîne. Système de jeu ultra défensif. 28 In Les Cahiers de l’Équipe ».Georges Boulogne en 1968 était instructeur fédéral français. 29 Largeur de 24 à 26 pieds. Donc de 7m32 à 7m93. 30 Hauteur 8 pieds à 8 ½ pieds, soit de 2m44 à 2m59. 46 marque du penalty à 13 yards, soulignant.la corrélation existant entre la grandeur de la cible et la position du point de réparation (loi XIV).

8. Analyse systémique

La loi I et spécifiquement la cible, est en interaction avec la loi X concernant la façon de marquer un point, avec un ballon (loi II). Cette cible est gardée par un joueur (loi III : nombre de joueurs) un gardien de but, possédant un rôle spécifique, et un pouvoir supplémentaire, celui d’utiliser ses mains dans sa propre surface de réparation. Ce goal est lui-même soumis à une réglementation spécifique par la loi XII concernant les fautes et les incorrections. Par exemple pour marquer un point, le ballon doit être envoyé entre les montants de but et la barre transversale et franchir complètement la ligne de but. A la fin du XIX e siècle, il était conseillé de placer un dirigeant de chaque club pour vérifier si le ballon était bien entré dans le but, ou tout simplement passé à coté de celui-ci. Avec l’apparition des filets, ce problème fut en grande partie résolu. Si le but est marqué, celui-ci est validé par l’arbitre (loi V). Michel Serres fait remarquer subtilement, que « le joueur en fait propulse le ballon dans le but, et que c’est en définitive l’arbitre qui le marque… sur son calepin ». Si l’arbitre décide qu’il y a but, alors il siffle et fait reprendre le jeu par l’équipe adverse au centre du terrain par un coup d’envoi (loi VIII). La reprise du jeu sera accélérée par la présence des filets de but.

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Le nombre, les formes et les dimensions des cibles diffèrent totalement d’un sport collectif à l’autre, conditionnant des actions motrices spécifiques. Au basket-ball, la cible est horizontale, constituée par un petit cercle situé à 3,05 mètres du sol, à peine plus gros que le ballon. Au volley-ball, la cible est horizontale, et représentée par la totalité du camp adverse délimité par les lignes du terrain. Au handball, la cible est comparable à celle du football, mais plus petite. Les poteaux sont peints en blanc et rouge, comme une barrière ferroviaire. La reprise de cette signalétique très visible est rarissime au football 31 .

31 Nous l’avons observé sur le terrain stabilisé de l’Empire Stadium situé sur l’île de Malte en 1979, lors de la rencontre entre Malte et la RFA le 25/2/1979, pour la qualification au Championnat d'Europe des Nations de 47

Au rugby, il est possible de marquer des points par des actions motrices différentes visant deux cibles aux caractéristiques distinctes. Une première cible verticale, apparentée aux buts : sur chaque ligne de but et à égale distance des lignes de touche s'élèvent deux poteaux aussi hauts que possible, plantés à 5,50 m. l'un de l'autre et reliés à 3 mètres du sol par une barre transversale. Pour marquer il est nécessaire, en bottant le ballon, de le faire passer entre les poteaux et au dessus de la barre transversale. L’autre cible est horizontale, elle se situe derrière les poteaux adverses, entre la ligne de but et celle des « ballons morts 32 », et il suffit de venir aplatir le ballon dans l’en-but pour marquer un essai. La dimension stable de la cible constitue un trait caractéristique des sports universels. La précision de la délimitation de la cible en football, peut être comparée à celle de la hauteur des paniers dans le premier règlement du basket publié en décembre 1891 dans le journal du Springfield College , The Triangle , et affiché dans le gymnase le 21 décembre. Parmi les 14 règles originelles figure la hauteur des paniers : les cageots de pêches accrochés à la galerie du gymnase étaient à 3,05 de hauteur soit 10 pieds. Dans les deux cas, quelques aménagements se sont opérés au fil du temps, mais nous notons une permanence de la hauteur pour la cible de basket, (toujours 3, 05) et de la largeur pour celle de football (7m32). Paradoxalement la zone d’en-but au rugby reste variable. Dans le sens de la largeur, elle dépend tout simplement des marges de flexibilité du terrain et dans la profondeur elle peut osciller entre 8 et 15 mètres ! Il serait intéressant de comparer le nombre d’essais et de ballons « morts » avec d’une part une cible de 8 mètres de profondeur, et une autre de 15 mètres. S’il l’on se réfère à Saint-Chaffray et Dedet 33 cette ligne se situait en 1920, à 22 mètres en arrière de chaque ligne de but. Nous pouvons remarquer d’autres similitudes avec par exemple une cible prolongée par un filet en football, handball et basket-ball, avec le même souci de rendre l’action de marque plus visible pour les arbitres, les acteurs et les spectateurs du jeu.

1980 en Italie. Il s'agissait de la vétuste enceinte de l’Empire Stadium basé à Gzira et fermée en 1981. Le terrain en stabilisé, fut notamment utilisé à l'occasion des rencontres internationales. 32 Le ballon est « mort », s’il est envoyé au-delà de la zone d’en-but. 33 Saint-Chaffray, E & Dedet, L (1920. Football (Rugby) Édition Armand Colin.1999 Nouvelle Éditions Revue « E.P.S. » Collection : Archives et mémoire de l'éducation physique et du sport, p. 95-96. Article 3 : A 22 mètres en arrière de chaque ligne de but et parallèlement à elle, on trace, d'une touche à l'autre, une ligne appelée ligne de ballon mort. 48

Synthèse Dans les jeux et les règlements des public schools les cibles s’adaptent aux contraintes de l’environnement, et sont également dépendantes des négociations entres les joueurs, ou les différentes associations. Avec le processus d’institutionnalisation, la dimension de la cible est codifiée en 1863, et contrairement aux jeux les dimensions sont très précises. La largeur des buts constitue une des permanences du football. La cible deviendra délimitée en hauteur et gardée par un gardien à la fin du XIX e siècle. La fabrication des buts est également normée pour la forme des montants et les matériaux employés, mais paradoxalement il est toujours possible de jouer avec des poteaux carrés en bois, même si pour les filets le synthétique a remplacé le chanvre. Les filets ont fait leur apparition à la fin du XIXe siècle et sont aujourd’hui un élément indissociable de la cible, et pour l’arbitre un moyen efficace de discerner si le ballon est passé en dedans ou en dehors des buts. Cet élément illustre la diminution de l’aléatoire dans les sports modernes. En 1905, E. Weber 34 en recommandait leur utilisation sous le prétexte qu’il faut toujours supposer l'adversaire de mauvaise foi. Pour lui, avec les filets il n’y a plus de contestation possible. Autres temps, autres mœurs, le débat actuel sur le thème de l’usage d’enregistreurs vidéo se cristallise sur le même problème. L’objectif est aujourd’hui de déterminer avec certitude et en temps réel si le ballon a franchi totalement la ligne de but. L’évolution technologique permet de fixer une caméra sur cette ligne, ou d’équiper un ballon à puce et de capter avec une cellule son intrusion réelle dans le but. Mais le Board , lors de la réunion de travail annuelle du 20 octobre 2010, a souhaité que cette technologie réponde à des critères de simplicité, de précision et de vitesse. En fait il exige une délivrance immédiate du résultat. Entre le 7 et le 13 février 2011, les membres de l’IFAB ont suivi une présentation consacrée aux tests de la technologie sur la ligne à la Maison de la FIFA, mais aucunes des dix sociétés n’est parvenue à satisfaire les critères fixés. L’IFAB, lors de sa réunion du samedi 5 mars 2011 au pays de Galles, a donc décidé d’autoriser la poursuite des essais sur les technologies permettant de vérifier si un ballon a franchi ou non la ligne de but.

34 Weber, E. (1905), op. cit., p.161. 49

Chapitre 2 Loi II : le ballon 1 ______

« C'était un matin de Pâques, j'avais quatre ans. Je dormais et, par la fenêtre ouverte, un ballon est entré dans ma chambre. Je n'ai jamais oublié l'odeur de ce cuir. Elle est restée en moi. Ce jour-là, je me suis marié avec le football ». Stefan Kovacs 2

1. Loi actuelle

Le ballon répond à des normes précises de forme, de taille, de poids et de pression. Les matériaux utilisés pour sa fabrication sont contrôlés. Les ballons subissent des tests afin de prouver qu’ils répondent aux exigences techniques minimales. Les Logos officiels « FIFA APPROVED », « FIFA INSPECTED »3 et la désignation « International Matchball Standard » apposés sur les ballons prouvent que le matériel approuvé. Ces caractéristiques techniques font qu’aujourd’hui le ballon est fabriqué « en cuir ou dans une autre matière adéquate », avec une circonférence de 68 à 70 cm, un poids compris entre 410 g et 450 g au début du match et une pression se situant entre 0,6 et 1,1 atmosphère (600 - 1100 g/cm 2). Dans la réalité il n’y a plus un gramme de cuir dans la confection des ballons, plus de lacets, plus de coutures et la forme ronde est de plus en plus parfaite. Pour les pratiquants le ballon doit rebondir, mais pas trop, et les trajectoires doivent être suffisamment prévisibles. Objet indispensable à la pratique, le remplacement d’un ballon défectueux est prévu par la loi. Dans le cas où il éclate ou est endommagé en cours de match, la partie est arrêtée ; le match reprend, avec un nouveau ballon, sous le contrôle de l’arbitre.

2. Principes de cette loi

Dans « la balle à la main » la forme du ballon consomme la rupture entre les « handlers » et les « dribblers » ; il est possible d’attraper un ballon plus ou moins rond, voire vraiment ovale. Mais dans la « balle au pied »4 il est interdit de le porter, et pour les

1 Law II – The ball 2 Stefan Kovacs cité par Astolfo Cagnacci (1998), op. cit., p. 15. 3 Cf. annexe n°36, p. 129. 4 Walh, A. (1990). La balle au pied. Histoire du football. Paris, Gallimard. 50

« dribblers » si le ballon est rond, il est plus facile de le faire avancer droit devant soi et de courir derrière. Nous pouvons retenir que le ballon reste libre pour tous les joueurs à tout moment du jeu. Selon le philosophe Schaffhauser, « Cet objet n'appartient à personne en particulier si ce n'est au jeu lui-même. C'est parce qu'il roule et circule sur l'aire de jeu qu'il prend toute sa valeur »5. Cette liberté est seulement interrompue par les gardiens pendant une période de six secondes au maximum. La balle doit rebondir, une « balle hésitant éternellement entre la chute et l'envol… », pour le poète autrichien Rainer Maria Rilke. Si le terrain est gorgé d’eau, dans un geste théâtral l’arbitre lance le ballon en l’air, et s’il reste plaqué au sol alors le match est reporté. De même si le ballon devient « défectueux »6 ou « quand le ballon éclate ou se dégonfle au cours du jeu »7, la partie doit être interrompue et reprise par une balle à terre avec un nouveau ballon à l'endroit où le premier ballon est devenu défectueux. Le ballon doit également rester visible, et ne pas se confondre avec la couleur blanche de la neige par exemple. Le ballon rouge utilisé au stade Bonal en 1980 8 a laissé la place à des ballons de couleurs spécifiques, fluorescents obligatoirement utilisés sur la neige. Le principe de sécurité est lié à cet objet de toutes les convoitises. Le règlement depuis 1905, le précise « aucun produit qui serait un danger pour les joueurs ne devra être utilisé pour sa confection ».

3. Historique de la loi

La constitution intérieure et extérieure de la balle est un élément essentiel de l’histoire des jeux de balle, si on se réfère à Philippe Villemus 9. Chaque balle possède un nom souvent identique au nom du jeu : la soulette 10 , l’ atoyortok 11 , l’ aqsaqtuk 12 … La construction du

5 Schaffhauser, P. (2008), op. cit., p. 16. 6 Le mot apparait pour la première fois en 1953 dans la proposition faite au Board . 7 Réunion du Board de 1962 : Proposition adoptée par le Board . 8 Le 10 décembre 1980 lors du match retour de la huitième de finale de la coupe de l’UEFA, les Sochaliens reçoivent les Allemands de Francfort. (Match aller victoire 4-2 de Francfort après avoir mené 4-0 !) Le stade Bonal est recouvert d’une neige épaisse, et le ballon du match que Patrick Revelli, le vieux Gaulois, envoie deux fois au fond des filets, était rouge. 9 Villemus, P. (2006), op. cit. 10 La soulette désigne la boule remplie de crin, de foin ou de son, et recouverte de morceaux de cuir ou de drap solidement cousus ensemble, utilisée pour pratiquer la soule. 11 L’ atoyortok : jeu de balle Esquimaux. La sphère de cuir de phoque est remplie de sable. 12 L’ aqsaqtuk :jeu de balle pratiqué par les Inuits depuis 300 ans. Pour ce « football sur glace » la balle est faite d’os de baleine et de peaux de phoque, remplie de cheveux, de mousse et de plumes. 51 ballon, société par société, révèle l’ingéniosité des hommes et l’emploi des matières premières disponibles. Il est possible de repérer une grande variété de matériaux utilisés pour remplir l’intérieur de la sphère : du crin, du foin ou du son, ( soulette ), du sable (l’ atoyortok ), des cheveux, de la mousse et des plumes (l’ aqsaqtuk ), du bambou (le kémari), des graines ou des boyaux de chat (en Egypte). L’enveloppe de la boule est constituée de morceaux de cuir ou de drap solidement cousus ensemble ( soulette ), de cuir de phoque (l’atoyortok), d’os de baleine et de peaux de phoque ( l’aqsaqtuk ), de peau d’antilope (Egypte). La balle peut être uniquement d’une seule matière, par exemple pour le hakosaki la sphère est totalement en bois. Vers 1850, à l’époque des premières rencontres entre clubs ou entre nations, les ballons n’étaient pas vraiment sphériques. La coutume voulait que l’on gonfle une vessie de porc, qu’on l’attache aux deux extrémités et qu’on l’enveloppe de cuir, ce qui lui donnait une forme ovoïdale. Pour la « la balle au pied », ils deviennent de plus en plus ronds à partir de 1860. Le règlement de la Football Association de 1863 ne contenait aucune indication sur le ballon. Les règles édictées à cette époque par J.C. Thring en 1862, par Cambridge en 1863 ou par l’Association de Sheffield en 1870 restent totalement silencieuses sur le sujet. Il faut attendre 1872 pour que les dimensions du ballon soient fixées par la Football Association. Une année essentielle dans l’histoire du Football, marquée par la première finale de la F.A ; Cup 13 . La circonférence moyenne du ballon de l'Association devait être comprise entre 27 pouces (0,.675m.) et 28 pouces (0,700m.). Le poids du ballon est également fixé, la balle devait peser de 12 à 15 onces (340 à 425 grammes.). Les règles concernant le ballon sont présentes pour la première fois dans le compte rendu du Board de 1889, qui prend la décision d’imposer un poids spécifique pour les ballons des matchs internationaux, « au commencement de la partie le poids du ballon devra être entre 13 et 15 once »14 .

4. Transformations de la loi décidées par le Board

La première indication de forme, donnée par le règlement de la Football Association en 1872, concerne la circonférence du ballon. Nous pouvons noter qu’il est question de « circonférence moyenne », ce qui confirme le fait que les balles ne sont pas des sphères

13 La FA Challenge Cup, appelée Coupe d'Angleterre en français, est une compétition à élimination directe anglaise fondée en 1871. La première finale s’est jouée le 16 mars 1872, devant 2.000 spectateurs au Kennington Oval, les Wanderers s'imposent 1-0 face aux Royals Engineers. 14 Mr. Crump and Mr. Gregson proposed that at the commencement of the game the weight of the ball in internationals matches be from 13 to 15 ounces. 52 parfaites. Le Board modifiera en 1993 l’article 1 en supprimant le mot « moyenne » et en employant désormais « la circonférence du ballon ». A la fin du XIX e siècle, Tunmer et Fraysse 15 , nous confirment que « Le ballon dont se sert l’association est rond… ». Cette évolution est certainement liée à la possibilité de fabriquer et de se procurer des ballons de plus en plus ronds. En effet Géo Duhamel 16 a raconté comment il avait découvert à 13 ans le Football Association au : « C’était un jeudi du mois d’avril 1892… Le jeu consistait à poursuivre un ballon ovale. Parfaitement ! Un ballon de rugby, car il avait été impossible de se procurer un ballon rond »17 . L’utilisation du caoutchouc à partir des années 1860 a permis « d’arrondir un peu les angles ». Jusque-là, on utilisait toujours un ballon de fortune, ovale ou rond, de confection et de matériel variés, qui ne favorisait pas le rebond, la précision et la vélocité des passes au pied. Le ballon devient donc de plus en plus rond, une véritable sphère …comme la terre, une boule presque parfaite. Le mot sphérique apparait dans les règlements édités en France dès 1905 18 , mais nous retrouvons seulement trace pour la première fois de cet adjectif dans la réunion du Board de 1938 « Le ballon doit être sphérique... » 19 . Nous pouvons noter que l’expression « ballon rond » est totalement absente des comptes rendus du Board depuis 1886 ! La seconde transformation concerne la taille du ballon et son poids . Dans le Football Florentin 20 , la dimension du ballon rond et gonflé était à peu près la même que pour le handball et le football contemporains. Il est sans doute possible de faire l’hypothèse d’une dimension variable dépendant de la grosseur de la vessie de porc. Ces dimensions sont fixées pour la première fois par la Football Association en 1872, avec une taille entre 27 et 28 pouces et un poids compris entre 13 et 15 onces. Cette fourchette permet une certaine tolérance pour toujours trouver un ballon pour jouer. La taille est invariable depuis 1886. Nous n’avons relevé qu’une seule modification en 1937 21 avec un accroissement du poids du ballon. Celui-ci doit peser entre 14 et 16 onces (396-453g). Certes, les ballons du football d’antan prenaient du poids dans des conditions humides, mais ils étaient plus légers que ceux d’aujourd’hui. Pour certaines catégories, football féminin et football des jeunes, le Board

15 Tunmer, N.G. & Fraysse, E (1897), op. cit., p. 42. 16 Géo Duhamel (1879-1965) archiviste officiel de la FFF. 17 Cité par Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974). La fabuleuse histoire du football. Tome I. Des origines à la Coupe du monde 1966. Paris, O.D.I.L., p. 34. 18 Pontié, E. (1905). Op.cit., p 162-164. 19 Proposition du Pays de Galles adoptée par le Board en 1938. 20 Breedekam, H. (1995) Le Football Florentin. Les jeux et le pouvoir à la Renaissance. Paris, Diderot Editeur, arts et sciences. 21 Proposition de la FA adoptée par le Board . Seule la FIFA a voté contre. 53 autorise à modifier la taille des ballons 22 . Il existe une codification de la taille des ballons en France avec une taille 5 classique en référence au Board . Les ballons taille 3 sont utilisés pour les débutants (Catégories U9 depuis 1999) et ceux de la taille 4 pour les benjamins, 13 ans (U13, U15) et le football féminin . La matière du ballon est abordée pour la première fois en 1905 ; « l’extérieur du ballon » doit être en cuir. En 1910, l’Association du Pays de Galles propose de modifier l’article 1 et d’imposer que « l'enveloppe extérieure du ballon » soit obligatoirement en cuir. Après discussion, cette proposition est retirée au cours de la réunion. Suite à une nouvelle demande du Pays de Galles, 28 ans plus tard, cette modification sémantique sera finalement adoptée. Il sera donc précisé en 1938 23 que l’ « enveloppe extérieure doit être en cuir ». L’expression « toucher le cuir » s’explique donc pas la matière du ballon, même si aujourd’hui il n’y a plus un gramme de cuir dans les ballons. La rupture commence en 1965 24 avec la possibilité de fabriquer des ballons avec une autre matière. Le Board devra décider, au cas par cas, ce qui constitue les matériaux approuvés. Pour la « balle à la main », le ballon doit être rond mais également rebondir. Les seules indications fournies par le Board concernent l’enveloppe extérieure, mais la notion « d’enveloppe » étanche permettant de gonfler le ballon n’est pas abordée. Philippe Villenus a répertorié les différentes techniques utilisées par les Romains pour ce type de ballon : « Pour fabriquer des balles rebondissantes , les Romains utilisaient des vessies de porc ou de bœuf gonflées et recouvertes de la peau de l’animal, soit des intestins et des boyaux de chats hachés en forme de sphère et recouverts de cuir ou de peau, soit des éponges enveloppées dans des tissus ou enrobés de cordes »25 . Une ingéniosité qui s’est transmise jusqu’à la fin du XIX e siècle, car si on se réfère à Tunmer et Fraysse en 1897 « le ballon est rond formé d'une vessie recouverte d'une gaine de cuir »26 . La fabrication du ballon intègre progressivement de nouveaux matériaux liés à l’histoire des innovations techniques. En 1839, l'Américain Charles Goodyear invente la vulcanisation par addition de soufre au caoutchouc. A la fin du XIX e siècle, « le caoutchouc remplaça les vessies »27 . Cette innovation technique participa à l’expansion de la pratique du football par la Football Association, largement devancée par le Football Rugby jusque dans les années 20.

22 Cf. annexe n°21, p. 76 : 1997 : Minutes of the Annual General Meeting, p. 4. 23 Proposition du Pays de Galles adoptée par le Board en 1938 : Loi I : « le ballon doit être sphérique ; l'enveloppe extérieure doit être en cuir … ». 24 Proposition du Pays de Galles en 1964 et en 1965. Adoptée par le Board en 1965 : « Loi 1 : Le ballon doit être sphérique; l'enveloppe extérieure doit être en cuir ou en une autre matière approuvée par le Board ». 25 Villemus, P. (2006), op. cit., p. 41. 26 Tunmer, N.G. & Fraysse,E. (1897), op. cit., p. 76. 27 Villemus, P. (2006), op. cit., p. 80. 54

En 1909, l'Allemand F. Hofman dépose le premier brevet d'un véritable caoutchouc synthétique, facilitant la fabrication des ballons. Pendant toute la première partie du XX e siècle les ballons sont formés « d'une chambre à air et d'une enveloppe de cuir cousu »28 . Une nouvelle révolution technique accompagne la seconde partie du XX e siècle avec un ballon qui ne présente plus aujourd'hui ni ouverture pour la valve, ni couture. Dans un premier temps, à partir des années 1970, le Board approuve lui-même le matériel utilisé dans la fabrication de ballon. Par exemple lors de la réunion de 1970, il donne son accord pour une période provisoire d'un an, en attendant les rapports, pour deux nouveaux ballons : le Huracon (une enveloppe extérieure de cuir, doublée avec du nylon) et le Mitre multiplex (matériel feuilleté composé de caoutchouc synthétique). L’année suivante seul le ballon Mitre multiplex Football est approuvé par le Boar d. En 1972 le Board considère que la fabrication des chaussures et des ballons est devenue très technique, ce qui pose la question de sa compétence pour décider « des matériaux approuvés » pour la loi II et la loi IV. Même si la constitution du ballon est déterminante pour la qualité du jeu, en particulier son rebond, le Board réaffirme en 1972 que les ballons doivent être approuvés sur la base du poids, de la circonférence et de la pression. Il sera d’ailleurs présenté à ses membres lors de la réunion de 1974 un instrument prototype pour contrôler les caractéristiques du ballon (pression, poids, circonférence), et déterminer si le ballon est en accord avec les lois du jeu. Un ballon qui rebondit trop rend est incontrôlable. Pour la première fois en 1967 29 , le Board définit la pression idéale pour la pratique d’un football moins aléatoire. Cette pression devait être égale à la pression atmosphérique (1 atmosphère), au niveau de la mer. En 1975 30 , le Board décida de fixer cette norme entre 0,6 et 0,7 atmosphère. Cette norme ne fut pas respectée notamment avec la pression des ballons utilisés à la Coupe du monde 1982 qui variait de 0,9 à 1,1 atmosphère. Le fait que ces pressions aient donné d’excellents résultats, et sans réclamation de la part de joueurs, amène le Board à autoriser en 1983 31 l’utilisation d’une tolérance beaucoup plus grande avec des pressions comprises entre 0,6 et 1,1 atmosphère au niveau de la mer. Une norme très flexible pour la pratique du même jeu, qui s’explique peut-être par les caractéristiques variables des surfaces de jeu utilisées. En effet la

28 Wahl, A. (1990), op. cit., p. 87. 29 Réunion du Board en1967 : La pression devra être égale à la pression atmosphérique (C’est-à-dire 15 lb. per sq.in = 1kg par / cm 2) au niveau de la mer. 30 Proposition de la FIFA adoptée par le Board en 1975. La pression devra être égale à 0,6 - 0,7 atmosphère, soit 600 - 700 g/cm 2 au niveau de la mer. Proposition de la FIFA adoptée. 31 Réunion du Board de 1983 : Proposition adoptée. La pression devra être égale à 0,6 - 1,1 atmosphère, soit 600 - 1100 g/cm2 au niveau de la mer. 55 qualité et la hauteur du rebond sont vraiment différentes, sur une pelouse ou un stabilisé dur, souple, sec, humide ou trempé. Le ballon du match est demeuré unique pendant plus d’un siècle. Le Board permet seulement de le changer s’il devient défectueux et uniquement à partir de 1953, si l’arbitre donne cette l'autorisation. Il prend d’ailleurs toujours le soin de vérifier le nouveau le ballon, avant la reprise du jeu, car la loi V, précise que l’arbitre doit s’assurer que tout ballon utilisé respecte les recommandations de la loi II. Suite à l’introduction des ballons multiples 32 dans l’optique d’augmenter le temps de jeu effectif, ce ballon n’est plus unique pour les matchs de haut niveau qui sont caractérisés par la présence des ramasseurs de balle. Depuis 1999 33 , tous les ballons choisis sont vérifiés au préalable par les arbitres, ce qui permet de reprendre le jeu avec n’importe lequel d’entre eux.

5. Décisions du Board liées à cette loi

Le Board a étudié le cas du ballon qui éclate ou se dégonfle au cours du jeu. La décision a été prise en 1962, d’interrompre la partie et de reprendre le jeu par une balle à terre avec un nouveau ballon à l'endroit où le premier ballon est devenu défectueux. Lors de la réunion de 1995 34 , la décision d’utiliser uniquement des ballons préalablement testés et approuvés, lors des matchs disputés dans le cadre des compétitions de la FIFA ou de celles placées sous la juridiction des confédérations fut prise. Ces ballons auront obligatoirement subi des tests afin de prouver qu’ils répondent aux exigences techniques minimales définies sous la loi II, et seront munis de l’une des désignations 35 autorisées.

32 « multi-ball system ». 33 Réunion du Board de 1999 : Proposition de la FA Wales adoptée par le Board . Loi V. L’arbitre doit s’assurer que (le ballon respecte)  tout ballon utilisé respecte les recommandations de la loi II. Cette modification est nécessaire suite à l’introduction du « multi-ball system ». 34 Réunion du Board de 1995 : Proposition de la FIFA, amendée par la FA, adoptée par le Board . Nouvelle décision 4. 35 Trois désignations prouvent que le ballon répond aux exigences de conformité techniques minimales exigées par la FIFA : 1/Logo officiel « FIFA APPROVED », 2/ Logo officiel « FIFA INSPECTED », 3/ Référence « International Matchball Standard » (avec autres indications de conformité technique exigées par la FIFA). Cf. annexe n°36, p. 129. 56

6. Expérimentations

En 2005 l'IFAB a décidé d'autoriser en compétition l'expérimentation du ballon prototype (Adidas) contenant une puce électronique et a habilité la FIFA pour le Championnat du Monde U-17 36 au Pérou, du 16 septembre au 2 octobre 2005. La FIFA a supervisé les premiers tests officiels de systèmes technologiques qui pouvaient déterminer si le ballon avait passé entièrement la ligne de but ou non. La précision du système était au centimètre près. L'arbitre et ses trois assesseurs portaient tous un brassard et une montre spéciale. Une info relevée par le capteur et redistribuée en temps réel par les récepteurs faisait vibrer les brassards. Ainsi alerté, ils consultaient alors aussitôt leur montre sur laquelle apparaissait alors en toutes lettres une information du genre « le ballon n'a pas franchi la ligne » et la minute à laquelle l'info était tombée. L’arbitre devait pouvoir prendre sa décision sans affecter « la nature universelle des lois du jeu ». Cette expérimentation n’a pas provoqué de modification de la loi, l’aspect humain du jeu est toujours revendiqué par le Board même si cette expérimentation se poursuit encore en 2011. Ces prolongements sont développés dans le cadre des expérimentations sur le but marqué (Cf. chapitre 10, loi X).

7. Analyse systémique

Le ballon est indispensable pour jouer au football. Le choix du ballon est donc un privilège généralement accordé à l’équipe qui reçoit. Lors de la première finale de Coupe du monde entre -Argentine 37 l’arbitre John Langenus 38 raconte que « chaque équipe avait apporté une balle de fabrication nationale propre et prétendait ne jouer qu’avec une balle de cette espèce 39 ». Personne ne voulait céder, ce qui explique qu’au moment de donner du coup d’envoi, il s’est retrouvé au centre du terrain, portant un ballon sous chaque bras. En définitive, la balle de jeu fut désignée à pile ou face. Le ballon reste l'élément central du jeu. Pour une compétition, l’arbitre (Loi V) est tenu de vérifier le(s) ballon(s) du match avant la partie. Il est posé sur le point central (Loi I : le terrain) avant de débuter la partie par un coup d’envoi (Loi VIII).

36 U.17 = under 17, moins de 17 ans. 37 Première finale de la Coupe du monde à le 30 juillet 1930 : Uruguay-Argentine 4-2. 38 John Langenus : 85 rencontres internationales de 1920 à 1939. Il a arbitré aux Jeux Olypiques d’Amsterdam en 1928, et aussi la finale de la Coupe du monde en Uruguay en 1930. 39 Langenus, J. (1943). En sifflant par le monde. Belgique, Gand, Snoeck-Ducajou et Fils., p. 209. 57

Les dix sept lois du jeu sont en interaction avec le ballon, notamment la loi concernant le ballon en jeu et hors jeu (Loi IX). Un ballon est en jeu tant qu’il reste dans les limites du terrain et tant que l’arbitre n’a pas sifflé. Pour Schaffhauser 40 lorsque l'arbitre siffle et indique un arrêt du jeu, c'est en fait d'un arrêt du ballon dont il est question. Celui-ci est l'expression cardinale du jeu. Un ballon qui roule sur les lignes, cesse d’être en jeu quand il dépasse entièrement les lignes extérieures du terrain. Il sera ensuite remis en jeu par exemple par une touche (loi XV), un coup de pied de coin (loi XVII), un coup de pied de but (loi XVI)... Quand un but est marqué (Loi X), c’est en fait le ballon qui pénètre dans les filets et la remise en jeu se réalise par un engagement (loi VIII : coup d’envoi). Un ballon, considéré comme un véritable trophée, est remis, par tradition en Espagne, au joueur qui a réussi trois buts dans le même match. Si le jeu est stoppé par l’arbitre, le ballon est arrêté, et le match reprend par un balle à terre (loi VIII), un coup franc (loi XII : fautes et incorrections) ou un coup de pied de réparation (loi XIV).

8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Il est possible de comparer les formes, les tailles et les poids du ballon en fonction de chaque sport collectif. Les ballons sont ronds sauf au rugby. Aucun impératif ne codifiait les dimensions et la forme du ballon quand les règles du rugby furent officiellement rédigées en 1871. La vessie de porc, vaguement ovoïde avait naturellement imposé sa forme. En 1892, au moment où apparaissent les premières vessies en caoutchouc, la Rugby 41 Union fixe enfin les caractéristiques du ballon (dimensions et poids) qui resteront les mêmes jusqu'en 1931. Les caractéristiques des ballons conditionnent les actions motrices spécifiques et variées. A contrario il semble complexe de conduire et viser une cible avec un ballon ovale en utilisant les pieds. Il ne serait pas non plus évident pour un joueur de handball de tirer dans une cible défendue par un gardien avec un ballon gros comme celui utilisé au basket. Les évolutions des matériaux semblent toucher simultanément tous les sports collectifs et l’histoire du ballon de football semble pouvoir être transférable dans les autres sports. La première expérimentation d’une l'enveloppe extérieure du ballon uniquement en cuir date de

40 Schaffhauser, P. (2008), op. cit., p. 48. 41 William Gilbert, un cordonnier dont l'échoppe était située en face de la Rugby School fut le premier à fabriquer des ballons. 58

1910, et sera adoptée par le Board en 1938. En 1965 la loi précisera « ou en une autre matière approuvée par l’International Board ». Les matières synthétiques investissent de plus en plus la fabrication des ballons. Les coutures disparaissent et les ballons de plus en plus ronds et de plus en plus « technologisés » voient le jour. Des évolutions aujourd’hui orchestrées dans une optique marketing où les dessins et les couleurs changent à chaque saison.

Synthèse Philippe Villemus 42 a étudié l’origine et les rites du football. Le ballon est souvent associé à des symboles cosmiques : l’univers 43 , le mouvement des constellations 44 , l’astre solaire 45 , la lune, la terre. Par exemple dans le hakozaki 46 , la sphère « femelle » représente la lune, symbole féminin par excellence et le ballon « mâle » le soleil. La référence aux symboles terrestres est aussi présente avec la tête du chef Viking vaincu 47 , « une bête perfide, à demi captive, irritée », pour Henri De Montherlant. La sphère ne fait pas référence uniquement à des symboles concrets. Walter Ummingen 48 écrit : « La sphère, cette forme la plus saisissante de l'harmonie, suggère l'idée de forces magiques qui l'ont créée ou qui résident en elle. Sa forme évoque l'infini et un principe de force latente ...» Un ballon de football, en caoutchouc se joue de la pesanteur, et rebondit, comme soulevé par une force magique. La force, la magie expliquée dans la pensée animiste, où les choses ont également une âme, peut être illustrée par la superstition ou le rituel de certains joueurs. Le gardien de but allemand Sepp Maïer 49 avait la particularité de

42 Villemus, P. (2006). Le Dieu du football. Ses origines - Ses rites - Ses symboles. Eyrolles. 43 Selon Platon, dans le Timée, l'univers tout entier avait la forme d'une sphère. La sphère symbolise la totalité et la perfection. 44 Ummingen, W. (1962) Des hommes et des records, La Table Ronde. « ... Des hommes ont tenté sur le continent américain, de résoudre symboliquement avec les mouvements d'une balle l'un des plus grands mystères qui se posèrent à eux : le mouvement des constellations, l'alternance du jour et de la nuit. Ils inventèrent un jeu de balle qui était dans leur esprit l'équivalent de ce qui se passait dans le ciel, l'équation céleste... » 45 Hanot, G. (1932) « La X e olympiade », l'Illustration. « Le football –le ballon poussé par le pied- est la copie du soleil pour les jeux des hommes. Il est rond, et nous aimons les cercles et les sphères qui nous rappellent l'astre lumineux de notre système planétaire. ….. Le football est une forme de culte solaire ». Hanot, G. (1932) « La X e olympiade », l'Illustration. 46 Villemus, P. (2006), op.cit. Le hakozaki , jeu de balle japonais qui se déroule le 3 janvier, tous les trois ans dans la ville de Fukuoaka, devant le temple shintoïste Hakozaki. …Le jeu de hakosaki est un hommage à la fécondité qui exclut toute idée de sacrifice. 47 A Kingston-on-Thames, en Angleterre, on raconte une histoire tenace. Au XI e siècle, les Saxons vainquirent les Vikings qui venaient de débarquer et allaient envahir le bourg. Le chef Viking eut la tête coupée par les vainqueurs. Les seigneurs saxons, selon la légende, poussèrent sa tête à coups de pieds dans les rues du village, comme un vulgaire ballon de foot. Villemus, P. (2006), op.cit, p. 30. 48 Ummingen, W. (1962), op. cit. 49 Sepp Maier. Gardien de but. International Allemand Champion du monde en 1974, d’Europe en 1972. Joueur du Bayern de Munich, vainqueur de la coupe d’Europe des clubs Champions en 1974, 1975 et 1976. 59 parler au ballon ; au moment où un penalty était accordé à l’équipe adverse, il se saisissait du ballon et murmurait « à son oreille ». Le ballon filait souvent sur le poteau ou terminait sa course à côté des buts, car les grands gardiens provoquent souvent la chance ou la maladresse des adversaires. Cette « folie » était très peu appréciée par les attaquants adverses, souvent très superstitieux. A la fin des années 70, ils l’empêchaient, avec l’aide de l’arbitre, de s’emparer du ballon avant le tir. Le ballon, objet essentiel du jeu de « la balle au pied » est donc lié à des symboles cosmiques et terrestres, mais aussi élément de manifestations de forces magiques. Pour le poète Peter Handke 50 « Comme toute chose ronde, la balle de foot symbolise l'incertitude, la chance et l'avenir ». Il s’agit d’un véritable « objet sacré » pour Vladimir Dimitrijevic 51 . Pour le footballeur, il s’agit surtout d’un ballon à apprivoiser avec l’intelligence des pieds, comme le suggère Henri de Montherlant : « Devant lui sautille la bête perfide, à demi captive, irritée, qu'on mène à coups de caresses rageuses et de l'intérieur du pied, et ses pieds sont intelligents, et ses genoux sont intelligents 52 ».

50 Handke, P. (1982). L'angoisse du gardien de but au moment du penalty. Paris, Gallimard. 51 Dimitrijevic, V. (2006). La vie est un ballon rond. Paris, La table ronde, p.19 : « Quand j'ai touché pour la première fois -j'avais douze ans -un vrai ballon de football, j'étais en présence d'un objet sacré ». 52 De Montherlant. H. (1954), op. cit., p. 183. 60

Chapitre 3 Loi III : le nombre de joueurs 1 ______

Le nombre onze est « le signe de l'excès, de la démesure, du débordement, dans quelque ordre que ce soit, incontinence, violence, outrance de jugement ; ce nombre annonce un conflit virtuel ». Jean Chevalier 2

1. Loi actuelle

Aujourd’hui les équipes sont composées de 11 joueurs dont un indispensable gardien de but. Il peut échanger sa place avec n’importe lequel des autres joueurs. Une équipe peut utiliser au maximum pour un match de compétition, trois joueurs remplaçants au cours de la partie. Un joueur remplacé n’a plus la possibilité de revenir sur le terrain 3. Les noms des remplaçants doivent être inscrits sur la feuille de match et communiqués à l’arbitre avant le début de la rencontre. Le nombre minimum de joueurs présents pour commencer ou continuer le match est laissé à l'appréciation des associations nationales 4.

2. Principes de cette loi

D'abord, comme dans tous les sports collectifs, la partie oppose deux équipes constituées du même nombre de joueurs, pour respecter au départ du match l’égalité des chances. Le football se joue à 11. Cette règle fut seulement précisée par le Board dans l’article premier seulement en 1897 5 : «Le jeu devra être joué par onze joueurs dans chaque camp ». L'égalité est désirée par les joueurs sinon « cela ne vaut pas ». Gagner contre une équipe qui est en infériorité numérique, n’a pas la même valeur. En 1875, dans la finale de la Cup 6 un joueur de Old Etonians fut blessé, le capitaine de l’équipe de Royal University, Marindin 7, quitta volontairement sa place pour rétablir l’équilibre des forces. Ces joueurs

1 Law III – the nomber of players . 2 Chevalier, J. & Gheerbrant, A. (1982). Dictionnaire des symboles. Paris, Laffont, p. 704. 3 Réunion du Board de 1967 : Décision 5 : Un joueur qui a été remplacé ne peut plus prendre part au jeu. 4 La reunion du Board de 1971 a confirmé cette décision : « The minimum number of players in a team is left to the discretion on National Associations ». 5 AGM of 1897, p. 2. Law1 – added to law : « The game should be played by 11 players on each side ». 6 Finale de la Cup de 1875 : Royal University Old Etonians 1-1 au premier match et ensuite 2-0. 7 Francis Marindin (Colonel Sir Francis Arthur Marindin) devint arbitre notamment de la finale de Cup en 1884. 61 amateurs avaient une idée élevée du fair-play , et pour eux l’équilibre des chances supposait en premier lieu un nombre identique de joueurs. « Dans un match, je ne puis admettre l’infériorité numérique de l’une des deux équipes en présence ».8 Cette affirmation de Raymond Kopa en 1965, laisse penser que cette idée persiste dans le monde professionnel. A cette époque, les remplaçants ne sont toujours pas autorisés, comme lors de la demi-finale de la Coupe du monde en Suède en 1958 à laquelle il participait. Les Français s’inclinèrent cinq à deux, devant les Brésiliens, avec un Robert Jonquet diminué, qui termina la partie malgré une fracture du péroné ! En fait, l’équilibre des chances est directement en corrélation avec le nombre de joueurs si les niveaux sont équivalents. Le Bayern de Munich organise dans ses matchs de préparation une rencontre face à une équipe de 3 ou 4 divisions inférieures. Ils jouent à huit joueurs contre onze pour rétablir l’équilibre des chances, mais aussi pour solliciter davantage le processus énergétique et gérer des situations en infériorité numérique. Ensuite, l’arbitre est tenu de contrôler le nombre de joueurs présents sur le terrain. Pour ce faire il compte réellement les joueurs avant le coup d’envoi, mais il est possible de jouer et de commencer le match avec moins de onze joueurs. L’arbitre doit également à tout moment du match avoir une comptabilité précise de ce nombre. Si un joueur entre en jeu après le commencement de la partie, il doit d'abord se présenter à l'arbitre 9. De même, il n’est plus envisageable depuis 1939 10 de quitter le terrain sans le consentement de l'arbitre. Pour l’en dissuader, le joueur est sanctionné d’un avertissement s’il quitte ou pénètre sur l’aire de jeu sans l’autorisation de l’arbitre 11 . Enfin, un seul rôle est spécifié, celui de gardien de but. Le goal-keeper peut être changé pendant la partie 12 , si le remplacement a lieu pendant un arrêt de jeu, et à condition d’en informer au préalable l’arbitre 13 . Il est le seul joueur à pouvoir utiliser ses mains dans sa propre surface de réparation. L’altérité du gardien est aussi mise en évidence par la loi IV relative aux équipements ; il lui est imposé de porter un maillot de couleur différente.

8 1965 Football Magazine. Football à 11 à 12 ou à 13 ? Numéro 70, novembre 1965, p. 33. 9 Réunion du Board de 1920. 10 Réunion du Board de 1939 : Proposition FA adoptée. Loi III : nombre de joueurs : Tout joueur qui quittera le terrain durant le déroulement du jeu (excepté pour cause d'accident) sans le consentement de l'arbitre sera coupable de conduite inconvenante. 11 Si un remplaçant pénètre sur le terrain de jeu sans autorisation de l’arbitre : le jeu est arrêté, le remplaçant concerné est averti (carton jaune) et doit quitter le terrain de jeu, le jeu reprend par une balle à terre à l’endroit où le ballon se trouvait au moment de l’interruption du jeu. 12 Réunion du Board de 1890 : Le gardien de but ( goal-keeper ) peut être changé pendant la partie, mais pas plus d'un joueur dans le même temps ne doit jouer au poste de gardien, et un second joueur ne peut intervenir et jouer durant la période pendant laquelle le gardien régulier peut avoir quitté son poste. 13 AGM of 1901: The following alteration were also proposed by Mr. Crump and adopted unanimously ; Law 8 read : « … The goal-keaper may be changed during the game, but notice of such change must first be given to the Referee ». 62

3. Historique de la loi

Dans la pratique les capitaines convenaient de la durée du jeu et du nombre des joueurs. Cette variabilité s’explique par le fait qu’il existait des équipes de collège, d'entreprise, de village qui se lançaient des défis. La plus grande tolérance régnait au sujet des effectifs, qui étaient fonction du nombre de joueurs disponibles. Ces marges de flexibilité caractérisent les premiers règlements, et le passage du jeu au sport (During, 1984). Le nombre de joueurs est variable ; les tables de la loi de 1863 et les règles de la Sheffield Association n’y font aucune allusion. Ce n’est qu’à partir de 1871, que la Football Association décida que pour la « Cup »14 , « les équipes devaient être limitées à 11 joueurs de chaque côté ». Cette coupe est considérée comme l’une des plus anciennes compétitions15 de Football, avec des matchs hors des cercles de proximité. Ce chiffre fut confirmé en 1877. Les clubs de Londres, rencontrant fréquemment ceux de la région de Sheffield, les deux associations mirent au point un code uniforme 16 prévoyant notamment qu'une équipe se composerait de onze joueurs. Ce nombre de onze joueurs questionne toujours les historiens du football et nous avons rencontré au cours de cette recherche deux hypothèses. D’abord, celle envisagée par Gaby Robert 17 concerne le nombre d’élèves dans la classe, environ 22 à 24 à l’époque, qui permet de constituer deux équipes de onze ou douze joueurs. Il ne nous est pas possible pour le moment de valider cette hypothèse même si les premiers clubs de football étaient scolaires. Ensuite Henri Bard, et le Docteur Henri Diffre 18 tentent de démontrer en 1927 que « l'adoption de ce chiffre n'a certes pas été dictée par le hasard ». Ce chiffre, relève pour les auteurs d’une organisation collective reposant sur des bases scientifiques. Cette analyse fait référence à l’organisation pyramidale 19 de l’équipe, avec 2 arrières, 3 demis et 5 avants. Il s’agit du système dominant de l’époque, mais au regard de l’histoire des systèmes de jeu, ces propos sont surprenants car d’autres systèmes existaient avant celui là. Par exemple, des systèmes très offensifs avec seulement 1 ou 2 arrières et 8 ou 9 attaquants… donc des formations qui ne reposent pas sur des bases scientifiques. Il est difficile de se référer aux

14 La « Cup »: Challenge Cup , la coupe d’Angleterre. 15 Cf. annexe n°71, p. 177. 16 Cf. annexe n°68, p. 172: The law of the game of 1878. 17 Gaby Robert (1920-2003). Educateur, il a entraîné l'équipe de France amateur et a été membre de la Direction Technique Nationale à la FFF. 18 Bard, H. & Diffre, H. (1927) Le Football Association. Paris, librairie Octave Doin, pp. 3-4. 19 Système pyramidal 2.3.5 (2 arrières, 3 demis et 5 attaquants). Ce système est dominant jusqu’en 1925. Cf. annexe n°75, p. 181. 63 systèmes de jeu pour expliquer la présence de vingt deux joueurs sur le terrain. L’histoire des lois du jeu ne fait jamais allusion à la disposition des joueurs sur le champ de jeu et ne distingue pas des avants, des demis ou des arrières, seul le rôle du gardien de but est spécifié. Le chiffre de onze joueurs, véritable nombre d’or pour le football, demeure une énigme, ce nombre onze est symbole de dualité et d'opposition, car la somme des deux chiffres qui le compose donne deux. Cet aspect conflictuel est confirmé par Chevalier et Gheerbrant 20 , ce chiffre est aussi associé à la violence, à la rébellion et à la transgression. Le nombre de joueurs est donc fixé entre 1871 et 1877, ce chiffre constitue une permanence des lois du jeu.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

«Une équipe doit subir les circonstances extérieures en bien ou en mal comme le soleil, la pluie, le vent…Je reste fidèle à la fameuse comparaison avec l’équipage d'un navire : cet équipage ne change pas durant la traversée. Et puis quand une collectivité parvient à surmonter un certain nombre de difficultés, elle fait preuve d'une incontestable valeur morale extrêmement éducative. Prouver que l'on n’est pas battu à dix, c'est quelque chose qui peut être donné en exemple dans tous les domaines, à n'importe qui. » Georges Boulogne 21

A l’origine, le remplacement de joueurs n'était pas autorisé ; l’image de l’équipage de Georges Boulogne est en adéquation avec cette logique. Sur un bateau il n’est pas possible de rajouter des marins en pleine mer et la perte des hommes n’est jamais compensée. La première transformation concerne la possibilité d’utiliser des remplaçants dans le cas d’un joueur blessé. Cette permission est limitée d’abord aux matchs amicaux. Le remplaçant fait son apparition officielle dans les lois du jeu en 1923 22 . Il suppose l’accord préalable des deux équipes. A partir de 1934, dans les matchs amicaux et en cas de blessure, il est possible de faire entrer un nouveau joueur avant la 40 ème minute. Cette autorisation de remplacer des joueurs blessés, peut être considérée comme une expérimentation. Elle concerne uniquement les matchs amicaux avec l’obligation d’obtenir une autorisation de la FIFA. Cette possibilité relève du problème d’équité. En effet dans le cas d’un joueur blessé volontairement par un adversaire, l’équilibre des chances est perturbé. Le témoignage de

20 Chevalier, J. & Gheerbrant, A. (1982), op. cit., pp. 704-705. 21 Boulogne, G. (1965) Football Magazine, 70, p. 33. 22 Réunion du Board de 1923 . Suivant l'accord fait avant le commencement du match (mais non pour un match joué sous les règlements d'une compétition) des remplaçants pourront être autorisés à prendre la place des joueurs blessés. 64 l'Argentin Francisco Varallo, dernier acteur vivant de la finale de la Coupe du monde de 1930 entre l'Uruguay et l'Argentine va dans ce sens. « On a eu deux blessés et on a terminé le match à neuf, puisque, à cette époque, il n'y avait pas de remplaçants. Moi aussi, ils m'ont blessé, mais je suis resté sur le terrain, on ne pouvait quand même pas terminer le match à huit. On a finalement perdu par quatre buts à deux. C'est le souvenir le plus triste de ma carrière, car on était vraiment les meilleurs »23 . Pour ce finaliste, il n’est pas logique que ce ne soit pas la compétence technique ou tactique qui ait fait basculer le match, et il regrette toujours, 76 ans plus tard, que les meilleurs aient en définitive perdu la partie. L’idée du remplacement semble faire son chemin, dans l’optique d’assurer l’égalité des chances des opposants, mais le Board considère que le remplacement laisse la porte ouverte aux tricheries. Par exemple lors du match Autriche-Brésil en 1956 24 , un joueur non blessé se fait remplacer pour revenir ensuite sur le terrain. Cet exemple, prouve que le remplacement des joueurs non blessés, reste contraire à l’esprit initial du jeu et soulève le problème du joueur remplacé qui participe de nouveau à la partie… Ce point de règlement sera définitivement fixé par le Board, en 1980, qui décida qu’un « joueur remplacé ne peut plus prendre part au jeu »25 . Ces entorses confortent le Board à ne rien céder pour les matchs de compétitions. À l'époque « les Britanniques envisagent des remplacements avec réticence alors même que les blessures ont gâché leur propre finale de Coupe en 1952,1953 et 1955 »26 . Les fédérations sportives vont tenter de faire fléchir le Board en utilisant trois méthodes différentes. Les propositions des fédérations constituent une première voie législative. Dès 1924, au congrès de Paris, l'Association de Football Soccer des Etats-Unis 27 demande à la FIFA de recommander au Board d’autoriser les deux équipes à retirer un ou deux joueurs et à les remplacer au cours des 75 premières minutes du match. Le congrès ne s'est pas laissé convaincre… »28 . Dans la même logique, en 1938 les quatre fédérations scandinaves

23 Cité par France Football du 3 février 2006, numéro 3121 Francisco Varallo racontait sa finale pour ce magazine. 24 Eisenberg, C., & Co. (2004), op. cit., p. 128: « Lors du match Autriche contre Brésil, disputé en avril 1956, l'on s'entend pour remplacer le gardien de but et un autre joueur en cas de blessure durant la première mi- temps. Et ces remplacements ont lieu. Mais une certaine confusion en a résulté : au cours de la première mi- temps, Sabetzer (Autriche), qui n'était pas blessé, est remplacé par Buzek. Les spectateurs protestent car Sabetzer jouait bien. Plus tard, Hanappi, qui n'était pas blessé non plus, quitte le terrain de sa propre initiative pour se faire remplacer par Sabetzer pourtant sorti une première fois ». 25 A.G.M. of 1980. Amendment submitted fy the football Association : Law III (5 d) : « A player who has been replaced shall not take any futher part in the game ». 26 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 129. 27 USSFA : United States Soccer Football Association. 28 Eisenberg, C., & Co. (2004), op.cit., p. 127. 65 demandent la permission de remplacer les joueurs blessés au cours des compétitions les opposants. Mais le comité des arbitres de la FIFA refusera cette proposition. Une seconde voie apparaît en 1938, totalement hors la loi, avec de nombreuses fédérations qui font des entorses à la règle du non remplacement en compétition. Une pression est exercée sur le Board , directement sur le terrain, à l’initiative du Luxembourg en 1938 29 . En violation des règlements de la Coupe du monde un remplaçant rentre en deuxième mi- temps. Dès 1945, dans sa Coupe nationale, l’USSFA, utilise des joueurs remplaçants. En réaction, la FIFA lui demande de modifier son règlement et la menace d’éviction dans le cas contraire. Puis la FIFA, va proposer une troisième voie, que nous pouvons qualifier de consultative. D’abord, en 1955 un questionnaire envoyé à toutes les fédérations sur le problème des remplacements n'obtient que 50 % de réponses. Puis en 1957 le comité exécutif de la FIFA envoie un second questionnaire aux fédérations nationales : « elle obtient 70 % de réponses indiquant clairement que quelque chose doit être changé. Mais la modification sera timide »30 . En effet les décisions du Board, en 1958 31 ne concerneront que les changements des joueurs blessés, d’une part le gardien à n'importe quel moment du match et d’autre part un joueur uniquement au cours de la 1 ère mi-temps. Le règlement interdit donc aux joueurs de se blesser en seconde mi-temps. Pourtant le remplacement de joueurs est pour la première fois autorisé en compétition. Le processus de transformation est enclenché et progressivement le Board semble céder du terrain sur la possibilité des remplacements. Toutefois, il faut bien garder à l’esprit que cette possibilité est laissée à l’initiative des organisateurs de la compétition. Par exemple lors la Coupe du monde de 1966, les remplacements des joueurs blessés ne sont toujours pas autorisés, et la France se fait éliminer par l’Angleterre en terminant à neuf joueurs 32 . L’autorisation d’utiliser deux remplaçants ne sera admise qu’en 1968 par la FIFA notamment

29 Match de qualification pour la Coupe du monde de 1934, le 15 avril 1934 au Luxembourg. (Luxembourg – France : match 133, score 1-6) Entrée de Kremer Eugène à la 46 ème minute, qui aurait entraîné la disqualification du Luxembourg en cas de victoire. Cazal, J-M., Cazal, P. & Oreggia, M. (1998), op. cit., p. 88. 30 Eisenberg, C.‘ & Co.. (2004), op. cit., pp. 128-129. 31 Réunion du Board de 1958 : Proposition Écosse adoptée. « Des remplaçants pour joueurs blessés pendant le match joué suivant le Règlement d'une compétition officielle et qui n’ont pas la possibilité de poursuivre le match seront seulement autorisés si l’approbation de l’association nationale ou des associations internationales intéressées a été obtenue ». 32 Lors de la Coupe du monde 1966 en Angleterre, la France rencontre au premier tour le Mexique (1-1), l’Uruguay (1-2) et se voit dans l'obligation de battre l'Angleterre le 20 juillet chez elle pour poursuivre la compétition. Norbert Stiles se distingue et blesse le Stéphanois Robert Herbin, en première mi-temps, et le Nantais Jacques Simon en seconde mi-temps. Virtuellement à neuf sur le terrain, les tricolores terminent péniblement la rencontre et s'inclinent sur le score de un but à zéro. Cazal, J-M., Cazal, P. & Oreggia, M. (1998), op. cit., p. 201. 66 pour les matchs de qualification de la coupe du monde de 1970. Le premier remplacement officiel en Coupe du monde se déroula le 31 mai 1970, lors du match Mexique-URSS 33 . La modification de 1958 interdit encore le coaching concernant les remplacements et rien ne change jusqu’en 1965, où le règlement précise que les équipes doivent se mettre d’accord avant le match sur la possibilité ou non de remplacer des joueurs blessés 34 . Le débat pour l’autorisation des remplaçants dans les matchs de compétitions se poursuit. Deux courants semblent s’opposer jusqu’en 1965, une tendance très conservatrice et une autre favorable aux changements de joueurs. La FIFA décide de relancer le débat en adressant le 6 juillet 1965 un questionnaire à chacune des 126 fédérations sur l’autorisation du remplacement 35 . L’objectif était d’établir, un véritable état des lieux. Sur les 80 réponses obtenues, 50 fédérations permettaient le remplacement des joueurs blessés ou non dans les matchs de compétition. Ce fut une surprise car le Board l’interdisait. 25 fédérations souhaitaient au minimum le remplacement du gardien de but et de deux joueurs, et 6 optaient pour le remplacement illimité. Seule la Fédération Australienne s’est prononcée contre tout remplacement. Cette enquête montre qu’à cette époque, trois idées dominent. D’abord seul le gardien de but peut être remplacé. C'est le système employé en Amérique du Sud, en Argentine notamment, mais aussi en Italie. Ensuite, le gardien et un joueur de champ -ce dernier jusqu'à la mi-temps seulement- peuvent être remplacés. C'est la convention généralement appliquée lors des matchs amicaux, c'est aussi le système adopté officiellement par la Suisse en championnat. Enfin, les Anglais viennent d'innover en se mettant « hors la loi » en contradiction avec le Board et ont institué au début de la saison 1965-1966, le 12 e homme dont le nom figure sur la feuille de match. Il porte effectivement le numéro 12, peut entrer à tout moment et à n'importe quelle place en remplacement d'un joueur blessé. Les Anglais ne respectent donc pas à la lettre, les lois du jeu édictées par le Board, dont l’influence véritable peut onc être questionnée.

33 Coupe du monde 1970. Mexique – URSS du 31 mai 1970. 46 ème minute Anatoli Puzach remplace Viktor Serebryanikov. 34 Circulaire du Board en 1965 Loi III Alinéa 2 : « le remplacement des joueurs blessés pendant une partie jouée sous les règlements d’une compétition et qui sont incapables de continuer à jouer, est seulement permis si le consentement est obtenu de l'association nationale ou des associations nationales concernées ». Alinéa 3 : concerne les matchs amicaux nationaux ou internationaux. « Des remplacements pour les joueurs blessés peuvent être autorisés dans d'autres matchs sous réserve que cet arrangement ait été accepté par les deux équipes avant le match ». 35 Permettez-vous le remplacement des joueurs au cours du match ? Si oui, dans quelle compétition ? Dans quelles conditions ? Avec quel résultat ? 67

Le débat est relancé en France. Le magazine France Football en novembre 1965 36 , consacre un dossier en demandant l’avis des acteurs du Football. Il est possible de distinguer deux tendances. G Boulogne 37 , Pierre Delaunay 38 , Jean Prouff 39 , et Angelo Grizzetti 40 sont résolument contre ; pour eux utiliser des remplaçants finirait par détruire l’esprit du Football et ouvrirait la porte aux tricheries. Par contre les joueurs Raymond Kopa, Robert Jonquet et Just Fontaine qui ont tous les trois participé à la Coupe du monde en Suède, sont plutôt favorables aux remplacements des joueurs blessés. Mais c’est bien la peur de la tricherie qui rassemble tous ces acteurs. La judicieuse proposition de Just Fontaine, « le joueur remplacé ne participera pas aux deux matchs officiels suivants » va dans ce sens. La seconde transformation concerne la possibilité d’utiliser des remplacements tactiques Il faudra attendre 1967 41 pour les matchs amicaux et, 1972 42 en compétitions officielles pour que le Board donne son autorisation et décide que deux remplaçants pourraient être utilisés à n'importe quel moment du match et pour n'importe quelle raison, dans toutes les compétitions. Cette règle ne sera pas appliquée par toutes les Fédérations, par exemple « En France, cependant les compétitions n'autorisent qu'un remplacement pour des raisons essentiellement d'économie »43 . Les années 70 officialisent donc le passage de l’équipage à l’équipe . Sans doute l’acceptation des remplacements éloigne le jeu de l’esprit initial, mais aujourd’hui, cette dimension est acceptée par tous, et personne ne parle de tricherie à ce sujet, seulement d’un coaching plus ou moins réussi.

36 Football Magazine. (1965). Football à 11 à 12 ou à 13 ? , 70, pp. 32-37. 37 Boulogne, G. (1965) Football Magazine , 70, p. 33 : « Je me déclare contre le remplaçant. Je me laisserai, à la rigueur, tenté par le remplacement de gardien, en raison de sa fonction spéciale, mais ma tolérance s'arrêtera là ». 38 Pierre Delaunay, secrétaire général de la F.F.F. : « Je me déclare contre le remplacement des joueurs au cours du match. … Je crois qu’il faut être rigoureux. Sinon on finira par détruire l’esprit du football ». 39 Jean Prouff, entraîneur du Stade rennais : « Je suis résolument contre et demeure fidèle au vieux principe de l’équipage. Ce n’est pas parce qu’un co-pilote est défaillant que l’avion tombe ». 40 Angelo Grizzetti, entraîneur d’Angoulême : « Je dis non au remplacement. C’est la porte ouverte à toutes les tricheries ». 41 Réunion du Board de 1967 : Décision 2 : Des remplaçants, un maximum de 2 par équipes seront permis pour un match amical si l’approbation de l’Association nationale ou des associations internationales a été obtenue, dans un match joué sous les Règles d’une compétition officielle. L’arbitre doit être informé des noms des remplaçants avant le début du match. 42 Réunion du Board de 1972, Amendement Écosse adopté: Décision 2. Des remplaçants peuvent être utilisés dans n'importe quel match joué suivant le Règlement d'une compétition officielle, à la condition que les dispositions suivantes soient observées : a) l'autorisation de la ou des associations internationales ou nationales intéressées doit être obtenue ; b) le Règlement de la compétition doit spécifier le nombre de remplaçants éventuels qui peuvent être utilisés, en tenant compte de la restriction mentionnée au paragr. c) ci-après ; c) une équipe ne doit pas être autorisée à utiliser plus de deux remplaçants par match. 43 Ferran, J. (1975). Football Magazine . Le Football et ses lois, 184, pp. 25-32. 68

5. Décisions du Board liées à cette loi

Selon la célèbre formule de Gary Lineker 44 « Le football se joue toujours à 11 contre 11 et à la fin ce sont toujours les Allemands qui gagnent». La réalité est plus complexe, le nombre de onze joueurs est une limite à ne pas dépasser. Le Board signale, dès 1923 45 , qu’il n’est pas possible de se mettre d’accord et de jouer avec plus de onze joueurs. Les circulaires 46 de la FIFA envisagent également toute une série de mesure, dans le cas où une équipe se retrouverait avec douze joueurs sur le terrain. Par exemple un but marqué en faveur de l’équipe régulière, sera validé en application du principe de l’avantage, en revanche un but pour l’équipe excédentaire sera refusé. Dans tous les cas l’arbitre refoulera le joueur excédentaire avec un avertissement et adressera aussi un avertissement au capitaine de l’équipe. Le nombre maximum de joueurs pour une équipe sur le terrain est donc de onze. En 1956, le Board décide que le nombre de joueurs présents sur le terrain ne doit pas être inférieur à sept 47 . Mais depuis 1971, ce nombre est laissé à l'appréciation des associations nationales 48 . Il n’existe pas de nombre minimum de joueurs présents pour commencer ou continuer le match, même si le Board est d'avis qu'un match ne peut être considéré comme régulier s'il y a moins de sept joueurs dans l'une des deux équipes 49 . La Fédération espagnole a choisi un minimum de sept joueurs contrairement à la majorité des autres fédérations 50 qui imposent au moins huit joueurs. Le règlement de la compétition peut également prévoir une telle disposition. Si jouant à huit, un nouveau joueur est expulsé, ou se blesse et quitte le terrain, le match est arrêté par l’arbitre. L’équipe en infériorité numérique perd automatiquement le match. Il est donc possible de jouer en infériorité numérique à 11 contre 8, ou 11 contre 7 en Espagne. L’arbitre n’est pas tenu d’attendre l’arrivée de tous les joueurs. En ligue des champions, en février 2009 51 , contre l’AS Rome l’équipe d’Arsenal a recommencé la seconde mi-temps à 9, William Gallas et Kolo Touré étaient encore dans le vestiaire ! Plus surprenant,

44 Gary Lineker, joueur international anglais des années 1980. 45 AGM of 1923, the proposal by the Football Association was adopted : « The game shall be played by not more than 11 players on each side ». 46 Circulaire 3.05 de juillet 1985, modifiée en juillet 1986. 47 Résolution adoptée par l’Internationale Board en 1956, proposée par la FA et suggérée par la Commission des arbitres de la FIFA le 23 mars 1949. 48 Réunion du Board de 1971 : Loi III Décision 1. 49 Réunion du Board de 1971 : Loi III Décision 2. 50 La Fédération Française de Football (FFF) impose un nombre de 8 joueurs minimum. Sinon le match est perdu par pénalité. 51 Mardi 26 février 2006. Arsenal-AS Rome : 1-0. Londres, Emirates Stadium. William Gallas finissait de se faire soigner dans le vestiaire et Kolo Touré l’attendait… par superstition il sort toujours le dernier ! 69 le philosophe Schaffhauser (2008) parle d’une rencontre incroyable en 1973 entre le Chili et l’URSS dans laquelle l’arbitre donne le coup d’envoi d’un match à onze contre zéro : « Seule présente sur le terrain, l'équipe chilienne engagea le coup d'envoi pour pousser immédiatement le ballon dans le but adverse, vide, et l'arbitre de siffler aussitôt la fin de cette insolite partie »52 . Les décisions suivantes concernent le nombre de remplaçants . Depuis 1972, les lois du jeu permettent l’utilisation de deux remplaçants dans n'importe quel match joué suivant le règlement d'une compétition officielle. Cette possibilité n’est pas une obligation, par exemple en 1975, en championnat de France le remplaçant est unique. La France n’utilisait donc pas pleinement les possibilités que lui donnaient les lois du jeu, cependant la question du troisième remplacement est déjà posée par Jacques Ferran. Ce problème est pour la première fois abordé par le Board en 1988 53, puis une seconde fois en 1993 54 avec la possibilité d’utiliser un troisième remplaçant, uniquement en cas de blessure du gardien de but. La mesure sera adoptée en 1994 55 dans un premier temps, avec « la règle du 2 +1 », qui permettait l’entrée d’un troisième remplaçant, à condition qu’il soit désigné uniquement en qualité de gardien remplaçant. Le processus se poursuit en 1995 56 avec la possibilité d’utiliser un nombre de trois remplaçants sans restriction, au cours de tout match disputé en compétition officielle. Les dernières décisions permettent de choisir les remplaçants parmi un certain nombre de joueurs. La possibilité d’inscrire plus de remplaçants que le nombre de remplacements autorisés apparaît en 1967 57 pour les matchs amicaux, et en 1972 58 pour les matchs de

52 Schaffhauser, P. (2008), op. cit., p. 11 : La sélection nationale soviétique était absente sur la pelouse du stade national de Santiago en signe de protestation contre le coup d'État militaire d'Augusto Pinochet. 53 Réunion du Board de 1988 : Proposition de la FIFA non adoptée : c) une équipe ne doit pas être autorisée à utiliser plus de trois remplaçants (l’un d’eux doit être le gardien) par match. 54 Réunion du Board de 1993 : Items of discussion : il est évoqué la possibilité d’introduire en 1994, l’autorisation d’utiliser 3 remplaçants avec la restriction de ne pouvoir seulement utiliser le 3ème si le gardien est blessé. Editorial Commitee. 55 Réunion du Board de 1994 : Proposition FIFA adoptée d) Au-delà de la limitation imposée en (c) une équipe peut également utiliser un troisième remplaçant à condition qu'il soit désigné comme gardien remplaçant, et jouer en remplacement du gardien. Si toutefois le gardien est exclu, son remplaçant désigné peut remplacer un autre joueur de la même équipe et jouer au poste de gardien. 56 Réunion du Board de 1995 : Proposition de la FIFA amendée par la Scottish FA Décision 2 : Il est possible d’avoir recours à trois remplaçants au maximum au cours de tout match disputé dans le cadre d’une compétition officielle placée sous la juridiction de la FIFA, des confédérations ou des associations nationales. 57 Réunion du Board de 1967 : Décision 3. Des remplaçants peuvent être utilisés dans n'importe quel autre match, pour autant que les deux équipes intéressées s'entendent au sujet d'un nombre maximal qui ne doit pas dépasser 5 et que l'arbitre soit informé des conditions d'un tel accord avant le match. Si l'arbitre n'en est pas avisé, ou si les équipes n'arrivent pas à s'entendre on n'autorisera pas plus de deux remplaçants. 58 Réunion du Board de 1972 : Proposition FIFA et amendement Écosse adopté. Décision 3.03. : Dans le cas d'une compétition, il peut être spécifié que l'arbitre doit être informé, avant le début du match, des noms de cinq joueurs au maximum parmi lesquels des remplaçants éventuels pourront être nommés. 70 compétition avec un nombre maximum de 5 noms. Depuis la réunion du Board de 1991 59 , les remplaçants peuvent être choisis parmi la liste entière de joueurs autorisés à jouer la compétition. A partir de 1996 60 , trois remplacements sont possibles sur une liste donnée avant le match de trois à sept joueurs en fonction des règles de la compétition. En 2010, lors de la Coupe du monde en Afrique du Sud, chaque sélection comprend 23 joueurs. Tous les joueurs peuvent figurer sur la feuille de match, en tant que titulaire ou remplaçant, ce qui permet à l’entraîneur de faire des choix tactiques sur l’ensemble des joueurs en fonction des circonstances du match. Mais dans de nombreuses compétitions le nombre de remplaçants inscrits est limité à cinq, et même à trois comme dans les compétitions amateurs en France.

6. Sanctions liées à cette loi

Un joueur expulsé après le début du jeu ne peut être remplacé. L’équipe termine donc en infériorité numérique. Si la compétition prévoit un nombre minimum de huit joueurs présents sur le terrain, et que quatre joueurs de la même équipe sont expulsés alors l’arbitre arrête le match. Le règlement envisage également le cas du joueur expulsé avant le début du match. Il peut être remplacé par un autre joueur 61 . Depuis 1967 62 , un joueur expulsé avant le début du jeu ne peut être remplacé que par l'un des remplaçants inscrits. L’équipe ne bénéficiait donc plus que d’un seul remplacement jusqu’en 1993 et de deux depuis 1995.. Dans le même ordre d’idée, à partir de 197263 , un remplaçant inscrit qui a été expulsé soit avant, soit après le début du match ne peut être remplacé sur la feuille de match.

7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

59 Réunion du Board de 1991. 60 Réunion du Board de 1996 : Proposition de la FIFA, amendement FA Wales adopté :Le Règlement de la compétition doit préciser le nombre de remplaçants qu’il est possible de désigner, de trois à un maximum de sept. 61 Universel Guide des Arbitres en 1962 : Décision transférée de la loi 5 à la loi 3 (nombre de joueurs) : Si un joueur est expulsé avant le début du jeu, il peut être remplacé par un autre joueur, mais le coup d'envoi ne doit pas être retardé. 62 Réunion du Board de 1967 : Décision 4 : Un joueur expulsé avant le début du jeu ne peut être remplacé que par l'un des remplaçants inscrits. Le coup d'envoi ne doit pas être retardé pour permettre au remplaçant de rejoindre son équipe. 63 Réunion du Board de 1972 : Cette décision ne concerne que les joueurs expulsés en application de la Loi XII. Elle ne s'applique pas aux joueurs qui ont contrevenu à la Loi IV, sur les équipements. 71

La première transformation concerne le remplacement des joueurs blessés pour les matchs de compétition. La proposition de remplacer les joueurs blessés a été adoptée en 1923 pour les matchs amicaux. L’extension de cette mesure aux matchs amicaux internationaux est refusée en 1930 64 . En ce qui concerne les matchs de compétitions 65 , la première proposition rejetée date de 1932 66 . Celle de 1947 est beaucoup plus précise, pour la première fois est mentionné le nombre maximum de 2 remplaçants possible avant les 40 dernières minutes du match. A partir de 1948, les propositions concernent d’une part le gardien de but et d’autre part un autre remplacement autorisé avant la fin de la première mi-temps (1948 67 , 1955 68 et 1956 69 ). Il semble donc possible dans la pensée des législateurs de jouer en infériorité numérique pendant toute la seconde mi-temps. Deux autres propositions concernant uniquement le remplacement spécifique du gardien de but blessé sont faites par la FIFA en 1956 70 et 1957 71 , et non adoptées par le Board . En fait, le rôle est spécifique et une équipe sans gardien de but est réellement amoindrie. Les membres du Board ont envisagé dès 1948, que dans le cas d’une blessure l’empêchant de revenir sur le terrain, son remplacement tout au long du match devait être possible. Les propositions de 1948 et 1949 72 , précisaient même que le remplaçant ne pouvait être contraint d’occuper le poste de gardien de but dans son équipe. Les remplaçants de joueurs blessés lors des compétitions furent finalement autorisés par le Board en 1958, soit 26 ans après la première proposition. Dans le cas des joueurs non blessés, la proposition de la FIFA de 1966 73 fut reportée et adoptée l’année suivante. Elle permettait à une équipe d’utiliser deux remplaçants pour deux remplacements. La seconde proposition questionne le nombre minimum de joueurs. La question de savoir si un match pouvait commencer ou continuer avec moins de sept joueurs fut débattue dans les années 70. L’étude des archives révèlent deux propositions de l’Écosse (1971 et 1973), et deux propositions de la FIFA (1973 et 1981), pour imposer un minimum de sept

64 Réunion du Board de 1930 : Proposition FA non adoptée : Pour un match international non joué sous les règles d’une Compétition des remplaçants peuvent être autorisés à la place des joueurs blessés si un arrangement a été conclu avant le commencement du match. 65 Réunion du Board de 1956 : Un match de compétition est un match où le résultat ajoute des points dans un championnat ou élimine une équipe d’une compétition. Cette définition est donnée par l’Écosse. 66 Réunion du Board de 1932 : Proposition FA retirée. 67 Réunion du Board de 1948 : Proposition FIFA non adoptée. 68 Réunion du Board de 1955 : Proposition Écosse non adoptée. 69 Réunion du Board de 1956 : Proposition Écosse non adoptée. 70 Réunion du Board de 1956 : Proposition de la FIFA non adoptée, 3 voix contre 2. 71 Réunion du Board de 1957 : Proposition de la FIFA non adoptée, 4 voix contre 1. 72 Réunion du Board de 1948 et 1949 : Proposition Scottish non adoptée. 73 Réunion du Board de 1966 : Proposition FIFA non adoptée, reportée. La partie sera jouée par deux équipes comprenant chacune pas plus de 13 joueurs et dont pas plus de 11 joueurs doivent participer au jeu en même temps. Chacun des 2 joueurs restants peut remplacer n’importe quel joueur parmi les onze, seulement une fois, durant tout le jeu et les prolongations s’il y en a. Un joueur exclu du terrain, par l’arbitre pour n’importe quelle infraction ne peut pas être remplacé. 72 joueurs au début du match. Les propositions étaient complétées par l’idée qu’un match commencé ne pouvait être abandonné dans le cas où l’une des équipes, ou les deux en même temps étaient réduites à moins de 7 joueurs. Etrangement il semblait logique d’être au moins sept pour commencer le match, mais les fédérations membres du Board proposaient de continuer le match avec moins de sept joueurs, donc de jouer à 11 contre six par exemple! Toutes ces propositions ont été rejetées. En 2010, le nombre minimum de joueurs dans une équipe est toujours laissé à l'appréciation des associations nationales ou des organisateurs de la compétition.

8. Expérimentations

En 1951 74 , le Board accorde une permission temporaire, dans les tournois internationaux de jeunes, organisés par les Associations membres de la FIFA, pour remplacer des joueurs blessés. Cette possibilité concerne d’une part le gardien de but pendant tout le match, et d’autre part un autre remplaçant avant la fin de la première mi-temps. Cette règle vise uniquement les joueurs sérieusement blessés qui ne peuvent revenir sur le terrain. Cette expérimentation est conforme aux propositions faites au Board depuis 1948. En 1962, il est également mentionné dans le compte rendu concernant uniquement les quatre Associations britanniques 75 , un nouvel agrément, autorisant les remplacements pour les matchs internationaux des moins de 23 ans. Ces deux expérimentations anticipent les modifications adoptées par le Board en 1958 pour les joueurs blessés et en 1967 pour les remplacements tactiques. Les seules autres expérimentations concernent le choix des deux remplaçants parmi une liste de 9 joueurs, pour le Championnat d’Europe des Nations de 1992 76 , et parmi 11 joueurs pour la Coupe du monde de 1994 77 . En 1974 la proposition d’utiliser 5 remplaçants au lieu de 2 par United States Soccer Fédération (U.S.S.F) est refusée par le Board. Les lois du jeu permettront uniquement un troisième remplaçant à partir de 1995.

74 Réunion du Board de 1951. 75 Meeting of the Four British Associations of 1962 : New agreement : « The substitutes be permitted in Under 23 international matches… ». 76 Réunion du Board de 1992 : Le Board approuve la demande de l’UEFA pour le Championnat d’Europe des Nations qui se déroule en Suisse du 10 au 26 juin 1992. 77 Réunion du Board de 1991 : A la demande de la FIFA, il est accordé de conduire une expérimentation permettant de choisir les deux remplaçants parmi 11 joueurs pendant la Coupe du monde de 1994 et les finales des compétitions de la FIFA. 73

La libre substitution des remplaçants pendant le match est également souhaitée par l’U.S.S.F en 1974. Cette proposition qui devait permettre à un joueur rappelé en cours de match sur le banc de retourner sur le terrain après un temps de repos, a été étudiée par le groupe technique d’étude de la FIFA dans les années 70 (Ferran , 1975). Il fut décidé de ne pas s’engager dans cette voie, car cette pratique modifierait le rythme du jeu et en transformerait l’esprit Cette question ressurgit en 1999, dans la rubrique des discussions en fin de réunion sous l’appellation « rolling substitutions ». Cette pratique est utilisée en jeunes et en vétérans 78 , mais aucune autre proposition n’a été faite pour les seniors au Board dans ce sens depuis 1974. La réduction progressive 79 du nombre de joueurs était une alternative envisagée en 1995 par la FA pour remplacer les tirs du point de penalty. Mais après maintes discussions, la demande de la FA de mener une expérimentation dans ce domaine fut refusée par le Board .

9. Analyse systémique

La loi III est en relation avec la dimension du terrain (loi I). Le football est considéré comme un sport collectif de grand terrain, dans lequel les joueurs disposent d’une certaine surface de jeu. En modifiant la dimension du terrain ou le nombre de joueurs, l’espace disponible pour chacun devient différent. Cette étude se fait le plus souvent sur une distribution théorique des joueurs qui disposent chacun de plus de 300 m². Mais la réalité du jeu ne se laisse jamais réduire à cette répartition scientifique. La densité des joueurs dépend avant tout de la position du ballon (loi II). Un ballon joué dans une surface de réparation après un corner fait ressembler le jeu à celui d’un « tout petit terrain » où chacun utilise un espace minimum. Cette densité est aussi liée à la loi du hors-jeu (Loi XII), qui influence également la répartition des joueurs sur le terrain. La confrontation de deux blocs équipes qui s’affrontent au milieu du terrain est la réalité de la pratique au XX e siècle. L’arbitre (loi V), en appliquant la loi XII (fautes et incorrections) qui lui permet d’exclure un joueur, peut faire varier le nombre de footballeurs participant à la suite de la partie. Si le gardien est expulsé, un autre joueur doit obligatoirement prendre sa place car ce poste est indispensable pour poursuivre le match. La loi XII prévoit également d’avertir un

78 Cf. Annexe n°21, p. 76 : 1997 : Minutes of the Annual General Meeting, p. 4. 79 The staged reduction 74 joueur qui échange sa place avec le gardien de but sans prévenir l’arbitre, pendant le jeu. Depuis 1901 80 si ce nouveau gardien de but touche le ballon avec les mains à l'intérieur de la surface de réparation, un coup de pied de réparation (Loi XIV) doit être accordé à l'équipe adverse.

10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Les premières règles du Football datent de 1863, et dès 1871 avec la « Cup » le football se joue à onze contre onze. En comparaison en 1884, le football rugby n’avait pas définitivement choisi son nombre de joueurs, et le chiffre de 14 joueurs apparaît sur le dessin du terrain, dans la bible de dix pages de l’époque 81 . En basket, la première équipe de James Naismith en 1891 est constituée de neuf hommes, simplement parce que sa classe d'éducation physique possède alors dix-huit élèves. En l'espace de cinq ans, les équipes de cinq joueurs deviennent la norme. (Guttmann, 1978 82 ). Le nombre de joueurs semble donc très vite se stabiliser. Au contraire, le handball s’est joué à 7 et à 11 joueurs avant la seconde guerre mondiale, par exemple l’Allemagne organise les premiers Championnats du Monde à onze et à sept dont elle remporte les deux titres. Mais aux Jeux olympiques en 1936, le handball se joue à onze et, il est assimilé à un sport collectif de grand terrain qui se joue sur l’herbe à l’extérieur. Il fera sa réapparition aux Jeux Olympiques en 1972 dans un gymnase à 7 contre 7, et il est prioritairement pratiqué sous cette forme depuis la fin des années 50. Pour ce sport apparu à la fin du XIX e siècle, le nombre de joueurs s’est stabilisé seulement au bout de 60 ans, Le rôle spécifique du gardien de but en Football n’est pas un cas isolé. Il existe également dans les autres sports collectifs des rôles spécifiques contraints par un règlement particulier : le gardien de but au handball, le libero 83 au volley-ball, le demi de mêlée au rugby. Le nombre de joueurs constituant une équipe est spécifique à chaque sport collectif et dépend plus ou moins de l’espace disponible et de certaines caractéristiques de la logique interne de l’activité. Par exemple, la nécessité de défendre la cible horizontale du volley-ball

80 Réunion du Board de 1901 : Décision internationale du 17 juin 1901. 81 Règles du Jeu de Football Rugby et Association. (1884) L’Union des Sociétés Françaises des Sports Athlétiques. Paris, P Arnoud Editeurs. 82 Terret. T. (2006). Du Rituel au Record. La nature des sports modernes. Paris, L'Hamarttan, p. 70. 83 Le libero est un poste défensif du volley-ball créé à la fin des années 90. De par sa spécificité, le libéro a un statut à part au sein d’une équipe de volley-ball et des règles particulières le concernant. 75 impose une grande densité de joueur. Le football se différencie des autres sports collectifs par son faible nombre de remplaçants autorisés à entrer en jeu, et surtout par le fait que le joueur sorti du terrain ne peut plus y revenir.

Synthèse Les lois du jeu fixèrent rapidement le nombre de joueurs à la fin du XIX e siècle. Le football se joue donc à onze depuis les années 1870, et personne ne remet en cause ce nombre. La possibilité du remplacement d'un membre de l'équipe fut beaucoup plus controversée. Au nom de l’égalité des chances, les pressions exercées par les différentes fédérations furent certainement déterminantes. Il est possible de différencier une première étape où seul le remplacement des joueurs blessés était autorisé, en match amical, et très longtemps limité à la première mi-temps, pour éviter ce qui était considéré comme une tricherie. Elle sera suivie d’une seconde étape avec la possibilité de faire entrer en jeu un, puis deux, et enfin trois remplaçants à n’importe quel moment de la partie et pour n’importe quelle raison. La transformation des mentalités, donne la possibilité à l’entraîneur d’influer sur le cours du match, de réaliser un « coaching gagnant », sans être considéré comme un tricheur. Le nombre de joueurs est en relation avec la dimension du terrain. L’espace détermine leur densité, conditionnant la libre circulation et la fréquence des duels. Paradoxalement, des marges de tolérance ont toujours existé sur les dimensions du terrain et non sur le nombre de joueurs d’une remarquable stabilité. Au fil du XX e siècle, la dimension subjective, l'espace d'évolution de chaque joueur s'est modifié, avec l'avènement des systèmes de jeux renforcés en défense ou au milieu de terrain, et également avec la distance parcourue par les joueurs. Les duels sont plus nombreux, illustrés par des chocs tête contre tête pratiquement à chaque match pendant l'Euro 2008. Cette transformation est relevée par Michel Platini qui propose de jouer à 10 contre 10 pour redonner une fluidité au jeu, et permettre sans doute, aux attaquants de bénéficier de plus d’espace et de davantage de temps pour leurs enchaînements techniques. Il s’agit d’une proposition qui vise également à faire remonter la moyenne des buts marqués. L’évolution de la loi III n’est sans doute pas terminée. L’augmentation du nombre de remplaçants dans les matchs peut se poursuivre. Pour les matchs amicaux internationaux, le Board autorise l’utilisation de 5 remplaçants à partir de 1995 84 , et de six depuis 2005 85 , à

84 Réunion du Board de 1995 : Proposition de la FIFA, amendée par la Scottish FA. 85 Circulaire du Board de 2005 : lors des matchs internationaux A (amicaux), les équipes peuvent avoir recours au maximum à six remplaçants chacune. Dans tous les autres matchs, davantage de remplaçants peuvent être 76 condition d’en informer l’arbitre avant le début du match. Il s’agit peut-être d’une perspective en considérant que le processus de remplacement a débuté lors de rencontres non officielles.

utilisés à la condition que les équipes concernées se soient mises d'accord sur un nombre maximal et que l'arbitre en soit informé avant le match. 77

Chapitre 4 Loi IV : Les équipements 1 ______

Quand j'ai chaussé pour la première fois des souliers à crampons, j'avais l'impression, en me levant, d'avoir une dizaine de centimètres de plus. Vladimir Dimitrijevic2

1. Loi actuelle

L’équipement de base de tout joueur comprend obligatoirement : un maillot ou une chemisette, un short, des chaussettes hautes, des protège-tibias 3 et des chaussures 4. Si le joueur porte des cuissards, ceux-ci doivent être de la même couleur que la couleur dominante des shorts 5. Le gardien de but devra arborer des couleurs le distinguant des autres joueurs, mais aussi de l'arbitre 6 et des arbitres assistants . L’arbitre doit s’assurer que chaque joueur porte correctement ses vêtements et vérifier s’ils sont conformes aux équipements requis par la loi IV 7. Chaque joueur doit être identifiable par un numéro flocké sur son maillot, correspondant à celui inscrit sur la feuille de match.

2 Principes de cette loi

Le premier principe est le port d’un maillot commun pour toute l’équipe, dans le souci de donner de la clarté au jeu. Les acteurs, joueurs, adversaires, gardiens de but et arbitres doivent se distinguer du premier coup d’œil. Les maillots, shorts et chaussettes des joueurs de toute l’équipe doivent être de « même genre » depuis 1973 8. Les maillots permettent à

1 Law IV – Players’ Equipement . 2 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 19. 3 Réunion du Board de 1990 : Proposition de la FIFA adoptée : La paire de protège-tibias est obligatoire. 4 Réunion du Board de 1989 : Les chaussures sont obligatoires… avant cette date un match pouvait se jouer si tous les joueurs étaient pieds nus ! 5 Réunion du Board de 1997. 6 Réunion du Board de 1973 : Proposition FA adoptée : Le gardien de but devra porter des couleurs le distinguant des autres joueurs et de l'arbitre. 7 Réunion du Board de 1997. 8 Réunion du Board de 1973 : Proposition de l'Écosse adoptée : Dans un match joué suivant le règlement d'une compétition, les joueurs ne sont pas obligés de porter des chaussures, mais ils devront porter un maillot ou chemisette, une culotte courte ou un training ou des culottes de même genre et des bas. 78 l’arbitre de distinguer adversaires, partenaires et gardiens de but. Dans le cas contraire, il a le devoir d’imposer au goal ou à une équipe de changer de maillot. Le second principe est sécuritaire. D’une part, il est permis pour se protéger de porter des protège-tibias. Ils apparaissent en 1874 et sont obligatoires depuis 1990. D’autre part, il est interdit de porter des chaussures dangereuses. Le règlement précise depuis 1938 9 qu’un joueur ne peut porter aucun objet dangereux pour les autres joueurs, pas plus qu’un équipement ou une tenue qui représenterait un danger quelconque pour lui même. Nous pouvons reprendre l’exemple du « Goal à la jambe de fer » relaté par Eisenberg & co (2004) 10 . M. Moris, le gardien de but de l’Inde jouait depuis 4 ans avec une jambe artificielle avant d’être exclu en 1954 par un arbitre qui considérait que ce joueur représentait un danger pour les autres. Dans cette logique tous les bijoux et piercing doivent être enlevés avant le match, seul le port de l’alliance sous un « strap » demeure autorisé 11 . L’arbitre doit donc s’assurer, selon la formulation de 1997, « qu’aucun joueur ne porte d’objet potentiellement dangereux » pour lui ou pour les autres . Le troisième principe impose une tenue correcte, exigée à tout moment du match. Pendant plus d’un siècle, le règlement précise la tenue usuelle du joueur. Mais à partir de 1989 12 , le vocabulaire évolue, d’abord « équipement de base », puis en 1990 13 « équipement obligatoire». Il semble qu’une tenue correcte soit souhaitée, puis exigée, pas simplement pour des raisons de sécurité avec le port obligatoire des protège-tibias en 1990, mais aussi pour des raisons esthétiques, avec un cuissard 14 de la même couleur que le short ou de la couleur dominante des culottes depuis 1997 15 . Le maillot rentré dans le short (1997) 16 peut être interprété dans le sens d’une tenue non négligée, mais aussi pour aider l’arbitre à repérer plus facilement si le maillot a été tiré ou non. Il est également obligatoire de jouer, depuis 2002, avec des maillots à manches, et indispensable de conserver son maillot sur soi. Cela peut

9 Réunion du Board de 1938 : Proposition du Pays de Galles adoptée : Loi I. 10 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit. La décision d’exclure ce gardien a été confirmée par la FIFA après la Coupe du monde de 1954. « Conformément aux dispositions relatives à la loi IV, M. MORIS ne doit pas être autorisé à participer à un match de Football ». Cf. photocopies des courriers entre la FIFA et la Fédération de Football de L’Inde pp. 136-137. 11 Réunion du Board de 2010: Strap autorisé sur alliance. 12 Réunion du Board de 1989 : Proposition de la FIFA adoptée : 4.01. L’équipement de base… 13 Réunion du Board de 1990 : Proposition de la FIFA adoptée : 4.01. L’équipement obligatoire de base de tout joueur… 14 Réunion du Board de 1991 : La proposition de la FIFA est adoptée : La couleur des cuissards (undergarments ) doit être la même que le short concerné. 15 Réunion du Board de 1997 : Les joueurs sont autorisés à porter des sous vêtements visibles tels que des cuissards. Ils doivent, cependant, être de la même couleur que le short porté par le joueur et ne pas descendre au- delà du haut du genou. Si une équipe porte des shorts multicolores, la couleur dominante des cuissards doit être la même que celle du short. 16 Réunion du Board de 1997 : Les joueurs doivent faire attention que leur maillot reste rentré dans leur short et que leurs chaussettes soient remontées. 79 paraître disproportionné ou hors de propos, mais le joueur qui enlève son maillot, pour fêter un but ou protester contre un changement peut et doit recevoir un carton jaune. Avoir les cheveux trop longs peut aussi être considéré dans certains pays comme une tenue incorrecte ou indécente. En 2006 le match de championnat en Arabie Saoudite entre Al-Ittihad et Al- Shabab, a débuté à 9 contre 10, car trois joueurs avaient, selon le règlement, les cheveux trop longs et l'arbitre a dû les renvoyer aux vestiaires17 .

