GEORGES DUHAMEL ET LA CIVILISATION by JAMES
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GEORGES DUHAMEL ET LA CIVILISATION by JAMES ALEXANDER HOOD A THESIS SUBMITTED IN PARTIAL FULFILMENT OF THE REQUIREMENTS FOR THE DEGREE OF MASTER OF ARTS IN THE DEPARTMENT of FRENCH THE UNIVERSITY OF BRITISH COLUMBIA April, 1949. Abstract of Georges Duhamel et la Civilisation, thesis submitted for the degree of Master of Arts by- James Alexander Hood. Chapter I, La Fonction sociale de l'6orivain. Duhamel1s conception of the r8le of the author in society; his social, moral and political responsibilities. Chapter II, Le De* sinteressement. Deals with Duhamel»s belief in the conflict between industrial and cultural civilization, the former founded on selfishness, the latter on disinterestedness. Chapter III, Le Regno du coeur. An explanation of Duhamel's doctrine for an ideal society, based on brotherly love rather than social coercion. His conception of the moral value of pain and suffering in the development of the individual. Chapter 17, La Crise de la civilisation - La Vie future. Duhamel's belief that the social and industrial mores of the U.S.S.R., and of the U.S.A., reveal the future form of the social institutions of humanity. His criticism of the curtailment of human freedom under the antagonistic political philosophies of both these states. Chapter V, La Crise de la civilisation - Le Ph^nomene panique. Duhamel's criticism of the uncontrolled extension of bureaucratic interference into all levels of human activity in the modern state, with special reference to France. Chapter VI. Le Role de 1'elite. The responsabillties of the intellectual 61ite in contemporary society. , Tt^s duties are, negatively, to defend spiritual civilization against the encroachments of industrial civilization, positively, to extend the influence of true culture by educating the masses. Conclusion. The contradictions to be found in Duhamel's thought. GEORGES DUHAMEL ET LA CIVILISATION CHAPTTRE 1 LA FONCTION SOCIALE DE L'ECRIVAIN. "Deli-Tre" des nalves ideologies du XlXe. siecle, c'est-a-dire d»une confiance excessive dans Involution actuelle de l'espece, j'use de mon droit et remplis mon devoir d'homme vivant: je veux librement connaftre, comprendre, juger, critiquer le temps dans lequel je suis."l II est des ecrivains de souche modeste qui, en arrivant au falte de leur gloire UttSraire, ont oublie leurs origines et leurs responsabilit£s envers ceux, parents et camarades, qu'ils ont connus a leurs debuts. L'histoire, et malheureusement surtout l*histoire toute r£cente, nous fournit maints exemples de semblables desertions. Michel Ragon s'est fait un devoir dans son ouvrage de merite, Les Ecrivains du Peuple. de nous parler de ceux qui n'ont pas fait defection. "Mais voila ... que de ce peuple montent des intellectuels, des artistes, des ecrivains, qui, au lieu de s'amalgamer a. l'elite h^reditaire comme c^tait l'usage etabli, s'y refusent. lis se font une fierte d'Stre des fils du peuple. lis se font une volonte* de ne pas trahir."2 Georges Duhamel, lui, est de ceux qui n*ont pas trahi. C'est vers les pauvres quf a penehe son ame fraternelle, son oeuvre entiere est consacree aux humbles, aux hommes a 1*abandon. "Que ce soit Jules Romains, Georges Duhamel, Charles Vildrac ou Luc Durtain en liaison avec l'Abbaye, tous te*moignent une comprehension et un amour pour le peuple, allant, ehgz certains a s'intdgrer aises revendications sociales."3 1 Paroles de Me*dec in. 204. 2 Michel Ragon, Les Ecrivains du Peuple, 11, 3 Ouvrage cite. 254. - 2 - Pour Georges Duhamel, les mots de fonction soelale n^nt aucun sens politique. C'est-a-dire que, pour lui, la fonction sociale de l*ecrivain nfa aucun rapport avec ses activites en tant que militant de la politique sociale. Gela ne veut pas dire que 1'ecrivain ne puisse accepter de responsabilltes dans le domaine politique. Au contraire, "Chaque ecrivain se trouve le seul juge de son attitude. Notre devoir est toutefois, en raisonnant sur les faits, de chercher les elements d'une doctrine."1 C'est une double fonction que Duhamel s*impose, celle de faire mieux comprendre l'homme a l'homme; celle de critiquer la civilisation et les oeuvres de la civilisation. "Uh ecrivain joue ... a mon regard sa fonction sociale quand il nous aide a mieux comprendre l'homme et le monde, ••• quand il est vraiment un decouvreur, un inventeur, un detecteur, que cette propriety de detection s'exerce immediatement, sur les etres, les evenements, les phenomenes, ou, mediatement, sur les pensees et les ouvrages d'un homme, d'un peuple, d'une civilisation." 