Un Messin D'adoption : Jean De Heppe, Seigneur De Brouville Et De Germiny, Ambassadeur De Suède Près La Cour De France
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Un Messin d'adoption : Jean de Heppe, seigneur de Brouville et de Germiny, ambassadeur de Suède près la cour de France Avant de partir en Poméranie et en Suède pour "un nouveau, long et périlleux voyage", Jean de Heppe rédigea le 7 août 1657 un testament qui nous a été heureusement conservé; il nous a appris bien des choses sur la vie et les activités de ce personnage qui semble avoir joué un cer tain rôle à son époque. La famille de Heppe, de confession luthérienne, originaire de Hesse, est connue depuis 1485. Parmi ses illustrations, on trouve Jérô me, maître queux à la cour du Landgrave Guillaume IV à Cassel vers 1550, Jacob, inspecteur des forêts de Hesse (1578-1657) et leur fils Jean Philippe, colonel d'artillerie et vice-commandant de Cassel (1628-1701), Charles-Guillaume, conseiller secret pour la guerre et les domaines du Landgrave de Hesse, qui reçut confirmation de noblesse le 8 juillet 1787. Leur descendance existe toujours en Allemagne(l). Si l'on ignore les parents de Jean, on sait cependant que sa grand mère Schorey était originaire de Hirsfeld (2), qu'il avait un frère et un ne veu, tous deux décédés. Du mariage de ce dernier avec une Hoffmann était né un fils Jean-Simon qui sera son héritier. Jean avait aussi une sœur, également décédée, mariée à un sieur Riesner et père d'Anne-Ma rie qui sera co-héritière de ses biens. Lui-même est né en 1603 peut-être à Hirschfeld. On ne sait à quelle époque il entra au service de la cour de Suède mais vraisemblablement après 1643 car son contrat de mariage ne fait pas état de ce titre; son tes tament le dit "agent de la Couronne de Suède"; un autre document le mentionne "ambassadeur du roi de Suède vers S.M. très chrétienne". Il semble bien qu'il n'ait pas toujours eu à se féliciter de sa situation puisqu'en 1657, il envisageait un voyage en Suède pour réclamer les émoluments qui lui étaient dûs depuis nombre d'années, ainsi que le remboursement des frais déboursés pour le service du prince. Il possé dait une obligation signée de la reine Christine à la demande d'Axel d'Oxenstiern, grand chancelier du royaume décédé trois années aupara vant, un des hommes d'état les plus illustres de son époque. La reine ayant abdiqué en faveur de Charles Gustave (1654), il espérait que ce roi qui le connaissait bien s'acquitterait de cette dette sans trop tarder. (1) Sur la famille, on consultera Gothaisches ade/ig Taschenbuch, série B, 1911 et 1942 ainsi que Genea/ogisches Handbuch des Ade/s, adelige Hauser, série B,t.V, 1961, p. 114. Cette généalogie donne l'ascendance des possesseurs actuels du nom depuis Théodore, né à Cassel en 1801. Nous avons écrit à deux d'entre eux pour avoir des précisions sur Jean de Heppe, objet de cette étude, mais les lettres sont re venues avec la mention : "parti sans laisser d'adresse". (2) Hirsfeld, aujourd'hui Hirschfeld, en Saxe. 237 Il était aussi seigneur de Brouville(3), gentilhomme de la Chambre du roi, bailli et gouverneur des terres du duc de Croy depuis 1635. Il semble qu'il ait rencontré auprès de celui-ci les mêmes difficultés pour se faire payer ses émoluments. En remboursement d'une partie de sa dette, il avait reçu "par forme d'engagement" la seigneurie de Germiny; pour le reste le duc avait voulu lui donner les terres de Stolp et de Gultzau (Gultzow) en Poméranie mais comme elles valaient au plus 3000 risda lers, il les avait refusées. Germiny était une seigneurie lorraine relativement importante (4). Il i y avait là en réalité tro S châteaux, appelés respectivement d'En-haut, d'Emmy ou du milieu, et d'En-bas. Le premier, au XVIIe siècle, appar tenait aux d'Haraucourt et le dernier pour deux-cinquièmes aux d'Our ches, pour trois-cinquièmes à Vian-Pistor Le Bègue. Celui d'Emmy avait été offert en 1534 à Jean-François de Dommartin par sa femme Anne de Germiny, fille du bailli de Nancy. Il en donnera dénombrement en cette année puis en 1540 et 1577. Des Dommartin, la seigneurie passa aux Croy quand Charles Philippe de Croy épousa Diane de Dommartin, comtesse de Fontenoy et dame en partie de Fénétrange. Leur fils Ernest de Croy, marquis d'Havré, baron de Fénétrange convola en 1619 avec Anne de Poméranie, fille de Bogeslas XI dit le Bon, duc de Poméranie et de Claire de Brunswick-Lunebourg. En 1625, celle-ci reprit du duc de Lorraine "le château et maison forte appelé le chasteau Emmy, en basse court, fosses, granges, jardins ... estans à l'entour d'icelle maison, la haulte justice, moyenne et basse". C'est donc ce château