3. Historique de la loi

Dès l’origine, les équipes de clubs portent des couleurs distinctives. Selon Réthacker et Thibert (1974) 18 , l’équipement des joueurs du HAC comprenait dans les années 1870-1880 « des blouses en coton blanc, avec soutache bleue aux manches, solides et résistances ». Les blouses vont laisser progressivement la place aux maillots. Lors du premier match international de football, opposant l’Écosse et l’Angleterre en 1872 19 , les joueurs écossais avaient des maillots bleus, des knickerbockers (shorts en dessous du genou) blancs et des bas rayés bleus et blancs, tandis que les Anglais portaient maillots et shorts blancs et bas aux couleurs de leur collège. Les descriptions de ce match, et les gravures de l’époque montrent les joueurs avec des chapeaux et même des casquettes. A l’époque, le couvre-chef était une composante normale de l’attirail du parfait footballeur, une habitude vestimentaire qui a longtemps résisté au XX e siècle. Dans le roman « Les Olympiques » en 1924, Henri De Montherlant 20 décrit son héros Peyroni portant un béret sur la tête pendant le match. Les descriptions sur les tenues des footballeurs sont nombreuses et éparses, mais celle de Tunmer et Fraysse (1897) semble refléter la réalité : « Le meilleur costume, le plus pratique et le plus hygiénique à la fois, est celui adopté par le joueur d’association : il se compose d’une chemise de flanelle, d’une culotte courte, de bas de laine, et d’une paire de bottines lacées et s’ajustant bien au pied» 21 . Les « boots » sont effectivement présentes dans le règlement, avant les « shoes ». Ils notent également que des jambières peuvent être utiles aux débutants. En

17 Les dirigeants ont fait appel à des coiffeurs présents dans les tribunes pour qu'ils coupent les cheveux des joueurs et dix minutes après le coup d'envoi, les trois « tondus » ont pu débuter la partie. Chacun des joueurs a écopé d'une amende de 2000 $ et d'une suspension de trois matchs fermes pour avoir enfreint les règlements de la fédération et les préceptes coraniques. Sous la pression des religieux, la fédération a décidé d'installer un coiffeur dans les vestiaires avant chaque match de championnat. 18 Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974). La fabuleuse histoire du football. Tome I. Des origines à la Coupe du monde 1966. Paris, Ed O.D.I.L., p. 30. 19 Écosse-Angleterre 0-0 samedi 30 novembre 1872 à Partick, Écosse, 4000 spectateurs. 20 Montherlant, H. (1954), op. cit., pp. 104-105. 21 Tunmer N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit., p. 84. 80 fait, avant la fin du XIX e siècle, « Les joueurs utilisent des chaussures spéciales et des protège-tibias »22 . Les deux règlements de 1863 23 , interdisent les chaussures à crampons, les clous et les lamelles de fer sur les semelles des chaussures. Deux hypothèses peuvent expliquer cette précaution. Il est possible d’envisager une pratique sur les sols en pavés et non sur des sols mous et glissants, ou une pratique ne privilégiant pas les changements de direction, tel le dribbling game qui consiste à taper dans le ballon et à courir derrière… Une autre analyse du jeu de cette époque évoque un jeu brutal où le hacking est largement répandu. Balancer des grands coups de pied dans les tibias fait partie du jeu. Cette hypothèse est privilégiée car le port des protège-tibias est autorisé, à condition que ceux-ci ne soient pas en métal.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

La première transformation concerne les bottes ( Boots) et les chaussures (Shoes ). Pendant plus d’un siècle (1886 – 1989) le Board donne la possibilité de jouer sans chaussures. Le règlement des compétitions est parfois plus strict. Une avalanche de forfaits aurait dû permettre à l’Inde de participer au Mondial 1950, sans avoir à disputer le moindre match de qualification. Mais les joueurs de l’Inde n’ont pas reçu l'autorisation d'évoluer pieds nus ! Cette question a été débattue en 1973, avec deux propositions contradictoires, celle de la FIFA pour rendre obligatoire le port des chaussures, et celle de l’Écosse qui considère que les joueurs n’ont pas besoin de porter des boots ou des chaussures. En fait avant 1973, pour le Board , les arbitres ne doivent pas autoriser un ou plusieurs joueurs à jouer sans chaussures si tous les autres joueurs en portent. A partir de 1973 24 , la loi impose cette règle aux arbitres, avec comme conséquence un équipement identique pour tous les joueurs, et deux styles de matchs possibles : avec ou sans chaussures. Depuis 1989 25 , le port des chaussures est devenu

22 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit. 23 Cf. annexe n°65, p. 167 : The 14 laws adopted by the football association in december 1863 . Art 14 Aucun joueur ne pourra avoir des clous saillants, des lamelles de fer ou de la résine au niveau de la semelle ou du talon de ses chaussures de foot. Annexe n°66, p. 168 : The Rules of Association Football 1863, Art 13 : Aucun joueur n'a le droit de porter des écarte-narines, des protections de tibias en métal, des chaussures à crampons. 24 Réunion du Board de 1973 : Proposition de la FA adoptée : La Loi n'oblige pas à porter des chaussures. Toutefois, dans le cas de matchs de compétition, selon l'opinion du Board. , les arbitres ne doivent pas autoriser un ou plusieurs joueurs à jouer sans chaussures si tous les autres joueurs en portent. 25 Réunion du Board : Proposition de la FIFA adoptée : Les chaussures doivent être portées par les joueurs et satisfaire aux conditions suivantes ... 81 obligatoire. Et un joueur qui perd accidentellement une chaussure pendant le jeu est invité, depuis 1991 26 à la remettre dès que possible. La seconde transformation concerne la fabrication des chaussures utilisant les clous et les plaques de fer. Avant 1888, seuls les clous sont autorisés, à condition que leurs têtes soient enfoncées à ras du cuir. L’article 11 en 1886 interdit toutes les pièces en métal ou en gutta percha 27 sur les semelles ou les talons des bottines ou les jambières. En fait, il n’est pas possible de rajouter aux chaussures des fers qui dépassent à l’avant ou à l’arrière des semelles. Cette règle reprécisée en 1904 28 , se soucie de la sécurité des joueurs…qui reçoivent des coups de pied ou de talon. La troisième transformation est liée à la réglementation des barres et des crampons. Pour les barres, deux ans après la première proposition en 1886, du Major Moridin, le Board autorisera les crampons et les barres de fer en 1888 : « Les barres doivent être transversales et plates, elles auront au minimum ½ pouce (1,25mm) de longueur et ½ pouce (1,5mm) de largeur ». A partir de 1898 29 , ces barres doivent obligatoirement traverser la largeur de la semelle de bout en bout. En 193730 , le règlement précisera que « Des barres et crampons combinés pourront être portés… ». Les autres modifications concernent les crampons, leur taille, leur type et leur matière. Le Board, dès 1888, impose une hauteur maximum de 1/2 pouce et un diamètre minimum de 1/2 pouce. La règle interdit l’utilisation des crampons coniques et pointus. Ils doivent donc être arrondis. A partir de 1951 31 , la taille des crampons autorisés augmente de ½ pouce à ¾ de pouce (12 à 18mm), mais les plaques de métal sous les chaussures sont désormais interdites (la mention va disparaître du règlement après 1983 suite au rapport du Board , car les plaques de métal sont devenues obsolètes). Le problème des crampons usés est

26 Réunion du Board de 1991 : Proposition FIFA adoptée : Décision 3 : Un joueur qui perd une chaussure ou un protège-tibia durant le match devra le remettre dès que l’opportunité se présentera. Si le joueur joue délibérément sans chaussure ou protège-tibia, l’arbitre doit stopper le match et accorder un coup franc indirect à l’équipe adverse à l’endroit où était le ballon à ce moment là, ou selon les dispositions de la loi XIII. 27 Gutta percha : substance provenant du latex d'un arbre de Malaisie. 28 Réunion du Board de 1904 : Loi 11 : Chaussures ( boots ) : II est défendu aux joueurs de porter des clous à leurs souliers ou bien des plaques ou pièces en métal ou en gutta-percha dépassant les semelles ou les talons des chaussures ou les jambières. Cependant le fait d'appliquer du caoutchouc mou aux semelles (sur le côté des chaussures) ne constitue pas une infraction à cette règle. 29 Réunion du Board de 1898. 30 Réunion du Board de 1937 : Loi XII : … Des barres et crampons combinés pourront être portés, à condition que la barre soit fixée transversalement et s'étende sur toute la largeur de la chaussure, et que la totalité réponde aux exigences générales de la Loi. Les barres, conjointement avec les crampons, seront arrondies aux extrémités et sans plaque de métal d'aucune sorte. 31 Réunion du Board de 1951 : Proposition de la FA adoptée : Ni les barres, ni les crampons appliqués aux semelles ou aux talons ne devront avoir plus de ¾ de pouce (18 mm) d'épaisseur. A l'exception du logement en métal pour le type de crampons à vis, il ne devra pas être porté de plaque de métal, même recouverte de cuir ou de caoutchouc. 82

évoqué pour la première fois en 1950 32 . Les crampons peuvent devenir pointus et dangereux. Mais même usés, le minimum de diamètre de chaque section ne doit pas être inférieur à 12,7mm depuis 1888. Ce règlement ne semble pas uniformément appliqué. En effet, le Board note en 1970 que de nombreux crampons sont non conformes, et que beaucoup font moins de 1/2 pouce de diamètre. Des plaintes sont reçues concernant les conséquences dangereuses résultant de l’utilisation de crampons usés, particulièrement en plastique et de semelles en plastique usées . Des rapports sont demandés pour tout incident en précisant le type de crampons incriminés . Le Board demande à la FIFA de rédiger une circulaire attirant particulièrement l’attention sur l’interdiction des crampons limés. Le règlement fait pour la première fois référence aux crampons à vis en 1951, soit trois ans avant la finale de la Coupe du monde en 1954. Les Allemands utilisaient des crampons vissés pour cette finale, contrairement aux Hongrois, sur une pelouse totalement détrempée à Berne. C'est l'une des causes avancées pour expliquer la défaite des Hongrois invaincus depuis quatre ans en compétition. L’expression « crampons moulés » apparaît pour la première fois en 1967, et sera précisée en 1973 33 : ils forment la partie intégrante de la semelle et ne peuvent être remplacés. Pour des raisons de sécurité, le Board impose un nombre minimum de 10 crampons par semelle et un diamètre d’au moins 10 mm (3/8 inch). La matière des crampons est également questionnée. A la fin du XIX e siècle les chaussures sont en cuir et en fer. De nouveaux matériaux apparaissent au milieu du XX e siècle. Ainsi en 1955 34 ; le Board précise que les barres et les crampons seront en cuir ou en caoutchouc 35 mou, alu minium, plastique ou matériel similaire. Si des clous sont utilisés ils devront être enfoncés à ras du cuir. Le Board stipule en 1961 que les crampons doivent être solides. Dans la même logique le qualificatif « mou » pour les crampons en caoutchouc, apparu en 1904 a été supprimé en 1957. A partir de 1973, se pose la question de l’utilisation des crampons aluminium sur les terrains en cendrée. Ce type de surface peut se transformer en sol très dur, impénétrable par les crampons, comme le terrain stabilisé d’aujourd’hui. Leur utilisation peut donc provoquer des blessures aux pieds des joueurs, des chutes et des collisions avec les adversaires. Le problème sera similaire avec l’apparition des surfaces synthétiques à la fin du XX e siècle. La pratique du football sur ces surfaces impose un

32 Réunion du Board de 1950 : Loi IV … Les crampons (doivent être arrondis → ) ne doivent pas être usés. 33 Réunion du Board de 1973 : Proposition FIFA adoptée : c) Les crampons moulés formant partie intégrante de la semelle et ne pouvant être remplacés seront en caoutchouc, plastique, polyuréthane ou matières souples de même nature. Sous la réserve qu'il n'y aura pas moins de 10 crampons par semelle, leur diamètre minimal devra être de 10 mm (3/8 inch). 34 Réunion du Board de 1955 : Proposition de la FA adoptée. 35 Le caoutchouc est tiré du latex de l'hévéa que l'on trouve en particulier dans l'État mexicain de Tabasco. 83 matériel spécifique, des chaussures dites stabilisées ou des crampons moulés. Pour ces derniers, ils devront être selon le Board, depuis1973, en caoutchouc, plastique, polyuréthane ou matières souples de même nature. Lors de sa réunion de 1975, sur proposition de la FIFA, le Board autorise que le matériel de support additionnel destiné à stabiliser les crampons en matière souple et les barres moulées et à renforcer la semelle, soit utilisé pour autant qu'il n'offre aucun danger pour les autres joueurs. La question des protège-tibias illustre le problème de la protection des joueurs. Ils sont mentionnés dans le règlement en 1863, avec l’interdiction de porter des protège-tibias en métal. Nous pouvons supposer que les autres matières sont autorisées 36 . A l’origine, il s’agissait de versions raccourcies des protections utilisées au cricket Ceci s’explique par l’apparition récente du tacle sous le genou, ou pour se protéger tout simplement des coups de pied dans les tibias autorisés par le règlement sous le nom de « hacking ». Suite à l’observation lors de la Coupe du monde de 1982, le Board précise lors de la réunion de 1983, qu’à titre de mesure préventive contre les blessures par crampons, l’utilisation des protège-tibias ( shin- pads ) devrait être recommandée (par l’ensemble des coachs et des responsables médicaux) pour les matchs et les entraînements. Dans tous les cas cette précaution devrait être un élément essentiel de la conscience du sportif professionnel. Sept ans plus tard en 1990 37 , la paire de protège-tibias devient obligatoire. Le règlement précise qu’ils doivent être d’une matière adéquate (caoutchouc, plastique, ou matière similaire), offrir un degré de protection approprié et entièrement recouverts par les bas. Ces indications confirment les principes de cette loi : une tenue correcte et la protection des joueurs. En plus des chaussures et des protège-tibias, la tenue usuelle se compose « d'un maillot ou chemisette, d'une culotte courte, de bas …» 38 . Les matières ont évolué, la laine et la flanelle laissent la place au coton puis aux tissus synthétiques. Les maillots numérotés permettent aussi aujourd’hui de distinguer chaque joueur. Ceci fut rendu possible grâce à l’apparition en 1928 du flocage des maillots dans le championnat anglais. Lors de la Finale de la Cup en 1933 entre Everton et Manchester City, chaque joueur portait un numéro différent : du 1 au 11 pour Everton et du 12 au 22 pour City. Cette pratique se diffusera lentement. Par exemple pour la Coupe du monde les numéros apparaissent en 1950 et non lors

36 Il est aussi possible de considérer qu’ils sont réellement autorisés, dans les règles de la FA seulement en 1874. 37 Réunion du Board de 1990 : Proposition de la FIFA adoptée. 38 Réunion du Board de 1938 : Proposition du Pays de Galles adoptée L'équipement usuel d'un joueur se composera d'un maillot ou chemisette, d'une culotte courte, de bas et de chaussures. Le gardien de but devra porter des couleurs le distinguant des autres joueurs. 84 des trois premières éditions (1930, 1934 et 1938). En France, 15 ans plus tard lors de la finale de Coupe de France en 1948 39 , les Lensois portaient un numéro sur leur maillot contrairement aux Lillois. Conformément à la demande du Conseil Fédéral, en 1977 la Commission Centrale de l’Arbitrage (C.C.A) insiste pour qu'il soit fait une application rigoureuse du numérotage des joueurs dans toutes les compétitions, car elle regrette que ce numérotage ne soit pas appliqué dans certaines ligues. Le Board est resté silencieux pendant tout le XX e siècle sur la question des différentes sortes de maillots. Lors de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) en 2002, le Cameroun remporte l’épreuve avec des maillots sans manches. La Fédération Internationale de Football (FIFA) s’est indignée de cette tenue, et a interdit ce maillot pour la Coupe du monde 2002. L’équipementier a d’abord pensé ajouter des manches transparentes, mais a finalement opté pour l’ajout de manches noires aux maillots. C’est à l’origine de la nouvelle précision du Board en 2003 : « Les maillots doivent être des maillots à manches ». Le Cameroun fera encore l’actualité en 2004 avec une tenue une-pièce40 « UniQT » lors de la CAN en 2004. La FIFA prendra la décision de retirer six points au Cameroun en raison du port de cette tenue pour les qualifications de la Coupe du monde 2006. Cette décision sera ensuite annulée. Les « Lions Indomptables » du Cameroun abandonnèrent le maillot et récupérèrent les points. Le football reste traditionnel et on ne badine pas avec les tenues « correctes»! Il n’est plus possible de retirer son maillot pour célébrer un but. Depuis 2002 41 , un joueur qui simplement soulève son maillot pour révéler un maillot de corps avec des slogans ou des publicités doit être averti. A partir de la fin du XIX e siècle le statut et le rôle du gardien de but s’affirment. Il est possible de distinguer les joueurs de champ du gardien de but, qui devient avec les règles du Board , unique en 1891 42 et indispensable en 1897 43 . Cette altérité se manifeste par un maillot particulier. En France, le règlement de 1909, stipule que le gardien de but n’a le droit qu’au bleu roi, au blanc ou à l’écarlate. Le Board oblige les gardiens de but, dans les matchs internationaux, en 1921 44 à porter un maillot de couleur jaune foncé. Le Board va assouplir cette mesure et, à partir de 1938, les gardiens sont invités à revêtir un maillot d’une couleur qui les distingue de leurs partenaires. Cette règle est toujours d’actualité aujourd’hui où le maillot du gardien doit se différencier de ceux des autres acteurs du jeu. Une règle favorable

39 Finale de coupe de France le 10 mai 1948 entre Lille et Lens : 3-2. 40 Cette tenue révolutionnaire, sans short, est en infraction à la loi IV. 41 Réunion du Board de 2002 : suite à une question de la FIFA  Décision du Board . 42 Réunion du Board de 1891. 43 Réunion du Board de 1897. 44 Réunion du Board de 1921. 85 pour le journaliste G. Hanot 45 (1921), car selon lui, il y a un intérêt évident pour le gardien à enfiler un maillot de la couleur voyante, vert par exemple, afin d’attirer sur lui le shoot de l’adversaire et d’être pris par conséquent pour cible. Cette mode perdure au XXI e siècle avec des tenues de gardien de plus en plus design et fluorescentes. Hormis la couleur de maillot, la loi IV reste silencieuse sur la tenue spécifique du gardien de but : gants, short rembourré, pantalon, genouillères, maillot spécial, casquette, casque, autres protections … Nous pouvons faire l’hypothèse d’une tenue liée à la mode, aux coutumes, entre tradition et modernité avec l’apparition de nouveaux matériaux. Par exemple jouer avec des gants n’est ni une obligation, ni une permanence. Gabriel Hanot nous apprend qu’en 1921 « En Angleterre tous les grands gardiens de but des équipes professionnelles jouent les mains nues ». Sur les photos des journaux de l’époque ou des livres relatant l’histoire du Football et de ses compétitions, la plupart des gardiens ont adopté cette mode jusque dans les années 1960. La rupture est nette ; depuis 40 ans rares sont les gardiens jouant non gantés. De la même manière, l’observation des images entre 1920 et 1950 nous montre majoritairement des gardiens portant la casquette, comme l’Espagnol Ricardo Zamora 46 ou les Français Di Lorto 47 et René Vignal 48 . Cette coutume a totalement disparu, excepté pour se protéger d’un soleil aveuglant. Contrairement au hockey le gardien de but n’a pas de protection spéciale. Certains jouent avec un casque souple comme le gardien de Chelsea, le Tchéque Peter Cech, suite à un traumatisme crânien subi en 2008, lors d'une percussion avec adversaire.

5. Décisions et les sanctions liées à cette loi

Paradoxalement, bien que concernant la sécurité des joueurs, les sanctions semblent s’être assouplies En effet entre 1897 49 et 1929 50 , si un joueur jouait avec des crampons non conformes à la règle, le jeu devait être arrêté par l’arbitre. Le fautif immédiatement exclu de la partie ne pouvait plus y prendre part. Depuis le joueur peut revenir sur le terrain à condition que l’arbitre ait de nouveau vérifié son équipement, sans même recevoir un avertissement.

45 Hanot, G. (1921). Pour devenir un bon joueur de Football Association. Berger-Levrault, Editeurs. 46 Ricardo Zamora, international Espagnol, 46 sélections entre 1922 et 1934. 47 Di Lorto international Français, 11 sélections entre 1936 et 1938. 48 René Vignal, international français, 17 sélections entre 1949 et 1954. 49 Réunion du Board de 1897 : Tout joueur contrevenant à cette loi sera immédiatement exclu de la partie et ne pourra plus y prendre part. 50 Réunion du Board 1929 : Tous les joueurs dont les chaussures ne seront pas conformes à cette loi seront renvoyés du terrain de jeu et ne seront pas autorisés à revenir sans en référer d'abord à l'arbitre, qui vérifiera lui- même que les chaussures soient satisfaisantes. 86

C’est le fait, depuis 1931 51 pour un joueur de revenir sur le terrain de jeu après avoir réparé ses chaussures, sans en référer à l’arbitre qui constitue une offense, que l’arbitre doit sanctionner d’un avertissement. A partir de 1933 52 un joueur ayant quitté le terrain pour n'importe quelle cause, ne peut y revenir que si le ballon a cessé d'être en jeu et doit en référer à l'arbitre. Si un joueur pénètre ou rentre sur le terrain de jeu pour joindre ou rejoindre son équipe, le Board précisera en 1967 53 que l’arbitre ne doit pas arrêter le jeu même si l'équipe fautive en tirait avantage. Si l'arbitre a arrêté le jeu pour donner un avertissement, le jeu reprendra par une balle à terre à l'endroit où la faute a été commise. L’Écosse proposera en 1962 et 1963 pour la reprise de jeu de remplacer la balle à terre par un coup franc indirect… sans succès. La réunion du Board de 1992 54 , confirmera que « le jeu ne doit pas être stoppé immédiatement pour une infraction à cette loi » : le joueur fautif recevra l’instruction par l’arbitre de quitter le terrain pour mettre son équipement en ordre ou remplacer un équipement manquant, à l’arrêt de jeu suivant, à moins que l’équipement du joueur ne soit déjà remis en ordre.

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

L’Écosse a proposé lors de la réunion du Board de 1967 qu’un joueur ne puisse avoir la possibilité de porter des lunettes de n’importe quelle sorte. Cette proposition fut rejetée, et il est toujours possible en 2011 de jouer avec des lunettes, ou des verres de contact. Avec la mode des chaussures de couleur, l’uniformisation des équipements d’une même équipe est soulevée par le Board en 2000. En effet dans les Items of discussion , Mr M. Zen- Ruffinen de la FIFA informe les membres du Board que la FIFA considère la possibilité d’introduire à l’intérieur de ses compétitions une clause demandant que toutes les chaussures des joueurs de la même équipe soient d’une couleur unique ( one colour ). Cette clause ne semble pas encore, ni avoir été introduite par la FIFA, ni adoptée pas le Board .

51 Décision du Board du 13 juin 1931. 52 Réunion du Board de 1933 : Proposition de l’Irish FA adoptée. 53 Réunion du Board de 1967 : Décision 4 Un joueur qui n'a pas été autorisé à prendre part à la partie ou qui a été expulsé pour infraction à la Loi IV et qui pénètre ou rentre sur le terrain de jeu pour joindre ou rejoindre son équipe, transgresse les dispositions de la décision 5. L’arbitre ne doit pas arrêter le jeu même si l'équipe fautive en tirait avantage. Si l'arbitre a arrêté le jeu pour donner un avertissement, le jeu reprendra par une balle à terre à l'endroit où la faute a été commise. 54 Réunion du Board de 1992 : Proposition FA. 87

7. Expérimentations

En 1970, le Board avait demandé un premier rapport concernant les incidents causés par les crampons. Le rapport de 1971 relève peu de critiques concernant les types de crampons habituellement utilisés, excepté un avis négatif donné sur l’augmentation de l’emploi des crampons utilisés au rugby. Il est convenu qu’un tel type de crampon n’est pas approuvé et qu’il ne répond pas aux exigences de la loi IV. Lors de la réunion du Board en 1982, sont apparus des problèmes concernant la fabrication non conforme des crampons, ayant des répercussions sur les chaussures de football…. Th e Editorial Commitee 55 est d’accord pour que le Board réexamine les exigences de la loi IV, spécialement celles faisant référence aux semelles moulées, rigides et aux crampons. Le Board a accepté que la Coupe du monde 1982 serve d’expérience. Et en 1983, dans le compte rendu de la réunion, une page complète est consacrée au bilan sur les équipements suite à cette observation. Les pelouses utilisées étaient excellentes…et pendant toute la Coupe du monde aucune blessure causée par les crampons n’a été rapportée par le Comité Médical. Il n’y a absolument pas besoin de faire des ajustements aux crampons des chaussures de foot 56 , qui facilitent les mouvements des joueurs, tel que stopper ou changer de direction promptement. L‘observation a montré que les plaques de métal utilisées dans le passé sont maintenant obsolètes. La seule légère modification du règlement les concerne. Elles étaient présentes dès 1886, et furent interdites en 1951…il n’est plus besoin de les interdire, et elles disparaissent donc définitivement du règlement en 1983.

8. Analyse systémique

La vérification du matériel est une mission assurée par l’arbitre (loi V). En 1897, le Board précise que l'arbitre, si on le lui demande, doit examiner les souliers des joueurs avant le commencement d'un match. Il sera aussi amené à le faire à partir de 1910, pendant le repos. Lors de sa réunion de 1983, le Board indique que les chaussures de football doivent être vérifiées par le trio arbitral avant le match dans le tunnel donnant accès au terrain. Quand les

55 AGM of 1988 : « The Editorial Committee of the IFAB shall consist of the Secretaries of the member Associations of the IFAB ». 56 « Leather screw-in studs and metal and synthetic cone-shapped studs ». 88 joueurs sont remplacés pendant le jeu, le même contrôle doit être réalisé par l’arbitre de touche (loi VI). Cette vérification des équipements est liée à une obligation des arbitres, celle de la sécurité des acteurs. En fait, un joueur doit se protéger et ne pas être dangereux pour les autres joueurs. Depuis 1938 57 , le règlement précise qu’« un joueur ne pourra porter aucun objet dangereux pour les autres joueurs ». L’équipement et la tenue des joueurs sont également en lien avec la loi sur les fautes et incorrections (Loi XII). Le joueur qui perd une chaussure doit arrêter sous peine de sanction technique et administrative (coup franc et avertissement). Il est responsable de son équipement et doit rechausser son soulier le plus tôt possible. Dans le cas contraire, il sera invité par l’arbitre à l’arrêt de jeu suivant, à quitter le terrain pour remettre son équipement en ordre. Le joueur qui enlève son maillot pendant le jeu, y compris pour célébrer un but, fait preuve de tenue incorrecte et l’arbitre est tenu par le règlement de lui adresser un carton jaune. Le jet d’objet en direction d’une personne est sanctionné au même titre que les coups portés à cette personne. Le jet d’objet avec la main en direction du ballon…est considéré comme le prolongement de la main. Dévier le ballon de sa trajectoire en lançant son protège-tibia dans sa surface de réparation est logiquement sanctionné par un coup de pied de réparation.

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Les équipements de base des joueurs de sports collectifs semblent à première vue très similaires : des chaussures, un short, un maillot et des chaussettes. La nature du sol permet de distinguer des types de souliers différents. Les crampons sont réservés aux surfaces « molles » de terrain. Le fait de devoir pousser en mêlée explique une taille de crampons autorisée plus grande au rugby (22mm) qu’au football (18mm). La forme et la taille des crampons sont conditionnés, par la surface de jeu comme le prouve la réglementation spéciale sur terrain synthétique. Les protections adoptées par les joueurs sont soit en relation avec la nécessité de se jeter au sol (genouillère, coudière au volley-ball) soit une aide pour capter le ballon, comme les gants du gardien de but de football. Les équipements autorisés par le règlement semblent inversement proportionnels aux droits de charge spécifique de chaque activité. La règle du « non contact », au basket, ne nécessite pas d’adopter un matériel particulier. En revanche au

57 Réunion du Board de 1938. 89 football les protège-tibias amortissent les tacles et les coups de pieds maladroits. Au rugby le casque, le protège-dents, les protections pour les épaules et la colonne vertébrale permettent à ces nouveaux gladiateurs de tenter de sortir indemne des « chocs » frontaux et des placages.

Synthèse Nous avons mis en évidence, suite aux évolutions technologiques de chaque époque l’apparition progressive de différents matériaux. L’étude approfondie des archives du Board montre un contrôle constant, dans la fabrication des chaussures, de l’utilisation du fer, du caoutchouc, du plastic, de l’aluminium, du cuir, des matériaux synthétiques avec une obligation d’approbation par le Board . Les crampons en fer et en cuir ont progressivement laissé la place aux crampons en plastic ou en métal. Le règlement intègre les nouveaux matériaux Par exemple à partir de 1973, la loi précise la nature des crampons moulés « caoutchouc, plastique, polyuréthane ou matières souples de même nature ». Le règlement anticipe les évolutions futures. La révolution actuelle des surfaces de jeu synthétiques favorise de nouvelles innovations focalisées sur la fabrication des chaussures spécifiques. Elles conditionnent la pratique et la technique, comme l’illustre la consigne donnée par l e demi-aile de Montherlant ; « Il faut que tu sentes bien le cuir partout, que la botte colle au pied »58 . La règle IV semble surtout se focaliser sur le versant sécuritaire, spécifiquement pour les chaussures. Les boots avec barres et clous en fer, ont progressivement laissé la place à des chaussures spécialisées ( footwear 1973). Des chaussures de plus en plus sophistiquées, de plus en plus légères et de plus en plus colorées, avec des scratchs à la place des lacets en cuir, selon l’imagination des fabricants et la logique marketing du XXI e siècle. Cette loi est toujours en évolution comme le montre la dernière réunion du Board du samedi 5 mars 2011. La proposition de la Fédération Galloise de football a été adoptée. Dans le cas où un joueur porte des cuissards ou des collants, ceux-ci doivent être de la même couleur que le short. La standardisation des équipements semble constituer une tendance d’évolution. Lors du premier match international de football en 1872 les Anglais portaient maillots et shorts blancs et bas aux couleurs de leur collège. Même si la sélection des rugbymen Barbarians arbore les chaussettes de la couleur de leur club, les tenues se sont uniformisées, et tous les joueurs d’une équipe portent les mêmes couleurs.

58 De Montherlant, H. (1954), op. cit., p. 106. 90

La transformation de la tenue usuelle varie en fonction des matériaux utilisés mais aussi au gré des modes : des shorts plus ou moins longs, des maillots qui collent plus ou moins au corps. Lors de la saison 2010/2011, deux joueurs, Samir Nasri d’Arsenal et Carlos Tevez de Manchester City, ont joué avec des minerves au cou. Le Board a immédiatement réagi et a interdit en 2011 59 le port de protège-cou. Le Board avait adopté de limiter en 2002 60 , la publicité aux seuls maillots, mais la FIFA a obtenu l’année suivante que ce point soit retiré! Les joueurs sont donc autorisés à se transformer en homme-sandwich et à arborer de la publicité sur les shorts, chaussettes ou chaussures. Le joueur se met au service du groupe mais reste un individu, identifié par un numéro et surtout par un nom flocké sur un maillot qui peut se vendre aux supporters. Une vedette peut aussi tenter de se démarquer par des accessoires souples (bandeaux…) ou des chaussures aux couleurs fluorescentes, une sorte de lutte contre l’uniformisation. Des perspectives peuvent être envisagées avec des joueurs qui se protègent davantage. Petr Cesch, le gardien de la République Tchèque qui porte toujours un casque pendant les matchs, est peut être un précurseur.

59 Réunion du Board du 2 au 4 mars 2011 au pays de Galles à Newport. 60 Réunion du Board de 2002 : Suite à une question de la FIFA, Décision du Board . 91

1 Chapitre 5 Loi V : Les arbitres ______

« La décision, même injuste, de l'arbitre est approuvée par principe. La corruption de l'agôn commence là où aucun arbitre ni arbitrage est reconnu ». Roger Caillois 2

1. Loi actuelle

L’arbitre est tenu à de nombreuses compétences et obligations. Nous nous proposons de resituer l’ensemble de ses responsabilités en fonction de leur apparition chronologique, dans les archives du Board .

Dates Loi actuelle : Compétences et obligations

1889 Assurer la fonction de chronométreur. 1889 Rédiger un rapport sur le match. 1889 Prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de tout joueur ayant commis une faute passible d’avertissement ou d’exclusion. 1891 Veiller à l’application des lois du jeu. 1891 Assurer le contrôle du match en collaboration avec les arbitres de touche 3. 1897 S’assurer que l’équipement des joueurs satisfasse aux exigences de la Loi IV. 1903 Laisser le jeu se poursuivre (laisser l’avantage), pour sanctionner un joueur, l’arbitre n’est pas tenu de réagir immédiatement, mais doit le faire lors de la prochaine interruption de jeu. 1914 Prendre des mesures à l’encontre des officiels de l’équipe qui n’ont pas un comportement responsable et, à sa discrétion, expulser ceux-ci du terrain de jeu et de ses abords immédiats. 1921 Arrêter le match temporairement, le suspendre ou l’arrêter définitivement, à sa discrétion, à chaque infraction aux Lois, 1924 Arrêter le match s’il considère qu’un joueur est sérieusement blessé. 1934 Donner le signal de la reprise du match après une interruption du jeu. 1935 Sanctionner la faute la plus grave quand un joueur commet simultanément plusieurs fautes. 1938 Faire en sorte qu’aucune personne non autorisée ne pénètre sur le terrain de jeu. Intervenir sur indication des arbitres assistants en ce qui concerne les incidents qu’il n’a pas pu constater lui-même. 1997 Faire en sorte que tout joueur souffrant d’une plaie qui saigne quitte le terrain de jeu. 1999 S’assurer que tout ballon utilisé respecte les recommandations de la loi II.

1 Law V – Referees . 2 Caillois, R. (1958). Les jeux et les hommes. Paris, Gallimard, p. 107. 3 Les arbitres de touche sont devenus les arbitres assistants en 1896. 92

2. Principes de cette loi

2.1. Principe d’autorité Selon la formule de Tunmer et Fraysse, en 1897, les décisions de l’arbitre sont « finales et sans appel »4. Le Board précise, dès 1889, que « la décision de l'arbitre est définitive tout comme sur les points de discussion » 5. Franck Annese et Jean-Damien Lesay 6, le comparent à un instituteur ou un juge. L’arbitre peut en effet expliquer les règles aux joueurs, mais il le fait rarement. Il lui est surtout demandé de prendre des décisions, comme un juge, mais avec un temps de réflexion extrêmement court. Vladimir Dimitrijevic se prononce en faveur d’un « arbitre qui décide, qui impose, qui n'organise pas un référendum avant de décider s'il y a hors-jeu ou pas, si le but est valable ou non » 7. Pour lui l’arbitre est indispensable pour donner du sens au match, pour les joueurs mais aussi pour les spectateurs. Ces derniers ne trouvent plus de sens dans le monde qui les entoure. Alors, plus ce monde devient chaotique, et plus ils se cherchent des lois strictes, en venant au spectacle par exemple. Le match se dispute sous le contrôle d’un arbitre disposant de toute l’autorité nécessaire pour veiller à l’application des lois du jeu dans le cadre d’une rencontre qu’il est appelé à diriger. Ces décisions sur les faits en relation avec le jeu sont sans appel 8. Ce qui signifie, que personne ne peut revenir sur l’une de ses décisions. « L’arbitre est, d’après le code du jeu, le maître absolu de la partie » 9. Il possède même une sorte de pouvoir de vie ou de mort sur un match. Même s'il doit tout mettre en œuvre pour que le match se poursuive jusqu’à son terme, il est en mesure de l’arrêter, temporairement ou définitivement 10 .

2.2. Principe de justice

La notion de justice est parfois envisagée pour protéger le faible contre le fort. .Mais cette vision n'est pas compatible avec l’arbitrage. La justice évoquée, ici, est universelle, comme le sont les lois du jeu. Si un joueur fait une faute, l’arbitre la sanctionne dans le sens d’une réparation du préjudice commis. Le principe de justice suppose, d’une part que les lois

4 Tunmer N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit., p. 89. 5 Réunion du Board de 1891 : Un arbitre est désigné pour faire respecter la règle et décider des points de discussion. 6 Annese, F. & Lesay, J-D. (2007) A mort l'Arbitre? Paris, Calmann-lévy. 7 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 32. 8 Réunion du Board de 1892 : Proposition de M. Gregson : La décision de l'arbitre est définitive sur les points en relation avec le jeu, tout comme sur les points de discussion. 9 Parat, M. (1924). Le Football Association. Paris, Editions Nilsson, p. 147. 10 Réunion du Board de 1921 : L'arbitre devra suspendre le match ou le terminer par suite de l'obscurité, de l'intervention des spectateurs ou pour tout autre motif, qu’il jugera nécessaire. 93 du jeu soient identiques pour tous, et d’autre part que leur application soit la plus uniforme possible entre les directeurs du jeu. L’universalité des règles fut l’un « des objectifs essentiels de la FIFA lors de sa formation de 1904 »11 . L’arbitre reste totalement neutre, ne prend pas partie. Il veillera à l'application des lois du jeu, de la manière la plus stricte possible. Pour Michaël Attali 12 , l'institution sportive s'est dotée d’un arbitre pour étendre le champ d'application de la règle. L'officialisation de sa présence participe de la mise en œuvre d'une justice sportive indiscutable et extensible. L'arbitre a alors pour mission de faire respecter les règles élaborées par l'institution : il contribue de la sorte à l'extension géographique et sociale d'un règlement sportif et aux conditions de sa diffusion.

2.3. Principe de neutralité

Pour André Comte Sponville, les philosophes ne dissertent pas sur l'arbitrage . La raison essentielle retenue est que les principales qualités de l'arbitre sont l'impartialité et la neutralité, ce qui est en contradiction avec l’esprit des philosophes qui veulent s'engager . En matière de sports, l'arbitre est une personne neutre qui doit veiller au bon déroulement des épreuves et au respect des règlements et autres Lois des jeux. L'arbitrage sportif existait déjà pendant l'Antiquité, mais a eu tendance à disparaître du Moyen Âge. Le Jeu de paume médiéval n'avait ainsi pas de corps arbitral, les joueurs devaient s'incliner devant les décisions du... public. Chaque sport connaît une histoire différente sur la gestion de l'arbitrage comme le montre aujourd'hui la très grande variété existant dans ce domaine. Pour Eric Dunning 13 , l’arbitre apparaît avec les sports collectifs modernes, plus civilisés, par opposition aux jeux populaires. Il se voit attribuer par l'institution un rôle spécifique, qui reste « en dehors » et « au-dessus » du jeu afin de contrôler la partie. « Dès le départ, la nécessité de sélectionner ces arbitres parmi les pays neutres s'est imposée »14 . Mais il faut attendre l’agrément du 14 juin 1930 15 où le Board stipule que pour les matchs internationaux les arbitres doivent être neutres, et le directeur du jeu posséder obligatoirement la licence officielle d’une association nationale. Il

11 Eisenberg, C., & al. (2004), op.cit., p. 73. 12 Attali. M. (2004). Le sport et ses valeurs. Sous la dir. de Michaël Attali. La Dispute, p. 73. 13 In Elias, N. & Dunning, E. (1994). Sport et civilisation. La violence maîtrisée. Paris, Fayard, p. 317 : « Par opposition à ses ancêtres populaires, le rugby moderne illustre une forme de jeu civilisé en ce qui présente quatre aspects au moins dont les formes ancestrales étaient dépourvues : un ensemble complexe de règles écrites et instituées formellement stipulant un contrôle strict de l'usage de la force physique et interdisant la cravatte, le tackling et le hacking ; des sanctions internes au jeu clairement définies ou « pénalités » ; l'institution d'un rôle spécifique, à savoir celui de « l'arbitre » ; et un corps national centralisé qui établit les règles et veille à ce qu'elles soient respectées, la Rugby Football Union ». 14 Eisenberg, C., & Co. (2004), op.cit., p. 126. 15 Réunion du Board de 1930. 94 sera précisé en 1950 16 la nécessité de les choisir parmi la liste officielle des arbitres internationaux. Ils doivent en principe être sélectionnés dans un pays neutre, à moins que les pays concernés soient d'accord pour utiliser l'un de leurs propres arbitres officiels. Cette neutralité doit être garante de l’impartialité, base de la réussite d’une carrière, selon John Langenus : « Je n’avais jamais de préférence pour les équipes qui jouaient dans leur pays, je n’essayais pas de flatter le public. Ce fut l’origine de mon succès »17 .

3. Historique de la loi

Les fautes et les arbitres n’avaient aucune place dans les règles originelles. En effet, les joueurs étaient supposés fair-play, et il n’était pas imaginable qu’ils commettent des fautes intentionnelles. L'arbitrage était alors le fait des deux capitaines. Cette autogestion était compliquée, et la partie pouvait dégénérer. L’apparition de l’arbitre remonte au milieu du XIXe siècle, dans les règlements des public schools britanniques. La date d’apparition est incertaine, pour Michaël Attali 18 , vraisemblablement aux alentours de 1846, avec le code réglementant le football à Cheltenham. Franck Annese et Jean Damien Lesay 19 évoquent en premier lieu le règlement d’Eton qui dès 1847, peut-être avant, précise que deux « umpires » surveillent les buts, qui n'ont pas encore de filets. Il est aussi possible en 1847 de prendre l’exemple de Harrow qui rend les décisions arbitrales définitives, dépossédant ainsi les capitaines de leurs anciens pouvoirs dans ce domaine. Le code de Cheltenham en 1849 semble inaugurer, une organisation à deux niveaux, qui va progressivement s’imposer : les deux capitaines désignent les umpires , ensuite ces derniers doivent s'entendre pour nommer un referee. Les umpires n’arbitraient pas réellement. Ils ne sifflaient pas les fautes, et se contentaient de prononcer des arbitrages à la demande des capitaines. L’ umpire doit donc prendre parti, juger. Mais comme chacun d’eux, représente une équipe, inévitablement les discussions furent souvent animées et longues. Si les umpires ne peuvent tomber d'accord sur une décision, c'est le referee qui tranche. Cette organisation complexe doit permettre au match de se poursuivre jusqu’à son terme. La solution n'était guère idéale car les décisions, tantôt favorables, tantôt préjudiciables, ne tombaient qu'après de longs palabres et plusieurs appels

16 Réunion du Board de 1950. 17 Langenus, J. (1943), op. cit., p. 45. 18 Attali, M. ( 2004), op. cit., p. 74. 19 Annese, F. & Lesay, J-D. (2007), op. cit. 95 devant le referee. A cette époque, les joueurs sont les seuls acteurs présents sur le terrain, les umpires et le referee se tiennent le long des lignes de touche ou en tribune. Certains règlements des public schools britanniques évoquent donc les umpires et le referee dès le milieu du XIX e siècle, mais les règles de Sheffield de 1857, d'Uppingham en 1862 et surtout de la Football Association 20 en 1863 restent muettes au sujet de l'arbitrage. L'avènement de l'arbitre débute à la fin des années 1860, avec le rapprochement de la Football Association et de la Sheffield Association. Il était possible de réaliser deux mi-temps avec des règles différentes, mais pour pouvoir jouer l'un contre l'autre, il est plus simple d’adopter des règles communes et de désigner un arbitre pour les appliquer. Ce qui fut fait lors du match organisé en mars 1866 entre des sélections représentant les deux associations. En 1870, les règles de Sheffield mentionnèrent pour la première fois des umpires. Ils devenaient autonomes, et ne devaient donc pas prendre parti uniquement pour l’équipe qu’ils représentaient. Cette évolution est à l’origine d’une nouvelle répartition spatiale, qui leur donne la responsabilité d’une moitié de terrain. Chacun d'entre eux avait pour tâche de juger les litiges survenant dans sa moitié de terrain. Si les joueurs possédaient encore le pouvoir de déclencher l'intervention de l' umpire , la décision de celui-ci était désormais sans appel. Ces propos sont certainement à nuancer, car par exemple avant de prendre une sanction, chaque umpire devait se mettre d'accord avec son vis-à-vis, et dans le cas contraire faire appel au referee ! L’évolution se poursuit avec la mise en place d'un dispositif inédit lors de la première édition de la Football Association Cup au cours de la saison 1871-1872 21 . Les deux umpires pénètrent sur le terrain et pratiquent une forme de double arbitrage. Le referee, le juge d’appel, lui se tient toujours hors du terrain. Cette procédure est donc utilisée en 1872, pour la finale de la FA Cup, mais aussi la même année pour le premier match international. En 1874, la présence des umpires sur le terrain fut enfin consacrée dans les règles de la Football Association. A partir de 1877, la Football Association et la Sheffield Association posent un code unique, qui officialise sur tous les terrains la présence de deux umpires placés sous le contrôle d'un referee, toujours posté hors du champ de jeu. Le referee peut aussi signaler les fautes à l'aide d'un sifflet. Cette mesure consacre la présence d'une autorité neutre et indépendante et marque le recul du rôle des umpires.

20 La Football Association se composait des représentants des grandes écoles du Sud. 21 Annese, F. & Lesay, J-D. (2007), op. cit., p. 17. 96

4. Transformations de la loi décidées par le Board

4.1. Régulateur du jeu

Pour Schaffhauser 22 , l'arbitre remplit une fonction de régulation et de constitution du jeu. Il va en effet transformer la pratique du « football sauvage » en football institué. Il est le personnage qui « labellise » le match et celui qui « départage ». A l’origine, l’art du débat était presque aussi important que la technique balle au pied, puisque les joueurs pouvaient contester les décisions. Les différents ont été d’abord aplanis par les capitaines des deux équipes ainsi qu'il convenait à un sport pratiqué par des gentlemen, puis ensuite par les umpires , deux juges qui se tenaient en dehors du terrain. Le referee en tribune était chargé de trancher, en appel, entre les deux umpires. L’arbitre est censé exercer une justice sportive indiscutable et permettre de trancher les désaccords. Il est le régulateur des litiges : « L'arbitrage est donc un mode de règlement des litiges consistant à recourir à une ou plusieurs personnes privées choisies par les parties, les arbitres, pour obtenir une décision impérative. La décision rendue dans ces conditions est appelée sentence arbitrale» 23 . L’arbitre est donc le médiateur entre des joueurs, les capitaines ou les deux umpires qui participent chacun à une équipe. Avant 1886, quand le referee est encore en dehors du terrain, cette mission était fondamentale. Il était considéré comme un juge d' appel chargé de départager en cas de litige les deux umpires , derniers vestiges de la participation des équipes à la régulation du match. Selon le Board, en 1886 24 , les deux umpires désignés, devaient prendre une décision sur tous les cas donnant lieu à discussion. Les discussions faisaient donc partie de l’essence du jeu ! De plus un arbitre est désigné pour décider sur toutes les différences de points de vue entre les umpires . En fait, l'arbitre se tenait sur la ligne de touche et chronométrait le match, et lorsque les deux umpires ne parvenaient pas à trouver un terrain d'entente, ils en référaient à lui. Il était donc chargé de prendre une décision en cas de désaccord. Cette fonction de médiateur est reprécisée en 1889 25 , car il lui est alors possible de désigner lequel des umpires a tort, et ne doit pas imposer son point de vue. En France en 1894 M. Péche, Président de la Commission de Football demande au Conseil de l’Union 26 (U.S.F.S.A.) d’ajouter aux lois du jeu un article spécial « Les deux capitaines pourront

22 Schaffhauser, P. (2008), op. cit., p. 48. 23 Linant de Bellefonds, X. & Hollande, A. (1995) L'arbitrage, Paris, PUF, Que Sais je ? 2952, p.34. 24 Réunion du Board de 1886 : Article 12. (Rappelé en 1889 lors de la modification de l’article 12). 25 Réunion du Board de 1889 : Art 12 : L'arbitre devra veiller à décider de tous les cas dans lesquels les umpires ne seront pas d'accord, ou lequel des umpires ne doit pas donner de décision. 26 Conseil Départemental de l’Union Sportive des Sports Athlétiques. Ce conseil dépendait de l’USFSA (Union des Sociétés Françaises de Sports Athlétiques). 97 convenir que l’arbitre sifflera toutes les fautes sans qu’il soit besoin de réclamer» 27 . A la fin du XIX e siècle, le règlement accepte et tolère les discussions et les réclamations des capitaines. L’art du débat ne disparaît pas du jour au lendemain. Dans la pratique, les palabres se poursuivent selon Alfred Wahl : « Les arbitres sont d'abord mal informés et peu qualifiés. Sur l’aire de jeu, ils hésitent et palabrent avec les capitaines. La situation est pire chez les joueurs qui confondent volontiers rugby et football et se permettent de charger brutalement ou de décocher des coups de pied dans les tibias»28 ..

4.2. Place de l’arbitre

Le referee passe des tribunes au centre du terrain au début des années 1890, et devient un véritable acteur permanent du jeu. Le mouvement est inverse pour les umpires qui se retrouvent sur les bords du terrain et se transforment en linesmen 29 . Cette évolution est la conséquence des problèmes que posait le double arbitrage réalisé par les deux umpires . Ces derniers étaient confrontés de plus en plus souvent à des joueurs non « fair-play ». En août 1891, le trio arbitral tel que nous le connaissons aujourd'hui était formé. L’arbitre est la seule personne habilitée à expulser des joueurs et à octroyer des coups francs sans se soucier des appels. Simultanément l’introduction du penalty se réalise aussi en 1891. Ce n’est pas une coïncidence car cette sanction suprême, qui est souvent le fruit de contestation, ne peut être accordée que par une seule personne. Son intrusion sur le terrain, fait de l’arbitre un véritable acteur du jeu, le personnage central. Pour John Langenus, entre les deux guerres mondiales, l’arbitre était « considéré comme une espèce d'intrus », qui subissait à chaque match, « un baptême du feu » 30 . Il signale les fautes par un coup de sifflet et fixe la sentence. Il devient le seul maître du terrain, le directeur du jeu.

4.3. Directeur de jeu

Le régulateur du jeu laisse la place au directeur du jeu. Sa fonction principale, déterminée par le Board en 1889 31 , est « de faire respecter la règle », et depuis son entrée sur

27 Cité par Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 39. 28 Wahl, A. (1990), op. cit., p. 64. 29 Linesmen : juges de ligne, juges de touche, arbitres de ligne ou arbitres de touche. 30 Langenus, J. (1943), op. cit. 31 Réunion du Board de 1889 : Un arbitre est désigné pour faire respecter la règle et décider des points de discussion. 98 le terrain en 1891 32 « de veiller à l’application des lois du jeu ». Par exemple, dans le règlement de 1909 33 , il est spécifié qu’il est du devoir de l'arbitre de veiller à ce que tous les coups de pied libres, les coups de pied de but, et les coups de pied de coin soient donnés régulièrement. Mais sa fonction dépasse largement le fait d’appliquer et d’interpréter les règles. Progressivement il prend en charge l’ensemble des paramètres de la rencontre, pour devenir le directeur du jeu et du match. Le Board le missionne, en 1891 34 , pour assurer le contrôle du match en collaboration avec les juges de touche. Le Board de 1971 35 précise, qu’un arbitre sera désigné pour diriger chaque match. Sa juridiction commencera dès qu'il aura pénétré dans le terrain de jeu. Par exemple il est le seul à autoriser une personne à pénétrer sur le terrain 36 . Plus surprenant, il devait aussi empêcher les entraîneurs et les officiels de donner des directives à leurs joueurs depuis les lignes de limites. Il faut attendre 1993 37 pour qu’il soit permis à l'entraîneur de communiquer des instructions tactiques à ses joueurs durant le match. Cependant, l'entraîneur, comme les autres officiels, doit rester à l'intérieur des limites de la surface technique 38 lorsqu'il y en a une et adopter en toutes circonstances une conduite responsable. Par tradition certains entraîneurs, tel Sir Alex Fergusson pour l’équipe de Manchester United, manage toujours leur équipe des tribunes. Les autres sont étroitement surveillés par le quatrième arbitre qui fait son apparition officielle en 1991, dans les lois du jeu, soit exactement un siècle après la mise en place du trio arbitral.

4. 4. Déplacements de l’arbitre

Le premier à réfléchir sur les déplacements des arbitres fut le Belge John Langenus 39 . Il observait ses confrères et tentait d'établir un système scientifique de placement sur le terrain. Mais Stanley Rous 40 fut le premier officiel à recourir au système diagonal d'arbitrage. Un grand article intitulé « Le système de contrôle en diagonale » y est consacré en 1939 dans Football Word. « L’on imagine un arbitre qui se déplacerait le long d'une ligne allant en diagonale d'un coin du stade à l'autre, et deux juges de touche qui surveilleraient la zone de

32 Réunion du Board de 1891. 33 Règlement de 1909 notes H. 34 Réunion du Board de 1891. 35 Réunion du Board de 197 : Réécriture adoptée sur une proposition de l’Écosse. 36 Reprécisé lors de la réunion du Board de1972 : Décision 12 : L’arbitre n'autorisera personne à pénétrer sur le terrain, avant, pendant le déroulement du jeu sans qu’il n’ait donné le signal de le faire. 37 Réunion du Board de 1993 : Amendement de la Scottish FA adopté : Loi V. Décision 13. 38 La surface technique apparaît dans les lois du jeu en 1994. 39 Le Belge John Langenus fut l’arbitre de la première finale de la Coupe du monde de 1930. 40 Stanley Rous est membre de l'IFAB. Il sera ensuite président de la FIFA. 99 la touche la plus éloignée du trajet de l'arbitre ». 41 En fait, les déplacements de l’arbitre agissent comme un système en interaction, pour permettre à l’un des trois officiels, d’être à tout moment au plus près des actions, le moins éloigné possible du ballon. Une réflexion sur ce sujet est menée par le Board à la fin des années 60. En 1968, il propose de réviser le système de contrôle en diagonale 42 . En fait avant 1970 il était proposé à l’arbitre d’adopter cette procédure générale, mais il conservait la possibilité de choisir une autre méthode. A partir de 1970 43 l’arbitre est obligé exploiter le système de contrôle en diagonale quand les arbitres de touche sont neutres. (Dans le cas contraire, il doit les informer de la méthode qu’il a l’intention d’utiliser). Le Board recommande au referee de coopérer avec les arbitres de touche et de suivre leurs points de vue et leurs indications. En fait le système de contrôle en diagonale, semble le plus rationnel, et il est toujours la référence au XXI e siècle.

4.5. Gestes de l’arbitre

Nous avons vu que la fonction de médiateur de l’arbitre laisse progressivement la place à celle de directeur de jeu. Son devoir de décider ou de trancher sur les points de discussion ne sera retiré du règlement qu’en 1973 44 . Il n’est plus le referee , mais bien celui qui dirige la partie en s’appuyant sur les lois du jeu. Le Board précise, en 1973, dans le Mémorandum des signaux 45 proposés par la FIFA, qu’un arbitre n’a pas le devoir d’expliquer ses décisions aux joueurs ou aux spectateurs. Toute tentative de le faire peut amener de la confusion, de l’incertitude et du retard. Pour éviter toutes discussions inutiles et donner du sens aux décisions de l’arbitre, le Board adopte en 1974 46 un « Mémorandum on signals », préparé par Sir Stanley. Il y est précisé que tous les signaux utilisés par les arbitres devraient être simples et instinctifs. Ils sont conçus pour contrôler le jeu efficacement et garantir sa meilleure continuité ; ils sont destinés à indiquer quelle sera l’action de jeu suivante, sans justifier cette action. Un bras pointé pour indiquer un corner, un coup de pied de but ou une faute, et la direction dans laquelle elle est accordée, est suffisant. Le bras levé pour indiquer le coup franc indirect est clairement connu de tous. Ce Mémorandum fixe donc précisément les gestes de

41 Cité par Eisenberg, C. & Co. (2004), op.cit., p. 141. 42 Diagonal système of contrôle. 43 Réunion du Board de 1970 : Memorandum Coopération betweeen referee and linesmen. 44 Réunion du Board de 1973 : Un arbitre est désigné pour faire respecter la règle (il est retiré  décider des points de discussion.) Sa décision sur les points en relation avec le jeu doit être définitive si le résultat du jeu est concerné. 45 Cf. annexe n°41, p. 134 : 2011, Loi V : Signaux de l’arbitre. 46 Réunion du Board de 1974 : « Mémorandum on signals » préparé par Sir Stanley. Proposition de la FIFA adoptée. 100 l’arbitre, rappelle son rôle, et sa fonction de directeur du jeu. En effet, il est mentionné que pour l’arbitre, aller au-delà de ces dispositions invite aux discussions, aux contestations ou aux exagérations. Le seul autre signal requis est celui d’indiquer que le jeu continue quand la clause de l’« avantage » est invoquée. L’arbitre n’est donc absolument pas tenu de discuter avec les joueurs, ni de donner des explications concernant ses décisions. Il utilise les signaux, un langage des signes spécifique et universel, pour se faire comprendre de tous.

4.6. Fonction de sanctionner

L’arbitre a le devoir de sanctionner les joueurs qui enfreignent les lois du jeu. Pour réparer le préjudice, l’arbitre accorde un coup-franc, qui peut se transformer en penalty, dans le cas d’une faute volontaire commise par un joueur dans sa propre surface de réparation. Le règlement prévoit depuis 1935 47 , que l'arbitre doit sanctionner la faute la plus grave, lorsqu'un joueur commet simultanément deux fautes de gravité différente. Le referee a aussi le pouvoir de distribuer des sanctions administratives, du simple avertissement à l’exclusion définitive du terrain. Par exemple le Board précise que l'arbitre a la possibilité d'exclure définitivement du terrain un joueur coupable de conduite violente (1938 48 ), de brutalité, s’il tient des propos injurieux ou grossiers (1972 49 ), ou s’il persiste dans sa mauvaise conduite après avoir reçu un avertissement (1975 50 ). Au fil du temps, les possibilités de sanctionner administrativement les joueurs augmentent. Les acteurs du jeu testent l’élasticité des règles et la tolérance des arbitres et en réaction le Board adapte progressivement les lois du jeu. Pour clarifier la situation, et rendre compréhensibles et visibles du bord du terrain ou des tribunes les sanctions administratives, les joueurs reçoivent depuis 1970 des cartons jaunes et rouges.

4.7. Pouvoir de l’arbitre

Le terme « pouvoir » apparaît en 1888 dans l’article 12 : « L'arbitre a le pouvoir d'arrêter le match », et également en 1889 « même en cas de violence, sans avertissement préalable, l'arbitre a le pouvoir réglementaire d'exclure du jeu le ou les coupables… ». Les décisions de l’arbitre sont prises en présence des umpires entre 1886 et 1891. A partir de cette date, les umpires disparaissent et sont remplacés par des arbitres de touche. Le pouvoir n’est

47 Réunion du Board de 1935 : Décision 5.10. 48 Réunion du Board de 1938 : Proposition du Pays de Galles adoptée : Loi XIII. 49 Réunion du Board de 1972 : Proposition de la Scottish Football Association adoptée : Loi V h. 50 Réunion du Board de 1975 : Proposition de la Scottish Football Association adoptée : Loi V h. 101 donc plus partagé. Le règlement précise qu’un arbitre est désigné pour faire respecter la règle et trancher sur les points de discussion. Ses décisions relatives à des questions concernant les faits de jeu sont sans appel 51 . Ce pouvoir absolu se mesure à travers l'extension des pouvoirs du referee, désormais chargé de chronométrer le temps de jeu, d'enregistrer les fautes et d'expulser les joueurs coupables de conduite antisportive. En 1897, le pouvoir de l'arbitre est étendu aux offenses commises pendant la suspension temporaire du jeu ou lorsque le ballon est hors du jeu. A partir de 1903 52 les arbitres doivent réprimer rigoureusement toute infraction de la part des joueurs, des dirigeants de clubs ou des spectateurs! Ce pouvoir semble sans limite. Ils peuvent empêcher les entraîneurs de donner des consignes aux joueurs, et également, à partir de 1902 53 , d’exclure un arbitre de touche. Ce pouvoir sera confirmé en 1981 54 par le Board. L’arbitre est réellement le maître du terrain, sans sa permission personne ne doit être autorisé à pénétrer sur le terrain de jeu pendant la partie, à l’exception des arbitres de touche et des joueurs 55 . L’arbitre est considéré soit comme l’autocrate du jeu soit comme un véritable despote. Selon Guido Panico et Antonio Papa, « le passage à l'état de despotisme arbitral répondait à un principe fondamental de tous les jeux, au désir d'absolu que ceux-ci exigent, au postulat de la sécurité et de l'immédiateté des résultats» 56 . A partir de 1973 57 , la sémantique évolue. Sur une proposition de la FIFA, le Board adopte une nouvelle formulation : « Son autorité et l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par les lois du jeu commenceront dès qu'il aura pénétré dans le terrain de jeu ». Le pouvoir de l’arbitre se réfère désormais systématiquement aux lois du jeu. Ceci peut être illustré par le fait qu’avant 1973, l’arbitre avait un pouvoir discrétionnaire , par exemple de donner un avertissement. Le règlement laissait la faculté à l’arbitre de prendre l’initiative de certaines mesures. Cette expression est supprimée en 1972 58 avec une nouvelle formulation de la loi V : « A partir du moment où il pénètre sur le terrain de jeu, il adressera un avertissement à tout joueur ayant une mauvaise tenue ou une attitude inconvenante et l'empêchera de prendre part au jeu en cas de récidive ». En fait les lois du jeu guident

51 A la réunion du Board de 1973, il sera ajouté concernant ces décisions sans appel: « pour autant que cela concerne le résultat du match ». 52 Réunion du Board du 14 décembre 1903. 53 Réunion du Board de 1902 : Dans le cas d'interférence excessive ou de conduite inappropriée d'un juge de touche, l'arbitre devra avoir le pouvoir de l'exclure du terrain et de désigner un remplaçant. 54 Réunion du Board de 1981 : Suite à une demande d’opinion de la Football Association of Wales 55 Réunion du Board de 1938 : Proposition de la Football Association of Wales adoptée. 56 Panico, G. & Papa, A .( 2002). Storia sociale del cacio in Italia. Bologne, Il Milino. 57 Réunion du Board de 1973. 58 Réunion du Board de 1972 : Proposition Écosse adoptée. Loi V e. 102 précisément l’arbitre. La sémantique du règlement glisse du pouvoir discrétionnaire vers une obligation de sanctionner, d’avertir ou d’exclure le joueur. De même, dans les années 70 59 , l’arbitre avait le pouvoir discrétionnaire d'arrêter le jeu pour toute infraction aux Lois, de suspendre ou d'interrompre définitivement la partie chaque fois qu'il l'estimera nécessaire en raison des événements météorologiques, de l'intervention des spectateurs ou d'autres motifs. Mais le Board avait souligné en 1960, qu’il ne devait pas non plus en faire trop car « Dans l'esprit des lois du jeu les matches doivent être joués avec aussi peu d'arrêts que possible… »60 . Le règlement précisait avant 1960, que dans ce but, l’arbitre ne devait pas pénaliser les infractions techniques ou involontaires. Il stipule à partir de 1960, avec la proposition de la FIFA, « de ne pénaliser que les infractions à la Loi commises délibérément ». Il a aujourd’hui, le devoir d’interrompre au minimum le jeu, et de faire tout son possible pour que le match se déroule jusqu’à son terme. Cette autorité, ce pouvoir s’exprime à travers la tenue des arbitres. Au début du XX e siècle les arbitres ont parfois adopté une tenue composée d’un pantalon noir, d’un blazer et d’un nœud papillon. Dans ses mémoires, John Langenus 61 nous apprend qu’il a été recalé à son premier examen d’arbitrage juste avant la première guerre mondiale, par M. Gaspey, un Anglais. Cet arbitre, portait toujours une belle tunique de soie mauve, couleur qui symbolise la justice. Des tendances, des modes que les archives du Board ne valident pas. La tenue de référence dans la seconde moitié du XX e siècle, celle du sérieux, de la rigueur, est noire : ils sont « les hommes en noir »62 . Le règlement reste silencieux sur les tenues des arbitres jusqu’aux années 1970 63 . Il est alors précisé que les arbitres des matchs inter-nations devront porter une veste ou une chemisette dont la couleur sera distincte de celles des équipes en présence. Ils ont aujourd’hui une panoplie de couleur pour se distinguer… et le noir n’est plus la tenue dominante. Pour Vladimir Dimitrijevic, « il fut un temps où l’arbitre était effacé, où l'on ne parlait guère de cette silhouette noire, souvent peu svelte, qui suivait la course du ballon. Or, pour lui aujourd'hui, ils sont habillés de tenues scintillantes, roses, genre pied-de- poule : ils sont devenus importants, de vrais juges »64 . Depuis 1994 et la Coupe du monde aux États-Unis, si le noir reste traditionnellement la couleur de l'arbitre, il est permis à celui-ci d'arborer d'autres couleurs, qui ne se confondent pas avec les couleurs des joueurs loi III.

59 Règlement de 1977 : Loi V d. 60 Réunion du Board de 1960. Loi 5.08. 61 Langenus, J. (1943), op. cit., p. 12. 62 Hubert, C. (1974). Les hommes en noir : Tout le football belge t.4.Bruxelles éd. Arts et voyages. 63 Règlement de 1977 : Décision 5.01. 64 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 32. 103

5. Décisions du Board liées à cette loi

5.1. Clause de l’avantage Son origine dans les archives du Board remonte à la réunion de 1903. Il est conseillé à l’arbitre de laisser le jeu se poursuivre quand l’équipe contre laquelle une faute a été commise peut en tirer un avantage, et seulement sanctionner la faute commise initialement si l’avantage escompté n’intervient pas. Il est également précisé, la même année, dans la loi concernant le penalty 65 , que l'arbitre peut se retenir d'appliquer la loi dans le cas où, en le faisant, il est convaincu que cette application permettrait de donner un avantage au camp fautif. La nouvelle formulation de 1971 66 , encourageant l’arbitre à s'abstenir de pénaliser s'il pense favoriser l'équipe ayant commis la faute, confirme la permanence de cette philosophie de jeu. La problématique concernant cette clause, concerne le temps accordé à l’arbitre pour revenir sur sa décision. Lors de la réunion du Board de 1960, il fut précisé que lorsque l'arbitre décide de laisser se poursuivre le jeu, il ne peut plus revenir sur sa décision si l'avantage présumé ne se réalise pas. Le débat est relancé en 1995 67 avec la proposition de la Football Association, qui considère que si l’avantage anticipé ne se matérialise pas « presque immédiatement », il doit sanctionner la faute initiale. Cette modification est demandée pour s’assurer que l’équipe fautive ne tire pas bénéfice, même par chance, de la faute commise. Cette proposition a été refusée, car le Board souhaite une clarification des mots « almost immediately »68 . Il est d’avis de délimiter la période en question à 2 ou 3 secondes de jeu. La proposition semble en adéquation avec les pratiques des arbitres. Mais l’année suivante, en 1996 69 , le Board décide que si l’avantage anticipé ne se matérialise pas, l’arbitre devra immédiatement sanctionner la faute initiale. Ce texte sera une nouvelle fois modifié en 1997, le mot immediately , sera remplacé par « at that time »70 . Il n’est donc pas question, pour l’arbitre, de laisser le jeu se dérouler plusieurs secondes, comme c’est le cas au rugby par exemple. Par contre, depuis 1960, si l’arbitre a appliqué la clause de l’avantage, il est autorisé à sanctionner administrativement le joueur fautif à la fin de l’action de jeu.

65 Réunion du Board de 1903 : Loi 16 : le penalty. 66 Réunion du Board de 1971 : Proposition Écosse adoptée. 67 Réunion du Board de 1995 : Proposition de la FA non adoptée. 68 « almost immediately » : presque immédiatement. 69 Réunion du Board de 1996 : Amendement de la Scottish Football Association adoptée. La FA avait proposé le même texte sans le mot « immédiatement ». La FA a retiré sa proposition en faveur de l’amendement de la Scottish FA. 70 « at that time » : à ce moment-là. 104

5.2. Protection de joueurs

La mission de protéger les joueurs n’est pas dans l’air du temps au début du XX e siècle. En 1914, le Board adopte la proposition de la Scottish Football Association, selon laquelle le jeu ne doit pas être stoppé pour un accident survenu à un joueur. L’arbitre doit en effet attendre, que le ballon soit sorti du terrain, pour faire évacuer le joueur blessé en dehors de la ligne de but ou de touche la plus rapprochée. Ensuite, il fait reprendre le jeu 71 . La possibilité d’interrompre immédiatement le match ne sera adoptée que 10 ans plus tard, en 1924 72 , et uniquement pour des joueurs sérieusement blessés. Dans ce cas le joueur doit être aussitôt évacué du terrain. A partir de 1938 73 et jusqu’en 1997, un joueur peut recevoir des soins directement sur le terrain de jeu. Cette intervention sur le champ de jeu sera abandonnée en 1997 74 , dans une logique de lutte contre le gaspillage de temps. Aujourd’hui, les officiels d’une équipe entrent sur le terrain de jeu avec l’autorisation de l’arbitre, seulement dans le but de diagnostiquer une blessure – non de la traiter – et d’organiser l’évacuation du joueur. Si le jeu est arrêté, le joueur blessé est prié de retrouver ses esprits en dehors de l’aire de jeu. Si son évacuation est nécessaire, elle se fait, dans le football de haut niveau, le plus rapidement possible, en voiture électrique ou avec la civière. Cette procédure permet logiquement de ne pas aggraver la blessure réelle. Pour décourager les joueurs qui simulaient une blessure, le Board, en 2002 75 , a précisé d’une part que l’arbitre devait s’assurer que le joueur blessé quittait réellement le terrain de jeu, et d’autre part n’autoriser ce joueur blessé à revenir sur le terrain qu'une fois le jeu repris. La mission d’assurer la sécurité des joueurs est également préventive. L’arbitre a le pouvoir d’exclure le joueur brutal ou violent, et donc de l’empêcher d’avoir une nouvelle possibilité de blesser un joueur. Il protège aussi les autres joueurs de contamination éventuelle par le sang. La loi oblige depuis 1997 76 , tout joueur présentant une blessure ouverte, qui saigne, à être soigné hors du terrain. La vérification des équipements des joueurs participe également à la prévention des blessures. Depuis 1897 77 l'arbitre devait, si on le lui demandait, examiner les souliers des joueurs avant le commencement d'un match. A partir de 1898, il est

71 Réunion du Board de 1914 : Loi 13. Décision (d). 72 Réunion du Board de 1924 : Loi 13 décision (d) : Si dans l'opinion de l'arbitre un joueur a été sérieusement blessé, il arrêtera la partie fera transporter le joueur hors du terrain aussitôt que possible et fera reprendre le jeu. Si un joueur est légèrement blessé, la partie ne sera arrêtée que lorsque le ballon aura cessé d'être en jeu. 73 Réunion du Board de 1938 : Loi XII Proposition de la Football Association of Wales adoptée : « … Un joueur capable de se rendre jusqu'à la ligne de but ou la ligne de touche ne pourra recevoir des soins sur le terrain de jeu ». 74 Réunion du Board de 1997. 75 Réunion du Board de 2002 : Proposition FIFA adoptée. 76 Réunion du Board de 1997. 77 Réunion du Board de 1897. 105 tenu de le faire. Cette obligation est rappelée par le Board en 1997 78 : l’arbitre en coopération avec ses arbitres assistants, devra inspecter les crampons des joueurs à la sortie du couloir entre les vestiaires et le terrain, quand ils sont prêts à pénétrer sur le terrain pour commencer le match. En fait, dans un souci sécuritaire, l’arbitre s’assure que l’ensemble de l’équipement des joueurs satisfait aux exigences de la loi IV. Il tente de prévenir les blessures éventuelles causées par des crampons non conformes, et vérifie le port des protège-tibias qui permet au joueur d’éviter certaines douleurs ou traumatismes.

5.3. Rapport de l’arbitre

A l’origine, en 1889 79 , le referee devait prendre note de ce qu’il observait pendant le match. Le Board précise, en 1903, que l’arbitre doit remettre aux autorités compétentes un rapport consignant les informations relatives à toute mesure disciplinaire qu’il a prise à l’encontre de joueurs et/ou d’officiels, ainsi que tout autre incident survenu pendant le match. A partir de 1935 80 , il est obligé d’établir un rapport, dans le cas d'une mauvaise conduite d'un joueur ou de plusieurs joueurs préalablement au coup d'envoi. La procédure s’étend donc progressivement aux événements qui se déroulent avant, pendant et après le match. Elle concerne en premier lieu les joueurs et progressivement l’ensemble des acteurs d’un match. En 1889 81 , dans le cas d’une exclusion l’arbitre a le devoir de transmettre le nom ou les noms de ce ou de ces joueurs à leur association nationale, laquelle sera entièrement en droit d'accepter une excuse ! Il lui est demandé en 1921, dans tous les cas où une partie aura été définitivement interrompue, de faire un rapport sur les raisons qui l'ont fait agir, au comité compétent qui statuera suivant le cas. A partir de 1967 82 , l’arbitre devient le véritable rapporteur de tous les événements concernant le match de près ou de loin. En effet, il doit adresser un rapport sur toute mauvaise tenue ou écart de conduite de la part des spectateurs, des officiels, des joueurs, des remplaçants inscrits ou de toutes autres personnes. Il est en outre précisé que les incidents peuvent se produire sur le terrain de jeu ou à proximité, et se dérouler soit avant, pendant ou après le match considéré.

78 Réunion du Board de 1997. 79 Réunion du Board de 1889 : Il prendra note aussi de ce qui se passe et remplira les fonctions de chronométreur. 80 Réunion du Board de 1935 : Décision du 8 juin 1935 81 Réunion du Board de 1889. 82 Réunion du Board de 1967 : Décision 5.04. 106

Le Board considère que le rapport doit être envoyé dans les meilleurs délais, dans les trois jours en 1903 après les incidents puis dans les deux jours (dimanche non inclus) en 1969. Cette dernière décision fut prise pour conformer le texte du Board au Guide Universel des Arbitres. Ce rapport est obligatoire, rédigé sur papier et lors de sa réunion de 1910, le Board décide qu'il est effectif quand il a été reçu en courrier ordinaire. Ce rapport reste aujourd’hui un élément déterminant, comme la feuille de match, pour juger des événements lors d’une commission disciplinaire ou d’appel.

5.4. Coaching

Il n’est pas autorisé par le règlement avant la fin du XX e siècle. Il est légalisé en 1993 83 avec la décision numéro treize : l'entraîneur peut désormais communiquer des instructions tactiques à ses joueurs durant le match. La loi précise que le coach, comme les autres officiels, doit rester à l'intérieur des limites de la surface technique, lorsqu'il y en a une, et adopter en toutes circonstances une conduite responsable. A partir de 1994, dans la loi I concernant le terrain, cette surface est obligatoirement délimitée par des pointillés. L’entraîneur est confiné dans cet espace restreint, invité à s’y tenir tranquille et surveillé de près par le 4 ème arbitre. Il lui est recommandé de se rasseoir sur le banc, après avoir donné ses consignes.

5.5. Protection juridique le l’arbitre

La protection juridique des arbitres est questionnée à la fin du XX e siècle. Lors de sa réunion de 1994 84 , le Board accepte qu’une clause soit insérée dans la réédition de the Universal Guide. Il est précisé que les arbitres ne devraient pas être tenus légalement responsables pour toutes les décisions prises dans la poursuite de leur mission définie sous la loi V, même s’ils sont les autorités responsables du football. Il semble désormais nécessaire de prendre des mesures pour protéger les arbitres contre tous les types de plaintes auxquels ils sont exposés. Suite à la proposition de la FIFA, le Board adopte en 1995 une nouvelle décision concernant la responsabilité civile des arbitres. « Un arbitre (ou le cas échéant, un juge de touche ou un quatrième officiel) ne peut pas être tenu responsable, de quelque blessure que ce soit subie par un joueur, un officiel, ou un spectateur ; ou d’un dommage à

83 Réunion du Board de 1993 : Décision 13 : Amendement de la Scottish Football Association adopté. 84 Réunion du Board de 1994 : Proposition de la FIFA adoptée. 107 quelque type de propriété que ce soit ; ou de quelque perte que ce soit encourue par une personne physique, un club, une compagnie, une association ou tout organe similaire consécutif – ou pouvant être consécutif – à une décision prise conformément aux lois du jeu ou selon la procédure normale requise, pour interrompre un match, le disputer ou le contrôler ». Le Board précisera en 1995 85 huit types de décisions susceptibles d’être prises par l’arbitre, pour bien montrer que dans tous les cas sa responsabilité n’est pas engagée. Il serait intéressant de vérifier si ce texte fait force de loi devant des tribunaux civils.

6. Sanctions liées à cette loi

L’arbitre a le pouvoir de sanctionner en avertissant ou en excluant le joueur fautif. Dès la réunion de 1889, le Board donne les modalités de telles mesures disciplinaires. Dans le cas où l'un des joueurs se conduirait de façon inconvenante 86 sur le fait de n'importe quelle contestation, le ou les coupables seront, en présence des umpires , avertis. Si cette offense est répétée ou même en cas de violence, sans avertissement préalable, l'arbitre a le pouvoir réglementaire d'exclure du jeu le ou les fautifs. Nous montrerons avec la loi XII 87 que les possibilités de sanctionner les joueurs se sont sans cesse accrues depuis 120 ans. Depuis 1903 88 , les arbitres doivent également réprimer rigoureusement toute infraction de la part des dirigeants de clubs ou des spectateurs. Il peut aussi destituer un arbitre de touche. Le Board précise, en 1902 89 , que dans le cas d'interférence excessive ou de conduite inappropriée d'un juge de touche, l'arbitre devra avoir le pouvoir de l'exclure du terrain et de lui désigner un remplaçant.

85 Annexe n°39, p. 132 : 1995 : Loi V : Legal Liability of Referee. 86 Ungetlemanly conduct. 87 Cf. Loi XII, chapitre 12 : Les fautes et incorrections. 88 Décision du Board du 14 décembre 1903. 89 Réunion du Board de 1902. 108

7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

En 1930, la Scottish Football Association a formulé une demande pour que l’arbitre soit responsable de tout le jeu à la condition qu’il puisse voir de n’importe quelle position du champ de jeu la totalité du terrain de jeu. Cette question concerne les conditions de visibilité des arbitres pour diriger le match, en cas de brouillard par exemple. Cette proposition fut rejetée. Aujourd’hui, la loi impose à un assistant situé au point de corner de pouvoir distinguer le drapeau de coin opposé dans le sens de la diagonale. En 1963 90 , les Écossais souhaitaient dans le cas de conditions météorologiques défavorables, que l’arbitre ou l’officiel spécialement délégué, soit seul juge pour décider si le terrain était praticable ou non. Cette question de l’autorité responsable se pose toujours. Il n’est pas possible aujourd’hui pour un arbitre, de « casser » un arrêté municipal décrétant la fermeture d’un terrain. La raison évoquée est économique, avec comme justification les coûts d’entretien et de rénovation des espaces verts de plus en plus élevés. En revanche, l’arbitre peut prendre la décision de ne pas commencer le match, ou de l’arrêter s’il juge le terrain impraticable, par exemple si le ballon ne rebondit plus.

8. Expérimentations

Le double arbitrage, deux arbitres qui officient dans les matchs de la Football Association, est abordé lors de la réunion du Board de 1935. Cette expérience fut menée en 1935 lors de deux matchs à Chester et à West Bromwich, et selon Eisenberg & Co : « les résultats ont été décevants» 91 . Cette expérimentation semble avoir tourné court car lors de sa réunion en 1937 92 , le Board refusa l'utilisation de deux arbitres dans un match en août 1937 et lors de trois matchs de la saison 1937 et 1938. Plus de 60 ans plus tard, en 1999 93 , la FIFA a demandé la possibilité d’une nouvelle expérimentation pour diriger un match avec 2 arbitres et deux arbitres assistants. Le Board a accepté, en imposant que cette expérimentation se déroule dans la plus haute division d’une association nationale. La FIFA a choisi la fédération italienne, et la Coupe d' Italie pour cette utilisation simultanée de deux arbitres de champ. En 2000, le Board a autorisé que cette expérimentation soit reconduite en Italie, au Brésil et dans une autre association nationale. Un rapport, a été commandé et exposé en 2001 dans le

90 Réunion du Board de 1963 : Proposition de la Scottish Football Association retirée. 91 Eisenberg, C., & Co. (2004), op. cit., p. 131. 92 Réunion du Board de 1937 : Demande d’expérimentation de la Football Association refusée. 93 Réunion du Board de 1999 : Items of discussion. 109 meeting suivant, avec une conclusion sans appel : l’expérimentation n’a pas produit suffisamment de résultats positifs, et le Board se prononce pour l’abandon de l’expérimentation. Nous pouvons noter que le Board utilise les mêmes précautions plus d’un demi-siècle plus tard, pour empêcher toutes les dérives possibles concernant les modifications des lois du jeu. Ainsi en 1935, le Board autorise l’expérimentation des deux arbitres, mais précise qu’aucune modification de règles ne peut intervenir avant son accord préalable. Et en 1999, il n’omet pas de rappeler aux fédérations nationales qui expérimentent ce type d'arbitrage qu’il ne peut être mené dans un match sans autorisation écrite préalable de la FIFA.

9. Analyse systémique

Pour diriger le match, l’arbitre coopère avec ses assistants (Loi VI), à l’aide d’un code gestuel très précis. Cette communication se double aujourd’hui d’une communication verbale avec l’introduction au haut-niveau des oreillettes. Cette loi VI est en interaction avec toutes les autres lois, car la mission première de l’arbitre est de faire appliquer les lois du jeu. Il est devenu l’acteur principal du jeu, et porte une tenue qui permet de le distinguer du premier coup d’œil.

10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Des tenues spécifiques, des sifflets et des signaux sont utilisés par les arbitres dans tous les sports collectifs. Les signaux se différencient d’un sport collectif à l’autre car la logique interne de chaque activité repose sur des règles spécifiques. « La moulinette » du basket n’a pas de sens au rugby, où il est possible de courir avec le ballon, et encore moins au football ou il est interdit d’utiliser ses mains ! A son origine la Rugby Football Union en 1871 utilisait comme au football un duo arbitral désigné par les capitaines d’équipe, les umpires. Des 1874 94 , la Rugby Union désigna un arbitre supplémentaire pour superviser le match. Il obtient à partir de 1880, le pouvoir de sanctionner les fautes. Pour le premier match international en 1881 95 , la partie était arbitrée selon cette procédure. L’arbitre neutre au milieu du terrain fera son apparition en 1882, lors

94 Tous arbitres. (2010). Paris, Chroniques-Mediatoon Licensing SA., pp. 39-40. 95 A Edimbourg, le 27 mars 1881 : Écosse – Angleterre : 2-1. 110 du match Angleterre-Écosse. Le referee est également le « seul juge des faits et sans appel »96 . Il est symptomatique de constater que les joueurs ne viennent pas discuter avec l’arbitre. Le règlement ne le tolère pas : « Il est interdit aux joueurs de discuter les interprétations de l'arbitre » 97 . Le fait qu’ils soient pénalisés par la règle dite « des 10 mètres», les en dissuade assurément. Pour la clause de l’avantage, l’arbitre indique la faute et laisse le jeu se poursuivre. Contrairement au football, il reviendra même plus de 15 secondes plus tard à la faute initiale, si l’avantage n’est pas profitable. Le double arbitrage est utilisé dans les sports collectifs de « petit terrain » au basket-ball et au handball. Au volley-ball, le premier arbitre se positionne sur la chaise, et lr second au sol de l’autre côté du terrain. Les arbitres sont en dehors du terrain, comme les umpires et le referee au football dans les années 1880. Il n’existe pas de corrélation entre la grandeur du terrain, et le nombre d’arbitres utilisés. Le nombre utile dépend de facteurs divers : la vitesse du ballon, le temps pour celui-ci d’atteindre la cible, la difficulté à apprécier le contact autorisé, la densité des joueurs sur une surface de terrain donnée... L’arbitre au football est responsable d’une étendue considérable de gazon, et cette gestion implique un athlète en forme physique. Dans les surfaces de réparations, quand la densité des joueurs est très importante comme sur un terrain de basket, cela devient plus complexe et l’aide d’un assistant et des juges de surface peut s’avérer judicieuse. Au football, l’arbitre est un élément neutre du jeu, le jeu se poursuit si le ballon touche l’arbitre, même juste avant de pénétrer dans le but. Le règlement du football rugby de 1920 lui donne un statut « d’intouchable ». En effet, l’article 30, précise que « Si le ballon ou le porteur du ballon viennent à toucher l'arbitre, le ballon est mort et une mêlée est faite à ce point »98 .

Synthèse Les notions de fair-play et de gentlemen's agreement accompagnent la naissance des sports collectifs dans les public schools britanniques. Ces valeurs sont remises en cause, pa r l’intrusion de l’arbitre au cœur du terrain de jeu à la fin du XIX e siècle. Pour Franck Annese

96 Saint-Chaffray, E. & et Dedet, L. (1920). Football (Rugby). Paris, Armand Colin. Réimpression en 1999 Revue « E.P.S. » Collection: Archives et mémoire de l'éducation physique et du sport, p. 103. 97 Ibid., p. 103. 98 Ibid., p. 103. 111 et Jean Damien Lesay 99 , l’apparition du referee peut s'analyser comme une tutelle imposée au peuple, « une violence symbolique »100 , comme si le peuple ne pouvait, à l'inverse de la noblesse, s’auto-discipliner. Le pouvoir glisse progressivement des capitaines aux umpires , puis aux arbitres. Ces derniers deviennent les maîtres incontestables du jeu, et la figure emblématique des sports modernes : « pas de match sans arbitre ». En cas de nécessité, le speaker du match lance un appel en direction des tribunes pour en trouver un ! En football, la place de l’arbitre est depuis 1891, au centre du terrain, mais il est aussi depuis son apparition au cœur des polémiques et des contestations. Un article de Football Word 1938 déclare que l'arbitrage est l'un des problèmes du moment. Les mêmes préoccupations sont à la une des journaux de France Football et de l'Equipe en 2008. Nous pouvons par exemple retenir les propos de Denis Chaumier dans son éditorial de France Football du 1er avril 2008 « Et nous pouvons bien sûr comprendre que, le spectacle s’accommodant d'une part de mystère, l'arbitre éprouve dans l'exercice de sa fonction le besoin d'une certaine distance et refuse de se livrer au moindre commentaire. Mais, en même temps, il nous paraît tellement vital de renouer le contact, de dialoguer, de causer et de s'expliquer, de s'ouvrir. Et, surtout, de se remettre en cause ». Il n’est pas certain que le spectacle sportif se nourrisse de mystère, mais les explications de l’arbitre ne sont pas inscrites dans les lois du jeu. Le Board ne demande pas aux arbitres d’expliquer les règles sur le terrain, mais d’utiliser le langage universel des signaux pour diriger le match. Les fonctions de l’arbitre sont multiples, il est le directeur du jeu, le maître du temps, le protecteur des joueurs mais aussi pour Stanley Rous « le véritable gardien de l'esprit du jeu »101 . Le statut du referee est complexe. Il peut être considéré comme l’acteur principal d’un spectacle, et à ce titre endosser le statut d’artiste : « En exerçant son art (le terme n'est pas excessif) de façon judicieuse et non rigoureuse, il démontre sa classe »102 . Mais étrangement cet artiste est considéré s’il est invisible, si l’on ne parle pas de lui. Un point de vue corroboré par les arbitres eux-mêmes qui répètent à l'envie qu'un bon arbitre est « un arbitre qu'on ne voit pas »103 . La problématique actuelle est de savoir, comment ce statut, au mieux invisible, au pire négatif peut se transformer en statut positif pour ce professionnel, travailleur indépendant 104 au XXI e siècle. Il est souvent déconsidéré, ne doit pas faire d’erreur. Pourtant, l’arbitre a aussi le droit de se tromper; et même de revenir sur sa décision, tant que

99 Annese, F. & Lesay, J-D. (2007), op. cit., p. 13. 100 Concept introduit par Pierre Bourdieu. 101 Eisenberg, & Co. (2004), op. cit., p.142. 102 L’entraîneur français. (1959). L'avantage. « Lorraine football », 73. 103 Annese, F. & Lesay, J-D. (2007), op.cit., p. 23. 104 En France, la loi du 23 octobre 2006 a fait des artistes du sifflet des travailleurs indépendants. 112 le jeu n’a pas repris. Au milieu de l’arène, au milieu des joueurs, André Maurois le compare dans la première moitié du XX e siècle à un héros des temps modernes : « Je me souviens d'un temps où arbitrer en France certains grands matches qui soulevaient de sauvages passions était un acte d'héroïsme »105 .