2 Duhamel se rend compte que l'homme moderne cherche aveuglement la verite dans une obscurite qui menace d'etre de plus en plus complete; l'homme a perdu la foi, mais, affirme-t-il, il lui reste lui-meme, l'homme. Peu lmporte le progres des techniques machinistes, ce n'est ni dans 1'americanisme, ni dans le communisme, ni dans la bureaucratie, bref ce n'est pas dans tout ce qui vise a 1*augmentation des richesses materielles par l'effort collectif que l'on va trouver le secret du bonheur, mais bien au contraire, le 1 Defense des Lettres, 184. 2 "Deux Textes." Mercure de France, cclxxi, le 15 novembre, 1936, 449. - 3 - bonheur se trouve dans la liberte et plus precisement dans le coeur humain. Henri Bordeaux lui dit, lors de sa reception a l'Academie francaise: . • "vous vous Stes detourne des fausses experiences humaines, la russe et 1'americaine. Elles ne sont pas a l'echelle de l'homme. Elles ne tiennent pas un compte suffisant de la dignite de la personne. Toute votre oeuvre, si avide de bonheur humain, est tournee, si 1'on y regards de pres, vers cette vie morale, cette , civilisation morale qui fortifie et eleve l'individu." x On a reproche a Duhamel de ne pas prendre part aux luttes politiques qui se font jour a l'heure actuelle. Entre autres, Henri Barbusse lui reproche de n'Stre . "ni un revolutionnaire, ni un proletarian. II n'admet guere la violence rectificatrice et constructive et demeure assez rebelle au realisms demesure de la multitude." Mais bien que, dans le mime article, Barbusse se montre tres indulgent pour Duhamel et assez severe pour Salavin, qui est pourtant son fils spirituel, . "l'abfme a la droite de Duhamel," 3 il fait montre d'une incomprehension totale des opinions de Duhamel en lui faisant blame d'un manque de conviction partisans. C'est justement que Duhamel tient a pouvoir travailler librement, sans se subordonner a une philosophic politique quelconque. Ue me suis) • • • "resolu fermement a m'exprimer tout seul," • • • dit-il. "Du moins me 1 Gerard Bauer, "Georges Duhamel a l'Academie." Revue de Paris, iv, le 15 juillet, 1936, 465. 2 Henri Barbusse, "Journal de Salavin par Georges Duhamel." Humanite. le 30 Janvier, 1927. 3 Jean Prevost, Georges Duhamel. 149; semble-t-il boh, quand les hommes se laissent aller a tous les de'lires collectifs, de dire que l'individu seul merits mon acte de foi." 1 N'empeche que, quoique jouissant du privilege du libre arbitre, il s'estime un ecrivain de litterature militante, mais toujours suivant sa definition particuliere; • . "la litterature militante, eelle des gens qui tirent a peu pres tout de leur propre fond."2 Tl semble que Duhamel aimerait qu'il n'y ait pas de rapport entre les problemes politiques et les problemes culturels, qu'il voudrait ne pas s'oecuper de la politique de peur d'y souiller la purete de sa mission spirituelle. Mais voila que, malheureusement, le tourbillon de la politique moderne l'a emporte pour ainsi dire malgre lui, et l'a oblige, tant bien que mal, a s'oecuper i'elle. Pour le metier de politicien il n'a que du mepris. "Les ideologues, les politiques, les orateurs de congrfes s'acharnent a corrompre et les idees, et les termes."3 II les traite de . "vieux specialistes a jamais desertes du genie."4 Mais Duhamel etablit une distinction entre la civilisation mecanique, fondee sur des methodes scientifiques irrefiechies, et une autre civilisation, celle-ci morale, et reposant sur les vraies valeurs culturelles. 1 Defense des Lettres, 184. 2 Chronlque des Saisons Ameres, 55. 3 Paroles de Medeoln. 3. 4 Lettres au Patagon, 44. - 5 - "J'ai consacre une grande part de ma vie a 1'etude et a la critique de notre civilisation occidentale. Examiner la valeur humaine et la portee morale de toutes les belles decouvertes qui ont bouleverse notre civilisation, deceler le danger sous les apparences du bienfait, mettre en garde nos societes frivoles contre la seduction qui vise principalement a creer des besoins nouveaux puis a les satisfaire tant bien que mal, en verite, a la veille de cette guerre, rien ne me semblait plus necessaire et plus urgent."1 Gela veut-il dire que, preoccupy par les grandes questions de valeur morale, M. Duhamel se desinteresse flfela condition populaire? Nullement. Sa predilection va toujours aux pauvres, aux faibles, aux coeurs malades. Cette predilection se fait voir par excellence dans la serie de romans construite autour du meme personnage, Salavin. Duhamel croit que 1*ecrivain a un devoir envers les hommes abandonnes, mais s'il s'occupe des maux de la societe, ce sera suivant l'exemple des revolutionnaires de 1848. Son but sera de former une societe d'apres 1*image ooncue dans ses meditations solitaires. "J'ecris pour ces petites gens d'entre lesquels Je suis sorti. C'est pour eux comme pour les autres que y&± lanctf par le monde maints messages imprimes. Et plus ils sont nombreux a preter l'oreille, plus je me sens fier et content.