que Jean de Heppe reçut après 1642. En 1662, sa veuve Olympe de Cherisey, dame de Germiny en partie, faisait ses re prises pour cette seigneurie. De son côté, la commune de Germiny de vait à l'ambassadeur de Suède depuis plus de 5 ans, 2300 francs barrois sans compter les intérêts. Ayant porté cette affaire au parlement, le pro cureur Benjamin Bondier lui assura qu'il serait payé au cours de l'été 1657. Il avait moins de certitude pour récupérer 1000 francs barrois que lui devait la commune de Fontenoy en Vosges : "debte mauvaise, écrit-il dont il faut tirer ce qu'on peut". Cette localité appartenait aussi pour moitié aux Croy; en 1681, elle était dans les mains d'Ernest Bogeslas, évêque de Kamin, alors absent de Lorraine(5). (3) Brouville (Meurthe-et-Moselle), arr. Lunéville, cant. Baccarat. (4) Germiny (Meurthe-et-Moselle), cant. Colombey, arr. Toul; annexe de Crepey au XVIIIe s. Voir E. OIry, Notice sur le village de Germiny dans les Mémoires de la Société d'archéologie lorraine, 1877, p. 388 et Lepage, Les Communes de la Meur the, Nancy, 1 (1853), p. 413. Le château d'Emmy était à l'époque de Lepage une fer me assez considérable, possession de la famille de Ravine\. (5) Ernest Bogeslav est donné dans L'Art de vérifier les dates et dans La Chesnaye Desbois, Dictionnaire de la noblesse, qui a copié le précédent, comme évêque de Kamin (Camenensis), devenu Kamieniecz (Pologne) et aujourd'hui Ust-Kameno gorsk (U.R.S.S.). La Hierarchia catholica medii et recentioris aevi, de même que Gams, Series episcoporum, l'ignorent. Il est possible qu'il ait été nommé mais non confirmé par Rome. 238 Un autre prince était dans ses dettes : Jean-Louis comte de Nassau Sarrebrück et, avec lui, ses frères Gustave-Adolphe et Walrad (61. En 1655 , il reçut en gage la moitresse d'Altheim (Bade). Elle devait rester sa propriété en 1660 si les Nassau ne lui avaient pas versé son dû, soit 2500 risdallers. La ville de Wetzlar (Rhénanie) lui devait 500 risdallers, celle de Gross-Karlsbad (Palatinat) 1000 florins. A Francfort, à Hirschfeld (Saxe), Dillenbourg et Herborn (Hesse-Nassau), il attendait de l'ar gent proveà nant de successions ou de créanciers. Le testament mentionne également les brebis et les vaches qu'il possédait Cherisey, sa vaisselle d'argent placée dans un coffre de fer chez M. Leà Goullon seigneur de Reignier et ses joyaux demeurés à Metz en son domicile, place des Char rons. Jean de Heppe, de confession réformée, épousa en premières noces Marie Sibille de Schado, originaire de Francfort où sa mère vivait encore en 1643; il épousa en secondes noces Olympe de Cherisey, issue d'une ancienne famille lorraine devenue protestante avant de retourner au catholicisme. Son père Jean, fils de Ch ristophe et de Jeanne d'Orthe s'était marié (par contrat) le 4 juillet 1612 avec Marthe Chauveau (1587- 1637), fille de Mathieu, seigneur de la Grange-Fouquet, Goin en partie, la Grange aux Ormes (mort en mars 1605) et de Claudine Goz (morte en septembre 1614). Sa sœur Anne Chauveau avait épousé en 1604 Jacques Lespingal seigneur de Corny et de Goin en partie dont la fille Suzanne fut la seconde fe mme du célèbre pasteur Paul Ferry. Celui-ci était donc devenu le cousin germain de Jean de Heppe. Une autre sœur Sara épou sera en 1604 Melchior Gauvain d'où, entre autres, François qui figurera au contrat de mariage de Jean de Heppe. Du mariage Cherisey-Chauveau étaient nés cinq enfants : Olympe en 1614, Anne-Elisabeth (1624- 1670), Charles, Jeanne dame de la Gran ge aux Ormes et Nicole, ievenue au catholicisme. Charles assurera la descendance qui perdure encore en épousant Françoise d'Ernecourt. Un de leur fils Louis, baptisé à Metz le 3 juin 1667, qui deviendra lieutenant général des armées du roi, lieutenant des gardes du corps, gouverneur du fort S.-Jean de Marseille, grand croix de S. Louis et l'un des meilleurs généraux de son temps, eut pour marraine, contrairement aux règles ca noniques, Olympe de Cherisey, sa tante demeurée calviniste (71. Le contrat de mariage de Jean de Heppe, seigneur de Brouville, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, bailli et gouverneur des terres et souveraineté de Mgr le duc de Croy, d'Arschot et d'Havré fut passé devant les notaires Jacques Le Bachellé et Jean Bourgeois le 4 juin 1643 . Le mariage religieux n'eut pas lieu à Metz(81 . (6) La généalogie des Nassau-Sarrebrück est dans Moreri, Grand dictionnaire histo rique. ed. , 1732, t. V, 219-220. (7) La reconstitution dep. la parenté a été. faite grâce aux registres réformés conservés aux Archives de la ville de Metz. (8) Le contrat se trouve aux Archives de la Moselle, 3 E 3207 (étude de Le 8achel lé).