105 Maurois, A. (1949) Discours 1888-1949. Jubilé du football français. 113

1 Chapitre 6 Loi VI : les arbitres assistants ______

« Les oranges poussent en Espagne et en Italie. En Hollande, elles…volent. Au moment où j’élevais mon drapelet, pour signaler un hors-jeu contre l’équipe hollandaise, une nuée d’oranges volèrent dans ma direction ». John Langenus 2

1. Loi actuelle

L’ancienne dénomination « juges de touche » apparaît en 1891 et correspond à la disparition des umpires . L’appellation actuelle « arbitres assistants » date de 1996. Ce changement identitaire, précise à tous leur fonction essentielle : ils assistent l’arbitre central. Ils sont au nombre de deux et désignés avant le match. Ils se déplacent le long des lignes de touche, sont munis de drapeaux et ils aident l'arbitre à contrôler le match en application des lois du jeu. Le tableau suivant synthétise par ordre d’apparition chronologique, la liste des devoirs des arbitres assistants.

Dates Les arbitres assistants ont pour mission de signaler : 1891 Quand le ballon est entièrement sorti du terrain de jeu. 1891 A quelle équipe revient la rentrée de touche, ou s’il y a coup de pied de coin ou coup de pied de but. 1904 Quand un comportement répréhensible ou tout autre incident est survenu en dehors du champ de vision de l’arbitre. 1982 Quand un remplacement est demandé. 1996 Quand un joueur doit être sanctionné parce qu’il se trouve en position de hors- jeu. 2000 Quand les fautes sont commises lorsque les arbitres assistants sont plus près que l’arbitre de l’action (y compris, exceptionnellement, toute faute commise dans la surface de réparation). 2000 Quand, lors de tirs de coups de pied de réparation, le gardien de but a bougé avant que le ballon n’ait été botté et si le ballon a franchi la ligne.

1 Law VI – Assistant referees . Ils succèdent en 1996 aux « linesmen », dont la traduction est multiple : juges de ligne, juge de touche, arbitres de ligne ou arbitres de touche. 2 Langenus, J. (1943), op. cit., p. 53. 114

Le premier assistant possède également une mission spécifique. Il a la responsabilité de la procédure de remplacement, sauf en cas de présence d’un 4 ème arbitre. En effet, depuis 1991, le quatrième arbitre a fait son apparition dans les lois du jeu. Sa fonction est d’assister l’arbitre à tout moment. Il doit signaler à l’arbitre un joueur averti à tort, un joueur non exclu alors qu’apparemment il a reçu un second carton jaune, un acte de brutalité survenu en dehors de son champ de vision et de celui de ses assistants. L’arbitre peut déjuger, et prendre une décision contraire à celle indiquée par son assistant, ou l’avis du quatrième arbitre, car il conserve l’autorité pour décider sur toutes les questions relatives au jeu.

2. Principes de cette loi

Contrairement aux umpires qui sévissent jusqu’en 1891, il est recommandé aux arbitres de touche d’être neutres. Cependant, chaque club en choisit un et le place sous la responsabilité de l’arbitre. Ils doivent soudainement ne plus prendre parti…et tenter d’être impartiaux. Cette procédure est identique, aujourd’hui, dans la plupart des plus basses divisions de district. Pour tous les matchs internationaux, le Board décide, en 1899, que des juges de touche neutres doivent officier. Cette pratique se diffuse lentement, d’abord pour les matchs de l’élite, et ensuite pour les autres matchs. Ainsi la version française du règlement de l’IFAB en 1909 3 précisait que dans le cas où un juge de touche ou de but ne s'acquitte pas convenablement de ses fonctions, soit par suite de partialité, d'incapacité soit pour tout autre motif, l'arbitre peut le renvoyer du jeu et choisir un remplaçant. Dans tous les matchs importants, il est désirable que les juges de touche ne fassent partie d'aucun des deux clubs en présence. Le principe de solidarité n’est pas une loi écrite, et il ne figure pas dans les archives du Board. Mais l’arbitre n’est pas toujours considéré comme un partenaire du jeu, et le soutien des assistants est fondamental. A l’opposé, l’adage « diviser pour mieux régner » s’adapte aux joueurs. Un trio en désaccord est perçu comme une faille potentielle dans l’application des lois du jeu, et donne naissance chez les joueurs à des contestations plus importantes. La communication est essentielle dans le trio, qui sera d’autant plus performant, si les personnes qui le constituent ont l’habitude de contrôler le match ensemble. Le quatrième arbitre, fait naturellement partie de cette équipe, et dans le cas où il soumet un rapport aux autorités

3 Règlement de 1909 : Article 25 : Note B. 115 compétentes, il doit au préalable en informer ses partenaires. Une véritable équipe, qui se renforce numériquement avec les deux juges de surface, introduits à titre expérimental depuis 2009, en Europa League, puis en Champions League.

3. Historique de la loi

A l’origine, les juges de touche n’existaient pas. Les umpires font leur apparition au milieu du XIX e siècle. Ils sont mentionnés dans le règlement d'Eton en 1847, avec pour mission de surveiller les buts, qui n'ont pas encore de filets. A partir de 1849 à Cheltenham, les capitaines désignent les umpires . Chacun représente une équipe, se positionne au bord, puis à l’intérieur du terrain. Pendant ce temps, le referee reste sur le bord du terrain, ou dans la tribune. Cette configuration est appliquée en 1872 lors de la première édition de la Football Association Cup et du premier match international. A l’époque, les joueurs par l’intermédiaire du capitaine demandaient la faute, chaque équipe pouvait donc faire appel à un umpire , qui intervenait uniquement sur les points de discussion. Lorsque les deux umpires ne parvenaient pas à trouver un terrain d'entente, ils en référaient à l'arbitre, le « referee ». A la veille de la première réunion du Board en 1886, les arbitres de touche n’existaient toujours pas.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

4.1. Les umpires deviennent des juges de touche. Les umpires semblent questionner dès le départ le Board . Lors de sa réunion de 1889, il précise que toute interférence excessive de la part d'un umpire doit être rapportée par l'arbitre à l'association nationale auquel appartient l' umpire . Deux ans plus tard, en 1891, suite à la proposition de la Football Association, l’IFAB. décide de supprimer les postes des umpires. En fait, suite aux nombreux problèmes que posait le double arbitrage, au début des années 1890, le referee passe des tribunes au centre du terrain repoussant les deux umpires sur les lignes de touche. Ces derniers changent de statut et d’appellation, ils deviennent les juges de touche. Ils ne sont plus autorisés à se mouvoir sur le terrain, et doivent se déplacer le long de la ligne de touche. Ainsi en août 1891, le trio arbitral tel que nous le connaissons aujourd'hui était déjà formé.

116

4.2. Evolution des compétences des assistants. Dans un premier temps, le règlement précise en 1891, que leur devoir est de décider à quel endroit le ballon est sorti du terrain et, à quel camp revient le droit d’effectuer la touche, le corner ou le coup de pied de but. En 1897 4, ils décident également si le ballon est sorti du jeu soit en but, soit en touche… Ce pouvoir « de décision » peut être considéré comme un abus de langage. Ils restent sous la responsabilité de l'arbitre qui peut déjuger le juge de touche, sans même aller discuter avec lui. Cette mission de décider est permanente dans les lois du jeu, de 1891 au début des années 1960. La réunion du Board de 1961 précise leur fonction au travers d’un Mémorandum sur la coopération entre les arbitres et les juges de touche. La loi est modifiée, et le devoir de « décider » laisse la place à celui « d’indiquer » quand le ballon est sorti du jeu et aussi « d'indiquer » à quelle équipe revient, le coup de pied de coin ou le coup de pied de but. Conformément à la loi du jeu numéro V, l’arbitre est réellement le seul à décider. Paradoxalement leur mission semble se développer. Le Board stipule en 1904 5, que les juges de touche, quand ils sont neutres, doivent attirer l'attention de l'arbitre sur les cas de jeu brutal ou de conduite inconvenante et, d'une manière générale, aider l'arbitre à appliquer toutes les règles de jeu d'une façon correcte. Ils ne sont donc pas juste là pour indiquer les sorties du ballon, mais bien pour coopérer avec l’arbitre. Ils sont les collaborateurs 6 de l'arbitre, et le Board, en 1982 7, précise qu’ils aideront également l'arbitre à contrôler le jeu en application des lois. Cette même année une nouvelle mission leur est attribuée, celle de signaler quand un changement est désiré par une équipe 8. En 1996, une nouvelle dénomination de la loi est adoptée, et ils deviennent les arbitres assistants. Une modification logique, car leur rôle n’est pas restreint uniquement à la sortie du ballon au-delà de la ligne de touche. La mention « Ils assistent l'arbitre dans l'application des règles de jeu », était déjà présente dans les lois du jeu en 1897 9. Avec cette nouvelle appellation, le Board en profite également pour préciser de nouveau l’ensemble de leur

4 Réunion du Board de 1897 : ART. 13 : Deux juges de touche (linesmen) doivent être désignés, avec la fonction, (sous réserve cependant de confirmation par l'arbitre), de décider quand le ballon est sorti du jeu, soit en but, soit en touche et quel camp a droit au coup de pied de coin, de but ou à la rentrée en touche. 5 Réunion du Board de 1904. 6 C’est le terme retenu dans le règlement de 1977 mise à jour par la Commission Régionale des Arbitres de la ligue du Nord de football. Leclerc, L. et Van De Veegaete, C.H. (1977). L'arbitre Edition 1977-1978. 7 Réunion du Board de 1982 : Nouvelle formulation de la loi proposée par la Scottish Football Association, adoptée par le Board. 8 Réunion du Board de 1982 : Proposition de la Scottish Football Association adoptée. 9 AGM of 1897. Art 13 : « …and to assist in carrying out the game according to the laws ». 117 mission 10 . Il est stipulé que le juge de touche doit signaler, sous réserve de décision de l'arbitre, un comportement antisportif ou tout autre incident ayant échappé à la vision de l’arbitre. Cela ressemble à une reformulation de la décision énoncée en 1904. Mais beaucoup plus surprenant, une nouvelle mission apparaît : signaler à l’arbitre « quand un joueur doit être sanctionné pour sa position de hors-jeu ». En effet, les archives du Board laissent sous silence cette responsabilité fondamentale depuis 1891 ! L’importance du rôle de l’assistant sera encore renforcée en 2000 11 . A partir de cette date, il aura également pour mission de signaler une infraction commise à chaque fois qu'elle se situe plus proche de lui, que de l'arbitre (y compris, exceptionnellement, toute faute commise dans la surface de réparation), et si, à l'occasion d'un penalty, le gardien s'est avancé avant le tir dans le cas où le but est manqué. Mais il est aussi stipulé que les arbitres assistants aident l'arbitre à veiller à l'application des lois du jeu, une formule qui résume l’évolution des devoirs et compétences des assistants.

4.3. Les déplacements et la position des arbitres assistants.

En 1891, les umpires qui évoluaient sur le terrain, sont repoussés en dehors de celui-ci, et deviennent de simples linesmen . Ces nouveaux juges de touche se déplacent uniquement sur le bord des lignes de touche. Ils sont responsables de toutes les sorties du ballon de leur côté du terrain. Il faut les imaginer se déplacer d’un bout à l’autre du terrain. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, leur zone d’évolution est réduite de moitié, et sur leur gauche face au terrain, ils s’arrêtent à la ligne médiane. Nous pouvons avancer deux explications complémentaires pour justifier cette limitation. La première est liée à l’évolution de la loi du hors-jeu (Loi XI). Quand les juges de touche apparaissent en 1891, le hors-jeu se juge sur l’antépénultième défenseur, et il est logique de penser que le linesman tente de suivre cette ligne, imaginaire, flottante. Mais à partir de 1907, un joueur ne peut plus être hors-jeu dans sa propre moitié de terrain, et si sa mission prioritaire est d’apprécier le hors-jeu, alors progressivement ses déplacements vont s’arrêter à la ligne médiane. La seconde explication concerne la mise en place progressive du système de contrôle en diagonale. Ce système apparaît juste avant la seconde guerre mondiale, et il devient obligatoire en 1970. Cette procédure illustre parfaitement la coopération entre l’arbitre et les assistants, pour permettre à l’un des trois de couvrir au plus près n’importe quelle zone du terrain. A partir du moment où l’assistant

10 Réunion du Board de 1996 : Proposition de la Scottish Football Association adoptée. 11 Réunion du Board de 2000 : Proposition FIFA adoptée. 118 s’arrête à la ligne médiane, l’arbitre central prend le relais. En 2000 ils peuvent notamment entrer sur le terrain pour aider au contrôle de la distance de 10 yards (9,15 m.). Le fait de les autoriser à rentrer sur le terrain pendant le match, pour la première fois depuis 1891, est un signe fort de la part du Board pour montrer aux joueurs et au public que l’arbitrage est réellement réalisé par ce trio.

4.4. Mission prioritaire de l’assistant : signaler à l’arbitre « quand un joueur doit être sanctionné pour sa position de hors-jeu ».

Même si cette fonction n’apparaît qu’en 1996 dans les lois du jeu, la mission est inscrite depuis 1974 dans le mémorandum sur la coopération entre les arbitres et les juges de touche, et intégrée à la formation des juges de touche. Le Board le confirme, car les modifications de la loi en 1996, sont motivées par deux raisons. D’une part le texte précédent ne faisait pas mention de ce devoir, le plus important pour la performance des arbitres assistants. Et d’autre part l’objectif est d’encourager les juges de ligne à être conscients de leur responsabilité pendant le match pour garantir que les bonnes décisions soient prises. Les arbitres de touche, sont devenus des juges de hors-jeu. L’expertise est complexe : en se déplaçant, voir à la fois le ballon et l’avant-dernier défenseur 12 ; ensuite apprécier au départ du ballon la position des attaquants en fonction de cette ligne flottante, symbolisée par les déplacements de l’avant dernier-défenseur. La concentration doit être maximale, pour une prise d’information instantanée, ce qui rend la performance délicate. Le déplacement sur le seul demi-terrain de l’arbitre de touche, confirme sa mission prioritaire, la surveillance du hors-jeu. La circulaire de la FIFA de 1998 13 , confirme cette analyse. « Lors d'une rentrée de touche au bénéfice de l'équipe défendant, l'arbitre assistant, qui a pu aller indiquer le point de sortie si cela c'est avéré nécessaire, doit donner la priorité à la surveillance du hors-jeu en allant se placer le plus rapidement possible à la hauteur de l'avant-dernier défenseur».

4.5. Introduction d’un quatrième arbitre. La paternité de cette idée d’un quatrième arbitre est souvent attribuée à Ken Aston 14 , et il apparaît pour la première fois dans les archives du Board en 1991. En effet, le rôle du 4 ème

12 La règle du hors-jeu fut modifiée en 1925, avec une ligne de hors-jeu qui s’apprécie dorénavant sur l’avant dernier défenseur et non plus sur l’antépénultième. 13 Circulaire FIFA. Juillet 1998 : Circulaire 6.05 : Positions des arbitres assistants sur la rentrée de touche. 14 Aston Ken, arbitre anglais du match Italie-Chili lors de la Coupe du monde 1966, qualifié de « Bataille de Santiago ». Il est l’inventeur des cartons jaunes et rouges en 1968. Cet ancien arbitre deviendra ensuite président du comité arbitral de la FIFA. 119 arbitre est accepté suite à la demande de la Scottish Football Association et inclus dans « the Universal Guide of Referees ». La décision numéro sept de la loi VI lui donne naissance : « Quoique le quatrième officiel n’a pas de statut dans les lois du jeu, ses fonctions seront d’assister l’arbitre à tout moment ». Le statut sera progressivement défini, et sa présence recommandée par le Board dès 1999 15 pour les matchs de l’élite. Sa mission fondamentale, d’assister l’arbitre à tout moment, sera confirmée en 1995 16 . A partir de 1996 17 , après le match il doit soumettre aux autorités compétences, un rapport sur tous les comportements antisportifs ou les autres incidents qui auraient échappé à la vision de l’arbitre et des arbitres assistants. Cette responsabilité ressemble fort, à celle du referee , placé en tribune entre 1886 et 1890, qui devait noter ce qui se passait au cours du match. Sa mission se complète en 1999 18 , une tâche dévolue au premier assistant lui revient. En effet, il a autorité pour contrôler l'équipement des remplaçants avant qu'ils n'entrent sur le terrain et le devoir d’en informer l’arbitre si leur équipement n'est pas en conformité avec les lois du jeu. Il a également, depuis 1999 19 , autorité pour signaler à l'arbitre un comportement irresponsable de la part de toute personne présente dans la surface technique. Depuis 1995, le Board conseille de délimiter cette surface qui intègre le banc de touche, mais ce qu’il y est autorisé ou non de faire fait débat. Même le roi Pelé 20 s’est exprimé en 2005 21 sur le rôle du quatrième arbitre : « Certains pensent qu'il ne devrait plus avoir comme fonction de surveiller les entraîneurs. Mon opinion personnelle est que si un périmètre leur est réservé, ils sont libres d'y faire ce qu'ils veulent. Certains aiment communiquer et donner de la voix, d'autres sont plus calmes. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de leur dire de retourner s'asseoir sur le banc. On estime parfois que le coach a trop de pouvoir. Je pense qu'à partir du moment où il reste dans son rectangle et ne fait pas preuve d'agressivité déplacée par ses paroles ou son comportement, il n'y a aucune raison d'intervenir ». La zone proche des bancs de touche est une zone sensible, une zone d’influence, où la tension monte parfois et où naissent les problèmes. Ce qui peut expliquer que le quatrième arbitre soit parfois très pointilleux sur les règles à respecter dans la surface technique.

15 Réunion du Board de 1999 : Sur une Proposition de la FIFA, le Board décide qu’« il est en outre recommandé aux fédérations nationales de désigner un quatrième arbitre pour les matchs de l'élite dans des compétitions organisées par elles ou par leurs ligues ». 16 Réunion du Board de 1995 : Décision 7 modifié : La 4ème arbitre devra assister l’arbitre à tout moment. 17 Réunion du Board de 1996 : Proposition de la Scottish Football Association adoptée : Nouvelle Décision 8. 18 Réunion du Board de 1999 : Amendement soumis par la Scottish Football Association adopté. 19 Réunion du Board de 1999 : Amendement soumis par la Scottish adopté: Nouveau point. 20 Edson Arantes do Nascimento dit Pelé. Il a été trois fois champion du monde 1958, 1962 et 1970 avec le Brésil et a marqué plus de 1200 buts dans sa carrière. 21 Fair-play : l'interview de Pele (FIFA.com) 29 mars 2005. Agence Reuters. 120

D’autres missions incombent aujourd’hui au quatrième arbitre. Il doit officier si l'un des trois officiels désignés pour le match n'est pas présent ou en mesure de poursuivre , assister l’arbitre dans tous les devoirs administratifs, superviser les remplacements de ballon qui sont demandés, s’assurer que tout joueur saignant, qui a quitté le terrain, ne puisse y revenir tant que le saignement persiste et seulement au signal de l’arbitre. Sa position lui permet de posséder une vision d’ensemble, de porter un regard extérieur au jeu et logiquement de conserver une lucidité plus grande. Il doit donc être en mesure d’indiquer à l'arbitre si un joueur reçoit un avertissement suite à une mauvaise identification ou si un joueur n'est pas exclu après un second avertissement ou s'il se rend coupable d'un acte de brutalité en dehors du champ de vision de l'arbitre et des arbitres assistants.

5. Décisions du Board liées à cette loi

Le drapeau constitue l’équipement indispensable de l’arbitre assistant. Son existence est antérieure mais, il est mentionné pour la première fois dans les archives du Board en 1938 22, et à partir de cette date, il revient au club sur le terrain duquel le match est joué de fournir les drapeaux des juges de touche. Même si aucune précision sur la couleur n’est donnée, le rouge et le jaune semblent progressivement s’imposer. La décision 6.3 dans le règlement actuel le confirme : Pour les matchs inter-nations, les drapeaux de touche devraient être de couleurs vives, notamment le rouge et jaune . De tels drapeaux sont également recommandés pour tous les autres matchs. Au XXI e siècle, ces deux couleurs sont associées, sous forme de damier, et l’utilisation de ce type de drapeaux semble se généraliser.

6. Sanctions liées à cette loi

L’arbitre de touche peut être destitué par l’arbitre central depuis 1902 23 . En effet, dans le cas d'interférence excessive ou de conduite inappropriée d' n juge de touche, l'arbitre aura le pouvoir de l'exclure du terrain et de lui désigner un remplaçant. C’est ce que fit par exemple, John Langenus lors du match entre FC Liégeois et Daring au cours de la saison 1912-1913, car l’arbitre de touche était tout aussi virulent que les supporters 24 !

22 Réunion du Board de 1938 : Loi XIV. Proposition de la Football Association of Wales adoptée. 23 Réunion du Board de 1902. 24 Hubert, C. (1974). Les hommes en noir : Tout le football belge t.4, éd. Arts et voyages, Bruxelles, p. 19. 121

Cette liberté sera confirmée en 1981 25 même si le Board pense qu’il serait extrêmement difficile pour l’arbitre de destituer les officiels d’un club lors un match joué dans un parc public. Mais il a absolument l’autorité de le faire. Si les contrevenants refusent d’exécuter cette requête, l’arbitre peut abandonner le match si une telle solution est souhaitable.

7. Expérimentations

. La question des juges de but est évoquée pour la première fois lors de la réunion du Board de 1893. M. Reid de l’ Irish Football Association souhaite que des juges de but soient désignés sous l'autorité de l'arbitre pour décider si le ballon est passé entre les poteaux. Cette proposition sera rejetée et le dossier clos pour plus d’un siècle, ce qui peut s’expliquer par l’obligation d’installer des filets de but en 1895. Il est étrange de trouver, dans la traduction française du règlement de l’International Board en 1909, la mention des juges de but. L’article 25, précise que l’arbitre pourra s'adjoindre des juges de but dont le rôle sera de juger les sorties sur la ligne de but. Il est aussi stipulé en note (B) de bas de page : « Les juges de touche peuvent être interrogés par l'arbitre et déclarer que d'après leur opinion un but a été fait ». Il est possible de supposer qu’une certaine liberté a été prise, avec les traductions successives, ou que des coutumes propres à un pays, sont introduites accidentellement ou volontairement. Dans le cas des juges de but, il s’agit d’une pratique réelle. Jean-Philippe Réthacker et Jacques Thibert 26 nous apprennent que lors de la finale de la Coupe de France en 1921 27 , l’arbitre M Slawick était assisté de 2 juges de touche …et deux juges de but. Les auteurs se posent même la question en 1974, de savoir pourquoi a-t-on abandonné ces quatre adjoints pour n’en conserver que deux. La réponse est simple, cette possibilité n’est pas mentionnée dans les lois du jeu, et le Board a déjà refusé en 1893, cette proposition. Les juges de but refont leur apparition en 2009. Ils représentent une alternative humaine, à l’introduction de la vidéo, pour laquelle les expérimentations deviennent impossibles. Par contre, le Board autorise de tester l’arbitrage à cinq, une idée défendue par M. Platini, le président de l’UEFA, car cette solution privilégie l’aspect humain. Dans un premier temps cette expérimentation a été menée en Europa Ligue pour la saison 2009-2010, et dans un second temps dans la reine des compétitions interclubs la Ligue des Champions

25 Réunion du Board de 1981. Suite à une demande d’opinion de la Football Association of Wales. 26 Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 76. 27 Finale de la Coupe de France, le 24 avril 1921 au Stade Pershing : Red Star – Olympique de Paris : 2-1. 122 pour l’édition 2010-2011 28 . Les juges de but se tiennent en dehors du terrain, derrière la ligne de but, à gauche de la cible. Ils portent un maillot d’arbitre, mais à la différence des arbitres assistants, ils ne possèdent pas de drapeau et restent en pantalon de survêtement. Le Board n’a pas souhaité qu’ils aient des drapeaux, car ils ne doivent pas prendre de décision, mais seulement faire part de leurs observations aux autres arbitres via le système audio 29 . Leur rôle ne s’arrête pas seulement à confirmer ou infirmer, si le ballon a réellement dans sa totalité franchi la ligne de but. Ils surveillent aussi les fautes commises dans la surface de réparation. Ces paires d’yeux supplémentaires concurrencent la seule caméra vidéo fixée sur la ligne de but.

8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Il existe une similitude de fonction entre les arbitres assistants au football et au Rugby, avec en priorité la mission de signaler les sorties de ballon en touche et de désigner avec son drapeau quelle équipe en bénéficie. Au basket-ball, handball, il n’existe pas d’arbitres assistants, qui se déplacent sur les lignes de touche. Dans ces sports la table de marque est tenue par un officiel désigné par la fédération de Basket Ball, qui a quelques fonctions similaires à celles du quatrième arbitre au football. Au volley-ball, les deux arbitres sont assistés par quatre juges de lignes immobiles, qui s’apparentent plutôt à ceux du tennis, avec pour mission de juger si le ballon rebondit dans le terrain ou au delà de la ligne. La vitesse du projectile les focalise sur cette mission unique.

Synthèse Les devoirs et les compétences des anciens juges de touche, devenus les arbitres assistants se sont largement développés depuis 1891. Le constat est identique, en ce qui concerne le quatrième arbitre depuis 1991. Ils coopèrent, selon des procédures précisément établies et sont devenus des véritables collaborateurs de l’arbitre central, qui garde toutefois l'autorité de décider sur tous les faits en relation avec le jeu.

28 La demande d’expérimentation pour les éliminatoires de l’Euro 2012 a été refusée par le Board en juillet 2010. 29 Les micro-oreillettes ont été lancées en 2003 en Ligue 1. 123

La mission de l’arbitre assistant est fondamentale, car une position de hors-jeu se joue à quelques dizaines de centimètres près. Sa responsabilité est engagée, et sa prise d’information est déterminante pour stopper ou laisser se poursuivre le jeu. Il n’a pas accès au ralenti et doit prendre une décision très rapidement, pour signaler, ou non, le hors-jeu si le joueur concerné touche le ballon, ou fait réellement action de jeu. Lever le drapeau peut avoir une influence directe sur le résultat d’un match, où les scores sont souvent serrés. Lors de la Coupe monde de 1990 en Italie, de nombreux problèmes liés aux hors-jeu apparaissent. Pour remédier à cela, un corps spécifique d’arbitres de touche est nommé pour la Coupe du monde aux Etats- Unis en 1994. Cette spécialisation des rôles qui persiste aujourd’hui est une véritable révolution dans la pratique polyvalente. Une évolution technologique est aussi à noter dans les 20 dernières années. Comme dans les pelotons de cyclisme, l’oreillette 30 a fait son apparition, et la coopération instantanée de l’équipe d’arbitres est grandement facilitée par cet outil. L’assistant n’est pas en permanence dans le champ de vision de l’arbitre, et pour signaler un hors-jeu, il lui est possible d’appeler l’arbitre, ou de le bipper à l’aide de son drapeau de touche. Ce dernier est aussi conçu dans un souci de visibilité, avec des couleurs vives. Sa matière glisse progressivement du bâton en bois avec toile de coton, vers des matériaux synthétiques aux couleurs fluorescentes.

30 Oreillette : 124

Chapitre 7 Loi VII : La durée de la partie 1 ______

« Ainsi, dans un match de football, où chaque mètre du terrain et chaque seconde de sa durée peuvent être déterminantes, mais dont il est impossible de prévoir quel sera ce mètre ou quelle sera cette seconde…» Albert Batteux 2

1. Loi actuelle

La partie dure quatre-vingt-dix minutes, répartie en deux mi-temps de quarante-cinq minutes. Chaque période doit être prolongée, à la discrétion de l’arbitre, pour récupérer le temps perdu lors des arrêts de jeu. Ces derniers sont chronométrés, et généralement occasionnés par le nombre de remplacements, l’examen des blessures des joueurs, le transport des joueurs blessés hors du terrain de jeu, et les manœuvres visant à perdre du temps délibérément. D’autres causes, peuvent conduire l’arbitre à stopper temporairement son chronomètre : panne d’électricité, orage, intrusion sur le terrain, bagarre entre joueurs…

2. Principes de cette loi

2.1. Un temps mesuré La temporalité distingue nettement les jeux, dont la durée peut être aléatoire ou dépendre du temps d’une récréation, des sports institutionnels codifiés précisément par des lois du jeu. Les jeux peuvent s’éterniser, comme le relate Vladimir Dimitrijevic. « Nous tapions le ballon toute la journée, les dimanches d'été de six heures du matin à huit heures du soir » 3. Dans le football le dépassement du temps n’est pas permis, toute négociation se révèle impossible. Nous retiendrons comme premier principe, selon la formulation de Tunmer et Fraysse, que « La durée de la partie est fixée d'avance » 4. La durée du match est incompressible, un match arrêté définitivement avant son terme doit être rejoué, sauf disposition contraire édictée dans le règlement de la compétition.

1 Law VII – Duration of the game . 2 Batteux, A (1974) Préface. In Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 8. 3 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., pp. 86-87. 4 Tunmer , N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit., p 76. 125

2.2. Un temps de repos

La formule littéraire de Henri de Montherlant 5 « les jambes courageuses, qui courent et frappent pendant six quarts d'heure,.. », est ambiguë. Le temps n’est pas divisé en six unités classiques de « quart d’heure », mais en deux séquences de jeu égales séparées par une mi- temps. Les joueurs ont droit à une seule pause, d'un quart d’heure, pendant laquelle les équipes sont autorisées à retourner aux vestiaires. A la reprise, elles doivent changer de camp, avant de reprendre le jeu.

2.3. Arbitre, maître du temps

Il assure la fonction de chronométreur 6 ; le temps est de sa responsabilité, « à la discrétion de l’arbitre ». Il le mesure avec un chronomètre ou selon John Langenus « … s ur une quelconque montre de poche que l’on fixait au poignet dans un bracelet de cuir »7. Il n’existe pas de table de marque, seuls ses assistants peuvent le renseigner, et particulièrement le quatrième arbitre depuis son apparition en 1991. Contrairement au basket-ball, le temps de jeu n’est pas effectif, le chronomètre ne s’arrête pas à chaque fois que le ballon sort du terrain ou le jeu interrompu. Néanmoins, depuis 1921 8 l'arbitre doit tenir compte du temps perdu accidentellement ou pour tout autre motif. Il possède, seul le pouvoir d'arrêter le jeu. Le Board précise, en 1888 9, qu’il peut le stopper pour une raison justifiée, et aussi longtemps qu'il semble nécessaire de le faire, mais aussi en 1889 10 pour cause d'obscurité, d'intervention des spectateurs ou pour tout autre motif.

3. Historique de la loi.

Pour les sports, les règles définissent plus ou moins précisément la durée de la partie en fonction, soit d’un temps chronométré, soit d’un nombre de points marqués, de manches ou de sets à gagner. Bertrand During 11 a montré que la mesure du temps et de l’espace différencie les jeux des sports. En ce qui concerne le football, la partie commence et prend fin au signal

5 Montherlant, H. (1954), op. cit., p. 101. 6 Réunion du Board de 1889 : Article 12. Proposition de la Football Association : Il prendra note aussi de ce qui se passe et remplira les fonctions de chronométreur. 7 Langenus, J. (1943), op. cit., p. 16. 8 Réunion du Board de 1921. 9 Réunion du Board de 1888 : Nouvelle loi 15. 10 Réunion du Board de 1889. 11 During, B. (1984). Des jeux aux sports. Paris, Vigot. 126 donné : le temps détermine la durée de la partie. À Winchester, le règlement de 1847 indique que l'un des umpires doit posséder une montre et appeler la mi-temps et la fin du match. Le temps aléatoire du jeu, se transforme en temps mesuré dans le sport. Comme d’autres règles, la durée de la partie est discutée et négociée avant le match. Le règlement de la Football Association, l’année de sa création en 1863 reste mystérieusement silencieux sur ce point. C’est à partir du moment où les matchs se jouent en dehors des cercles de proximité et où les clubs de Londres, rencontrent fréquemment ceux de la région de Sheffield, que les choses évoluent. En effet, la Football Association et la Sheffied Association mirent au point, en 1877, un règlement uniforme prévoyant notamment qu'une équipe se composerait de onze joueurs et que le match durerait une heure et demie. La durée de la partie était donc actée avant la première réunion du Board en 1886. A cette époque, en Cup par exemple, ce n’est plus l’un des umpires qui chronométrait le match, mais le referee qui se tenait sur la ligne de touche. Concernant le changement de camp, l’article 3, du règlement de 1863, précisait : « Chaque équipe devra changer de côté à chaque but gagné »12 . La formule est aussi présente dans l’ouvrage de Tunmer et Fraysse 13 «…à la mi-temps les camps changent de côté et aussi quand un but a été gagné ». Cette règle semble donc subsister jusqu’à la fin du XIX e car cette œuvre fait référence en France.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

4.1. La durée de la partie est définitivement fixée. Le chiffre de 90 minutes apparaît dans les archives du Board, lors du compte rendu de la réunion de 1897 14 . Il est précisé que la durée de la partie devra être de 90 minutes, à moins d'accord contraire. Cette logique de s’accorder sur les règles, pratique courante à la fin du XIX e siècle, sera de moins en moins tolérée. La durée du match est une permanence, et sera par exemple rejetée en 1960 15 la proposition de réduire le temps de jeu avec un accord préalable, même dans le cas où les règles de la Ligue ou de la compétition l’autoriseraient. La possibilité de réduire le temps de jeu, par les fédérations, ne sera accordée que dans les compétitions féminines, vétérans et de jeunes, en fonction de la catégorie d’âge 16 .

12 Les 14 lois originelles du jeu parues dans le journal sportif Bell’s Life. Cité en version originale par Eisenberg. C., & Co. (2004), op. cit., p. 20. Cf. annexe n°65, p. 167. 13 Tunmer & Fraysse, (1897), op. cit., p. 76. 14 Réunion du Board de 1897. 15 Réunion du Board de 1960 : Proposition de la Football Association retirée. 16 Cf. annexe n° 21, p. 76 :1997 : Minutes of the Annual Meeting, p 4. 127

Cette durée est incompressible et le match doit se dérouler entièrement. John Langenus 17 souligne à propos du match Argentine-France en 1930 à Montevideo : « Finalement, la France fut battue par 1-0 ... l’arbitre siffla la fin cinq minutes plus tôt. (…) La police montée dut intervenir vivement lorsque l’arbitre constata son erreur et rappela au jeu les joueurs déjà entourés d’admirateurs déjà enthousiastes ». Malgré la ferveur, l’arbitre a permis au match de se dérouler entièrement, comme le prévoient les lois du jeu. Dans le cas d’un match arrêté définitivement avant son terme, le Board envisage en général de le rejouer complètement 18 , sauf disposition contraire édictée dans le règlement de la compétition. Mais deux autres solutions sont autorisées par le Board . D’abord, si les règles de la compétition concernée le prévoient, depuis 1959 19 , le résultat au moment de l’arrêt le match, peut être entériné. Ensuite, il est envisagé de ne pas rejouer le match complètement et de le reprendre là où il s’était arrêté. C’est le cas de figure retenu en Liga Espagnole. Le 5 janvier 2005 20 le Real de Madrid obtient une victoire face à la Real Sociedad dans une partie de six minutes. Le match avait été interrompu à la 84 ème minute sur un score de parité, un but partout, trois semaines auparavant pour cause d'alerte à la bombe dans le stade Santiago Bernabéu.

4.2. Allongement du temps de jeu effectif et lutte contre le gaspillage de temps La question de la perte de temps semble abordée pour la première fois en 1909 21 : il est demandé à l'arbitre de suspendre le match, pour du temps perdu, accidents ou toute autre cause d'interruption. Le Board semble d’abord se focaliser sur le gaspillage de temps, causé par les blessures de joueurs. Ainsi, entre 1921 et 1927, le Board conseillait de porter le joueur blessé immédiatement en dehors de la ligne de but ou de touche la plus rapprochée, pour reprendre le jeu le plus rapidement possible. Cette attention, sur le gaspillage du temps ressurgit dans la dernière partie du XX e siècle, avec un football de moins en moins prolifique en but. Dans les années 1960, l’avènement du Catenaccio , un système de jeu ultra défensif se caractérise par la volonté de ne pas encaisser de but. Le fait de réduire le temps de jeu effectif, est un moyen de répondre à l’objectif visé par cette tactique. Le risque de prendre un but, est amoindri si la durée effective est écourtée. Il devient avantageux, de truquer le match, de

17 Langenus, J. (1943), op. cit., p. 195. 18 Réunion du Board de 1959 : Décision 7.01. 19 Réunion du Board de 1959 : Proposition de la Football Association of Wales adoptée. 20 Real de Madrid-Real Sociedad : Stade Santiago Bernabéu, le 5 janvier 2005. Match repris à la 84 e minute sur le score de 1-1. Score final 2-1 But de Zidane sur Penalty. 21 Réunion du Board de 1909 : Proposition de la Football Association (M.Crump) adoptée. 128 simuler une blessure, de sortir le ballon loin du jeu, de retarder les reprises en jeu… Ces dérives tentent d’utiliser les lois du jeu, ou la tolérance des arbitres dans leur application pour arriver à cette finalité. Le Board est interpellé sur ces questions deux années de suite. D’abord lors de la réunion de 1978, quand la Football Association of Wales entame une discussion sur le problème du temps de jeu. Le Board sensibilisé par le problème, propose que soit étudié le temps réel du jeu. Puis en 1979, la FIFA attire l’attention des associations nationales et des arbitres FIFA sur les abus par détournement des lois, qui se répandent et notamment sur les tactiques de perte de temps adoptées par les gardiens de but. Mais, la loi VII ne sera modifiée qu’en 1987 22 . Dans le cadre de la durée de la partie, il est précisé qu’il convient de tenir compte pour chaque période des pertes de temps occasionnées par les remplacements, l’évacuation des blessés, et les autres facteurs favorisant le gaspillage de temps. Le Board précise que le total retenu à ajouter, reste à la discrétion de l’arbitre. Cette recommandation et cette modification de la loi, ne semblent pas avoir réellement eu beaucoup d’impact. Lors de la Coupe du monde en 1990 23 , la situation devient alarmante, le temps de jeu effectif moyen est de 54 minutes et 58 secondes (61%), et le nombre moyen de buts inscrits en phase finale n’a jamais été aussi faible (2,2 buts en moyenne par match 24 ). A partir de cette date, la tendance va s’inverser. En 1998, le temps de jeu effectif enregistré lors de la Coupe du monde est de 62 minutes et 32 secondes. En 8 ans, sur un match de 90 minutes, le temps de jeu réel augmente de 61% à plus de 69%. L'hypothèse d'une meilleure préparation physique constitue peut-être un facteur pertinent, mais ce sont surtout les modifications des lois du jeu et les directives de la FIFA pour limiter les temps morts dans le match qui semblent avoir joué un rôle déterminant. Le Board va, en premier lieu, lutter contre les gaspillages du temps par le gardien de but. Lors de la réunion de 1990, une discussion amorcée par la Scottish Football Association en fin de réunion porte sur cette préoccupation, et le Board demande l’étude du problème à l’Editorial Commitee. Deux ans plus tard, la loi sera modifiée. Il sera décidé d’interdire au gardien de capter, d’une part en 1992 une passe bottée par un de ses partenaires, et d’autre part en 1997, une touche effectuée par un coéquipier. La même année, la règle des six secondes est adoptée, forçant le gardien à relancer avant ce temps limite, pour ne pas être sanctionné par un coup-franc indirect dans sa propre surface de réparation. Ces règles

22 Réunion du Board de 1987 : Loi VII. 23 Coupe du monde 1990, au Mexique. 24 Cf. annexe n°74, p. 180. 129 n’influencent pas directement le temps de jeu réel, car le ballon est toujours considéré en jeu dans les bras du gardien. En revanche, elles favorisent la fluidité du jeu, et augmentent le nombre de possessions de ballon et d’actions de jeu. Le Board donne, en 1996 25 , des instructions précises pour encourager l’augmentation du temps réel de jeu 26 . D’abord, il devient possible d’utiliser plusieurs ballons de match, et de les placer autour du terrain pour permettre leur renvoi rapide par les ramasseurs de balle. Ensuite, le Board recommande d’accélérer la procédure de remplacement des joueurs, car les équipes peuvent en profiter pour « casser » le rythme de la fin de match, avec un joueur remplacé qui quitte tranquillement le terrain en marchant. Enfin, les arbitres doivent accélérer la reprise du match suite à un but marqué. Un dernier levier est utilisé pour augmenter le temps de jeu effectif : les arrêts de jeu. En effet, la circulaire de la FIFA en 1997, insiste sur ce point, le temps additionnel doit être systématiquement joué et indiqué par le quatrième arbitre. Il ne s’agit pas d’une modification de la loi, car dés 1886, l’arbitre est le responsable du temps de jeu et il peut ajouter à chaque période le temps qu'il estimera avoir été perdu par suite d'accident ou pour tout autre motif. Cet ajout manquait d’objectivité et un arbitre qui voulait siffler au bout de 45 minutes pouvait le faire. A partir de 1987 27 , les critères sont précisés et le règlement stipule qu’il convient de tenir compte pour chaque période des pertes de temps occasionnées par les remplacements, l’évacuation des blessés, le gaspillage de temps ou pour tout autre motif. Le total retenu étant à la discrétion de l’arbitre 28 . L’ajout des arrêts de jeu qui restait à l'appréciation de l'arbitre central, n’était pas systématiquement réalisé. Avec le quatrième arbitre, qui se concentre sur cette mission, la loi est appliquée avec davantage d’objectivité, d’une façon plus transparente et chaque période est prolongée pour récupérer le temps perdu. La lutte contre les manœuvres pour hacher le jeu, et gaspiller du temps, s’est accentuée depuis les années 1990. Mais cette logique répond à une préoccupation permanente de conserver la continuité et d’augmenter la fluidité du jeu. Le Board 29 est d’avis que si l'arbitre siffle constamment des fautes insignifiantes ou douteuses il énerve les joueurs, provoque de la mauvaise humeur de leur part et gâte le plaisir des spectateurs. Dans l'esprit des lois du jeu les matchs doivent être joués avec aussi peu d'arrêts que possible et, dans ce but, il est du

25 Réunion du Board de 1996 : Proposition de la Scottish Football Association. 26 Actual Playing Time . 27 Réunion du Board de 1987 : Proposition FIFA adoptée. 28 The first meeting of the international Football Association Board of 1886 : The amount of which shall be a matter for the discretion of the referee. 29 Réunion du Board de 1960. 130 devoir de l'arbitre de ne pas sanctionner les infractions involontaires. Le Board en 1960 30 , imposera aux arbitres de ne pénaliser que les infractions à la Loi commises délibérément. Dans la même optique il est conseillé à l’arbitre d’appliquer la règle de l’avantage : « La lettre et l'esprit de la Loi XII n'obligent pas l'arbitre à arrêter la partie pour donner un avertissement »31 .

4.3. Prolongement de la partie Nous avons vu que la durée de la partie était de 90 minutes, avec éventuellement l’ajout des arrêts de jeu à chaque fin de période. A la fin de ce temps additionnel, l’arbitre doit siffler la fin du match. La seule exception concerne le coup de pied de réparation. Le règlement stipule depuis 1899 32 , que si cela est nécessaire le temps de jeu doit être prolongé pour permettre l'exécution du penalty. Cette loi sera précisée en 1938 33 , en spécifiant que cette mesure concerne aussi bien la première mi-temps que la fin du match. Au-delà du temps réglementaire, si le score est la parité, il est possible de prolonger la partie : « S'il y a lieu, on la prolonge, après accord des adversaires ou décision d’un arbitre »34 . En effet, pour départager les équipes et déterminer les vainqueurs, le règlement prévoit des prolongations. Cette question n’est abordée qu’en 2004 dans la loi VII. Le Board précise alors, que le règlement des compétitions peut prévoir de jouer une prolongation de deux périodes égales ne dépassant pas 15 minutes chacune. Le Board semble donc fixer une limite à ne pas dépasser, mais le règlement de chaque compétition garde le choix, de les disputer, ou de raccourcir leur durée. Dans nos recherches, nous avons retrouvé des temps de prolongation divers. Par exemple en 1895 35 , lors de la demi-finale du championnat France entre les White Rovers et le Standard, les équipes se départagent en deux fois dix minutes. Le règlement de 1905 36 , en France prévoit une première prolongation de deux fois 15 minutes, puis si le score est encore nul une seconde identique. Enfin, après deux heures trente de match, si les équipes sont encore à égalité, alors, le match doit être reporté à une date ultérieure ! Aujourd’hui, depuis la circulaire 5.13 de la FIFA de Juillet 1998, quand il est

30 Réunion du Board de 1960 : Proposition de la FIFA adoptée. 31 A.G.M. of 1970 : Proposal by FIFA adopted : « The letter and spirit of Law XII do not oblige the referee to stop the game to administer a caution. He may, if he chooses , apply the advantage clause ». 32 Réunion du Board de 1899. 33 Réunion du Board de 1938 : Proposition de la Football Association of Wales adoptée. 34 Caillois R. (1958), op. cit., p. 37. 35 Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 40. En mars 1895, lors de la demi-finale du championnat de France les White Rovers battent le Standard 2 buts à 1, après une prolongation de deux fois dix minutes ! 36 Weber, E. (1905). Sports Athlétiques. 2 ème édition. Paris, Garnier Frères, p. 162. 131 nécessaire d’avoir recours aux prolongations les deux équipes bénéficient d’un repos de cinq minutes sur le terrain, sans possibilité de retourner aux vestiaires.

4.4. Durée de la pause entre les mi-temps

Il est décidé lors de la réunion du Board de 1897, que l'arrêt à la mi-temps ne pourrait dépasser cinq minutes, à moins d'autorisation de l'arbitre. Il est possible d’envisager, une certaine laxité, prise avec le règlement. En effet, dès 1905, Edouard Pontié 37 évoque dans le règlement en usage en France, une suspension du milieu du jeu qui ne doit pas dépasser dix minutes, à moins que l'arbitre ne consente à accorder un temps plus long. Mais il faut attendre la réunion de 1974, pour voir une première proposition rejetée, de rallonger la pause de 5 à 10 minutes. La discussion, ressurgit en 1985. La FIFA suggère, alors, de modifier le second paragraphe de la loi 7 en spécifiant clairement qu’un intervalle de 15 minutes est permis. Le Board donne son accord pour que cet item soit étudié par l’ Editorial Board 38 . Mais la loi ne changera en définitive qu’en 1995 39 , soit 21 ans après la première proposition. Il est adopté que, la pause entre les deux mi-temps ne doit pas excéder 15 minutes. Le texte précise, d’une part que le règlement de chaque compétition devra clairement définir la durée de la pause entre les deux mi-temps, et d’autre part que cette durée peut seulement être modifiée avec le consentement de l’arbitre. Le Board , justifie ce changement de 1995, par le fait que le nouveau texte reflète de manière plus pertinente les besoins du football moderne!

5. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

La division du temps de jeu en quarts temps. Lors de la réunion de 1990, le Président de la FIFA explique l’historique qui a mené à l’idée d’avoir le jeu divisé en 4 périodes de 25 minutes. Le détail de cette explication ne figure pas dans les archives du Board, mais pour la Coupe du monde 1994 aux Etats Unis, les annonceurs voulaient pouvoir faire passer davantage de spots publicitaires. En fait, ils désiraient fonctionner en quart-temps pour coller au format de la National Basketball Association (N.B.A.), parfaitement rodée. Les membres du Board ne se sont pas laissés fléchir.

37 Pontié, E. (1905). Le football Association, in Les sports modernes illustrés, sous la dir. de P. Moreau & G. Voulquin. Paris,Larousse, p. 163. 38 Editorial Board 39 Réunion du Board de 1995 : Proposition FA, amendement Scottish FA adopté. 132

Le moment de siffler le terme des mi-temps de 45 minutes. La Football Association of Wales a proposé sans succès en 1938 40 d’attendre que le ballon ait cessé d'être en jeu pour siffler la fin du match. Cette proposition est conforme aux lois du jeu du rugby, le signal de fin et de mi-temps, ne peut être donné qu’à la condition que le ballon cesse d'être en jeu. Quand le temps est écoulé la cloche retentit et le match se prolonge jusqu’à la fin de l’action. Il suffit donc pour l’équipe qui mène au score de sortir le ballon du jeu pour mettre fin au suspense. Si un essai ou un coup franc vient d'être obtenu, l’arbitre prolongera la partie pour laisser donner la transformation ou la pénalité. Mais au football, quand le temps est écoulé, ballon en jeu ou non, sauf en cas de penalty 41 , l’arbitre renvoie tout le monde aux vestiaires.

6. Expérimentations

Un temps de jeu aléatoire. Pour départager, les équipes lors de la prolongation, une solution fut envisagée temporairement par la FIFA entre 1994 et 2004, qui nous pouvons donc considérer comme une véritable expérimentation. En juillet 1994, le Board 42 a proposé d’arrêter le match au cours de la prolongation après le premier but marqué. Contrairement à l’histoire du football, le match se termine au moment où un but est marqué… émotions garanties pour les deux équipes. Ainsi le vainqueur est désigné par une action de jeu, et non sur un tirage au sort, ou la loterie des tirs aux buts. Cette modalité semble donc acceptable pour les joueurs et pour le public. Le premier nom donné à cette règle, « la mort subite » a fait débat. Image forte…oui perdre comme cela, est sans doute considéré comme une mort symbolique 43 … les perdants s’écroulent aux quatre coins du terrain. Le sport offre, alors, le spectacle de « la mort jouée » selon la formule de Bernard Jeu. Pour lui « l'essentiel, néanmoins, réside dans le tragique. Le sport, c'est l'image de la mort affrontée par le vaincu »44 . Pour la première fois, la finale du Championnat d’Europe des nations de 1996 s’est jouée sur « la mort subite ». L’issue est favorable aux Allemands, qui battent la

40 Réunion du Board de 1938 : Proposition de l’ Association of Wales retirée. 41 Loi XIV : le coup de pied de but. 42 Réunion du Board de 1994. 43 Jeu, B. (1972). Le sport, la mort, la violence. Paris, éditions universitaires. Sur le plan symbolique il est possible de se référer à Bernard Jeu. Pour lui le sport moderne est au plan de l'imaginaire permanence car on y rejoue « inlassablement le scénario de la création du monde, tel que cette création était représentée dans les religions primitives». 44 Ibid., p. 120. 133

République Tchèque, 2 buts à 1 au cours des prolongations, au bout d’un match de 95 minutes 45. Un glissement sémantique s'opère avant le mondial de 1998, la « Mort subite », mots trop forts, à connotation médicale, et expression déplacée par rapport aux véritables victimes, se transforme en «but en or ». Le but de Laurent Blanc contre le Paraguay en huitième de finale fut le premier but en or de l’histoire de la coupe du monde. Durant cette période de 10 ans, sept matchs se sont terminés par un « but en or », en Coupe du monde et au Championnat d’Europe, dont trois inscrits par des Français 46 . Ce « but en or » est à comparer au « but vainqueur » vers la fin de la partie où il est décrété d’un commun accord que le prochain but, sera le but gagnant, dans tous ces petits matchs sur les terrains vagues, dans les cours d’école, ou lors des jeux d’entraînement ! Une pratique « sauvage », utilisée parfois en compétition. Par exemple, en mars 1895, lors du Championnat de France (élimination directe), l’arbitre avait décidé d’arrêter la partie au premier but marqué pendant la prolongation qui s’était engagée alors que la nuit était tombée. Le but de Neuilly a provoqué la réclamation des Asniérois ! En 2003, le « but en or » devint le « but en argent ». Le premier but marqué dans les prolongations n’arrêtait pas « subitement » le match, qui se poursuivait jusqu’à la fin de la première prolongation de 15 minutes. Si à ce moment une équipe menait au score alors le match se finissait, au bout de 105 minutes. Dans le cas contraire, une nouvelle prolongation de 15 minutes était jouée. Ce règlement fut appliqué par l’UEFA 47 à partir de 2003 et notamment pour l’Euro 2004 au Portugal 48 . Sans doute trop cruelle pour l’équipe perdante, la règle de la « mort subite », disparut de sa belle mort, avec la décision du Board du 27 février 2004 de supprimer « le but en or » et le « but en argent ». Les raisons de cet abandon ne sont pas explicitées par le Board, mais cette modélisation de victoire était paradoxale. Pierre Parlebas a déterminé quatre grandes catégories de jeux sportifs en fonction des caractéristiques de leur support de marque 49 : le jeu impose un score limite qui interdit le match « nul »; le jeu se déroule au temps-limite; le jeu combine le score et la durée limite; et le jeu n'impose aucune contrainte d'arrêt. Le football se joue depuis 1863

45 Allemagne - République Tchèque: (1-1) 2 buts à 1. But en or de d'Oliver Bierhoff à la 95 éme . 46 Mondial 1998: France - Paraguay: 1-0 But en or de Laurent Blanc à la 113 éme . Euro 2000 Demi-finale. France - Portugal: 2-1 But en Or de Zidane à la 117 éme . Euro 2000 Finale. France - Italie: 2-1 But en or de David Trezeguet à la 103 éme . 47 UEFA : Union des Associations Européennes de Football, fondée en 1954. 48 Lors de la seconde demi-finale de l'Euro 2004 le 1er juillet la Grèce élimine la République Tchèque 1-0 grâce au but en argent lors de la première période de la prolongation. But de la tête de Dellas au premier poteau (105 éme .). 49 Parlebas, P. (1999). Jeux, Sports et Sociétés. Lexique de praxéologie motrice. Insep, pp. 405-407. 134 au temps limite. Le but en or adopté par les lois du jeu entre 1994 et 2002, a fait basculer, pendant 8 ans au cours des prolongations, le football vers un jeu qui combine le score et la durée limite car le match s'achevait dès qu'un but était marqué. Un temps de jeu aléatoire, compris entre 90 et 120 minutes. L’utilisation des temps morts. La Fédération de Sao Paulo, avait souhaité en 1990, introduire un temps mort de 3 minutes par mi-temps. Le Board a autorisé, la FIFA à mener une expérimentation lors de la Coupe du monde féminine de 1995 en Suède, avec des temps morts d’une durée de 90 secondes par mi-temps. Cette expérimentation ne fut pas concluante, avec par exemple, seulement un tiers des temps morts possibles réellement utilisés. Lors de sa réunion annuelle de 1996, le Board prit la décision d’abandonner définitivement cette expérimentation. Dans cette logique, la demande faite en 2002 par l’atelier des 32 finalistes de la Coupe du monde d’introduire un « drink stop » à cause des conditions climatiques a été unanimement rejetée, par le Board .

7. Analyse systémique

La durée de la partie dépend de l’arbitre (Loi V), qui est considéré comme « le maitre du temps » et remplit les fonctions de chronométreur. Il collabore aujourd’hui avec le quatrième arbitre (LoiVI) pour déterminer le temps additionnel à ajouter à la fin de chaque mi-temps. Les joueurs qui gaspillent du temps de jeu effectif sont d’abord rappelés à l’ordre par l’arbitres puis sanctionnés par un avertissement (Loi XII fautes et incorrections). La durée de la partie est également en interaction avec le coup de pied de réparation (Loi XIV), la mi- temps est prolongée pour permettre son exécution. La durée de la partie peut également être liée au nombre de buts marqués (Loi X). Si le score est à parité à la fin du temps réglementaire, pour les matchs de coupe où la désignation du vainqueur est nécessaire, la partie est prolongée de deux fois 15 minutes et éventuellement suivie d’une séance de tirs au but 50 .

50 Cf. Chapitre 18 : Les tirs au but. 135

8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

La notion de temps de jeu n’existe pas au Volley-ball. La durée de la partie est dépendante d’un certain nombre de points marqués pour gagner des sets indépendants les uns des autres. Le jeu impose un score limite qui interdit le match « nul »51 . Pourtant selon l’étude de Patrice Fournier 52 , la question d’un jeu au temps, ou contre la montre, est une réflexion récurrente dans la revue fédérale de volley-ball. Il a répertorié des articles sur ce jeu au temps en 1947, 1954, 1959, 1968 et 1969! Le rugby se joue en deux mi-temps de 40 minutes sans temps mort. Les modalités de chronométrage sont identiques à celles du football. Le chronomètre ne s’arrête qu’exceptionnellement à l’inverse du basket qui se joue en deux fois minutes, ou en quarts temps de 12 minutes en N.B.A. avec une mesure du temps de jeu effectif. La table de marque stoppe le temps, à chaque faute, à chaque fois que le ballon n’est plus en jeu. Un « money- time » de 30 secondes, peut réellement durer 5 minutes ! En football, comme au rugby l’arbitre est le maître du temps. Le règlement du rugby en 1920 53 , précisait que l'estimation de l'arbitre au sujet de la durée du jeu était sans appel … même s'il s'était laissé aller à quelque négligence. L'arbitre est seul chronométreur et a le droit de prolonger la partie pour compenser des suspensions imprévues. En revanche, au basket les arbitres ne sont pas responsables du temps qui est géré à la seconde près par la table de marque. La préoccupation d’augmenter le temps de jeu effectif est commune, au football, au rugby et au handball. Par exemple pour ce dernier, dans l’optique d’une réelle accélération de la procédure de reprise du jeu à la suite d’un but marqué, une véritable modification de la règle a été adoptée. Ainsi il est aujourd’hui autorisé d’engager au milieu de terrain, même si les adversaires ne sont pas revenus dans leur propre camp. En 1925, selon Gaston Bénac 54 , le rugby a lui aussi subi quelques modifications de jeu qui paraissent devoir lui donner plus de vitesse et plus de variété. Ce changement concerne l'interdiction du coup de pied en touche hors des 22 m, au cours du jeu. « Trop de trucs avaient été trouvés pour paralyser le jeu, et la défensive avait fait, dans ces dernières années, plus de progrès que l'offensive, frappé de stérilité ». Selon Gaston Bénac, cette modification des règles se justifie pour donner au jeu plus de vitesse, plus de temps de jeu effectif, moins de temps morts. On retrouve donc la

51 Parlebas, P. (1999), op.cit., p. 405. 52 Fournier, P. (1997). Genèse du jeu de Volley-ball. Tentative de reconstitution des étapes qui ont jalonné cette genèse de 1940 à 1992. Villeneuve d’Ascq, Septentrion Thèse à la carte, p. 259. 53 Saint-Chaffray, E & et Dedet, L. (1999), op. cit., p. 106. 54 Bénac, G. (1925). Le Miroir des Sports , 281, Mercredi 30 septembre 1925. 136 même année (1925) au football les mêmes arguments pour la modification de la loi du hors- jeu, et la fin de « la règle des trois défenseurs ». La position de hors-jeu est dorénavant appréciée en fonction de la position de l’avant-dernier défenseur. La pratique de changer de camp après chaque but gagné en vigueur au XIX e siècle dans le football, est encore usitée en Ultimate. Aujourd’hui, au rugby, au handball, au basket-ball comme au football les équipes changent de camps à la mi-temps. En volley-ball, la procédure est différente, les équipes changent de camp, à la fin de chaque set, et quand une équipe atteint le score de huit points dans le dernier set. Au volley-ball, les pauses sont de 3 minutes entre les sets, sauf avant le dernier, la pause, dite « pause de publicité », est alors de 10 minutes sur la demande de l’équipe qui reçoit.

137

Synthèse Lors de la réunion en 1978, la Football Association of Wales engage la discussion du temps réel du jeu, et le Board confirme que l’arbitre est le seul gardien du temps 55 . Une augmentation sensible du temps de jeu effectif a été obtenue depuis 1990, en ajoutant systématiquement le temps additionnel et en positionnant des ballons tout autour du terrain. Cette augmentation fut une constante lors des 5 dernières Coupes du monde 56 . Les procédures de remplacement de joueurs pourraient être encore plus accélérées. La présence du quatrième arbitre, ne justifie plus la nécessité d’arrêter le jeu. Il est aussi envisageable, dans le money time d’interdire les changements. Il n’est pas certain du tout, que les remplacements effectués au-delà de la 85ème minute aient réellement un sens tactique. Le football se joue en deux périodes de quarante-cinq minutes. Il existe une permanence dans la durée et le découpage de la partie. Depuis 1886, le Board a réglementé les prolongations, un maximum de deux fois quinze minutes aujourd’hui, et les temps de pauses avant la seconde mi-temps ou la prolongation. Ces temps de pauses semblent influencés par des facteurs exogènes, liés aux sports spectacles et aux droits des télévisions. Les spots publicitaires doivent avoir la possibilité d’être diffusés pendant le spectacle.

55 The time keeper 56 Cf. Annexe n°74, p. 180 : Statistiques sur les buts marqués. 138

Chapitre 8 Loi VIII : Le coup d’envoi et les reprises du jeu 1 ______

« Ma nature, mon rêve d'être moi, c'est quand je suis concentré. Il y faut peu de chose, un match, un livre, une chose à faire. Le premier coup de sifflet de l'arbitre et le dernier pour un match, le commencement et la fin d'un livre ». Vladimir Dimitrijevic 2

1. Loi actuelle Le coup d’envoi, marque le début de la partie. Avant celui-ci, tous les joueurs se trouvent dans leur propre moitié de terrain et le ballon est posé à terre sur le point central. L’arbitre compte les joueurs, contrôle la présence des gardiens de but et de ses assistants. Il vérifie que tout le monde soit prêt à démarrer le match, et notamment que les joueurs de l’équipe ne procédant pas au coup d’envoi se tiennent au moins à une distance de 10 yards (9,15 m.) du ballon 3 tant qu’il n’est pas en jeu, c'est-à-dire hors du rond central. A partir de ce moment, l’arbitre donne le signal du coup d’envoi, et le ballon sera considéré comme étant en jeu dès qu’il aura été botté vers l’avant, dans la direction du camp adverse. Depuis 1997, il est possible de marquer directement sur cette mise en jeu. Par contre, l’exécutant du coup d’envoi ne peut jouer le ballon une seconde fois avant que celui-ci n’ait été touché par un coéquipier. Le coup d’envoi est également une reprise du jeu, au début de la seconde période et après chaque but marqué. Après la mi-temps, les équipes changeront de camp et le coup d'envoi sera donné par un joueur de l'équipe qui n'en a pas bénéficié au commencement de la partie. Pendant le match, à chaque fois qu’une équipe a encaissé un but, elle récupère le ballon pour procéder à un nouveau coup d’envoi. La balle à terre est également une procédure de reprise du jeu, dans le cas d’une interruption temporaire du match provoquée par une cause non prévue par les lois du jeu, alors que le ballon est sur le terrain. Pour reprendre la partie, l'arbitre laisse tomber le ballon à terre à l'endroit où il se trouvait au moment de l'arrêt de jeu. Aucun joueur ne pourra jouer le ballon avant que celui-ci ait touché le sol, le ballon sera considéré en jeu, au moment de l’impact sur le terrain. La balle à terre doit être recommencée si le ballon est touché par un

1 Law VIII – The start of play. 2 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 35. 3 La mesure exacte est de 10 yards. 139 joueur avant d’être entré en contact avec le sol, ou si le ballon quitte le terrain de jeu après avoir rebondi sur le sol sans qu’un joueur ne l’ait touché.

2. Principes de cette loi Le ballon est posé au centre du terrain, au centre de l’univers du jeu. Horst Breedekam 4, nous apprend que dans le football florentin, le milieu était signalé par un disque de marbre. Au football il peut s’agir, d’un point ou même d’un cercle. Contrairement au point d’engagement, le petit cercle, tracé à la craie ou au plâtre, à l’intérieur duquel on dépose le ballon n'est pas mentionné dans les lois du jeu. Pourtant ce petit cercle est fréquemment visible sur les photos d’archives dans les années 1930 et 1940 : par exemple pour le match France-Allemagne de 1935 au Parc des Princes 5, celui de 1939 entre le Racing et Arsenal 6 mais aussi sur la photo 7 du 30 septembre 1944 lors du match entre la France et l’armée britannique. Aujourd’hui il est matérialisé par un point central, de la taille de la circonférence du ballon, tracé à la « peinture ». L’arbitre pose le ballon sur ce point. L’anecdote de John Langenus, à propos du match Italie-Autriche de 1928 à Rome est savoureuse : « La balle fut déposée au centre du terrain, une demi-heure avant le coup de sifflet du début. Ce fut le signe du déclenchement de la guerre vocale 8 ». Tant que le ballon, n’est pas posé au centre, rien ne peut commencer. Le ballon est immobile, les joueurs dans leur camp, les arbitres en place, les spectateurs en dehors du terrain… l’univers est ordonné, la partie peut commencer. Le tirage au sort 9, le choix du camp, par principe, a lieu avant de débuter la partie. Pour Philippe Villemus 10 , le fait de lancer la pièce ( toss), signifie s’en remettre au hasard, c'est à dire aux Dieux. Le football se joue à l’extérieur et subit les aléas des conditions météorologiques, et du dieu Eole. Pour Roger Caillois « Dans les rencontres sportives, l'exposition, le fait d'avoir le soleil de face ou de dos ; le vent qui aide ou qui gène l'un des deux camps ;… , constituent le cas échéant autant d'atouts ou d'inconvénients dont l'influence n'est pas forcément négligeable »11 . Il n’est pas anodin de commencer contre le vent, ou avec le soleil de face, en sachant que les conditions peuvent varier une heure plus tard. .En effet la

4 Breedekam, H. (1995. Le Football Florentin. Les jeux et le pouvoir à la Renaissance. Paris, Diderot Editeur, arts et sciences, p 199. 5 Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 157. Match du 17 mars 1935. France-Allemagne. Score : 1-3. 6 Delaunay, P. De Ryswick, J. Cornu, J. (1983). 100 ans de football en France. Edition Atlas, p. 144. 7 La légende indique que le coup d’envoi est donné par le général Koenig, « le signal de la renaissance ». 8 Langenus, J. (1943), op. cit., p. 167. 9 Tos s : tirage au sort 10 Villemus, P. (2006), op. cit. 11 Caillois R. (1958), op. cit., p. 52. 140 micro-météo permet en un point précis des prévisions assez fines et fiables Dans un sport où l’égalité des chances doit être au maximum respectée, le règlement atténue ces inconvénients : « On annule ou on tempère cet inévitable déséquilibre par le tirage au sort de la situation initiale, ensuite par une stricte alternance de la position privilégiée »12 . En effet au football, à la fin de la première période, les équipes changent de camp, pour un temps en général équivalent de 45 minutes. Le tirage au sort symbolise, la part de l’aléatoire, du hasard. Dans sa théorie élargie des jeux, Roger Caillois évoque cette combinaison de l’aléa (le hasard), et l’âgon (la compétition). Dans cette alliance « qui préside au monde de la règle, l’aléa et l’âgon expriment des attitudes diamétralement opposées à l’égard de la volonté »13 . Dans le tirage au sort, les joueurs adoptent une attitude totalement passive. En effet, « l’aléa apparaît comme une acceptation préalable, inconditionnelle du verdict du destin »14 . La loi VIII débute par l’expression « At the biginning of the game, … », rappelant à tous que le football est avant tout un jeu.

3. Historique de la loi. L’article 2, du règlement de la Football Association de1863, précise que le jeu débute par un coup de pied placé 15 donné du centre du terrain par le camp qui aura perdu le tirage au sort. Ce coup de pied est défini en 1863 : il s’agit d’un coup de pied dans le ballon lorsqu'il est au sol, quelle que soit la choisie pour le frapper. Les joueurs de l’équipe adverse ne peuvent approcher à moins de 10 yards du ballon tant que le coup n'a pas été donné. L’article 3 16 stipule qu’après un but marqué, on change de côté, et que l'équipe battue remet en jeu par un engagement ( kick off ).

12 Ibid., p. 52. 13 Ibid., p. 155. 14 Ibid., p. 155. 15 Coup de pied placé : Place Kick . Definition of term : A place kick is a kick at the ball while on the ground, in any position in which the Kicker may choose to place it . Cette définition est donnée par la Football Association en décembre 1863. (cf. annexe n°67, pp. 169-171 : Definition of terms ). 16 Law 3 : « After a goal is won, the losing side shall kick off and goals shall be changed ». 14 Laws adopted by the football Association in December 1863. In Rous, S. & Ford, D. (1974). A history of the laws of Association Football. FIFA. Zurich, Suisse, pp. 22-23 (Cf. annexe n°65, p. 167.). 141

4. Transformations de la loi décidées par le Board

4.1 Tirage au sort… le gagnant ne peut plus engager Le choix des camps est déterminé par un tirage au sort effectué au moyen d’une pièce de monnaie. Le règlement de la Football Association de1863, précisait que le vainqueur du tirage au sort choisissait ses buts, donc son camp. Il n’avait pas la possibilité de choisir le ballon, et de donner le coup d’envoi, qui revenait obligatoirement à l’équipe qui avait perdu le tirage au sort. Lors de la réunion du Board de 1890 17 , la loi fut modifiée, et le gagnant du tirage au sort avait l'option du coup de pied d'envoi ( kick- off ), ou du choix des buts. Ce qui est confirmé par 1897 par Tunmer & Fraysse : « On tire au sort et le gagnant a le choix entre le côté du terrain et le coup d'envoi »18 . Ce privilège accordé aux chanceux subsistera pendant 107 ans. Mais, étrangement, le Board décidera en 1997, de revenir à la loi ancestrale de 1863, le capitaine gagnant du toss , choisit uniquement le but en direction duquel son équipe attaquera la première mi-temps. Les adversaires se voient attribuer automatiquement le coup d’envoi du match. Le perdant du tirage obtient donc, le ballon, celui qu’Albert Batteux appelait le trésor du match, et aussi la possibilité de marquer directement sur le coup d'envoi, également une nouveauté en 1997.

4.2. Possibilité de marquer directement. Pendant plus d’un siècle, le joueur qui engageait n’avait pas la possibilité de marquer sur ce coup de pied. Celui-ci s’était progressivement transformé en une petite passe vers l’avant à un partenaire situé juste à coté du point central. Le Board modifie cette loi, en 1997 19 , en précisant que sur cette remise en jeu le but direct est valable. Le Board tente de favoriser le jeu offensif, cette évolution donnan une nouvelle possibilité de marquer à l’équipe qui vient de perdre le toss , ou de prendre un but.

4.3. Modifications de la procédure, de la définition. Le jeu commencera par un coup de pied placé ( place kick ). La définition de cette action motrice est reprécisée en 1896 par le Board : un coup de pied dans le ballon pendant que celui-ci est sur le sol, au centre du terrain de jeu. L’engagement est un cas particulier de « coup de pied placé », il se caractérise par le fait que le ballon est exactement posé au centre

17 Réunion du Board de 1890 : Art.2. 18 Tunmer N.G. et Fraysse, E (1897), op. cit., p. 76. 19 Réunion du Board de 1997. 142 du jeu, et obligatoirement envoyé dans la direction de la ligne de but opposée. La description de Tunmer & Fraysse est en parfaite adéquation avec cette exécution 20 . Avant même la première réunion du Board, les joueurs de l'autre camp ne peuvent s'approcher à moins de 9m.150 (10 yards) du ballon avant que le coup de pied soit donné ; aucun joueur ne pourra dépasser le centre du terrain dans la direction du goal adverse, avant que le coup de pied d'envoi soit donné. Avec l’introduction de la ligne de partage du terrain, la ligne médiane, et du rond central en 189121 , l’arbitre peut visualiser en un coup d’œil si la position des adversaires est réglementaire.

4.4 Ballon en jeu : du ballon qui roule au ballon qui bouge. Dans un premier temps le ballon est considéré en jeu, lorsqu’il est lancé dans le territoire ennemi. Pour l’engagement, il sera toujours nécessaire de propulser le ballon vers l’avant, mais le Board va préciser le moment où le ballon est en jeu, et donc jouable par un autre joueur. D’abord à la réunion de 1895 22 la règle impose que le ballon parcourt au minimum une distance égale à sa circonférence. Un siècle plus tard, en 1997 la loi est modifiée, avec un ballon en jeu dès lors qu’il a été botté vers l’avant.

4.5. Changement unique de côté L’article 3, du règlement de la Football Association en 1863 précisait, qu’après chaque but marqué, on changeait de côté. Lors de la réunion de 1890 23 , le Board précisera que le changement de côté se réalisera uniquement à la mi-temps. Le fait de ne changer qu’une seule fois, à la fin de la première moitié de la partie, reste d’actualité.

4.6. Reprises de jeu : du ballon lancé en l’air à la balle à terre. La loi VII réglemente les conditions de reprise du jeu, dans le cas d’une interruption temporaire du match, avec un ballon encore en jeu. Lors de sa première réunion en 1886 24 , le Board précise qu’en cas d'arrêt temporaire de la partie, quelle qu'en soit la cause, si le ballon n'a dépassé ni les limites latérales, ni les lignes de but, la partie sera reprise. L'arbitre lancera en l'air le ballon du point où le ballon se trouvait au moment de l'arrêt. La loi précisait déjà,

20 Tunmer N.G. & Fraysse, E (1897), op. cit., p. 77 « le coup d'envoi se donne au centre du terrain en posant le ballon à terre ; un des joueurs du camp qui a gagné le coup d'envoi, le frappe du pied en l'envoyant dans la direction du camp ennemi. » 21 Rous, S & Ford, D. (1974 ), op. cit. , p. 142-143. 22 Réunion du Board 1895 : Proposition Football Association adoptée : Le ballon est en jeu quand il a roule signifie quand il a fait un tour ou parcouru la distance de sa circonférence. 23 Réunion du Board de 1890 : Art 2 & 3. 24 Réunion du Board en 1886 : Art 15. 143 qu'aucun joueur ne pouvait jouer le ballon avant qu'il touche le sol. Le ballon est donc lancé en l’air, et rien n’est précisé sur la direction du lancer, la hauteur du lancer, ou la présence de joueurs autour du ballon et de l’arbitre. En 1902 25 , le Board ajoutera que si le ballon sort des limites avant d'avoir été touché par un joueur, l'arbitre le lancera à nouveau en l'air. Le fait que cet événement puisse survenir, à part dans le cas d’un vent violent, permet de faire l’hypothèse d’un lancer aléatoire. Cet envoi en l’air se transforme en 1905 26 en lancer vers le sol, également aléatoire si on se réfère, au lancer de certains sports collectifs australiens. L'arbitre frappe violemment le ballon avec le poing, vers le sol, pour obtenir un rebond. Cette pratique prend fin en 1914 27 , le Board décide que l’arbitre doit tout simplement laisser tomber le ballon à terre. Les formes de lancer se sont donc transformées jusqu’en 1914, mais depuis l’origine, sur cette remise en jeu, le ballon est considéré en jeu, lorsqu’il touche le sol.

4.7. Lieu de la balle à terre. L’arbitre lâche le ballon à l’endroit précis où celui-ci se trouvait au moment de l’interruption du match. Une exception sera ajoutée à cette règle lors de la réunion de 1984. En effet, lorsque la balle se situe au moment de l’arrêt à l'intérieur de la surface de but, une balle à terre sera exécutée sur la partie de la ligne de la surface de but parallèle à la ligne de but. Le ballon est reculé au point le plus près où il était quand il a été stoppé. L’arbitre n’a donc plus la possibilité de lâcher le ballon dans la surface de but, devant l’attaquant par exemple, qui n’aurait plus qu’à pousser le ballon au fond des buts. La même logique a été adoptée pour les coups francs indirects offensifs.

5. Décisions, sanctions, infractions liées au coup d’envoi.

Le cas de la violation de la loi 2 est abordé dès 1887. Le Board précise que la pénalité devient maintenant un coup franc pour les opposants. Cette décision est confirmée en 1891 28 , par la nouvelle loi 16 qui généralise la sanction du coup franc pour la violation des lois du jeu. Le fait de ne pas exécuter correctement le coup d’envoi, d’envoyer le ballon vers l’arrière par

25 A.G.M of 1902 : Law 15 proposal by FA adopted : « … the Referee shall throw the ball up where it was when play wassuspended, and the ball shall be in play when it has touched the ground. If the ball goes into touch or behind the goal-line before it is played by a player, the referee shall again throw it up ». 26 A.G.M of 1905 : Law 15 proposal by FA adopted : « … the Referee shall throw the ball down where it was when play was suspended, …». 27 A.G.M of 1914 : Law 16 : Second sentence : delete « throw the ball » and substitute « drop the ball ». 28 Réunion du Board de 1891 : La loi 16 est rajoutée : Art. 16 : Pour toute infraction aux articles 2 5, 6, 8, 9 10 un coup de pied franc (free kick) doit être accordé au camp opposé, au point où l'infraction a été commise. 144 exemple, implique qu’un « coup franc doit être accordé aux opposants »29 . Cette règle restera en vigueur 12 ans. En 1903 le Board décide de modifier la loi 2 et précise que si cette règle n'est pas respectée le coup d'envoi sera recommencé30 . Cette loi est toujours d’actualité, sauf dans le cas du joueur qui donne l’engagement et qui rejoue le ballon avant qu'il n’ait été touché ou joué par un autre joueur. Comme pour une touche ou un coup franc, le fait de toucher deux fois de suite le ballon, est sanctionné par un coup franc indirect accordé à l'équipe adverse à l'endroit où la faute a été commise. Le Board précisera à partir de 1984, que si la « seconde touche » du joueur se produit dans la surface de but, alors comme le prévoit la loi XIII, le coup franc indirect sera exécuté d'un point quelconque de la moitié de la surface de but dans laquelle la faute a été commise. Le règlement prévoit et anticipe les événements, même les plus improbables. En effet il est difficilement imaginable que le joueur frappant le coup pied d’engagement, puisse exécuter une seconde touche de balle 50 mètres plus loin, juste devant le but adverse, sans qu’aucun adversaire ne touche le ballon, pendant au moins 7 secondes!

6. Décisions, sanctions, infractions liées à la balle à terre

Dans le cas d’une balle à terre, aucun joueur ne peut toucher le ballon avant qu'il ait atteint le sol. Le Board modifie la loi en 1924 31 , en précisant qu’un coup franc doit être accordé pour toute infraction à cette disposition. Dans le même ordre d’idée, le Board , décide en 1935 32 , que si le ballon est joué intentionnellement de la main avant de toucher le sol, un coup franc doit être accordé pour avoir manié la balle. Cette règle, stipule donc, que le joueur qui intervient sur la trajectoire du ballon, entre le lâcher de l’arbitre et le sol, viole la loi. Ces changements semblent en décalage avec la logique des lois du jeu. Depuis l’origine, sur cette remise en jeu, le ballon est considéré en jeu à partir du moment où il touche le sol. Donc dans ce cas de figure le joueur enfreint une loi avant que le ballon soit en jeu, la remise en jeu devrait alors être recommencée. Cette anomalie sera corrigée en deux temps. D’abord en 1937, date à laquelle la modification de 1924 est retirée. Ce qui signifie que dans le cas d’une infraction à cette remise en jeu, l’arbitre n’a pas à accorder automatiquement un coup franc à l’équipe adverse. Ensuite

29 Réunion du Board de 1902. 30 A.G.M. of 1903. Decision of international Board. Law 2 « … If this law is not complied with, the kick-off must be taken over again ». 31 Réunion du Board de 1924 : Loi 16. 32 Réunion du Board de 1935 : Loi 16. Décision du Board . 145 en 1977, la décision 8.01 du règlement, précise que si lors d'une balle à terre un joueur commet une infraction quelconque avant que le ballon ait touché le sol, le joueur coupable doit recevoir un avertissement ou être exclu du terrain suivant la gravité de la faute. Il est explicitement stipulé qu’il ne peut être accordé un coup franc à l'équipe adverse, puisque le ballon n'était pas en jeu au moment de l'infraction. Dans pareil cas, l’arbitre n’a pas le droit d’accorder de sanctions techniques, seules les sanctions administratives sont possibles. La balle à terre sera donc automatiquement recommencée par l'arbitre.

7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

Le Board avait décidé, en 1924, qu’un coup-franc devait automatiquement être accordé à l’équipe adverse, pour toutes les infractions relatives à la balle à terre. Dans ce cadre l’ Irish Football Association avait proposé en 1935, qu’en cas d'infraction à la loi 16, l'arbitre devait notifier au camp offensé que le but ne pouvait être marqué directement d'un tel coup franc ! Cette proposition fut retirée, mais elle confirme qu’accorder un coup franc pour une faute technique, avec un ballon qui n’est pas encore en jeu questionne. Par cette demande, les Irlandais affirment en fait qu’il n’est pas vraiment juste de pouvoir marquer sur ce coup franc… que l’équipe n’aurait pas dû obtenir.

8. Analyse systémique

Les reprises de jeu sont liées au fait que le ballon soit au préalable hors du jeu (loi IX), stoppé par l’arbitre ou but marqué ayant donc dépassé les limites du terrain. Le règlement précise également le moment précis où le ballon est à nouveau en jeu (loi IX), dès qu’il a bougé depuis 1997 pour le coup d’envoi et seulement quand il touche le sol pour la balle à terre. Le coup d’envoi est en relation avec le début de la partie ou la reprise du jeu après la mi-temps (Loi VII, durée de la partie), ou à la suite d’un but marqué (loi X). Ernest Weber confirmait déjà cela, dans son règlement commenté en 1905 : « Dès que le but est marqué et sifflé, l’arbitre doit faire ramener le ballon au centre du terrain et faire reprendre le jeu sans perte de temps »33 .

33 Weber, E (1905), op. cit., p. 166. 146

En ce qui concerne la reprise de jeu par une balle à terre, cette loi est en interaction avec l’arbitre (loi V), et aussi avec les fautes et incorrections (loi XII). Notre analyse systémique des lois du jeu, se réduira à l’interaction entre la balle à terre et la règle du hors-jeu (loi XI). Le Board précise, en 1923 34 , qu’un joueur, jouant le ballon quand il a été lâché par l'arbitre pour reprendre le jeu, ne peut pas être hors-jeu. Cette règle, s’inscrit dans les cas d’exceptions du hors-jeu. Le hors-jeu est jugé au départ d’une passe d’un partenaire… et l’arbitre n’en est pas un, il est juste considéré comme un élément neutre du jeu. Si nous tentons de resituer cette règle à l’époque, le lancer n’est déjà plus aléatoire, l’arbitre ne lance pas le ballon en direction d’un but, il lâche tout simplement le ballon. Il n’y a donc pas de passe vers l’avant, et seulement une possibilité d’être hors-jeu de position. La règle du hors- jeu jusqu’en 1925, étant celle « des trois joueurs », il est donc apprécié sur le déplacement de l’antépénultième défenseur. Donc cette règle stipule que l’arbitre peut lâcher le ballon dans les pieds d’un attaquant, qui serait considéré comme hors-jeu, c’est à dire qu’il n’aurait devant lui qu’au maximum deux joueurs adverses. L’introduction de cette règle est donc explicable dans le contexte de 1923, si l’attaquant se retrouve devant un défenseur et le gardien de but. Mais cette règle devient surréaliste, si l’on considère que l’arbitre peut aussi donner le ballon à un attaquant seul, face au but, ou face au gardien, avantage considérable, après une interruption temporaire du jeu. La modification de loi du hors-jeu de 1925, renforce cette idée d’une loi inutile, car il est difficilement imaginable qu’un arbitre impartial offre une telle occasion de but, sans provoquer la colère de l’équipe lésée. La Football Association fera la proposition en 1987 de retirer « la balle à terre » des exceptions de la loi du hors jeu, mais cette anomalie ne sera corrigé qu’en 1990 35 .

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Les mises en jeu sont liées à la logique interne de chaque activité, et sont donc spécifiques à chaque sport collectif. Cette action motrice exécutée soit avec le pied ou/et les mains, se réalise du centre du jeu, ou de derrière la ligne de fond, par un joueur ou par l’arbitre. Au basket-ball, le coup d’envoi est donné par l’arbitre, qui propulse le ballon en l’air entre deux joueurs. Il existait un lancer en l’air du football en vigueur au XIX e siècle. Celui-ci

34 AGM of 1923 : Law 6. Proposal of Football Association of Wales adopted : A player, who next plays the ball when it has been dropped by the referee to resume play after its stoppage, cannot be offside. 35 Réunion du Board de 1990 : Proposition de la Football Association adoptée. 147 n’était pas utilisé pour commencer le jeu, mais à la place de la balle à terre en cas d’interruption temporaire du jeu. De plus les joueurs devaient attendre que le ballon retombe au sol pour pouvoir le jouer. Rien de comparable au basket, où les joueurs se disputent la possession du ballon dans les airs. La remise en jeu, suite à un panier encaissé, se fait de l’extérieur du terrain par une passe. Au handball, l’engagement se réalise comme au football au milieu du terrain. Mais après un but inscrit il n’est plus nécessaire d’attendre le retour des adversaires dans leur camp, il suffit de transiter par le centre du terrain. Le possesseur du ballon met le pied sur la ligne médiane et attend le coup de sifflet de l’arbitre. Il est également possible de marquer directement sur le coup d’envoi. Au rugby, bien qu’ils soient exécutés tous les deux du centre du terrain. le règlement différencie le coup d’envoi du début du match, avec les mises en jeu suite à l’obtention de points de l’adversaire. Au début du match et après la mi-temps, une équipe engage en effectuant un coup de pied placé ; le botteur peut poser le ballon sur du sable, de la sciure ou un socle agréé par la Fédération. Par contre si une équipe marque, l’équipe adverse donne un coup de pied tombé au centre de la ligne médiane, ou derrière cette ligne. Logiquement le ballon doit dépasser la ligne des 10 mètres située dans le camp adverse et ne pas sortir directement du champ de jeu. Si ce n’est pas le cas, l’équipe adverse peut accepter le coup d’envoi, le faire recommencer ou bénéficier d’une mêlée ordonnée au centre du terrain. Contrairement au football, il n’est pas possible de marquer des points directement sur ces coups d’envoi. Les caractéristiques du volley-ball, sport collectif non interpénétré, donnent une coloration particulière à la mise en jeu. Le service est exécuté en dehors du terrain, derrière la ligne de fond de son propre camp, par l’équipe qui a gagné le point précédent. Le service a évolué d’une simple mise en jeu, à la cuillère, vers une véritable action offensive avec le « service smatché ». Dans tous les sports collectifs, un tirage au sort est effectué avant le début de la partie. Au handball, au volley-ball et au rugby le capitaine favorisé par le sort choisit ou le ballon, ou le terrain. Au basket, l’arbitre lance lui-même le ballon au début de la partie, et au football, depuis 1997, c’est le perdant du toss qui récupère la balle et l’engagement. Les différents règlements facilitent les remises en jeu, en interdisant aux adversaires d’intervenir ou de les gêner avant que le ballon soit réellement en jeu. Chaque sport quantifie une mise à distance

148 minimum : 10 mètres au rugby, 3 mètres au handball, 10 yards au football… et « les joueurs ne peuvent charger tant que le coup d'envoi n'a pas été donné »36 .

