A La Decouverte Des Minyankas Du Cercle De Koutiala
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Page 1 sur 17 SEYDOU MAOUNIA DEMBELE INSTITUTEUR EN RETRAITE ANCIEN MAIRE DE LA COMMUNE DE KOUTIALA A LA DECOUVERTE DES MINYANKAS DU CERCLE DE KOUTIALA KOUTIALA Décembre 1992 et complété en 1995 Page 2 sur 17 A LA DECOUVERTE DU CERCLE DE KOUTIALA Sommaire INTRODUCTION………………………………………………………………………………………………… 3 I – Couverture géographique du cercle………………………………………………………………3 II – L’appellation Minyanka ?................................................................................. 3 III – La société minyanka……………………………………………………………………………………… 4 IV – Cosmogonie et religion traditionnelle…………………………………………………………… 5 V – Naissance et choix du prénom……………………………………………………………………….. 8 VI – Circoncision et excision……………………………………………………………………………………. 9 VII – Le mariage traditionnel…………………………………………………………………………………… 10 VIII – La mort - Les funérailles……………………………………………………………………………………12 IX – La colonisation……………………………………………………………………………………………………….. 14 X – Le coton dans le développement du cercle…………………………………………………………….. 15 XI – La commune…………………………………………………………………………………………………………… 15 XII – Conclusion……………………………………………………………………………………………………………….. 17 Page 3 sur 17 INTRODUCTION KOUTIALA, Kudiakâh, capitale du coton est une circonscription administrative répondant de ce nom, le cercle. Dans son contour, il est limité, dans le sens des aiguilles d’une montre à partir du nord, à midi, par les cercles de Bla, San, Yorosso, une partie du Burkina-Faso, les cercles de Sikasso et Dioila. Koutiala est aussi une commune en plein développement, administrée par un conseil municipal de 37 membres, présidé par un maire assisté de 7 adjoints. Le cercle est placé sous l’autorité d’un administrateur civil appelé commandant de cercle assisté de deux adjoints. Il est divisé en 6 arrondissements : M’Pessoba, Kouniana, Molobala, Zangasso et central. I – COUVERTURE GEOGRAPHIQUE DU CERCLE Physiquement le pays est une pénéplaine soudanaise typique : son aspect est celui d’une savane herbeuse parsemée de grands arbres utiles : karité, néré, baobab, fromagers, kapokiers, cailcédrats, lianes zaban et popo. Les zones basses, envahies par les eaux, forment ainsi de vastes plaines inondées notamment autour de Fonfona, Sourbasso, Kouniana, Zangasso et Ourikéla. Ces espaces sont réservés à la culture irriguée du riz. Les sols sableux, argileux ou latéritiques reposent sur une épaisse couche de grés très durs appelés par les géomorphologues « grés de Koutiala ». Au sud ces grés remontent brusquement en surface, rompant avec la monotonie du paysage aux environs de N’tosso, Zangasso, Tiéré , Sao, Ourikéla. Les paysans minyanka distinguent trois qualités de sols facilement repérables à leur couleur. La terre noire argileuse appelée téwongo, les sols jaunes sableux ou mra et les sols rouges latéritiques, yanga ou nyanga. Ces derniers sont impropres à l’agriculture mais riches en minerais de fer. La population totale du cercle s’élève à 243 757 habitants dont 180 000 minyanka environ, répartis dans 261 villages sur une superficie de 12 000 km2, soit 20 habitants au km2. II – MINYANKA, MINGA, MIANKA, d’où vient cette appellation ? Nous sommes d’accord avec Monsieur Bazin quand il dit, je cite : « ceux que tout le monde appelle aujourd’hui les minyankas se donnent eux-mêmes le nom de Bamala, Bamana, en dépit de l’usage qui réserve ce terme aux bambara ». Nous partageons également l’avis de Madame Danielle Jonckers, une ethnologue belge dont les séjours successifs totalisent trois ans dans nos villages, quand elle avance que l’expression « bamala- jomo » le parler bamala, s’applique à la langue minyanka, par opposition au bambara, appelé « blo- jomo », la langue des esclaves, parce que ceux qui avaient été capturés par les armées de Ségou, Tondjons, la parlaient. Page 4 sur 17 Pour ma part, Minga, Mianka ne serait-il pas une déformation dialectale de Miniga, c'est-à-dire Malinké du mandé ? Ce qui est sûr, c’est que les patronymes minyanka COULIBALY, TRAORE, DEMBELE, GOITA (entendez par là KEITA) KONE, BERTHE sont authentiquement malinké. Danielle Jonckers ajoute que « le minyankala constituait un arrière-pays où les états guerriers de Ségou et de Sikasso notamment, se livraient à des pillages et à la razzia esclavagiste », c'est-à-dire que notre peuple n’a pas connu un pouvoir centralisé. Chaque village était donc autonome dans des alliances avec les voisins. III – La société Minyanka Elle repose sur une communauté familiale étendue (gbun) se composant des descendants en ligne paternelle d’un ancêtre commun et de leurs épouses. Le terme « gbun » désigne à la fois la communauté et l’espace qu’elle occupe, la concession. Cette famille étendue est placée sous l’autorité du plus âgé. Les repas sont pris en commun : groupe des femmes, groupe des hommes. Le plat du chef est porté dans sa chambre. Dans l’éducation des enfants, les garçons ne s’affichent point auprès de leur géniteur mâle. L’enfant ne fixe pas son