Synthèse Le coup d’envoi est un moment particulier, et le donner peut être considéré comme un honneur, par exemple à la soule, à Vieux-Pont, en Normandie au Moyen Age, le coup d’envoi devait être exécuté par le dernier homme marié 37 ! Cet honneur est parfois dévolu à une personnalité dans un simulacre de mise en jeu avant le coup d’envoi véritable. Le choix se fait aujourd’hui par le tirage au sort… mais depuis 1997 en football, il faut perdre le toss pour se voir automatiquement attribuer le coup d’envoi du match. Le fait d’engager est donc aujourd’hui lié à l’échec, à un manque de compétence ou de chance. En effet, l’engagement revient à l’équipe qui a encaissé un but, à l’équipe qui a perdu au tirage au sort. Le ballon est donné aux perdants, dans le sens de leur « redonner leur chance ». L’engagement est botté et le ballon devait faire un tour sur lui-même pour être en jeu ; depuis 1997, il suffit qu’il bouge. La permanence de la loi est illustrée par le fait, que le coup de pied d’engagement se réalise depuis l’origine au milieu de terrain avec des adversaires qui doivent respecter la distance des 10 yards. En ce qui concerne, la balle à terre, la règle s’est transformée d’un ballon d’abord lancé aléatoirement en l’air, puis vers le sol, à simplement lâché par l’arbitre. Le règlement ne spécifie pas un nombre de joueurs minimum ou maximum requis. Il ne s’agit pas comme le pensent beaucoup de joueurs et spectateurs d’un « entre deux ». L’arbitre peut favoriser une équipe, et rendre par exemple le ballon au gardien blessé. Depuis l’origine, le ballon est en jeu, à partir du moment où il touche le sol.

36 Saint-Chaffray, E & Dedet, L. (1999), op. cit., p. 98, Article 16, c. 37 Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 16. 149

Chapitre 9 Loi IX : Ballon en jeu et hors du jeu 1 ______

« Dans le jeu et hors du jeu, Dents de Chien est « canin » pour cette joie animale de prodiguer son corps (sauf en une seule circonstance : quand le ballon est sorti du terrain. Alors monsieur est soudain pris d'une immense cosse ; c'est aux spectateurs à courir après le ballon, de préférence si ce sont des femmes ou des vieillards. - Eh! dérouille toi un peu petit maquereau!) ». Henri De Montherlant 2

1. Loi actuelle

Le ballon est hors du jeu, soit quand il a entièrement franchi la ligne de but ou la ligne de touche, soit quand le jeu a été arrêté par l’arbitre. Le ballon est en jeu dans toutes les autres situations, y compris quand il rebondit dans le terrain après avoir touché un montant de but, la barre transversale, un drapeau de coin. Si le ballon touche l’arbitre ou un arbitre assistant se trouvant sur le terrain, le jeu se poursuit car l’arbitre est considéré comme un élément neutre. Le règlement précise que le ballon reste en jeu « en attendant qu'une décision soit prise à propos d'une infraction supposée »3. Plus globalement, il est possible d’affirmer que le ballon est en jeu s’il reste dans les limites du terrain et tant que l’arbitre n’a pas sifflé, pour interrompre le jeu.

2. Principes de cette loi Le ballon est en jeu s’il reste dans les limites du terrain. Bertrand During 4 a montré que les sports, contrairement aux jeux, se jouaient sur des espaces spécifiques limités, et délimités. Le passage du jeu au sport s'est fait progressivement. Dans le règlement de 1863 5, il est possible de considérer que le jeu se poursuit en dehors des limites du terrain, car le premier joueur s’emparant du ballon, bénéficie de la remise en jeu. Il faut imaginer les joueurs se disputant farouchement la possession du ballon, très au-delà des limites du terrain, au milieu des spectateurs.

1 Law IX - Ball in and out of play . 2 Montherlant, H. (1954), op. cit., p. 27. 3 If the event of the supposed infringement of the laws, until a décision is given . 4 During, B. (1984), op. cit. 5 Tables de loi de 1863 : Lois 5 et 7. Cf. annexe n°65, p. 167. 150

Le ballon est hors du jeu à partir du moment où l’arbitre siffle. Ce pouvoir de l’arbitre lui est conféré avant même son apparition à l’intérieur du terrain. En effet, avant 1891 il était dans les tribunes, muni d’un sifflet, et pouvait interrompre le jeu. Lorsque l'arbitre siffle et indique un arrêt du jeu, la dynamique cesse ; le ballon est sur le terrain, mais il n’est plus possible de le jouer avant une remise en jeu réglementaire avec des procédures précises. A l’opposé, tant que l’arbitre n’a pas sifflé, les joueurs doivent continuer la partie, même si une faute est réclamée ou en discussion, avec un arbitre autorisé à appliquer la règle de l’avantage.

3. Historique de la loi La frontière entre un ballon en jeu et hors du jeu semble floue dans le règlement de 1863. Le fait que le ballon sorte du terrain n’est pas un critère fiable, et le jeu se poursuit au- delà des limites tracées. En fait le jeu s’arrête quand un joueur prend possession du ballon à l’extérieur du terrain. La loi 7 des tables de loi de 1863 6, en constitue une parfaite illustration. Elle précise les cas où le ballon sortirait derrière la ligne des buts. Stanley Rous remet l’existence de cette ligne en doute. Elle n’est pas tracée sur les schémas de terrain qu’il propose 7. Si le premier joueur à toucher le ballon appartient à l’équipe qui défendait la cible, un de ses coéquipiers aura le droit de faire un coup franc sur la ligne en face du point où le ballon aura été récupéré. Au contraire, si le premier joueur à toucher le ballon appartient à l’équipe qui attaquait la cible, l'un de ses partenaires aura droit à un coup franc à 15 yards de la ligne de but, en face de l'endroit où la balle a été touchée. La récupération du ballon au-delà de la ligne de but se révèle donc fondamentale, elle donne soit la possibilité de dégager son camp tranquillement, soit de marquer un but. La même logique est adoptée pour le ballon qui quitte le terrain par les lignes de touche. La loi 5 de 1863 précise que le premier joueur qui touche le ballon au-delà des limites bénéficie de la remise en jeu. Ce même règlement permet au joueur de faire un « arrêt de volée »8, qui peut être considéré comme un arrêt du jeu réalisé par un joueur. En fait il cherche à stopper le jeu, par une action motrice. Il l’attrape en plein vol et doit à la réception du ballon, planter son talon pour faire immédiatement une marque au sol. A cette seule condition, le jeu est interrompu par l’arbitre et il aura le droit de faire un coup franc en toute

6 Cf. annexe n°65, p. 167. 7 Rous, S. & Ford, D. (1974), op. cit., pp. 141-144. 8 fair catch : arrêt de volée. 151 quiétude. La règle 8 précise qu’il pourra reculer aussi loin qu'il le souhaite, et aucun joueur de l'équipe adverse n’avancera au-delà de sa marque jusqu'à ce qu'il ait shooté dans le ballon

4. Transformations de la loi décidées par le Board

4.1. Ballon en jeu Avec la création du Board la notion de « ballon en jeu » se détermine en fonction des limites du terrain. Lors de la réunion de 1887, le Board considère qu’une balle sur la ligne est jouable. Ce sera confirmé par la décision de 1901, qui stipule que les lignes appartiennent aux surfaces qu'elles délimitent. Par conséquent, les lignes de touche et les lignes de but font partie du terrain de jeu. En 1890 9, le Board précisera que le ballon est aussi en jeu quand il rebondit dans le terrain après avoir frappé le « goal », les poteaux, ou la barre transversale. Les poteaux peuvent s’entendre par les poteaux de but et les poteaux de corner ; ceci sera clairement explicité en 1896 dans la loi 4. Cette même année, la proposition de la Football Association est adoptée ; le Board considère que dorénavant le ballon est en jeu s’il touche l'arbitre ou un umpire sur le terrain de jeu 10 . Nous pouvons retenir la formule imagée, donnée par Tunmer et Fraysse en 1897: « Le ballon qui touche l’arbitre ou l’un des juges n’est pas mort »11 . L’arbitre devient donc un élément neutre du jeu. Ces modifications montrent la volonté du Board de donner de la continuité au jeu, de ne pas l'interrompre inutilement. Le règlement donne progressivement à la fin du XIX e siècle à l’arbitre le pouvoir de stopper le jeu. Le Board précise, en 1890 12 , que pour toute infraction supposée du règlement, le ballon sera considéré en jeu jusqu'à ce qu'une décision ait été rendue. A l’époque le règlement prévoit de sanctionner le joueur qui crochète, charge par derrière, pousse ou tient un adversaire, ou manie volontairement le ballon. Cela signifie que même si un joueur ou le capitaine demande une faute, fait un appel 13 , les joueurs n’ont pas autorité pour stopper le jeu, et le ballon reste jouable, « en vie ».

9 Réunion du Board de 1890 : Art 4. 10 AGM. of 1896 : Proposal by the FA adopted. Law 4 : « The ball is in play if it touches the referee or a linesman when in the field of play ». 11 Tunmer N.G. et Fraysse, E. (1897), op. cit., p. 94. 12 Réunion du Board de 1890 : Art.13. 13 Réunion du Board 1890 : Art.13 : Dans le cas d'un appel, pour toute infraction supposée du règlement, le ballon sera considéré en jeu jusqu'à ce qu'une décision ait été rendue. 152

4.2. Ballon hors du jeu La notion de « ballon hors du jeu » est abordée lors de la réunion de 1887. Les représentants du Board se questionnent pour savoir si la balle est sortie ou non du jeu, dans le cas où elle se situe en l'air au delà des lignes de limites du terrain. Aucun accord ne sera trouvé sur ce sujet. La loi sera modifiée l’année suivante 14 : le ballon dépassant les lignes de but ou les lignes de touche, soit à terre, soit en l'air, sera hors du jeu. Il faut donc comparer les limites du terrain à un « mur vertical » que le ballon ne doit pas franchir. Le Board précisera lors de la réunion de 1904, que la totalité du ballon doit avoir passé au-delà de la ligne de but ou de la ligne de touche pour être hors du jeu. Ce qui confirme qu’une balle se situant sur la ligne ou au-dessus d’elle est jouable.

4.3. Du ballon qui roule au ballon qui bouge Le Board précise en 1938 15 que le referee devra donner le signal de reprise après tout arrêt. Les modalités sont spécifiques en fonction des différentes reprises. Par exemple, sur le coup de pied de but, le ballon est en jeu à partir du moment où il sort de la surface de réparation. En principe, excepté dans le cas de la balle à terre et de la touche, le ballon doit être immobile, posé sur le sol au moment de remettre en jeu. Le Board précise dès 1895, sur proposition de la Football Association, le moment à partir duquel le ballon peut être considéré en jeu : il est en jeu quand il a fait un tour ou parcouru la distance de sa circonférence. Cette loi sera modifiée en 1997, le ballon est dorénavant considéré en jeu dès qu’il a bougé. Cette règle s’applique pour l’engagement, le coup franc, le coup de pied de réparation et le corner.

5. Analyse systémique Cette loi est en interaction avec toutes les remises en jeu. Les cas de figures sont nombreux et le critère pertinent est de considérer le moment où le ballon est de nouveau en jeu : quand il rentre sur le terrain pour la touche (Loi XV), quand il sort de la surface de réparation sur le coup de pied de but( Loi XVI), quand il a bougé sur l’engagement (Loi VIII), le coup franc (Loi XII) le coup de pied de réparation (Loi XIV) et le corner (Loi XVII). Pour ces trois dernières remises en jeu, avant 1997, le ballon était considéré comme en jeu aussitôt qu'il avait roulé sur lui-même ou parcouru une distance égale à sa circonférence.

14 AGM of 1888 : Law 4 : The ball is out of play when it has crossed the goal-line or touch-line, either on the ground or in the air ». 15 Réunion du Board 1938 : Loi XIII : Proposition de la Football Association of Wales adoptée. 153

Le cas de la balle à terre (Loi VIII : reprise de jeu) est aussi spécifique, le ballon lâché par l’arbitre doit entrer en contact avec le sol à l’intérieur du terrain du jeu avant de pouvoir être touché par les joueurs. Ce critère était identique à la fin du XIX e siècle quand l’arbitre lançait en l’air le ballon, de façon aléatoire, les joueurs devaient attendre qu’il retombe. Cette loi est également liée à la loi X, le but marqué. A partir de 1904, la totalité du ballon doit avoir passé au-delà de la ligne de but ou de la ligne de touche pour être considéré hors du jeu. Afin que le but soit validé le ballon doit avoir entièrement franchi la ligne de but, entre les poteaux et sous la barre transversale. Dans le cas contraire le ballon est encore en jeu. Cette loi est aussi en relation avec la loi XII sur les fautes et incorrections, notamment les sanctions administratives et les sanctions techniques. L’arbitre n’est pas autorisé à accorder une sanction technique si le ballon n’est pas en jeu. Par exemple le ballon étant en dehors du terrain, le penalty ne sera pas accordé si un joueur frappe un adversaire dans sa propre surface de réparation ; le fautif sera simplement expulsé !

6. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences. Dans tous les sports collectifs l’arbitre utilise « un sifflet dont le son arrêtera le jeu… »16 . En ce qui concerne le ballon en jeu, le règlement du football présente de très fortes similitudes avec le handball où la ligne de touche est apparentée à un mur invisible. Lorsque le ballon franchit cette ligne il est hors du jeu. A contrario, le ballon peut franchir la ligne en l’air au basket-ball, tant que le joueur ne pose pas d’appui en dehors du terrain pour ramener le ballon dans l’aire de jeu, la partie se poursuit. Par contre un ballon dans les limites du terrain est considéré comme hors du jeu si le porteur du ballon le touche au moment où l'un de ses appuis est à l’extérieur du terrain. Au rugby le ballon n’a pas non plus besoin de franchir la ligne de touche pour être hors du jeu 17 . Il suffit que le porteur du ballon, ou un joueur qui participe au regroupement (mêlée ou maul ) pose un appui sur la ligne. Au-delà de ces différences, un principe est commun à tous les sports collectifs : si le ballon touche le sol en dehors de la surface délimitée, le jeu est stoppé et repris par une remise en jeu.

16 Saint-Chaffray, E. & Dedet, L. (1999), op.cit., p. 102. 17 Saint-Chaffray, E. & Dedet, L. (1999), op.cit, p. 95 : « Les lignes de touche sont en touche, les lignes de touche de but sont en touche de but, les lignes de but sont en but ». 154

Dans la plupart des sports collectifs, comme au football, seul l’arbitre a le pouvoir d’arrêter le jeu. Au rugby le joueur possède aussi ce droit et peut réaliser un arrêt de volée. Au football, cet arrêt de volée existait dans la première codification des lois du jeu en 1863 ; rien de surprenant pour deux sports collectifs issus de la même souche. Au rugby, la possibilité d’exécuter un arrêt de volée, a été réduite à la zone des 22 mètres en 1925 dans un souci de continuité du jeu. Mais cette action motrice reste une option tactique favorable à la défense qui stoppe définitivement le mouvement offensif adverse. Si ce marqué est réalisé correctement, l’arbitre valide cet arrêt de volée et les adversaires doivent se reculer à 10 mètres du botteur, qui a tout le temps de dégager son camp sans la pression des opposants. Le joueur a aussi la possibilité d’aplatir le ballon dans sa propre zone « d’en-but » pour stopper le jeu. Les conséquences sont différentes en fonction de l’équipe qui a amené le ballon dans cette zone derrière la ligne de but : renvoi aux 22 mètres ou mêlée à 5 mètres avec introduction pour l’adversaire. Contrairement au football, l’arbitre n’est pas un élément neutre du jeu. En 1905, Ernest Weber 18 signalait déjà que si le ballon touchait l'arbitre, le jeu était arrêté, il n’était donc plus considéré en jeu. L’article 30 du règlement de 192019 , précise que si le ballon ou le porteur du ballon vient à toucher l'arbitre, le ballon est « mort » et une mêlée a lieu en ce point. Si cet événement se produit dans la zone « d’en but », la possession du ballon détermine la décision finale : soit le porteur appartient au camp attaquant alors il y a essai, soit il appartient au camp attaqué il y a touché . Enfin si le ballon est libre au moment où il touche l'arbitre un coup de renvoi est accordé à la défense. Le ballon est hors du jeu en fonction de sa position par rapport à la ligne de but ou à la ligne de touche, et parfois également en fonction de la position des appuis du porteur de balle ou du groupe de joueurs qui le tient. Le ballon est aussi hors du jeu quand la partie a été arrêtée par l’arbitre.

Synthèse Les sports modernes se jouent désormais dans un espace normé et délimité. Les joueurs et surtout le ballon sont confinés dans cet espace restreint. Dans le cas contraire le ballon est hors du jeu. La partie est dirigée par un arbitre qui a le pouvoir de siffler, d’arrêter le cours de la partie et donc aussi de décider si le ballon est encore « en vie » ou « mort ».

18 Weber, E. (1905), op. cit., p. 227. 19 Saint-Chaffray, E. & Dedet, L. (1999), op. cit., p. 102. 155

Pour Schaffhauser, « lorsque l'arbitre siffle et indique un arrêt du jeu, c'est en fait d'un arrêt du ballon dont il est question »20 . En ce sens, la loi IX est la simple expression de l’interaction entre les Lois V (l’arbitre) et II (le ballon). Contrairement au football sauvage où le ballon reste l’élément central du jeu, dans le football institutionnalisé , t out se passe comme si l'interaction entre l'arbitre et le ballon en constituait l'essence même. En réalité pour Schaffhauser « il ne s'agit que de la reconnaissance de celui-ci et de la validation (homologation) de ce que l'on appelle un match de football... »21 . L’arbitre et le ballon sont donc les éléments moteurs du jeu, et la loi IX illustre la remarquable stabilité des lois, avec un ballon qui est jouable sur la ligne depuis 1887 et un arbitre, muni d’un sifflet, présent sur le terrain depuis 1891. Cette loi confirme la volonté du Board de promouvoir la continuité du jeu. Il est en effet demandé à l’arbitre d’interrompre le moins possible la partie donc de siffler le moins possible. Le fait de considérer le ballon en jeu dès qu’il a bougé, illustre une tendance nouvelle de simplification des reprises de jeu. Une réflexion sur l’accélération des reprises est également dans l’air du temps, avec des consignes données à l’arbitre pour reprendre le jeu le plus rapidement possible après un but marqué. Il est possible d’envisager que ces deux voies de réflexion se poursuivent, dans le but de favoriser réellement l’équipe bénéficiaire de la remise en jeu. Il semble par exemple contre- productif d’obliger une équipe à exécuter un coup franc précisément à l’endroit de la faute commise. Souvent l’arbitre le fait recommencer car l’équipe bénéficiaire l’a joué trop vite et pas exactement au bon endroit…ce qui laisse tout le temps à l’équipe fautive de se replacer. La simplification et l’accélération des reprises de jeu seront sans doute des préoccupations du XXI e siècle car ces perspectives répondent à la fois au souci d’augmenter le temps de jeu effectif et de promouvoir un football plus offensif.

20 Schaffhauser, P. (2008), op. cit., p. 48. 21 Ibid., p. 48. 156

Chapitre 10 Loi X : Le but marqué 1 ______

D'une certaine façon, ce jeu fonctionne comme le jeu d'échecs. Là aussi, les reines et les fous, les tours et les cavaliers peuvent vous faire revenir à quelque Moyen-âge enfoui, mais seul compte en définitive la mise à mort du roi, le mat. Et le mat, en football, cela s'appelle le but. Vladimir Dimitrijevic 2

1. Loi actuelle La marque 3 est constituée par le total variable des points attribués à un joueur ou une équipe en fonction de ses « interactions de marque »4 réussies au cours du jeu. Contrairement à certains jeux traditionnels qui ne comptabilisent pas les réussites et les échecs, les sports institutionnels privilégient la structure du duel, la finalité étant d'obtenir la victoire en marquant plus de points que l'équipe adverse. Pour Pierre Parlebas, dans les sports collectifs, « un certain nombre de points, appelé pas de la marque, est associé à toute interaction de marque réussie »5. En ce qui concerne le football, ce « pas » possède une valeur unique, tous les buts valent un point. L’interaction de marque est réussie quand le ballon a entièrement franchi la ligne de but, entre les montants du but et sous la barre transversale, sous réserve qu’aucune infraction aux lois du jeu n’ait été préalablement commise par l’équipe en faveur de laquelle un but aura été marqué. L’équipe qui aura inscrit le plus grand nombre de buts pendant le match, le gagne. L’objectif des joueurs d’une équipe est alors de « provoquer le maximum d'interactions de marque qui leur soient favorables car celles-ci consacrent de façon chiffrée la réussite ou l'échec, et permet ainsi, la désignation d'un vainqueur et d'un vaincu »6. Quand les deux équipes marquent le même nombre de buts, ou n'en marquent aucun, le tableau d’affichage

1 Law X – Method of scoring. 2 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 14. 3 Parlebas, P. (1998), op. cit., p. 151. 4 Ibid.. p. 184. « Interaction de marque : communications ou contre-communications motrices permettant d'atteindre les objectifs codifiés d'un jeu sportif et doté d'un statut ludique valorisé : modification du score ou changement de statut sociomoteur ». 5 Ibid., p. 100. 6 Ibid., p. 101. 157 indique le même chiffre pour chacune des deux équipes et dans ce cas le Board précisera, en 1923 7, que le score du match est déclaré nul.

2. Principes de cette loi Le but est l’unique interaction de marque. Depuis 1863 8, et les quatorze lois originelles, la valeur attribuée au but est invariablement de un point. Au regard du système de score, le qualificatif « simplest game »9 est totalement justifié. Le Board précise, en 1923, qu’ « Un match sera gagné par l'équipe ayant marqué le plus grand nombre de buts 10 ». A ce sujet, en 1978 la fédération des Pays-Bas pose à la FIFA, une subtile question concernant le libellé de la loi X qui reste silencieuse sur la comptabilité des buts marqués contre son camp. En fait il suffit pour remporter la victoire « de posséder une marque supérieure à celle de l'adversaire à la fin d'un temps de jeu réglementaire »11 . Le football rentre à priori dans la catégorie des jeux sportifs qui se déroulent en temps limité, en l'occurrence 90 minutes. L’équipe qui mène au score, tente donc logiquement de conserver son avantage, jusqu’au coup de sifflet final, sans pouvoir être pénalisée pour refus de jeu, comme au handball par exemple. Le ballon doit réellement pénétrer dans le but. Il n’existe pas de but de pénalité et un but ne peut, en aucun cas, être accordé lorsque le ballon a été arrêté par un corps étranger avant de dépasser la ligne de but. Il est possible de marquer avec n’importe quelle partie du corps à l’exception des mains et des bras. La formule de Tunmer et Fraysse en 1897, « Pour gagner un but, il faut que le ballon ait été envoyé avec le pied entre les deux poteaux et en dessous de la barre transversale »12 , semble donc très réductrice. Celle d’Edouard Pontié, en 1905, est également incomplète : « On marque aussi bien un but d'un coup de tête que d'un coup de pied… ». 13 Tous les joueurs présents sur le terrain peuvent marquer des buts, y compris le goal qui est un joueur comme un autre. Alfred Wahl remarque en 1990 que « Jusqu'aux années 1960, un but marqué par un arrière constituait un événement insolite. C’est chose courante

7 AGM. of 1923 : Proposal by Football Association adopted. Law 4 : « If no goals have been scored, or the scores are equal at the end of the game, the game shall be drawn». 8 Citées Eisenberg, & Co. (2004), op. cit., p. 20. 9 En référence à J.C. Thring, maître assistant à l'Uppingham School, qui publie en 1862, un code de football en 10 lois intitulé « The simplest game ». Cf annexe n°61, p. 163. 10 AGM of 1923 : Proposal of Football Association adopted : « A game shall be won by the team scoring the greater number of goals». 11 Parlebas, P. (1999), op. cit. p. 405. 12 Tunmer N.G. & Fraysse, E (1897), op. cit., p. 76. 13 Pontié E. (1905), Le football Association, in Les sports modernes illustrés , sous la dir. de P. Moreau et G. Voulquin. Paris, Larousse, p. 164. 158 aujourd'hui. Ce football total a été imposé au début des années 1970 par l'Ajax d'Amsterdam »14 . Il est aussi possible de marquer contre son camp, et le gardien de but peut même propulser avec les mains le ballon dans ses propres filets.

3. Historique de la loi Dans les différents règlements des public schools 15 la barre transversale n'était pas mentionnée. La cible était délimitée par deux poteaux. L’article 4 de la Football Association de 1863 précise qu’ « un but est gagné quand le ballon passe entre les poteaux des buts (à quelque hauteur que ce soit), sans avoir été porté ou jeté avec la main ». La dimension de la cible pouvait varier d’une partie à une autre dans le même établissement. Un ou plusieurs joueurs étaient désignés ou contraints pour la garde des buts : « la reconnaissance officielle du pouvoir des plus anciens sur les plus jeunes, et du droit pour certains élèves d’infliger des châtiments corporels à d’autres, facilite leur organisation , et au moins permet aux plus âgés de contraindre les plus jeunes à participer, ou au moins à faire masse dans les buts »16 . La marque était également associée au changement de camp. A l’origine, les équipes changeaient de côté à chaque but marqué. Cette règle semble perdurer jusqu’à la fin du XIX e siècle, comme le souligne encore en 1897 l’œuvre de Tunmer et Fraysse « La durée de la partie est fixée d'avance ; à la mi-temps les camps changent de côté et aussi quand un but a été gagné »17 . Cette procédure renvoie au règlement actuel de l’Ultimate 18 , où le vent joue un rôle fondamental et peut constituer un avantage décisif. Changer de camp répond donc aux principes d’égalité des chances et d’équité. Cette règle ne survivra pas au XX e siècle, et seul les changements de côté à la mi-temps du match et lors des prolongations restent en vigueur aujourd’hui.

14 Walh, A. (1990), op. cit., p. 72. 15 Cf. annexes n°61, 62 , 63 et 64. 16 Mc Intosh, P.C. (1952) L’éducation physique en Angleterre depuis 1800, p. 32-33.1 ère édition 1952, 4 e éd 1974. Cité par B. During (1984), op. cit. 17 Tunmer,N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit., p. 76. 18 Ultimate : Sport collectif qui se joue avec un frisbee . 159

4. Transformations de la loi décidées par le Board La cible est devenue rectangulaire pour la Football Association entre 1866 et 1875, avec d’abord un ruban, puis une barre transversale. Le Board stipule dès 1890 19 que pour gagner un but le ballon doit passer entre les montants et sous la barre transversale sans avoir été jeté, frappé de la main ou porté par aucun joueur du camp attaquant. Cette règle laisse supposer que les joueurs utilisaient encore souvent les mains pour dévier ou frapper le ballon. Elle n’oblige pas les attaquants à propulser le ballon avec leur pied ou avec une autre partie de leur corps. En1897, le Board décide que le gardien peut être chargé quand il tient le ballon. Il est donc possible d’expédier honnêtement le gardien de but et le ballon dans le filet grâce à une charge correcte et loyale. Pour Edouard Pontié, « On fait même des buts en rentrant souvent dans son filet... le gardien du but portant dans ses bras l'objet du jeu qu'il vient de saisir »20 . Le mot « souvent » n’est pas galvaudé ; notre recherche sur les buts de l’équipe de France 21 montre qu’entre 1907 et 1913, sept buts ont été marqués de la sorte. L’attaquant Eugène Maës en avait fait une de ses spécialités. Cette loi sera progressivement modifiée. Jusqu’en 1897, la loi détermine les conditions dans lesquelles un but est « gagné ». Le Board change la terminologie et évoque désormais le fait de « marquer » un but. Le terme « gagné » sera, dès lors, réservé au gain de la partie. Une nouvelle formulation sera adoptée par le Board en 1939 22 . Elle précisera qu’un but sera marqué lorsque le ballon aura entièrement dépassé la ligne de but entre les montants et sous la barre transversale sans avoir été jeté, porté ou propulsé de la main ou du bras par un joueur de l'équipe attaquante. La classification de Stanley Rous, en 1939, a permis un « toilettage », et une mise en adéquation des différentes lois entre elles. Le Board avait précisé, lors de la réunion de 1904, que la totalité du ballon devait être passée au-delà de la ligne de but ou de la ligne de touche pour être considéré hors du jeu, mais cette notion n’apparaissait pas dans la loi sur le but marqué. De la même manière la loi X n’avait pas encore intégré que le fait de jouer sans les mains, signifiait aussi de « jouer sans les bras ». Enfin, en 1974 23 , la notion d’intentionnalité apparaît : « le but est marqué si le ballon n’a pas été intentionnellement propulsé de la main ou du bras par un joueur de l'équipe attaquante ». L’attaquant peut donc marquer involontairement de la main.

19 AGM. of 1890 : Law 4 : « A goal shall be won when the ball has passed between the goal-posts under the bar, not being thrown, knocked on, or carried by any one of the attacking side ». 20 Pontié, E. (1905), op. cit., p. 164. 21 Cazal, J-M., Cazal, P., & Oreggia, M. (1998), op. cit., pp. 20-35. 22 Réunion du Board de 1939 : Proposition de la Football Association adoptée. 23 AGM of 1974 : Proposal by FIFA adopted : « Except as otherwise provided by these Laws, a goal is scored when …, provided it has not been thrown, carried or intentionnally propelled by hand or arm, by a player of the attacking side … ». 160

L'extension du règlement dans la possibilité de marquer peut également être illustrée sur les coups de pied arrêtés. A l’origine, les joueurs n’étant pas censés commettre de fautes, il n’était pas imaginable d’obtenir un but sur un coup franc jusqu’à la fin du XIX e siècle. Une nouvelle loi 11 apparaît en 1905 « Un but peut être marqué directement sur un coup franc accordé pour l'une des fautes indiquées à l'article 9, mais non dans un autre cas ». A cette date il devient possible de marquer sur certains coups francs. Ils seront assimilés à la catégorie des coup-francs directs à différencier des coups francs indirects ; cette terminologie apparaît en 1939 24 , avec la nouvelle classification de Stanley Rous. Les lois du jeu permettent également de marquer directement sur un coup de pied de coin à partir de 1927 25 , et sur l’engagement en 1997. L’augmentation des possibilités de marquer répond à la préoccupation récurrente du Board.

5. Décisions du Board liées à cette loi Suite à une question de la Scottish Football Association , lors de sa réunion de 1948, le Board décide que la loi X définit la seule méthode selon laquelle gagner un match, ou faire match nul, aucune possibilité de modification ne sera autorisée quelles que soient les circonstances. Les matchs nuls sont possibles, mais pour Allen Guttmann 26 la tendance des sports modernes est de les éliminer par quelques expédients permettant de mettre fin à l'ambiguïté. En effet, dans les matchs à élimination directe les scores de parité ne sont pas recevables. L’étude historique de la modélisation de la victoire nous a permis de discerner cinq solutions pour déterminer le vainqueur en cas de match nul : rejouer le match, ajouter au match une prolongation, tirer au sort le vainqueur, se départager avec la séance de tirs au but et enfin le « but en or ». Tirer au sort ou tirer les penalties va à l’encontre de la décision de 1948. Pour éviter le « sort de la pièce », les tirs au but sont introduits à la fin des lois du jeu en 1970. Un autre genre de loterie, mais avec des actions motrices qui déterminent le sort du match. Le cas de la barre transversale cassée ou déplacée pendant le déroulement du jeu fut abordé pour la première fois en 1896, suite à la proposition de la Football Association. Le Board décide alors que l'arbitre possède le pouvoir d'accorder un but s'il pense que le ballon

24 AGM. of 1939 : Law XII, Fouls and misconduct. Punishment : « A direct free kick », « an indirect free-kick ». 25 AGM of 1927 : Proposal by Football Association adopted. Law 11 : « A goal may be scored direct from a corner-kick, and if a free-kick is awarded because of any infringement of Law 9 a goal may be scored direct from such free-kick against the offending side, but not from any other free-kick ». 26 Guttmann, A. (1978) , Traduction Terret, T. (2006), op. cit., p. 112. 161 serait passé sous la barre si elle était restée dans sa position normale. Cette décision ne sera retirée qu’en 1958. Pendant 62 ans, l’arbitre a donc autorité pour accorder un but qui ne passe pas sous la barre transversale ! Cette question épineuse sera débattue de nombreuses fois par le Board 27 . Le remplacement de la barre transversale par une corde sera possible jusqu’en 1972 dans les matchs amicaux ! Le Board a aussi traité, à partir de 1960 28 , du problème du corps étranger qui empêche le ballon de pénétrer dans le but, un spectateur ou un autre ballon par exemple. Dans ce cas, un but ne peut être accordé. Si le fait se produit au cours d'une phase ordinaire de jeu, la partie doit être interrompue et reprise par une balle à terre à l'endroit où le ballon est rentré en contact avec le corps étranger. A partir de 1966, la loi précisera que si cet événement se produit lors du botté d'un coup de pied de réparation, le penalty est à recommencer. Le règlement fera ensuite la distinction entre le corps étranger qui arrête le ballon, et celui qui le dévie simplement mais ne l’empêche pas de franchir la ligne de but. Dans ce dernier cas, le but est validé si l’arbitre estime, que sans cette déviation, la course du ballon aurait logiquement terminé dans le but.

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board Il existe un principe permanent depuis la naissance du Board : si le ballon ne pénètre pas réellement dans le but, celui-ci ne peut être validé La Football Association of Wales propose, en 1938 29 , que l’arbitre accorde un but de pénalité (sans le nommer ainsi) dans le cas où il est évident qu'un but aurait été marqué. Par exemple si un joueur, autre que le gardien de but, manie le ballon pour éviter qu'il franchisse la ligne de but ou encore si le ballon est intercepté de façon inappropriée par un spectateur. Cette proposition sera refusée. Pourtant cette loi a déjà été appliquée. Ce but de pénalité a réellement existé dans le règlement de la Football Association lors de la saison 1883-1884. Il n’existe pas de but de pénalité comme par exemple au rugby, l'essai de pénalité pour un jeu déloyal selon la sémantique de 1920 30 . Cet

27 En 1949, 1957, 1961, 1964, 1965, 1966 et 1972. 28 AGM of 1960 : Decisions of the International Board : Law X – Method of scoring. Decision n°2 : « A goal cannot in any case be allowed if the ball has been stopped by some outside agency before passing over the goal- line ». 29 AGM. of 1938. Proposal was withdrawn : « A goal, may be awarded by the Referee in the case where it is obvious that a goal would have been scored… ». 30 Saint-Chaffray, E. & Dedet, L. (1999), op. cit. p. 102. Art. 29 : Jeu déloyal. Le juge-arbitre a le droit, dans le cas d'incorrection ou de jeu déloyal, d'accorder un essai, s'il pense que cet essai aurait été inévitablement obtenu si cette incorrection n'avait pas été commise. 162 essai de pénalité est toujours en vigueur, et répond à un principe de justice. La sanction technique est remplacée par un gain de points. La proposition de la North Américan Soccer League (NASL) en 1968, marque une volonté d’augmenter le nombre de buts marqués. Elle prônait un agrandissant de la dimension de la cible avec un but de 10 yards sur 9 pieds (9, 23m. x 2;74m.)31 , et un objectif annoncé de six buts inscrits par match. Cette proposition fut refusée par le Board et notamment par la FIFA. Pourtant en 1974 le président de la FIFA, João Havelange 32 , s'était à plusieurs reprises déclaré favorable à un agrandissement du but de la « mesure d'un ballon » à chaque poteau. Cette volonté d’agrandir les buts anime les débats à partir de la fin des années 60, époque coïncidant avec l’apogée du Catenaccio. La plus ancienne proposition rencontrée à ce jour dans nos recherches est de Georges Boulogne 33 en 1967 : il faut les augmenter considérablement, car il s'agit de faire basculer le jeu défensif en offensif. Il pensait qu’une augmentation minuscule ne servirait qu'à durcir et épaissir les défenses. Il propose donc une dimension de 10m sur 3m. L’année suivante en 1968, à la table ronde de Monaco, il est envisagé d’agrandir les buts à 9 yards x 9 pieds (8,24m. x 2,75m.). La proposition écrite de Pierre Junqua 34 en 1972 à l'intention de l'UEFA intitulée « pour la revalorisation du football offensif : l'agrandissement de la surface des buts » est la plus argumentée. Il milite pour le football offensif : « Bien protégé par un rideau de joueurs placés avec art sur l'échiquier de la surface de réparation, le gardien de but qui saute plus haut, plus loin, plus vite que ses ancêtres de 1875 a une tâche beaucoup plus facile que ceux- ci. Il est grand temps de chercher à établir un meilleur équilibre entre l'attaque la défense, forcer les arrières à s'écarter de devant leur but et assurer aux avants la possibilité de tenter plus souvent leurs chances de marquer des buts ». Il note que les records du monde du saut en longueur et du saut en hauteur ont été améliorés depuis 1875 d'environ 15%, et il milite pour une augmentation équivalente de la dimension de la cible. Il propose donc des dimensions de 2,66m sur 7,76m. La barre transversale serait alors relevée de 22 cm, soit du diamètre du ballon, et chaque montant vertical serait également déplacé d'une distance égale. Un réel débat a donc eu lieu dans les années 1960-1970 sur cette question, mais à part celle de la NASL, aucune autre demande de modification ou d’expérimentation n’est évoquée dans les archives du Board .

31 La dimension officielle, toujours d’actualité, est de 8 pieds sur 8 yards, soit 2m44 sur 7m32. 32 João Havelange. Président de la FIFA entre 1974 et 1998. Il avait succédé à Stanley Rous. 33 Georges Boulogne, instructeur fédéral français. 34 Pierre Junqua : administrateur du groupement professionnel. 163

7. Expérimentations La question de savoir si le ballon a entièrement franchi la ligne de but, anime les discussions depuis la finale de la Coupe du monde de 1966 35 . Aujourd’hui encore personne ne peut affirmer si l’arbitre qui a validé le troisième but anglais inscrit par Geoffrey Hurst à la 100 ème minute avait pris ou non la bonne décision. Pour mettre fin à ce genre de problème, au début des années 2000, les chercheurs d’Adidas ont mis au point un ballon prototype avec puce électronique, qui détermine grâce à des capteurs la position exacte du ballon par rapport à la ligne de but. L'IFAB a décidé en 2005 d'autoriser l'expérimentation de ce système en compétition et a habilité la FIFA à la faire lors du Championnat du Monde U-17 au Pérou, du 16 septembre au 2 octobre. La FIFA a supervisé ces premiers tests officiels de systèmes technologiques, mais les résultats n’ont pas été concluants. Le système pouvait effectivement déterminer si le ballon avait passé entièrement la ligne de but ou non … mais quand le ballon passait à coté du cadre le système accordait aussi le but ! Cette expérimentation s’inscrit dans un débat plus large, celui de l’introduction de la technologie, comme aide à l’arbitrage. Le Board a rejeté dès 2008, le recours à la vidéo. La question fut de nouveau débattue en 2010 lors de la 124 ème réunion annuelle de l’IFAB : les membres ont décidé de ne pas aller dans la direction des technologies sur la ligne de but et de ne pas continuer les expériences en la matière. Cette décision a été mûrement réfléchie après avoir entendu les arguments des développeurs des systèmes d'aide vidéo à l'arbitrage Cairos et Hawk Ey ; l’une des technologies consistait en une puce dans le ballon et l’autre en des caméras placées dans le but, fournissant des images permettant la capture du mouvement des corps et du ballon. Une décision forte qui s’explique par de multiples facteurs. Pour Jonathan Ford, de la Fédération galloise et Patrick Nelson, de la Fédération d’Irlande du Nord, le plus important concerne sans doute la philosophie du jeu car l’aspect humain du football est essentiel à ce sport. Le Board ne souhaite pas non plus que le jeu soit interrompu à maintes reprises. Les représentants de la FIFA ont voté contre l’introduction de la technologie dans le football. « Si nous mettions en place cette technologie pour la ligne de buts, pourquoi pas pour d’autres situations ? Les hors-jeux, les actions litigieuses, et vous terminez avec la vidéo. Ce n’est pas ce qui a été décidé, nous voulons garder le jeu tel qu’il est ». Ces propos de Jérôme Valcke, Secrétaire Général de la FIFA, montre que le Board ne souhaite pas enclencher le processus technologique, qui symbolise la modernité, mais la question n’est pas close.

35 Finale de la Coupe du monde du 30 juillet 1966 à Wembley : Angleterre - RFA : 4-2 (a.p.). 164

8. Analyse systémique

Le Board modifie la loi sur le but marqué en 1903, en ajoutant simplement au début de la règle « Sauf indication contraire avec les autres lois »36 . Ceci montre le caractère systémique des lois du jeu et permet également d’anticiper les évolutions des autres lois, sans éprouver la nécessité de réécrire la loi 5 de l’époque, qui deviendra la loi X en 1939. Cette loi est en relation avec toutes celles des remises en jeu. Chacune d’elle précise s'il est possible pour le joueur qui l’exécute de marquer directement. Pour illustrer ce propos, nous pouvons nous référer au règlement de 1905 37 commenté par Ernest Weber. Il précise que si le ballon, à la suite d'un coup de pied de coin, coup de pied de but ou d'une remise en touche, franchit la ligne de but, entre les poteaux, directement, c'est à dire sans avoir été touché par un joueur, le but n'est pas valable : il y a lieu seulement à un coup de pied de but par le camp défendant (loi XVI). Nous avons montré que la loi s’était transformée et qu’il est aujourd’hui possible de marquer directement sur un coup franc direct (loi XII), sur l’engagement (loi VIII), et sur le corner (loi XVII). La loi X est également en interaction avec le ballon (Loi II) et l’arbitre (Loi V). Pour Michel Serres 38 : « un but est un événement juridique décidé, mieux, créé même par l’arbitre ». Si le ballon pénètre complètement dans le but, l’arbitre prend la décision ou non de le valider. Cette sentence est définitive, le score ne pouvant en aucun cas être modifié à postériori. La décision de 1998 39 du Board précise que le score et les faits en relation avec le jeu doivent être inscrits sur la feuille de match. La loi X est aussi en relation avec la loi I concernant le terrain et spécifiquement la cible. La décision suivante le montre : « Un but sera marqué quand le ballon aura entièrement dépassé la surface formée par le bord extérieur de la barre transversale et des poteaux de but, et le bord extérieur de la ligne de but ». Le fait que lors de la réunion du Board de 1960 40 cette décision soit transférée de la loi I vers la loi X prouve l’interdépendance de ces deux lois du jeu. L’argument sémantique peut sans doute également être retenu. En effet, Philippe Villemus 41 remarque judicieusement, que l’on utilise curieusement, le même mot « but » pour désigner la « cage » où doit être projeté le ballon, et

36 AGM. of 1903 : « Except as otherwise provided by these Laws, … ». 37 Weber, E. (1905), op. cit., Pp.165-166. 38 Tous arbitres. (2010). Paris, Editions Chroniques-Mediatoon Licensing SA, p. 15. 39 Réunion du Board de 1998 : Proposition du Sub-committee , acceptée par le Board 40 AGM of 1960 : Proposal by Football Association adopted. « A goal shall be scored when the ball has holly passed over the surface formed by the exterior edge of the cross-bar and the goal-posts, and the outside edge of the goal-line ». 41 Villemus, P. (2006), op. cit., p. 132. 165 le fait de marquer. Cet argument est également valable en Anglais où la même terminologie, « goal », est utilisée.

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Le football, le rugby, le basket et le handball se déroulent en temps limité, c'est le temps qui prime ; le résultat de la partie (qui accepte le match nul) est fourni par l'état du score enregistré à la fin de la période réglementaire. En revanche pour le volley-ball et l’ultimate, le jeu impose un score limite qui oblige l’équipe gagnante à obtenir un certain nombre de points ou de sets. Cette catégorie de sport, contrairement à la précédente interdit le match « nul ». Selon Pierre Parlebas « la marque progresse par saut ou « pas » dont la valeur est imposée par la règle »42 . Le « pas » de marque possède une valeur unique en football, au handball et au volley-ball. En revanche les règlements spécifiques du rugby et du basket-ball 43 accordent à ce « pas » plusieurs valeurs dont chacune sanctionne un type d'interaction particulier, permettant de cumuler des points . C es valeurs ont varié au cours du temps. Le rugby se différencie également des autres sports collectifs car les interactions de marque ont des modalités différentes. Il est en effet possible de marquer avec les mains un essai ou en inscrivant un but avec le pied. Les interactions de marque réussie s’accompagnent de « saut » du score : 3 points pour un « drop », ou une pénalité, 5 points pour un essai et 2 points pour sa transformation. À l'origine, les essais n'étaient pas comptabilisés. L'objectif était alors de franchir la ligne de but adverse pour obtenir le droit de « tenter » de marquer un « but » ( goal ) en faisant passer au pied le ballon entre les barres. Paradoxalement, pour « le jeu à la main », du football rugby, la seule interaction de marque se réalisait avec le pied. Une comptabilité complexe et subtile s’est progressivement mise en place pour valoriser le jeu à la main, avec une augmentation constante des points attribués à l’essai 44 . Les interactions de marque réussies avec le pied permettent au score de faire « un saut » de deux points ou de trois points, avec encore aujourd'hui la possibilité de gagner le match en marquant moins d’essais que l’adversaire, ou aucun essai. Au basket-ball la valeur d’un panier permet d’obtenir de un à trois points en fonction des conditions de sa réalisation. Le facteur déterminant est le lieu du départ du shoot de

42 Parlebas, P. (1999), op. cit., p 100. 43 Basket-ball: trois points pour un tir à plus de 6m25, deux pour un panier, et un pour un lancer-franc. 44 Garcia, H. (2011). La fabuleuse histoire du rugby. Paris. 9 ème édition. Editions de la Martinière., p. 120. L'essai vaut 1 point en 1884 (un but = 2 points) ; 2 points en 1891 (un but = 3 points) ; 3 points en 1894 ; 4 points en 1971 ; 5 points en 1992. 166 précision, qui en fonction de la distance rapporte 2 ou 3 points. La ligne des trois points apparaît en 1984 à 6 m25 et se trouve en 2011 à 6m 7545 du panier. La même action motrice, un tir à 6m 50, rapporte étrangement 2 points en 1980, puis 3 points en 1990 et de nouveau 2 points en 2011 ! Pour Pierre Parlebas « Le système des scores 46 est l'un des universaux du jeu sportif ». Les jeux sportifs institutionnalisés organisent leur système de scores selon une structure très élaborée qui aboutit toujours à un résultat final. La logique interne de chaque activité est en partie déterminée par les actions motrices autorisées, les spécificités de la cible et les modalités de marque : donner un coup de tête dans le ballon, tirer au but avec la main, shooter avec les mains au panier, tirer un lancer franc, botter un drop, « aplatir » le ballon pour un essai, « smacher » le ballon… Il précise que la nature du système des scores, « entraîne des conduites stratégiques extrêmement variables, reflète à coup sûr certains traits de la logique interne du jeu »47 . L’évolution du jeu, celle de la qualité des joueurs, la volonté de maintenir un équilibre entre l’attaque et la défense, ou entre le jeu au pied et à la main sont des éléments d’explication des ajustements des lois et notamment de la marque. Mais le sport est devenu un vrai phénomène de société et un véritable spectacle aux enjeux économiques importants. La recherche de la « spectacularité »48 sportive est l'un des moteurs du développement du sport : « le système de scores est, dans tous les cas, construit de façon à permettre des revirements de situation, de façon à entretenir jusqu'au bout l'intérêt des spectateurs »49 . Cette logique externe influence le règlement, par exemple au volley-ball l’invention du tie-break en 1988 pour diminuer la longueur de la partie. Après cette date, au cours du set décisif sur le service adverse, il est possible de marquer le point, et depuis le premier janvier 1999, tous les points comptent dans tous les sets qui se jouent désormais au tie-break.

Synthèse Le football se caractérise par la permanence de la marque. Il faut non seulement cadrer son tir mais encore lui donner assez de puissance et de vice pour tromper la vigilance d'un

45 La distance de 6m75 avait été instaurée pour les matchs FIBA-NBA depuis l’Open McDonald’s de 1987 à Milwaukee. 46 Parlebas, P. (1999), op.cit. p. 275 : Définition du système des scores : réseau des réussites, des gains ou des points acquis par les joueurs ou les équipes d'un jeu sportif, et prévus explicitement par le code de jeu, tant dans le déroulement de tous les possibles que dans la désignation éventuelle des gagnants ou des perdants. 47 Parlebas, P. (1999), op. cit., p. 275. 48 Parlebas P, (1981).Contribution à un lexique commenté en sciences de l'action motrice. Paris, Insep, p. 234. 49 Ibid., p. 235. 167 homme autorisé à détourner le ballon avec ses mains. Une cible basse, limitée en largeur, facile à défendre contre des actions motrices à réaliser sans les bras sont quelques facteurs qui expliquent en partie la faiblesse des réussites. Les possessions de balle se terminent rarement par un but, avec des scores à la fin du match ridiculement faibles par rapport aux autres sports collectifs. L’étude des buts inscrits en Coupe du monde, ou en Coupe d’Europe, montre un net fléchissement depuis la fin des années 60 50 Ce jeu ne semble pas avoir été inventé dans la logique de marquer facilement des points 51 . La marque 52 étant difficile, ce n'est pas si simple de se départager ; les scores sont serrés et le jeu se termine souvent par une égalité. Pour Pierre Parlebas, le score censé « résumer » la compétition , « n'est pas sans relation avec la spectacularité recherchée de l'affrontement. Elle est un trait déterminant de la logique interne du sportif »53 . De fait, le résultat reste indécis et serré au football pendant presque toute la partie. Un but modifie le résultat du match, il permet d’obtenir la victoire ou de revenir au score. Dans ce cas les règlements des compétitions peuvent prévoir des dispositions relatives aux prolongations ou à d’autres procédures agréées par le Board permettant de déterminer le vainqueur du match. En 1970, le Board décide d’introduire les tirs aux buts à la fin des prolongations, un spectacle avec une dimension dramatique, beaucoup plus spectaculaire que le simple jet d’une pièce de monnaie. Depuis la création du Board, il n’existe au football qu’une seule manière de marquer un but, il suffit simplement de faire pénétrer le ballon dans la cible horizontale. L’étude historique des lois du jeu montre une permanence du « pas » de marque. Pour un but marqué, un point est accordé au tableau d’affichage. La prohibition spécifique à ce sport collectif, « l’interdiction d’utiliser ses mains pour porter, dévier ou propulser le ballon dans le but » est toujours d’actualité. Cette précision aurait pu être retirée puisque depuis 1939, la loi commence par l’expression « Sauf les exceptions prévues par les lois du jeu », ce qui spécifie implicitement qu’un joueur ne peut utiliser ses mains comme le mentionne la loi XII. La loi sur le but marqué fut modifiée à onze reprises. Contrairement au XIX e siècle, les buts marqués directement sur coup de pied de coin, engagement ou coup franc direct sont valables. La validité ou non d'un but décrit donc aussi une actualité de la règle. Cette évolution n’est peut être pas terminée, par exemple des propositions ont été faites pour que

50 Moyennes des buts par match en Coupe d’Europe. Entre 1956 et 1965 : 4,7 buts, entre 1966 et 1975 : 3 buts ; entre 1976 et 1985 : 1,4 buts. D’après les statistiques de France Fooball. 51 Par exemple le premier match opposant deux pays se solde par un score nul et vierge. Écosse-Angleterre 0-0 samedi 30 novembre 1872 à Patrick, Écosse, 4.000 spectateurs). 52 Parlebas, P. (1999),op. cit., p. 237.. La marque: total variable des points attribués à un joueur ou une équipe en fonction de ses interactions de marque réussies au cours du jeu. 53 Parlebas, P. (1981), op. cit., p. 101. 168 tous les coups francs deviennent directs. Par contre, le règlement n’autorise toujours pas à marquer d’une remise en touche. Il est possible d’échapper à la prohibition, « jouer sans les mains » en dehors des limites du terrain, mais marquer avec les mains serait contraire à l’esprit du jeu. Il est bien sûr imaginable que la remise en jeu d’une touche se fasse un jour avec les pieds et que cette question soit de nouveau d’actualité. Les perspectives dans la modification de la marque peuvent s’inspirer des propositions rencontrées dans les archives du Board , mais sont également à rechercher dans les autres sports collectifs. Le renforcement du côté spectaculaire du jeu a été obtenu en partie au volley-ball, au rugby, et au basket-ball par un changement de la marque. Cela pourrait revenir en football à accorder un point sur un penalty, deux pour les buts sur des actions de jeu, les buts hors de la surface, comme les tirs au-delà de la ligne des 6m75 au basket, seraient valorisés et rapporteraient 3 points. Ces modifications, qui impliqueraient un changement total de mentalité n’ont jamais été proposées par les fédérations. Modifier la marque, accorder des points supplémentaires à certains buts marqués, est une variable didactique utilisée par les éducateurs et les professeurs d’éducation physique et sportive, pendant les entraînements ou les leçons utilisant comme support l’activité football. Ce procédé répond à la logique du « score parlant » qui privilégie certaines actions motrices, par exemple les buts de la tête, de volée ou en une touche de balle, qui compte double ou triple

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Chapitre 11 Loi XI : La loi du hors-jeu 1 ______

« Supprimer le hors-jeu, équivaudrait presque à promouvoir un sport nouveau qui, très probablement, ne connaîtrait pas un succès aussi grand que le football actuel ». Jean Dufour 2

1. Loi actuelle Aujourd’hui la règle peut se résumer par : un joueur est en position de hors-jeu s’il est plus près de la ligne de but adverse qu’à la fois le ballon et l’avant dernier défenseur. Cette position ne doit être jugée qu'au moment où le ballon est touché ou joué par un coéquipier 3. Si à cet instant le futur receveur se trouve dans son propre camp, alors la règle du hors-jeu ne s’applique pas. Des cas d'exceptions existent lorsque le joueur reçoit directement le ballon d’une des remises en jeu suivantes : coup de pied de but, rentrée de touche, ou coup de pied de coin. Le règlement stipule que le hors-jeu n'est pas une faute en soi. Un joueur en position de hors-jeu ne doit pas être sanctionné quand il n'intervient pas dans le jeu, n'influence pas un adversaire ou n'essaye pas de tirer un avantage de cette position. Avec la règle actuelle du hors-jeu passif (2005) le joueur est en infraction seulement s’il touche le ballon, ou participe activement au jeu, et ne sera sanctionné qu’à ce moment là.

2. Principes de cette loi Tout comme les termes d'attaque, de défense, d'ailier, d'attaquant et de tir, le concept de hors-jeu trouve son origine dans la vie militaire. « En dehors de votre équipe » ou « hors jeu » signifie qu'un joueur attaquant, se trouvant devant le ballon, est en position illégale. Mais la traduction mot à mot de « off side » est « de l’autre coté ». Il n’est pas permis de dépasser une ligne ou une tranchée, au risque de se retrouver dans le camp adverse, pour poursuivre la référence militaire.

1 Law XI – Off-side. 2 Dufour, J. (1972) Football moderne. Paris, Editions Bornemann, p. 40. 3 AGM. of 1997 : « Off-side shall not be judged at the moment the player in question receives the ball, but at the moment when the bal l is passed to him by one of his own side ». 170

Le premier principe que nous pouvons retenir consiste à mettre de la clarté dans le jeu. Les pionniers du Football et du Rugby avaient en effet senti que le jeu devait se développer autour du possesseur du ballon, et par conséquent qu'il fallait interdire l'anarchie qui naîtrait de joueurs placés n'importe où sur le terrain par rapport au ballon. Il est possible d’imaginer les mêlées désordonnées avant l’application effective de la règle du hors-jeu en se référant aux propos de Thomas Hugues, ancien élève de l'Ecole de Rugby : « Les deux camps se refermèrent et, pendant plusieurs minutes, vous ne pouvez rien voir qu'une oscillante foule de garçons violemment agités en un point. Ça c'est l'endroit où se trouve la balle. C'est là que sont les joueurs ardents pour se rencontrer, et la gloire et les coups pour être reçus. Vous entendez le bruit mat de la balle et les cris de « Vous êtes hors-jeu », « Descendez avec lui », « Culbuter le »4. Thomas Hugues évoque le rugby des années 1840, sans la règle du hors-jeu qui apparaît lors de la saison 1841-1842. Il semble que cette règle fut introduite dans l’espoir de mettre de l'ordre et de l'intelligence dans le jeu. Elle fut certainement difficile à intégrer par des joueurs livrés à eux-mêmes sur le terrain, avant la mise en place du trio arbitral en 1891. Cette loi impose, surtout de la mesure, de l’intelligence dans l’engagement physique pour tous les joueurs. En effet, les défenseurs 5 peuvent également être sanctionnés, ce qui est toujours le cas aujourd’hui au rugby. Cette organisation du jeu issue de la loi se confronte à la réalité du terrain. Les gravures proposées par Louis Bédarieux datées de 1868 et 1890 6, témoignent de mêlées encore très confuses et violentes. L’application réelle de la règle contribua à la clarté du jeu, avec une ligne de hors-jeu qui passait par le ballon, une véritable frontière entre les camps opposés, avec des équipes se faisant face. Nous dégageons, comme principe second, la nécessité pour un joueur de se tenir derrière la balle. Lorsqu'un joueur est en possession du ballon, ses partenaires doivent donc se trouver derrière lui. L’article 6 du règlement de la Football Association précise qu’« Un joueur sera hors-jeu immédiatement s'il est devant le ballon, et doit retourner derrière le ballon dès que possible ... » 7. Cette règle est restée commune au football et au rugby de 1863 à 1871. La définition est donc, à resituer dans une perspective historique, à une époque où le Football- Rugby 8 et le Football Association étaient entremêlés. Elle nous permet d’envisager la simplicité de cette règle, et de mettre en lumière les principes fondateurs de la loi. Le hors-jeu

4 Hughes, T. (1857).Tom Brown's Schooldays. Cambridge, Macmillan. Thomas Hugues était un ancien élève de l'Ecole de Rugby. 5 Les défenseurs : tous les joueurs de l’équipe qui ne possède pas le ballon. 6 Bédarieux, L. (2008). Le Foot de Papa. Terres éditions, p.15 & 19. 7 Les 14 lois originelles du jeu parues dans le journal sportif Bell’s Life. Cité en version originale par Eisenberg, C., & Co. (2004), op. cit., p. 20. Cf. annexe n°65, p. 167. 8 La fédération anglaise de rugby est créée en 1871 sous le nom de : Rugby Football Union. 171 en football est une adaptation de l'interdiction de la passe en avant, telle qu'elle existe au Rugby. Ceci peut ne pas sembler très évident à première vue, car l'explication communément adoptée aujourd’hui fait référence au nombre et à la position des défenseurs pour aborder la loi du hors-jeu. Mais ce qui prime avant tout, c'est la position du ballon. La formule de Edouard Pontié en 1905 semble très explicite à ce sujet : « Un joueur non plus n'est jamais hors-jeu s'il suit un joueur de son propre camp qui joue le ballon »9. Mais ceci est aussi confirmé par le règlement fixé par le Board en 1927 10 . En fait, il y a hors-jeu si, au départ d'une passe, le receveur est plus proche de la ligne de but adverse que le ballon. A l’origine, cette règle contraint le joueur ou un de ses partenaires à courir toute la distance parcourue par le ballon, ce qui est encore le cas aujourd’hui au rugby. Le règlement en 1863 11 stipulait qu’un joueur était hors-jeu immédiatement s'il était devant le ballon. Si le ballon est frappé vers l’avant par un joueur de sa propre équipe dans sa direction, il ne doit pas le toucher ... à moins qu’un de ses coéquipiers au même niveau ou devant lui donne un nouveau coup de pied dans le ballon.

3. Historique de la loi Dans les 37 règles du football datant du 7 septembre 1846 joué à l'Ecole de Rugby figure celle du hors-jeu. Deux ans plus tard, en 1848 les premières règles de Cambridge précisent : « lorsqu'un joueur a botté la balle, tout autre joueur de la même équipe qui se trouve plus près de la ligne de but adverse est hors-jeu et ne peut ni toucher la balle lui-même ni empêcher un autre de le faire »12 . Les règles de décembre 1863 de la Football Association, confirment la règle du hors-jeu : «Un joueur sera hors-jeu immédiatement s'il est devant le ballon, et doit retourner derrière le ballon dès que possible. Si le ballon est frappé vers l’avant par un joueur de sa propre équipe il ne devra pas le toucher ou lui donner un coup de pied d'avance (vers l’avant) jusqu'à ce qu'un joueur adverse donne d'abord un coup de pied ou que l'un des joueurs de son équipe au même niveau ou devant lui donne un coup de

9 Pontié, E. (1905), op. cit., p. 162-164. 10 Règlement fixé par le Board en 1927 : Art.6 : Lorsqu'un joueur joue le ballon, tout joueur du même camp qui, au moment où le ballon est touché, est plus rapproché de la ligne de goal adverse que celui qui a touché le ballon en dernier lieu, est hors jeu ( out of play). 11 1863. Les tables de loi : facsimilé des fourteen lows ot the game . Loi VI : « A player shall be out of play immediately be is in front of the ball and must return behind the ball as soon as possible. If the bal lis kicked past a player by his own side, he shall no touch or kick it or advance until one of the other side has first kicked it or one of his own side on a level with or in front of him has been able to kick ».(cf. annexe n°65, p. 167. 12 Les premières règles de Cambridge, octobre1948. 172 pied »13 . Dans les premiers systèmes tactiques 14 mis en place, les équipes alignaient jusqu'à huit attaquants : le seul moyen de faire avancer le ballon était de dribbler ou de jouer en mêlée car, il était impossible de réaliser une passe vers l'avant. Les joueurs étaient fixés en arrière du ballon, et le jeu pouvait être modélisé par une ligne d’affrontement particulièrement violente où les plus courageux venaient révéler leur ardeur. À cette époque, deux philosophies s'affrontent. Le premier courant, représenté par les élèves de la ville de Rugby, tient à conserver cette ligne imaginaire passant par le ballon, et à obliger les joueurs des deux équipes à se tenir derrière le ballon et son porteur. Mais un second courant, défendu par la Sheffield Association 15 , proposait une autre approche du jeu qui voulait faire disparaître la ligne d’affrontement, et abolir la ligne de hors-jeu passant par le ballon. Il est donc possible d'affirmer qu’à cette époque deux sortes de football se côtoyaient, l'un avec une règle du jeu identique au rugby et l'autre représenté par Sheffield, sans application de la règle du hors-jeu. Les différences furent finalement aplanies à la fin des années 1860 lorsque les écoles de Westminster et de Chaterhouse entrèrent dans l’association, et apportèrent avec elles une nouvelle règle du hors-jeu « qui permet de passer le ballon à tout équipier qui aurait plus de trois joueurs entre lui et la ligne de but du camp adverse »16 . La Football Association 17 prit la décision capitale d'adopter cette règle en 1867. Une première transformation fondamentale voit apparaître une ligne de hors-jeu fluctuante qui se réfère à la position d’un joueur et non plus à celle du ballon. À partir de cette date, il faut considérer qu'il existe une règle du hors- jeu spécifique au football qui se différencie de celle du rugby. Les joueurs peuvent se déplacer et se répartir sur tout le terrain. Il devient possible de venir devant le ballon, donc de faire des passes à un partenaire situé vers l’avant mais aussi de se déplacer dans le dos des défenseurs. Le jeu de passes fait partie intégrante du football. Le passage du « dribbling game » au « passing game » est considéré par les historiens du football, comme la véritable naissance de ce sport. Cette scission entre le football et le rugby devient effective en 1871 avec la création du Rugby Football. La possibilité ou non des joueurs de franchir la ligne du ballon distingue les deux formes de jeu. Avant la création du Board , la loi fut donc profondément transformée. La logique interne du jeu, et notamment la libre circulation des joueurs fut modifiée. Cette évolution

13 Les tables de la loi de 1863 : Règle numéro 6. Cf. annexe n°65, p. 167. 14 Les systèmes de jeu : Cf. annexe n°75, p. 181. 15 La Sheffield Association (S.A.) : Création en 1857 autour du Club de Sheffield fondé la même année. Elle regroupe les clubs du Nord de Londres qui avaient adopté en 1866 « le règlement de Sheffield ». 16 Tunmer N.G. & Fraysse, E (1897), op. cit., p. 23. 17 La Football Association (FA) est créée en 1863 à Londres. 173 institutionnelle contribua à une révolution tactique et à la naissance de nouveaux systèmes de jeu, avec en particulier le système pyramidal 18 qui fut dominant pendant 50 ans. Dès l’origine cette loi connut des problèmes d’application et fut contestée. Par exemple, lors de la finale de la Cup 19 en 1884 20 la règle du hors-jeu créa des troubles et l’arbitre, le commandant Francis Marindin, annula pour cette raison quatre buts !

4 Transformations de la loi décidées par le Board La ligne de hors-jeu imaginaire est une permanence dans l’histoire de la règle. Par contre le point de référence par laquelle passe la ligne se transforme. Cette ligne flottante dépend d’abord d’un objet mobile, le ballon. Il n’existe au départ qu’une seule ligne de hors- jeu passant par le ballon et concernant donc tous les joueurs. A partir de 1867, la « règles des 3 joueurs », précise que le joueur est hors-jeu « s’il n’y pas 3 adversaires devant lui ». Il coexiste ainsi deux lignes de hors-jeu à hauteur de l’antépénultième défenseur de chaque équipe. A partir de ce moment là, et contrairement au Rugby, seuls les attaquants, joueurs de l’équipe en possession de la balle, peuvent être sanctionnés pour leur position de hors-jeu. La ligne fluctuante passe donc par l’antépénultième défenseur à la fin du XIX e siècle. Cette loi sera souvent débattue par le Board et subsistera jusqu’en 1925.

4.1. La « règle des deux joueurs » La « règle des trois joueurs » devient « règle des deux joueurs », le 1 er septembre 1925. Un joueur est hors-jeu s'il n'y a pas deux joueurs (et non plus trois) plus rapprochés que lui de la ligne de but. La première demande pour modifier cette loi dans les archives du Board date de 1894 21 . Après 30 ans d’attente et sept propositions écossaises infructueuses (1894, 1902, 1913, 1914, 1922, 1923, 1924) la règle fut enfin adoptée en 1925. Cette procédure révèle la résistance d’une institution frileuse à changer la règle. Le Board cède car cette loi donnait un véritable pouvoir à la défense et fut élevée à hauteur d’une véritable tactique en 1924, par le club de Newcastle avec une remontée rapide de tous les défenseurs. La fréquence des hors-jeu

18 2-3-5 : système de jeu : (1 gardien ) 2 arrières, 3 milieux, 5 attaquants. Système de jeu pyramidal : la disposition des joueurs sur le terrain représente une pyramide, la base correspond aux cinq attaquants, puis les trois milieux de terrain et enfin les deux défenseurs symbolisent la pointe de la pyramide. Cf. annexe n°75, p. 181. 19 Cup : La FA Challenge Cup, appelée Coupe d'Angleterre en français, est une compétition à élimination directe anglaise fondée en 1871. 20 Finale Cup 1984: Blackburn - Queen’s Park Glasgow: 2-1. 21 AGM. of 1894 : Proposal by Scottish F. A. Law 6 : After word « played », to read ; -« Unless there are at such moment of playing or throwing in at least two of his opponents nearer their own goal-line. » 174 sanctionnés empêchait le bon déroulement de l'action et la possibilité de marquer des buts. Le Board jugea alors nécessaire l’évolution de la loi en raison d’une diminution du nombre de buts, et d’une baisse du temps de jeu due aux interruptions de l’arbitre. Pour N. Elias, « L'élasticité de l'ancienne règle, exploitée avec habileté, avait eu pour conséquence de multiplier les matchs nuls. La balance penchant du côté de la défense, les jeux avaient tendance à traîner en longueur, sans qu'il fût possible de départager les adversaires ou de marquer suffisamment de buts… 22 Ce changement illustre une volonté d’« établir une configuration plus fluide qui restaurerait l'équilibre entre l'attaque et la défense »23 . Le hors- jeu étant devenu une entrave au jeu d’attaque, le Board modifia la loi dans le sens d’un assouplissement. L’idée admise est que cette règle « semble avoir donné de bons résultats car le jeu est devenu plus offensif »24 . L’évaluation objective de cette modification est possible en se référant au temps de jeu effectif et surtout au nombre de buts marqués. Les conséquences de cette évolution ont été étudiées par Patrick Blain 25 (1979) dans le Championnat Anglais, avec une remontée spectaculaire du nombre de buts inscrits (2,8 pour la saison 1924-1925 contre 4 buts par match en 1925-1926). Nous pouvons prolonger cette réflexion avec l’étude statistique des buts lors des Jeux Olympiques (1924, 1928), de la Coupe du monde (1930) et le nombre de buts marqués par l’équipe de France avant et après 1925. Les résultats confirment majoritairement la thèse de Patrick Blain. Paradoxalement, John Langenus fait remarquer que les champions Olympiques Uruguayens marquèrent plus de buts à Paris en 1924, qu’à Amsterdam en 1928, où ils pratiquèrent un football « fignolé et artistique »26 . Seconde surprise la moyenne des buts inscrits lors de la première Coupe du Monde en Uruguay en 1930 (3,9 buts par match) est inférieure à celle des JO de 1928 (5,78 buts par match). et également à celle des JO de 1924 (4 buts par match). Il est possible d’envisager une influence uniquement à très court terme, en raison des dispositifs défensifs qui s’adaptent de mieux en mieux à cette modification. Les managers, constatant la nouvelle perméabilité de leur défense, n’ont pas tardé à faire décrocher un attaquant de façon à venir renforcer les lignes arrières, ce glissement s’effectuant bien évidemment au détriment du jeu offensif. Le changement de 1925 provoque l’abandon progressif du système pyramidal (2-3-5) et induit la création d’un nouveau système de jeu dominant. Pour Jacques Ferran ce système se « répandit peu à peu dans le monde sous le

22 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 275. 23 Ibid., p. 275. 24 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p.131. 25 Blain, P. (1979). Le Football Britannique. Editions Famot. 26 Langenus, J. (1943). Football et Footballers. Gand, Belgique, Snoeck-Ducajou et Fils., p. 83. 175 nom de W. M. C'est là l'exemple le plus frappant d'un changement de règle qui conduit à une révolution du jeu »27 . Ce W.M.28 fut notamment mis en place à Arsenal, sous l’influence de son célèbre manager Herbert Chapman, à la fin des années 20. Les historiens pensent qu’il s’agit véritablement de la dernière grande modification des règles, un changement qui contribua à renforcer l'essor du football. Les effets de la modification de la loi XI, ne sont donc pas simplement à rechercher dans le nombre de buts marqués. Jean Dufour fait l’hypothèse que «…tout au long de l’évolution de la tactique collective du football, il apparaît qu’à chaque fois que l’on a retiré une possibilité à la défense, les systèmes défensifs se sont numériquement renforcés» 29 . La modification de la loi du hors-jeu était destinée à augmenter le nombre de buts marqués, mais ce sont les intentions des joueurs et des entraîneurs qui semblent déterminantes dans ce domaine. En effet, avec les mêmes lois du jeu, il est possible de proposer un football orienté vers l’offensive, ou axé sur le pôle défensif.

4.2. Position de l’attaquant en fonction de la ligne imaginaire de hors- jeu. Avec la modification du référentiel concernant la ligne imaginaire du hors-jeu, selon les époques les attaquants devaient se tenir d’abord derrière le ballon, puis derrière l’antépénultième défenseur (1867) et depuis 1925 derrière l’avant dernier défenseur. La volonté de proposer un football plus offensif dans les années 1990, se traduit par une nouvelle mesure. Avant cette date la définition précisait qu’un joueur était en position de hors-jeu s'il était plus près de la ligne de but adverse que le ballon sauf « S'il y a, au moins, deux adversaires plus rapprochés que lui de leur propre ligne de but »30 . Le Board accepte en 1990 de modifier la règle, et remplace la dernière partie de la phrase par « S’il n’est pas plus rapproché de la ligne de but adverse qu’au moins deux de ses adversaires »31 . Un avantage considérable est donné aux attaquants, qui n’ont plus besoin de partir derrière le défenseur quand le ballon est joué par un partenaire. Le Board, en 2005, clarifiera, l'expression « plus près de la ligne de but adverse ». Cela signifie que n'importe quelle partie de la tête, du corps ou des pieds du joueur est plus près de la ligne de but adverse qu'à la fois le ballon et l'avant-

27 Ferran, J. (1975). Football Magazine, 194, pp. 25-32 et 49-56, décembre 1975. 28 3-2-2-3 ou W. M. Les pointes de chaque lettre indiquent la position des joueurs sur le terrain. : 3 arrières, 2 milieux, 2 inters et 3 avants. Système dominant à partir de la fin des années 20 jusqu’au début des années 50 (cf. annexe n°75, p. 181). 29 Dufour, J. (1972), op. cit., p. 40. 30 « ..there are least two of his opponents nearer their own goal-line than he is ». 31 AGM. of 1990 : Proposal by Scottish Football Association adopted : « He is not nearer to his opponents’ goal-line than at least two of his opponents ». 176 dernier adversaire. Il n’est donc pas tenu compte de la position des bras dans cette définition. Cette précision est difficilement vérifiable avec les ralentis proposés à la télévision, seule une image arrêtée permettrait de se faire une juste opinion… mais ces technologies ne sont pas à la disposition des arbitres assistants.

4.3. Libre circulation du ballon et des joueurs sur le terrain. Une première étape décisive est atteinte avec la modification de 1867 qui permet aux joueurs de se déplacer devant le porteur de balle, et de faire des passes vers l’avant. Mais progressivement, la libre circulation du ballon est limitée par la règle des 3 joueurs. En effet, « Les défenseurs avaient habilement exploité cette règle du hors-jeu. Elle obligeait les attaquants à progresser vers le but adverse en ayant recours aux passes en arrière, héritage du football originel que le rugby a d'ailleurs conservé »32 . Le passage de la règle des trois joueurs aux deux joueurs de 1925 va permettre, de nouveau, une meilleure circulation des joueurs et du ballon. D’autres modifications vont amplifier ce phénomène : le fait de ne pas être hors-jeu dans son camp, ou encore de pouvoir être en position de hors-jeu sans être sanctionné. Le Board en 1907 33 , décida, qu'un joueur ne serait plus hors-jeu lorsqu'il se trouverait dans son propre camp au moment où le ballon serait joué par n'importe quel équipier. La circulation des joueurs devient donc illimitée dans leur propre moitié de terrain. A l’origine, être en position de hors-jeu constitue une faute, mais le Conseil Général Anglais, du 14 décembre 1903, décide que le seul fait pour un joueur d’être en position de hors-jeu ne constitue plus une infraction. Cette modification sera confirmée par le Board, en 1924 34 , qui précisera que l’infraction consiste à influencer ou à interférer dans le jeu. Cet assouplissement de la loi favorise l’attaque et le Board considère qu’« être en position de hors-jeu ne constitue pas une faute en soi »35 . En effet, seul le joueur qui « gêne un adversaire », « prend part au jeu » ou « influence le jeu » commet une infraction et risque d’être sanctionné. En 2005, la notion de hors-jeu passif implique que si le joueur ne touche pas le ballon, il est présumé innocent et peut se déplacer librement sur tout le terrain et venir roder derrière le dernier rideau défensif.

32 Eisenberg, C., & Co. (2004), op. cit., p. 132. 33 AGM of 1907 : « A player is not out of play… when he himself is within his own half of the fied of play at the moment the ball is played or thrown in from touch by any player of the same side ». 34 Réunion du Board de 1924. 35 Circulaire du Board de 1959. 177

4.4. Joueurs ont de moins en moins de possibilités d’être sanctionnés pour leur position de hors-jeu . Toutes les modifications abordées vont dans le sens de cette évolution. Les législateurs privilégient constamment un rééquilibrage au profit de l’attaque et au détriment de la défense. La plupart des exceptions à la règle du hors-jeu concernent les remises en jeu qui apparaissent progressivement avant 1925 au cours de « l’époque juridique »36 où l’histoire du football se confond avec la définition des lois du jeu : le coup de pied de but (1920), la rentrée de touche (1920), le coup de pied de coin (1920) et enfin la balle à terre en 1923 37 . Cette dernière exception constitue une surprenante décision quand on sait que sur cette remise en jeu depuis 1914, l’arbitre doit tout simplement laisser tomber le ballon à terre. Il est possible d’imaginer que l’arbitre fasse une sorte d’entre-deux avec l’avant-centre et l’avant-dernier défenseur de l’équipe. Avec la règle des trois joueurs de l’époque, l’attaquant est hors-jeu et profite de cette exception. La modification de 1925, rend peu plausible cette situation. Le seul cas où l’attaquant profiterait de cette règle serait que l’arbitre laisse tomber le ballon entre l’attaquant et le gardien de but adverse ! Cette procédure est difficile à envisager de la part d’un arbitre conscient de la valeur des buts en football. Suite à une première tentative en 1987, la FA réussira à convaincre le Board de supprimer cette exception en 1990.

4.5. Transformation de l’interprétation de la loi du hors jeu . Jean Dufour considère qu’ « En vérité cette loi est très simple. Ce qui l’est moins c’est son application »38 . En effet, cette loi se prête à de nombreuses interprétations. Par exemple, en 1924, la loi précise qu’ « Un joueur en position de hors-jeu ne commet pas une infraction à l’article six, mais seulement quand dans cette position il gêne un adversaire ou prend part au jeu. Si un joueur en position de hors-jeu avance vers un adversaire ou le ballon et qu'en agissant ainsi il influence le jeu, il doit être pénalisé »39 . Cette notion d’avancer vers un adversaire va disparaître, pourtant elle semblait caractériser clairement l’infraction. Si le joueur ne restait pas immobile, ou ne tentait pas de se replacer, il devait être considéré comme suspect. La modification de 1959 introduit de nouvelles notions. Pour le Board , seul le joueur, qui « gêne un adversaire », « prend part au jeu » ou « influence le jeu » est sanctionné. Cette modification, nécessite de donner des instructions complémentaires aux arbitres, ce que fit la

36 Expression empruntée à Gérard Ernault, éditorialiste du journal France Football. 37 AGM of 1923. Proposal by Football Association of Wales : « A player, who next plays the ball when it has been droped by the Referee to resume play after its stoppage, cannot be offside ». 38 Dufour, J. (1972), op. cit., p. 40. 39 Circulaire du Board , 1924 : Art. 6, note 1. 178

Commission Centrale des Arbitres 40 . Le flou de ce texte est renforcé par la nécessité pour l'arbitre d'interpréter toutes ces notions selon son jugement, « selon l'estimation de l'arbitre »41 . L’interprétation de la loi du hors-jeu dépend maintenant des différentes appréciations de l'arbitre sur le fait de gêner un adversaire, prendre part au jeu ou influencer le jeu. Les modifications de la loi, qui en théorie limitent le nombre de hors-jeu, vont engendrer en réalité de la confusion. Ces notions ont d'ailleurs été expliquées, complétées, clarifiées ou modifiées par le Board . Nous allons tenter d'étudier cette évolution sémantique. D'abord la notion de « gêner un adversaire » qui reste présente dans la loi du hors-jeu de 1898 42 à 1994, disparaît ensuite. En 1959, le journaliste Raymond Eymery commente les précisions apportées par la circulaire du Board : « Ce point ne prête pas à équivoque. Lorsqu'un joueur en position de hors-jeu « gêne un adversaire » au moment où le ballon est joué, il commet une faute prévue par la loi et doit être aussitôt sanctionné par arbitre. Il ne peut donc être ultérieurement remis en jeu par l'intervention d'un quelconque adversaire 43 . A partir de 1995, l’expression « Gêner un adversaire » est remplacée par « Intervenir dans le jeu », et clarifiée en 2005 : "Intervenir dans le jeu signifie jouer ou toucher le ballon passé ou touché par un coéquipier »44 . Ensuite la notion « de prendre part au jeu » est précisée une première fois dans le texte de 1959 : un joueur qui « ne tente pas d'obtenir un avantage en se trouvant en position de hors-jeu » et une seconde fois en 1995 45 : « si l'on considère qu'il participe de manière active au jeu,… en tirant avantage de sa position ». Pour Raymond Eymery 46 , c'est le cas d'un joueur qui, en position de hors-jeu, espère qu'une mauvaise intervention d'un adversaire lui permettra d'obtenir la possession du ballon. Indiscutablement, cet attaquant « tente d'obtenir un avantage » en se trouvant en position de hors-jeu et doit être sanctionné par l’arbitre dès que le ballon est joué, sans possibilité ultérieure d'être remis en jeu par un adversaire. Une

40 La Commission Centrale des Arbitres, après le stage d'arbitrage qui, en août dernier, a été organisé en Suisse par la Fédération Internationale de Football Association, manifestation à laquelle la Fédération Française de Football était représentée, est amenée à donner aux arbitres fédéraux et interlignes, ainsi qu'aux Commissions Régionales d'Arbitres des instructions complémentaires en ce qui concerne le hors-jeu. Ces instructions intéressent plus spécialement le comportement de l'arbitre lorsque le ballon a été touché ou joué en dernier lieu par un adversaire ». Eymery, R. (1959), op. cit. 41 Circulaire du Board , 1959, Réunion du Board de 1978 : « in the opinion of the referee ». 42 AGM of 1898 : Proposal by FA adopted. Law 6 : Delete the words « prevent any » and substitute the words « interfere with an ». 43 Eymery, R. (1959) : L’entraîneur français. Le hors-jeu. Discussion sur une circulaire, 81, Novembre - Décembre 1959. 44 Circulaire du Board de 2005. 45 AGM. of 1995 : « involved in active play by …c) gaining an advantage by being in that position ». 46 Eymery, R. (1959), op. cit. 179 nouvelle interprétation de cette notion est proposée par le Board en 2005 : «Tirer avantage d'une position de hors-jeu signifie, jouer un ballon qui rebondit sur un poteau ou la transversale dans sa direction ou jouer un ballon qui rebondit sur un adversaire dans sa direction alors qu'il y a position de hors-jeu ». Enfin la notion « d’influencer le jeu » se transforme en 1995, par « en influençant un adversaire ». Il paraît difficile, dans une configuration systémique du jeu de distinguer la différence entre ces deux notions : influencer le jeu, et influencer un adversaire. Le placement des défenseurs dépend de celui des attaquants, ce que confirme la thèse de Norbert Elias : « En effet, dans un match de football, les configurations des joueurs de l'un et l'autre camp sont interdépendantes et inséparables. Elles forment en fait qu'une seule configuration »47 . Un joueur qui se déplace derrière les lignes de défense, influence à la fois le jeu et le placement des derniers défenseurs, voire du gardien de but. Pour Raymond Eymery 48 lorsqu'un joueur se porte en position hors-jeu, même s'il gagne une zone du terrain éloignée du ballon, il « influence le jeu » car, ou bien il entraîne avec lui l'adversaire chargé de le marquer, ou bien il attire l'attention des défenseurs adverses. La faute de hors-jeu doit être sanctionnée par l'arbitre dès que le ballon est joué et, là encore, le joueur hors-jeu ne peut être remis en jeu par l'intervention d’un adversaire. Cette notion a été clarifiée par le Board en 2005 : « Influencer un adversaire signifie empêcher un adversaire de jouer ou être en position de jouer le ballon en entravant clairement la vision du jeu ou les mouvements de l'adversaire, ou en faisant un geste ou mouvement qui, de l'avis de l'arbitre, trompe ou distrait un adversaire »49 .

5. Décisions du Board liées à cette loi

5.1. Facteur temporel : de l’instant d’apprécier au moment de sanctionner . A partir de 1863, le joueur est sanctionné pour sa position de hors-jeu à tout moment du jeu, s’il franchit la ligne du ballon. Avec la règle « des trois joueurs » en 1867, il existe deux lignes de hors-jeu, et il semble que seuls les attaquants puissent se retrouver en position réprimandable. Ensuite, cette position est appréciée seulement à l’instant du départ de la passe

47 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 264 48 Eymery, R. (1959), op. cit. 49 Circulaire du Board de 2005. 180 de son partenaire, comme le confirme le Board en 1897 50 . En aucun cas un joueur ne peut devenir hors-jeu pendant la trajectoire du ballon, même s’il se retrouve seul face au gardien adverse. Si l’instant d’apprécier, de juger la position de hors-jeu du joueur ne fait plus débat depuis plus d’un siècle, le moment idéal pour sanctionner cette infraction est questionné : soit au départ du ballon, soit à l’arrivée de celui-ci. Les archives du Board ne permettent pas de faire la lumière sur ce point de désaccord à la fin des années 50. Cette épineuse question est traitée en 1959 au stage national des arbitres italiens à Rimini. Nous retiendrons les commentaires de l’époque du journaliste Raymond Eymery, pour qui l’interprétation de la loi va dans le sens d’une réponse immédiate de l’arbitre : «donc, au départ de la balle désormais, le sifflet de l'arbitre devra retentir, à moins que le joueur hors-jeu ne fasse la preuve qu'il ne désire tirer aucun avantage de sa position irrégulière »51 . Le hors-jeu doit donc se siffler au départ du ballon. Cette vision partage les responsabilités du passeur et du receveur, et cette interprétation fera jurisprudence jusqu’à la fin du XX e siècle.

5.2. Hors-jeu-passif En 2005, une nouvelle notion apparaît : la règle du « hors-jeu passif »52 , qui illustre le caractère encore évolutif de cette loi. La modification concerne essentiellement le moment de sanctionner l’infraction du joueur. Au niveau de la prise d’information, de la perception et de l’analyse de la situation, le hors-jeu se juge au départ du ballon. Ce qui est précisé en 1959, « exactement au moment où le ballon est joué par un partenaire… »53 est reformulé en 1995, par « au moment où le ballon est touché ou joué par l’un de ses partenaires,… »54 . Le moment de sanctionner cette infraction évolue. La première solution consistait à lever le drapeau dès le départ du ballon, et donc à siffler le plus vite possible, la seconde, à juger le hors-jeu au départ du ballon et à siffler à l'arrivée du ballon. La notion de hors-jeu passif de 2005 précisée par le Board montre clairement un choix pour cette seconde solution, et répond également à la logique d’interrompre le moins possible la partie et d’augmenter le temps de jeu effectif. Cette loi peut se référer à la règle du « Wait and see »55 : l'arbitre assistant doit se demander si le joueur participe ou non à l'action. Il doit même maintenant attendre de savoir

50 AGM of 1897 : « Off-side shall not be judged at the moment the player in question receives the ball, but at the moment when the ball is passed to him by one of his own side ». 51 Suarnet, P. cité par Eymery, R.(1959), op. cit. 52 The passive off-side. Les joueurs attaquants en position de hors-jeu qui ne réceptionnent pas la passe sont dits en hors-jeu passif . 53 Circulaire du Board de 1959. 54 Circulaire du Board de 1995. 55 Wait and see : attendre et voir. 181 si le joueur hors-jeu touche le ballon ou le joue réellement. La décision est différée, et cette règle offre désormais la possibilité aux arbitres assistants de se donner plus de temps pour signaler la faute afin de savoir si elle profite en définitive au joueur concerné. En réalité cette règle donne aux arbitres, une charge supplémentaire, au niveau du traitement de l’information, avec une prise de décision retardée en fonction de l’analyse de la suite de l’action. Cette règle ne semble donc pas aller dans le sens d’une simplicité des lois. Cette nouveauté permet, au joueur attaquant de poursuivre son action, s'il ne touche pas le ballon. Dans la pratique, il est remis en jeu si un adversaire ou un de ses partenaires joue le ballon. Dans ce dernier cas, le départ du ballon d’une nouvelle passe provoque une nouvelle possibilité d’être jugé en position de hors-jeu. Cette seconde passe ne tient étrangement aucun compte de l’action précédente. Pourtant un attaquant en position de hors-jeu sur la première passe, tire profit de sa position dans un second temps, et peut devancer à l’arrivée de l’action, un défenseur chargé de le surveiller. Cette distinction entre un joueur actif ou passif semble très confuse. Si un attaquant se situe au-delà de la ligne des défenseurs, ceux-ci en tiennent compte et modifient leur comportement ; ils laissent volontairement passer ce joueur dans leur dos, pour le laisser se mettre en position de hors-jeu. Mais aujourd’hui ce joueur peut sur la même action bénéficier de sa position de hors-jeu initiale. Cette règle du hors-jeu passif semble remettre en question une analyse systémique du jeu 56 , avec une interaction permanente entre les deux groupes de joueurs qui se disputent un seul ballon et s’affrontent au même moment sur le même terrain. « Il n'est pas possible d'admettre en effet, qu'un joueur en simple position de hors-jeu ne peut pas chercher, du fait qu'il est sur le terrain et qu’il participe à la partie, à tirer avantage de sa position irrégulière si l'occasion se présente »57 . En se référant à Norbert Elias, il est inenvisageable de ne pas tenir compte de la position des joueurs des deux équipes à tout moment. « Il faut se distancier du jeu pour reconnaître que les actions de chaque camp s'imbriquent constamment et que les deux équipes opposées forment donc une configuration unique »58 . Cette règle est doublement questionnée, car elle se juge sur l’avant-dernier défenseur dans un jeu où il existe une interactivité permanente qui conditionne le positionnement des attaquants et des défenseurs sur l'ensemble du front d'attaque. La notion de passivité semble incompatible avec un joueur, engagé dans un match, encore debout, qui poursuit son action en direction de la cible opposée.

56 Grehaigne, J.F. (1992). L'organisation de jeu en Football. Joinville-le-Pont, Actio. 57 Eymery, R. (1959), op. cit. 58 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 70. 182

5.3. Position de l’attaquant Le Mondial 1990, pendant lequel les défenses ont pris le pas sur les attaques avec la plus faible moyenne de buts marqués de toutes les Coupes du monde (2,21 buts par match), déclenche une nouvelle décision du Board « Dorénavant un joueur qui se trouve à hauteur de l’avant-dernier défenseur ou des deux derniers défenseurs n’est pas en position de hors- jeu ». 59 Un léger frémissement est enregistré pour les Mondiaux de 1994 et 1998 avec un but de plus tous les 2 matchs. Cette augmentation s’explique aussi par d’autres modifications de la règle, par exemple en 1992, l’impossibilité pour un gardien de prendre le ballon avec les mains sur une passe au pied d’un partenaire. Les effets semblent vite s’estomper, les statistiques de la Coupe du monde de 2006 sont comparables à celles de 1990, seul le temps de jeu effectif a réellement augmenté.

6. Sanctions liées à cette loi La sanction prévue dans le cadre des lois du jeu pour un joueur en position de hors-jeu, apparaît en 1891 60 avec la création de la loi 16. Cette loi précise, entre autre, que pour une infraction à l’article concernant le hors-jeu, un coup de pied franc doit être accordé au camp opposé, au point où l'infraction a été commise. Le Conseil Général Anglais, précisera en 1903 61 , que ce coup franc ne peut être accordé pour le seul fait qu'un joueur se retrouve en position de hors-jeu. L'infraction consiste à influencer le jeu en position hors-jeu. Cette application semble poser problème, comme le souligne ce même conseil en 1910 62 , car certains arbitres accordent un coup de pied franc pour un joueur se trouvant seulement en position de hors- jeu. Ces dérives ne devraient plus se produire. Dans le cas d’une infraction réelle, il n’a jamais été permis de marquer directement sur le coup franc obtenu. Il s’agit donc d’un coup franc indirect. Cette terminologie apparaît en 1938 avec la nouvelle classification de Stanley Rous dans la loi XII sur les fautes et incorrections. En 1975, la FA Wales a tenté sans succès de transformer tous les coups francs, en coups francs directs Depuis la proposition de la FIFA en 1978, si l’infraction de hors-jeu est commise dans la surface de but adverse, le coup franc indirect est exécuté d'un point

59 AGM of 1990 : Proposal by the Scottich Football Association adopted. New décision 2 : « A player who is level with the second last opponent or with the last two opponents is not in an off-side position ». 60 AGM of 1891 : the addition of Law 16 : « In the event of any infringment of Laws 5, 6, 8, 10 or 15, a free kick shall be awarded to the opposite side, from the place where the infringement occured ». 61 Décision du Conseil Général Anglais du 14 décembre 1903. 62 Décision du Conseil Général Anglais du 10 décembre 1910. 183 quelconque de la moitié de la surface de but dans laquelle la faute a été commise. Il est possible de placer le ballon n’importe où dans la surface de but, depuis 1993 63 .

7. Les propositions de transformation de la loi rejetées par le Board La loi du hors-jeu fut questionnée tout au long du XX e siècle. « Il n'y a pas de règles de jeu plus discutées que celles relatives à l’off side ou hors-jeu »64 . Cette citation, d’Henri Bard en 1927, est toujours d’actualité, comme le montrent les statistiques issues des archives du Board. Nous avons trouvé trace de près de trente propositions, rejetées par le Board , destinées à modifier la loi du hors-jeu. La plupart d’entre-elles ont donné lieu à de véritables expérimentations et sont donc traitées dans le chapitre suivant. La FA, dans les années 1990, a tenté par trois fois de modifier la loi, en précisant que devait seulement être sanctionné pour sa position de hors-jeu un joueur qui « cherche à influencer le jeu ou un adversaire »65 ou « tente de tirer avantage de sa position de hors- jeu »66 . L’objectif avoué de cette proposition visait à ne pas sanctionner les joueurs qui ne cherchaient pas à interférer dans le jeu. Mais cette nouvelle formulation, introduisant les verbes « chercher » ou « tenter », semble augmenter la part d’interprétation des intentions des joueurs, et par conséquent ajoute une dose supplémentaire de suggestivité. Le Board a donc refusé ces propositions en 1990, 1991 et 1995.

8 Expérimentations Nous pouvons regrouper en trois catégories les expérimentations accordées par le Board depuis la fin du XIX e siècle : le changement de référentiel concernant la ligne imaginaire, la diminution de la zone d’application du hors jeu, la demande de suppression du hors-jeu sur certaines actions, ou coups de pied arrêtés. Le changement de référentiel concerne le passage de la règle « des trois joueurs » à celle des deux joueurs. Cette idée trouve son origine dès 1894 avec la première demande des Écossais pour modifier la loi, et aboutit à la modification de 1925. Entre ces deux dates six demandes infructueuses des Écossais. Cette ligne imaginaire ne sera remise en cause qu’une

63 Réunion du Board de 1993 : Proposition de l’Irish Football Association, en accord avec la modification de la loi XVI (coup de pied de but) réalisée en 1992. 64 Bard, H & Diffre, H (1927), op. cit., p. 44. 65 AGM of 1990 : « seeking to interfere with play or with an opponent ». 66 AGM of 1990 : « seeking to gain an avantage by being in that position ». 184 seule fois, avec l’expérimentation accordée à la Scottish Football Association en 1949, pour la saison 1949-1950. Elle proposait de diviser le terrain en 3 parties égales avec deux lignes et de ne considérer le joueur hors-jeu que dans la zone offensive et seulement si au moment où le ballon est joué il est plus proche que 3 joueurs de leur ligne de but. La zone d’application du hors-jeu fait l'objet d'un processus de transformation qui débute avec la loi de 1907 la limitant à la moitié de terrain. Les propositions et les expérimentations vont toutes dans le même sens. Elles sont classées en fonction de leur impact sur la diminution de cette zone. La première demande date de 1920 67 , avec la volonté de tracer une ligne aux 40 yards, pour délimiter la zone de hors-jeu dans le camp adverse. Cette proposition, portée par la Football Association, sera reformulée les cinq années suivantes par la Scottish Football Association. Lors de la réunion de 1924, suite à une demande commune de ces deux association, le Board considère souhaitable d'en faire l'essai durant la saison 1925-1926 68 . Mais en 1925, la modification de la loi concernant les deux joueurs met un point final à cette demande. Le Board va ensuite accepter d’autres expérimentations avec des nouvelles lignes tracées sur le terrain. Nous avons déjà évoqué celle de 1949, avec la permission accordée aux Écossais de diviser le terrain en 3 parties égales avec deux lignes. La flexibilité des dimensions des terrains explique certainement cette formulation, qui revient à tracer une ligne entre 30 et 40 mètres de chaque but. La zone d’application de la règle serait donc réduite au tiers du terrain au lieu de la moitié auparavant. La demande de USSFA 69 , dans la North American Soccer League 70 , de tracer une ligne aux 35 yards pour la saison 1973 poursuit la même logique. Cette expérimentation sera accordée uniquement pour la saison 1973-1974. Mais en 1980, la North American Soccer League 71 trace une ligne de hors- jeu aux 35 yards (32m.). Une sorte de passage en force sans l’accord du Board . Elle obtient ensuite l’autorisation de la FIFA uniquement jusqu’à la fin de la saison 1980-1981, … saison déjà commencée. Lors de la réunion du Board de 1981, Dr. Kaser précise que la USSFA a joué pendant plus de trois ans des matchs contrairement aux lois du jeu et qu'elle doit, comme tout les autres pays, les respecter. M Cavan annonce que la FIFA a présenté un ultimatum à la North States Soccer Fédération insistant pour que ces expérimentations cessent au cours de la saison Américaine.

67 AGM of 1920 : Proposal by the Football Association . Law 1 : « Lines shall be marked 40 yards from each goal-line across the field of play ». 68 Réunion du Board de 1924. 69 USSFA : United States of Soccer Football Association. 70 Professional league. 71 NASL : North Américan Soccer League . La ligue de Football professionnel de l’Amérique du nord. 185

Une autre proposition de la Scottish Football Association en 1920 72 visait une application de la loi du hors-jeu sur environ un quart du terrain avec le tracé de deux lignes situées à une distance de 25 yards de la ligne de but. Cette proposition ne fut pas adoptée. Cinquante quatre ans plus tard, en 1974, les Écossais reprendront la même idée sous la forme d’une demande d’expérimentation qui sera de nouveau refusée par le Board. Les demandes de 1968 73 , 1972, 1973, 1991 et 1992, proposent une zone d’application encore plus réduite, avec un joueur qui ne peut être hors-jeu que dans la zone de la surface de réparation adverse prolongée jusqu’aux lignes de touche. La plus célèbre expérimentation a lieu à Édimbourg en 1968, suite à une proposition de la North Américan Soccer League, avec un hors-jeu jugé en première mi-temps, uniquement, au niveau la surface de réparation. L’Écosse, lors de la Drybrough Cup 74 , expérimentera cette même règle lors des saisons 1972- 1973 et 1973-1974. Cette application fut aussi testée par la FIFA lors du Championnat du Monde des moins de 17 ans en août 1991 en Italie. Le Board a également accepté en 1992 que cette expérimentation soit poursuivie sur la demande des associations suisse et finlandaise, lors des compétitions organisées par la FIFA ou par une ou plusieurs confédérations. Les demandes de la FA, en 1971 et en 1972, proposaient de réduire encore davantage la zone d’application du hors-jeu. Le Board accepte que soit appliquée la loi du hors-jeu uniquement dans la surface de réparation pour les matchs de la Watney Mann Cup 75 . La même expérimentation est accordée à l’Irlande en 1972 sur une période de 10 jours pendant la pré- saison. Au XXI e siècle, le sujet est toujours d’actualité. En effet, en 2005 la Fédération de Football du Pays de Galles fait une proposition pour qu’un joueur ne soit en position de hors- jeu que lorsqu'il se trouve dans la surface de réparation adverse. Cette proposition est retirée avant même la séance ! Ces nombreuses propositions répondent toutes à la même logique de réduire la zone d’application du hors-jeu. Elles ont toutes été expérimentées, mais sans modification de la loi, et depuis 1907, cette zone s’étend toujours sur tout le champ de jeu adverse. La suppression du hors-jeu sur certaines actions de jeu fait l'objet des propositions suivantes :

72 AGM of 1920 : Proposal by the Scottish FA was withdraw : « A player is not out of play….or when he himself is not within his opponents’ 25 yards area ». 73 AGM of 1968 : « FIFA proposed to the FA Board that experimental matches be authorized in which the off- side law would not applied to the taking of free-kicks » (p. 7). 74 Drybrough cup : tournoi de début de saison réservé aux quatre équipes les plus prolifiques de Division 1 et de division 2 Écossaises. Cette coupe c’est jouée entre 1971 et 1974 et en 1979 et 1980. 75 Watney Mann Cup, ou Coupe Watney : tournoi de début de saison réservé aux deux équipes les plus prolifiques des quatre divisions professionnelles anglaises. Cette coupe c’est jouée de 1970 à 1973. 186

La première proposition vise à ne pas appliquer la loi du hors-jeu sur les coups francs. La trace de cette idée remonte à 1929 dans les archives du Board . En effet, la Football Association propose de supprimer le hors-jeu sur les coups francs accordés suite à une faute intentionnelle. Le Board refusera d’adopter cette règle, qui revient à rajouter aux cas d’exceptions, le coup franc susceptible d’être marqué directement. Cette idée ressurgit en 1968 76 . Le Board autorise alors d’expérimenter en matchs, la non application du hors-jeu sur les coups francs. En 1974, Sir Stanley Rous, alors président de la FIFA, a de nouveau proposé la suppression du hors-jeu sur les coups francs directs et indirects. Cette nouvelle règle fut essayée officiellement, en novembre 1974, au cours du tournoi européen junior à Monaco. Les résultats ne furent pas encourageants, car les attaquants pouvaient sur coup franc venir s’agglutiner sur la ligne de but et gêner les déplacements et les interventions du gardien de but. Pour remédier à cet inconvénient, l’expérimentation fut prolongée en novembre 1975 toujours à Monaco, mais il fut précisé que les partenaires du tireur n'avaient plus le droit de se placer dans la surface de but adverse lors des coups francs directs et indirects. Cette modification permettait au goal de disposer d’un peu d’espace pour voir le départ du ballon, anticiper sa trajectoire et intervenir le cas échéant. La règle est restée inchangée et la même question ressurgit dans les années 1980. La proposition de 1986 de la FA fut refusée par le Board . Une nouvelle expérimentation sera accordée à la FA pour ne pas appliquer la règle du hors-jeu dans une compétition sénior, lors de la saison 1987-1988. Les résultats seront si décevants que la FA retirera de l’ordre du jour, de la réunion du Board de 1988 77 , sa nouvelle demande de modification de la loi. La seconde proposition a pour ambition d’ajouter un cas d’exception à la règle. La FA et FA Wales proposent que ne soit pas déclaré hors-jeu un joueur qui reçoit directement le ballon de son gardien de but quand ce dernier a joué le ballon depuis sa propre surface de réparation. Cette demande d’expérimentation formulée pour la saison 1982-1983 sera refusée par le Board 78 . La troisième proposition émane de la Football Association of Wales lors de la réunion du Board de 1990 79 . Le Board accepte qu’elle conduise une expérimentation visant à

76 AGM of 1968 : Proposal by FIFA adopted : « FIFA propose to the FA Board that experimental matches be authorized in which the off-side law would not be applied to the taking of free-kicks ». 77 AGM of 1988 : « The football Association having considered carefully the evidence collated in the experiment conducted in this context during Season 1987/1988, withdrew the proposal ». 78 Réunion du Board de 1982 : Spécial meeting , lettre du 8 juin 1982. Demande d’expérimentation de la FA et FA Wales non accordée. 79 AGM of 1990 : The Board agreed to accede to the request of the FA of Wales to permit an experiment under Law X : « The experiment will be amendment of the Law whereby a player shall not be off-side if receives the ball which is played directly from his own half of the field ». 187 supprimer l’application du hors-jeu dans le cas où un joueur réceptionne un ballon envoyé directement par un partenaire à partir de sa propre moitié de terrain. Cette modification favorise les passes longues vers l’avant et le « kick and run » typiquement britannique. Une telle mesure limite en fait le jeu construit et le juge n’a pas jugé utile de poursuivre dans cette voie. La dernière expérimentation concerne à la fois la touche et la loi du hors-jeu. En 1993, le Board autorise que les touches soient remplacées par des tirs au pied 80 en positionnant le ballon sur la ligne de touche. Pour ces touches jouées au pied, les mêmes règles s’appliquent que pour les ballons lancés avec les mains et par conséquent un joueur ne pouvait être hors- jeu suite à cette remise en jeu. Le jeu est dénaturé car toutes les touches sont systématiquement « balancées » devant le but adverse. Ces quatre types d’expérimentations, supprimant le hors jeu sur certaines actions, n’ont jamais provoqué de nouvelle modification de loi. Mais toutes poursuivaient une même logique : diminuer la possibilité pour un attaquant d’être sanctionné pour sa position de hors- jeu. L’expérimentation demandée par la Football Association en 1972 propose d’aller au bout du processus et de supprimer tout simplement la loi du hors-jeu ! Le Board a autorisé cette expérimentation, appelée « no-off side » dans une compétition Anglo-Italienne. Cette permission est fort étrange, car supprimer cette règle, modifierait la logique interne du jeu. Nous pouvons reprendre à notre compte la formule de Jean Dufour mise en exergue, qui date de la même année : « Supprimer le hors-jeu, équivaudrait presque à promouvoir un sport nouveau qui, très probablement, ne connaîtrait pas un succès aussi grand que le football actuel »81 . Le Board n’a pas donné suite, et le compte rendu de cette expérimentation n’apparaît même pas dans les réunions suivantes.

9. Analyse systémique L’analyse systémique permet d’appréhender le règlement comme un ensemble de lois en interaction qui ont pour but de conserver un rapport de force équilibré entre les possibilités des attaquants et celles des défenseurs. Les cas d’exceptions à la règle du hors-jeu sont à analyser dans le cadre de la polarité entre l’attaque et la défense. Ils donnent toujours un

80 Réunion du Board de 1993 : Demande de la FIFA et de l’UEFA de conduire les expérimentations dans les compétitions de jeunes qu’elles organisent sur les touches au pied ( kick-in) et la mort subite ( sudden death ). 81 Dufour, J. (1972), op. cit., p. 40. 188 nouveau pouvoir à l’équipe qui possède le ballon avec comme objectif d’augmenter le nombre de buts marqués. Les exceptions débutèrent avant la création du Board avec le coup de pied de but en 1880, puis l’année suivante le corner. Le processus se poursuivit ensuite avec la touche depuis 1920, et la balle à terre à partir de 1923. Ces différentes exceptions montrent les interactions entre les règles et confirment le fait que le joueur attaquant a de moins en moins de probabilité d’être en position de hors-jeu. Cette loi est dépendante du nombre de joueurs (Loi III) car le hors-jeu se juge au départ du ballon en fonction de la position des adversaires. Depuis 1925, la ligne flottante passe par l’avant-dernier défenseur. Avec deux opposants devant lui, un joueur ne peut se retrouver en position de hors-jeu. Les adversaires sont aussi concernés, s’ils jouent le rôle du passeur. Le règlement de la Football Association précise dès 1880 pour le hors-jeu, qu’un joueur ne pouvait plus être sanctionné si le ballon venait d’un adversaire. Dans le même ordre d’idée le Board stipulera, en 1939, qu’aucune sanction ne peut être accordée si le ballon est touché ou joué en dernier par un adversaire. L’évolution de l’interprétation de la loi et de son application par les arbitres illustre le lien entre la loi XI et les lois V (arbitre) et VI (arbitres assistants). Les arbitres doivent juger différemment le joueur en position de hors-jeu au cours du temps : s’il touche le ballon ou empêche un autre joueur de le jouer (1890) ; s’il gène un adversaire (1898) ; s’il influence le jeu (1924) ; s’il tente de tirer avantage de cette position (1978) ; s’il influence un adversaire (1995). De plus, le fait que la ligne imaginaire du hors-jeu passe, non plus par le ballon, mais par un des derniers défenseurs de chaque équipe provoque un partage des responsabilités du trio arbitral. Avec la modification de 1925, la focalisation des arbitres de touche passe de l’antépénultième défenseur à l’avant-dernier défenseur. Cette mission sera évoquée en 1997 : la loi précisera que l’arbitre assistant ne doit pas signaler un joueur se trouvant simplement en position de hors-jeu 82 . Une dépendance entre le terrain (loi I) et le hors-jeu existe. Dans ce sport collectif de signes contraires, le jeu est orienté car les équipes n’attaquent pas la même cible. La loi du hors-jeu n’existe que dans ce type de sport, car elle est définie par la position des joueurs en avant ou en arrière du ballon, ce qui nécessite de s’accorder sur un sens d’attaque. Une autre relation avec la surface de jeu apparaît : un joueur ne peut plus être sanctionné pour une position de hors-jeu dans sa propre moitié de terrain depuis 1907. Cette nouvelle loi donne une nouvelle fonction à la ligne médiane. Elle permet de repérer si le joueur au moment où le

82 AGM of 1997 : « An assistant referee should not signal merely because a player is in an off side position ». 189 ballon est joué par un des ses partenaires se trouve dans sa propre moitié de terrain. Cette modification entraîne elle-aussi une évolution de la loi sur le terrain. En effet, le Board précisera l’année suivante en 1908 qu’un drapeau peut être placé juste en face de la ligne médiane de chaque côté du terrain de jeu, à au moins un yard de la ligne de touche. Ce repère visuel, facilite la prise d’information spatiale de l’arbitre pour juger la position initiale de l’attaquant destinataire du ballon.

10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences Au volley-ball, la règle du hors-jeu ne peut exister, car il s’agit d’un sport collectif non interpénétré, dans lequel chaque équipe se situe de part et d’autre du filet. Dans les sports collectifs de petit terrain la règle du hors-jeu n’est pas appliquée. La libre circulation des joueurs est contrainte par une zone interdite de six mètres devant les buts au handball. En revanche, au basket, la circulation est illimitée mais c’est le stationnement sous le panier qui est contrôlé, avec la règle « des trois secondes ». La règle du hors-jeu est absente du règlement de l’ultimate, pourtant elle constitue une spécificité des sports collectifs de grands terrains, comme le football, le rugby ou le hockey sur glace. Au rugby comme au football, à l’origine la ligne de hors-jeu imaginaire passe par le ballon. Cette loi est encore valable sur le jeu en mouvement, mais le règlement distingue aujourd’hui le hors-jeu sur les regroupements, sur le jeu au pied ou sur certaines remises en jeu. Dans les regroupements spontanés, les « rucks » ou les « mauls »83 , il existe deux lignes de hors-jeu : une par équipe, se situant derrière le pied le plus en arrière du dernier joueur participant à ce regroupement. Un joueur ne peut l’intégrer qu'en passant par l'arrière du regroupement, et non sur le côté. S'il sort du regroupement, il doit immédiatement se replacer derrière sa ligne de hors-jeu. Sur le jeu au pied, tous les coéquipiers du botteur situés devant lui, donc entre le ballon qu’il tient et la ligne de ballon mort adverse sont hors-jeu. Un joueur redevient en jeu lorsqu'il est dépassé par le botteur ou un coéquipier situé en jeu au moment du coup de pied…c'est-à- dire que toute la distance a été courue. Il est aussi de nouveau en jeu si un adversaire a parcouru cinq mètres avec le ballon, ou a fait une passe ou a eu un contact intentionnel avec le

83 Dans un maul, le porteur de balle est debout, le regroupement comprend un minimum de trois joueurs. Dans le ruck le porteur de balle a été mis à terre par un adversaire, et deux nouveaux joueurs sont venus se lier à ce binôme. 190 ballon (volonté de s'en saisir sans y parvenir). Tout joueur hors-jeu doit se tenir à dix mètres du ballon. Un joueur hors-jeu ne doit pas avancer ni gêner l'adversaire d'une façon active ou passive tant qu'il n'aura pas été remis en jeu. Au football, la règle du hors-jeu ne précise pas quand un joueur cesse d’être hors-jeu. Dans la pratique actuelle, s’il n’est pas le destinataire ou le receveur de la passe, il peut continuer activement à jouer et influencer le jeu… et il ne risque rien jusqu’à la passe suivante. Au rugby, les remises en jeu ont une règle spécifique. Pour la touche, deux lignes de hors-jeu sont situées à dix mètres de chaque côté de l'axe de l'alignement. Lorsque la touche est finie, la ligne de hors-jeu est fixée par le ballon. Sur la mêlée, la ligne de hors-jeu est fixée par le pied le plus en arrière du troisième ligne centre de chaque équipe et pour le demi de mêlée par le ballon. Il existe donc trois lignes de hors-jeu différentes sur ce type de regroupement non spontané. Le hors-jeu est l'une des fautes les plus souvent sanctionnées et donne droit, sur demande du camp opposé, soit à une pénalité, soit à une mêlée. Le botteur peut donc marquer directement trois points, contrairement au football où il n’est pas possible de marquer directement sur le coup franc.

Synthèse Entre la définition de 1886 et celle d’aujourd’hui, plus de 120 réunions du Board , où la loi sur le hors-jeu fut abordée et débattue plus d’une fois sur deux. Nous avons repéré 30 propositions rejetées, 18 expérimentations temporaires acceptées et 18 modifications du règlement. La loi XI n’est pas contestée, mais son application est controversée car cette règle détermine une véritable tactique. Cette tactique fait débat, car elle prive l'équipe qui est en possession du ballon de finir ses actions et de marquer des buts. Le côté spectaculaire du jeu qui repose en partie sur le nombre de buts inscrits est questionné. Cette loi est dépendante des interactions entre les joueurs, et les transformations s'avérèrent indispensables dans l’optique de maintenir un équilibre entre les pouvoirs des attaquants et ceux des défenseurs. Le journaliste Gabriel Hanot, en 1925, évoque les deux tendances sur l'appréciation de cette tactique. « Il y a ceux qui estiment que (s’appuyer sur) le hors-jeu est une tactique licite, permise, normale. Et ceux qui pensent que le (l’utilisation du) hors-jeu élevé à la hauteur d'une tactique devient une scie, un fléau, un désastre »84 . Cette tactique défensive peut être perçue de façon positive, comme un moyen très actif pour récupérer le ballon, avec une réelle

84 Hanot, G. (1925). Le Miroir des Sports. « La modification de la fameuse règle du hors-jeu va transformer profondément le sport du football, dont la saison commence », n°279, le mercredi 16 septembre 1925. 191 prise de risques. Le point de vue des attaquants ou des spectateurs est tout autre : cette loi s'inscrit en négatif, car elle privilégie les défenseurs. Cette tactique est souvent considérée comme abusive, voire illicite, car « malheureusement, rien dans les règlements du hors-jeu ne saurait empêcher un défenseur d'en abuser» 85 . Cette tactique aux multiples facettes, peut se caractériser soit par un alignement des défenseurs, soit par leur remontée rapide. La première forme qui consiste à jouer la ligne en s’appuyant sur la règle du hors-jeu est plutôt considérée comme licite. En effet, « Lorsqu'une défense oppose à la ligne d’attaque adverse une ligne plus ou moins compacte, mais parallèle, on ne peut dire qu'elle tend vraiment un piège à l'adversaire. Les derniers défenseurs en effet, grâce au hors-jeu continuent à faire face au ballon et au jeu »86 . A contrario, la seconde forme est un véritable piège. La remontée collective ordonnée est préparée avec un signal précis, par exemple une passe en arrière de l'équipe adverse, et peut se pratiquer de nombreuses fois dans le match. C'est un plan tactique spécial au sens de Léon Téodorescu 87 , qui renvoie à l'aspect stratégique. Il est élaboré pour chaque match et possède donc un caractère temporaire. Il est qualifié de « mur briseur de jeu », en 1925, par Gabriel Hanot 88 . La multitude des notions qui accompagnent cette loi, notamment la notion de hors-jeu passif, témoigne de la complexité de son interprétation. Ces éléments semblent remettre en cause le principe de simplicité recherché à l’origine par les lois du jeu. Pour diminuer les controverses, Marco Van Basten 89 se prononce en 2011 clairement pour une simplification de la règle. La règle du hors-jeu est présente dans les lois de la Football Association depuis 1863. La position du ballon a toujours primé : si je suis derrière le ballon je ne peux jamais être en position de hors-jeu. Elle contraint, limite les déplacements des attaquants et modifie la répartition des joueurs sur le terrain. Il est donc possible de s’appuyer sur cette règle pour s’aligner en défense, ou d’utiliser cette loi pour s’éloigner très vite de sa propre ligne de but afin de piéger les attaquants adverses. Les équipes de Newcastle dans les années 1920, de Rouen dans les années 40, d’Anderlecht dans les années 60 révèlent, pour chaque époque, des équipes spécialisées dans cette tactique. Utiliser la règle du hors-jeu est une tactique licite, un

85 Bard, H. & Diffre, H. (1927), op. cit., p. 47 86 Robert, G. (1957). L’entraîneur français. Le système du « WM » 56, p. 3. (Notes à propos du hors jeu, Août 1957). 87 Teodorescu, L. (1977). Théorie et méthodologie des jeux sportifs. Paris, Les Editeurs Français Réunis. 88 Hanot, G. (1925), op. cit. 89 France Football du mardi 15 janvier 2011. Marco Van Basten :«…. Le vrai problème du foot, c’est la règle du hors-jeu. Parce qu’elle n’est pas claire et laisse la place à toutes les interprétations, donc à tous les débats. Il faut qu’elle soit simplifiée ». 192 plan stratégique. Elle a comme conséquence une distribution des joueurs ni scientifique, ni aléatoire. Aujourd’hui de très grands espaces devant les gardiens de but se retrouvent totalement vidés de joueurs. Pour Vladimir Dimitrijevic ce ne serait sans doute pas le cas sans la règle du hors-jeu : « II est arrivé un moment où l'on a voulu se débarrasser du côté tribal du jeu, c'est pourquoi on a inventé le hors-jeu, qui fait que tout le monde ne peut aller au même endroit en même temps, ni s'agglutiner dans la surface de réparation »90 . Cette loi du hors-jeu, conçue pour donner de la clarté au jeu et un avantage à la défense, subit des transformations qui augmenteront les possibilités de l’attaque. Nous pouvons constater une réduction de son champ d'application. D’abord, la ligne flottante ne se juge plus sur le ballon, ni même sur l'antépénultième défenseur comme avant 1925, mais sur l'avant- dernier défenseur. Ensuite il existe des cas d'exceptions à la règle évitant aux joueurs d’être sanctionnés. Enfin, la position de hors-jeu ne constitue plus une faute en soi. Le joueur ne sera sanctionné que s’il tire réellement et immédiatement un avantage de sa position ; dans le cas contraire, il peut continuer l’action. Avec la règle du hors-jeu passif, il est possible de se questionner sur le principe de justice fondateur des premières lois en 1863 par les clubs londoniens. En effet, le jugement de l'arbitre assistant ne prend en considération que la dernière passe jouée. Chaque nouvelle passe marque un nouveau signal, comme le début de l'action, très loin d'une analyse systémique. Un joueur en position de hors-jeu à la passe précédente, qui influence tout le dispositif défensif adverse, peut profiter de sa position, de son avance spatiale, ou temporelle, pour conclure une action. Pour caricaturer, un joueur pourrait passer tout le match dans la surface de réparation adverse et conserver de la fraîcheur et de la lucidité pour terminer les actions. Les propositions et les expérimentations pour transformer la loi du hors-jeu ont été multiples au cours du XX e siècle : tracer une nouvelle ligne sur le terrain pour délimiter la zone de hors-jeu (25, 35 ou 40 yards), prolonger la ligne des 18 yards jusqu’à la touche, limiter le hors-jeu à la surface de réparation, supprimer le hors-jeu sur les coups francs, sur les ballons venant directement de sa moitié de terrain, de sa surface de réparation, de son gardien de but … Les perspectives sont à rechercher dans les propositions soumises par les fédérations au Board . Elles vont toutes dans le même sens : une réduction des cas de hors-jeu ou de sa zone d’application. Elles contribuent toujours à redonner un pouvoir nouveau aux attaquants pour rétablir un équilibre permettant de réussir à marquer davantage de buts.

90 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 36. 193

Il nous semble indispensable de nous questionner sur la notion de « hors-jeu passif ». Notre argumentation peut s’appuyer sur les théories de Norbert Elias, mais aussi de Jean- Francis Grehaigne (1992) et son analyse systémique du jeu. Nous pouvons également reprendre à notre compte l’hypothèse « du suspect et du complice » développée conjointement par les journalistes Raymond Eymery et Paul Suarnet en 1959 et 1960. Pour Raymond Eymery, le joueur en position de hors-jeu, placé irrégulièrement, est un suspect : « l'arbitre doit considérer comme suspect tout joueur qui, en position hors-jeu ne fait rien pour se remettre en jeu »91 . Pour Paul Suarnet 92 , le joueur porteur du ballon est son complice, car il est responsable du déclenchement de la faute en « lui envoyant le ballon ». Un suspect et un complice participent à une action envisagée comme une véritable association de malfaiteurs, avec une présomption d’innocence que le journaliste n’accorde que très rarement au suspect. En 2006, Joël Quiniou 93 propose que dans la surface de vérité adverse, très proche du but, le joueur soit sanctionné en position de hors-jeu, même s’il ne touche pas le ballon. Mais c’est la notion même de passivité qui est à remettre en question. Une position passive de hors jeu pourrait être observée et reconnue avec un joueur qui ne bouge plus, sans intention manifeste de poursuivre son action. La possibilité de se remettre en jeu contribuerait à entretenir la complexité de l’interprétation de la loi. Cette loi, historiquement controversée, dont l’application est aujourd’hui surveillée à la loupe et « au ralenti » par les médias n’est pas encore stabilisée. Les dernières modifications sont récentes, et tendent à démontrer que la transformation se poursuit pour rétablir l’équilibre entre les attaquants et les défenseurs. La faculté d’adaptation des dispositifs défensifs aux nouvelles modifications, explique également la nécessité de renouveler la loi. L’étude de la loi XI permet de formuler l’hypothèse d’une diminution des possibilités de sanctionner les joueurs pour leur position de hors-jeu depuis 1863. L’évolution de la loi du hors-jeu est aussi à resituer dans une perspective plus large, avec la volonté du Board de développer un football plus offensif et plus spectaculaire, avec davantage de temps de jeu effectif et une protection renforcée des artistes. L’histoire du règlement se croise aussi avec l’histoire des systèmes de jeu et des tactiques employées.

91 Eymery, R. (1959), op. cit. 92 Suarnet, P. (1960). L’entraîneur français. Le hors-jeu à l'ordre du jour, 82, janvier 1960. 93 Quiniou, J. (2006). France Football n° 3150 du 25 août 2006. 194

Chapitre 12 Loi XII : les fautes et incorrections 1 ______

« Le football est un jeu parfait pour les filles un peu rudes, mais n'est pas du tout adapté aux garçons délicats ». Oscar Wilde

1. Loi actuelle La loi XII porte le nom de « fautes et incorrections », le Board ne semble pas faire de distinction précise entre ces termes. Le titre exact de cette loi dans les archives est « Fouls and misconduct », qu’il est sans doute préférable de traduire par « fautes et mauvaise conduite ». En effet, le règlement distingue, à partir de 1960 conduite violente et conduite inconvenante ou incorrecte. Le Board rappelle, lors de la réunion de 1997, que le football est un sport rugueux et combatif, où le combat pour la possession du ballon devrait rester néanmoins fair-play et correct. En cas de contact physique, l’action peut être considérée par l’arbitre comme une faute sanctionnée par un coup franc. Si ce duel devient réellement vigoureux, l’arbitre a le devoir d’intervenir. Les fautes et les mauvaises conduites sont, quelle que soit la manière, strictement interdites et l’arbitre doit réagir en appliquant strictement les lois du jeu. A travers le règlement actuel, il est possible de distinguer ces deux types d’infractions, en fonction de la lutte pour la possession du ballon. Le joueur commet une faute, s’il enfreint les lois du jeu dans le duel contre son adversaire pour la possession du ballon. Le Board précise les éléments qui caractérisent une faute en 2009 : l’infraction doit avoir été commise par un joueur, s’être produite sur le terrain de jeu et pendant que le ballon est en jeu. Une agression contre un adversaire sans relever le défi pour la possession de la balle constitue une conduite violente. Par extension, loin de jouer le ballon, un joueur qui attaque un des ses coéquipiers, l’arbitre, les arbitres de touche, un spectateur, est sanctionné pour une conduite violente. Cette catégorie de comportement a été requalifiée en 2009, « d’acte de brutalité », qui peut se produire sur le terrain de jeu ou en dehors, que le ballon soit en jeu ou non. Un joueur se rend coupable d’un acte de brutalité s’il agit soit avec excès d’engagement

1 Law XII – Fouls and misconduct . 195 envers un adversaire alors que le ballon n’est pas disputé, soit avec force excessive ou avec violence envers un coéquipier, un spectateur, un officiel de match ou toute autre personne. Les fautes, se produisant quand le ballon est en jeu, sont regroupées en deux grandes catégories et se traduisent par des sanctions techniques : coup franc direct ou coup franc indirect. Cette sanction doit être considérée comme une réparation en faveur de l’équipe lésée. Il existe aujourd’hui dix fautes 2 donnant droit à un coup franc direct : le fait de manipuler le ballon avec les mains, et neuf autres concernant la violence ou la charge sur l’adversaire. Pour toutes les autres infractions, l’arbitre accorde un coup franc indirect : le jeu dangereux, le hors-jeu, les fautes spécifiques de mains du gardien… L’arbitre dispose également du pouvoir d’avertir ou d’exclure un joueur du terrain. Un avertissement, symbolisé par un carton jaune, est infligé à un joueur quand il commet des fautes regroupées dans sept grandes catégories ; par exemple « il se rend coupable d'un comportement antisportif », ou encore « il manifeste sa désapprobation en paroles ou en actes ». Le fait de recevoir deux cartons jaunes dans le même match provoque automatiquement l’expulsion du joueur, symbolisé par la présentation du carton rouge. Ce carton est directement attribué pour les conduites violentes et dans certaines circonstances comme celles qui annihilent une occasion manifeste de but. Pour les fautes commises dans le jeu, les sanctions techniques peuvent se doubler de sanctions administratives. Cette double peine n’est pas systématique. En revanche, si le ballon n’est pas en jeu au moment de l’infraction, l’arbitre est habilité à imposer des sanctions disciplinaires. Il peut le faire pendant les arrêts de jeu, mais aussi avant le début du match, pendant la mi-temps et après le coup de sifflet final.

2. Principes de cette loi Cette loi doit être appréhendée pour déterminer les droits et les devoirs des joueurs. Le règlement spécifie clairement, d’une part ce qui est interdit et sanctionné, et d’autre part ce qui est permis. Pour Pierre Parlebas, « La logique interne des jeux sportifs se manifeste fondamentalement dans les prescriptions du code de jeu qui induit des comportements corporels précis 3. A ce titre, les lois du jeu du football ont donné progressivement naissance à une motricité spécifique, caractérisée par des actions destinées à propulser un ballon sans l’aide des membres supérieurs.

2 Cf. annexe n°50, pp. 144-159. 3 Parlebas, P. (1999), op. cit., p. 216. 196

2.1. Jouer sans les mains Le proverbe médiéval , « Jeu de mains jeu de vilain » est repris par Gabriel Hanot 4. Pour lui, le joueur doit se libérer de son défaut principal, l’usage des mains et des bras pour tenir le ballon et les joueurs adverses. Au football, excepté pour le gardien de but, les actions motrices de préhension ou destinées à manipuler le ballon avec les mains et les bras sont interdites. Ce trait pertinent rend la pratique spécifique, et distingue le football des autres sports-collectifs.

2.2. Droit de charge limité La charge peut être définie dans un premier temps comme le fait d’ « attaquer » un adversaire en venant à son contact. Dans le code du football, charger un adversaire doit être entendu dans le sens d’une tentative de déposséder le porteur du ballon. Le droit de charge est un élément constitutif de la logique interne de chaque sport. Les règles du football prescrivent des interactions réglementées avec autrui qui ne permettent pas le corps à corps, mais autorisent néanmoins les charges sur l’adversaire. Le Board et la FIFA proposent, en 2009 5, la définition suivante : « Charger l’adversaire consiste à essayer de conquérir de l’espace par contact physique à distance de jeu du ballon, sans faire usage de ses bras ni de ses coudes ». Charger l’adversaire est une faute si l’action s’accompagne : d’imprudence, de témérité, ou d’excès d’engagement. La charge peut être caractérisée par la présence du ballon et le fait que le joueur reste ou non sur ses appuis pédestres. La charge debout est généralement limitée à une lutte épaule contre épaule avec un ballon à distance de jeu. L’action motrice destinée à jouer le ballon et qui entraîne une perte d’équilibre, se nomme le « tacle ». Elle doit nécessairement avoir pour intention première de toucher le ballon et d’en déposséder le porteur. Elle est doublement réglementée avec l’interdiction de tout tacle par derrière et pour le joueur l’obligation de toucher le ballon avant l’adversaire.

2.3. Contrôle de la violence Pour Norbert Elias 6, il est possible de suggérer une diminution de la tolérance à la violence dans nos sociétés modernes. Il remet en cause l’idée reçue d’une augmentation de la violence dans les sports. Pour lui, les jeux médiévaux étaient autrement plus barbares, et en comparaison le sport moderne apparaît comme une euphémisation de la violence, et une

4 Hanot, G. (1921), op. cit., p. 39. 5 Les lois du jeu 2009/2010. FIFA. For the Game. For the world. 6 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit. 197 pratique bien aseptisée. Elias a appelé « procès de civilisation » l’aspect essentiel de l'évolution du sport moderne concernant l'expression et le contrôle de la violence physique. Notre étude sur les archives du Board va nous permettre, dans la perspective d’Elias, d’illustrer cette thèse avec notamment une augmentation des fautes prises en compte par le règlement et des possibilités d’exclure un joueur. Sans supprimer la dimension duelle, aujourd’hui l’objectif clairement avoué du Board est d’assurer le maximum de sécurité aux joueurs sur le terrain, en sanctionnant systématiquement les actes de brutalité.

3. Historique de la loi

La loi XII sur les fautes et incorrections fait référence au degré de violence. La violence des jeux médiévaux, comme la soule, ou le folkball semble incompatible avec la logique des sports modernes. Pourtant cette violence était encore présente dans les écoles anglaises au milieu du XIX e siècle quand se développent le Football Association et le Football Rugby. Les espaces de jeu semblent conditionner la pratique. Sur les terrains en herbe, le jeu restait violent et les mêlées désordonnées. En revanche dans les cours d'école murées et pavées, le « dribbling game », visant à pousser la balle avec les pieds, comme le rapporte Philippe Villemus 7, l'emporta à Westminster, Eton, Windres, Shrewsbury ou Chaterhouse. Il s'agissait donc de donner la priorité à l'adresse et à l'habileté sur la force. Lors de la mise en place de règles communes en 1863, les discussions sont animées entre les représentants des différents clubs. F.W. Campbell se prononce contre un jeu aseptisé : « Le vrai football connaît aussi l’acte de s’attaquer à l’adversaire. C’était ainsi auparavant, et personne n’a le droit de l’interdire par de nouvelles règles. De telles dispositions ne s’appliquaient, certes qu’aux personnes qui préfèrent les liqueurs fortes, un jeu viril au sein des équipes. Les gens qui s’opposent au coup de pied (hacking) sont trop vieux pour bien apprécier l’esprit de notre jeu »8. Cette tendance minoritaire, souhaitait maintenir le hacking pratiqué dans les règles de rugby et qui consistait à envoyer un coup de pied sur les tibias d'un adversaire pour l'arrêter dans sa course. Saint-Chaffray et Dedet 9 précisent que tout joueur en position de hors-jeu était rappelé à l'ordre pour un hacking et l'on se servait souvent de ce procédé pour se frayer un chemin. Un bon hacker était très apprécié dans une équipe. Le fait que les représentants de

7 Villemus, P. (2006), op. cit., p. 61. 8 Campbell, F.W. (1863), cité par Georges Boulogne in L’Entraîneur Français, n° 220, octobre 1986. 9 Saint-Chaffray, E. & Dedet, L. (1920), op. cit., p. 21. 198

Rugby School aient quitté la précédente réunion laisse à penser que ce sont les partisans d’une philosophie de jeu plus édulcorée qui écrivirent les premières lois du jeu de la Football Association en 1863 10 , à la Freemasons’Tavern 11 de Londres. Les règles de la Football Association et du Football Rugby, sont encore étrangement mêlées, comme l’illustre la loi 9 12 . Cette dernière stipule qu’un joueur, qui fait un arrêt de volée, ou attrape le ballon au premier rebond a le droit de courir avec le ballon vers les buts adverses. Les deux suivantes concernent les fautes, et les lois du jeu distinguent déjà la charge sur un adversaire porteur ou non de la balle. Selon la loi 10 13 , si un joueur court avec le ballon vers les buts de l'adversaire, n'importe quel joueur de l'équipe adverse aura la liberté de le repousser, de le retenir, de le déséquilibrer, de lui faire un hacking , ou de lui arracher la balle. Le droit de charge sur le porteur laisse beaucoup de possibilités, et le maintien du hacking montre que cette charge peut également être violente. La règle empêche toutefois les empoignades et les acharnements sur le porteur, car il n’est plus possible que celui-ci soit à la fois tenu et subisse un « hacking », pratique certainement courante dans les mêlées désordonnées. La grande modification concerne en fait le droit de charge sur les non-porteurs de balle. La loi 11 14 interdit de donner des coups de pieds, de faire des béquilles ou des croches-pied, de tenir, de pousser un adversaire avec les mains ou les coudes. Cette loi protège donc les non-porteurs et évite les bagarres loin du ballon ou dans une mêlée. La dimension duelle, pour la possession du ballon, est bien présente dans ce règlement de 1863. Le contact corporel, le corps à corps est également évoqué car selon la loi 12 15 , tout joueur est autorisé à en repousser un autre avec son corps, à condition qu'ils soient tous deux en action. Contrairement au football rugby, l’utilisation des bras n’est pas possible, mais la charge dans le dos est autorisée, y compris loin du ballon. Notre propos est sans doute à nuancer, car un autre règlement de la Football Association rédigé la même année en 1863 a été mis en lumière en 2006 par Bragg Melvyn & Charlton

10 Les 14 lois originelles du jeu parues dans le journal sportif Bell’s Life, cité par Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 20. Mais il existe d’autres versions comme par exemple celle de Rous, S. & Ford, D (1974), op. cit., pp. pp. 22-23. Cf. annexe n° 65, p. 167. 11 Freemasons’Tavern, Great Queen Streeet, London. 12 1863 : law 9 : « A player shall be entitled to run with the ball towards his adversaries’ goal, if he makes a fair catch, or catches the ball on the first bound ; … ». Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 20 13 Law 10 : « If any player shall run with the ball towards his adversaries’ goal, any players on the opposite side shall be at liberty to charge, hold, trip or hack him, or to wrest the ball from him ; but no player shall be held and hacked at the same time ». Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 20 14 Law 11 : « Neither tripping or hacking shall be allowed, and no player shall use his hands for elbows to hold or push his adversary, except in the case provided by the law X ». Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 20 15 Law 12 : « Any player shall be allowed to charge another, provided they are both in active play. … ». Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 20 199

Bobby 16 . Les auteurs datent ce texte de décembre 1863 ; il a la particularité de comprendre une loi de moins. Ce code répond davantage au souci de s’autonomiser des règles du football rugby. La possibilité de porter la balle est supprimée 17 . Quel que soit le cas de figure, les coups de pied, les béquilles ne sont plus autorisés et aucun joueur ne peut utiliser ses mains pour retenir ou pousser un adversaire 18 . Ces règles sont donc à rapprocher de celles de Cambridge, adoptées après la réunion du 1 er décembre 1863 19 . Le joueur n’a plus la possibilité de passer la balle à un autre à la main, ni le droit de s’emparer du ballon quand il est à terre. Dans les deux cas, « ni les règles de Cambridge, ni les nouvelles règles de la Football Association n’interdisent de toucher la balle avec les mains »20 . En effet le joueur était parfaitement habilité à l’attraper en l’air pour faire un arrêt de volée et obtenir un coup franc, sur lequel les joueurs adverses n’avaient pas le droit de charger 21 .

4. Fautes et sanctions techniques

A titre de réparation, des sanctions techniques sont accordées au bénéfice de l’équipe lésée en fonction de la nature des fautes et infractions commises. Il s’agit soit d’un coup franc direct, soit d’un coup franc indirect. Il sera, sauf cas particulier, exécuté par un joueur de l’équipe adverse à l'endroit où l'infraction a été relevée. Repérer le lieu exact de la faute est primordial, car il détermine la position précise du ballon au moment du coup franc. En principe, ce point se détermine au moment où la faute a été initiée.

4.1. Fautes sanctionnées par un coup franc direct Il existe aujourd’hui dix fautes sanctionnées par un coup franc direct. Huit de ces fautes interdisent certains contacts entre les joueurs et concernent donc la protection du joueur en limitant le droit de charge. La neuvième sanctionne le fait de cracher sur un adversaire assimilé à un acte de brutalité. La dernière faute se distingue des autres, car l’action incriminée n’est pas orientée en direction de l’adversaire mais destinée à arrêter ou dévier la

16 Bragg, M. & Charlton, B. (2006). The rules of Association Football 1863 . Oxford, Boldeian, Library. Version française Charroin Pascal. (2008). Les premières règles du Fooball 1863. Les quatre chemins. 17 Law 9 : « No players shall carry the ball ». Cf. annexe n°66, p. 168. 18 Law 10 : « Neither tripping nor hacking shall be allowed and no player shall use his hands to hold or push his adversary ». Cf. annexe n°66, p. 168. 19 Cf. annexe n°65, p. 167. 20 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 21. 21 Bragg, M. & Charlton, B. (2006 ), op. cit., Law 8 : « If a player makes a fair catch he shall be entilled to a free kick. … » 200 course du ballon, avec l’interdiction de manier le ballon avec les mains ou les bras. Elle ne peut pas être considérée comme une conduite violente ou excessive, mais plutôt soit comme une maladresse, soit comme un véritable acte d’antijeu. Le gardien de but est soumis aux mêmes restrictions que les autres joueurs concernant le contact entre le ballon et les mains hors de sa propre surface de réparation. Cette classe regroupe donc des fautes de nature différente et se scinde aujourd’hui en deux sous catégories. La première comprend trois fautes systématiquement sanctionnées : tenir un adversaire ; cracher sur un adversaire ; et toucher délibérément le ballon de la main (excepté le gardien de but dans sa propre surface de réparation). La seconde regroupe les sept autres cas, sifflés uniquement si la faute a été commise avec imprudence, témérité ou excès d’engagement. Nous nous sommes attachés à remonter à l’origine et à l’évolution de chacune de ces fautes sanctionnées par un coup franc direct depuis la création du Board . Le tableau numéro 1 en constitue un résumé synthétique.

L’identification de certaines fautes remonte avant la création du Board . Par exemple, dans les règles de la Football Association à la fin de 1863, les actions de tenir, pousser ou de mettre des coups de pied aux adversaires sont formellement interdites. Nous précisons dans le tableau l’apparition de la faute dans les comptes rendus du Board depuis sa première réunion en 1886. Les sept premières fautes apparaissent au XIX e siècle, et illustrent la naissance d’un code précis du jeu. Le règlement complet retranscrit, suite à la réunion de 1903, confirme ce nombre de sept fautes. Deux nouvelles fautes apparaissent avant 1914 pour interdire la charge par derrière, sur un adversaire qui ne fait pas obstruction, et le fait de frapper ou d’essayer de frapper un joueur adverse. En 1980, le fait de « cracher » sur un adversaire est sanctionné par un coup franc direct. Cette dernière faute est assimilée à l’interdiction de frapper un adversaire, et devient dans la classification de 1995 une faute à part entière. En 1995, le tacle est également spécifiquement réglementé avec l’interdiction de toucher l'adversaire avant le ballon pour s'en emparer. Neuf fautes, plus ces deux nouvelles portent le total à onze. Mais dans le même temps, le règlement a regroupé sous le vocable « charger un adversaire », les deux anciennes fautes concernant la charge 22 . Depuis 1995, les fautes sanctionnées par un coup franc direct sont donc au nombre de 10.

22 Il a été regroupé : Charger un adversaire de manière violente et dangereuse + charger un adversaire par derrière à moins qu’il ne fasse obstruction : Charger un adversaire. 201

LES FAUTES SANCTIONNEES PAR UN COUP FRANC DIRECT

Date Origine et Lois du jeu 2011 apparitio Nature des fautes Les 10 fautes n sanctionnées par un coup franc direct en 2011 1887 Passer un croc-en-jambe à 1 Faire ou essayer de faire un croche-pied à l'adversaire. un adversaire. 1888 1888 : Charger par derrière. 2 Charger un adversaire. 1903 : Charger un adversaire violemment ou dangereusement. 1890 Tenir le ballon de la main. 3 Manier volontairement le ballon, c'est-à-dire le porter, le frapper ou le lancer avec la main ou le bras (cette disposition ne s’applique pas au gardien de but lorsqu’il se trouve dans sa propre surface). 1893 Pousser un adversaire. 4 1998 Bousculer un adversaire. 1896 1896 Tenir un adversaire. 5 Tenir un adversaire. 1888 Sauter sur un adversaire. 6 Sauter sur un adversaire. 1897 1897 Frapper du pied un 7 Donner ou essayer de donner un coup de pied à adversaire l'adversaire. 1914 Charger par derrière un Remarque : Les deux fautes concernant la charge d’un adversaire qui ne fait pas adversaire de 1903 et 1914 ont été regroupé en 1995 : obstruction Charger un adversaire. 1914 Frapper ou essayer de 8 Frapper ou essayer de frapper un adversaire. frapper un adversaire. + 1980 : Cracher contre un adversaire 1995 Interdiction de cracher sur 9 Cracher contre un adversaire. un adversaire. 1995 Interdiction de tacler pour 10 Interdiction de tacler pour s'emparer du ballon en 10 fautes s'emparer du ballon en touchant l'adversaire avant de jouer le ballon + 1998 : touchant l'adversaire avant l’interdiction de tout tacle par derrière. de jouer le ballon.

Tableau n°1 : Les fautes sanctionnées par un coup franc direct

Au fil du temps le nombre de fautes sanctionnées par un coup franc direct ne cessent d’augmenter, avec un contrôle de plus en plus strict de la charge autorisée. Ce tableau confirme la mise en place des lois du jeu pendant l’époque juridique, et leur stabilité jusqu’en 1990. La réforme des lois est illustrée dans la loi XII par le fait que le tacle est davantage réglementé et qu’une nouvelle forme de violence (cracher) est sanctionnée par un coup franc direct.

4.2 . Fautes sanctionnées par un coup franc indirect L’emploi de l’expression « coup franc indirect » apparaît avec la nouvelle classification de Stanley Rous en 1938. Mais notre recherche englobe la période précédente, car il existait des fautes sanctionnées par un coup franc où il n’était pas permis de marquer directement.

202

Nous nous proposons à travers les archives du Board de retrouver l’origine et les principales transformations de chacune de ses infractions Il existe deux sous catégories. L’’une concerne les fautes commises par un joueur de champ (Tableau n° 2).et l’autre les fautes spécifiques du gardien de but (Tableau n° 3).

LES FAUTES SANCTIONNEES PAR UN COUP FRANC INDIRECT COMMISES PAR UN JOUEUR DE CHAMP

Date Origines et nature de la faute Loi du jeu 2011 apparition Commise par un joueur de champ Les 5 fautes sanctionnées par un coup franc indirect accordé à l’équipe adverse du joueur qui, de l’avis de l’arbitre : 1939 Charger le gardien de but excepté 1 empêche le gardien de but de lâcher le s’il tient le ballon en mains, ou ballon des mains. s'il fait (il a été supprimé en 1939: volontairement) obstruction à un opposant quand il sort de la surface de but ( goal area). (FA adoptée) 1948 Charger loyalement quand le ballon n'est pas 2 à distance de jeu. 1971 Proposition d'accorder un CF indirect pour 3 tenter d'empêcher le gardien adverse de dégager 1995 décision 7 : Si un joueur (est retiré : fait intentionnellement obstruction) entrave la progression du gardien de but adverse pour l'empêcher de mettre le ballon en jeu. 4 joue d’une manière dangereuse. 1951 Obstruction : empêcher la progression d’un 5 fait obstacle à la progression d’un adversaire (1995) adversaire ; 1975 Board 12.09. Si un joueur fait intentionnellement obstruction au gardien de but adverse pour l'empêcher de mettre le ballon en jeu conformément à la loi XII 5 a), l'arbitre accordera un coup franc indirect. (Proposition 1981 → CF direct ) Cette mesure existait déjà dans la décision 12 08 depuis 1969. Commettre une conduite inconvenante 6 commet d’autres fautes non mentionnées dans la Loi XII et pour lesquelles le match est arrêté afin d’avertir ou d’expulser un joueur. Entrer ou quitter le terrain (1969) Décision 12.03. Dans le cas de contact dans la surface de but entre un joueur attaquant et le gardien de but adverse n'ayant pas le ballon l'arbitre, qui est seul juge de l'intention, doit arrêter le jeu s'il estime que l'action du joueur attaquant a été intentionnelle et accorder un coup franc indirect.

Tableau n°2 : Les fautes sanctionnées par un coup franc indirect commises par un joueur de champ.

203

Les cinq fautes commises par un joueur de champ et sanctionnées par un coup franc indirect regroupent des infractions de nature très différente. Une sorte de catégorie fourre tout, tentant de limiter les fautes spécifiques subies par le gardien de but, le jeu dangereux, et les actes d’antijeu, notamment ceux sanctionnés par un avertissement ou l’exclusion d’un joueur. Une logique de simplification du règlement semble se dégager, avec une réduction des catégories d’infractions sanctionnées. La reformulation du règlement publié lors du compte rendu de la réunion du Board de 1997, répertorie trois fautes spécifiques commises contre le gardien de but : sauter sur le gardien sous prétexte de jouer le ballon de la tête ; s’interposer (dodge ) devant le gardien dans le but de l’empêcher de dégager le ballon ; tenter de jouer le ballon alors que le gardien est en train de le lâcher. Les deux premières sont aujourd’hui englobées dans les autres cas de coup franc indirect et une seule concerne spécifiquement le gardien.

LES FAUTES SANCTIONNEES PAR UN COUP FRANC INDIRECT COMMISES PAR LE GARDIEN DE BUT.

Lois du jeu 2011 Date Origines et Nature de la faute Un coup franc indirect est accordé à apparition commise par le gardien l’équipe adverse si, à l’intérieur de sa propre surface de réparation, un gardien de but 1896 Porter le ballon, signifie « faire plus de deux pas ». A partir de 1897, il peut faire plus de 2 pas en faisant rebondir le Garde le ballon en main pendant plus de six ballon 1 secondes avant de le relâcher. 1967 Perdre du temps 1967  2001 1968 Faire 4 pas, conduire le ballon et reprendre Touche une nouvelle fois le ballon des mains le ballon avec les mains 2 après l’avoir lâché, sans qu’il ait été touché par un autre joueur. 1992 Toucher le ballon des mains sur une passe touche le ballon des mains sur une passe bottée bottée délibérément par un 3 délibérément par un Coéquipier. coéquipier. 1997 Toucher le ballon des mains directement sur Touche le ballon des mains directement sur une rentrée de touche effectuée par un 4 une rentrée de touche effectuée par un coéquipier. coéquipier.

Tableau n°3 : Les fautes sanctionnées par un coup franc indirect commises par le gardien de but.

Pour le gardien, la nature des fautes concerne uniquement le gaspillage du temps. Son poste spécifique lui confère un pouvoir supérieur, celui de pouvoir utiliser ses mains dans le champ de jeu. A l’origine en 1890, le gardien avait la possibilité de se servir de ses mains à

204 l’intérieur de toute sa propre moitié de terrain. Ce droit subsistera pendant vingt deux ans. En 1912 23 , la jouissance de ce droit est réduite à sa propre surface de réparation. Ce pouvoir n’est pas absolu, car en manipulant le ballon avec les mains dans cette zone, il peut être sanctionné pour quatre types de fautes spécifiques 24 par un coup franc indirect en faveur de l’équipe adverse. Un cinquième cas « Perdre du temps » a subsisté entre 1967 et 2001. Sur une proposition de la FIFA, cette faute a été retirée en 2001, car cette règle n’était qu’une répétition du premier cas « garder le ballon en sa possession pendant plus six secondes avant de le lâcher des mains , » (Règle modifiée en 2000 par le Board ). La possibilité de tenir le ballon, de le confisquer, et de supprimer la possibilité pour les adversaires de le jouer est particulièrement surveillée par le règlement.

4.3 « La règle de l’avantage » : une absence de sanction technique. En principe, quand une faute est commise, le joueur est immédiatement sanctionné, l’arbitre siffle le coup franc. Mais la loi stipule que si la faute bénéficie à l’équipe de celui qui l'a subie, l’arbitre peut laisser le jeu se poursuivre et l’indiquer clairement aux joueurs. Dans ce cas la sanction technique ne sera pas appliquée, car l’arbitre après 2 ou 3 secondes ne reviendra pas à la faute, même si l’avantage ne profite pas concrètement. Le fautif n’échappe pas nécessairement à la sanction administrative, car les cartons jaunes ou rouges ne sont pas systématiquement distribués juste après la faute. Le Board précise, en 1971 25 , que la lettre et l'esprit de la Loi XII n'obligent pas l'arbitre à arrêter la partie pour donner un avertissement. S'il le préfère, il peut appliquer l'avantage. L’arbitre avertira ou expulsera le joueur quand le jeu sera arrêté. La reprise du jeu sera obligatoirement retardée pour donner un carton 26 . En effet, lorsque l’arbitre a décidé de distribuer un carton pour avertir ou exclure un joueur, le jeu ne doit pas reprendre avant que la sanction ait été infligée. La règle de l’avantage ne doit pas être appliquée dans des situations impliquant un acte de brutalité (sanctionné par une expulsion) à moins qu’une nette occasion de marquer un but ne se dessine.

23 Réunion du Board de 1912 : Proposition de la FA adoptée. Loi 8 : Le gardien de but, dans sa propre surface de réparation, peut se servir de ses mains, mais ne peut porter le ballon. 24 Règlement FIFA 2009 : approuvé par le Board . Coup franc indirect, si le gardien de but dans sa propre surface de réparation commet l'une des 4 fautes suivantes: 1) faire plus de 4 pas en tenant le ballon dans les mains ; 2) toucher un nouvelle fois le ballon des mains après l'avoir lâché, sans qu'il n'ait été touché par un autre joueur, 3) toucher le ballon des mains sur une passe bottée délibérément par un coéquipier ; 4) toucher le ballon des mains directement sur une rentrée de touche effectuée par un coéquipier. 25 Réunion du Board de 1971 : Décision 12. 06. 26 Réunion du Board de 2009. 205

5. Fautes et sanctions administratives

Les sanctions disciplinaires sont de deux types : l’avertissement ou l’exclusion du joueur. Elles sont consécutives d’un certain nombre de fautes contraires à l’esprit du jeu. L’administration par l’arbitre central d’un carton jaune ou rouge est la manifestation visible de ces sanctions.

5.1. Avertissement 5.1.1. Distinction entre carton jaune et avertissement L’arbitre dispose du pouvoir d’avertir un joueur. Cette possibilité remonte au XIX e siècle. En 1889, l’article 12 des lois du jeu permet à l’arbitre de le faire dans le cas où l'un des joueurs se conduirait de façon inconvenante ( ungetlemanly conduct) , sur le fait de n'importe quelle contestation. Cet extrait de la réunion du Board de 1889, montre que l’avertissement précède l’arrivée de l’arbitre au centre du terrain en 1891. Les officiels signifiaient leur décision de manière orale, auprès du joueur fautif en présence des umpires , et éventuellement, de son capitaine ou du juge de touche le plus proche. L’avertissement se confond aujourd’hui avec le carton jaune, mais, le fait de montrer le carton jaune n’apparaît qu’à la fin des années 1960. Très marqué après avoir dirigé le match Italie-Chili lors de la Coupe du monde 1966, qualifié de « Bataille de Santiago », l'arbitre anglais Ken Aston, réfléchissait à un moyen d'endiguer la violence. Deux ans plus tard, à l'arrêt devant un feu tricolore, il eut l’idée, comme une lumière, des cartons 27 . Ceux-ci furent introduits, aux Jeux Olympiques de Mexico en 1968 et à la Coupe du Monde de 1970 28 . Les cartons jaunes et rouges firent leur apparition pour notamment lutter contre le jeu dur. C'est pour permettre aux spectateurs et journalistes de prendre connaissance visuellement de la décision du directeur de jeu que celui-ci fut chargé de brandir un carton, parfois de façon théâtrale à l'adresse du coupable. Les cartons ont peut-être également été introduits pour des raisons linguistiques évidentes, dans un match international, l'arbitre neutre peut ainsi se faire comprendre sans discussion. Jusque dans les années 80, les associations nationales sont libres de maintenir ou de supprimer l'utilisation des « cartons ». Par exemple, lors de la saison 1984-1985, l'Angleterre et le Brésil ont abandonné cet usage dans leurs compétitions nationales. La question est

27 Ken Aston était en 1970 président du comité arbitral de la FIFA. 28 Le premier joueur averti en Coupe du monde est le défenseur soviétique Evgueni Lovcev à la 31 ème minute du match d'ouverture du Mondial Mexicain en 1970. 206 débattue lors de la réunion du Board de 1987, suite à la proposition du Comité des Arbitres de la FIFA qui souhaite la réintroduction des cartons dans toutes ces compétitions et matchs. Le Board recommande à la FIFA d’émettre une instruction à toutes les associations nationales pour rendre l’utilisation des cartons jaunes et rouges obligatoire dans les plus hautes divisions du jeu.

5.1.2. Nombre et nature des fautes Un joueur se voit infliger aujourd’hui un carton jaune pour sept catégories de fautes. Trois de ces fautes peuvent être également commises par un remplaçant ou un joueur remplacé : se rendre coupable de comportement antisportif, manifester sa désapprobation en paroles ou en actes, retarder la reprise du jeu. Nous les avons reclassés par ordre chronologique d'apparition. Les archives nous permettent de remonter à l’origine et de suivre l’évolution de chaque faute Le tableau numéro 4 suivant synthétise ce travail.

LES FAUTES ET COMPORTEMENTS SANCTIONNES PAR UN CARTON JAUNE Date Lois du jeu 2011 apparition Origine et nature de la faute ou du comportement Un joueur se voit infliger un carton jaune quand il : 1889 1889: Conduite inconvenante. ( ungetlemanly conduct) 1 se rend coupable de Article 12. comportement antisportif ; 1997 : Le « comportement antisportif » remplace la "conduite inconvenante" en tant qu'infraction passible d'avertissement. (Board : « ungentlemanly conduct »  « unsporting behaviour »). 1889 1889 : dans le cas où l'un des joueurs se conduirait de 2 manifeste sa désapprobation en façon inconvenante, sur le fait de n'importe quelle paroles ou en actes ; contestation. 1924 : un joueur n'est pas autorisé par mot ou par action, à montrer son désaccord.  conduite inconvenante (FA adoptée). 1907 S’il enfreint avec persistance les lois du jeu  conduite 3 enfreint avec persistance les lois inconvenante (Board 8 juin 1907). du jeu ; 1931 S’ il revient sur le terrain de jeu après avoir réparé ses 4 pénètre ou revient sur le terrain chaussures sans en référer à l’arbitre (Décision du 13 de jeu sans l’autorisation juin 1931). préalable de l’arbitre 1939 Tout joueur qui quittera le terrain durant le déroulement 5 quitte délibérément le terrain du jeu (excepté pour cause d'accident) sans le sans l’autorisation préalable de consentement de l'arbitre sera coupable de conduite l’arbitre. inconvenante. (1939 : loi III FA adoptée) 1997 S’il ne respecte pas la distance requise lors de l'exécution 6 ne respecte pas la distance d'un coup de pied de coin, d'un coup franc ou d'une requise lors de l’exécution d’un rentrée de touche. coup de pied de 1997 Tout joueur qui perd du temps doit être sanctionné pour 7 retarde la reprise du jeu. conduite inconvenante.

Tableau n°4 : Les fautes et comportements sanctionnés par un carton jaune

207

La nature de ces fautes implique l'interprétation de l’arbitre, et insiste sur le respect du comportement des joueurs. L’arbitre contrôle les allées et venues des joueurs sur le terrain, et fait tout simplement appliquer les règles du jeu. Ce classement en catégorie proposé par le Board en 1997 questionne. En effet, il semble que toutes les fautes puissent être qualifiées de « conduite inconvenante » ou de « comportement antisportif », et peuvent donc appartenir à la première catégorie. Le règlement demande au joueur d’avoir un comportement exemplaire. Ce tableau montre un empilement de fautes sanctionnées par les lois du jeu. L’histoire de cette sanction administrative révèle une complexité croissante du règlement à appliquer. L’apparition des différentes catégories distingue deux grandes périodes. La première, avant 1940, prolonge la mise en place des lois du jeu. La seconde, depuis la fin des années 1990 peut être analysée comme une reprise en main du Board visant à lutter contre certains comportements de joueurs : le jeu dur, les simulations, le gaspillage du temps. Cette vision est sans doute simpliste, mais l’étude des transformations de chaque catégorie la confirme. Les années 60, donnent néanmoins à l’arbitre le pouvoir de contrôler réellement les entrées et les sorties de joueurs du terrain pendant le match, avec la possibilité de les sanctionner.

5.2. Exclusion 5.2.1. Exclusion et carton rouge Le fait de recevoir deux cartons jaunes dans le même match provoque automatiquement l’expulsion du joueur, symbolisée par la présentation du carton rouge. Les cas d’exclusion du joueur sont évoqués dès 1889 29 par le Board , mais il faut attendre 1968 pour voir distribuer les premiers cartons rouges. Pendant plus de 70 ans, le fait d’exclure un joueur, n’était donc pas synonyme de carton rouge. Ces deux entités seront associées par le Board pour la première fois dans la même phrase en 1992 30 . Lors d’exclusion suite à un second carton jaune, les arbitres sortaient directement le carton rouge. Le Board a précisé en 1992 que l’arbitre devait montrer simultanément les cartons jaune et rouge. Il a motivé cette procédure par la clarification de la situation, pour les joueurs, spectateurs et particulièrement pour les observateurs multimédia. L’année suivante en

29 Réunion du Board de 1889 : Art. 12 : Les umpires … et si cette offense est répétée ou même en cas de violence, sans avertissement préalable, l'arbitre a le pouvoir réglementaire d'exclure du jeu le ou les coupables, et de transmettre le nom ou les noms de ce, ou de ces joueurs, à leur association nationale, laquelle sera entièrement en droit d'accepter une excuse. 30 Réunion du Board de 1992 : Proposition de la FIFA adoptée. Loi V h) : L’arbitre exclura du terrain et montrera un carton rouge ( show a red card ) à tout joueur qui, selon lui, est coupable de comportement violent, de faute grave ( serious foul play ) tient des propos inconvenants ou grossiers ou persiste dans l'infraction après avoir été averti. 208

1993, est adoptée la procédure actuelle : l’arbitre doit montrer en premier le carton jaune et immédiatement après le carton rouge quand un joueur est expulsé pour un second avertissement.

LES FAUTES ET COMPORTEMENTS SANCTIONNES PAR UN CARTON ROUGE Date Origine et nature de la faute ou du Un joueur, un remplaçant ou un joueur app. comportement remplacé est exclu s’il : 1889 En cas de violence, sans avertissement préalable 1 Adopte un comportement violent ; (Loi 12). 1993 : il se rend coupable d'un acte de brutalité (Proposition Scottish FA & amendement de la FA). 1889 Si cette offense est répétée (Loi 12 : Board). 2 reçoit un second avertissement au 1939 : S'il persiste dans sa faute après avoir reçu cours du même match ;. un avertissement ( Loi 12 : Board). 1926 Langage grossier ou injurieux envers l'arbitre = 3 tient des propos ou fait des gestes conduite violente (Loi 12 : FA). blessants, injurieux et/ou grossiers ; 1939 : S'il se rend coupable …..de langage grossier (Board). 1997 : Tout joueur qui agresse ou insulte un arbitre doit être expulsé. 31 (Board) 1998 s'il tient des propos ou fait des gestes blessants, injurieux et/ou grossiers.

1939 S’il se rend coupable d'une faute grossière 4 commet une faute grossière ; (serious foul ). 1998 Les fautes grossières sont passibles d'un carton rouge. 1968 L'outrage consistant à cracher sur des adversaires, 5 crache sur un adversaire ou sur toute des officiels ou autres personnes ainsi que tout autre personne ; autre comportement indécent seront considérés comme conduite violente. (Proposition FIFA, Décision 12.13). 1991 S’il prive l'équipe adverse de marquer un but, ou 6 empêche l’équipe adverse de marquer annihile une occasion de but manifeste, en un but, ou annihile une occasion de touchant délibérément le ballon de la main (ceci ne but manifeste en touchant s'applique pas au gardien de but dans sa propre délibérément le ballon de la main (cela surface de réparation) (Décision 15. FA Adoptée). ne s’applique pas au gardien de but dans sa propre surface de réparation) ; 1991 S’il annihile intentionnellement une occasion de 7 annihile une occasion de but manifeste but manifeste d'un adversaire se dirigeant vers son d’un adversaire se dirigeant vers son but en commettant une faute passible d'un coup but en commettant une faute passible franc ou d'un coup de pied de réparation. (Décision d’un coup franc ou d’un coup de pied 15. FA Adoptée). de réparation.

Tableau n°5 : Les fautes et comportements sanctionnés par un carton rouge

Le carton rouge a pour conséquence une expulsion sur le champ du joueur, qui retourne au vestiaire. Le Board précise en 2003 qu’un joueur qui a été expulsé doit quitter la proximité

31 AGM of 1997 : « Any player who assaults or insults a referee shall be sent off ». 209 du terrain de jeu ainsi que la surface technique 32 . Ce joueur est automatiquement suspendu pour le match suivant. Le cas du joueur expulsé est ensuite étudié en commission de discipline, où il écope d’un nombre variable de suspensions de matchs, ou d’une durée de suspension qui peut aller jusqu'à la radiation à vie en cas d’agression d’un arbitre.

Il existe aujourd’hui sept catégories de fautes passibles d’un carton rouge. Comme pour l’avertissement, nous avons reclassé par ordre chronologique leur apparition. Les archives nous permettent de remonter à l’origine et de suivre l’évolution de chaque faute.Le tableau numéro 5 synthétise ce travail.

5.2.2. Nature des fautes Les fautes concernent des comportements violents de nature différente : physique, verbale, gestuelle. Le joueur brutal, insultant, agressif est expulsé. Cette brutalité peut également s’exprimer dans une action de jeu. Un tacle par derrière qui met en danger l’intégrité physique d’un adversaire doit être sanctionné comme une faute grossière et considéré comme une conduite violente. Ce carton rouge est directement attribué pour les conduites très antisportives qui annihilent une occasion manifeste de but. Le règlement mentionne, par exemple, que la sanction n’est pas dictée par le fait que le joueur a délibérément fait une main, mais qu’il a empêché l’équipe adverse de marquer un but par son intervention inacceptable et déloyale. En 1992, les représentants de la Scottish FA ont soumis l’idée de rajouter dans la liste des fautes pouvant entraîner une expulsion, les fautes extrêmement injustes 33 . Le Board a décidé d’étudier cette question au prochain meeting, mais le sujet ne sera plus abordé par la suite. Ces sanctions ne concernent que les joueurs. Depuis 2001, il ne peut être présenté de carton rouge à un coach ou un dirigeant. Il est simplement exclu du banc, et se retrouve en tribune, comme ce fut le cas de José Mourinho 34 , l’entraîneur du Real de Madrid en demi- finale aller de la Champions League à Barcelone en mai 2011. Une fois le match terminé, l'arbitre ne peut revenir sur une de ses décisions.

32 Réunion du Boar d 2003. 33 Réunion du Board de 1992 : Proposition de la Scottish FA non adoptée concernant les fautes extrêmement injustes: « grossly unfair play ». 34 José Mourinho a été sanctionné de 5 matchs d’interdiction de banc de touche par la commission de discipline de l’UEFA. Il a fait appel… et après six heures d’audition avec ses avocats, cette sanction a été réduite à trois matchs. 210

Cette étude met en évidence une extension des possibilités d’exclure les joueurs. Il est permis à l’arbitre d’exclure les joueurs pendant le match, mais aussi depuis 1960 35 pendant la mi-temps, et également avant le début du match. Il est aussi possible d’exclure des remplaçants, des remplacés, mais aussi deux joueurs de la même équipe 36 , un joueur qui met un coup de pied à un adversaire en dehors des limites du terrain 37 . La nouvelle rédaction de la décision 11 en 1971 38 , illustre parfaitement ce phénomène : « Tout joueur, se trouvant à l'intérieur ou à l'extérieur du champ de jeu, qui se rendra coupable de conduite incorrecte ou violente, que ce soit à l'égard d'un adversaire, d'un coéquipier, de l'arbitre, d'un juge de touche ou d'une autre personne, ou qui prononcera des grossièretés ou des injures, sera déclaré coupable et sera puni suivant la nature de la faute commise ». L’arbitre est habilité depuis 2005 à imposer des sanctions disciplinaires à partir du moment où il pénètre sur le stade et jusqu'à ce qu'il le quitte. Un joueur peut donc recevoir un carton rouge avant le début du match, pendant la mi-temps et même après le coup de sifflet final 39 . Il est aussi possible d’apprécier la baisse de tolérance à la violence en analysant l’augmentation des cas d’expulsions de joueurs pour conduites violentes ou actes de brutalité. Le problème est traité dès 1887 par le Board : ainsi le joueur violent est sorti du terrain « sans avertissement préalable ». La violence verbale est sanctionnée à partir de 1926, le « langage grossier ou injurieux envers l'arbitre » est assimilé à une conduite violente. La pénalisation de la violence gestuelle apparaît en 1997 « il tient des propos ou fait des gestes blessants, injurieux et/ou grossiers ». Nous devons noter une extension du degré d’application de la loi, car cette violence illicite ne concerne plus seulement les adversaires mais toutes les autres personnes présentes, jusqu’aux spectateurs. Par exemple l’interdiction de cracher sur une personne se généralise en 1980. La violence en jeu est également contrôlée et le Board précise, en 1998, que les fautes grossières sont passibles d'un carton rouge avec notamment le

35 Réunion du Board de 1960 : Décision transférée de la loi III à la loi XII : Si pendant la mi-temps un joueur frappe un opposant ou se conduit de manière inconvenante envers l’arbitre, il doit être exclu sans attendre la reprise du match, et ne doit pas être remplacé. 36 Réunion du Board de 1960 : Proposition de la FIFA adoptée : Si deux joueurs de la même équipe se rencontrent et commettent une conduite violente ou inconvenante à l’intérieur de la surface de réparation, l’arbitre devra les sanctionner par un avertissement ou une expulsion du terrain, et le jeu stoppé pour l’administration soit de l’avertissement, soit de l’expulsion, sera repris par un coup franc indirect. 37 Réunion du Board de 1960 : Décision transférée de la loi VIII à la loi XII. 38 Réunion du Board de 1971 : Proposition de la Scottish FA adoptée : Décision 12.11. 39 C’est le cas d’Arjen Robben le joueur du Bayern de Munich. Il a été expulsé le 9 avril 2011, lors de la rencontre de la 29eme journée de la Bundesliga Nuremberg – Bayern Munich (1-1) aprés avoir insulté l’arbitre à la fin du match.

211 tacle par derrière, et, à partir de 2005, tout tacle qui met en danger l'intégrité physique d'un adversaire. 5.3. Sanctions techniques et sanctions administratives La loi XII sur les fautes et incorrections détermine d’une part ce qui est autorisé et interdit, et d’autre part, les différentes possibilités de sanctionner techniquement et/ou administrativement les joueurs fautifs. 5.3.1. La double infraction Si les fautes sont simultanées l’arbitre doit sanctionner la plus grave. Si elles sont successives les sanctions administratives peuvent s’additionner. Le Board a décidé, en 1973 40 , que si, au moment où l'arbitre va donner un avertissement à un joueur, mais ne l'a pas encore fait, le joueur commet une autre infraction également punie d'un avertissement, le joueur sera expulsé du terrain. 5.3.2. La double peine La double peine n’est pas automatique. Un grand nombre d’infractions et de fautes sont simplement sanctionnées par un coup franc. Par exemple une faute commise par imprudence n’appelle aucune sanction disciplinaire supplémentaire. En fait, l’interprétation de l’arbitre est mise à rude épreuve. Pour la même faute, le joueur fautif demande la clémence : (« Je n’ai rien fait », « j’ai joué le ballon », « c’est ma première faute »...), en revanche les coéquipiers et l’entraîneur de l’équipe adverse souhaitent que le joueur soit « cartonné ». Le règlement précise que si un joueur se rend coupable de « jeu dangereux » lors d’une conquête « normale » du ballon, l’arbitre ne prendra pas de sanction disciplinaire. Par contre, si l’action comporte un risque de blessure évident, l’arbitre devra avertir le joueur. La frontière entre ces deux décisions est étroite et discutable à l’infini ; à quelle distance était le pied du fautif de la tête de l’adversaire, à quelle hauteur était cette tête, le fautif a-t-il fait preuve de retenue, l’adversaire a-t-il eu peur de mettre la tête… Une double peine est en théorie systématique pour les actes d’antijeu. La circulaire de la FIFA, du 6 mai 1998 41 , insiste sur le fait que tout acte d'antijeu notoire doit être sanctionné administrativement et techniquement. Le joueur doit être averti pour comportement antisportif. De plus, face à la recrudescence constatée des actes d'antijeu commis sur le terrain et en particulier dans les surfaces de réparation (tirages de maillot, joueurs ceinturés) par des

40 AGM of 1973 : Proposal by The Scottish Football Association adopted to add a new decision. Law XII. Decision 13 : « If, when a referee is about to caution a player, and before he has done so, the players commits another offence, which merits a caution, the player shall be sent off the fied of play ». 41 Circulaire FIFA n°644 du 6 mai 1998. 212 joueurs défenseurs et aussi par des attaquants, ces fautes doivent être sanctionnées sans état d'âme par un coup de pied de réparation, ou un coup franc direct. Le règlement semble bien distinguer les actes d’antijeu notoires du simple tirage du maillot. Le fait de tenir volontairement un adversaire ou tirer le maillot de son adversaire n’est pas sanctionné systématiquement comme un comportement antisportif. En effet, cette proposition faite par la Football Association of Wales en 2001 ne fut pas adoptée. La volonté de « nettoyer » les actes d’antijeu dans la surface de réparation, tenir un adversaire lors des corners par exemple est cependant manifeste. Dans cette situation, il est recommandé à l’arbitre d’abord de mettre en garde tout joueur qui tient un adversaire avant que le ballon ne soit en jeu ; ensuite de l’avertir s’il continue de tenir l’adversaire. Après la mise en jeu du ballon, l’arbitre est tenu d’accorder un coup franc direct ou un coup de pied de réparation et avertir le joueur s’il tient l’adversaire. D’autres décisions semblent plus faciles à prendre, des fautes plus visibles ou spectaculaires comme par exemple le tacle par derrière qui provoque le coup franc direct et l’expulsion du joueur fautif. 5.3.3. La triple peine Le Board est aujourd’hui également questionné sur la « triple peine » pour les fautes annihilant un but dans les 18 yards. Le joueur est expulsé (il sera suspendu au moins pour le prochain match), son équipe termine la partie en infériorité numérique et l’équipe adverse bénéficie d’un coup de pied de réparation soit environ 75% de chance de marquer un but. Lors de sa réunion de 2011, le Board a décidé de confier la réflexion au sujet de la « triple peine » à la FIFA Task Force Football 2014 42 .

6. Analyse des transformations de la loi XII

6.1. Les mains et le « jeu au pied » 6.1.1. Prohibition pour le joueur L’interdiction, spécifique au football, est précisée par le Board dès 1890 43 , « Aucun joueur ne doit porter, frapper ou tenir le ballon sous aucun prétexte que ce soit, excepté dans le cas du gardien de but … ». Cette loi se distingue des règlements des différentes public

42 La mission de la Task Force est de « faire toute proposition ou recommandation tendant à l’amélioration de l’arbitrage dans le football professionnel ». En France, la Task Force de l’arbitrage, est une commission créée le 13 mars 2008. Elle est présidée par Gérard Ernault, ex directeur de la rédaction de l’Equipe et de France Fooball. 43 Réunion du Board de 1890 : Art. 8. The law of the game, in Alcock, C.W. (1890). Association Football. London, Georges Beel & sons, York Street, Covent Garden, pp. 71-74. 213 schools britanniques de la seconde moitié du XIX e siècle, ou de celui de la Football Association de 1863, qui permettent toujours de toucher le ballon, c'est-à-dire de le dévier et de le propulser et aussi de l’arrêter avec les mains. Le « dribbling game » se caractérise de fait par l’impossibilité de se saisir du ballon et de le porter. La question des mains intentionnelles se pose en cette fin du XIX e siècle. Effectivement le règlement de 1896 44 , concernant le penalty stipule que si le joueur manipule volontairement le ballon avec les mains, il doit être sanctionné. Le règlement précisera, en 1898 45 , qu’aucun joueur de peut intentionnellement manier le ballon sous aucun prétexte que ce soit, excepté dans le cas du gardien de but … Il est donc décidé « ... de ne pénaliser que les mains intentionnelles » 46 . Le terme « main » est impropre, et le Board propose une extension de ce concept, faire une main revient à manier intentionnellement le ballon avec la main ou le bras 47 . Ce qui signifie que la « main » indique en fait le bras, de l'épaule aux doigts, depuis la fin du XIX e siècle. Inventer un jeu qui ne permet pas d’utiliser les membres supérieurs, était certainement un pari risqué, comme le souligne Albert Batteux en 1966 ; « On pouvait craindre que l’interdiction de se servir de ses mains allait rendre le ballon rond artificiel et faux »48 . Cette prohibition impose aux membres inférieurs, la prise en charge, en plus des actions de locomotion habituelle, des actions motrices destinées à l’appropriation, au transport, à la transmission, et à la propulsion du ballon. Cette contrainte, loin de décourager les pratiquants a donné naissance à une motricité spécifique extraordinaire.

6.1.2. Le droit de porter le ballon pour le gardien. L’interdiction de porter le ballon caractérise le « jeu au pied », symbolisé par le « dribbling game ». Le gardien de but subit cette interdiction, et ses actions motrices sont essentiellement orientées vers la défense du but, pour repousser, éloigner le ballon de la cible en le déviant ou en le frappant. Il ne faut pas imaginer le gardien au XIX e siècle soignant ses relances et prenant tout son temps. Le règlement stipule dès 1890 49 , que le gardien ne peut pas porter le ballon, néanmoins il existe une tolérance. Pour le goal « porter le ballon » consiste à

44 Réunion du Board de 1896 : Loi 13. Le penalty. 45 Réunion du Board de 1898 : Art. 8. 46 Parat, M. (1924). Le Football Association. Paris, Editions Nilsson, p. 13. 47 AGM of 1898: Definition of terms. « Handling and tripping : Handling is intentionally playing the ball with the hand or arm, and Tripping … ». 48 Batteux, A. in Réthacker, J.PH. & Thibert, J. (1974), op. cit., p. 7. 49 Réunion du Board de 1890. Cf. The Law of the game, in Alcock, C.W. (1890), op. cit., pp. 71-74. 214 faire deux pas au maximum en le gardant ou en le faisant sauter dans ses mains. En 1896, la question sur le droit de faire plus de 2 pas en faisant rebondir le ballon, est abordée par le Board . Aucune résolution ne sera adoptée, mais dans la pratique le fait de le faire rebondir à terre, n'est pas considéré comme porter le ballon. Dans la réalité, il relance les ballons avec la possibilité de faire deux pas, dont l’utilité première n’est pas la prise d’élan, mais bien l’évitement de la charge de l’adversaire. Georges Vigarello 50 a étudié la motricité des gardiens de but en 1932 en se référant à l’école de Joinville : « Le gardien de but conjure le danger par arrêt de ballon, puis par feintes et esquives ; il l'éloigne par dégagement ... » A u début du XX e siècle les attaquants pouvaient le charger et le projeter dans le but. La motricité s’adapte à la règle en vigueur, une motricité contextualisée qui répond à la logique d’une époque. Pour le goal, l’intention première est de ne pas se faire prendre ou charger par des adversaires avec le ballon dans les mains. Il est souvent amené à se débarrasser du ballon le plus vite possible, une motricité spontanée, sans doute éloignée d’une technique académique. La description évoque les deux actions typiques du gardien en fonction de cet impératif temporel. « Quand il est chargé de trop près il dégage à la main. Il dégage au pied, dans tous les autres cas, en laissant tomber le ballon et en le frappant avec le dessus du pied ». Il se concentre sur des gestes défensifs ou d’éloignement du ballon de la cible. La technique de gardien de but en football, après la seconde guerre mondiale, se transforme progressivement. Essentiellement de défense, elle se diversifie et se complexifie à partir du moment où le gardien est perçu comme le premier attaquant. « Non plus seulement homme de défense, mais homme de « relance »51 . La précision et la longueur des relances au pied et à la main deviennent déterminantes pour contre-attaquer ou lancer les attaques placées. Les gestes de défenses se modifient également, car la relance à la main est conditionnée par la capture réelle du ballon. Toute saisie de balle par le gardien est privilégiée par rapport aux dégagements du poing, ou au ballon dévié dans l’optique de garantir le meilleur renvoi. D’une simple « libération » de la cage à une « distribution » d'une balle offensive, les actions motrices du gardien évoluent en fonction du but recherché. Cette transformation est possible car la charge contre le gardien de but est dans la pratique proscrite, ce qui laisse donc le temps d’analyser la situation. La modification du règlement en 1939 52 , lui permet également de faire quatre pas en tenant le ballon dans les mains, donc de se déplacer avec le ballon pour

50 Vigarello,G. (1988). Une histoire culturelle du sport. Techniques d'hier… et d'aujourd'hui. Paris, Robert Laffont SA et Revue EPS, p. 44. 51 Ibid., p. 44. 52 Réunion du Board de 1939 : Loi XII : « A player shall be penalised if he intentionaly : … (g) When playing a goalkeaper carries, i.e., takes more than four steps while holding the ball, without bouncing it on the ground ». 215 améliorer sa position de relance, prendre de l’élan ou se rapprocher d’un partenaire. Il sera substitué à cette règle « des 4 pas », une nouvelle règle en 2000 53 , celle des « six secondes ». Cette modification met en terme définitif à l’interdiction de porter le ballon, mais en fixe la durée maximum. Dans sa surface, il a une liberté totale de déplacement, et peut en six secondes venir à la limite des 18 yards pour relancer. Les adversaires ne sont autorisés ni à le gêner dans sa course, ni à le charger quand il lâche le ballon pour dégager. Au XX e siècle le gardien a progressivement obtenu le droit de porter le ballon Très peu sanctionné, il en a parfois abusé pour gaspiller du temps. La règle des « six secondes » du début du XXI e siècle limite théoriquement ce droit. Cette mesure était destinée à rééquilibrer les pouvoirs entre les joueurs et le gardien. Le gardien ne pouvant plus être chargé, il semble logique qu’il ne puisse pas confisquer le ballon trop longtemps, face à des joueurs impuissants. Cette histoire de quelques secondes et de quelques pas concernant le droit pour le gardien de tenir et de se déplacer avec le ballon peut sembler anecdotique, mais cette chronologie est à relier avec l’histoire d’un football de moins en moins prolifique en buts inscrits. Malgré ces mesures, le nombre de buts marqués reste désespérément faible dans les grandes compétitions avec moins de trois buts inscrits par match 54 . Nous pouvons également mettre en évidence une réduction spatiale et événementielle du pouvoir du gardien depuis 1870. A cette époque les statuts sont indifférenciés, et n’importe lequel des derniers défenseurs pouvait jouer le rôle du gardien de but avec la possibilité de manipuler le ballon dans les 3 yards devant son but. Avec la création d’un statut spécifique, le gardien obtient le pouvoir incroyable de toucher le ballon avec les mains dans toute sa moitié de terrain. A partir de 1912 55 son droit est limité à sa surface de réparation 56 . Une réduction spatiale très importante en considérant que la surface de réparation est environ six fois moins grande qu’une moitié de terrain. L’utilisation des mains par le goal à l’occasion de n’importe quelle phase de jeu est possible pendant plus d’un siècle. Une rupture s’opère dans les années 1990. La loi se modifie, avec l’interdiction de capter, d’une part une passe au pied d’un partenaire en 1992, et d’autre part une touche effectuée par un coéquipier en 1997. Une rupture dans l’altérité, le gardien ne conserve plus son pouvoir spécifique pendant tout le match. Le statut s’efface avec

53 AGM of 2000: Proposal of FIFA adopted. Law XII : «... takes more than five or six seconds while controlling the ball with his hands before releasing it from his possession ». 54 Au mondial 1990 les défenses ont pris le pas sur les attaques, la moyenne de buts marqués est la plus faible de toutes les Coupes du monde : 2,21 buts par match. Cf. annexe n°74, p. 180. 55 AGM of 1912 : Proposal of Football Association, Mr. Crump : « The goalkeaper may, within his own penalty area, use his hands, but shall not carry the ball ». 56 La surface de réparation est créée en 1902, en relation avec la règle du penalty qui apparaît en 1891. 216 la possession du ballon. Au moment où un de ses partenaires récupère la balle, le gardien de but devient un joueur de champ comme un autre, qui n’échappe plus à la prohibition collective. L’optique est d’empêcher le gardien de consommer du temps de jeu, en conservant le ballon dans les mains. Ce temps est considéré comme gaspillé car le ballon n’est plus en mouvement et contredit un principe essentiel du football, « une balle libre pour tous à tout moment ».