père ou le chef de famille quand celui-ci lui parle. C’est le chef de famille appelé « Baba » qui est père de tous les enfants, même quand il n’en détient pas (du cordon de son pantalon comme il est dit). Les garçons sont vite mis à la garde des moutons et des chèvres puis des champs contre les prédateurs : singes et mange-mil qu’ils éloignent de leurs cris, d’un petit tam-tam ou de cailloux lancés d’une fronde, puis ils accompagneront à 10-12 ans les aînés dans les opérations culturales. Ils intégreront une société de culture de leur âge. Après la circoncision, ils seront initiés au NYA, au DAGORO ou au KHORO. Les filles quand à elles, vaquent tôt auprès de leurs mères au nettoyage de la cour, à la corvée d’eau, à la toilette des ustensiles de cuisine, au pilage du mil, au ramassage du bois de chauffe, des noix de karité, participent à la cuisson des repas, à la préparation du soumbala, du beurre de karité et du dolo, cette bière locale bien prisée dans la société. Avec les camarades de leur âge, elles subiront l’excision entre 13 et 14 ans, avant le mariage. Les familles sont disposées en clans, séparées dans chaque quartier par des places et des ruelles en chicane. Aux abords de ces places se dressent les greniers à céréales dans lesquels sont puisés chaque matin la ration du jour = déjeuner et dîner. La disposition du village en quartiers distants les uns des autres constituaient un rempart contre l’envahisseur. Quand l’un était cerné, les autres venaient à son secours. L’activité principale de la communauté villageoise étant l’agriculture, la terre reste la propriété des familles fondatrices du village qui l’attribuent gracieusement aux nouveaux migrants. Le village comme le quartier, se développe sur les terres immédiates des cases bien que riches en culture. Page 5 sur 17 Le mil est à la base de l’alimentation, apprêté sous forme de tô mangé avec des sauces de gombo, de soumbala, des feuilles de niébé, de baobab, d’oseille, de dah koumou en feuilles ou en corolles et dont les graines entrent dans la préparation du datou. Datou et soumbala sont deux condiments fortement appréciés et riches en vitamines. Le petit mil offre également des beignets, du mougou- fara ou de la crème, (dégué). Le haricot se mange bouilli avec beurre de karité ou sous forme de couscous (fari) toutogo, de beignets ou sous forme de purée beurrée (toutoflo). La société Minyanka était caractérisée par les scarifications, balafres, tatouages ou cicatrices raciales que nous étions fiers de porter en carte d’identité affichée sur le visage. Les scarifications de l’enfant sont celles caractéristiques du village de sa mère. Les miennes sont celles de Karangasso d’où ma mère est issue. D’autres cicatrices sur tout le corps d’un enfant avec bretelle de causes au dos indiquent que c’est un revenant cabochard ayant survenu. J’en suis un, cinquième garçon et qui n’a pas connu ses aînés (42 cicatrices de revenant sur mon corps). La coquetterie féminine était marquée chez certaines femmes par des petites cicatrices au dos et autour de l’ombilic sous forme de petits pois bien rangés. Ces femmes en ajoutaient également en se faisant tailler les dents en pointe de scie. Mais avec l’âge, elles les perdaient, l’ivoire étant mis à nu. Pour clore ce chapitre, il faut dire que la société minyanka est une société sans classes, au sein de laquelle le forgeron joue un rôle capital. Détenant la science de détecter le minerai de fer, de l’extraire des entrailles de la terre, puis de le fondre et le transformer pour confectionner les outils aratoires du paysan, cet homme jouit du respect et de l’estime publique au village. Il règle les litiges entre familles et individus. Son enclume est une divinité par laquelle on ne jure pas impunément quand on est coupable. Cette même enclume assure la survie des revenants quand elle est sollicitée. Malgré la modernisation des moyens de production du monde rural par l’utilisation des charrues, semoirs, multiculteurs et autres, le paysan aura toujours besoin de dabs, houes, haches, herminettes, de la fabrication du forgeron. Il aura besoin de mortiers, pilons, écuelles que le forgeron taillera dans le bois. Sa femme, potière, fournira des ustensiles de cuisine. Enfin, le minyanka est d’un tempérament calme, laborieux, discret, fier sans vantardise, respectueux et jaloux de sa liberté. IV – LA COSMOGONIE ET RELIGION TRADITIONELLE La religion traditionnelle, l’animisme, s’exprime en la croyance d’un Dieu unique, Klé, celui-là même des musulmans et des chrétiens, mais en passant par des médiateurs, des interlocuteurs. Ceux-là sont souvent un bois sacré abritant iguanes, caïmans dans une mare, boas ou pythons. Ce sont aussi des jarres ou canaris renfermant des éléments de la nature à l’intérieur des sanctuaires et auxquels est rendu tous les ans un rite sacrificiel. Ce sont enfin des divinités auxquelles on accède par l’initiation après la circoncision : Nya,Dagoro, Nago, Magna, Koro, Bamadjigui. Nya et Dagoro protègent le village des maléfices des sorciers.