6. 2. Intentionnalité de la faute et interprétation des règles par l'arbitre

Dans le langage courant les fautes sanctionnées par un coup franc direct sont associées à des fautes volontaires. En fait, le règlement encourage les arbitres à prendre en compte l’intention du joueur et ceci dès le XIX e siècle. Ainsi en 1896 57 , l’arbitre ne peut accorder un penalty que si un joueur crochète, tient ou pousse intentionnellement un adversaire, charge un adversaire par derrière, ou manipule volontairement le ballon avec les mains. En 1902 58 , le Board précise que de nombreuses fautes peuvent ne pas être préméditées et, que dans ce cas, aucune pénalité ne doit être appliquée. En fait le joueur possède la présomption d’innocence, ….comme à l’origine du jeu où le fait qu’un gentleman puisse faire une faute n’était pas envisageable. L’arbitre doit, non pas apporter la preuve, mais au moins avoir la certitude que la faute est intentionnelle. Le bénéfice du doute semble être accordé au joueur. Cette philosophie privilégiant surtout le défenseur, qui tente de s’approprier le ballon, est une permanence jusqu’aux années 1990. Le Board en 1993 précise toujours cette idée d’intentionnalité : « Un joueur qui commet intentionnellement une des neuf fautes suivantes doit être pénalisé:… »59 . Le mot « intentionnellement » est progressivement retiré de cette règle en 1995 et en 1996 60 , car il est, selon le Board , en contradiction avec le nouveau texte de la loi XII. Par exemple en 1995, les 10 fautes sont classées en deux catégories. La règle précise désormais qu’un joueur qui commet une des six fautes suivantes 61 par négligence, par

57 Réunion de 1896 : Loi 13. 58 Décision du Board du 16 juin 1902 : Le fait de manier le ballon ou de passer un croche-pied, de pousser, de frapper du pied et de tenir un adversaire ou de charger par derrière peut être non prémédité ( unintentionnel) et, dans ce cas, aucune pénalité ne doit être appliquée. 59 Réunion du Board de 1993 : Scottish FA proposition adoptée 60 Réunion du Board de 1996 : Si un joueur du camp défendant commet (il a été retiré : intentionnellement) une de ces dix fautes dans sa propre surface de réparation, il sera pénalisé par un coup de pied de réparation. 61 Réunion du Board de 1995. Proposition FA  Amendement de la Scottish FA adopté. Un joueur qui commet une des six fautes suivantes par négligence, par imprudence, ou avec une force disproportionnée : Donner ou essayer de donner un coup de pied à l'adversaire ; Faire un croche-pied (croc-en- jambe) à l'adversaire ; Sauter sur un adversaire ; Charger un adversaire ; Frapper ou tenter de frapper un adversaire, Pousser (Bousculer) un adversaire. ou qui commet l’une des 4 fautes suivantes : Tacler un adversaire et toucher celui-ci avant qu’un contact avec le ballon n’ait eu lieu ; Tenir un adversaire ; Cracher 217 imprudence, ou avec une force disproportionnée doit être sanctionné. Cette formulation permet à l’arbitre de sanctionner les fautes involontaires, et marque une nouvelle tendance. L’arbitre est encouragé à prendre des décisions en fonction des faits réels et non d’intention. Cette logique doit permettre de diminuer la part d’interprétation du règlement laissée à la charge du directeur du jeu. De la même manière le mot intentionnel est retiré de la règle concernant l’obstruction d’un joueur sur l’ gardien de but 62 . L’arbitre n’a plus à se demander si cette obstruction est volontaire ou non. Cette logique se diffuse à l’ensemble du règlement, comme l’illustre la modification de la loi XIV concernant le coup de pied de réparation en 1996 63 , avec la disparition de l’adjectif intentionnel. L’intentionnalité du joueur est donc questionnée, dans les années 1990. Ce propos est à nuancer pour les actions violentes ou le seul fait d’essayer de donner un coup de pied ou de frapper un adversaire s’accompagne d’un coup franc direct et d’un carton rouge. Les évolutions peuvent être interprétées comme une tentative de rationalisation du règlement, ou tout du moins de diminution de la part de subjectivité de son interprétation par les arbitres. Les règles du football sont réputées simples, mais leur interprétation est complexe. Le cas de la main en est une parfaite illustration. Il n’est pas permis de manipuler volontairement le ballon avec les mains ou les bras. L’arbitre doit décider si « à son avis » cette main est intentionnelle ou non, et selon « son opinion » il doit trancher sur le champ, siffler ou ne pas siffler. Aujourd’hui, le Board et la FIFA semblent vouloir réduire la part d’incertitude et donner, à l’arbitre, des éléments les plus concrets possibles pour prendre une telle décision…dont peut dépendre le sort du match. Le règlement actuel, précise qu’il y a main lorsqu’il y a un contact délibéré entre le ballon et la main ou le bras. Il est demandé à l’arbitre de prendre en considération les critères suivants : le mouvement de la main en direction du ballon (et non du ballon en direction de la main) ; la distance entre l’adversaire et le ballon (ballon inattendu) ; la position de la main, qui ne vaut pas nécessairement infraction ; le fait que le ballon soit touché avec un objet tenu dans la main (vêtements, protège-tibias, etc.), ce qui vaut infraction ; le fait que le ballon soit touché par un objet lancé (chaussure, protège tibias, etc.), ce qui vaut infraction. Cette énumération est fastidieuse et révèle la vraie complexité de l’interprétation des lois du jeu, par des hommes. Par contre, comme le souligne

contre un adversaire ; Manier volontairement le ballon, c'est-à-dire le porter, le frapper ou le lancer avec la main ou le bras  doit être sanctionné d’un coup franc direct accordé à l’équipe adverse. 62 Réunion du Board de 1995 : décisions 7 : Si un joueur (est retiré : fait intentionnellement obstruction) entrave la progression au gardien de but adverse pour l'empêcher de mettre le ballon en jeu. 63 Réunion du Board de 1996 : Board Scottish FA adoptée. Si un joueur du camp défendant commet (il a été retiré : intentionnellement) une de ces dix fautes dans sa propre surface de réparation, il sera pénalisé par un coup de pied de réparation. 218

Guy Roux 64 le règlement ne stipule pas, pour cette loi, la notion de « mains décollées du corps ». Le joueur utilise naturellement ses bras pour se rééquilibrer dans de nombreuses actions motrices, et ne doit pas être pénalisé pour cela. Pour Guy Roux « S’il n’y pas d’intention, la main est une partie neutre comme le reste du corps ou celui de l’arbitre ». La même démonstration peut être réalisée avec des arbitres qui doivent tenir compte de cinq critères 65 pour décider s’ils entendent sanctionner d’un carton rouge le fait d’avoir empêché de marquer un but ou d’avoir annihilé une occasion de but manifeste ! Une logique de traitement de l’information qui demande simultanément une faculté de repérer la position de nombreux joueurs, une expertise en balistique avec le calcul des vitesses et l’anticipation des trajectoires non rectilignes des joueurs….

6.3. Droit de charge 6.3.1. Droit de charge sur le joueur Pierre Parlebas a caractérisé une distance d’affrontement moteur 66 spécifique aux jeux d’équipes qu’il a nommée « distance de charge »67 . Pour les sports collectifs, et contrairement aux activités de combat, la violence de l'affrontement « décroît avec l'augmentation des distances de charge »68 . En fait, la possibilité de faire du corps à corps comme au rugby, provoque des contacts violents entre les joueurs, car plus la distance de charge est faible, plus grande est la violence du contact. L’agressivité licite sera envisagée sous l’angle du droit de charge. La charge peut être définie dans un premier temps comme le fait d’« attaquer » un adversaire et dans un second temps comme une tentative de déposséder le porteur du ballon. Cette procédure se caractérise par deux classes d’actions motrices distinctes au football : la charge debout et le tacle. Pour la charge debout, le règlement de 1863 69 commence à en fixer les limites : tout joueur est autorisé à en repousser un autre avec son corps, à condition qu'ils soient tous deux en action. A partir de 1888, la charge par derrière n’est plus autorisée à moins que l’adversaire

64 Roux, G. (Préface) in Charroin, P. (2008). Les premières règles du Football 1863. Les quatre chemins, p. 11. 65 La distance entre le lieu de la faute et le but ; la probabilité qu’a l’équipe de conserver ou de récupérer le ballon ; le sens du jeu ; le placement et le nombre des défenseurs ; le fait de priver l’adversaire d’une occasion de but manifeste peut être une faute sanctionnée par un coup franc direct ou indirect. 66 Parlebas, P. (1999), op. cit., p. 98. Distance d’affrontement moteur : distance codifiée qui sépare deux adversaires d'un jeu sportif au moment de leur affrontement direct 67 Ibid., p. 98 : Distance de charge : distance d'affrontement moteur qui sépare deux adversaires d'un jeu sportif quand l’un «charge » l'autre qui possède le ballon. 68 Ibid., p. 98. 69 Les tables de la loi du 26 octobre 1963, Loi 12. « Any player shall be allowed to charge another, provided they are both in active play ». Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 20. 219 soit face à sa propre ligne de but; et si, dans l'opinion des umpires 70 ou de l'arbitre, il fait dans cette position volontairement obstacle à son adversaire. Il est donc légal de pousser dans le dos un joueur qui se retourne, pour protéger le ballon, vers son but au moment d'être chargé. Cette règle sera confirmée en 1897, puis en 1907 (décision du 8 juin) et encore en 1962. La nouvelle formulation précise qu’un joueur qui fait écran de son corps à la balle, en tournant délibérément son dos à l’adversaire au moment d’être tacle (t ackled) , peut être chargé mais pas de manière dangereuse. Cette pratique ne semble plus tolérée à la fin du XX e siècle, mais la règle subsistera jusqu’en 1995 71 . A partir de cette date, le défenseur doit donc mieux contrôler ses appuis, et si l’attaquant se retourne, éviter de rentrer en contact avec lui. L’année 1939 marque un tournant concernant la limite du droit de charge puisqu’il faut désormais y associer le ballon. La charge est autorisée à condition que le ballon « soit à distance de jeu des joueurs concernés et qu'ils tentent incontestablement de le jouer »72 . Cette précision limite les possibilités de charge à la lutte pour la possession du ballon. Elle ne concerne pas seulement les défenseurs qui tentent de récupérer le ballon. En effet, le porteur de balle, qui conduit le ballon, peut pousser son adversaire direct, qui tente de l’en déposséder. Une charge loyale se réalise désormais avec le corps, sans l’aide des bras, et avec un ballon à distance de jeu. Il est nécessaire de préciser que le joueur n’a pas la possibilité de s’aider en utilisant ses membres supérieurs avant ou pendant la charge. Le fait de pousser un joueur apparaît pour la première fois en 1893, dans la loi 13 sur le penalty, celui de tenir un adversaire est mentionné à partir de 1896 Ces actions motrices sont sanctionnées depuis le XIX e siècle. Le Board précise en 1902 qu’un joueur ne peut utiliser ses mains pour tenir ou pousser un opposant à moins que le fait de pousser ne soit pas prémédité. Il est possible de constater une extension des possibilités de faire ce type de faute. D’abord avec les mains puis à partir de 1939 73 avec aussi les bras décollés du corps. Aujourd’hui « tenir un adversaire » consiste à l’empêcher d’avancer ou de se déplacer, que ce soit à l’aide des mains, des bras ou du corps, ou tout simplement en le retenant par le maillot. Le terme « pousser » a été remplacé par « bousculer » dans la loi XII depuis 1998. Cette modification peut être interprétée comme une extension du concept, car il est aussi possible de bousculer avec son corps.

70 Umpire s : les deux juges veillent à décider de tous les cas donnant lieu à discussion. 71 Réunion du Board de 1995. Décision 12.02. retirée. 72 AGM of 1939 : Maw XII – Fouls and misconduct : « This is not intented to penalise all charging ; it is permissible as long as, in the opinion of the Referee, it is fair and is made when the ball in within playing distance of the players concerned and they are definitely attempting to play it ». 73 Réunion du Board de 1939 : Tenir, Pousser un opposant avec ses mains, ou avec ses bras décollés de son corps. 220

Pour le tacle, les joueurs utilisent les membres inférieurs. Ils se jettent littéralement les pieds en avant en direction du ballon et mettent leur équilibre en jeu, pour finir automatiquement au sol. Cette charge est évoquée pour la première fois par le Board en 1994, pour des raisons de sécurité. A partir de 1995 il n’est plus possible de toucher le joueur avant le ballon pour un tacle. Le Board précisera également en 1997 74 , qu’un tacle glissé avec une ou deux jambes est permis si, dans l’opinion de l’arbitre, il n’est pas dangereux. Si cependant, le joueur faisant le tacle, au lieu de faire un contact avec la balle, fait un croche-pied à son adversaire, l’arbitre devra accorder un coup franc direct à l’équipe adverse et devra avertir le joueur fautif. En 1997, le tacle par derrière doit être considéré comme violent, et sanctionné en conséquence. En 1998 75 , ce tacle est définitivement interdit car il met en danger la sécurité d’un adversaire, et doit être considéré comme une faute grossière. Comme tous les tacles violents, avec la tentative ou non de jouer le ballon, il est sanctionné à la fois par un coup franc direct et une expulsion du joueur. Deux actions motrices pour la possession du ballon sont donc réglementées différemment. Dans le cas d’une charge debout, il est possible de donner un coup d’épaule à son adversaire avant de toucher le ballon, par contre dans le tacle, le défenseur doit obligatoirement toucher le ballon en premier. L’étude de la charge en football illustre les propos de Pierre Parlebas : « La codification artificielle des distances d'affrontement moteur traduit un phénomène clef indiscutable du sport moderne : l'édulcoration de la violence » 76.

6.3.2. Droit de charge sur le gardien Le droit de charge sur le gardien de but, spécifique par rapport au droit de charge sur les autres joueurs, se transforme également. Nous choisissons de l’étudier selon trois configurations de jeu distinctes. D’abord le cas du gardien qui ne joue pas le ballon. Il était possible dans les années 1870 et 1880 de « faire tomber le gardien quand le ballon est à proximité du but »77 . Ce geste apprécié dans le jeu britannique, sera interdit en 1892. Contrairement au football américain, il est impossible de charger un joueur qui ne joue pas le ballon. Cette règle permet de penser que ce joueur au statut particulier était davantage exposé au XIX e siècle. En fait un joueur qui viendrait pousser le gardien se retrouverait en position de hors-jeu. Cette règle du hors-jeu, au-delà de donner de la clarté au jeu, sert aussi à protéger le gardien de but des assauts des

74 Réunion du B oard de 1997. 75 Réunion du Board de 1998 : Décision 8. 76 Parlebas, P. (1999), op. cit., p. 99. 77 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 126. 221 avants adverses. Sans cette loi, un attaquant pourrait attendre à côté du gardien de but adverse, et au moment du tir d’un partenaire, le charger pour l’empêcher de jouer le ballon. Ensuite le cas du goal qui tient le ballon. En 1897, le Board décide qu’il peut être chargé quand il tient le ballon. Il était donc possible d’expédier honnêtement le gardien de but et le ballon dans le filet grâce à une charge correcte et loyale. Les Anglais ne sont pas les seuls à adopter cette tactique spéciale, en effet l’équipe de France 78 , marquera sept buts entre 1907 et 1913 de cette manière. Cette charge quand le gardien tient le ballon est à comparer avec les charges autorisées dans les autres sports collectifs, dont le facteur pertinent est pour Pierre Parlebas (1999) la facilité permise de maîtrise du ballon. Il met en évidence la loi : « Plus le joueur a la tâche facilitée par le règlement, plus son adversaire est autorisé à le charger de près »79 . La règle de la charge contre le gardien de but demeure en vigueur au XX e siècle, mais semble de moins en moins tolérée, comme le montre la proposition en 1962 de la Fédération Écossaise d’interdire tout contact avec le gardien dans sa surface de but. Cette modification de la loi n’est pas adoptée par le Board , néanmoins, la non application de la règle permet « d’affirmer, qu’en pratique, l’ère de la charge du gardien de but est révolue» 80 Enfin le cas du gardien en train de jouer le ballon pour le boxer ou le capter. Le règlement stipule qu’il est possible de le charger quand il sort de sa surface de but (1902), ou gène un adversaire (1905). L’interprétation de la règle est mouvante selon les époques et les régions du monde. En pratique toucher le gardien qui joue le ballon est impossible en Amérique du Sud, mais mieux toléré en Grande-Bretagne. Le règlement protège également le gardien de but au moment de relancer le ballon. L’adversaire est sanctionné depuis 1975 quand il l’empêche de dégager. Concentré sur sa relance ou son dégagement au pied, le gardien de but souvent dans un équilibre dynamique sur un pied est vulnérable et incapable de résister à une charge d’un adversaire. A partir de 1995 il n’est plus possible pour un adversaire d’entraver sa progression. Cette mesure est à relier avec l’obligation pour le gardien de but de tenir le ballon au maximum six secondes, et à la volonté d’augmenter le temps de jeu effectif. Le droit de charge contre le gardien est à la fois spécifique et culturel. Ces trois cas montrent qu’au fil du temps, d’une part la loi le protège globalement davantage, et d’autre part dans la pratique les arbitres font de la charge sur le gardien un droit de moins en moins permissif. L’étude de la charge sur le gardien de but met en évidence la thèse « d’une

78 Cazal, J-M., Cazal, P. & Oreggia, M. (1998), op. cit. pp. 20-35. 79 Parlebas, P. (1999), op. cit. 80 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 130. 222 pacification des comportements, un recul décisif des défis de sang et des engagements de force »81 .

6.3.3. « tripping » Dès 1963, le « tripping » est interdit. Il ne s’agit pas simplement d’interdire les croche- pieds. Une première définition est proposée par la Football Association : « Faire trébucher, croche-pied : c'est projeter un adversaire en utilisant les jambes sans les mains, et sans hacking ni charging »82 . Le « tripping » concerne donc les actions motrices des membres inférieurs destinées à faire tomber l’adversaire au sol. La définition le distingue des coups de pied dans les tibias et des mouvements du corps pour percuter l’adversaire. Le Board modifie pour la première fois la définition de « tripping » dès 1887 83 , en ajoutant « la tentative de jeter quelqu'un par terre », qui illustre le désir de sanctionner aussi la simple intention de faire faute. Au début du XX e siècle, Edouard Pontié 84 utilise pour définir cette action le fait de « faire des crocs-en-jambe », cette jolie expression est ensuite tombée en désuétude. La définition du « tripping » est modifiée en 1921 par le Board. Le croche-pied a pour objectif de faire tomber ou tenter de faire tomber un adversaire en se servant de sa jambe ou bien en se baissant devant ou derrière lui. Les actions de corps sont privilégiées, ce qui est confirmé par le Board en 1939 85 , qui inclut dans cette définition le fait de s’arrêter devant ou derrière un adversaire. Le « tripping » englobe des actions motrices, qui répondent simplement à la logique d’empêcher la progression de l’adversaire. Cette notion est précisée par le Board en 1997 : tout joueur qui empêche la progression de son adversaire par un contact physique, soit en utilisant sa main, son bras, sa jambe soit tout autre partie de son corps, doit être sanctionné par un coup franc direct accordé en faveur de l’équipe adverse. Le « tripping » regroupe donc aujourd’hui un très grand nombre de classes d’actions motrices.

6.4. Obstruction et jeu de corps. Le concept d’obstruction a évolué depuis la naissance du Board . A l’origine il se confondait avec le fait de faire barrage ou écran entre le ballon et son adversaire. L’obstruction n’était pas considérée comme une faute mais elle présentait l’inconvénient

81 Vigarello, G. (2002). Du jeu ancien au show sportif. La naissance d’un mythe. Paris, Seuil, p. 166. 82 Les tables de la loi du 26 octobre 1863 : « Tripping : Is throwing an Adversary by the use legs without the hands, and without hacking or charging ». 83 AGM of 1887 : « attempting to throw ». 84 Pontié, E. (1905), op. cit., pp 162-164. « Il est défendu à l'association de faire des crocs-en-jambe à un adversaire, de lui donner des coups de pied ou de sauter sur lui ». 85 Réunion du Board de 1939. 223 majeur pour son auteur, de pouvoir être chargé par derrière par un adversaire. En effet la charge par derrière est interdite à partir de 1905, sauf dans le cas où le porteur se retourne volontairement vers sa propre ligne de but. Cette conception est toujours valable dans la seconde moitié du XX e siècle. La décision 12.07, précise que lorsqu'un joueur couvre le ballon sans le toucher dans le but d'éviter qu'il puisse être joué par un adversaire, il y a obstruction mais non infraction à la Loi XII. Le joueur est déjà en possession du ballon et il le couvre pour des raisons tactiques, alors que le ballon demeure à distance de jeu. En fait, il joue effectivement le ballon et ne commet aucune infraction ; dans ce cas, le joueur peut être chargé (dans le respect des lois du jeu). Cette décision disparaîtra du règlement en 1997 86 . Selon le Board en 2009, l’utilisation de son corps, nommée par les éducateurs « le jeu de corps » est autorisée pour protéger le ballon. En effet, un joueur qui se place entre un adversaire et le ballon pour des raisons tactiques ne peut être considéré comme coupable d’une faute pour autant que le ballon reste à distance de jeu et qu’il ne tienne pas l’adversaire avec ses bras ou son corps. L’obstruction est tolérée pendant plus de 60 ans par le Board et sanctionnée en tant que telle à partir de 1951 87 , si cette faute est intentionnelle. Les conditions de l’obstruction sont fixées : elle concerne le joueur qui court entre l'adversaire et le ballon, ou interpose son corps de manière à faire obstacle à l'adversaire. Cette définition sera précisée au début des années 1960 88 . Un joueur doit aussi être sanctionné, s'il allonge intentionnellement les bras pour faire obstruction à un adversaire et fait des pas d'un côté et de l'autre, agitant les bras de haut en bas pour retarder son adversaire, le forçant à changer sa course, mais sans entrer en contact avec lui. Le champ d’application de la règle est donc étendue, avec la possibilité de faire obstacle avec les bras, ou simplement en changeant de trajectoire. A partir de 1969 89 , cette mesure s’applique aussi aux joueurs qui tentent d'empêcher le gardien de mettre le ballon en jeu conformément à la loi XII. En 199790 , le Board introduit la notion de corps pour insister sur l’interdiction d’utiliser celui-ci dans le but d’entraver la course d’un adversaire pour

86 La décision 12.07, devient la décision 12.05 en 1995, et est retirée dans le texte de 1997. 87 AGM of 1951 : Proposition FA et FIFA adopted. Law XII, (3) : « When not playing the ball, intentionally obstructing an opponent, i.e. running between the opponent and the ball, or interposing the body so as to form an obstacle to an opponent ». 88 Décision 12.08. « If a player intentionally stretches his arms to obstruct an opponent and steps from one side to the other, moving his arms up and down to delay his opponent, forcing him to change course, but does not make « bodily contact » the referee shall caution the player for ungentlemanly conduct and award an indirect free-kick ». 89 AGM of 1969. 90 AGM of 1997 : « Prohibited use the body »: 224 l’empêcher de courir vers une position, y compris quand le ballon est hors du jeu, au moment qui précède la remise en jeu sur corner par exemple. Aujourd’hui, le fait de « faire obstacle à la progression d’un adversaire » est sanctionné. Le Board précise qu’il est interdit de couper la trajectoire d’un adversaire pour le gêner, le bloquer, le ralentir, ou l’obliger à changer de direction. Les deux équipes évoluent sur le même terrain, et chaque joueur a le droit de se retrouver sur le chemin d’un adversaire, mais il n’est pas autorisé à faire volontairement « obstruction », pour entraver sa progression. Le règlement différencie clairement aujourd’hui la protection du ballon par le porteur (une action autorisée), et le fait de faire obstacle à la progression de l’adversaire. Cette distinction peut être illustrée par un joueur qui accompagne le ballon en sortie de but. Si le ballon se trouve à distance de jeu, le joueur protège son ballon et ne fait aucune faute, et il peut être chargé par un adversaire, ce qui signifie que cet adversaire peut revenir à sa hauteur ou le dépasser pour lui mettre par exemple un coup d’épaule ou le tacler. Si le joueur s’arrête ou simplement ralentit par rapport à la course du ballon et si celui-ci n’est plus à distance de jeu, alors il faut considérer qu’il utilise son corps pour faire obstacle à la progression de l’adversaire. Cette conduite sera interprétée par l’arbitre comme « obstruction » et sanctionnée par un coup franc indirect. Le fait de tenir un adversaire ou d'entraver sa course avec sa main, son bras ou son corps quand le ballon est hors du jeu dans le but de l’empêcher de courir vers une position est une faute, sanctionnée par un coup franc indirect et punissable d’un avertissement. Il est possible de se questionner sur le fait qu’une faute aussi grave soit seulement sanctionnée par ce type de coup franc. Cette question fut débattue lors de quatre réunions différentes du Board : 1974, 1975, 1976 et 1981. La proposition avait pour objet de faire passer l’obstruction dans les fautes volontaires sanctionnées par un coup franc direct, et non seulement par un coup franc indirect. Dans sa proposition, la Scottish FA avait pris la sage précaution de redéfinir cette notion d’obstruction à géométrie variable au cours du temps : faire obstruction à un adversaire en courant entre lui et le ballon, ou interposer son corps, qu’il y ait ou non contact physique, de manière à faire un obstacle avec un adversaire 91 . Dans un premier temps, l’obstruction n’était pas du tout sanctionnée mais donnait à l’adversaire le droit de charger dans le dos ! Dans un second temps l’obstruction est une faute en soi, sanctionnée par un coup franc indirect, au même titre que les fautes considérées comme involontaires. La proposition des Écossais laisse supposer que pour eux l’obstruction répond à une volonté délibérée de nuire au jeu et de

91 AGM of 1976. 225 stopper intentionnellement l’attaque adverse. Ils souhaitent que cette faute soit la 10 ème faute volontaire… même s’il n’y a pas de contact de physique. Ceci n’est pas antinomique avec cette loi, car elle condamne déjà le fait de tenter de faire un croche-pied à un adversaire. Mais le Board ne s’est pas laissé convaincre par cette proposition, qui semblait judicieuse.

6.5. Logique sécuritaire et jeu dangereux Le problème de la sécurité des joueurs est abordé dès 1892 92 . Le Board entérine le fait qu’aucun joueur ne devra utiliser ses mains pour tenir ou pousser son adversaire, ou jouer d'une manière susceptible de causer des blessures. Cette préoccupation se manifeste également en 1905 93 , avec l’interdiction des charges violentes ou dangereuses. Cette violence reste, à l’appréciation de l’arbitre. En fait, le Board avait fixé des limites à ne pas dépasser, mais les joueurs testèrent l’élasticité de la règle. La charge « épaule contre épaule » permise, était parfois devenue terriblement violente et tout à fait contraire à l'esprit du jeu. En fait le Board précise les limites de l’agressivité licite. Il les confirmera en 1999 : « la charge d'un adversaire est régulière tant que l'arbitre ne la qualifie pas de force inconsidérée, dangereuse ou excessive ». La décision de distinguer charge régulière ou déloyale est laissée à l’initiative de l’arbitre, et parfois des cultures locales. « Le jeu britannique se distingue par le caractère agressif du tacle dur associé au coup d’épaule viril. Mais la charge peut revêtir un caractère trop violent, même au goût des Britanniques. En conséquence, l'article neuf est amendé afin que soit bien clair que la charge autorisée ne doit être ni brutale, ni dangereuse (1905). Pour les Britanniques, la charge reste d'une importance primordiale dans un jeu qui a la réputation de combiner l'adresse de la force »94 . Le jeu reste parfois manifestement violent. Par exemple, pour Gabriel Hanot en 1924 95 « Les footballeurs français battent les professionnels de West Ham par 2 à 1, après un match laid, brutal, dangereux, en marge des règles du jeu ». La volonté du Board d’interdire les conduites violentes répond à une logique sécuritaire, notamment en sanctionnant techniquement et administrativement les joueurs. Le Board a par exemple progressivement réglementé le droit de charge au cours du XX e siècle, pour limiter au maximum les risques de blessures. Lors de la réunion de 1994 la FIFA, propose d’interdire le tacle par derrière. Lequel est injuste (déloyal). Les arbitres doivent recevoir des instructions pour prendre des mesures contre cette pratique qui constitue un grave

92 AGM of 1892 : Law 10 « … or play in many manner likely to cause injury ». 93 AGM of 1905. Law 9 : « Charging is permissible, but it must not be violent or dangerous ». 94 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 129. 95 Hanot, G. (1924). Miroir des sports, n°204 du 29 mai 1924. 226 danger pour les joueurs. Le Board continue aujourd’hui et condamne fermement, les fautes commises par témérité, quand le joueur agit en ne tenant aucunement compte du caractère dangereux ou des conséquences de son acte pour son adversaire. L’arbitre doit aussi sanctionner l’excès d’engagement du joueur qui fait un usage excessif de la force au risque de blesser son adversaire. En fait le joueur est encouragé à maîtriser ses actions motrices destinées à s’approprier le ballon et à agir avec précaution. Toutes les fautes sont alors visées et le caractère intentionnel ou non n’est plus retenu et ne peut plus dédouaner le jouer fautif. L’arbitre possède aussi le devoir de sanctionner les fautes commises par imprudence ou inadvertance, comme l’attitude d’un joueur qui charge un adversaire sans attention ni égard, ou qui agit sans précaution. Il est possible d’illustrer cette logique sécuritaire par deux catégories de fautes sanctionnées par le règlement : le jeu dangereux et la faute grossière. Le jeu dangereux, n'impliquant pas de contact physique 96 entre les joueurs, est sanctionné par un coup franc indirect. Par « jeu dangereux » on entend toute action d’un joueur qui, en essayant de jouer le ballon, risque de blesser quelqu’un (y compris lui-même). Le jeu dangereux se commet à proximité d’un adversaire et empêche celui-ci de jouer le ballon par crainte d’être blessé. L’action de lever le pied pour jouer le ballon en l’air, alors que son adversaire a dans le même temps la possibilité de jouer le ballon de la tête, en est la parfaite illustration. Le facteur pertinent est la présence ou non de l’adversaire à proximité Un ciseau ou un coup de pied retourné est autorisé si, l’arbitre estime qu'il ne représente pas de danger pour l’adversaire. La faute grossière concerne la mise en danger de l’adversaire. Cette notion est avancée dans la définition fournie par la FIFA en 1997 97 . La faute grossière est la violation intentionnelle des lois du jeu : il doit être pris en compte le fait de ne chercher que la blessure ou la mise en danger de l'adversaire. Un joueur qui s'en rend coupable (faute avec le pied ou faute avec la main) et n'a manifestement pas cherché à jouer le ballon doit être sanctionné par un coup franc direct et une exclusion. De la même manière les possibilités d’avertir ou d’exclure un joueur tout au long du XX e siècle, se sont additionnées et répondent souvent à une logique sécuritaire, pour éliminer du terrain les joueurs dangereux. Manifestement la modification de la règle ne fait pas

96 En cas de contact physique, l’action devient une faute qui peut être sanctionnée par un coup franc direct ou un coup de pied de réparation. En cas de contact physique, l’arbitre doit sérieusement envisager la probabilité qu’une incorrection a aussi été commise. 97 Cette définition de la faute grossière est donnée par la FIFA dans sa lettre du 20 novembre 1997, en réponse la question posée par la Commission Centrale des Arbitres. 227 disparaître le jeu dur. Il caractérise les années 1960, ainsi pour Alfred Wahl « En 1962 et 1966, l'excès de brutalité dépare le spectacle ». 98 L’apparition des cartons jaunes et rouges en 1968, semble être une conséquence du jeu dur de l’époque, comme le revendique son inventeur, l’arbitre Aston Ken 99 . Une révolution selon Pelé100 , à qui on demandait la différence entre le football d'hier et celui d'aujourd'hui : « les attaquants sont désormais beaucoup plus protégés, grâce en partie aux cartons jaunes et rouges. Maintenant, les joueurs se retiennent de tacler par derrière, alors qu'à mon époque ils ne se gênaient pas, ils vous tiraient par le short, vous rentraient dedans, tous les moyens étaient bons pour vous arrêter ». L’arbitre est aussi le garant de la sécurité des joueurs, et calmer les ardeurs des joueurs en les sanctionnant techniquement et administrativement concourt à préserver l’intégrité physique de chacun. Le problème sécuritaire est toujours d’actualité dans un jeu où le gain des affrontements individuels reste une clef de la réussite des matchs. Les duels au XXI e siècle se manifestent aussi par de nombreux chocs tête contre tête et des coups de coude, comme le souligne Guy Roux 101 . La résurgence des tacles de face avec une semelle au niveau du tibia de l’adversaire est aussi dévastatrice que le hacking du XIX e siècle.

6.6 Comportement antisportif et conduite inconvenante Le joueur se voit infliger, aujourd’hui un carton jaune dans sept cas de fautes. Cette classification ne semble pas reposer sur des critères scientifiques. Une faute peut se retrouver dans deux catégories différentes. Par exemple, contester les décisions de l’arbitre peut se ranger à la fois dans la classe « manifester sa désapprobation en paroles et en actes » et également dans la catégorie des « comportements antisportifs ». Les critères ne sont donc pas exclusifs. En poursuivant ce raisonnement il est possible de montrer que le comportement antisportif se manifeste dans toutes les autres classes : ne pas respecter la distance requise, retarder la reprise de jeu, enfreindre avec persistance les lois du jeu. La conduite inconvenante apparaît pour la première fois en 1889 102 . De très nombreuses infractions peuvent être qualifiées de la sorte et donnent à l’arbitre la possibilité de les sanctionner par un avertissement. Depuis 1997 103 , la sémantique a évolué et le

98 Wahl, A. (1990), op. cit., p. 97. 99 Aston Ken, arbitre anglais du match Italie-Chili lors de la coupe du monde 1966, qualifié de « Bataille de Santiago », inventeur des cartons jaunes et rouges en 1968. 100 Pelé (2005). FAIR-PLAY : l'interview de Pelé. FIFA.com. 29 mars 2005. Agence Reuters. 101 Roux, G. (Préface) in Charroin, P. (2008), op. cit., p. 9. 102 AGM of 1889. Law 12 : « ungetlemanly conduct ». 103 AGM of 1997. Law XII. « ungentlemanly conduct »  « unsporting behaviour »). 228

« comportement antisportif » remplace la « conduite inconvenante » en tant qu'infraction passible d'avertissement. Nous nous proposons d’étudier plus spécifiquement trois de ces comportements qui cristallisent aujourd’hui les préoccupations du Board : le gaspillage du temps, les simulations et la célébration du but. Le football ne se joue pas au temps de jeu effectif, le jeu est continu, sans temps mort possible et l’arbitre en général laisse tourner son chronomètre pendant toute la durée de la mi- temps. « Le temps perdu ne se rattrape pas », même aujourd’hui avec la systématisation du temps additionnel. Les joueurs peuvent gaspiller du temps, et les arbitres qui en sont les maîtres absolus, doivent l'éviter. En 1905, Ernest Weber commentant le règlement de la Football Association insiste sur ce point : « L’arbitre aide à la rapidité du jeu, en sifflant dès que le joueur qui doit donner le coup de pied franc est prêt »104 . En fait, le Board prendra progressivement des mesures visant tout simplement à diminuer les temps de la partie pendant lesquels le ballon est « hors du jeu ». Lors de sa réunion de 2002, la FIFA sensibilise le Board à ce problème. M. Blatter met spécifiquement en cause les joueurs qui retardent les reprises de jeu. Les lois sont très claires sur ce sujet et le Board insiste sur le fait que les arbitres doivent les appliquer. En effet, il existe une panoplie de tactiques destinées à retarder la reprise du jeu 105 , comme par exemple « botter le ballon au loin ou l’emporter avec soi après que l’arbitre ait stoppé le jeu ». Ce dernier ne doit pas hésiter à condamner un tel comportement et à infliger au joueur fautif un avertissement. La simulation consiste à tenter de faire paraître comme réelle une chose qui ne l’est pas. Par exemple, un joueur peut tenter d’obtenir une faute en se jetant au sol, en se faisant tout seul un croche-pied ou tout simplement feindre d’être blessé dans une logique de gain de temps. Comme l’écrit Ernest Weber, « …il faut toujours supposer l’adversaire de mauvaise foi. Le devoir d’un arbitre est d’ailleurs, non seulement de ne pas croire, mais de ne pas écouter les explications d’un joueur ; s’il doute d’une faute il ne doit pas l’accorder… »106 . Ce problème n’est donc pas récent, pourtant il est abordé par le Board pour la première fois en 1999. Ses représentants décident que toute simulation destinée, en quelque point du terrain

104 Weber, E. (1905), op. cit., p. 183. 105 Un avertissement sera infligé aux joueurs qui retardent la reprise du jeu en recourant à des tactiques telles que : exécuter un coup franc depuis un mauvais endroit dans le seul but de forcer l’arbitre à ordonner que le coup franc soit recommencé ; faire semblant de vouloir effectuer une rentrée de touche avant de passer soudainement le ballon à l’un de ses coéquipiers pour qu’il l’exécute ; retarder excessivement l’exécution d’une rentrée de touche ou d’un coup franc ; traîner pour quitter le terrain de jeu au moment d’être remplacé ; provoquer une confrontation en touchant délibérément le ballon après que l’arbitre a arrêté le jeu. 106 Weber, E. (1905), op. cit., p. 161. 229 que ce soit, à induire l'arbitre en erreur doit être sanctionnée comme un comportement antisportif 107 . La FIFA a de nouveau insisté sur ce point lors de la réunion de 2002, en illustrant par un film les exemples de simulations répertoriés lors de la Coupe du monde FIFA de 1998 en France. Les membres du Board ont unanimement encouragé le fait de mettre en avant une campagne de sensibilisation organisée par la FIFA contre les joueurs coupables de ces fautes. Les arbitres doivent être instruits pour prendre des mesures fortes contre les simulations. Elles n’apparaissent pas à la fin du XX e siècle mais la lutte contre ce fléau prend réellement son envol à ce moment là, avec une loi à appliquer, une sensibilisation et une formation des arbitres et surtout des preuves « vidéo » utilisables. En effet, suite à cette réunion de 2002, il y a eu un accord pour que les sanctions puissent être envisagées rétrospectivement, grâce au visionnage du match, par les autorités disciplinaires dans le cas de non pénalisation par l’arbitre. Cette décision est historique et peut être considérée comme une première étape à l’introduction de la vidéo… pendant les grandes compétitions et sur quelques terrains privilégiés. Cette mesure permet de sanctionner les joueurs dangereux, par exemple de détecter des coups de coude passés inaperçus et exécutés parfois loin du ballon en jeu. Ces preuves vidéo ont aussi été utilisées pour blanchir un joueur averti à tort, un vrai innocent sanctionné par l’arbitre sur le terrain, ou tout simplement à la place d’un autre ! Le dernier point abordé concerne la célébration d’un but. Le fait de réglementer la joie des joueurs, dans un sport où les points marqués sont rares peut sembler paradoxal. Pourtant cette réglementation répond à plusieurs logiques. Une logique de lutte contre le gaspillage de temps, clairement mentionné par le Board en 1997. Ainsi, après qu’un but ait été marqué, les joueurs sont autorisés à exprimer leur joie avec leurs co-équipiers. Toutefois, l’arbitre doit veiller à ce qu'elles n'entraînent pas une perte de temps excessive. Une logique sécuritaire également. Suite à des accidents de personnes le Board interdit en 1997 aux joueurs de se précipiter sur les panneaux publicitaires, ou de grimper sur les grilles entourant le terrain. Le fait pour un joueur d’enlever son maillot après avoir inscrit un but ne sera plus toléré à partir de 2004. Cette interdiction trouve une explication réglementaire avec la loi sur les équipements (Loi IV) qui exige à tout moment du match, une tenue correcte pour chaque joueur. L’interdiction de cette pratique peut aussi être analysée dans une logique de spectacle et de marketing. Lors de la réunion du Board de 2002, M. Erzik pour la FIFA critique la pratique commune des joueurs d’enlever leur maillot pour célébrer un but, afin de révéler des

107 Réunion du Board de1999 : Nouvelle décision 6 : Proposition FIFA adoptée. 230 slogans ou des publicités. En effet, les joueurs sont filmés et montrés un grand nombre de fois au ralenti dans ces moments forts. Il est tentant pour les joueurs de mettre en évidence un de leurs sponsors, de faire passer un message ou de soutenir une cause. Cette pratique devient interdite en 2002. Le joueur n’a plus le droit d’enlever son maillot ou de s’en couvrir la tête… même s’il marque le but de la finale de la Coupe du monde, comme Iniesta pour l’Espagne en 2010. Il n’a pas non plus l’autorisation de recouvrir sa tête ou son visage d’un masque ou autre article analogue, pour fêter cet événement. Aujourd’hui le règlement précise que les joueurs sont autorisés à exprimer leur joie lorsqu’un but est marqué, mais sans effusion excessive. Si, de l’avis de l’arbitre, le joueur fait des gestes provocateurs, moqueurs ou incendiaires, il doit être averti. Les manifestations de joie raisonnables sont autorisées. Le Board demande aux arbitres de faire la différence entre une authentique joie et une célébration du but avec pour objectif de faire perdre du temps. Un grand nombre de célébrations très préparées sont diffusées sur le Net en 2011, réalisées le plus souvent dans les matchs se déroulant dans des divisions inférieures. Le Board avait déjà précisé dès 2002, que les célébrations orchestrées ne devaient pas être encouragées si elles entraînaient une perte de temps excessive. Il est demandé aux arbitres d’adopter une attitude préventive et de faire preuve de bon sens. Par exemple quitter le terrain sans l’autorisation de l’arbitre fut parfois interprété comme une conduite inconvenante et sanctionné pour cela. Aujourd’hui, quitter le terrain de jeu pour célébrer un but n’est pas une faute passible d’avertissement en soi mais il est important que les joueurs reviennent sur le terrain de jeu le plus rapidement possible. Depuis les années 1990, le Board est sensibilisé par le problème du gaspillage du temps, qui peut être une des causes du faible nombre de buts marqués depuis le début des Coupes du monde en 1930. Lorsque le temps de jeu effectif augmente, le nombre des actions offensives est plus grand avec une possibilité de marquer davantage des buts. Le Board favorise les règles qui évitent de hacher le jeu. Les mesures concernant le gaspillage du temps, les simulations de blessures et la célébration du but poursuivent cette logique.

6.7. Temps de jeu 6.7.1. Volonté d’augmenter le temps de jeu effectif La réduction du temps de jeu effectif est directement imputable à la perte de temps lorsque le ballon n’est pas en jeu. Le règlement considère que le ballon est hors du jeu, d’une part si l’arbitre a stoppé le jeu, et d’autre part si le ballon est sorti des limites du terrain. Dans

231 ces deux cas, la reprise du match se fait par une remise en jeu. Excepté pour la balle à terre, elle est réalisée par un joueur, qui peut utiliser, à ce moment là, des stratégies pour retarder la reprise de jeu : jouer le ballon du mauvais, endroit sur le coup franc, laisser le ballon à un partenaire pour exécuter la touche, célébrer longuement un but… Il est possible de prendre l’exemple de la sortie de but, avec une reprise de jeu réalisée par un coup de pied de but. Le gardien, peut prendre beaucoup de temps pour remettre le ballon en jeu : attendre que le ballon revienne, aller le chercher sans se presser, « louper » le ballon lancé par le ramasseur de balle, replacer le ballon dans les 6 yards, feinter le dégagement, observer le jeu avant de dégager, demander à un partenaire de le faire à sa place. Le Board sensibilise les arbitres aux procédures d’accélération des reprises de jeu.

7.7.2. La lutte contre le gaspillage du temps de jeu utile La spécificité du poste, donne au gardien de but de multiples possibilités pour réduire le temps de jeu effectif ou le consommer. Les droits spécifiques accordés au gardien, notamment celui de pouvoir tenir le ballon dans les mains, lui donne le pouvoir de consommer du temps de jeu. Il peut se coucher sur le ballon même si cela n’est pas nécessaire 108 , prendre tout son temps pour se relever, vérifier si personne ne peut le gêner, et en fait, tenir le ballon beaucoup plus de 4 pas, ou des six secondes. Cette pratique est sanctionnée par le Board depuis 1967 109 . La loi XII précise que si le gardien de but se laisse aller à des manœuvres qui dans l'opinion de l'arbitre n'ont pour but que de retarder le jeu, et ainsi de perdre du temps et de donner un avantage déloyal à son équipe, un coup franc indirect doit être accordé à l'équipe adverse à l'endroit où la faute a été commise. Cette règle ne semble pas résoudre ce problème. Le Board clarifie en 1968 110 l’action de porter le ballon par le gardien. Il peut le conduire avant, pendant ou après les 4 pas. S’il conduit le ballon après les quatre pas autorisés, il ne peut le reprendre les mains avant qu’il ne soit retouché par un autre joueur. Mais cette préoccupation du gaspillage du temps est récurrente. Lors de la réunion du Board de 1979, la FIFA attire l’attention des Associations Nationales et des arbitres FIFA sur les abus, qui de l’opinion du Board se répandent, et notamment, pour le gardien de but d’enfreindre la « règle des 4 » pas et d’adopter des tactiques de perte de temps. Dans la même optique en 1984, le Board donne

108 Décision 2.12 : Si dans l'opinion de l'arbitre, un gardien de but se couche intentionnellement plus longtemps que nécessaire sur le ballon, il se rend coupable de conduite inconvenante et il y a donc lieu : a) de lui adresser un avertissement et d'accorder un coup franc indirect à l'équipe adverse ; b) en cas de récidive, de l'exclure du terrain. (L’arbitre. Édition 1977-1978. Mise à jour par la commissions des arbitres de la Ligue du nord de Football). 109 Réunion du Board de 1967 : Loi XII. 5 b). 110 Réunion du Board de 1968 : Décision prise en accord avec le Comité des arbitres de la FIFA. 232 son accord pour que la FIFA sorte une circulaire pour assurer que « la règle des 4 pas » soit rigoureusement appliquée. Cette règle peu respectée sera transformée avec la règle des six secondes en 2000, qui donne plus de liberté de déplacement, mais limite le gaspillage de temps. La sanction est tellement sévère qu’elle n’est que rarement appliquée. Le Board est conscient du problème. En 1991, suite à une proposition soumise par la FA, il demande au Comité des Arbitres d’inclure une recommandation dans une lettre circulaire de la FIFA concernant les instructions pour renforcer la loi sur les pertes de temps dues aux gardiens, autres joueurs et équipes responsables des retards dans la reprise de jeu. Les modifications de la loi interdisant au gardien de toucher avec les mains une passe du pied d’un coéquipier (1992), ou une touche exécutée par un partenaire (1997) répondent également à cette logique. Ces évolutions ont forcé le gardien et ses partenaires à relancer, jouer un ballon redevenu disponible pour tous et non gardé en sécurité dans les mains du gardien.

7. Décisions du Board liées à cette loi

Si la faute se produit lorsque le ballon est hors du jeu, le reprise de jeu se fait normalement dans le respect des Lois du jeu : un engagement, une touche, un corner, un coup de pied de but… Dans le cas où le ballon était en jeu au moment de l’interruption de la partie par l’arbitre, la loi XII propose deux types de reprise de jeu : le coup franc et la balle à terre. La première décision concerne la reprise de jeu consécutive à un avertissement. La décision 13 du 9 juin 1934 111 , stipule que si le jeu a été stoppé suite à une conduite inconvenante de la part d'un joueur, il doit être repris par un coup franc, en faveur de l'équipe adverse, que le joueur soit seulement averti ou expulsé du terrain. Cette règle est toujours d’actualité. La reprise de jeu se fait, en fonction de la nature de la faute, soit par un coup franc indirect soit par un coup franc direct qui se métamorphose en coup de pied de réparation si la faute a été commise dans la surface de réparation adverse sur un joueur adverse. Le règlement prévoit également de sanctionner depuis 1960 les fautes sur un de ses coéquipiers et de reprendre le jeu par un coup franc indirect. Toujours en 1934, quand un joueur revient sur le terrain de jeu ou rejoint son équipe après le début de la partie, sans en référer à l’arbitre, le règlement prévoit la reprise de jeu par

111 Réunion du Board de 1934 : Loi XIII (arbitre) : Décision 13 du 9 juin 1934. 233 une balle à terre 112 . Sur ce cas, la nature de la reprise de jeu sera discutée par le Board en 1959, 1960, 1962, 1963, et s’effectuera à partir de 1962 par un coup franc indirect 113 . Le lieu de cette reprise de jeu 114 , s’effectue à l’endroit où se trouvait le ballon quand le jeu a été arrêté et non plus à l’endroit où était le joueur quand il a été sanctionné. Dans le cas d’une faute ou d’une infraction, la reprise de jeu par une balle à terre a disparu. Cette dernière est réalisée aujourd’hui par l’arbitre, quand il est obligé d’interrompre le jeu à cause de la présence d’un agent extérieur sur le terrain ou dans le cas d’une collision entre deux joueurs par exemple. Le règlement détermine aussi l’endroit exact de la reprise de jeu pour un coup franc, en fonction de lieu de l’infraction. Le Board décide en 1967 que la faute ou la tentative de faute est commise à l’endroit où le joueur concerné initie l'action. Cette loi de 1967, s’applique aussi aux actes violents, au jet d’objet. Les lois du jeu 2009/2010 de la FIFA concernant le fait de tenir un adversaire sont en contradiction avec cette décision de 1967. En effet, le nouveau règlement stipule que « Si un défenseur commence à tenir un attaquant à l’extérieur de la surface de réparation mais poursuit son infraction à l’intérieur de la surface, l’arbitre accordera un coup de pied de réparation ». De la même manière les fautes liées à un jet d’objet (ou du ballon) se sanctionnent au point d’impact du projectile 115 . Si l’arbitre interrompt le match en raison d’une infraction commise en dehors des limites du terrain de jeu (lorsque le ballon est en jeu), le jeu reprendra par une balle à terre à l’endroit où se trouvait le ballon au moment de l’interruption du jeu.

8. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

La première proposition, déjà étudiée dans la partie 5.4. a pour objet de faire passer l’obstruction dans les fautes volontaires sanctionnées par un coup franc direct, et non seulement par un coup franc indirect. La seconde proposition est soumise par la FIFA au Board en 1989. La discussion s’engage sur l’utilisation de trois joueurs maximum pour former « le mur », sur les tirs de

112 La balle à terre. Loi VII : Le jeu devra reprendre par une balle à terre à l’endroit où se trouvait le ballon lorsque le jeu a été interrompu à moins que le jeu ait été arrêté à l’intérieur de la surface de but auquel cas l’arbitre laissera le ballon tomber sur la ligne de la surface de but qui est parallèle à la ligne de but, et ce au point le plus proche de l’endroit où se trouvait le ballon au moment où le jeu a été arrêté. 113 Réunion du Board de 1962 : Proposition FA adoptée. 114 Réunion du Board de 1962 : Proposition FIFA adoptée. 115 Loi du jeu 2009/2010 : Si le joueur situé à l’extérieur de sa propre surface de réparation jette un objet sur un adversaire qui se trouve à l’intérieur de la surface de réparation, l’arbitre signifie la reprise du jeu par un coup de pied de réparation. 234 coup franc. En effet une équipe qui obtient un coup franc en retire rarement un réel bénéfice… et l’équipe fautive n’est pas vraiment sanctionnée. C’est aussi l’avis de Pelé 116 en 2005, pour qui si une faute est commise aux abords de la surface et que le joueur fautif et ses coéquipiers ont le droit de revenir former un mur devant le ballon, cela ne constitue pas vraiment une sanction. En clair il propose de supprimer le droit de venir se mettre devant le ballon. Cette mesure est adoptée par la FFF chez les jeunes, où pour toutes les fautes commises dans le demi-terrain adverse, il peut être accordé un coup franc direct sans mur sur la ligne des 13 mètres. Une règle ingénieuse, dans l’optique d’un football offensif… mais qui n’est visiblement jamais appliquée et totalement inconnue. La discussion n’a pas donné suite à d’autres propositions, mais le Board a reconnu que la question de la mise à distance des défenseurs était un problème majeur ! Cela semble signifier qu’aucune modification n’est envisagée, car les lois du jeu permettent à l’arbitre de régler ce problème. La troisième proposition vise à lutter contre les contestations des joueurs, en les pénalisant d’une distance de 10 yards, comme au rugby. Elle émane de la Football Association et se retrouve à l’ordre du jour des réunions de 2000 et 2001. Quand un coup franc est accordé, souvent les joueurs de l’équipe sanctionnée, ne respectent pas la distance requise des 10 yards ; ils retardent la reprise du jeu pour transporter, lancer ou tirer le ballon au loin, manifestent leur désapprobation en paroles ou en actes et se rendent coupables par n’importe quelle forme de comportement antisportif. Cette proposition visait à sanctionner ce genre de comportement, sur les coups francs mais aussi lors de l'exécution d'un coup de pied de coin ou d'une rentrée de touche. Dans de telles circonstances, l’arbitre devait premièrement avertir le joueur incriminé, et ensuite avancer la position du coup franc de 10 yards vers le point médian de la ligne de but de l’équipe fautive. Cette proposition fut retirée, pourtant il semble que cette règle soit opérante avec les joueurs de rugby. L’une des difficultés de sa mise en place au football, concerne le cas où avec une avancée de 10 yards, le ballon se retrouve dans la surface de réparation adverse. Deux solutions différentes ont été envisagées, soit transformer le coup franc en coup de pied de réparation, soit tirer un coup franc sans mur en posant le ballon sur la ligne des 18 yards. Mais le Board ne s’est pas laissé convaincre.

116 Interview de Pelé : FAIR-PLAY : l'interview de Pelé (FIFA.com) 29 mars 2005, Agence Reuters. 235

9. Les expérimentations

La première expérimentation concerne l’expulsion temporaire. M. Kaser, représentant de la FIFA obtient l’accord du Board en 1976 pour tester dans les tournois de jeunes les suspensions temporaires, ainsi que les mini-corners et les touches joués avec le pied 117 . Ces expérimentations sont permises dans un but éducatif et se réalisent notamment au tournoi Européen Juniors de Monaco entre 1976 et 1978. Cette idée est relancée en 1988, avec une expulsion temporaire symbolisée par le « carton bleu ». La Fédération Autrichienne demande l’autorisation de conduire une expérimentation sur une période de trois ans, avec des équipes adultes amateurs au-delà de la 6 ème division, sous la responsabilité d’une association régionale. Cette demande et les propositions futures seront systématiquement refusées par le Board , mais des expérimentations sauvages sont pratiquées. La décision est définitive et le Board demande en 1989 à la FIFA de veiller à ce que les expérimentations sur les expulsions temporaires cessent immédiatement, dans les Associations concernées. Treize ans plus tard, le problème reste entier, mais le rappel du Board est sans ambiguïté. Il intime en 2002 à la FIFA d’écrire à ces associations dans des termes fermes pour que les procédures d’expulsions temporaires cessent. La FIFA doit prendre des sanctions disciplinaires contre les fédérations récalcitrantes. Le Board en 2003 118 réaffirme une nouvelle fois sa décision prise dans les derniers meetings : les expulsions temporaires de joueurs ne sont pas autorisées quel que soit le niveau de compétition. La seconde expérimentation concerne l’interdiction pour un gardien de but de manipuler avec ses mains un ballon reçu sur une passe en arrière d’un partenaire. Cette question est abordée pour la première fois en 1991 à l’initiative de la FIFA. Pour cette institution, si cette règle est enfreinte, l’arbitre doit accorder un coup franc indirect à l’endroit où le gardien de but a touché le ballon avec ses mains. L’expérimentation de cette règle lors du Championnat du Monde des U-17 de 1991 en Italie au mois d'août, fut un véritable succès. L’idée de sanctionner à l’endroit du départ de la passe a été dans un premier temps évoquée, mais la loi adoptée est plus dissuasive avec un coup franc indirect accordé à l’intérieur même de la surface de réparation. Un amendement a été déposé pour ne pas limiter l’application de la règle aux passes en arrière ou aux passes venant de l’extérieur de la surface de réparation. La loi fut adoptée en 1992 et concerne toutes les passes bottées. Un joueur peut donc passer le ballon à son gardien de la tête, de la poitrine, du genou, etc. Néanmoins il n’est pas question

117 Kick-ins : touche au pied. 118 AGM of 2003. Items for discussion. « The board re-affirmed the decision taken at its last meeting that temporary expulsion of players is not permitted at any level of football ». 236 dans l’esprit du Board de contourner cette règle. L’année suivante en 1993 119 il est décidé que si l’arbitre estime que le joueur a délibérément recours à cette ruse, il sera averti et un coup franc indirect sera accordé à l’équipe adverse à l’endroit où le joueur a commis la faute. Cette décision vise par exemple à lutter contre le fait de monter soi-même le ballon pour faire une passe de la tête à son gardien. En de telles circonstances, le Board précise qu’il n’est pas important que le gardien touche ou non le ballon des mains, car la faute est commise par le joueur qui tente de contourner le texte et l’esprit de la loi XII.

10. Analyse systémique

La dimension du terrain (Loi I) est une des variables qui modifie « l’espace d’interaction »120 théorique, et influence la possibilité de se retrouver au contact direct avec un adversaire, de provoquer un duel et donc aussi de faire une faute (Loi XII). Le fait de pouvoir pratiquer sur des terrains de tailles différentes, de 90 à 120 mètres de long par exemple, a une incidence probable sur la loi XII, et le nombre de fautes subies. Cet espace d’interaction se calcule en fonction d’une distribution théorique des joueurs. Mais dans la réalité du jeu, les densités influencées par le hors jeu (Loi XI), sont beaucoup plus importantes autour du ballon et dans certaines zones du terrain, lors des phases de coups de pied arrêtés. Cette relation entre la loi XII et la loi I peut également être illustrée par le fait que les mêmes fautes commises à des endroits différents du terrain sont traitées spécifiquement. Par exemple pour les coups francs accordés dans la surface de but adverse, le ballon est reculé sur la ligne des 6 yards (5m50). Au contraire si le coup franc est au bénéfice de la défense, il peut se jouer de n’importe quel point de cette surface 121 . De la même manière, les fautes commises dans la surface de réparation adverse, sanctionnées habituellement par un coup franc direct le sont par un coup de pied de réparation (loi XIV), exécuté du point de penalty. Les transformations de la loi XII, influencent directement la loi sur le coup de pied de réparation (Loi XIV), et notamment pour toute nouvelle faute sanctionnée par un coup franc direct. L’étude montre une accentuation des

119 AGM of 1993 : Law XII ; proposal of FIFA to add a new decision 18, adopted : « IF, however, in the opinion of the referee, a player uses a deliberate trick in order to circumvent the amendement to Law XII, the player will be guilty of ungentlemanly concuct… ». 120 Parlebas, P. (1999), op. cit. 121 Entre 1978 et 1993 le coup franc accordé dans la surface de but pouvait se jouer d'un point quelconque de la moitié de la surface de but dans laquelle la faute a été commise. 237 sanctions techniques et l'invention du penalty en 1891 a permis de pénaliser les brutalités en donnant une réelle chance aux attaquants de marquer. Pour une faute commise sur un adversaire l’arbitre (Loi V) accorde soit un coup franc direct, soit un coup franc indirect. Pour ce dernier, l’arbitre doit conserver son bras levé jusqu’à ce que le ballon soit touché par un second joueur car il n’est pas possible ne marquer un but directement. Le facteur humain provoque une application non uniforme, et il n’est pas d’interprétation qui ne diffère d’un directeur de jeu à l’autre, d’un pays à l’autre. Par exemple des arbitres tolèrent en 2011 que le gardien tienne le ballon trop longtemps ou que les joueurs ne se mettent pas spontanément à distance lorsqu’un coup franc est sifflé contre leur équipe. Les membres du Board sont conscients de cette réalité. Ils précisent lors de la réunion de 1996, que les arbitres travaillent sous une pression qui ne devrait pas être tolérée. A cause d’elle, les arbitres n’appliquent pas toujours suffisamment strictement la loi, leurs prises de décisions oscillent entre une stricte application du règlement et un arbitrage dans l'esprit du jeu. En repoussant les marges d’interprétations ou leur tolérance aux règlements, ils anticipent les évolutions futures. Par exemple ils sifflaient avant 2005, le joueur qui se positionne ou saute devant celui qui fait la touche. La loi XII est aussi en relation avec les remises en jeu effectuées par les partenaires du gardien de but. En effet, sur ces dernières il peut commettre des infractions. Par exemple depuis 1936 122 , il n'est plus permis au gardien de but de recevoir le ballon dans les mains sur un coup de pied de but (Loi XVI depuis 1938) joué par un de ses partenaire, afin qu'il puisse par la suite le relancer dans le jeu. Le ballon doit être envoyé directement au-delà de la surface de réparation. La même règle sera appliquée en 1937 123 , pour un coup franc joué par un coéquipier à l'intérieur de sa propre surface de réparation. Les réformes empêcheront le gardien d’utiliser ses mains sur une passe bottée par un partenaire (1992, Board), donc aussi sur tous les types de coup franc (loi XIII). Cette interdiction s’applique également, depuis 1997, sur les rentrées de touches effectuées par un partenaire (Loi XV). Le comportement antisportif stipulé dans la loi XII se réfère également à la loi IV concernant les équipements. Un joueur qui enlève son maillot, même pour célébrer un but est automatiquement averti, pour une conduite inconvenante, et une tenue incorrecte. Le fait de continuer son action après la perte d’une chaussure, n’est pas non plus toléré. Le joueur est invité, s’il ne l’a pas fait immédiatement à aller remettre son équipement en ordre sur le bord du terrain.

122 Réunion du Board de 1936 : Loi 7, décision a). 123 Réunion du Board de 1937 : Proposition de la FA adoptée. 238

La loi XII est également en interaction avec la loi V. En effet l’arbitre dirige le jeu, interprète les règles, siffle les infractions, indique la nature de la remise en jeu et à quelle équipe elle bénéficie. Pour les fautes, il accorde des coups francs et possède le pouvoir de sanctionner administrativement les joueurs. Il contrôle aussi bien les allées et venues des joueurs sur le terrain au cours du match, que le jeu dangereux ou les actes de brutalité. L’arbitre a le pouvoir d’exclure les joueurs du terrain. Sans possibilité de remplacement, cette sanction ampute l'équipe qui se retrouve en infériorité numérique pour finir le match. Cette sanction individuelle pénalise donc toute une équipe. Ce pouvoir peut influencer également la durée du match (Loi VII) dans le cas où l’arbitre exclut quatre joueurs de la même équipe, le match est définitivement arrêté, faute de combattants (Loi III : nombre de joueurs). Ce cas est exceptionnel, l’arbitre est encouragé à tout mettre en œuvre pour que le match se poursuive jusqu’à son terme. Le Board a rappelé en 1988, aux arbitres qu’une faute grossière mène souvent à une altercation générale, et qu’ils doivent donc s’employer activement à l’empêcher. L’arbitre a donc le devoir de tempérer les joueurs et de les inciter à jouer dans le respect des règles, notamment de la loi XII. Ces sanctions administratives doivent automatiquement être notées sur la feuille de match par l’arbitre. Le Board s’est autorisé à le rappeler aux arbitres en 1975, car la FIFA avait constaté un différentiel entre le nombre de cartons distribués et ceux enregistrés.

11. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Dans le cadre du règlement d’un sport particulier il est possible de distinguer une agressivité licite et illicite. L’agressivité licite est codifiée par les règles qui définissent la logique interne de l’activité. Une action motrice autorisée, le placage par exemple, dans le cadre du rugby, peut devenir illicite au regard du règlement d’un autre sport collectif. Les premières règles du basket sont publiées en décembre 1891 dans The Triangle, le journal du Springfield College , et affichées dans le gymnase le 21 décembre. Parmi les 13 règles originelles, la cinquième concerne les fautes : « il est défendu de pousser l'adversaire de l'épaule, de le retenir, de le bousculer ou de le soulever d'aucune façon. La première infraction sera considérée comme une faute, la seconde entraînera l'exclusion jusqu'au but suivant, voire l'exclusion du match si la volonté de blesser était évidente. On n'autorisera pas de remplaçant ». Cette règle met tout de suite en évidence un droit de charge défini par des actions motrices interdites et un lien évident entre les fautes et les sanctions administratives.

239

Au basket quand un joueur est en possession du ballon, la règle du « no contact » est adoptée. A l’opposé le rugby permet le corps à corps, de plaquer le porteur de balle, et de percuter les adversaires regroupés en mêlée organisée ou spontanée. Issu du même « sport souche », le droit de charge est plus limité au football qu’au rugby. Ceci peut s’expliquer par la facilité de manipuler le ballon et de se déplacer avec. Par, contre il est possible de comparer la charge autorisée sur un joueur de rugby, à celle sur le gardien de but, le seul à pouvoir tenir le ballon au football. Les actions d’adresse ont été valorisées, et une logique sécuritaire s’est imposée faisant progressivement disparaître la charge sur le gardien. La notion de coup franc n’existe pas au volley-ball : les infractions du type « toucher » le filet, donnent directement le point à l’équipe adverse. Au handball toutes les fautes donnent droit à un jet franc, où il est possible de marquer directement. En revanche, au rugby et au basket, la distinction entre coup franc direct et indirect est transférable. La pénalité au rugby et le lancer franc au basket apportent la possibilité de marquer directement. Comme au football, certaines fautes ou infractions, permettent de bénéficier du ballon, de le remettre en jeu mais pas de marquer directement. Par exemple le marcher et la reprise de dribble au basket sont repris par une remise en jeu de la touche, et l’en-avant au rugby par une mêlée. Au rugby comme au football, il n’est pas obligatoire de jouer directement la pénalité ou le coup franc direct, et toujours possible de faire une passe à un partenaire. Au rugby le joueur peut choisir de botter le ballon en touche pour se rapprocher de la zone d’en-but adverse… et bénéficier ensuite de la remise en jeu. La faute adverse est donc doublement sanctionnée. La place du coup franc accordé est liée à la nature et au lieu de la faute. Au football, au handball comme au rugby, les similitudes sont manifestes, le ballon est positionné à l’endroit de la faute. Au basket, le jeu est repris sur le coté du terrain à hauteur de la faute. Si la faute a lieu près de la cible ou dans la cible, le ballon est reculé sur la ligne des 6 yards pour les coups francs indirects au football, aux 9 mètres au handball, ou à 5 mètres de la ligne d’en-but pour former la mêlée au rugby. Au football, le coup franc se métamorphose en coup de pied de réparation pour une faute commise dans une zone particulière, la surface de réparation. La même logique est appliquée pour des joueurs qui ont une chance manifeste de marquer au handball avec le penalty (jet franc au 7 mètres) et au basket avec le lancer franc. Au basket un lancer franc est aussi systématiquement accordé, au bout d’un certain nombre de fautes collectives, quel que soit le lieu de la faute. Le fait de comptabiliser les fautes est spécifique au règlement du basket. Si le nombre de fautes collectives conditionne l’obtention d’une sanction technique, il

240 existe aussi un quota de fautes personnelles : au bout de cinq, le joueur ne peut plus participer à la suite de la partie. Les différents règlements offrent un arsenal de sanctions administratives, qui s’échelonne du simple avertissement verbal, à l’expulsion ou la disqualification du joueur. Le premier carton jaune assimilé à un avertissement, n’a pas de conséquence directe réelle au football. En revanche, il est accompagné d’une exclusion temporaire de 2 minutes au handball et de 10 minutes au rugby. Cette sanction individuelle pénalise toute l’équipe qui joue en infériorité numérique. Pour le second carton jaune, la sanction est identique au handball (2 minutes). Au rugby et au football, le joueur est exclu définitivement du terrain sans possibilité de remplacement. Le troisième carton au handball provoque l’exclusion définitive du joueur. L’arbitre a bien sûr la possibilité d’exclure directement un joueur, notamment pour les actes de brutalité, ou les conduites violentes. Ces différentes sanctions illustrent la baisse de la tolérance à la violence commune aux différents sports collectifs. Christian Pociello remarque par exemple, qu’« Au début du XX e siècle, on autorisait les coups de pied dans les tibias au rugby ; aujourd’hui on s’en offusquerait »124 . La mesure précise du temps de jeu effectif est spécifique au basket, la table de marque stoppe le chronomètre à chaque fois que le ballon n’est plus en jeu. Au handball, au rugby, au football la partie se joue au temps réel, avec une volonté manifeste commune d’augmenter le temps de jeu effectif, notamment avec l’accélération des procédures des remises en jeu. Le gaspillage du temps pendant le jeu, est sanctionné au handball par le jeu passif, et au basket par l’obligation de shooter avant 30 secondes. Dans les deux cas le ballon est redonné à l’équipe adverse. La spécificité du volley-ball ne donne pas la possibilité au joueur de consommer du temps. Au rugby, le ballon peut être « confisqué » pendant la mêlée, le jeu semble parfois s’arrêter quand les poussées se neutralisent. Au football, la règle des « 6 secondes » pour le gardien de but, qui prive les autres de jouer un ballon libre a limité ce gaspillage, mais le règlement ne sanctionne pas le fait de refuser d’attaquer la cible adverse.

Synthèse Le tableau des statistiques concernant les changements ou les propositions de modification de loi XII montre que cette loi est à la fois la plus complexe et la plus abordée lors des réunions du Board depuis le XIX e siècle. Cette recherche a mis en évidence

124 Pociello, C. (1999), Sports et Sciences sociales. Histoire, sociologie et perspective. Paris, Vigot, p. 156. 241 différentes explications de ces évolutions : une logique sécuritaire avec la volonté de protéger les joueurs, une logique spectaculaire visant à augmenter le temps de jeu effectif et le nombre de buts marqués… Il est aussi possible d’évoquer une logique de professionnalisation du jeu. Une culture de la « gagne », qui intègre « l'enjeu dans le jeu » et qui par conséquent ajoute encore à la difficulté de contenir la règle dans son esprit. En 1905, l'arbitre anglais John Lewis notait que « quand les lois furent écrites, bien entendu les joueurs rémunérés n'étaient pas nés, et bien qu'il y ait eu alors beaucoup de charges forcées, il y avait peu ou aucune de ces fautes habiles et vicieuses qui se sont développées dans les années 1890 »125 . L’observation du jeu permet progressivement de répertorier des types de conduite qui se répètent, et qui peuvent être classées en actions qui nuisent ou non à la logique interne du jeu. Ces fautes sont ensuite classées et en fonction de leur importance, une sanction technique leur est attribuée. Le règlement autorise une certaine forme de violence. Pour Georges Magnane 126 , nous devons admettre le fait que de nombreux sports intègrent des formes de violence légitimes et socialement sanctionnées, sans que l'on puisse vraiment dire, avec approbation ou répulsion, qu'ils sont violents. Pour Norbert Elias, « Si l'on compare les jeux de balles de la fin du Moyen Âge ou même au début de l'époque moderne avec le soccer et le rugby - les deux branches du football anglais qui ont vu le jour au XIX e siècle -, on constate un accroissement de la sensibilité à l'égard de la violence... »127 . L’étude de la violence au filtre de la transformation des lois du jeu depuis 1863, valide une diminution de sa tolérance sur le terrain. L’accroissement des fautes grossières sanctionnées, l’augmentation des possibilités d’exclusion des joueurs, la limitation du droit de charge sont des illustrations d'une euphémisation de la violence au sens de Norbert Elias. Il note qu’il est possible selon les pays d’observer « des différences considérables dans la capacité à tolérer les tensions - et c'est là un aspect du caractère national »128 . Ce particularisme national, simplement dû à l’interprétation, ou l’usage que l’on peut faire de la règle s’exprime par exemple dans la tolérance à la charge plus ou moins brutale. « Pour les Britanniques, la charge reste d'une importance primordiale dans un jeu qui a la réputation de combiner l'adresse de la force »129 . La violence du jeu, celle des tactiques et des affrontements directs sur le terrain, est loin d'être plus intense ou plus furieuse qu'autrefois. Ce serait même tout le contraire. Au-delà des fautes et incorrections, une étude

125 Cité par Annese, F. & Lesay, J-D. (2007), op. cit., p. 19. 126 Magnane, G. (1964). Sociologie du sport, Paris, Gallimard, p. 35. 127 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 28. 128 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 36. 129 Eisenberg, C. & Co. (2004), op. cit., p. 12. 242 systémique de l’ensemble des lois du football et une analyse des interactions entre les acteurs confirment que le football « promeut un endiguement de la violence ludique »130 . Une première rupture se manifeste par la présence d’un arbitre qui possède le pouvoir de décider sans être contesté. A l’origine, le jeu est joué par des gentlemen qui s’auto contrôlent avec deux « umpires »131 qui veillent à décider de tous les cas donnant lieu à discussion. Pour N. Elias, le concept clé qui permet de rendre compte de l'apparition du sport, pensé dans sa discontinuité par rapport aux affrontements anciens, est celui de « libération contrôlée des émotions »132 . Un relâchement temporaire, localisé, du contrôle des pulsions et des affects n'est possible que s'il existe une intériorisation suffisamment forte et répandue des mécanismes de l'auto contrainte. Ce phénomène conditionne le développement même du « processus de civilisation »133 . Pour Norbert Elias, cet auto contrôle est indispensable, sans lui, « les gens en tant qu’individus ne deviendraient pas humains et les sociétés se désintégreraient rapidement» 134 . Mais cet auto contrôle semble trouver ses limites, en fonction de l’appartenance sociale. En effet pour Georges Saint-Clair « Joué par des ouvriers d’usine et des mineurs, le jeu devient fatalement brutal et dangereux 135 ». Cette montée dans le sport de la violence par des individus « issus des couches les plus basses de la classe ouvrière est également suggérée par Norbert Elias 136 . A partir de ce moment là, en caricaturant, le jeu n’est plus pratiqué par des gentlemen capables de s’auto arbitrer. Le recul du rôle des umpires , est l’illustration du dernier vestige de la participation des équipes à la régulation du match. A partir de 1891 l’arbitre rentre sur le terrain, au milieu des joueurs et se fait assister par deux juges de touche pour contrôler la violence et le bon déroulement du jeu, avec la possibilité de sanctionner les joueurs qui dérogent à la règle. La seconde rupture concerne non pas le fait, de sanctionner, mais plutôt l’invention des cartons. L’étude détaillée des archives du Board , ne confirme pas cette rupture, mais dans la pratique le fait de rendre les cartons visibles et surtout d’obliger les arbitres à les noter sur la feuille de match, a modifié le comportement des joueurs. Le jeu n’a jamais été aussi dur que dans les années 1960, notamment lors des Coupes du monde de 1962 au Chili et 1966 en Angleterre. Cette période est également marquée par l’avènement d’un système de jeu ultra

130 Vigarello, G. (2002). Du jeu ancien au show sportif. La naissance d'un mythe. Éditions de Seuil, p. 165. 131 Umpires : ils se tiennent d’abord en dehors du terrain puis à partir de 1871 à l’intérieur du terrain. 132 « controlled decontrolling of emotion s » traduit par « libération contrôlée des émotions » Chartier, R. (1994). Avant-propos. In Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit. 133 Processus de civilisation : Ce concept est introduit par Norbert Elias en 1939 in Über den Prozess der Zivilisation. La civilisation des mœurs en 1973, est la traduction d’une partie de ce livre. 134 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 58. 135 Saint-Clair, G. (Préface) in Tunmer N.G. et Fraysse, E (1897), op. cit., p. XI. 136 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 74. 243 défensif, le « catenaccio » qui sublime la capacité des joueurs à truquer le match et à faire des fautes. L’apparition des cartons coïncide avec le retour d’un football moins agressif, mais plus offensif. Cette thèse est confirmée par le « Roi Pelé »137 , qui a subi des agressions en 1962 et 1966. Pour lui les attaquants sont désormais beaucoup mieux protégés par les arbitres, grâce en partie aux cartons jaunes et rouges. Son témoignage confirme la valeur des sanctions administratives pour conserver l’esprit du jeu, qui relève davantage d’une construction culturelle que d’un état naturel, ou d’une contrainte automatique acquise par l’activité humaine. Les chiffres revenant le plus souvent pour l’attribution des cartons, sont de l’ordre de quatre cartons jaunes par match, et d’un carton rouge tous les cinq matchs. Des matchs sont restés tristement célèbres avec plus de 15 cartons distribués. Le record de cartons distribués pour un seul match en Coupe du monde est de 18 cartons en 2002 138 . Pour les cartons rouges, en un seul match de Coupe du monde, le record est de quatre 139 . L’étude historique du règlement montre une transformation des pouvoirs du gardien de but et de son rôle. Ces évolutions se manifestent dans sa motricité spécifique et dans son jeu. Une première rupture s’opère avec la possibilité de faire quatre pas (en 1939) et le fait que la charge sur le gardien soit de moins en moins tolérée. Après la seconde guerre mondiale, la technique du gardien se modifie progressivement. Essentiellement de défense, elle se diversifie et se complexifie à partir du moment où le gardien est perçu comme le premier attaquant. « Non plus seulement homme de défense, mais homme de « relance », pour Georges VIgarello. Une seconde rupture, est perceptible depuis les années 1990 : l’interdiction à partir de 1992 de reprendre le ballon avec les mains sur une passe d’un partenaire, lui impose immédiatement de jouer de plus en plus au pied. Quand son équipe est en possession du ballon, le statut de gardien de but s’efface au profit de celui du joueur de champ comme les autres. Le goal redevient comme à l’origine un véritable joueur de « balle au pied » touché par la prohibition collective. La première rupture conforte le gardien dans une motricité spécifique, la seconde l’oblige à adopter en plus la motricité du joueur de champ, tout du moins d’un joueur de soutien capable de relancer et de changer le jeu de côté et de dégager des deux pieds. Sa motricité a fluctué selon les modifications du règlement.

137 Pelé (2005) FAIR-PLAY : l'interview de Pelé. FIFA.com 29 mars 2005, Agence Reuters. 138 11 juin 2002 Allemagne-Cameroun : 18 cartons : 8 jaunes de chaque côté et 2 cartons rouges par l’arbitre espagnol Lopez Niéto. 139 En juin 2006 lors de Portugal-Pays Bas, l’arbitre met 16 fois la main à la poche (1 fois toutes les 5’30’’!) et sort 4 cartons rouges. 244

Les perspectives sont à rechercher à travers les propositions et les expérimentations évoquées, mais peuvent également s’inspirer de règles opérantes dans d’autres sports collectifs. Les joueurs contestent beaucoup les décisions de l’arbitre dans les championnats nationaux : une façon de mettre la pression sur l’arbitre, qui peut les sanctionner. En 2011, une nouveauté, ce phénomène est observable dans les compétitions UEFA, notamment en demi-finale de la coupe de la Champions’ League entre le FC Barcelone et le Réal de Madrid. La généralisation de ces comportements antisportifs semble progressivement faire réagir le Board ; le fait d’applaudir l’arbitre ou de demander un carton pour le joueur adverse est aujourd’hui sanctionné. Le Board, par l’intermédiaire des consignes transmises par la FIFA aux arbitres, va sans doute une nouvelle fois mettre l’accent sur ce point et rappeler aux arbitres la nécessité de faire appliquer les lois du jeu. Mais le Board peut également considérer qu’il est utile de condamner plus sévèrement les comportements qui diminuent le temps de jeu effectif, en adoptant par exemple la « règle des 10 mètres » du rugby, ou une règle équivalente… qui sanctionne techniquement l’équipe du joueur fautif. Un coup franc pourrait se transformer en autre chose : un coup franc plus rapproché, un coup franc sur les 18 yards sans mur, pour les fautes dans le camp adverse ou après un certain nombre de fautes collectives comme au basket. L’idée du rugby est aussi séduisante, l’équipe qui bénéficie d’un coup franc peut choisir de botter en touche et de bénéficier ensuite de la remise en jeu. Ce qui reviendrait au football à chercher à sortir le ballon derrière la ligne de but et bénéficier du corner ! Dans la logique de lutter contre le temps gaspillé, des mesures ont été prises contre le gardien et ses partenaires, mais dans une logique de spectacle les législateurs peuvent décider de lutter contre le jeu passif, comme au basket ou au handball. Le faible nombre d’actions offensives de certains matchs peut les rendre très insipides. Pour Norbert Elias, « Comme d'autres activités de loisirs, le football se trouve en position instable entre deux dangers fatals, l'ennui et la violence. Un bon match de football a quelque chose en commun avec une bonne pièce de théâtre140 ». Il n’est pas certain que cette perspective soit un jour retenue, car il est moins facile de « confisquer » un ballon qui reste libre pour tous dans le « jeu au pied ». La règle des « six secondes », comme celle des 4 pas au XX e siècle, n’est ni appliquée fermement, ni systématiquement. Dans ce cas, deux solutions s’offrent aux membres du Board , soit rappeler simplement la nécessité d’appliquer les lois du jeu, soit changer cette loi.

140 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 68. 245

La non application de la part des arbitres peut être questionnée. Le fait d’accorder un coup franc indirect dans la surface de réparation est une décision lourde de conséquence avec une véritable chance de marquer…pour une action qui n’a demandé ni effort, ni compétence motrice à l‘équipe bénéficiaire. La gestion du coup franc indirect est également complexe, avec une grande densité de joueurs près de la cible et des défenseurs qui n’ont ni envie d’être à dix yards, ni envie de ne pas bouger avant le ballon. Cette non application de la loi peut illustrer la thèse du philosophe Schaffhausen 141 , qui pense que la loi XII laisse entendre l'existence d'une morale footballistique, même si celle-ci penche du côté d'une conception positiviste du bien et du juste, selon laquelle les jugements de valeur sont d'abord des jugements de fait.

141 Schaffhausen, P. (2008), op. cit., pp. 49-50. 246

Chapitre 13 Loi XIII : les coups francs 1 ______

« C'est pourquoi il faut savoir utiliser deux armes : 1es coups francs - de moins en moins francs - et les rares occasions que se créent les attaquants ». Vladimir Dimitrijevic 2

1. Loi actuelle

Le terme anglais « free-kick » est traduit par « coup franc ». Mais, faire semblant de tirer un coup franc pour tromper l’adversaire est permis, aujourd’hui par le règlement, cela fait partie du jeu. Les coups francs sont pour Vladimir Dimitrijevic « de moins en moins francs » Nous pouvons envisager d’autre sens pour le coup franc : « tirer franchement au but » ou « tirer franchement dans le ballon ». Mais, à l’origine, il n’était pas possible de marquer sur coup franc et le simple fait de faire rouler le ballon, le mettait en jeu. Pour définir le sens de cette expression, la traduction « coup de pied libre » est sans doute plus pertinente. Le joueur qui bénéficie du coup franc, a le temps et la liberté de jouer un ballon posé au sol, sans être perturbé par les autres joueurs. Les coups francs font partie des coups de pied arrêtés. Ils sont obtenus pour une faute commise sur un adversaire ou une simple infraction au règlement. Le coup franc est exécuté depuis 1890 du point précis où l’infraction est commise. Cette règle est toujours en vigueur entre les deux surfaces de réparation. Le règlement a progressivement caractérisé les coups francs en fonction du lieu de la faute : dans la surface de but, à l’extérieur de la surface de réparation. Les coups francs sont classés en deux catégories, et en fonction de la nature de la faute, l’arbitre accorde des sanctions techniques différentes : coup franc direct ou coup franc indirect. Il est possible de jouer rapidement un coup franc, dans n’importe quelle direction, à partir du moment où le ballon est arrêté.

1 Law XIII – Free-kick. 2 Dimitrijevic, V. (2006), op. cit., p. 26. 247

2. Principes de cette loi

Le premier principe, protéger les joueurs, est donné dès 1889 3 par le Board . L’arbitre a le pouvoir d'accorder un coup de pied libre, sans aucune contestation possible, dans le cas où il pense que la conduite d'un joueur est dangereuse, ou peut le devenir. C’est bien l’équilibre entre le droit de charge autorisé et la sécurité du joueur qui est ici questionné. Cette mission de l’arbitre est donc antérieure à son entrée au milieu des joueurs en 1891. Le second principe est la reconnaissance de la faute par le joueur et l’équipe coupable. Le coup franc ne se conteste pas et implicitement la faute doit être acceptée. En effet les règles prévoient que les joueurs adverses se retirent à 10 yards et ceux qui « se mettent à danser et à gesticuler dans le but de distraire l'adversaire » 4 doivent être sanctionnés. Le troisième principe considère que le coup franc doit réparer un préjudice subi. Dans le cas contraire il est recommandé à l’arbitre de ne pas sanctionner la faute. Nous devons insister sur le fait que le coup franc condamne une faute individuelle, mais sanctionne toute l’équipe en offrant parfois une véritable occasion de marquer un but.

3. Historique de la loi

Dans le règlement d’octobre 1863 de la Football Association, le terme coup franc ( free - kick ) est absent. Deux styles de coup de pied arrêtés sont évoqués. Le premier est accordé, à un joueur qui réussit un arrêt de volée (en plantant son talon immédiatement après la réception de la balle) ; alors il aura le droit de procéder à un dégagement. Dés décembre1863, le règlement empêche le joueur de porter le ballon comme au rugby, mais il peut continuer à frapper le ballon ou le bloquer. Cette possibilité disparaitra très vite et toutes les mains intentionnelles seront sanctionnées. Le second coup de pied arrêté est obtenu quand la balle sort derrière la ligne de but. Dans ce cas si le premier à toucher le ballon est un joueur de l'équipe attaquante, il placera la balle à 15 yards (13m 62) à l'intérieur du terrain dans l'axe de sa sortie, et aura le droit de tirer au but. Il s’agit d’un genre de transformation qui ressemble étrangement à celle du rugby, à une époque où les règlements sont encore très proches. Ce type de « coup franc » sera abandonné au profit du corner créé en 1873.

3 AGM of 1889. 4 AGM of 1963. Décision n°3. « If when a free kick is being taken any of the players dance or gesticulate in a way calculated to distract their opponents, it shall be deemed ungentlemany conduct for witch the offender(s) shall be continued », p. 8. 248

4. Transformations de la loi décidées par le Board

Dans sa logique première, le Board estime qu’un coup franc ne peut être joué que sous les ordres de l’arbitre, faisant fonction de starter. En effet en 1894 le règlement précise qu’« un coup franc ne doit pas être joué jusqu'à ce que l'arbitre ait donné un signal dans ce sens ». Mais deux ans plus tard, cette phrase est retirée pour donner la liberté aux joueurs de tirer le coup franc sans attendre. Nouvelle volte face du Board en 1905 5, le joueur doit attendre le signal de l’arbitre. Si on se réfère au règlement appliqué et commenté par Ernest Weber en France en 1905 6, il est recommandé aux arbitres de siffler dès que le joueur qui doit donner le coup de pied franc est prêt, pour aider à la rapidité du jeu. Le coup franc est exécuté depuis 1890 du point précis où l’infraction est commise. Mais le règlement a modifié cette loi pour les fautes dans la surface de réparation ou la surface de but. Pour les fautes commises dans la surface de but, le coup franc ne se joue pas à l’endroit précis de l’infraction. Depuis 1984 7, dans le cas d’une faute au bénéfice de l’équipe qui attaque la cible, pour en faciliter l’exécution d’un point de vue organisationnel, le ballon est alors replacé sur la ligne de la surface de but des 6 yards, parallèle à la surface de but. Dans le cas d’une faute d’un joueur dans la surface de but adverse, le coup franc pouvait être joué à partir de 1978 8 d’un point quelconque de la moitié de la surface de but et depuis 1992 de n’importe où dans cette surface de but. Le ballon sera en jeu dès qu’il sera botté par un joueur. A l’origine le ballon devait rouler pour être en jeu. En 1895 9 le Board définit le mot rouler : « faire un tour ou parcourir la distance de sa circonférence ». Cette définition sera modifiée un siècle plus tard en 1997 avec un ballon en jeu dès qu’il aura bougé. Depuis 1936, dans le cas d’un coup franc joué dans sa propre surface de réparation, le ballon n’est plus considéré en jeu après avoir seulement roulé, mais doit obligatoirement sortir de la surface de réparation. Aujourd’hui un tiers des buts sont marqués sur coup de pied arrêté, mais à l’origine le coup franc n’avait pas été prévu à cet effet, mais plutôt dans une perspective de protection du joueur. Le Board fait préciser en 1890 qu’en « aucun cas un but ne peut être marqué sur un

5 AGM of 1905: Definition : « A Place Kick, a Free Kick, or a Penalty Kick must not be taken until the Referee has given a signal for same ». 6 Weber, E. (1905), op. cit. p. 179 7 Proposition de l’Écosse adoptée par le Board lors de sa réunion de 1984. 8 Proposition de la FA en 1978 a) : « tout coup franc accordé à l'équipe défendant à l'intérieur de sa propre surface de but peut être exécuté d'un point quelconque de la moitié de la surface de but dans laquelle le coup franc a été accordé ». 9 Proposals for the AGM of 1895. 249 coup franc ». La première exception sera le « penalty » en 1891. Il faut attendre 1903 10 , pour qu’un but puisse être marqué directement sur un coup franc. Il ne sera alors question que des fautes concernées par l'article 9. Il s’agit des sept fautes 11 sanctionnées par un penalty, si elles sont commises dans la surface de réparation. Il est donc uniquement possible de marquer sur des infractions commises sur l’adversaire ou sur le ballon. A cette époque 12 le coup de pied d'envoi, le coup de pied de coin et le coup de pied de but sont assimilés à des coups de pied francs. Aujourd’hui ces trois actions sont qualifiées de remise en jeu, avec pour toutes les trois la possibilité de marquer 13 . A partir de 1903, le règlement n’empêchait pas sur un coup franc un joueur de tirer dans son propre but. La possibilité de marquer, sur coup franc et sur corner, uniquement contre le camp coupable est adoptée par le Board en 1926, et confirmée en 1931 14 avec la précision « contre le camp adverse ». La mise à distance des adversaires est fixée par le Board seulement en 1905. Cette question est pourtant apparue pour l’exécution d’un penalty dès sa création en 1891. Pour réellement donner un avantage à l’équipe qui bénéfice du coup franc, cette distance est repoussée de 6 à 10 yards en 1913. Les adversaires doivent donc respecter cette distance, ou se tenir sur leur propre ligne de but (1905). Il est donc possible pour un coup franc excentré proche de la ligne de but de se situer tout près du ballon si le joueur se place sur la ligne de but. Le Board réagit en 1936, en précisant que les joueurs peuvent se tenir sur leur ligne de but mais uniquement entre les poteaux de but. Jusqu’en 1963 15 , la décision n°3 de la loi précisait que « les joueurs opposés doivent se retirer à la bonne distance ». Cette obligation est ensuite liée aux sanctions dans la décision n°2 : « Des joueurs qui, sur un coup franc, ne se retirent pas à la distance réglementaire doivent recevoir un avertissement et, en cas de récidive, être exclus du terrain. Il est spécialement demandé aux arbitres de considérer comme conduite inconvenante grave toute tentative de retarder l'exécution d'un coup franc en avançant pour réduire ainsi la distance réglementaire ».

10 AGM of 1903: Law 10: « A goal may be scored from a free kick which is awarded because of any infringement of law 9, but not from any other free kick ». 11 En 1903, l’article 9 concerne 7 fautes : 1) Faire un croche-pied à un adversaire; 2) Frapper un adversaire; 3) Sauter sur un adversaire; 4) Manier la balle avec la main; 5) Tenir un adversaire; 6) Pousser un adversaire ; 7) Charger un adversaire par derrière. 12 Réunion du Board de 1905 : Art. 10 : « … Le coup de pied d'envoi, (excepté indication contraire de la loi 2) le coup de pied de coin et le coup de pied de but sont des coups de pied francs en ce qui concerne la signification de cet article ». 13 La possibilité de marquer date de 1924 pour le corner et de 1997 pour le coup de pied de but et pour le coup d’envoi. 14 AGM of 1931 Proposal by the FA were unanimously adopted « …scored against the offending side ». 15 Proposition de la FIFA adoptée par le Board lors de sa réunion de 1965. 250

Quoique les lois indiquent que les adversaires doivent se retirer à une distance d’au moins 10 yards du ballon, l’arbitre a le pouvoir discrétionnaire de ne pas tenir compte de cette contrainte pour permettre à un coup franc d’être joué rapidement. La distinction entre coup franc où il est possible de marquer directement ou non existe depuis 1903, mais le vocable « coup franc indirect » est mentionné pour la première fois en 1939 16 pour les infractions concernant le jeu dangereux. Le Board va progressivement classer les coups francs en deux catégories : le coup franc direct sur lequel un but peut être marqué directement contre l'équipe en faute, et le coup franc indirect « sur lequel un but ne peut être marqué que si le ballon, avant de pénétrer dans le but, a été touché ou joué par un joueur autre que celui qui a botté le coup ». Il faut considérer à partir de 1939 que dans les cas où cette précision n’est pas donnée, la loi concerne l’ensemble des coups francs. Il faut attendre les années 60 pour voir dans les archives du Board, une proposition de l’Écosse 17 préciser « si un joueur botte un coup franc direct ou indirect… ». Pour des raisons de simplification du règlement, le Pays de Galles proposera à partir de 1974 18 de supprimer la distinction entre coup franc direct et indirect. Cette idée sera débattue et le Board autorisera même une expérimentation du 12 au 19 Novembre 1978 au tournoi Européen Juniors de Monaco, avec entre autre l’abolition du coup franc indirect. Mais au final cette proposition sera repoussée et cette distinction est toujours d’actualité en 2011. Par contre la décision numéro un en 1973 19 stipule qu’« aucun signal n'est requis dans le cas d'un coup franc direct ». Pour les joueurs, mais aussi les spectateurs et téléspectateurs, la distinction est devenue visible avec le geste de l’arbitre, puisque lorsqu'il accorde un coup franc indirect, il est obligé de le signaler en levant un bras au-dessus de la tête. Le Board précisera en 1973 20 qu’il gardera son bras dans cette position « jusqu'à ce que le coup ait été donné » et en 1978 21 qu’il « maintiendra le signal jusqu’à ce que le ballon ait été joué ou touché par un autre joueur ou sorti du terrain ». Cette gestuelle visible depuis les tribunes

16 Proposition de la FA adoptée par le Board en 1939. Loi XII Pour toute infraction de (i) (jouer d'une manière dangereuse) un coup franc indirect doit être tiré par un joueur de l'équipe opposée à l'endroit où l'infraction a été commise. 17 Proposition de l’Écosse non adoptée en 1963. Adoptée en 1965 par le Board : « Si un joueur botte un coup franc direct ou indirect en dehors de sa propre surface de réparation, tous les joueurs de l'équipe adverse doivent se trouver à une distance d'au moins 10 yards ( 9,15 mètres) du ballon jusqu'à ce que celui-ci soit en jeu, sauf s'ils se tiennent sur leur propre ligne de but, entre les montants du but... ». 18 Le Pays de Galles fera trois fois la même proposition non adoptée par le Board en 1974, 1975 et 1978. 19 AGM of 1973 : Law XII : decision n°1 : « ... no signal is required in the case of a direct free-kick ». 20 Proposition de l’Écosse adoptée par le Board en 1973. 21 Proposition de la FA adoptée par le Board en 1978. Une proposition identique de la FA avait été rejetée par le Board en 1973. 251 apparait à la même époque que la création des cartons jaunes et rouges, une communication non-verbale, adoptée dans une logique de spectacle universelle.

5. Infractions et sanctions liées à cette loi

En 1890 22 toutes les infractions étaient sanctionnées par un coup franc, y compris sur les corners, sur les touches ou les coups d’envoi. Le Board ajoutera à cette liste en 1907 23 , le cas d’un joueur expulsé du terrain, ou simplement averti en 1934 24 . Les coups francs vont progressivement ne plus concerner toutes les fautes et incorrections, particulièrement les reprises de jeu. Ainsi en 1924, la reprise de jeu après un arrêt temporaire de la partie se réalise par une « balle à terre », et les infractions lors d’une touche ne donnent plus lieu à un coup franc en 1932 25 . Le tireur peut aussi commettre des infractions. Le fait de marquer sur un coup franc demeure une infraction jusqu’en 1902. Ensuite il ne sera permis de marquer directement que sur certains coups francs. Dans le cas d’un coup franc indirect, le but ne peut être accordé que si le ballon entre dans le but après avoir touché un autre joueur. Si le ballon pénètre directement dans le but de l’équipe adverse, un coup de pied de but est accordé à celle-ci. Il fut décidé par le Board dès 1891 que le ballon ne pourra être rejoué une nouvelle fois par le tireur. Certainement pas toujours appliquée cette règle fut rappelée par le Board en 1903. Le Board précisera en 1971 26 qu’il n’est pas non plus possible pour un joueur de lever le ballon simultanément avec ses deux pieds, mais le règlement le permet aujourd’hui 27 . Les joueurs du camp pénalisé par un coup franc peuvent aussi commettre des infractions, par exemple jouer le ballon pour l’éloigner du lieu du coup franc, et recevoir une sanction administrative. Les lois indiquent que lorsqu’un coup franc est sifflé les adversaires doivent se retirer à une distance d’au moins 10 yards du ballon. Cette obligation n’est pas

22 Réunion du Board de 1890 : Art. 16 : Pour toute infraction aux articles 2 5, 6, 8, 9 et 10 un coup de pied franc (free-kick ) doit être accordé au camp opposé, au point où l'infraction a été commise (Art. 2 : coup d’envoi, Art. 5 : touche, Art. 6 : hors-jeu, Art. 8 : fautes mains et gardien, Art. 9 : coup franc, Art. 10 : fautes) 23 Réunion du Board de 1907 : Loi 17 : Pour toute infraction aux articles 5, 6, 8, 10 ou 16, ou si un joueur a été expulsé du terrain sous la loi 13 un coup de pied franc ( free kick ) doit être accordé au camp opposé, au point où l'infraction a été commise ( → 1898 point → à la place où l'infraction s'est produite). 24 Décision du Board n° 13 du 9 juin 1934. Loi 13 (arbitre) : Si le jeu a été stoppé suite à une conduite inconvenante de la part d'un joueur, il doit être repris par un coup franc, en faveur de l'équipe adverse, que le joueur soit seulement averti ou expulsé du terrain (cette dernière partie de phrase a été retirée en 1935 sur proposition de la FA. 25 Proposition de la FA adoptée par le Board en 1932. 26 Suite à une question de la Scottish Football Association lors de la réunion du Board de 1971. 27 Règlement du Board 2009 : « Un coup franc peut être exécuté en levant le ballon d’un pied ou des deux pieds ». 252 accompagnée d’une sanction systématique. Ce comportement est même toléré dans le règlement de 2009 : « Si un joueur décide de jouer un coup franc rapidement et si un adversaire se trouvant à moins de 9,15 m intercepte le ballon, l’arbitre doit permettre au jeu de se poursuivre ». En fait, le joueur qui n’a pas fait l’effort de se mettre à distance n’est pas sanctionné, contrairement au rugby. Le règlement prévoit toutefois de donner un avertissement au joueur dans trois cas précis : retarder délibérément l’exécution d’un coup franc 28 , venir à proximité du ballon 29 et sortir prématurément du mur 30 .

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

La proposition qui retient notre attention date de 1924. Elle concerne les fautes intentionnelles commises à l'intérieur d'une zone entre la ligne existante de la surface de réparation et une ligne tracée en travers du terrain à une distance de 30 yards de la ligne de but. Dans ce cas le coup franc devrait être tiré de l'endroit où l'infraction a été commise avec tous les joueurs en dehors de la zone des 30 yards du camp défendant, excepté le joueur qui tire le coup franc et le gardien opposant. Il s’agit donc d’un coup franc sans mur, qui ressemble au duel du penalty, mais avec une distance de tir variable. Cette proposition présentée en 1924, étudiée par le Board en 1925 n’a pas été retenue. Cette procédure fait penser à celle qui existe dans le règlement de la fédération française pour le football à effectif réduit concernant les catégories de jeunes. En effet pour les fautes intentionnelles dans le camp adverse comprises entre la ligne médiane et la ligne des 13 mètres, le coup franc direct se tire sur la ligne des 13 mètres sans mur. Nous avons assisté à de nombreuses finales départementales et régionales de jeunes et étrangement cette règle n’est quasiment jamais appliquée. Plus de quatre–vingts ans plus tard, cette idée d’un coup franc sans possibilité de constituer un mur devant le ballon pour l’équipe fautive, est toujours d’actualité. En 2005 Pelé défendait ainsi le football offensif : « Personnellement, je suis toujours pour aider les attaquants. Lorsqu'un joueur réussit à passer un, deux, trois adversaires, et qu'il est arrêté de façon irrégulière alors qu'il s'apprête à tirer, je ne trouve pas très juste que l'équipe fautive

28 Réunion du Board en 1997 : « Tout joueur qui, pour n’importe quelle raison, retarde délibérément un coup franc accordé à l’équipe adverse, devrait recevoir un avertissement (yellow card). Et, en cas de récidive, il devra être exclu du terrain (red card) ». 29 Règlement du Board en 2009 : « Si un joueur décide de jouer un coup franc rapidement et si un adversaire se trouvant à proximité du ballon l’empêche délibérément de l’exécuter, l’arbitre devra avertir l’adversaire pour avoir retardé la reprise du jeu ». 30 Réunion du Board en 1997 : « Tout joueur qui sort prématurément du mur des défenseurs, formé au moins à 10 yards du ballon, avant que le ballon ait été joué, devra recevoir un avertissement. (yellow card). Et, en cas de récidive, il devra être exclu du terrain (red card) ». 253 soit autorisée à mettre tout le monde derrière le ballon et à former un mur… ». Il évoque la justice, un des principes fondateurs des lois du jeu. En effet, la faute ne doit pas profiter à l’équipe incriminée.

7. Expérimentations

Une première expérimentation, demandée par la Suisse et la Finlande, est autorisée par le Board en 1992 31 . Les coups francs, classés comme indirects, tirés à l’extérieur de la surface de réparation, sont transformés en coups francs directs. Cette règle est appliquée sur la totalité du terrain sauf dans la surface de réparation où l’existence de la prescription coup franc direct ou indirect demeure une loi en vigueur. Il n’y a eu aucune demande, ni pour poursuivre cette expérimentation, ni pour changer la loi, dans les comptes rendus du Board des années suivantes. La seconde expérimentation concerne l’adoption de « la règle des 10 mètres » empruntée au rugby pour les contestations des décisions de l’arbitre. Cette proposition semble récurrente. En effet en 1983, la FA avait, sans succès, fait une proposition dans ce sens pour changer la loi XIII. Dans le cas, où les joueurs de l’équipe sanctionnée ne respectaient pas la distance, l’arbitre devait les obliger à « se retirer immédiatement en dehors de la surface de réparation et au moins à une distance de 10 yards de la balle, jusqu’à ce que le ballon soit en jeu ». En 1998 le Board accorde à la Jersey Football Association de conduire sous couvert de la FA une expérimentation impliquant que la position du coup franc soit avancée, vers l’avant en direction du centre du but de l’équipe adverse d’une distance de 10 yards. L’arbitre pouvait prendre cette décision après un carton jaune administré pour contestation, pour non respect de la distance des 10 yards, pour retard de tir du coup franc ou tout autre acte comme un comportement antisportif. En 2000 et 2001 32 , la FA fait de nouveau une proposition pour modifier la décision n°1 de la loi XIII en ce sens. Sans plus de succès la proposition de la FA

31 Demande des associations de football Suisse et Finlandaise pour 3 expérimentations : Hors–jeu, Coup franc et Touche. Expérimentations accordées dans les compétitions organisées par la FIFA ou par une ou plusieurs Confédérations. 32 Proposition de la FA non adoptée par le Board en 2000 et en 2001 : Si lorsqu’un coup franc est accordé, un joueur de l’équipe fautive : - ne respecte pas la distance requise lors de l'exécution d'un coup de pied de coin, d'un coup franc ou d'une rentrée de touche - retarde la reprise du jeu pour transporter, lancer ou tirer le ballon au loin - manifeste sa désapprobation en paroles ou en actes - se rend coupable par n’importe quelle forme d'un comportement antisportif l’arbitre devra premièrement avertir de manière appropriée le joueur incriminé, en lui montrant le carton jaune et aussi avancer la position du coup franc de 10 yards vers le point médian de la ligne de but de l’équipe fautive. 254 a été retirée. L’expérimentation va pourtant se poursuivre sous la conduite de la FA et même s’affiner pour régler les cas où le coup franc se retrouverait dans la surface de réparation suite à l’avancée de 10 yards. Si le coup franc est avancé dans la surface de réparation, celui-ci doit rester un coup franc (direct ou indirect comme accordé par l’arbitre). Dans le cas spécifique d’un coup franc indirect, si par l’avancée il se trouve dans la surface de but, il doit alors être tiré sur la ligne de la surface de but. Cette expérimentation va ensuite prendre le nom de « 9,15 metre experiment » et le Board autorisera son extension en 2002 et en 2003 dans la Major National League 33 . Cette règle, qui semble efficace au rugby où les contestations provoquées par le coup de sifflet de l’arbitre sont rares, n’a pas été adoptée au football. Les joueurs peuvent continuer de contester les décisions de l’arbitre, le coup franc continuera bien de se jouer au point précis de l’infraction.

8. Analyse systémique

La loi XIII en en relation directe avec les décisions de l’arbitre (loi V) qui siffle le coup franc, indique sa direction et l’endroit où le ballon doit être posé. Elle est également en interaction avec les fautes et incorrections (Loi XII). La classification de ces dernières détermine si l’équipe offensée bénéficie d’un coup franc direct ou indirect, notamment pour les fautes spécifiques du gardien de but. Dans la surface de réparation les fautes défensives théoriquement sanctionnées par un coup franc direct se transforment depuis 1891 en un penalty qui se tire d’une ligne à 12 yards du but, puis à partir de 1902 du point de penalty (loi XIV : coup de pied de réparation). La loi XIII est aussi en interaction avec la loi XVI sur le coup de pied de but. Depuis la modification de cette de la règle en 1936, pour tous les autres coups francs joués par la défense dans l'enceinte de la surface de réparation, le ballon doit obligatoirement sortir de cette surface pour être considéré en jeu. La proposition du Pays de Galles, de supprimer la distinction entre coup franc direct et indirect en 1974, illustre le caractère systémique des lois du jeu. En effet, cette simple modification s’accompagnait de changements dans neuf autres lois jeu 34 .

33 Major National League, ou Major league Soccer (MLS) : La ligue majeure de soccer est la ligue profesionnelle de soccer en Amérique du Nord. Elle a été créée en 1993, avec une première saison en 1996 avec 10 franchises, et 19 en 2012. 34 Lois III, IV, VIII, XI, XII, XIV, XV, XVI et XVII. 255

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Cette sanction technique existe également dans les autres sports collectifs, sous des vocables différents : lancer franc, pénalité, jet franc… Elle vient toujours pour réparer, ou tenter de compenser la faute d’un adversaire. Cette action motrice, libérée de la plus grande partie de la pression défensive adverse, laisse au tireur le temps de se préparer, de viser une cible. Les adversaires à ce moment là, semblent souvent confinés dans un rôle de spectateurs, comme au rugby par exemple. La reconnaissance de la faute, inscrite dans la logique de l’activité du football avant l’arrivée de l’arbitre, est caractérisée en basket-ball par un joueur qui lève le bras en direction de la table de marque, et en ultimate avec un joueur qui redonne le frisbee à l’adversaire. Ces comportements sont rarement observables sur un terrain de football. Pourtant le joueur averti, est invité à venir près de l’arbitre pour recevoir sa sanction administrative.

Synthèse Le coup franc a toujours permis à l’équipe offensée de récupérer la possession du ballon, et donne donc la possibilité de poursuivre la phase offensive. Le football moderne est marqué par l’influence grandissante des coups de pieds arrêtés. La part des buts inscrits suite à ce type d’action peut atteindre plus d’un tiers des réalisations dans les grandes compétitions internationales 35 . Les remises en jeu et les coups francs n’ont pourtant pas été inventés dans cette logique. En effet, il faut attendre l’année 1903 pour pouvoir marquer directement sur certains coups francs. Les perspectives sont à rechercher dans les propositions déjà faites au Board, par exemple, rendre tous les coups francs directs. La possibilité de faire tirer des coups francs sans mur est également une piste de réflexion, actée en France dans le football à effectif réduit des jeunes. Si le football s’inspire des autres sports collectifs, il peut choisir d’accorder comme au basket, une sanction plus sévère au bout d’un certain nombre de fautes collectives, avec par exemple à la clef un coup franc tiré sur la ligne des 18 yards sans mur. Pour lutter contre les fautes « utiles » qui bloquent les contre-attaques au milieu du terrain, la double sanction du rugby serait plus adaptée pour compenser le préjudice commis. En effet, loin de la

35 Les statistiques des Coupes du monde de 1982 à 2002, attribuent de 30 à 33%, les buts marqués directement ou indirectement sur les coups de pieds arrêtés. (46 buts sur 141 en 1994, 55 buts sur 171 en 1998, 55 buts sur 161 en 2002) in Coupe du monde 2002 Analyses et enseignements. FFF, CTNF, DTN, p. 43. 256 cible, le joueur choisit le coup de pied en touche, et son équipe bénéficie ensuite de la touche. Cela correspondrait au football, lors d’un coup franc, à sortir le ballon du terrain pour obtenir ensuite une touche ou un corner : perspective dissuadante pour les actes d’antijeu et alléchante pour le football offensif, même s’il n’est pas, comme le rugby uniquement un jeu de « gagne terrain ».

257

Chapitre 14 Loi XIV: Le coup de pied de réparation 1 ______

« Le penalty est une punition. C’est la plus lourde qu’un arbitre puisse infliger au cours d’une rencontre parce qu’elle est presque toujours à l’origine d’un goal et qu’un goal peut décider de la victoire ou de la défaite. Certains arbitres en ont peur comme l’humanité doit avoir peur du déluge ». John Langenus 2

1. Loi actuelle

Le coup de pied de réparation est un coup de pied arrêté. Quand un joueur commet une des dix fautes sanctionnées par un coup franc direct 3, l’équipe adverse bénéficie de ce coup de pied arrêté en posant le ballon à l’endroit précis de la réalisation de la faute. Si la faute a été commise par un joueur dans sa propre surface de réparation, alors ce coup franc se métamorphose en coup de pied de réparation. Le ballon est alors posé sur le point de penalty, à 11 yards de la ligne de but adverse. La position des joueurs est fixée par le règlement et contrairement au coup franc direct, les joueurs adverses ne peuvent faire « un mur » ou se positionner devant le ballon. Le joueur exécutant le coup de pied de réparation est clairement identifié et se retrouve en duel face à un gardien de but obligé de rester sur sa propre ligne de but, face à l’exécutant, entre les montants du but, jusqu’à ce que le ballon soit botté. Ce coup de pied de réparation est souvent dénommé par le terme anglais de penalty , et il est à distinguer de la séance de « tirs au but »4 destinée à départager les équipes à la fin des prolongations.

2. Principes de cette loi

Le penalty est la réparation d’une faute commise par un joueur dans sa propre surface de réparation. Cette sanction technique doit donc bénéficier à l’équipe lésée. Dans le cas contraire, le Board a décidé en 1903 5 que l'arbitre peut se retenir d'appliquer la loi dans le cas où en le faisant il est convaincu que cette application permettrait de donner un avantage au

1 Law XIV - Penalty-kick . 2 Langenus, J. (1943). En sifflant par le monde. Gand, Belgique, Snoeck-Ducajou et Fils, p.39. 3 Loi XII – Fautes et incorrections. 4 Cf. chapitre 18 : Les tirs au but. 5 AGM of 1903 : Law 16. 258 camp fautif. De la même manière un penalty marqué ne peut être annulé pour une faute du camp subissant le coup de pied de réparation 6. La pénalité vise la faute elle-même. Il suffit que la faute se produise dans la surface réparation avec un ballon toujours en jeu. Il n’est pas nécessaire que le ballon soit dans cette surface, ni disputé par les joueurs. La décision du Board du 16 juin 1902, stipule qu’un coup de pied de réparation (penalty kick) peut être accordé quelle que soit la position du ballon au moment où l'infraction a été commise. Pour Ernest Weber (1905), le penalty a priorité sur les autres sanctions. Par exemple, si un joueur charge un adversaire hors-jeu qui ne gênait pas la partie, il y a lieu à coup de réparation. Selon John Langenus le penalty est la sanction suprême, « la plus lourde ». Pour obtenir ce coup de pied de réparation, les attaquants sont prêts à simuler et quand l’arbitre siffle ils lèvent les bras comme s’ils avaient déjà marqué un but. Selon les statistiques 7, ce duel bénéficie les trois-quarts du temps à l’attaquant. Un penalty sifflé sera tiré. Dès 1892, sous l’impulsion de M Crump 8 et M Gregson 9, le règlement est modifié, et il est ajouté à la loi 13 : « Si nécessaire le temps de jeu doit être prolongé pour permettre l'exécution du penalty ». C’est la seule phase de jeu qui oblige l’arbitre à différer la fin du match. En 1901, le Board a précisé que le but était valide même si le ballon avait touché le gardien avant de pénétrer dans le but. Un but peut être marqué directement sur pénalty, mais aussi être tiré de façon indirecte, en donnant le ballon vers l’avant à un partenaire qui était hors de la surface de réparation au moment du coup de pied.

3. Historique de la loi

Une lecture détaillée des premiers comptes rendus du Board fait découvrir le mot « penalty » pour la première fois en 1887 dans la phrase suivante. « Dans le cas de la violation de la loi 2 (engagement) le penalty devient maintenant un coup franc pour les opposants ». Dans ce sens le penalty doit être considéré comme une pénalité et non comme le coup de pied de réparation. La pénalité permet, comme au rugby, de scorer alors qu’il n’est pas possible à cette date de marquer sur coup franc (cf. loi XIII). Il est donc indispensable de

6 Réunion du Board de 1905 : loi 17. 7 Nous faisons référence aux statistiques fournies par le magazine France Football avec le bilan de la saison du championnat de France, à chaque mois de juin. Une statistique qui repose, donc à chaque fois sur 380 matchs. 8 M. Crump représentant de la FA au Board de 1889 à 1922. 9 M. Gregson représentant de la FA au Board de 1889 à 1910. 259 distinguer à la fin du XIX e siècle la pénalité, « the penalty » ; du coup de pied de réparation, « the penalty-kick ». Celui-ci apparaît pour la première fois avec une proposition de l’Irlande en 1890, à la fin du règlement, à la suite de la loi 16 : « Si n'importe quel joueur doit délibérément crocheter ou tenir un joueur adverse, ou délibérément manier le ballon à l'intérieur des 12 yards de sa propre ligne de but l'arbitre devra décider d’accorder au camp adverse un penalty, tiré de n'importe quel point à 12 yards de la ligne de but ». Le texte précisait la position des joueurs et du gardien de but. Tous les joueurs à l'exception du tireur de penalty et du gardien de but adverse, devaient se tenir derrière la balle à au moins 6 yards de celle-ci et il était possible de marquer directement sur le penalty. Cette proposition sera adoptée l’année suivante. Jusqu'en 1891, le penalty n'existait pas. On estimait qu'un homme éduqué dans le giron d'un collège de l'Angleterre victorienne était incapable de commettre la moindre faute délibérée. Même si l'avènement du professionnalisme en 1885 avait permis à un nombre croissant d'hommes issus de la classe laborieuse d'accéder à la discipline, l'invention du penalty fut plus vraisemblablement le résultat du renforcement de la concurrence que le souci de favoriser le fair-play. Son introduction fut la première d'une série de modifications spectaculaires des lois du jeu en 1891 10 . Dans le but de lutter contre l'antijeu et la violence qui se développaient, l’Irlandais William Mac Crum 11 , inventa le penalty, qui fut adopté par le Board le 2 juin 1891. L’apparition du penalty est donc postérieure à la création du Board en 1886. Il s’appelait à l'origine « kick of death », le tir de la mort, qu’il est possible de rapprocher de « la mort subite »12 , dénomination ayant précédé le but en or.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

La première transformation concerne la position du ballon, du gardien et des autres joueurs. Le Board tâtonne sur la position du ballon, entre 1891 et 1902. A l’origine en 1891, le ballon est posé à n'importe quel point à 12 yards de la ligne de but. Suite à la proposition de M. Laughlim 13 pour l’Écosse en 1899, il semble que le Board adopte le principe de tirer le penalty « sur la ligne des 12 yards de l’adversaire ». L’Écosse fera de 1900 à 1902 trois fois

10 Rous, S & Ford, D. (1974), op. cit. 11 William Mac Crum, modeste gardien de but du club du club de Wilford. F.C. en Irlande du Nord. 12 Mort subite : sudden death 13 Mac Laughlim représentant de la Scottish FA au Board en 1898 et 1999. 260 la même proposition pour préciser la position du ballon sur la ligne des 12 yards en fonction de l’endroit où la faute a été commise. Cette proposition est marquée par la volonté pour une faute hors de l’axe du but, de faire exécuter le penalty décalé à droite ou à gauche du but. Dans le même ordre d’idée l’Écosse propose, en 1901 et 1902, de faire tracer deux arcs de cercle d’un rayon de 12 yards à partir de chaque poteau de but, de telle sorte que le penalty soit exactement tiré d’une distance de 12 yards. Une autre logique va l’emporter, en 1902, avec la création du point de penalty. Il ne sera plus jamais question de tirer d’un point à 12 yards des buts, ou d’un point sur une ligne des 12 yards, mais d’un point unique situé dans l’axe du but à exactement 12 yards du but. Le gardien est mentionné comme une exception dans le projet de loi de 1890, il est le seul à pouvoir se tenir devant la balle lors du coup de pied de réparation. Après un an de réflexion, avec la loi de 1891 la position du gardien est précisée : « il ne pourra s’avancer au- delà de la ligne des 6 yards ». Ce droit lui sera retiré au début du XX e siècle 14 , et depuis il est obligatoire pour lui de rester sur sa ligne de but jusqu’à ce que le coup soit donné. Le Board précise que « se tenir » sur sa ligne signifie que le gardien ne doit pas bouger les pieds jusqu’à ce que le penalty soit tiré. Le penalty doit être compris comme une véritable sentence, une condamnation pour tous les joueurs de l’équipe qui ne sont plus libres de se déplacer sur le terrain. Pour le gardien qui est impliqué directement dans le duel, le législateur le confine sur sa ligne et lui demande d’accepter le verdict. Il ne peut bouger, et l’arbitre doit l’obliger à se tenir à partir de 1937 « entre les poteaux de but », comme sous une potence. Il accepte donc la peine, et le montre à tous, en se tenant debout, face au terrain, entre ses poteaux. Les comportements déviants, s’asseoir, se retourner, toucher un poteau, se mettre en dehors des buts, s’avancer, sont passibles d’un avertissement. Ses seules possibilités pour perturber le tireur sont de bouger le haut du corps, ou de se placer plus près d’un poteau de but que de l’autre, pour tendre un piège à son adversaire. A partir de 1980, les propositions vont dans le sens de redonner « un peu de vie » au gardien sur sa ligne pour lui permettre de bouger les pieds. Après onze ans et trois propositions infructueuses, le Board décide en 1991 15 , d’autoriser le gardien à bouger dans n’importe quelle direction, excepté vers l’avant, pendant la prise d’élan du tireur. La position des autres joueurs est également spécifiée dès l’origine de la loi en 1991 : ils se tiendront « derrière la balle à au moins 6 yards de celle-ci ». Dans l’esprit, ce duel ne doit

14 La dernière trace trouvée de cette règle, date de 1905 dans le règlement commenté d’Ernest Weber. 15 AGM of 1991 : « It was decided to refer to the Editorial Committee for consideration the matter of goalkeeper movement at Penalty Kicks, and wether it was now an opportune moment to allow goalkeepers to move in any direction except forward during the taking of Penalty Kicks ». 261 pas être perturbé par les autres acteurs du jeu… mais dans la réalité l’arbitre a toutes les peines du monde à repousser les joueurs à 6 yards derrière le tireur et à distinguer le tireur. En 1900 16 et 1901 17 , deux propositions sont faites au Board pour tracer une nouvelle ligne en pointillé au 18 yards, indiquant la position que les joueurs doivent respecter quand un penalty est en train d'être tiré. Cette ligne qui préfigure la surface de réparation, est donc pensée dans un premier temps pour mettre à distance les joueurs, et non pour délimiter la zone des fautes sanctionnées par un penalty. Le Board refuse ces deux propositions et adopte le tracé d’une simple marque en face de chaque poteau de but à 18 yards de la ligne de but. Le problème de la mise à distance des joueurs est résolu l’année suivante avec la création de la surface de réparation en 1902, à une distance de 18 yards du but, et donc à 6 yards du point de penalty. Cette mise à distance historique de 6 yards pour donner véritable avantage à l’équipe qui bénéficie d’un coup franc est jugée insuffisante par le Board. A partir de 1913 les adversaires sont repoussés à 10 yards du ballon. Pour le penalty, le problème est différent car les adversaires ne peuvent se positionner devant le ballon, mais en se situant sur la ligne de la surface de réparation ils perturbent la course d’élan du tireur. L’arbitre se retrouve dans la même situation qu’à la fin du XIX e siècle, en grande difficulté pour faire appliquer une règle. Sa tâche sera simplifiée en 1937, avec la création de l’arc de cercle du point de penalty qui permet de visualiser la position et les distances des autres joueurs. La seconde transformation fait référence à la zone d’application des fautes sanctionnées par un coup de pied de réparation. Cette zone est sujette à propositions et débats, sur sa forme et sa dimension. Dans un premier temps seules les fautes comprises entre la ligne des 12 yards et sa propre ligne de but, sont susceptibles d’être sanctionnées par un penalty, comme le schématise Stanley Rous18 . Il faut imaginer le traçage du champ de jeu avec une ligne sur toute la largeur du terrain. En 1895, de nombreux clubs de la Football Association proposent au Board de substituer à cette ligne des 12 yards parallèle à la ligne de but, un cercle à partir du but. La surface rectangulaire du départ, laisserait place à une surface arrondie où seules les fautes à proximité du but, et non à côté du point de corner, pourraient donner lieu à un penalty. Une nouvelle surface rectangulaire voit le jour en 1902, la surface de réparation actuelle mesurant 18 yards à partir de la ligne de but et 44 yards de largeur. En décidant d'accorder des penaltys pour les fautes commises dans cette surface, le législateur condamne davantage les fautes dans l’axe du but ou à proximité de celui-ci, que les fautes à la périphérie

16 Proposition de M. Reid (représentant au Board de 1889 à 1900) pour l’Irlande. Réunion du Board de 1900. 17 Proposition conjointe de M. Crump pour la FA et de M. Sheehan (représentant au Board de 1901 à 1905) pour l’Irlande. Réunion du Board de 1901. 18 Rous, S. & Ford, D. (1974), op. cit., pp. 141-144. Cf. annexe n°30, p. 120. 262 du champ de jeu. Quel que soit l’endroit de la faute dans cette surface, le ballon est systématiquement ramené dans l’axe à 12 yards du but, sur le point de penalty. La loi précisera dès 1902, qu’un « penalty kick » peut être accordé quelle que soit la position du ballon au moment où l'infraction a été commise. C’est donc bien l’endroit précis de la faute qui est déterminant, mais au fil du temps le coup de pied de réparation sanctionne des comportements différents, et de plus en plus nombreux.

5. Décisions du Board liées à cette loi

Le coup de pied de réparation doit se dérouler dans des conditions régulières. Dans le cas contraire, il est souvent recommencé. Par exemple, le Board adopte en 1966 la proposition de l’Écosse qui demande de recommencer le penalty, si, après que le coup de pied de réparation ait été donné, le ballon est arrêté dans sa course par un agent extérieur. La possibilité pour le tireur pendant sa course de feinter, ou de s’arrêter a fait l’objet de nombreuses questions. Suite à une question de la FIFA, le Board décide en 1981, que si un joueur interrompt sa course lors du tir du penalty, il commet une infraction pour laquelle il devra être averti pour conduite inconvenante par l’arbitre. Le jeu sera repris par un tir de penalty correctement exécuté. Le joueur peut donc modifier sa vitesse de course, comme le faisait Pelé, mais il lui est impossible de feinter la frappe, de s’arrêter complètement et d’attendre que le gardien plonge, avant de tirer.

6. Sanctions liées à cette loi

Le coup de pied de réparation est déjà une sanction technique en soi, qui doit nécessairement être appliquée. M. Gregson de la FA précisait à la réunion du Board de 1893, qu’à moins que dans l'opinion de l'arbitre le croche pied ne soit pas intentionnel, aucune autre punition qu'un penalty sur la ligne des 12 yards, ne doit être imposée. Un arbitre doit appliquer la loi 13 et n'a pas le pouvoir d'atténuer la loi. Les arbitres devaient hésiter a appliquer cette sanction, car le Board fait le même rappel à l’ordre en 1898 19 . Un siècle plus tard cette fermeté est encore souhaitée . Les arbitres sont, aujourd’hui, appelés à intervenir rapidement et avec fermeté à l’encontre des joueurs qui tiennent leur adversaire, notamment à

19 AGM of 1898 : « … within the 12 yards line, a Referee must enforce Law14, and has no power to mitigate the penalty ». 263 l’intérieur de la surface de réparation lors des coups de pied de coin et des coups francs. La loi évolue dans le sens d’une plus grande sévérité. Contrairement au XX e siècle, aujourd’hui, si un défenseur commence à tenir un attaquant à l’extérieur de la surface de réparation mais poursuit son infraction à l’intérieur de la surface, l’arbitre accordera un coup de pied de réparation. La loi distingue quatre catégories de joueurs pouvant commettre une infraction au moment du coup de pied de réparation : le tireur, le gardien, les partenaires du tireur et les partenaires du gardien. Pour le tireur, il est précisé en 1901, qu’un coup franc devait être accordé à l'équipe adverse si le ballon n'est pas joué vers l’avant, ou joué une seconde fois par le joueur qui a tiré le pénalty sans qu'il ait été joué par un autre joueur. De plus, le Board décide en 1967, que si au moment où le coup de pied de réparation est botté, le tireur se rend coupable de conduite inconvenante, le tir sera recommencé, uniquement dans le cas où le but a été marqué. Le joueur concerné recevra un avertissement. Pour le gardien, s’il commet une faute, comme avancer avant le tir, le coup sera recommencé uniquement dans le cas où le but n’est pas marqué. En fait l’arbitre laisse l’avantage, et si le but est marqué il l’accorde pour ne pas défavoriser l’équipe qui bénéficiait du penalty. Si les partenaires du gardien de but pénètrent dans la surface de réparation ou s'avancent à moins de 10 yards (9,15 m.) du point de réparation (ajouté en 1966) avant que le ballon ne soit en jeu, l'arbitre laissera exécuter le coup de pied de réparation. La loi prévoit, que si le but est marqué, il ne sera pas accordé et le coup sera recommencé. Pour les coéquipiers du tireur, la loi prévoit depuis 1967, que pour toute infraction de leur part, si un but est marqué, il sera annulé et le coup de pied de réparation recommencé. Pénétrer dans la surface de réparation avant que le coup de pied de réparation ne soit joué constitue une faute (2005) et dans le cas où le ballon n'entre pas dans le but, l'arbitre arrête le jeu et le match reprend par un coup franc indirect accordé à l'équipe adverse. Concernant les sanctions administratives, les joueurs pénétrant dans la surface de réparation avant que le ballon soit botté devaient recevoir un avertissement depuis la réunion du Board de 1967. Mais cette règle n’est plus en vigueur.

7. Les propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

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La première proposition date de 1900 et est formulée par M Reid représentant de l’Irish FA Son objet est de tracer une nouvelle ligne pointillée de 18 yards pour indiquer la position que les joueurs doivent respecter quand un penalty est en train d'être tiré. En, effet, la surface de réparation actuelle n’apparait qu’en 1902, et avant cette date il n’existe qu’une seule ligne tracée aux 12 yards sur laquelle le ballon est posé pour tirer le « penalty-kick ». Les joueurs adverses doivent se retirer à 6 yards du ballon, mais faire respecter cette règle doit être très difficile pour l’arbitre. Tracer les 18 yards permettrait de délimiter une ligne à ne pas franchir. Sur les terrains proposés dès 1891, par Stanley Rous 20 , cette ligne existe déjà, et cette proposition semble être réalisée pour entériner une pratique existante… mais le Board ne se laisse pas influencer et refuse ce tracé. Il optera pour le choix de créer la surface de réparation deux ans plus tard.

8. Expérimentations refusées par le Board

La première demande émane de l’United States Soccer Federation et de la North Américan Soccer League. Elle a pour objet d’augmenter la grandeur des buts à 26 pieds par 8 ½ pieds et de reculer la marque du penalty à 13 yards. Cette requête de 1975, est refusée par le Board. Nullement découragée la NASL, poursuivra sa volonté de changer les lois du jeu dans la perspective d’améliorer le spectacle, et adoptera pour départager les équipes à la fin des matchs la séance de « shoot-out »21 … sans jamais recevoir l’aval du Board . En 1982 22 , la FA et FA Wales font une demande d’expérimentation pour la saison 1982- 1983, afin de sanctionner d’un coup de pied de réparation des fautes commises hors de la surface. En effet, si un joueur commet une faute, normalement sanctionnée par un coup franc, et s’il le fait, selon l’arbitre, comme dernier défenseur avec une probable ou raisonnable opportunité de marquer, il devrait plutôt être sanctionné par un coup de pied de réparation. Cette expérimentation est refusée par le Board , elle répondait pourtant à une logique de sanctionner les actes d’antijeu. Ce refus semble anticiper la loi sur les futures expulsions de joueurs qui « annihilent une occasion réelle de but », sanctionnant le fautif, et non l’équipe entière avec un penalty. Le Board a fait le choix de sanctionner par un coup de pied de réparation uniquement les fautes commises dans la surface de réparation quelle que soit la position du ballon, du moment qu’il soit en jeu.

20 Rous, S. & Ford, D. (1974), op. cit., pp. 141-144. Cf. annexe n°30, p. 120. 21 Les « shoot-out » remplaçaient les tirs au but. Cf. chapitre 18. 22 Réunion du Board de 1982. Spécial meeting (lettre du 8 juin 1982). 265

9. Analyse systémique.

La loi sur le coup de pied de réparation (loi XIV) va évoluer au rythme des modifications de la loi sur les fautes et incorrections (Loi XII). Le nombre de fautes sanctionnées par un coup franc direct impacte les possibilités de siffler un penalty. En un peu plus d’un siècle, de 1891 à 1995 le nombre de comportements jugés répréhensibles et sanctionnés par un penalty passe de trois 23 à dix. La loi XIV est en interaction avec les décisions de l’arbitre (Loi V). L’arbitre interprète la loi, siffle éventuellement la faute. La communication entre le trio arbitral est codifiée pour cette prise de décision. Le fait que son assistant (Loi VI) se dirige vers le point de corner, donne immédiatement à l’arbitre le point de vue d’un autre homme, et lui confirme si la faute a bien eu lieu dans la surface der réparation. Avant l’exécution du tir, l’arbitre assistant se place sur la ligne de but à l’angle de la surface de réparation. Cette position lui permettra de vérifier si le ballon a réellement franchi la ligne de but (Loi X, le but marqué). L’arbitre veille à l'exécution du tir au but. La position du ballon et des joueurs est fondamentale lors de l’exécution du penalty. La décision 1 de cette loi rappelle à l’arbitre (loi V) qu’il doit attendre que tous les joueurs soient dans la position ordonnée par la loi. Le Board a précisé en 1905, que le coup de pied de réparation ne doit pas être exécuté tant que l’arbitre l'arbitre n'a pas donné le signal au tireur. La loi est également liée au fait que chaque équipe ne possède qu’un seul gardien de but (Loi III nombre de joueurs) qui ne peut être remplacé sans l’accord de l’arbitre. La décision du 17 juin 1901 précise que si le gardien de but a été changé sans que l'arbitre ait été prévenu et si le nouveau gardien de but touche le ballon de la main à l'intérieur de la surface de réparation, un coup de pied de réparation doit être accordé à l'équipe adverse. Comme pour les autres remises en jeu, cette loi détermine le moment où le ballon est considéré comme en jeu (Loi IX), et jouable par les autres joueurs. Le Board décide en 1939, que si le ballon a parcouru une distance égale à sa circonférence, il est considéré comme botté et en jeu. Cette distance sera réduite à sa portion congrue en 1997, avec un ballon qui a simplement besoin de bouger.

23 En 1891, seules trois fautes : « crocheter ou tenir un joueur adverse, ou délibérément manier le ballon à l'intérieur des 12 yards » permettent d’accorder au camp adverse un penalty. 266

La durée d'un match (loi VII) est prolongée à la mi-temps, à la fin du match pour donner ou recommencer un coup de pied réparation. Dans ce cas le but est validé si le ballon a franchi entièrement la ligne de but ; soit directement à partir d'un coup de pied de réparation, soit après avoir rebondi contre le montant de but ou la barre transversale ou, après avoir été touché ou joué par le gardien. Le match se termine aussitôt après la décision de l’arbitre d’accorder ou non ce but.

10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Le coup de pied de réparation au football est comparable au lancer franc du basket-ball, à la pénalité face au poteau du rugby, au penalty du handball et au shoot-out du hockey. Ces différents « penaltys » sanctionnent en priorité des fautes commises sur un joueur adverse engagé dans une action de marque à proximité de la cible adverse, mais également d’autres comportements comme le jeu défensif dans la zone au handball. Comme au football, il existe un endroit précis sur le terrain pour exécuter le lancer franc ou le penalty du handball. Il s’agit plutôt d’une ligne au basket-ball, la ligne de lancer franc qui peut être comparée à la ligne des 12 yards du XIX e siècle au football, avant l’apparition du point de penalty. Au handball, lors du penalty le gardien peut s’avancer jusqu’au « point de 4 mètres ». Cette action était possible au football à l’origine en 1891, mais depuis le début du XX e siècle le gardien est condamné à rester sur sa ligne de but jusqu’au moment de la frappe. En rugby, pour la pénalité face au poteau, comme au basket-ball, l’absence de gardien de but supprime cette dimension duelle. Le joueur se retrouve simplement, dans une habileté fermée, face à une cible avec une action motrice à réaliser en lançant le ballon ou en le bottant.

Synthèse Cette phase de jeu au football est un véritable duel, symptômatisé par le roman de Peter Handke « L'angoisse du gardien de but au moment du penalty » (1982), et analysé par Eric Dugas 24 en 2010 du point de vue de la métacommunication motrice. La situation est vécue très différemment par les deux protagonistes. Selon Vladimir Dimitrijevic « le joueur ne sait

24 Dugas, E. (2010). Tactiques corporelles et stratégie motrices au cours de duels sportifs in Revue STAPS. Bruxelles, Ed de Boeck Université, 90, pp. 25-35. 267 plus où tirer, il lui semble que le gardien est partout, alors que le gardien, lui, a l'impression de se trouver dans un vacuum, d'être partout vulnérable »25 . Cette loi est incroyablement discutée comme le montre le tableau des statistiques. En effet le Board a abordé cette question 82 fois au cours de ses 125 réunions annuelles. Cela s’explique, car le coup de pied de réparation, sanction technique suprême, peut faire basculer le résultat d’un match. Cette situation de duel est de plus en plus réglementée concernant la position et les possibilités d’actions des acteurs. Le penalty est apparu en 1891, et depuis cette date il n’a jamais été remis en question, dans un sport où le but de pénalité n’existe pas. L’exécution se déroulait au XIX e siècle de la ligne des 12 yards et depuis 1902 précisément d’un point de penalty. A la même date, la zone d’application des fautes sanctionnées par un penalty s’est agrandie avec la création de la surface de réparation, délimitée par des lignes situées à 18 yards de la ligne de but et de chaque poteau de but. Les perspectives vont dans le sens d’un nouvel agrandissement de la surface de réparation. Ce rectangle peut se déformer dans les deux sens. La première solution envisage de prolonger la surface jusqu’aux lignes de touche ; cette bande sur toute la largeur du terrain, ressemble à celle des 12 yards du XIX e siècle, avec la possibilité de sanctionner les fautes prés du point de corner par exemple. La seconde solution vise à repousser la ligne parallèle à la ligne de but à 25 yards, pour sanctionner en priorité les fautes actuellement commises dans l’axe du but. Ces deux solutions peuvent être combinées avec le tracer d’une ligne aux 25 yards, ligne déjà proposée pour réduire la zone d’application du hors-jeu. Le football s’est déjà inspiré d’un autre sport collectif avec le shoot-out du hockey adopté par la ligue professionnelle américaine dans les années 1970. Il est aussi possible d’envisager, comme au basket-ball que des fautes en dehors de la surface de réparation soient sanctionnées d’un coup de pied de réparation. Notamment si cette faute empêche une occasion manifeste de marquer un but, comme le fait de stopper la course d’un attaquant qui file au but.

25 Dimitrijevic, V. (2006). La vie est un ballon rond. Paris, La table ronde, p. 105. 268

1 Chapitre 15 Loi XV : La rentrée de touche ______

LE DEMI AILE. - ….Tu sais que d'ordinaire, quand on fait une rentrée en touche, on feint de lancer la balle à un de ses coéquipiers, de façon à concentrer sur lui l'attention de l'adversaire, et, vivement, on sert à un autre qui est démarqué. C'est un des poncifs -un peu puérils- de la tactique. Alors, moi, je lève la balle, fixe dans les yeux Beyssac et puis ... la lance à Beyssac. Quel désordre chez les Lions Rouges ! Ils avaient marqué tout le monde sauf lui. Henri De Montherlant 2

1. Loi actuelle

Si un joueur sort le ballon du terrain, sur les côtés du champ de jeu, l’équipe adverse bénéficie d’une rentrée de touche. L’exécutant est tenu de faire face au terrain, d’avoir, au moins partiellement les deux pieds, soit sur la ligne de touche soit sur la bande de terrain extérieure à cette ligne, de tenir le ballon des deux mains et de le lancer depuis la nuque et par-dessus la tête.

2. Principes de cette loi

La rentrée de touche est l’une des procédures de reprise de jeu. C’est le seul moment où les joueurs sont autorisés, et ont l’obligation de jouer avec les mains. Quels que soient les événements la reprise se fera obligatoirement par ce moyen. La touche peut changer de camp, si l’arbitre estime que la touche n’est, soit pas réalisée correctement, soit exécutée d’un point autre que celui où le ballon est sorti.

3. Historique de la loi

Le lancer de la balle à la main apparait avec la première codification de la Football Association en 1863 3. L’article 5 précise : « Quand la balle est sortie en touche, le premier

1 Law XV – Throw-in. 2 Montherlant, H. (1954), op. cit., p. 110. 3 Cf. annexe n°65, p. 167, Law 5. 269 joueur qui la touche doit la lancer pour la remettre en jeu en se plaçant sur la ligne, perpendiculaire à celle-ci, à l'endroit même où la balle est sortie ». Entre 1863 et 1973 il semble que le jeu se poursuive en dehors du champ de jeu. En fait c’est le premier joueur qui se saisit du ballon, hors du champ de jeu qui bénéficie de la touche. A l’époque, la touche ressemble à celle du Football Rugby, le joueur lance le ballon obligatoirement à angle droit avec la ligne du bord du terrain. Le ballon pouvait être lancé à une main ou à deux mains. A partir de 1882, la remise en jeu de la touche se fait uniquement à deux mains 4. Cette règle apparait dans les comptes rendus du Board en 1889, avec la possibilité nouvelle d’envoyer le ballon dans une direction quelconque. Le règlement ne précise pas quel joueur de l’équipe exécute la touche, mais Tunmer et Fraysse 5 en 1897 nous révèlent que dans la pratique ce rôle semblait réservé au joueur le plus ancien !

4. Transformations de la loi décidées par le Board

La sortie du ballon est conditionnée par la ligne appelée ligne de bord ( boundary line ) Le règlement distingue les lignes de touche ( touch line ), et les lignes de but (goal-line). Le Board décide en 1888, que le ballon dépassant ces lignes, soit à terre, soit en l'air, sera hors du jeu. Le lieu de la remise en touche est déterminé par l’endroit exact de la sortie du ballon. Il est indiqué soit par l’arbitre assistant, soit par l’arbitre qui vient se placer à hauteur, et montre de la sorte au joueur l’endroit de la remise en jeu. A partir de 1987 6, le Board considère qu’une touche jouée de n’importe quel endroit autre que le point de sortie du ballon au-delà de la ligne de touche est une mauvaise touche. Il n’est plus possible de remettre en jeu de derrière la main courante par exemple, car depuis 1997, une touche ne peut pas être réalisée à plus d’un mètre en dehors de la ligne de touche. Le lanceur doit obligatoirement faire face au terrain depuis 1895 7. Quand le lancer s’effectuait à angle droit, le joueur était réellement face au terrain. A partir de 1889, où il pouvait lancer dans n’importe quelle direction, il est possible de penser qu’il se tournait souvent en direction de l’envoi. Il serait plus exact de parler d’un joueur orienté vers le terrain, c'est-à-dire avec une interdiction de tourner le dos au terrain pour la remise en jeu. Il

4 Bédarieux, L. (2008). Le Foot de Papa. Terres éditions, p. 27. 5 Tunmer, N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit. 6 AGM of 1987:Propoal of FA adopted : « A throw-in taken from any position other than the point where the ball passed over the touch-line shall be considered to have been improperly throw in ». (Nb: une première proposition de la FA en 1984 avait été retirée précisant qu’il s’agissait d’une touche incorrecte) 7 AGM of 1895: « The player throwing the ball must stand o the touch-line, facing the field of play… ». 270 sera précisé en 1960 « faire face au terrain avec une partie du corps » : phrase encore plus énigmatique qui rend possible une dissociation de la tête et des trains inférieur et supérieur. A la fin du XIX e siècle la liberté d’exécution est grande, les joueurs peuvent courir, sauter. Une première proposition, souhaitant « que le joueur se tienne sur la ligne de touche et ne doit pas être autorisé à courir » est rejetée en 1895 8. Si le règlement oblige dès 1925, le joueur à se tenir debout il faut attendre 1932 9, pour voir stipuler que les deux pieds doivent toucher le sol. A partir de cette date, le joueur ne peut plus ni sauter, ni courir, ni faire la touche en marchant. Dans la pratique aujourd’hui le lanceur exécute la touche les deux pieds au sol, et doit donc marquer au minimum un bref temps d’arrêt sur ses deux appuis, avant de rentrer sur le terrain. Le règlement ne précise rien sur la prise d’élan, qui est déterminante pour la longueur du jet de ballon. Dans les années 1980 nous avons vu apparaître dans la ligue américaine un élan type « saut de mains de gymnastique », avec le ballon dans les mains. L’énergie emmagasinée permettait de faire des touches très longues, ressemblant au coup de pied du corner. La rotation était telle que le joueur pour conserver ses deux appuis au sol, se laissait tomber vers l’avant sur les mains. Cette motricité spectaculaire employée pour la prise d’élan, a apparemment aujourd’hui complètement disparu. Les pieds du lanceur sont l’objet d’une attention particulière du Board. Entre 1896 et 1925, n'importe quelle partie de ses deux pieds doit toucher la ligne quand il lance la balle. Cette contrainte disparait en 1925, « le joueur rejetant le ballon doit se tenir debout, les deux pieds touchant le sol, sur le terrain situé à l'extérieur de la ligne de touche ». Le fait de ne plus être obligé de se positionner précisément sur la ligne permet au joueur d’avoir des gestes plus libres, une rapidité d'action plus grande. Pour Gabriel Hanot 10 , avec cette exécution rendue plus simple « le législateur a voulu marquer nettement l'avantage de l'équipe qui bénéficie de la remise en jeu du ballon ». En 1926, le Board insistera sur l'importance pour le joueur qui réalise la touche de se tenir debout nettement en dehors de la ligne de touche. L’obligation de se tenir sur la ligne, se transforme en interdiction de toucher la ligne. Cette véritable rupture semble logique, si l’on considère que les lignes font partie du terrain et qu’un joueur ne peut toucher le ballon avec les mains dans le champ de jeu. Mais le Board modifie une nouvelle fois cette loi en 1936, sous l’impulsion de la FA : le lanceur doit « avoir une partie quelconque de chaque pied sur la ligne de touche ou sur le terrain à

8 Proposition de la Football Association rejetée par le Board en 1895. 9 Proposition de la Football Association adoptée par le Board en 1932. 10 Hanot, G. (1925) . La modification de la fameuse règle du hors-jeu va transformer profondément le sport du football, dont la saison commence. Le Miroir des Sports, 279, le mercredi 16 septembre 1925. 271 l'extérieur de la ligne de touche ». Une tolérance qui va dans le sens d’une diminution des infractions possibles et d’une accélération du jeu. Le règlement précise progressivement les conditions d’un lancer valide. La direction de l’envoi se modifie, l’obligation d’envoyer le ballon à angle droit disparait en 1889, au profit d’un envoi dans une direction quelconque. Cette modification n’est pas adoptée d’emblée. En effet dans la version de 1897 de l’ouvrage de Tunmer & Fraysse 11 , qui fait référence en France le lancer « dans le champ à angle droit » reste d’actualité. Les lois universelles vont se mettre progressivement en place, mais à la fin du XIX e siècle il existe un décalage entre le règlement colporté en France et celui prôné par le Board. La manière de lancer se précise progressivement. A partir de 1882 12 , la remise en jeu de la touche se fait uniquement à deux mains. Le geste est ensuite de plus en plus codifié ; d’abord en 1936 13 l’obligation de lancer le ballon par-dessus la tête ; puis en 1960 14 d’utiliser ses deux mains ensemble et enfin en 1965 15 de « lancer le ballon de derrière et par-dessus la tête ». Pour les remises en jeu, il est important de déterminer le moment où le ballon est de nouveau en jeu. Selon Tunmer et Fraysse 16 , « Les autres joueurs doivent attendre pour le jouer, que le ballon soit tombé à terre ». Cette interprétation étonnante semble trouver une explication lors de la réunion du Board de 1896, où il est précisé que dans la loi 5 le « terrain de jeu » est remplacé par « le sol ». Aucune autre précision n’est donnée, et jamais il n’est possible de confirmer cette hypothèse. Cette notion d’attendre que le « ballon soit tombé par terre » n’apparait nulle part dans les comptes rendus du Board. Il existe donc une incertitude sur cette pratique au XIXesiècle. Classiquement il semble plus juste d’affirmer que le ballon est en jeu dès l'instant où il aura été rejeté dans le jeu, comme le précise le règlement du Board de 1921. Une idée identique s’exprime tout au long du XX e siècle, par un ballon en jeu « aussitôt après avoir croisé la ligne de touche » et après 1965 par « aussitôt après avoir pénétré dans le champ de jeu ». Dès le ballon en jeu, il peut être joué par n’importe quel joueur sauf le lanceur. Jusqu’en 1934 celui-ci ne peut « reprendre part au jeu » jusqu'à ce que la ballon ait été joué par un autre joueur. Le règlement oblige donc le lanceur à attendre au bord du terrain !

11 Tunmer, N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit. : « Quand le ballon sort des lignes de touche, un joueur appartenant au camp opposé à celui qui l'a envoyé en dehors des limites, le remet en jeu en le lançant dans le champ à angle droit du point où il a passé la ligne de touche ». 12 Bédarieux, L. (2008), op. cit. 13 Proposition de la FA adoptée par le Board en 1936. 14 Proposition de la FA adoptée par le Board en 1960. 15 Proposition étudiée en 1964 et adoptée en 1965. 16 Tunmer, N.G. & Fraysse, E. (1897), op. cit. 272

Les infractions devaient être nombreuses et difficiles à apprécier par l’arbitre. En 1934 le Board modifie la loi et empêche juste le lanceur de « rejouer le ballon » avant un autre joueur. A l’origine il était possible au lanceur de marquer un but de manière directe ou indirecte. Le Board précise dès sa réunion de 1889 que « Le joueur qui le jettera ne pourra reprendre part au jeu jusqu'à ce que le ballon soit joué par un autre joueur ». Il n’est donc plus possible de se faire la touche pour soi-même et d’aller marquer un but. Il deviendra impossible de marquer directement sur une touche en 1898.

5. Sanctions liées à cette loi

En 1891, l’article 16 17 est ajouté aux lois du jeu. Si une infraction est commise lors de la touche (article 5) un coup de pied franc ( free-kick) doit être accordé au camp opposé, au point où l'infraction a été commise. La Football Association propose dès 1910 qu’en cas d’infraction la touche revienne au camp adverse. Suite à une proposition de l’Irish FA cette règle sera adoptée en 1931 mais uniquement pour une infraction au lancer. Il existe pour le lanceur plusieurs types d’infractions concernant le lancer du ballon (lancer du mauvais endroit, lancer les pieds dans le terrain, lancer dissymétrique, lâcher le ballon trop tard devant le front…) ou l’enchainement des actions suite au lancer. L’infraction pour le lanceur, consistant à retoucher le ballon avant un autre joueur, reste sanctionnée par un coup franc indirect. La FA Wales avait fait en 1975 la proposition de transformer tous les coups francs indirects en coups francs directs. Ce souci de simplification n’a pas eu de succès auprès du Board . La décision numéro 1 du Board en 1960 règle le problème du lanceur qui joue le ballon une seconde fois avec la main dans le terrain de jeu avant qu'il ait été touché ou joué par un autre joueur. Dans ce cas l'arbitre accordera un coup franc direct. Les autres infractions concernent les adversaires. Le Board a adopté, sur une proposition de la FA, en 1966 18 une règle interdisant aux adversaires de danser ou de gesticuler dans le but de distraire ou de gêner le joueur effectuant la rentrée de touche. Dans ce cas, ils se rendent coupables de conduite inconvenante et doivent recevoir un

17 Réunion du Board de 1891 : Nouvel Art.16 : Pour toute infraction aux articles 2, 5, 6, 8, 9 et 10 un coup de pied franc ( free-kick) doit être accordé au camp opposé, au point où l'infraction a été commise. 18 AGM of 1966 : Proposal by the Scottish FA : Law 15, New Decision n°3 adopted: « If, when a throw-in is being taken, any of the opposing players dance about or gesticulate in a way calculated to distract or impede the thrower, it shall be deemed ungentlemanly conduct, for which the offender(s) shall be cautioned ». 273 avertissement. L’adversaire sautait devant le lanceur, qui volontairement ou non pouvait lui envoyer le ballon en pleine face. Dans un souci de sécurité cette règle sera renforcée une première fois en 1997, en ne permettant plus aux joueurs de rester debout juste devant le joueur exécutant la rentrée en jeu comme pour le harceler, puis en 2005 avec l’interdiction pour tout adversaire de se situer à moins de deux mètres du lanceur. Cette modification limite les incidents et favorise plus généralement un gain de temps de jeu effectif, et une meilleure réalisation technique, car les joueurs ne sont plus perturbés pour réaliser la touche.

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

En 1930 le Pays de Galles, fait la proposition du « penalty throw », qui pénaliserait le joueur qui commettait une infraction à la loi 5, un lancer non conforme par exemple. L’équipe adverse bénéficie d’un coup franc avec le ballon posé sur la ligne de touche. Il était stipulé que les adversaires ne devaient pas approcher à moins de 15 yards de la ligne de touche, ou une telle autre distance qui permette l’accord du Board, jusqu’à ce que la balle ait été lancée. Cette subtile proposition qui laissait une part d’initiative au Board a été retirée.

7. Expérimentations

Remplacer le lancer à la main (throw-in ) par un coup de pied (kick-in ) est une idée récurrente. Deux périodes d’expérimentations sont autorisées par le Board : l’une de 1976 à 1979 dans certains tournois de jeunes, notamment au Tournoi Européen Juniors de Monaco, et l’autre de 1992 à 1998 avec les demandes des fédérations suisse, finlandaise et belge. Le processus de cette seconde période est intéressant à détailler. Le Board accorde dans un premier temps l’autorisation de l’expérimentation aux fédérations suisse et finlandaise, sous la responsabilité de la FIFA. L’expérience doit se dérouler obligatoirement dans des compétitions organisées par la FIFA ou par une ou plusieurs confédérations. Dans un second temps, le Board autorise la FIFA à poursuivre l’expérimentation de la touche au pied (Kick- in) dans une ou des ligues professionnelles appropriées. L’expérimentation se déroulera finalement en Belgique en seconde division entre 1994 et 1998. Une dernière année d’expérimentation est accordée par le Board en 1998, avec une demande d’évaluation définitive pour la prochaine Annual Business Meeting en 1999. L’expérimentation se termine donc en 1999, aucune amélioration majeure n’ayant été constatée. Le Board décide qu’il

274 n’accordera plus d’autorisation concernant cette expérimentation et qu'aucun changement ne sera mis en place dans les lois du jeu. Le Board reste le gardien des lois du jeu, libre de les modifier, d’accepter ou non les expérimentations. Une nouvelle tendance se dessine au sujet des expérimentations qui doivent être condensées dans le temps avec une durée idéale de deux ans, avant une prise de décision ferme et définitive.

8. Analyse systémique.

La rentrée de touche (Loi XV) est engendrée par le fait que le ballon soit sorti de l’aire de jeu. Cette loi est liée aux dimensions du terrain (Loi I), et au fait que le ballon soit considéré en jeu ou non (Loi VIII). Pour juger la touche, Ernest Weber confirme que le juge de touche (Loi VI) joue un rôle déterminant « Dès que le ballon a passé entièrement la ligne, le juge de touche (linesman) doit lever son drapeau, dire à qui appartient la remise en jeu et indiquer exactement à quel point elle doit être faite »19 . Le déplacement de l’arbitre sur le bord du terrain s’arrête à la ligne médiane, l’autre partie de la ligne de touche est gérée, grâce au système de contrôle en diagonale, par l’arbitre. Ce dernier vient en général se positionner à la hauteur de l’endroit où effectuer la rentrée de touche. Depuis la fin du XIX e il n’est plus possible de marquer (loi X) sur cette remise en jeu. Cette loi est également en interaction avec la loi du hors-jeu (loi XI). Avant 1925, un joueur pouvait être sanctionné pour sa position de hors-jeu suite à une touche d’un de ses coéquipiers. Le partenaire devait vérifier qu'il y ait au minimum trois joueurs du camp adverse plus rapprochés que lui de leur ligne de but. En 1925, le Board décide que sur les touches les joueurs hors-jeu ne seraient plus sanctionnés. La même année il officialise le passage de la règle de « trois joueurs à deux joueurs ».

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Dans tous les sports collectifs, si un joueur sort le ballon du terrain au-delà de la ligne de touche, l’équipe adverse récupère le ballon et réalise une remise en jeu. La limite du terrain est identique au football et au handball, la ligne représente une sorte de mur infranchissable

19 Weber, E. (1905), op.cit., p. 168. 275 pour le ballon. Au basket, le ballon est considéré comme sorti du terrain si le porteur de balle, ou la balle, touche le sol au-delà des limites du terrain. Au rugby, un ballon tenu, est hors du jeu, si le porteur ou un joueur du regroupement pose le pied sur ou au-delà de ligne de touche. Le ballon libre est hors du jeu s’il franchit la ligne de touche, même en l'air. Le règlement de 1923 20 , précisait déjà que le ballon était en touche, s'il franchissait la ligne de touche même en l'air ou s'il venait frapper un des poteaux de touche. Les contraintes de la remise en jeu semblent plus fortes au rugby : les joueurs des deux camps, en nombre égal, doivent s’aligner en deux colonnes face au lanceur, pour se disputer un ballon lancé perpendiculairement au terrain. Au contraire, elles semblent plus réduites au handball et au basket-ball. La touche peut être envoyée dans n’importe quelle direction comme au football, mais le lancer est beaucoup plus libre : il n’est pas indispensable de lancer à deux mains ni de positionner le ballon au dessus et derrière la tête. La pression autorisée est proportionnelle aux contraintes du lancer. Les adversaires se situent au moins à cinq mètres du lanceur au rugby, et à deux mètres au football. L’équipe qui bénéficie de la touche a généralement la possibilité de remettre le ballon en jeu très rapidement. En rugby, le plus souvent, le lanceur attend l’alignement des joueurs et l’ordre de l’arbitre. Au basket, l’accélération de cette remise en jeu est impossible. La table de marque arrête le chronomètre et le ballon doit repasser par les mains de l’arbitre, avant d’être lancé par un joueur. Pour une infraction lors du lancer, le ballon change de mains au football ; par contre au rugby, lors d'une remise en jeu incorrecte, le camp adverse bénéficiera d’une mêlée à 10 mètres.

Synthèse La rentrée en touche du football, réalisée perpendiculairement au terrain au XIX e siècle, illustre le fait que le rugby et le football sont deux sports issus du même jeu souche. Le football s’est libéré et démarqué de ce type de lancer, en autorisant un envoi dans n’importe quelle direction en 1889. Le Board a progressivement codifié une remise en jeu spécifique à l’activité. Il est possible de mettre en évidence une logique d’accélération de la procédure, en étant moins pointilleux sur la position des pieds du joueur et avec l’interdiction de venir gêner le

20 Saint-Chaffray, E. & Dedet, L. (1999), op. cit., p. 107. 276 lanceur. Au haut niveau, l’utilisation de plusieurs ballons, redonnés rapidement par les ramasseurs de balle, poursuit également cet objectif. Quand il est demandé à Arsène Wenger en 2009, d'indiquer une loi qui pourrait être modifiée dans le football, il évoque le fait de jouer les touches au pied. Des expérimentations dans ce sens ont déjà été menées dans les années 1970 et 1990. Cette évolution permettrait de transformer les touches offensives en de véritables corners, et offrirait des opportunités supplémentaires de marquage. Cette perspective semble en adéquation avec le désir du Board de promouvoir un jeu plus prolifique en buts.

277

1 Chapitre 16 Loi XVI : Coup de pied de but ______

« Si sur un coup de pied de but le vent ramenant le ballon dans les filets, l’arbitre ne devrait pas accorder un but, mais seulement un coup de pied de coin ». Ernest Weber (1905) 2

1. Loi actuelle

Le coup de pied de but appartient à la catégorie des remises en jeu. Quand un joueur, en tirant au but, par exemple, fait entièrement franchir la ligne de but au ballon, que ce soit à terre ou en l’air, sans qu’un but ait été marqué conformément à la Loi X, alors « il y a sortie de but ». L’équipe adverse bénéficie de la remise en jeu, qui se fait par un coup de pied de but. Un joueur pose le ballon n’importe où dans la surface de but, il botte la balle et doit nécessairement l’envoyer au-delà de la limite de la surface de réparation pour que le ballon soit considéré en jeu.

2. Principes de cette loi

Le terrain de football est parfaitement délimité par les lignes extérieures. Lorsqu’un joueur sort le ballon du terrain, le jeu est arrêté. Le ballon est systématiquement redonné à l’équipe adverse. La remise en jeu s’exécute sans la pression défensive, car les opposants sont repoussés hors de la surface de réparation

3. Historique de la loi

Entre 1863 et 1873, il semble que le jeu se poursuive en dehors du champ de jeu. La remise en jeu ne s’effectue pas nécessairement par l’équipe opposée à celle qui a sorti le ballon. En fait, si la balle sort derrière la ligne de but, le premier joueur qui se saisit du ballon hors du champ de jeu bénéficie de la remise en jeu. Il existe donc deux cas de figure, soit le

1 Law XVI – Goal-kick. 2 Weber, E. (1905), op. cit., p. 170. 278 joueur appartient à l’équipe qui attaquait la cible, soit à l’équipe adverse qui défendait le but. Dans ce dernier cas, l’article 7, des tables de loi de 1863 3 précise que ce joueur bénéficie d’un coup franc, tiré de la ligne de but, dans l'axe du point où la balle fut touchée. Ce dégagement qui se joue sur la ligne de but peut être assimilé à une première version du coup de pied de but, non confiné à une surface de but qui n’existe pas encore. Il faut imaginer que ce dégagement puisse se réaliser près du point de corner. La possibilité de relancer dans une zone à partir du poteau de but, date de 1873. En effet, l’article 7 de la FA précise que « Lorsque le ballon est envoyé derrière la ligne de but par l'un des adversaires, il sera relancé du pied, par un joueur quelconque à qui appartient la ligne de but derrière lequel il est sorti, qu'il exécutera à l'intérieur des 6 yards à partir du poteau de but le plus proche. Aucun autre joueur ne sera autorisé à l'intérieur d'une zone de 6 yards du ballon jusqu'à ce que le ballon soit envoyé ». Le coup de pied de but s’inscrit dans une surface délimitée et tracée sur le terrain de jeu. En se référant à Stanley Rous 4 il est possible de proposer l’apparition d’une première surface de forme arrondie en 1891. Le coup de pied de but apparait pour la première fois dans les comptes rendus du Board en 1888. A partir de cette date, les adversaires du botteur ne sont plus autorisés à rester dans les 6 yards au moment du coup de pied de dégagement.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

La première transformation concerne la place du ballon lors du coup de pied de but. Avant 1888, le ballon est posé à l'intérieur des 6 yards à partir du poteau de but le plus proche. La loi précisera en 1891 dans l’article 7 qu’il se tire dans les 6 yards du côté « du poteau le plus proche du point où le ballon a quitté le terrain »5. Cette règle ne semble pas appliquée, car la FA fait en 1895 la proposition suivante : « Le ballon est rejeté d'un point n'excédant pas les 6 yards ». Cette proposition ne changeant rien à la règle est donc rejetée par le Board. La référence du poteau de but est abandonnée en 1901 au profit de la moitié de la surface de but. Le ballon sera dorénavant placé à l'intérieur de celle-ci, la plus proche du point de sortie. Souvent au XX e siècle, le ballon était exactement posé à l’intersection des deux lignes délimitant la surface de but. Cette pratique, qui présentait l’inconvénient d’utiliser

3 14 Laws adopted by the football Association in december 1863: Law 7 « In case the ball goes behind the goal line, if a player on the side to whom the goal belongs first touches the ball, one of his side shall be entitled to a free kick from the goal line at the point opposite the place where the ball shall be touched ». 4 Rous, S & Ford, D. (1974), op. cit., p. 142. 5 AGM of 1891 : « …goalpost nearest to the point where the ball left f the field of play ». 279 abondamment la chaux, n’est pas confirmée par l’étude des archives du Board. De la même manière le fait d’installer le ballon sur la ligne de but, n’est pas inscrit dans le règlement. Le botteur le fait pour s’éloigner au maximum de sa ligne de but, et il en a le droit car cette ligne fait partie de la surface de but. Pour des raisons de simplification et pour lutter contre des manœuvres de perte de temps, depuis 1992, le ballon peut être placé « à un point quelconque » de la surface de but. La seconde transformation questionne le moment où le ballon est en jeu. En général dans les lois du jeu, le ballon est en jeu quand il est joué, c'est-à-dire depuis 1895 quand il a parcouru la distance de sa circonférence, puis à partir de 1997 simplement quand il a été botté et a bougé. Mais à partir de 1936 le ballon doit être botté directement en dehors de la surface de réparation pour être en jeu ; dans le cas contraire le coup est à recommencer. En 1969, il a été évoqué le cas où lors d'un coup de pied de but le ballon sort de la surface mais revient en arrière avec un vent fort. Si un joueur de l’équipe bénéficiant du coup, autre que le gardien, prend le ballon avec les mains dans la surface de réparation, le Board a précisé que l’arbitre devait siffler penalty ! Confirmant ainsi le fait que le ballon est en jeu dès qu’il est hors des 18 yards. La troisième transformation concerne la distance entre le coup de pied de but et les adversaires. Il est possible d’imaginer que le tireur puisse être gêné par un adversaire pour dégager le ballon. En 1888, le Bord décide d’interdire leur présence dans une zone de 6 yards autour du ballon jusqu'à ce qu’il soit envoyé. Les adversaires vont progressivement être repoussés par le règlement, d’abord à 10 yards du ballon en 1921, puis en dehors de la surface de réparation en 1948. Les dimensions de la surface de but (6 yards) et de la surface de réparation (18 yards) imposent donc aux adversaires, à partir de cette date, d’être au minimum à 12 yards du ballon. La dernière transformation concerne le droit de marquer d’un coup de pied de but, donc d’envoyer le ballon dans un but situé au moins à 90 mètres! Pendant 134 ans il était impossible de marquer directement sur un coup de pied de but, cela devient possible avec la révision des lois du jeu de 1997. A l’origine le droit de marquer sur un coup de pied de but n’est pas précisé par la loi. Le coup de pied de but est assimilé à un coup franc, sur lequel il est impossible de marquer jusqu’en 1903. A partir de cette date un but peut être marqué directement sur un coup franc accordé pour l'une des fautes indiquées à l'article 9 (concernant la charge et les fautes de main), mais non dans un autre cas. Il n’est donc, toujours pas possible de marquer directement. En revanche, à cette époque, un joueur peut jouer tout seul un coup de pied de but. Il peut se faire une passe à lui-même, rejouer le ballon, le conduire en

280 remontant le terrain et éventuellement aller marquer. En effet, la loi précisera seulement en 1924 que le joueur qui réalise un coup de pied de but ne peut pas retoucher le ballon avant qu’il ait été joué par un autre joueur.

5. Décisions du Board liées à cette loi

Le règlement ne précise pas l’obligation de jouer le ballon vers l’avant. Au début du XX e siècle les joueurs adverses pouvaient se tenir à 6 yards du botteur et le ballon n’était pas tenu d’être envoyé au delà de la surface de réparation. Ernest Weber décrit une pratique utilisée en 1905 6 : le botteur donne le ballon à un coéquipier situé derrière lui. Cette tactique permettait de repousser subitement les adversaires à 9 ou 10 yards du ballon, et facilitait donc le dégagement du nouveau porteur de balle. Dans la même logique, le joueur pouvait directement passer le ballon à son propre gardien afin qu'il puisse par la suite le relancer dans le jeu. A partir de 1936, cette pratique n’est plus permise, le ballon doit être envoyé directement au-delà de la surface de réparation. Cette interdiction est étendue en 1937, suite à une proposition de la FA, au coup franc joué à l'intérieur de sa propre surface de réparation. S’il n'est pas envoyé au delà de la surface de réparation, le coup sera recommencé.

6. Sanctions liées à cette loi

Depuis 1939, suite à une proposition de la FA, il n’est plus possible pour un joueur de rejouer le ballon après que celui-ci soit sorti de la surface de réparation, et avant qu'il ait été touché ou joué par un autre joueur. Ce fait est sanctionné par un coup franc indirect accordé à l'équipe adverse, à l'endroit où l'infraction a été commise. La FA Wales fait la proposition en 1975, rejetée par le Board , de pénaliser cette action par un coup franc direct.

7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board.

Dans la pratique, comme sur tous les coups de pied arrêtés, le ballon doit être à l’arrêt au moment du tir. Le Board a estimé inutile de le préciser et de surcharger cette loi, suite à une proposition de la FA en 1987.

6 Weber, E. (1905), op. cit., p. 170. 281

8. Analyse systémique.

Le coup de pied de but est directement lié au fait que le ballon soit hors du jeu (Loi IX). Cette remise en jeu est la conséquence d’une sortie du ballon derrière la ligne de but. Il suffit pour un attaquant d’envoyer le ballon ou de tirer à côté de la cible et que le ballon franchisse complètement la ligne de but (Loi I : le terrain). L’équipe qui défendait récupère le bénéfice du ballon pour jouer le coup de pied de but. Sur certaines remises en jeu le but direct n’est pas validé. Le but contre le camp adverse est tout simplement refusé et donne droit à un coup de pied de but. En 1967 l’Écosse avait proposé que « sur un engagement, un coup de pied de but, un coup franc indirect ou une touche, le ballon aura entièrement dépassé la ligne de but, soit à terre, soit en l'air, entre les poteaux de but, sans avoir été joué ou touché par un autre joueur, le jeu redémarrera par un coup de pied de but ». Cela concernait donc les reprises de jeu sur lesquelles un but direct n’était pas valable. Depuis 1997, sur un coup de pied de but, il est possible de marquer directement (Loi X), mais uniquement contre l'équipe adverse. Si un joueur, maladroit ou colérique, marque contre son propre camp, le but n’est pas validé et l’équipe adverse bénéficie d’un corner (Loi XVII). Cette loi est également en relation avec le hors-jeu (Loi XII), car le coup de pied de but est une exception à la règle du hors-jeu depuis 1920.

9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Au basket-ball cette remise en jeu s’effectue derrière la ligne de sortie sous le panier. Il n’y a aucune obligation ni pour les adversaires d’être à une certaine distance, ni pour le lanceur d’envoyer le ballon au delà d’une certaine zone. Au handball, cette remise est faite par le gardien d’un endroit quelconque dans sa « zone de 6 mètres ». Dans les gymnases, le gardien a souvent la possibilité de récupérer très vite le ballon, et peut se révéler le premier contre attaquant de son équipe : un passeur décisif si l’exécution de la relance est précise et rapide, ou même un butteur car sur ce jet, le but est validé. Au rugby, la relance devant son but est permise, dans deux cas : si les adversaires sortent la balle du champ de jeu en « ballon mort » ou si un défenseur aplatit le ballon derrière sa ligne de but à condition que ce soit l’équipe adverse qui ait amené le ballon dans cette

282 zone. La remise en jeu se fait soit par un drop, soit par un coup de pied pour soi. Il est donc possible comme en football jusqu’en 1939, de jouer tout seul et de partir vers la zone d’en but adverse.

Synthèse La transformation de la loi concernant le coup de pied au but, illustre le passage du jeu au sport. L’impossibilité de se disputer le ballon hors des limites du terrain de jeu, favorise la disparition de l’aléatoire. Lorsqu’un ballon sort du terrain, la remise en jeu revient automatiquement à l’équipe adverse. Avant la création de la surface de but, le coup de pied au but se tirait sur la ligne de but. Il est aujourd’hui possible de botter de n’importe quel point de cette surface avec l’obligation de propulser le ballon au delà de la surface de réparation. La possibilité de rejouer soi-même le ballon, disparait en 1924. Avant cette date il était permis en théorie de conduire le ballon jusqu’à la cible adverse. Depuis 1997, comme sur l’engagement il est possible de marquer directement… mais nous n’avons pas connaissance d’une telle réalisation motrice qui nécessite un coup de pied de près de 100 mètres. Cette remise est de plus en plus réalisée par le gardien de but. Cela présente l’avantage de permettre à l’avant dernier défenseur, référent pour la ligne de hors jeu flottante, de remonter dans le terrain. Le coup de pied de but est utilisé soit pour relancer précisément sur un partenaire, soit pour dégager le ballon loin en espérant gagner les duels aériens ou récupérer le ballon suite au renvoi adverse (notion de second ballon).

283

1 Chapitre 17 Loi XVII : Le coup de pied de coin ______

Un coup de pied de coin a lieu dans le cas où le ballon aura été touché en dernier lieu par un joueur du camp dont la ligne de but a été dépassée. Pour faire un coup de pied de coin un joueur du camp adverse place le ballon dans un rayon d'un mètre du piquet de coin le plus rapproché et le lance de façon à ce qu'il tombe devant le but, où ses camarades peuvent alors essayer de le faire rentrer. Edouard Pontié. (1905 2)

1. Loi actuelle

Le coup de pied de coin (corner) est accordé quand le ballon, est touché ou envoyé en dernier lieu par un joueur derrière sa propre ligne de but, que ce soit à terre ou en l’air, sans qu’un but ait été marqué conformément à la loi X. Un joueur de l’équipe adverse, dépose le ballon au sol à l’intérieur de l’arc de cercle de corner, à proximité du piquet de coin le plus rapproché. Les joueurs de l’équipe en défense doivent se tenir au minimum à 10 yards de l’arc de cercle de coin. Le ballon est en jeu dès qu’il est botté ; même s’il n’est pas sorti de l’arc de cercle. Le joueur peut marquer directement sur cette phase de jeu. Il n’a pas la possibilité de retoucher une seconde fois le ballon avant qu’un autre le joue.

2. Principes de cette loi

Le corner est une remise en jeu, qui bénéficie comme dans tous les sports collectifs à l’équipe qui n’a pas sorti le ballon du jeu. Le gardien de but ou les arrières évitent autant que possible d’envoyer le ballon derrière leur propre ligne de but, car le corner offre une réelle opportunité de marquer. Il doit donc être considéré comme une véritable « sanction technique ».

1 Law XVII – Corner-kick. 2 Pontié, E. (1905), op. cit., pp. 162-164. 284

3. Historique de la loi

Entre 1863 et 1873 il semble que le jeu se poursuive en dehors du champ de jeu. Cette pratique illustre le processus de transformation d’un jeu en sport, avec en particulier une délimitation précise des espaces. La remise en jeu ne s’effectue pas systématiquement par l’équipe opposée à celle qui a sorti le ballon. En fait, c’est le premier joueur qui se saisit du ballon, hors du champ de jeu qui en bénéficie. L’article 7 des tables de loi de 18633 stipule que « Si le premier à toucher le ballon est un joueur de l'équipe attaquante, celle-ci aura le droit de tirer au but la balle étant placée à 15 yards (13m62) à l'intérieur du terrain dans l'axe de sa sortie. Dans ce cas tous les joueurs adverses devront se tenir derrière leur ligne de but jusqu'au tir ». Il s’agit donc d’une pénalité comme au rugby, dans un but qui n’est pas rectangulaire. Ce « coup franc » se transforme en coup de pied de coin en 1873. Il est réalisé depuis le coin du terrain, en direction d’une cible qui devient rectangulaire en 1875 avec l'apparition de la barre transversale.

4. Transformations de la loi décidées par le Board

Au XIX e siècle le corner était assimilé à un coup franc. La loi autorise de marquer sur ce genre d’action à partir de 1903, mais uniquement, pour les fautes mentionnées à l’article 9, les futures fautes volontaires. Les deux premières modifications pour le coup de pied de coin, concernent la marque. Depuis l’origine du corner comme sur tous les coups francs, le joueur avait la possibilité de jouer le ballon individuellement, de partir en dribble et de marquer. A partir de 1903 ce droit disparaît, le même joueur ne peut retoucher le ballon jusqu'à ce qu’il ait été rejoué par un autre joueur. La seconde modification concerne la possibilité de marquer directement sur un corner. Suite à une première proposition faite en 1907 par le Pays de Galles, mais refusée par le Board , cette autorisation intervient en 1924. Elle sera remise en question l’année suivante par la proposition, non acceptée, de la Football Association de ne pas accorder les buts marqués directement. Il sera précisé en 1926 que cette marque ne peut se faire que contre le camp adverse.

3 Cf. annexe n°65, p. 167. 285

La troisième transformation concerne la distance entre le point de corner et les adversaires. En 1890 4 la règle précise que les adversaires doivent se situer à au moins 6 yards du ballon. Cette distance est agrandie de 6 à 10 yards en 1913. Nous pouvons noter que la loi précise progressivement le moment où l’adversaire peut s’avancer dans cette zone de 10 yards : quand le ballon est envoyé (1890), quand le ballon est joué (1913), jusqu’à ce que le ballon soit en jeu (2006). Il faut préciser que le ballon est en jeu depuis 1895 5 quand il a parcouru une distance égale à sa circonférence et depuis 1997, dès qu’il est botté et a bougé.

5. Décisions du Board liées à cette loi

Des précisions ont été données par le Board, quant à l’exécution du corner. Par exemple le joueur depuis 1904 6 n’est pas autorisé à enlever le poteau de corner pour jouer le coup de pied de coin. A la Coupe du monde de 1986, lors d’un corner Diego Maradona retire le poteau qui semble le gêner pour tirer. L’arbitre lui fait remettre le poteau de corner. Cette scène est célèbre car le fanion tombe du poteau, et le joueur dans un premier temps le repose juste sur le sommet du poteau. Remettre le tout en ordre a pris un temps considérable sous le sourire de ces deux acteurs. De même la loi stipule en 1890 que « le ballon doit être à l’intérieur d’une zone de un yard », en 1963 « à l’intérieur du quart de cercle » et en 1970 « entièrement à l’intérieur du quart de cercle ». Les joueurs peuvent poser le ballon sur la ligne de l’arc de cercle.

6. Sanctions liées à cette loi

En cas d’infraction du tireur du coup de pied de coin, la loi implique, depuis 1939, d’accorder un coup franc indirect à l'équipe adverse à l'endroit où l'infraction a été commise. Par exemple, le tireur est sanctionné s’il joue consécutivement deux fois de suite le ballon. Si le ballon frappe un poteau de but et revient vers le tireur du coup de pied de coin, le joueur qui a botté le corner n’est pas non plus autorisé à retoucher le ballon.

4 The laws of the game, in Alcock, C.W. (1890). Association Football. London, Georges Beel & sons, York Street, Covent Garden, p. 72 : « In either case no opponent shall be allowed within six yards of the ball until it kicked off ». 5 Réunion du Board de 1895. 6 A.G.M. of 1904 : Decision adopted : «The corner-flag must not be removed when a corner-kick is being taken ». 286

Le fait de ne pas placer le ballon à l’intérieur de l’arc de cercle est un sujet abordé par l’Écosse dès la réunion de 1967. Cette Fédération, accordait un coup franc indirect si le ballon était tiré depuis l’extérieur du quart de cercle. Cette pratique semble conforme à la loi, pourtant le Board réservera sa réponse et ne prendra sa décision… que cinq ans plus tard en 1973 : « Si le ballon n’est pas placé entièrement à l'intérieur du quart de cercle, le corner doit être retiré ». Cette adaptation de la loi semble logique, car elle fait référence à la loi IX sur le ballon en jeu ou hors du jeu et à la loi XII sur les fautes et incorrections. En effet si le ballon n’est pas en jeu, l’arbitre n’a pas la possibilité d’accorder une sanction technique. Il est rappelé aux arbitres que les joueurs de l’équipe en défense doivent se tenir au minimum à 10 yards de l’arc de cercle de coin tant que le ballon n’est pas en jeu. Les arbitres doivent avertir verbalement tout joueur se trouvant à moins de 10 yards avant que le coup de pied de coin ne soit effectué, et sortir un carton jaune s’il ne se met pas à distance réglementaire. Pour cette infraction, depuis 1973, le coup de pied de coin est à recommencer.

7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board

La matérialisation de la distance de 10 yards (9,15m.) à respecter par les joueurs adverses lors du coup de pied de coin, comme sur l’engagement ou le tir du penalty est soumise au Board . Le club de Nottingham Forest et des clubs Écossais proposent en 1973 de tracer un quart d’arc de cercle à 11 yards de chaque poteau de corner. Cet arc de cercle serait donc à 10 yards du quart de cercle existant (à 1 yard du poteau). Cette proposition de modification du tracé du terrain a été renouvelée en 1975 et 1977 par la Scottish FA Cette surcharge du tracé sera refusée. Le Board adoptera en 1995, soit vingt deux ans plus tard, la possibilité de tracer au sol de petites marques à 11 yards des poteaux de corners, à l’extérieur du terrain. Ce processus de modification de la loi est analysé dans les expérimentations du chapitre 1, car elle concerne également le graphisme du terrain de jeu.

8. Expérimentations

Cette expérimentation concerne les « short corners » et s’est déroulée entre 1976 et 1978 notamment au tournoi Européen Juniors de Monaco qui a lieu en novembre. Dans le cas où le corner a été concédé dans la surface de réparation, il est tiré au coin de cette surface

287 avec les adversaires au moins à 10 yards. Le Board a décidé en 1979 de ne pas mener plus loin l’expérimentation du « short corner kick » ou mini corner. La même demande fut refusée à la FA South Africa en 1974 pour une compétition locale. A partir de 1976, le Board assouplit la réglementation sur les expérimentations et permet à la FIFA d’en conduire lors de tournois de jeunes, dans un but éducatif. En dehors des mini-corners, elles ont concerné les suspensions temporaires, les touches jouées au pied,7 et l’abolition des coups francs indirects.

9. Analyse systémique.

Le coup de pied de coin est une remise en jeu. Cette loi est liée, d’une part, au fait que le ballon franchisse les limites du terrain (Loi I) et d’autre part, qu’il soit considéré hors du jeu (Loi IX). Le ballon doit être placé à l’intérieur d’un arc de cercle (Loi I, le terrain), et les joueurs adverses se situer au minimum à 10 yards du ballon. L’arbitre est aidé pour vérifier cette distance depuis 1995, par des marques optionnelles, situées hors du terrain et tracées au sol. Sur un coup de pied de coin, il est possible de marquer directement (Loi X), mais aussi d’envoyer le ballon directement en sortie de but. Le coup n’est pas à recommencer, et l’équipe adverse bénéficie de la remise en jeu par un coup de pied de but (Loi XVI). Sur un corner, les partenaires du tireur ne peuvent pas être sanctionnés pour une position de hors-jeu au moment où le ballon est botté (Loi XI, hors-jeu). Lors de l’exécution du coup de pied de coin, l’arbitre (Loi V), doit se placer pour Ernest Weber « près du poteau de but opposé au coin d’où se donne le coup ; il juge ainsi très exactement de la position des joueurs et des mouvements du ballon »8. Aujourd’hui, il se positionne dans la surface de réparation, au-delà du second poteau, à la hauteur du point de penalty pour surveiller l’ensemble des mouvements des joueurs. Pendant ce temps l’arbitre assistant (Loi VI) se place à coté du poteau de corner dans le prolongement de la ligne de but. Cette position préférentielle lui permet de contrôler si le ballon reste dans l’aire de jeu (Loi VIII) et si le ballon pénètre dans le but (Loi X : le but marqué).

7 Touches jouées à la main : throw-ins , touches jouées au pied : kick-ins, 8 Weber, E. (1905), op. cit., p.171. 288

10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Cette notion de coup de pied de coin est commune aux sports interprétés, avec une cible située au centre de la ligne de but. Au rugby, le fait de rentrer dans son en- but avec le ballon et d’aplatir ou de dégager en ballon mort, entraine une mêlée à 5 mètres. Cette « pénalité » avec entrée au demi de mêlée adverse est une véritable occasion pour marquer des points, mais ne peut pas être assimilée à un corner, dans un jeu où la cible couvre toute la largeur du terrain derrière la ligne de but. Au basket-ball, il se réalise comme au football dans le coin du terrain, se joue avec les mains et aucun joueur ne tente de marquer directement car le règlement ne l’autorise pas. Au handball, il se différencie par le fait qu’il n’y pas de corner si le gardien dévie le ballon derrière son but sur un tir adverse (comme si le gardien à ce moment précis était un joueur neutre, comme un arbitre). Le but direct est valable, mais les tentatives de tir directement dans la cible sont exceptionnelles. Parfois ce « corner » est utilisé comme dernière passe, pour réaliser un kung-fu 9 par exemple, mais le plus souvent comme une simple remise en jeu, permettant de garder le ballon.

Synthèse En football, le corner, même s’il est tiré avec le pied à au moins 40 mètres du but, est une opportunité de centrer dans des conditions très favorables, et de se créer une réelle possibilité de marquer. Dans les statistiques données au cours du match ou dans les comptes rendus, le nombre de corners est un élément pour mesurer l’emprise de la domination d’une équipe sur l’autre. Il est révélateur de la pression exercée par une équipe sur le but adverse. L’importance primordiale des coups de pied arrêtés dans le résultat d’un match, engendre des stratégies individuelles et collectives pour obtenir un coup de pied de coin. La manière de le jouer est variable. Le règlement ne permet pas de le jouer individuellement, mais autorise le joueur à botter intentionnellement le ballon contre un adversaire afin de pouvoir ensuite le rejouer (sans que la frappe ne soit irresponsable ou violente). Il peut également être joué « à la rémoise » : la remise en jeu débute avec une passe courte à un partenaire et se termine soit par un centre, soit par une succession de passes courtes comme l’exécute Barcelone depuis 2009. Le plus souvent, le corner est tiré directement devant le but

9 Kung-fu: combinaison tactique entre deux joueurs: un passeur qui lance le ballon en l’air dans la zone des 6 mètres adverse et, un receptionneur qui attrappe le ballon en plein vol et tir au but avant de retoucher le sol. 289 adverse et permet de mettre immédiatement le danger devant la cible adverse, en donnant une véritable occasion de marquer un but. Cette action est privilégiée dans l’optique de déposer le ballon directement sur la tête d’un partenaire. Ce centre sans pression défensive permet de choisir, le premier poteau, le second poteau ou le centre en retrait. Les déplacements coordonnés des joueurs sur ce genre d’action se travaillent à l’entrainement comme un véritable schéma tactique. L’apparition du corner en 1873, est donc antérieure à la création du Board en 1886. Les deux principales modifications concernent d’une part, le fait qu’à partir de 1903, il n’est plus possible de jouer ce corner tout seul, et d’autre part qu’un but direct est validé depuis 1924. Le « mini corner » tiré sur la ligne de but à l’angle de la surface de réparation reste une perspective plausible. Cette expérimentation qui s’inspire de ce qui se fait en hockey sur gazon, a déjà été expérimentée. Ce mini corner met une pression temporelle supplémentaire sur les défenseurs, qui doivent réagir plus rapidement en fonction de la trajectoire raccourcie du ballon. La loi sur le coup de pied de coin est également une source d’inspiration dans l’optique de modifier les remises en jeu par une touche. En effet, remplacer l’envoi réalisé à deux mains, par un coup de pied ferait ressembler les touches offensives à de véritables corners. Des expérimentations en ce sens ont également déjà été menées, sans pour le moment provoquer de modification de la loi.

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1 Chapitre 18 Les tirs au but ______

« Aucun film au monde, aucune pièce ne saurait transmettre autant de courants contradictoires, autant d'émotions que la demi- finale perdue de Séville ». Michel Platini 2

1. « Loi » actuelle Les tirs au but ne sont pas à proprement parler une loi, mais un texte ajouté à la fin du règlement, en 1970 après la 17 ème loi, comme si cette épreuve venait déranger une tradition. Elle se déroule donc après les prolongations à la fin d’un match de coupe qui se termine par un match nul et au bout du suspens, pour déterminer un vainqueur. Le Board , lors de sa réunion de 1973, précise que les tirs au but ne doivent pas être considérés comme faisant partie du match. Toute erreur dans l'application de ce règlement ne peut entraîner l'obligation de rejouer le match… elle donne juste la possibilité de recommencer ou continuer la séance des tirs au but. Le règlement spécifique de cette séance est décrit en 10 points depuis 1970 3. L’épreuve est constituée par des duels successifs entre le gardien de but et le botteur. L’exécution se réalise comme sur le coup de pied de réparation, mais sans possibilité pour le tireur ou un de ses partenaires de rejouer le ballon. Lors de la première série chaque équipe désigne 5 joueurs qui tirent alternativement. La série s’arrête si une équipe ne peut plus rejoindre l’autre au score, par exemple à 3 tirs à 0 au bout de trois tentatives de part et d’autre. A la fin de cette série de 10 tirs si les équipes sont à égalité, la séance se poursuit et le bilan comptable est fait à chaque fois que les équipes sont à égalité de tirs. Si à ce moment une équipe a pris l’avantage la séance est terminée et le vainqueur désigné.

1 The taking of kicks from the penalty mark 2 ½ finale de la Coupe du monde le 8 juillet 1982 à Séville au stade Sanchez Pizjuan. Allemagne (RFA) bat la France : 1-1, 3-3 (a.p), 5 t.a.b à 4. C’est la première séance de tirs au but de l’histoire de la Coupe du monde. La France perd aux tirs au but après avoir mené 3 buts à 1 à la 99ème minute. Ce match est au aussi resté célèbre car le Gardien Allemand Harald Schumacher avait percuté Patrick Battiston que sera évacué sur une civière… accompagné pour sa sortie du terrain par M. Platini. 3 Cf. annexes n° 59 et 60, pp. 159-161 : Procédures pour déterminer le vainqueur d’un match ou d’une confrontation aller-retour. 291

2. Principes de cette « loi » Avant 1970, le règlement adopté par les compétitions organisées par la FIFA prévoyait de départager les équipes à la fin des prolongations par le tirage au sort. Pour analyser cette pratique, il est possible de se référer à Roger Caillois qui combine l’aléa (le hasard), et l’âgon (la compétition) dans sa théorie élargie des jeux. Dans cette alliance « qui préside au monde de la règle, l’aléa et l’âgon expriment des attitudes diamétralement opposées à l’égard de la volonté »4. Lors du tirage au sort, les joueurs adoptent une attitude totalement passive dans l’attente d’une consécration ou d’une condamnation, car « l’aléa apparaît comme une acceptation préalable, inconditionnelle du verdict du destin »5. Le match se joue comme à la roulette, et « Il faut considérer en outre les jeux de vertige et le frisson voluptueux qui s'empare du joueur à l'énoncé du rien-ne-va-plus fatal »6. Mais les « jeux sont faits », ne peut guère être entendu ou souhaité par les acteurs du match après 90 ou 120 minutes d’efforts ! Pour les joueurs, les éducateurs, le tirage au sort n’est pas recevable et jugé par Gaby Robert « parfaitement inacceptable »7. A l’inverse, les joueurs veulent être responsables du gain ou non de la partie, faire preuve de compétence, ou éprouver un sentiment de compétence. « L’âgon, désir de victoire et d’efforts pour l’obtenir, implique que le champion compte sur ses ressources propres »8. Cette attitude semble davantage correspondre à l’esprit du jeu où le vainqueur se détermine sur le terrain. Même si la séance de tirs au but est bien souvent considérée comme une loterie… c’est bien la compétence motrice des tireurs ou des gardiens de but qui change le résultat du match. Une des tendances d’évolution des sports modernes est la disparition des matchs nuls. La séance de tir au but, répond à cette exigence, et sert à départager les équipes et à désigner un vainqueur. Dans les épreuves de coupe, déterminer un vainqueur, à la fin du temps réglementaire, s'avère nécessaire pour continuer une compétition qui répond, d’une part à une logique temporelle de matchs programmés et diffusés dans le monde entier, et d’autre part à une logique de spectacle. Lors de la réunion de travail du Board, le 20 février 1970 9, qui s'est tenue à Londres, la FIFA propose une nouvelle méthode pour déterminer le vainqueur (le qualifier) dans le cas d'un match nul lors d'une compétition de Coupe. Cette proposition comprenait cinq conditions à suivre pour exécuter les tirs depuis le point de réparation. Il faut

4 Caillois, R. (1958), op. cit., p. 155. 5 Ibid., p. 155. 6 Ibid., p. p 21. 7 Robert, G. (1994). L’Entraîneur Français , 296, Juillet 94. Gaby Robert était instructeur national. 8 Caillois, R. (1958), op. cit., p. 155. 9 Cf. annexe n°19, pp. 68-69 : 1970 : Minutes of the AGM. 292 noter que le second point préconisait déjà le tir d'une série de 5 penaltys, mais ceux-ci devaient être tirés successivement par la même équipe. Le règlement adopté à la réunion annuelle de juin 1970 opte pour que les coups soient tirés alternativement. Le suspens est garanti, la pression mise sur chaque tireur et l’émotion suscitée au sens de Bernard Jeu, réelle. Dans la même logique le Board adopte, toujours en 1972 10 , l’interruption de la série lorsqu’une une équipe a marqué un total de but qui lui permet de gagner. Le suspens est terminé, il ne sert à rien de finir la série. Pierre Parlebas 11 a classé en quatre grandes catégories les jeux sportifs en fonction des caractéristiques de leur support de marque. Le football est un jeu qui se déroule en général au temps-limite, et qui accepte le match « nul » à la fin de la partie. Dans certains cas, la désignation d’un vainqueur est nécessaire et le match nul n’est pas validé. La séance des tirs au but fait basculer le football dans une autre catégorie de jeu qui impose un score limite et qui interdit le match « nul », comme le volley-ball ou le tennis. En fait, cette remarque est en adéquation avec la décision du Board en 1973, de ne pas considérer la séance de tirs au but comme faisant partie du match. A la fin de la prolongation, les joueurs jouent à un autre jeu, avec un nouveau système de score qui détermine la fin de la partie. Cette spectaculaire séance répond également à une logique d’organisation permettant au tireur de n’être perturbé par personne et aux arbitres de se concentrer spécialement sur ce duel. Tous les autres joueurs sont regroupés dans le rond central 12 , et ne sont pas à gérer par l’arbitre comme sur un coup de pied de réparation.

3. Historique de la « loi »

La problématique de désigner le vainqueur du match est soulevée dès les premières compétitions et donc avant la naissance du Board en 1886. Pour répondre à cette attente plusieurs solutions, que nous donnons dans l’ordre chronologique furent envisagées, en cas de match nul pour désigner le vainqueur : d’abord rejouer le match pour se départager sur le terrain, ensuite ajouter au match une prolongation avant de rejouer éventuellement la partie, enfin après la prolongation se départager par le tirage au sort.

10 Réunion du Board de 1972 : Proposition de la Scottish F.A adoptée. 11 Parlebas, P. (1999). Jeux, Sports et Sociétés. Paris, Insep, pp. 405-407. 12 AGM of 1970 : The Board accepted a proposal by FIFA : 8) « Any players, other than the two goalkeepers and the player takink the kick, shal remain within the centre circle whilst the taking of the the penalty kicks is in progress ». 293

La première solution consiste en cas de match nul à rejouer la rencontre sur le terrain de l’autre club. Les Anglais sont les inventeurs du football et de la première compétition, la « Cup »13 créée en 1871 sous l’appellation, « Coupe du Challenge de la Football Association ». Dans cette compétition les équipes se départageaient dans le jeu. La finale fut rejouée une première fois en 1875 14 , puis en 1876 et aussi, loi des séries, en 1901 et 1902, puis en 1910 et 1911. A chaque fois, pour déterminer un vainqueur, deux matchs furent nécessaires dans ces finales : un autre match où le score repart de zéro. « En effet, là où toute nouvelle partie apparaît comme un commencement absolu, rien n'est perdu et le joueur, plutôt que de récriminer ou de se décourager, a lieu de redoubler son effort »15 . En fait on efface tout et on recommence, comme dans les jeux traditionnels. Pour la compétition de la Coupe d’Angleterre une seconde solution fut envisagée pour éviter que les matchs soient rejoués, avec l’adoption d’une prolongation de deux fois 15 minutes : une véritable révolution quant à la durée de la partie, une innovation testée dès la finale de 1912 qui se joua pendant les prolongations. Une véritable réussite, car si le match fut rejoué pour la finale de 1913, il fallut attendre jusqu’en 1970 pour qu’une nouvelle finale nécessite deux matchs 16 . Pour la « cup », la tradition est conservée, il sera donc joué autant de matchs avec prolongations que nécessaire dans la plus ancienne compétition du monde. Le record pour la « Cup »17 , est de six rencontres entre Alvechurch et Oxford City au cours de la saison 1971-1972. Par tradition il est hors de question de remettre le sort du match au tirage au sort. « Il apparaît ainsi justifié d'opposer les jeux de hasard et les jeux de compétition» 18 . La FIFA adoptera également les prolongations, que les Français joueront pour la première fois, sans succès, à la coupe du monde de 1934 19 . Une troisième solution va apparaître dans les grandes compétitions internationales : le tirage au sort. Une part de hasard équitable entre les deux équipes, une chance sur deux, comme au début du match. Par exemple, le sort est défavorable aux Espagnols qui ne

13 Cup : Coupe du challenge de la Football Association : Coupe d’Angleterre. Première compétition de football créée en 1871. Cette coupe du challenge, signifiait pour les premières éditions que le vainqueur remettait son titre en jeu et attendait le défi d'un challenger. Cette coutume se retrouve toujours aujourd'hui dans la finale de la coupe de l'América en voile. Le gagnant de l'année précédente ne disputait que la finale. 14 Finale de Cup en 1875 : Royal Engineers bat Old Etonians (1-1 premier match), 2-0. 15 Caillois, R. (1958), op. cit., p. 20 . 16 Loi des séries : la finale fut rejouée en 1981, 1982 et 1983 ! 17 Le règlement pour départager les vainqueurs en Coupe de France a été plusieurs fois modifié. Le record pour la Coupe de France est de cinq matchs en 1957, en 64 e finale le FC Nantes dû s’y reprendre cinq fois pour se qualifier devant le CM Caen : trois matchs nuls (0-0), un match arrêté pour mauvais temps et enfin la victoire du FC Nantes 1-0. 18 Caillois, R. (1958), op. cit., p. 47. 19 Match n°125 : France-Autriche:1-1 (2-3). Le 27 mai 1934 à Turin en Coupe du monde. Les Français encaissent 2 buts pendant les prolongations à la 93ème et 109ème minute et en marquent un par Verriest à la 115ème. In Cazal, J-M. & Co. (1998), op. cit., p. 90. 294 participent pas à la Coupe du monde en 1954 en Allemagne. En effet, en 1953, Espagnols et Turcs n'ayant pu se départager, c'est un jeune garçon de 14 ans qui procède au tirage au sort et qualifie la Turquie pour la Coupe du monde ! Par tradition, le football se joue au temps et le seul score retenu est celui de la fin du match. La marque au football étant difficile, les scores sont serrés et les matchs se terminent souvent par des scores nuls. Le règlement envisageait de départager les équipes par tirage au sort. Cela se produisit 2 fois en 1968 : d’abord en demi-finale des Jeux Olympique où l’équipe israélienne 20 fut éliminée, et ensuite en demi-finale du Championnat d’Europe où l’Italie accéda en finale aux dépens de l’URSS. Suite à ces deux qualifications au tirage au sort pour les finales des plus grandes compétitions de football, le Board a accepté en 1970, la proposition de la FIFA de remplacer cette pratique par l’épreuve des coups de pied au but. En raison d’un calendrier très serré, le match doit livrer son vainqueur et à la fin des deux prolongations l'épreuve des coups de pied au but 21 a été instituée.

4. Transformations de la « loi » décidées par le Board

Cette séance de tirs au but est d’une remarquable stabilité et le règlement exposé en dix points de 1970 est d’une grande actualité. Nous avons seulement enregistré de légères modifications en 40 ans d’existence. Pour respecter l’égalité des chances, comme au début du match, un nouveau tirage au sort est réalisé, ce qui signifie réellement que c’est un autre match, bien particulier, qui commence. Depuis 1970, l’arbitre tire à pile ou face 22 et l'équipe dont le capitaine est désigné par le sort botte le premier coup. Le Board a décidé de changer cette règle en 2003 23 . Le capitaine gagnant le toss a le choix de commencer la série ou de la faire débuter par l’équipe adverse. Cette modification est motivée par le fait que tirer en premier pouvait être perçu comme un désavantage. La seconde transformation concerne le rôle spécifique du gardien de but. Le règlement de 1970, prévoyait que tout joueur était autorisé à changer de place avec son gardien, à n'importe quel moment pendant la séance. Il est sous-entendu que l’arbitre soit informé de ce changement et que le nouveau gardien soit identifié par un maillot particulier. Une nouvelle

20 C’est l’Israélien Yoseph Dagan qui suggéra le premier l’épreuve des tirs au but pour désigner le vainqueur. 21 L'épreuve des coups de pied au but : la séance de tirs au but, ou la séance de pénaltys. 22 AGM of 1970 : « The referee toss a coin ». 23 Réunion du Board 2003 : Proposition FIFA et Scottish FA, adoptée. 295 possibilité est accordée par le Board en 1974 dans la mesure où un gardien se blesse pendant les tirs au but. Si à la suite sa blessure, il ne peut plus jouer comme gardien, il peut être remplacé pour autant que son équipe n'ait pas encore consommé le nombre maximal des remplaçants autorisés par le règlement de la compétition. La troisième modification concerne la position du gardien partenaire du porteur. Depuis 1970, le gardien, coéquipier du joueur qui botte devait se positionner sur le terrain à moins 9 m. 15 du point de réparation entre la ligne de but et une ligne imaginaire passant par le ballon et parallèle à la ligne de but. Il se positionnait donc devant le ballon. La proposition de la FA en 1998 adoptée par le Board oblige dorénavant le gardien partenaire du tireur à se situer derrière le tireur à l’angle des lignes délimitant la surface de réparation. Cette évolution va dans le sens d’éloigner le gardien, de son alter ego engagé dans le duel.

5. Décisions du Board liées à cette « loi »

Suite à la proposition de la FA Wales, le Board décide en 1974 que dans le cas d’interruption prolongée d'éclairage électrique avant la fin de l’épreuve des tirs du point de penalty le vainqueur devra être désigné par tirage au sort. Ce qui est paradoxal pour cette épreuve, inventée pour éviter le tirage au sort ! Le règlement précise aujourd’hui que si, pour une cause fortuite (conditions atmosphériques, interruption prolongée d'éclairage, etc...) l'arbitre est dans l'impossibilité de terminer l'épreuve, le vainqueur sera désigné par tirage au sort après une attente qui ne saurait excéder au total 45 minutes.

6. Expérimentations

Lors de la réunion de 1995, la FA propose deux alternatives pour remplacer les tirs du point de penalty. La première implique la réduction progressive 24 du nombre de botteurs et la seconde alternative se réfère au système du « shoot-out ». Après d’importantes discussions25 , la demande de la FA de mener une expérimentation dans ces domaines est refusée, par le Board. Le « shoot-out » est directement inspiré du penalty réalisé en hockey sur glace. Il s’agit d’un duel avec le gardien de but. Au départ de l’action le gardien est sur sa ligne de but et le

24 The staged reduction. 25 Le détail des discussions n’est pas reporté dans le compte rendu du Board. 296 joueur démarre balle au pied à 30 yards du but. Le gardien peut s’avancer et le joueur a cinq secondes pour marquer. Une sorte de penalty en mouvement, un véritable un contre un, qui demande des qualités techniques, tactiques et mentales. Le shoot-out apparait dans les comptes rendus du Board en 1995, mais cette pratique était célèbre depuis les années 1970. En effet, La Ligue Professionnelle Américaine 26 a utilisé ce système pour départager les équipes en cas d’égalité. Cette expérimentation « sauvage »,, grandeur nature conduite sur plusieurs saisons concurrençait donc la séance de tirs au but, qui venait d’être inventée. Cette pratique spectaculaire n’a jamais été acceptée par le Board , mais cette ligue est restée célèbre pour avoir retouché les règles du jeu sans l’accord préalable du Board … une fédération récalcitrante difficilement contrôlable 27 , qui fit faillite en 1984.

7. Analyse systémique.

Cette séance des tirs au but n’est envisageable qu’un cas de parité (Loi X nombre de buts marqués), à la fin des prolongations (Loi VII : durée de la partie). Seuls les joueurs (Loi III) présents à la fin du match peuvent prendre part à cette séance. Pour chaque tir, le ballon est posé sur le point de penalty (loi I : le terrain) comme pour le coup de pied de réparation (Loi : XIV) avec un tireur seul face au gardien adverse (Loi III). L’arbitre qui a choisi le but vers lequel seront tirés tous les coups (Loi V) se situe à hauteur du point de penalty pour vérifier la position du ballon et donner le signal au tireur. Un des arbitres assistants (Loi VI) se place sur la ligne de but, pour valider ou non le franchissement complet de la ligne par le ballon (Loi X). Le second assistant reste avec les autres joueurs dans le rond central (Loi I : terrain). Le nombre de joueurs (Loi III) est en lien avec les tirs au but. Le règlement de 1970 prévoyait l’éventualité d’une équipe ayant eu au cours du match un (ou plusieurs) joueur expulsé ou blessé et de ce fait, ne disposait plus de onze joueurs. Dans ce cas de figure, s'il était nécessaire d'effectuer un nombre de tirs supérieur à celui des joueurs dont dispose l'équipe, le (ou les) joueur chargé de tirer le coup de pied au but à la place du (ou des) joueur absent, devait être celui qui avait donné le premier coup de pied et ainsi de suite. Cette règle fut modifiée en 2000 suite à la proposition de l’Irish FA qui sera adoptée par le Board . Le nouveau règlement prévoit que lorsqu'une équipe termine une rencontre en supériorité

26 La NASL : National Association Soccer League (1968-1984). 27 Cf. Les innovations intempestives américaines in Eisenberg, C., & Co. (2004), op. cit., p. 133. 297 numérique, elle doit ramener le nombre de ses joueurs au niveau de celui de l'autre et informer l'arbitre du nom et du numéro de chacun des joueurs exclus. Cette responsabilité incombe au capitaine. Avant le début des coups de réparation, l'arbitre doit s'assurer qu'il ne reste plus dans le rond central qu'un même nombre de joueurs des deux équipes appelés à tirer les penaltys. L’épreuve prévoit donc, contrairement au match, un nombre équilibré de joueurs. Le tir au but est souvent assimilé à un « penalty » ou coup de pied de réparation (Loi : XIV). Pourtant il s’en distingue. Pour le tir au but seuls le gardien et le tireur participent à cette action, les autres joueurs sont confinés dans le rond central. Lors d’un coup de pied de réparation, si le ballon est renvoyé l’action continue et les autres joueurs peuvent reprendre le ballon. Ce n’est pas le cas pour le tir au but, après le tir, seul le gardien a la possibilité de toucher le ballon : de l’arrêter, de le repousser ou de le dévier dans son but…

8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences.

Contrairement à certains jeux traditionnels qui ne comptabilisent pas les réussites et les échecs, pour les jeux sportifs institutionnels qui privilégient la structure de duel, la finalité est d'obtenir la victoire en marquant plus de points que l'équipe adverse. Les matchs nuls sont possibles, mais pour Allen Guttmann 28 , la tendance lourde des sports modernes est de les éliminer par des tours de batte supplémentaires en base-ball, par des prolongations avec but en or, par de nouveaux matchs, par quelques expédients permettant de mettre fin à l'ambiguïté. Les tirs au but au football vont dans ce sens. Le même genre de séance existe au rugby, avec des joueurs qui tirent alternativement des pénalités à la fin des prolongations. Le phénomène est plus rare car les matchs se terminent rarement par des matchs nuls. Pour départager les équipes au handball et au basket-ball, les règlements prévoient de jouer les prolongations et ensuite de rejouer encore d’autres prolongations…nous n’avons jamais observé de séances de lancers francs ou de jets francs !

Synthèse La création de la séance des tirs au but pour déterminer le vainqueur, à la fin des années 1970 donne au « penalty » une nouvelle expression et une dimension encore plus dramatique

28 Guttmann, A. (1978). From Ritual to Record. The Nature of Modern Sports.Columbia University Press. Version française Terret, T. (2006). Du Rituel au Record. La nature des sports modernes. Paris, L'Hamarttan, p. 112. 298 avec toute une série de duels et de balles de match. Au cœur de l’arène, en une longue marche du rond central vers la surface de réparation, le joueur traverse seul le terrain et se présente face au gardien. Ces duels se succèdent en alternance pour chaque équipe avec cinq tireurs différents prévus avant la séance. Si l’égalité demeure après cette série, l’épreuve se poursuit jusqu’à ce que mort s’ensuive, avec à chaque fois deux nouveaux tireurs. Cela ressemble au tie-break du tennis, avec des balles de match ou d’égalisation tous les deux tirs. Dans ces moments là, pour reprendre une formule d’Arsène Wenger « La frontière entre tout gagner et tout perdre est extrêmement mince ». Des émotions intenses, au sens de Bernard Jeu, sont d’abord provoquées par l’épreuve : « Il s’agit de la poursuite de l’exploit. Par rapport à la vie banale, prosaïque et quotidienne, elle permet d’accéder au domaine du merveilleux, de l’extraordinaire »29 . Une véritable épreuve dans cette surface de vérité qui se termine d’un coté par de la joie et de l’autre avec des hommes qui pleurent… tombé du rideau, fin de la tension : « … l’exploit, c’est le risque. On baigne dans l’atmosphère du conte de la mort côtoyée et menaçante» 30 . Dramatique incroyable, les matchs restant dans la mémoire collective en France 31 se sont souvent terminés par la séance des tirs au but, avec de très grands joueurs qui échouent face à des gardiens mis à l’honneur. Cette épreuve des penaltys, est considérée par beaucoup comme une roulette russe 32 , comme une mort que l’on se donne. Marquer un penalty semble aller de soi, le rater c’est se tirer soi-même une balle dans le pied, et pendant la séance de tirs au but, c’est mourir un peu, car la conséquence est la perte du match pour toute l’équipe. Il est possible de comparer cela à une double faute sur une balle de match au tennis. D’une chance au tirage au sort, la désignation du vainqueur, se transforme en une sorte de loterie aux tirs au but. La probabilité reste la même, une chance sur deux, mais il est possible d’attribuer la victoire à une part de compétence technique et tactique, une part d’angoisse maîtrisée ou non du joueur face au gardien de but. « L’Agôn est une revendication de la responsabilité personnelle, l'aléa d'une démission de la volonté, un abandon au destin »33 . Chacun doit rester dans son rôle, et ce sont les joueurs qui décident de la victoire.

29 Jeu, B. (1977). Le sport, l'émotion, l'espace. Paris, Vigot, p. 31. 30 Jeu, B. (1977), op. cit. 31 A Guadalajara au Mexique le 21 juin 1986, avec la victoire de la France sur le Brésil aux tirs au but. (1-1), (1- 1, a-p) ( 4 t.a.b à 3 ). avec un penalty raté par Zico en match et par M. Platini lors de la séance de tirs au but. A Munich, en juillet 2006, en finale de coupe du monde, avec la victoire de l’Italie (1-1) (1-1, a-p) aux tirs au but avec un penalty raté par D. Trézeguet . 32 Une roulette russe : Article de France Football sur la finale de la ligue des champions en juin 2008. 33 Caillois, R. (1958), op. cit., p. 57. 299

L’invention de l’épreuve des tirs au but, en 1970 constitue une véritable rupture dans un jeu qui se jouait, et se rejouait au temps limite : une révolution influencée par des impératifs temporels lors des grandes compétitions, pour un jeu transformé en véritable sport-spectacle. Contrairement aux tâtonnements des autres lois du jeu, cette séance fait preuve d’une stabilité remarquable…comme si les conditions d’une mise en scène dramatique de la fin de spectacle avaient été murement pensées par les concepteurs. Les perspectives d’évolution, dans le sens d’une plus grande spectacularisation nous semblent déjà avoir été testées avec le « shoot-out » dans le « soccer »34 pratiqué en Amérique du nord.

34 Soccer : le football est appelé Soccer aux Etats Unis. Le mot soccer fut inventé par Charles Wreford Brown, un joueur du club anglais des Old Carthusians and Corinthians. Soccer est la contraction de association- player : assoc-er. 300

Conclusion ______

« Il n’y a pas de vérité absolue, il n’y a que des vérités évolutives ». Jacques Vankerschaver 1

Le Board est depuis 1886, le véritable gardien des lois du jeu 2. Depuis sa création à la fin du XIX e siècle, il joue un rôle fondamental dans le football international. Il est chargé de superviser, d’étudier, de contrôler et de modifier les lois régissant l’activité sportive. Les archives de l’IFAB permettent de porter une attention privilégiée aux origines, aux sources du football, un jeu devenu une institution sportive universelle 3. Le Board est avant tout un organe de décision. Ses membres peuvent choisir de modifier les lois du jeu, mais aussi d’autoriser les expérimentations d’une ou plusieurs règles. Dans ce cas, l’aval du Board est donné dans le cadre d’une compétition précise ou d’un match amical, avec une durée générale maximale de 3 saisons. Les transformations des lois du jeu sont du ressort du Board , non seulement pour étudier les propositions de modifications des lois, mais également pour adapter celles qui lui paraissent favorables à l’esprit et au développement du jeu. Leur transformation est dépendante de l’évolution du football. Cette évolution est manifeste, « la balle au pied »4 du XIX e siècle est difficilement comparable au football moderne du XXI e siècle. Ce jeu est devenu aujourd’hui un spectacle incontournable, le sport le plus pratiqué dans le monde, avec des lois universelles plus ou moins connues de tous.

Notre recherche questionne le processus d’évolution du règlement depuis 1886, rythmé par les 125 assemblées générales annuelles du Board. Nous avons repéré plus de 700 tentatives de transformations 5. Elles concernent la loi proprement dite ; les sanctions ou les décisions liées aux lois du jeu, qui peuvent être considérés comme de véritables décrets d’application, ou amendements de la loi. Plus des deux-tiers des propositions ont été

1 Vankerschaver, J.(1983), Revue EPS. Football : la formation à l’école ou au club, n°79. 2 Cette formule est utilisée lors de la réunion de 1993 par le Dr. Havelange qui met l’accent sur l’importance du travail du Board , « The effective gardian of the Laws of the Game ». 3 Defrance, J. (2006) Sociologie du sport. Editions La Découverte. 5 ème édition, p. 4. 4 Wahl, A. (1990). La balle au pied. Histoire du football. Paris, Gallimard. 5 Cf. annexe n°6 : statistiques synthèse, pp 20-21. 301 acceptées par le Board, ce qui valide un processus d’évolution continu, mais non uniforme. En effet il existe un traitement différencié pour chaque loi du jeu. Les trois lois les plus discutées concernent dans l’ordre, les fautes (Loi XII), le Hors-jeu (loi XI) et le coup de pied de réparation (Loi XIV). Ces trois lois présentent la particularité d’avoir une forte incidence sur les buts marqués, et donc sur le résultat des matchs. Il est nécessaire de se questionner sur la nature de ces transformations et leur impact réel sur la pratique. Les simples ajustements ou réécritures ne doivent pas être confondues avec les véritables transformations. Il est possible en synthétisant l’ensemble du règlement de proposer une chronologie originale, reliée à l’histoire du football.

Le football répond dans un premier temps à une logique de simplification des règles pour proposer un « minimum commun » à des règlements marqués par une extrême diversité d’un établissement scolaire à l’autre 6. Cette étape est illustrée par un faible nombre de lois, comme les 10 règles du « simplest game » de 1862 7, ou les 14 lois de 1963 8. Les lois, pourtant d’une précision et d’une concision remarquables, ne parviennent pas à « canaliser longtemps cette force neuve en constante évolution »9. Ce passage des règles aux lois du jeu est progressif, marqué par une lente unification à partir de 1863 10 . Selon Alfred Wahl11 ce sont les rencontres de la Cup 12 , qui ont conduit à l'uniformisation de la technique de jeu : « Vers 1876, le jeu de passe, ou le passing game, remplace le dribbling game et l'esprit collectif des ouvriers supplante ainsi l'individualisme bourgeois ». Les mêlées acharnées ont laissé la place à un jeu où la balle est toujours vivante, et la fluidité possible avec de très grandes qualités techniques. Le jeu individuel s’oriente vers un jeu plus collectif. Ce jeu de passes s’apparente, au début, le plus souvent à un « kick and rush »13 , puis progressivement tend vers un sport, fondé sur une tactique collective et individuelle, symbolisée par des systèmes de jeu. Le principe de simplicité est l'une des pierres angulaires du football, avec des règles écrites qui doivent restées accessibles à tous. Ce principe va favoriser la diffusion de cette forme de culture sportive.

6 Chartier, R. (1994), op. cit., p.16. 7 Cf. Annexe n°61, p. 163 : The simplest game. Rules prepared by the Rev. J.C. Thring, Master at Uppingham School, in 1860. 8 Cf. annexe n°65, p. 167 : 14 laws adopted by the FA in december 1863. 9 Perpère, L. (1951). Football ma passion. Ed Football Panorama, p.41. 10 Cf. annexe n°65, p. 167. 11 Wahl, A. (1990), op. cit., pp. 25-26. 12 . La “Cup”: The Football Association Challenge Cup. La coupe d’Angleterre. 13 Kick and rush : tactique qui consiste à jouer long vers l’avant et courir derrière le ballon (balancer le ballon vers l'avant et se lancer à l'abordage). Elle se caractérise par un nombre élevé de duels aériens. 302

L’étape suivante, de 1886 à 1925, complexifie progressivement le règlement, avec toute une série de nouvelles lois, d’amendements et de décisions. Les tables de la loi tenaient sur une page en 1863, les articles de la loi sur dix pages en 1925. C’est une époque juridique indispensable, où le Board assume le pouvoir législatif. Au cours de cette période, la puissante Royal Navy permet aux Anglais de diffuser le football sur tous les continents. Les marins organisent des matchs pendant les escales. Des sujets Anglais qui s'installent dans d'autres pays sont à l'origine de la création des premiers clubs. Un processus de diffusion et d'adoption remarquable répand une forme de culture sportive à travers le monde, sans qu’elle subisse de modifications profondes. Agnes Bain Stiven précise qu‘« Il est rare qu'un morceau de culture ait émigré d'un pays à l'autre en changeant si peu »14 . La simplicité du jeu et la rapidité de la diffusion sont sans doute des éléments d’explication de ce phénomène. Ce jeu va devenir un véritable sport, avec une Fédération Internationale, la FIFA créée en 1904. Le développement du football à la fin du XIX e siècle lui permet d’être en démonstration aux Jeux Olympique. En effet Pierre de Coubertin s’appuyait sur la notoriété de certains sports pour construire celle des Jeux.

Après la lente maturation du jeu, succède entre 1930 et 1990 une période décrite comme stable dans l'histoire des lois du jeu, avec la volonté affichée de modifier le moins possible des lois simples et universelles et de former des arbitres capables de les appliquer. Cette époque peut être qualifiée de « logistique, démographique et tactique »15 , symbolisée par la mondialisation du jeu. Contrairement aux jeux, qui sont largement dépendants des cultures , l’universalité et la stabilité des lois du football16 permettent progressivement une dissémination sur l’ensemble de la planète . La mondialisation est argumentée par l'accroissement du nombre de fédérations affiliées à la FIFA 17 . Elle se manifeste par la création, en plus des Championnats nationaux, des Coupes du monde et des compétitions continentales 18 pour satisfaire la demande des supporters qui s'étaient identifiés à leur club et à leur pays. Tous les continents participent aux Coupes du monde.

14 Agnes Bain Stiven , Englands Einfluss auf den deutschen Wortschatz, Marbourg, 1936, p. 72.Cité par Elias N. (1994), op. cit. 15 Expression empruntée à Gérard Ernault, éditorialiste du magazine de France football. 16 Caillois, R (1958), op. cit. p. 60. 17 Dietshy, P. (2006). Une plongée dans les archives du football mondial: faire l’histoire de la Fédération International de Football Association (FIFA), p. 319 -332. In le sport de l’archive à l’histoire. Sous la dir. de Bosman, F; Clastres, P & Dietschy, P.. Presses Universitaires de Franche-Comté. 18 La première édition de la Coupe d'Europe des Clubs Champions se déroule lors de la saison 1955-1956. 303

Le développement démographique est quantifiable avec l'augmentation du nombre de licenciés dans le monde, l'accroissement du nombre de spectateurs et surtout de téléspectateurs 19 . Cette dissémination planétaire du football se généralise en particulier sous la houlette du Brésilien João Havelange, Président de la FIFA de 1974 à 1998. L’époque tactique voit la transformation des formes de jeu et la création de nombreux systèmes qui supplantent le système pyramidal 20 . La modification de la loi du hors-jeu en 1925 21 sonne le glas de cette forme d’organisation très offensive, dominante pendant 50 ans. La révolution tactique laisse place à des systèmes, soit plus équilibrés, avec le WM 22 des années 30, le « 4-2-4 » des Hongrois en 1952 ou le « football total 23 » des années 70, soit radicalement défensifs tels, le verrou suisse ou le « catenaccio » italien. Dans les années 1960, le résultat du match devint la priorité aux dépens du spectacle. Les tactiques défensives se généralisèrent, avec l’utilisation systématique d’un libéro et un renforcement numérique des lignes défensives. Pour la première fois peut-être, dans la longue histoire du football, on nota certains signes de désaffection de l'audience, les tribunes se vidant de leurs spectateurs, en Italie particulièrement. A la fin des années 80, les observateurs s'accordaient à dire que cette évolution avait mis en lumière la nécessité de procéder à quelques réglages des lois du jeu. La nécessité de rafraîchir les lois du jeu se fit ressentir en 1937 après plus d'un demi- siècle de modifications et amendements. Sir Stanley Rous 24 fut considéré comme l'homme de la situation pour mener à bien cette tâche gigantesque. Il commença par éliminer certains amendements désuets et reclassa les lois dans un ordre rationnel. Les lois du jeu s'intègrent dans un nouveau système de codification mais restent basées sur celles jusqu'alors en vigueur. La refonte des lois du jeu, comparable à une « cure de jouvence » est proposée au Board en 1937 et, conduit à la classification actuelle 25 . Le travail de Sir Stanley Rous fut à ce point méticuleux, que les modifications des lois du jeu lors de la période d'essor véritable de la discipline furent très rares. Il faudra attendre près de 60 ans et 1997, pour assister à une

19 Debord, G. (1967). La société du spectacle. Ed Buchet/Chastel. 20 Cf. Annexe n°75, p. 183-184. Système de jeu pyramidal : la disposition des joueurs sur le terrain représente une pyramide, la base correspond aux cinq attaquants, puis les trois milieux de terrain et enfin les deux défenseurs symbolisent la pointe de la pyramide. 21 Le passage de la règle « des trois joueurs » à l’avant dernier défenseur. 22 WM : si on dessine ces lettres sur le terrain l’une en dessous de l’autre, la pointe des lettres symbolise la position des 10 joueurs sur le terrain : 3 arrières, 2 demis, 2 inters, 3 avants. Cf. annexe n°75, p. 183-184. 23 Football total : jeu joué par les Pays Bas et l’Ajax d’Amsterdam au début des années 1970. 24 L’Anglais Sir Stanley Rous, président de la FA, représentait la FA au Board. Il sera ensuite Président de la FIFA de 1961 à 1974. Il participa donc au Board de 1935 à 1974, avec 34 réunions du Board à son actif. 25 Cf. annexe n°4, p. 12, ou tout simplement le sommaire de cette thèse, concernant les 17 lois du jeu actuelles. 304 nouvelle simplification (de 30 %) du texte et une modernisation de la langue utilisée, mais le principe des lois fut conservé. La dernière période, à partir des années 1990 est celle des réformes. Le foot-business évolue au rythme des inflexions économiques avec l'industrialisation du jeu, la hausse exponentielle des droits télévisuels 26 , le « naming »27 des stades, les prix des transferts qui s’enflamment, les budgets des clubs difficilement équilibrés… Au début des années 1990, le football était devenu un phénomène mondial inégalé. Pour Pascal Boniface, « Le football est le stade ultime de la mondialisation. Il n’est pas aujourd’hui de phénomène plus global. Son empire ne connaît ni frontières, ni limites. Phénomène plus rare encore, c’est le seul empire qui soit populaire »28 . La télévision 29 ne fit que renforcer, ou créer, le désir de spectateurs. Elle amena des millions de personnes supplémentaires à s'intéresser au jeu en leur permettant de comprendre plus ou moins les règles, d’identifier de nombreuses vedettes mondiales et de transformer les marquages du terrain en un des graphismes les plus reconnaissables de notre planète. La diffusion et la compréhension de lois communes, nécessitent des lois simples et imposent surtout une traduction fiable. Cette universalité des lois, nécessite en cas de modification, une diffusion simultanée, assurée par la FIFA, dans les 208 pays où le football est pratiqué. Tous les acteurs du football doivent en prendre connaissance le plus rapidement possible, car la date d'application des nouvelles lois est fixée au début de la saison suivante. Le football laisse pourtant apparaître une faiblesse, mise en évidence lors du Mondial Italien de 1990 : jamais si peu de buts ne furent marqués depuis la création de la Coupe 30 en raison des tactiques défensives utilisées. Une réflexion pour promouvoir le football offensif au niveau international amena le Board à légiférer dans le domaine des lois du jeu, avec des amendements importants, souvent dictés « par le bien du jeu ». Pour obtenir un football plus offensif, et une augmentation du nombre de buts, le Board commença par remanier la loi sur le hors-jeu en 1991 31 pour permettre à l’attaquant de se situer au même niveau que l’avant dernier défenseur, et la loi XII en sanctionnant par une exclusion le fait de commettre une faute privant l'adversaire d'une occasion manifeste de but. En dépit de ces changements, la

26 Une hausse qui s’est confirmée en 2011 en France avec l’appel d’offre pour la commercialisation des droits de la ligue 1 pour 2012-2016, avec la proposition de Al-Jazira Sport (555 millions d’euros). 27 Le « naming » est un terme utilisé dans le monde de la publicité, qui décrit une pratique de sponsoring qui consiste à donner à une enceinte sportive le nom d'une marque, comme l’ Emirates Stadium d’Arsenal, ou l’ Allianz Arena de Munich. 28 Boniface, P. (2006). Football & Mondialisation. Paris, Editions Armand Colin. p 13 29 D’après le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel en 2010, plus de 700 heures d’antenne en France ont été consacrées au football (contre 254 heures au rugby) ; cela représente 29 jours de ballon rond dans l’année ! 30 Cf. Annexe 74, p. 180: Les statistiques sur les buts marqués. 31 1991 : afin de donner l'avantage à l'équipe attaquante. Si l'attaquant était sur la même ligne que l'avant-dernier défenseur, il n'était plus hors-jeu. 305 faible augmentation du nombre de buts marqués permit de penser que le jeu devait subir d’autres transformations. En 1992, le Board réalisa une des avancées les plus spectaculaires de son histoire en interdisant aux gardiens de but de contrôler avec les mains la passe en retrait intentionnelle d’un de ses partenaires. Les réformes se sont poursuivies dans l’optique d’augmenter le temps de jeu effectif, avec une lutte contre le gaspillage du temps et les comportements antisportifs en tout genre, notamment les simulations. Au football, le chronomètre ne s’arrête qu’exceptionnellement et l'augmentation du temps de jeu effectif se réalisa en ajoutant systématiquement le temps additionnel et en positionnant des ballons tout autour du terrain. Les modifications concernent également la protection du joueur, et donc la valeur marchande de l’artiste.

Ces tendances actuelles sont à mettre en perspective avec des tendances lourdes d’évolution qui traversent l’histoire des lois du jeu. En premier point, les joueurs se voient confisquer le pouvoir de prendre des décisions au cours du match. La disparition en 1891 des « umpires », les juges appelés en cas de litige, marque la fin d’un « gentlemen’s agreement »32 . L’arbitre obtient progressivement les pleins pouvoirs, le joueur n’a même plus la possibilité de le questionner sur ses décisions. Les interactions entre les arbitres et les joueurs se modifient sous la pression de la compétition et des enjeux. Les joueurs capables de s’auto-arbitrer dans une pratique non institutionnelle, laissent la place à des joueurs à sanctionner, capables de violence et de tricheries comme le symbolise la lutte contre les simulations des années 2000. En second lieu, l’institution sportive fait progressivement disparaitre l’aléatoire. Cette tendance se manifeste aujourd’hui par des surfaces de jeu de plus en plus standardisées et artificielles et de plus en plus planes pour éviter les faux rebonds. L’apparition des filets en 1895, pour vérifier la validité du but, l’évolution de la « balle à terre », qui à l’origine s’exécutait en lançant de façon aléatoire le ballon en l’air, et la possibilité de remplacer un joueur, répondaient déjà à cette logique. Le tirage au sort, à la fin des prolongations, pour déterminer le vainqueur du match de coupe laisse la place au début des années 1970 à l’épreuve des tirs au but, qui permet aux actions motrices de décider du sort du match. Les expérimentations de la technologie sur la ligne de but, vont également dans le sens de la

32 Annesse, F & Lesay, J-D. ( 2007), op. cit. p. 12. 306 réduction de l’aléa (Caillois, 1958). Même si, la révolution technologique, semble pour le moment s’arrêter au bord du terrain. La troisième tendance est la baisse progressive de la tolérance à la violence (Elias, 1994) que nous avons illustré lors de l’étude de la loi XII, les fautes et incorrections, avec une augmentation régulière des sanctions techniques et administratives. Le football, sport de duel, nécessite de conserver un équilibre entre la protection du joueur et l’engagement physique. Les arbitres sanctionnaient déjà la violence et l'atteinte à l'intégrité physique du joueur par un carton rouge, mais à partir de 1998, pour diminuer les risques de blessures, le tacle par derrière, impossible à esquiver, devint également une faute passible d'exclusion. Selon Norbert Elias « La difficulté, dans le football comme dans d'autres jeux sportifs, est de savoir maintenir le risque de blessure à un niveau relativement bas, tout en préservant l'excitation agréable de l'affrontement à un niveau élevé »33 . Cette logique sécuritaire, se manifeste également avec le contrôle permanent des équipements, des matériaux utilisés. La protection des joueurs constitue une des composantes des missions de l’arbitre, avec le devoir de calmer les esprits, d’arrêter le jeu en cas de blessure grave, pour permettre de traiter ou d’évacuer le joueur.

L’équilibre entre les pouvoirs des attaquants et ceux des défenseurs est une des conditions pour créer une tension suffisante (Elias, 1994), dans un match modélisé par une opposition entre deux forces antagonistes. L’histoire des lois du jeu est caractérisée par le fait de redonner cycliquement du pouvoir à l’équipe qui possède le ballon, dans l’optique de marquer des points. Si les parties se terminent trop souvent sur des scores nuls, il est nécessaire de changer la loi pour redonner de l’attrait au jeu. Nous pouvons, dans ce sens constater une réduction progressive du champ d'application de la loi du hors-jeu, et une augmentation du nombre des fautes sanctionnées. En effet, l’histoire des compétions montre que les systèmes défensifs s’adaptent plus ou moins rapidement aux changements de règles et finissent pas reprendre le pas sur la force de frappe offensive adverse.

Le football est pratiqué, depuis la fin du XIX e siècle à 11 contre 11, sur un terrain rectangulaire, avec une cible délimitée gardée par un joueur aux pouvoirs spécifiques 34 . Le jeu était déjà dirigé par un trio arbitral et encadré par 17 lois. « Les règles du jeu peuvent être

33 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 67. 34 Rous, S & Ford, D (1974), op. cit., p. 62 : « Goal’keeper’s privileges ». 307 qualifiées d’exemplaires »35 , ces lois caractérisent une partie de la logique interne du jeu, mais contrairement à une stabilité de façade, leur processus d’évolution est permanent. Derrière chaque loi se cachent de profondes mutations qui peuvent être reliées aux tendances d’évolution. Les réformes engagées depuis les années 1990 prouvent que le Board peut allier innovation et conservatisme. Tous ces amendements ainsi que la promotion de la sportivité et le retour aux racines courtoises de la discipline, soulignent parfaitement l'engagement du Board pour faire évoluer le football et l’adapter à l’époque. La nouvelle révision des lois du jeu en 1999 poursuit la transformation du jeu en sport-spectacle. Le Board est une institution, qui oscille entre tradition et modernité. Cette tension entre conservatisme et transformation s’illustre actuellement par le refus du recours à la vidéo. Le Board rejette pour le moment l'apport de la vidéo, pour assister l'arbitre dans le match, privilégiant l'aspect humain du jeu sur tous les terrains de la planète. Cette justification affichée répond sans doute aussi au souci de privilégier l’autorité « sans appel » de l’arbitre. Le Board est une institution qui traverse tranquillement le temps. Les quatre membres britanniques fondateurs sont toujours présents et le cinquième membre, la FIFA, va fêter son centenaire en 2013 : un fonctionnement invariable depuis le XIX e siècle, avec un principe de rotation des lieux d’assemblées générales et des « représentants à vie » des associations membres. Maintenir la tradition est l’un des principes structurants et organisateurs de cette institution dont la mission essentielle est de « garder les lois du jeu». Le principe de stabilité et la volonté de « conserver les choses en état » expliquent les réticences à modifier les lois. Par exemple, entre la première demande des Écossais en 1894 et l’adoption de la nouvelle règle du hors-jeu en 1925, la réflexion a duré plus de 30 ans. Dans cette optique, il faut considérer que moins il y a de changement mieux cela vaut, pour le jeu et l’esprit de jeu . « On peut dire que les lois du jeu le plus populaire du monde sont gravées dans le marbre» 36 . Cette affirmation de René Cotteaux en 1971, plus d’un siècle après les premières règles, compare les règles du jeu à de véritables « tables de loi ». Notre recherche questionne ce principe de stabilité. Le Board est une institution qui, en intégrant la FIFA en 1913, s’est offert une dimension internationale, une caution et un rayonnement incontesté. L’universalité des lois du jeu semble un trait permanent de l’histoire du football, alors que d’autres fédérations proposent

35 Menaut, A. (1998). Le réel et le possible dans la pensée tactique. P.U., Bordeaux. Million, p. 16. 36 Cotteaux, R. (1971). Le football : guide pratique pour bien connaître les lois du jeu. Paris, Editions Borneman, p. 6. 308 encore aujourd’hui des règlements différents (par exemple les règles du basket-ball en NBA, différent des règles européennes). La loi fixe un cadre d'application pratique, mais n’en précise pas les conditions d’application. Pour le philosophe Wittgenstein « la règle ne parle pas pour elle-même, c'est la pratique qui lui sert de porte-parole »37 . L’usage de la loi, valide ou invalide son bien fondé. Sans décret d’application, dans le code civil une loi ne possède qu’une existence théorique. Pour transformer durablement le jeu en sport, les lois doivent posséder certaines caractéristiques qui leur permettent de supporter des évolutions externes et internes, et donc de résister au temps. La thèse soutenue par Norbert Elias, abonde dans ce sens « Ainsi, pour que les relations de groupe puissent revêtir les traits propres d'un jeu, il faut qu'un équilibre spécifique s'établisse entre la fixité et la souplesse des règles. De cet équilibre dépend la dynamique du jeu. Si les règles établissent entre les joueurs des relations trop rigides ou trop laxistes, le jeu en pâtira »38 . Ces lois universelles, suffisamment souples pour permettre de jouer sous toutes les latitudes, sont illustrées par la flexibilité des dimensions du terrain et des formes des poteaux de but. Le Board veille à ce que les mêmes lois soient appliquées dans tous les pays, à tous les niveaux du jeu, ainsi bien en professionnel qu’en amateur, chez les hommes ou les femmes. En football, cet équilibre est aussi symbolisé par des lois du jeu rigides, et la grande variété possible dans l’interprétation des règles. Pour Schaffauseur (2008) c'est grâce à la convention que l'usage de la règle suppose l'existence d'une marge de manœuvre. L’esprit « fair-play » à l’honneur au XIX e siècle, tout du moins revendiqué par les créateurs du jeu, semble renaitre de ses cendres au XXI e siècle, et est de nouveau évoqué dans les réunions du Board à une époque où la victoire vaut vraiment de l’or. L’ Irish Football Association a présenté, en 1998, une vidéo illustrant des aspects du f air-play . La même préoccupation est avancée en 2002, lorsque Président de la FIFA, M. Joseph Blatter insiste sur l’importance des lois du jeu, qui contrôlent et garantissent de jouer à l’intérieur des limites du fair-play . Ce concept, ignoré dans les comptes rendus du XX e siècle, se révèle pourtant, en permanence, en creux. En effet, les conduites inconvenantes et les comportements antisportifs, sont manifestement et majoritairement des actions « non fair-play ». La lutte actuelle contre les simulations de joueurs, et le « nettoyage » des surfaces de réparation dans les années 1990, poursuivent le même objectif, le retour aux valeurs traditionnelles.

37 Wittgenstein, L. (1961). Investigations philosophiques. Paris, Gallimard ; cité par Schaffhauser, P. (2008), op. cit. 38 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 263. 309

Les évolutions spectaculaires récentes des lois du jeu de différentes activités collectives (rugby, basket, volley-ball), ou individuelles (tennis de table), expriment une forme de dynamisme et font passer le football pour un sport conservateur, le Board pour une institution traditionnelle, voire rétrograde. Pourtant cette institution fait preuve de modernisme à chaque époque, en intégrant, des matériaux nouveaux 39 , en luttant contre les effets pervers du jeu et en assimilant la logique du spectacle. Le côté spectaculaire influence en permanence les règles, comme le montre l’apparition des cartons jaunes et rouges et la séance des tirs au but. Si les stades se vident de leurs spectateurs, alors ce sport-spectacle est condamné à évoluer.

Il en est de même pour la médiatisation, quand l’audience baisse, quand les arbitres sont contestés, les acteurs du football exercent des pressions pour que les lois, le règlement d’une compétition ou l’application des règles se modifient. Le pouvoir des télévisions est important. Les droits de retransmissions contribuent grandement à faire vivre le football de haut niveau, et déterminent, par exemple, les horaires et les calendriers des matchs (décalés) au niveau national et international. Une médiatisation crée un nouveau spectacle, non instantané, un spectacle décalé, différé, avec une organisation propre, un regard centré sur une toute petite partie du terrain, un spectacle avec un rythme artificiel, fait de ralentis 40 et d’images repassés en boucle pour statufier des héros modernes ou vilipender les mauvais garçons.

Les tendances organisent les transformations des lois du jeu. Cette logique d’évolution est à considérer en vue des modifications futures de l’activité. En dépit des changements, marquer un point reste toujours un exploit et une caractéristique distinctive du football. Le règlement subira nécessairement d’autres transformations , car trop de parties se terminent par un match nul, souvent sans but, « c'est-à-dire sans que la victoire permette la résolution de la tension» 41 . Ces perspectives peuvent être recherchées dans les propositions et les expérimentations déjà réalisées. Nous avons repéré soixante-cinq demandes d’expérimentations des lois du jeu, dont cinquante ont été acceptées par le Board 42 . Nous pouvons signaler que les lois du jeu les plus expérimentées sont le hors-jeu (loi XI), la rentrée de touche (loi XV) et les coups francs (Loi XIII). Ces statistiques peuvent laisser supposer que les futurs ajustements du règlement

39 Dans la fabrication du terrain, de la cible, du ballon et les équipements des joueurs. 40 Vigarello, G.(2002). Du jeu ancien au show sportif. La naissance d'un mythe. Éditions de Seuil, p. 161. : « …l'image se ralentit pour offrir des détails, l'image se répète pour mieux souligner des moments ». 41 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 68 . 42 Cf. annexe n°6, pp. 20-21 : les statistiques, synthèse. 310 concerneront, en priorité ces lois. En effet, les propositions sont cycliques, les réticences du Board nombreuses 43 , et il existe un temps de latence entre la première évocation du Board et la modification effective de la loi. Il n’est pas non plus aberrant de penser que le football puisse s’inspirer des règles testées in vi vo dans les autres sports collectifs… des véritables laboratoires expérimentaux. L’expérimentation déjà réalisée au football, de la « règle des 10 mètres » au rugby dans le cas d’une contestation, en constitue une parfaite illustration. Notre étude comparative, est dans ce sens une véritable « mine » de perspectives envisageables (le « jeu passif », la modification de la marque… ) ; ces règles vont dans le sens d’un spectacle encore plus attrayant. La faiblesse de la marque est, pour Christian Bromberger 44 , une des causes qui ne permet pas à ce sport de s’imposer aux Etats-Unis. Ces modifications semblent utopiques… mais les changements récents au volley-ball, caractérisés par une modification radicale de la marque et l’apparition du rôle du « libero » étaient difficilement prévisibles 45 lors de l’étude de l’histoire des lois du jeu par Patrice Fournier en 1997 46 . Les modifications des lois influent sur l’activité… mais ne sont que la partie immergée de l’iceberg. Le passage du législatif à l’exécutif révèle des difficultés inhérentes aux acteurs du jeu, car les lois laissent une part d’interprétation aux arbitres et sont influencées par les usages des acteurs, qui jouent également un rôle dans l’évolution des lois du jeu. D’abord, les arbitres sont responsables de l’application des lois, directement sur le terrain. Un jeu simple, des règles simples, mais paradoxalement une interprétation complexe. Le facteur humain provoque une application non uniforme, et il n’est pas d’interprétation qui ne diffère d’un directeur de jeu à l’autre, d’un pays à l’autre. Des variabilités d’interprétation qui oscillent entre une application stricte de la règle et un arbitrage dans l’esprit des lois du jeu, celle du « bon sens »47 . En fait il semble exister une marge de tolérance et un certain droit à l’erreur pour l’arbitre. La loi fixe un cadre pratique, mais ne précise pas les conditions de

43 Eisenberg, C., Lanfranchi, P., Masson & T, Wahl, A. (2004), op. cit., p. 131 « le Board et le comité des arbitres de la FIFA se montrent prudents pour modifier les règles du jeu. Selon eux, moins il y a de changements, mieux cela vaut ; une plus grande stabilité contribuera à la croissance du jeu dans le monde entier ». 44 Bromberger, C. (1998). Football, la bagatelle la plus sérieuse du monde. Bayard , p. 44. 45 Par contre, Pierre Perlebas, à partir de l’analyse des Championnats du monde de volley-ball de 1988 a anticipé certaines modifications à venir. 46 Fournier, P. (1997). Genèse du jeu de Volley-Ball. Tentative de reconstitution des étapes qui ont jalonné cette genèse de 1940 à 1992. Fournier Patrice, juin 1997, Septentrion, Thèse à la carte. Villeneuve d’Ascq, p. 294. 47 Pour Michel Vautrot : « Il y a dix-sept lois du jeu mais la plus importante n'est pas écrite; c'est la dix- huitième : le bon sens, l'intelligence d'arbitrage, le sens de la justice » ; cité par Annesse, F & Lesay, J-D. (2007), op. cit., p. 124. 311 son application. L’usage de la loi valide ou invalide son bien fondé. Cette difficulté est une réalité. En France, la Commission Régionale des Arbitres de la Ligue du Nord de football, édite chaque année une brochure devenue un véritable livre « L’arbitre ». Celui-ci réactualise, pour le début de chaque saison l'ensemble des 17 lois et propose des centaines de questions- réponses qui servent de référence à la formation des arbitres, depuis 1932 48 . Cette brochure ne semble pas avoir un caractère officiel, mais elle fait référence dans tous les districts et pour tous les arbitres. Son sous-titre, « interprétation des lois du jeu », nous renseigne sur le fait qu'il ne s'agit pas d'un simple rappel des circulaires édictées par la FIFA, mais d'une aide indispensable à tous les arbitres débutants ou confirmés, pour appliquer les lois et connaitre ce qui fait « jurisprudence ». La méthode « question-réponse » constitue la clef de voute de la formation des arbitres qui doivent prendre instantanément des décisions. A ce titre, depuis 1995, la FIFA 49 édite un document sous cette forme approuvé par le Board, qui fait référence, pour les tests écrits que subissent chaque année tous les arbitres. Ensuite les joueurs : « un être humain s'engage dès le départ dans le déroulement d'un jeu aux côtés d'autres individus, et ensemble, sciemment ou non, ils contribuent à opérer un changement dans les règles selon lesquelles le jeu est joué ». 50 En effet, dans un premier temps les joueurs se soumettent plus ou moins aux règles fixées par l’institution 51 . Ensuite progressivement, certains mettent tout en œuvre pour gagner, s’engager pleinement dans le combat et sont incités à jouer à la limite du règlement. Les joueurs « souvent éloignés du centre du pouvoir et uniquement préoccupés de leurs chances de gagner, ont éprouvé l'élasticité de toutes les règles verbales en cherchant des échappatoires et en contournant les intentions des législateurs »52 . Des joueurs testent l’élasticité des lois dans l’unique but de remporter la victoire avec une sollicitation des différentes ressources disponibles : biomécaniques, énergétiques, socio-motrices, cognitives … Des joueurs qui viennent négocier, discuter la loi, ou son interprétation directement sur le terrain, juste pour « mettre la pression à l’arbitre ». Enfin les entraîneurs qui cherchent à faire gagner leur équipe, incitent les joueurs à être à la limite du règlement, avec des actes d'antijeu ou des positions de hors-jeu passifs. Il est possible d’imaginer que tenir le maillot ou marcher sur le pied d’un adversaire sur les corners, sans être vu par les arbitres, puisse s’apprendre à l’entraînement, ou faire partie du

48 1932 est aussi la date du premier championnat professionnel en France. 49 FIFA’s Laws of the Game Booklet : Questions and Answers Book. 50 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 141. 51 Meard, J. & Bertone, S. (1998). L'autonomie des élèves et intégrations des règles en éducation physique. Paris, Puf. 52 Elias, N. & Dunning, E. (1994), op. cit., p. 21. 312

« métier » du footballeur. Les éducateurs réfléchissent sur les systèmes de jeu aux différentes époques pour favoriser en priorité le jeu défensif ou le jeu offensif, utiliser au mieux la loi et s’engouffrer dans les vides juridiques. Par exemple le jeu passif, n’est pas sanctionné au football et il est possible de jouer à conserver tout simplement la balle. Les acteurs participent à l’évolution des lois du jeu. Le jeu « haché » par les hors–jeu dans les années 1920, principalement par les professionnels anglais de West-Ham , et les actes d’antijeu à la fin du XX e siècle ont suscité des réactions du Board. Quand le « jeu se meurt » ou est en danger, le Board fait évoluer les lois du jeu … et grave en quelque sorte de nouvelles lois dans le marbre. Des lois, simples, universelles, « stables » codifient le jeu, lui donnent du sens, le spécifient mais ne se confondent pas avec les pratiques. Le jeu inventé dans les public schools britanniques se métamorphose et devient un jeu populaire « the people’s game », à la fin du XIX e siècle . Ce jeu reste simple, compréhensible par les enfants, qui pratiquent de façon sauvage, sans arbitre et sans la règle du hors-jeu, avec un nombre de joueurs équilibré. Les enfants jouent dans les cours d'école, sur les terrains vagues avec juste des sacs d'école pour faire « les cages ». Les adultes peuvent jouer de façon autonome sur n'importe quelle surface, avec n'importe quel genre de ballon, ce qui fait du football un jeu très populaire. Cette simplicité a permis au football de se développer et de devenir le jeu le plus pratiqué au monde. Les mêmes règles peuvent donner naissance à des logiques motrices et des tactiques individuelles ou collectives très différentes. Les règles fixent plutôt les limites, entre lesquelles tout est permis : un espace de liberté, celui d’utiliser ses pieds mais aussi tout le reste de son corps excepté les bras, pour conserver le ballon 53 , s’organiser pour défendre tout le match, rechercher des individualités pour faire la différence. En fait, il ne s’agit pas d’un déterminisme absolu. Le jeu foisonne de signaux à décoder, et le « jouer » est pour André Menaut 54 du point de vue de la pensée cognitive, une tentative de réduction de l’incertitude. Les lois universelles n’enferment pas le jeu dans un produit manufacturé et stéréotypé. Le philosophe Philippe Schaffhauser montre que les formes culturelles de pratiques « disent à la fois le caractère universel et particulier du football »55 . Un football en effet joué selon différents styles dans les différentes régions du monde. .

53 Coupe du monde 1982 : Le 25 juin à Gijon : Allemagne-Autriche 1-0. Qualifié de « match de la honte », le score acquis au bout de 10 minutes qualifiait les deux équipes pour le tour suivant ; les 80 dernières minutes se sont résumées à un jeu de conservation du ballon. 54 Menaut, A. (1998), op. cit., p. 16. 55 Schaffhauser, P. (2008), op.cit., p. 12. 313

Bibliographie ______

I. Sources, les archives du Board

A/ Les comptes rendus (Minutes of the Annual General Meeting) 1886-2003 qui sont rédigés lors des réunions annuelles du Board. • Cf. annexe n°1, pp. 6-8 : Dates et lieux des réunions de l’IFAB. • Cf. annexes n°8 à 21, pp. 31-88 : Exemples de comptes rendus complets. • Cf. annexes n°22 à 24 : Statuts du Board.

B/ Les ordres du jour (Agenda of the Annual General Meeting) de 1921 à 2003 qui sont envoyés aux membres du Board avant la réunion annuelle.

C/ Les informations fournies sur le site www.FIFA .com depuis 2003.

II. Bibliographie Générale

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B/ Sports collectifs et Jeux

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320

IV. Films

Le pénalty le plus long du monde. Film Espagnol de Roberto Santiago, 2005. L’Angoisse du gardien de but au moment du penalty. Film Allemand réalisé par Wim Wanders, 1972.

V. Iconographie

Basse, P.L & Co. (1998). Football. D’un monde à l’autre. Editions Mango Sport. Eisenberg, C., Lanfranchi, P., Masson, T. & Wahl, A. (2004) . FIFA 1904–2004. Le siècle du football. Paris, Le cherche midi. Radnedge, K. (2006). Football. Histoire de la Coupe du monde. Paris. Rethacker, JP., Thibert , J. & Co. (1973). Joies du football. Hachette, Editions Réalités. Réthacker, J.PH. et Thibert, J. (1974). La fabuleuse histoire du football. Tome I. Des origines à la coupe du monde 1966. Ed O.D.I.L. Paris. Préface Albert Batteux Editions Gründ.

VI. Sites www..com: site officiel de la FIFA. www.footnostalgie.com site comportant un magazine dédié à la mémoire du football www.wearefootball.org .: site d’une association fondée par des historiens universitaires.

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Acronymes ______

AFA : Amateur Football Association AFC : Asian Football Confederation AGM : Annual General Meeting ASL : Amerique Soccer Ligue CAF : Confédération Africaine de Football CAN : Coupe d’Afrique des Nations CDA : Commission Départementale d’Arbitrage CIO : Comité International Olympique CONMEBOL : Confédération Sud Américaine de Football CONCACAF : Confédération Nord Américaine de Football DNA : Direction Nationale de l’Arbitrage DTN : Direction Technique Nationale FA : Football Association FAW : Football Association of Wales FFF : Fédération Française de Football FIFA : Fédération Internationale de Football Association HAC : Havre Athlétic Club. IFAB : International Football Association Board MFBA: Meeting of the Four British Associations NASL : North American Soccer League NFL : National Football League IRF : Irish Football Association OFC : Océania Football Confédération SFA : Scottish Football Association UEFA : Union des associations européennes de Football UGR : Universal Guide for referees UNAF : Union Nationale des Arbitres Français USA : United Soccer Association US(S)FA : United States(of Soccer) Football Association USFSA : Union des Sociétés Françaises de Sports Athlétiques

322

Table des matières ______

Avant-propos : le Board ………………………………………………………... 6

Introduction ………………………………………………………………... 18

Chapitre 1 Loi I : Le terrain 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 26 2. Principes de cette loi …..…………………………………………. 27 3. Historique de la loi …………………………………………………..…. 29 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……….……... 31 5. Décisions du Board liées à cette loi ………………….…..………. 36 6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board .……... 36 7. Expérimentations ………………….……………….…………………. 37 8. Analyse systémique ………………….. …………………………. 38 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences . 39 Synthèse ……………………………………………………………... 39

Chapitre 1 Bis Loi I : La cible 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 41 2. Principes de cette loi ……………………………………………… 41. 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 42 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………… 43 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………… 44 6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……… 45 7. Expérimentations ……………………………………………………… 46 8. Analyse systémique ……………………………………………………… 47 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 47 Synthèse ……………………………………………………………… 49

Chapitre 2 Loi II : Le ballon 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 50 2. Principes de cette loi ……………………………………………… 50 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 51 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………… 52 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………… 56 6. Expérimentations ……………………………………………………... 56 7. Analyse systémique ……………………………………………………… 57 8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 58 Synthèse ……………………………………………………………… 59

Chapitre 3 Loi III : Le nombre de joueurs 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 61

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2. Principes de cette loi ……………………………………………… 61 3. Historique de la loi ……………………………………………………... 63 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………… 64 5. Décisions du Board liées à cette loi …………………………………….... 69 6. Sanctions liées à cette loi ……………………………………………… 71 7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……… 72 8. Expérimentations ……………………………………………………… 73 9. Analyse systémique ……………………………………………………… 74 10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 75 Synthèse ……………………………………………………………… 76 . Chapitre 4 Loi IV : Les équipements 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 78 2. Principes de cette loi ……………………………………………… 78 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 80 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………. 81 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………… 86 6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……… 87 7. Expérimentations ……………………………………………………… 88 8. Analyse systémique ……………………………………………………… 88 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 89 Synthèse ……………………………………………………………… 90 . Chapitre 5 Loi V : L’arbitre 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 92 2. Principes de cette loi ……………………………………………………… 92 2.1. Principe d’autorité ……………………………………………… 92 2.2. Principe de justice ……………………………………………… 92 2.3. Principe de neutralité ……………………………………………… 94 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 95 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………. 97 4.1. Régulateur du jeu ……………………………………………… 97 4.2. Place de l’arbitre ………………………………………………. 98 4.3. Directeur du jeu ………………………………………………. 100 4.4. Déplacements de l’arbitre ……………………………………… 100 4.5. Gestes de l’arbitre ………………………………………………. 100 4.6. Fonction de sanctionner ………………………………………. 101 4.7. Pouvoir de l’arbitre ………………………………………………. 102 5. Décisions du Board liées à cette loi ………………………………………. 104 5.1. Clause de l’avantage ………………………………………………. 104 5.2. Protection de joueurs ………………………………………………. 105 5.3. Rapport de l’arbitre ………………………………………………. 106 5.4. Coaching ………………………………………………………. 107 5.5. Protection juridique ………………………………………………. 108 6. Sanctions liées à cette loi. ………………………………………………. 108 324

7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board. ………. 109 8. Expérimentations. ………………………………………………………. 109 9. Analyse systémique ………………………………………………………. 110 10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 111 Synthèse ……………………………………………………………… 111

Chapitre 6 Loi VI : Les arbitres assistants 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 114 2. Principes de cette loi ……………………………………………………… 115 3. Historique de la loi …………………………………………………….... 116 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………. 116 4.1. Les empires deviennent des juges de touche ………………………. 116 4.2. Evolution des compétences des assistants ………………………. 117 4.3. Déplacements et position des arbitres assistants ………………. 118 4.4. Mission prioritaire de l’assistant ………………………………. 119 4.5. Introduction d’un quatrième arbitre …………………………….… 119 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………… 121 6. Sanctions liées à cette loi ……………………………………………… 121 7. Expérimentations. ……………………………………………………… 122 8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 123 Synthèse ……………………………………………………………… 123

Chapitre 7 Loi VII : La durée de la partie 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 125 2. Principes de cette loi ……………………………………………………… 125 2.1. Un temps mesuré ……………………………………………… 125 2.2. Un temps de repos …………………….……………………….. 126 2.3. Arbitre maître du temps ……………………………………………… 126 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 126 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………… 127 4.1. Durée de la partie définitivement fixée ……………………… 127 4.2. Allongement du temps de jeu effectif et lutte contre le gaspillage 128 4.3. Prolongement de la partie ……………………………………… 131 4.4. Durée de la pause entre les mi-temps ……………………………… 132 5. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……… 132 6. Expérimentations ……………………………………………………... 133 7. Analyse systémique ……………………………………………………… 135 8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 136 Synthèse …………………………………………………………….. 137

Chapitre 8 Loi VIII : Le coup d’envoi et les reprises de jeu 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 139 2. Principes de cette loi ……………………………………………………… 140 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 141 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………… 142

325

4.1. Tirage au sort… le gagnant ne peut plus engager ………………… 142 4.2. Possibilité de marquer directement ………………………………… 142 4.3. Modification de la procédure, de la définition ………………………… 143 4.4. Ballon en jeu : du ballon qui roule au ballon qui bouge ………… 143 4.5. Changement unique de côté ………………………………………… 143 4.6. Reprises de jeu : du ballon lancé en l’air à la balle à terre ………… 143 4.7. Lieu de la balle à terre ………………………………………………… 144 5. Décisions, sanctions, infractions liées au coup d’envoi ………………… 144 6. Décisions, sanctions, infractions liées à la balle à terre ………………… 145 7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ………... 146 8. Analyse systémique ……………………………………………………….. 146 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 147 Synthèse ………………………………………………………………. 149

Chapitre 9 Loi IX : Le ballon en jeu et hors du jeu. 1. Loi actuelle ………………………………………………………………. 150 2. Principes de cette loi ……………………………………………………….. 150 3. Historique de la loi ……………………………………………………….. 151 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………….. 152 4.1. Ballon en jeu ………………………………………………………. 152 4.2. Ballon hors du jeu ………………………………………………. 153 4.3. Du ballon qui roule au ballon qui bouge ……………………….. 153 5. Analyse systémique ………………………………………………………. 153 6. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 154 Synthèse ……………………………………………………………….. 155

Chapitre 10 Loi X : Le but marqué 1. Loi actuelle ……………………………………………………………….. 157 2. Principes de cette loi ………………………………………………………... 158 3. Historique de la loi ………………………………………………………... 159 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………… 159 5. Décisions du Board liées à cette loi ………………………………………... 161 6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ………… 162 7. Expérimentations ………………………………………………………... 164 8. Analyse systémique ………………………………………………………… 165 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 166 Synthèse ………………………………………………………………… 168

Chapitre 11 Loi XI : Le hors-jeu 1. Loi actuelle ………………………………………………………………… 170 2. Principes de cette loi ………………………………………………………… 170 3. Historique de la loi ………………………………………………………… 172 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………… 174 4.1. « Règle des trois joueurs » devient « règle des deux joueurs » …………. 174 4.2. Position de l’attaquant ………………………………………………… 176

326

4.3. Libre circulation du ballon et des joueurs ……………………….. 177 4.4. Joueurs ont de moins en moins de possibilité d’être sanctionnés .. 178 4.5. Transformation de l’interprétation de la loi ……………………………... 178 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………….. 180 5.1. Facteur temporel : de l’instant d’apprécier au moment de sanctionner 180 5.2. Hors jeu passif ……………………………………………………….. 181 5.3. Position de l’attaquant ……………………………………………….. 182 6. Sanctions liées à cette loi ……………………………………………….. 183 7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……….. 184 8. Expérimentations ………………………………………………………. 184 9. Analyse systémique ………………………………………………………. 188 10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 190 Synthèse ………………………………………………………………. 191

Chapitre 12 Loi XII : Les fautes et incorrections 1. Loi actuelle ………………………………………………………………. 195 2. Principes de cette loi ………………………………………………………. 196 2.1. Jouer sans les mains ………………………………………………………. 197 2.2. Droit de charge limité ………………………………………………. 197 2.3. Contrôle de la violence ………………………………………………. 197 3. Historique de la loi ………………………………………………………. 198 4. Fautes et sanctions techniques ………………………………………………. 200 4.1. Fautes sanctionnées par un coup franc direct ……………………….. 202 4.2. Fautes sanctionnées par un coup franc indirect ……………………….. 205 4.3. « La règle de l’avantage ». Une absence de sanction technique ……….. 205 5. Fautes et sanctions administratives ……………………………………….. 206 5.1. Avertissement ……………………………………………………….. 206 5.1.1. Distinction entre carton jaune et avertissement ………………... 206 5.1.2. Nombre et nature des fautes ………………………………………... 207 5.2. Exclusion ……………………………………………………………….. 208 5.2.1. Exclusion et carton rouge ………………………………………… 208 5.2.2. Nature des fautes ………………………………………………… 210 5.3. Sanctions techniques et sanctions administratives ………………………… 211 5.3.1. Double infraction ………………………………………………... 211 5.3.2. Double peine ………………………………………………………… 211 5.3.3. Triple peine ……………………………………………………….... 211 6. Analyse des transformations de la loi ………………………………………… 214 6.1. Les mains et « le jeu au pied » ………………………………………… 215 6.1.1 Prohibition pour le joueur ………………………………………… 214 6.1.2 Droit de porter le ballon pour le gardien …………………………. 215 6.2 Intentionnalité de la faute et l’interprétation des règles par l’arbitre …. 216 6.3 Droit de charge …………………………………………………………. 219 6.3.1 Droit de charge sur le joueur …………………………………………. 216 6.3.2 Droit de charge sur le gardien …………………………………. 222

327

6.3.3 « Tripping » ………………………………………………………. 223 6.4 Obstruction et jeu de corps ………………………………………. 224 6.5 Logique sécuritaire et jeu dangereux ……………………………….. 226 6.6 Comportement antisportif et conduite inconvenante ………………... 229 6.7 Temps de jeu ……………………………………………………….. 231 7.7.1. Volonté d’augmenter le temps de jeu effectif ………………... 231 7.7.2. Lutte contre le gaspillage du temps de jeu utile ………………... 231 7. Décisions du Board liées à cette loi ………………………………………... 233 8. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ………… 234 9. Expérimentations ………………………………………………………… 236 10. Analyse systémique ………………………………………………………… 237 11. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 240 Synthèse. ………………………………………………………………. 241

Chapitre 13 Loi XIII : Les coups francs 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 217 2. Principes de cette loi ……………………………………………………… 248 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 248 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………. 249 5. Infractions et les sanctions liées à cette loi ………………………………. 252 6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ………. 253 7. Expérimentations ………………………………………………………. 254 8. Analyse systémique ………………………………………………………. 255 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 256 Synthèse ……………………………………………………………… 256

Chapitre 14 Loi XIV: Le coup de pied de réparation 1. Loi actuelle ……………………………………………………………… 258 2. Principes de cette loi ……………………………………………………… 258 3. Historique de la loi ……………………………………………………… 259 4. Transformations de la loi décidées par le Board. …………………….… 260 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………… 262 6. Sanctions liées à cette loi ……………………………………………… 262 7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board …….... 264 8. Expérimentations ……………………………………………………… 265 9. Analyse systémique. L’influence de cette loi. ……………………… 266 10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 267 Synthèse ………………………………………………………………. 267

Chapitre 15 Loi XV : La rentrée de touche 1. Loi actuelle ………………………………………………………………. 269 2. Principes de cette loi ………………………………………………………. 269 3. Historique de la loi ………………………………………………………. 269 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………. 270 5. Sanctions liées à cette loi ………………………………………………. 273

328

6. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……….. 274 7. Expérimentations ………………………………………………………... 274 8. Analyse systémique ………………………………………………………... 275 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 275 Synthèse ………………………………………………………………… 275

Chapitre 16 Loi XVI : Le coup de pied de but 1. Loi actuelle ………………………………………………………………… 278 2. Principes de cette loi ………………………………………………………… 278 3. Historique de la loi ………………………………………………………… 278 4. Transformations de la loi décidées par le Board ………………………… 279 5. Décisions du Board liées à cette loi ………………………………………… 281 6. Sanctions liées à cette loi ………………………………………………… 281 7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ………… 281 8. Analyse systémique ………………………………………………………... 282 9. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 282 Synthèse ……………………………………………………………….. 283

Chapitre 17 Loi XVII : Le corner 1. Loi actuelle ………………………………………………………………. 284 2. Principes de cette loi ……………………………………………………….. 284 3. Historique de la loi ……………………………………………………….. 285 4. Transformations de la loi décidées par le Board ……………………….. 285 5. Décisions du Board liées à cette loi ……………………………………….. 286 6. Sanctions liées à cette loi ……………………………………………….. 286 7. Propositions de transformation de la loi rejetées par le Board ……….. 287 8. Expérimentations ………………………………………………………. 287 9. Analyse systémique ………………………………………………………. 288 10. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 289 Synthèse ………………………………………………………………. 289 . Chapitre 18 Les tirs au but 1. « loi » actuelle. ………………………………………………………. 291 2. Principes de cette « loi » ………………………………………………. 292 3. Historique de la « loi » …………………………………………….… 294 4. Transformations de la « loi » décidées par le Board ………………………. 295 5. Décisions du Board liées à cette « loi » ………………………………. 296 6. Expérimentations ………………………………………………………. 296 7. Analyse systémique ………………………………………………………. 297 8. Comparaison avec les autres sports collectifs : similitudes et différences 298 Synthèse ……………………………………………………………… 298

Conclusion ……………………………………………………………………… 301

Bibliographie I. Sources : Les archives du Board ………………………………………. 314 329

II. Bibliographie Générale ……………………………………………………… 314 III. Bibliographie Thématique ………………………………………………… 315 A. Football ………………………………………………………………… 315 B. Sports collectifs et jeux ………………………………………………… 317 C. Lois, Règles, Lois du jeu, Arbitrages ………………………………… 318 D. Règlements de la « Football Association » et « Football Rugby » … 319 IV. Films ……………………………………………………………………….. 320 V. Iconographie ……………………………………………………………….. 320 VI. Sites ……………………………………………………………………….. 321

Acronymes ……………………………………………………………………….. 322

330