76 130 sommaire une photo, une histoire une vie en images 176 Printemps 2012 N°1 Le baiser 90 Sir Alex L'envol de de Vancouver Foot of Africa Ferguson l'Albatros

4 28 54 80 112 154 Du sport Un cru Les fastes Belles Fighting Rien que sous d'exception du palet de concours Cholitas les balles De l'Amour

Qu'il s'arme, comme on arme un bateau, d'images ou de mots, le journalisme est une invitation à la découverte, à la compréhension du monde. Hobo, vagabondage éclairé à travers la planète, témoigne des multiples facettes de l'exercice physique. France Info, qui donne à voir, à chaque instant, l'actualité et la profondeur du sport de compétition, est également 100 le relais de ce qui est devenu ces dernières années un indéniable fait de jours société. C'est deux-là, média de l'instant pour la radio, ou d'un temps plus distendu pour Hobo, n'en traitent pas moins de la même matière et avec d'images le même œil. Ils étaient par conséquent faits pour se rencontrer et pour © panoramic © AFP © Reuters © ap © presse sports © maxppp © abaca © icon sport 2 Hobo printemps 2012 s'entendre. Philippe Chaffanjon, Directeur de France Info Afghanistan du sport sous by Franck Seguin les balles Des bases arrière de Kaboul aux postes de combat dans les montagnes, les soldats engagés en Afghanistan font aussi du sport. Pratique indispensable pour évacuer la pression quotidienne, générée par une guerre où le danger est partout. Récit de Gaël Couturier

Sur la base de Tora, dans le district de Surobi, l’air est pur et les abords du poste sécurisés. Deux bonnes raisons pour les soldats de faire leur jogging à l’extérieur. Ils prennent soin de rester collés au mur d’enceinte. Un tour complet représente environ 2 km. Pour être prêts à intervenir en dix minutes chrono, ils font toujours du sport en treillis.

4 Hobo printemps 2012 OUZBEKIS.

CHINE TADJIKIS. Base de tora TURKMENIS.

Kaboul

AFGHANISTAN

IRAN PAKISTAN

Sport à la dure 200 km e 18 août 2008, dix On a pu malheureusement L soldats français partis constater, lors des drames en reconnaissance depuis du 29 décembre 2011 la FOB* de Tora sont tués et 20 janvier 2012, que PROVINCE lors d’une embuscade dans le danger pouvait venir DE KAPISA BASE DE INDE la vallée d’Uzbin, distante de l’intérieur. WARHOUSE d’à peine 15 km. Les hommes y disposent Vallée d’Uzbin Trois bouts de métal et BASE Située à l’est de la province d’une salle de musculation DE KAIA DISTRICT quelques blocs de béton Kaboul DE SUROBI de Kaboul, dans le district couverte et de quelques ont suffi à construire BASE de Surobi, cette zone est installations extérieures un espace fitness. DE TORA aujourd’hui plus calme. rudimentaires. Un terrain Entre les missions de Elle devrait d’ailleurs être de volley a été installé, à formation pour certains 25 km

bientôt transférée à l’armée l’origine pour répondre et de combat pour jungers stéphane d’autres, il est difficile nationale afghane, que aux attentes des Afghans. de trouver le temps de l’armée française forme C’est ici le sport national sortir du cadre militaire. à être autonome. avec le taekwondo. Les soldats s’entraînent, La base est dominée par Pas de soldats féminins à entre les missions, tous une colline baptisée Tora, parce que le régiment les trois jours. Depuis le début de l’année 2012 et e « Mont-Saint-Michel ». qui occupe la base, le 152 sur ordre du président à son sommet, un fortin d’infanterie de Colmar, de la République Nicolas construit et occupé par les est un régiment de combat. Sarkozy, les sorties soldats français la protège. *FOB : Forward Operating Base trop exposées sont Il offre aux occupants de la (Poste avancé). L’effectif de la FOB réduites au minimum. de Tora est d’environ 600 hommes. Ce soldat fait du sport FOB un confort relatif pour Il est composé uniquement de sans treillis, ce qui les activités de plein air. soldats français et afghans. indique qu’il n’est pas d’astreinte ce jour-là.

6 Hobo printemps 2012 7 « On est une équipe professionnelle, on part tous les jours pour la Coupe du monde et on pense qu’on va la gagner » Lieutenant Pierre

12 Hobo printemps 2012 13 by Guillaume Herbaut

Les Petits As 1999 un cru d' exception L’édition 1999 du tournoi de des Petits As, qui rassemble chaque année à Tarbes l’élite du tennis mondial des 12-14 ans, est , , Dudi Sela, Ashley Harkleroad, Teimuraz Nicolás Almagro, Jo-Wilfried Barbora Strycova, Marcos Baghdatis, Bethanie Mattek, Tomas Berdych, Kevin Anderson, , Antoine Tassart, exceptionnelle. Six des soixante-quatre joueurs présents dans le tableau Espagne, 12 ans Russie, 12 ans Israël, 12 ans USA, 13 ans Gabashvili, Espagne, 13 ans Tsonga, France, République Tchèque, Chypre, 13 ans USA, 13 ans République Tchèque, Afrique du Sud, France, 12 ans France, 13 ans final sont ou ont été classés dans les dix premiers mondiaux ATP. Russie, 13 ans 13 ans 12 ans 13 ans 12 ans

Making of la première fois aux Petits surtout pas décevoir. Je ne humaines entre ces jeunes. ce reportage, la victoire À l'époque, Richard Gasquet As. Guillaume Herbaut, connaissais pas bien le tennis Je me souviens de l’équipe de Gasquet avait poussé est déjà une vedette. Il alors jeune photographe, et pas du tout ce tournoi et russe, plutôt accueillante et L’Équipe Magazine à un a fait, à l’âge de dix ans, se voit confier parL’Équipe je n’avais aucune idée de ce décontractée, de Dudi Sela, traitement « actu ». Un grand la couverture de Tennis Magazine, la mission qui m’attendait. J’ai d’abord un petit marrant. Il est très portrait, sept ou huit photos Magazine avec ce titre : de le suivre dans ce gros voulu traiter l’aspect humain, présent dans le reportage de la nouvelle pépite du « Le champion que la France tournoi. Il raconte : « J’avais mais également insister sur parce qu’il était toujours de tennis français et le sujet était attend ». En 1999, le jeune la pression. C’était ma Richard Gasquet, que j’ai bonne humeur et content bouclé. Revisiter ce travail prodige a douze ans et donc première commande pour suivi pas à pas. J’ai beaucoup de me voir arriver. » Quand aujourd’hui lui donne le droit de s’inscrire pour L’Équipe et je ne voulais travaillé sur les relations Guillaume est rentré de un nouveau sens.

28 Hobo printemps 2012 29 Chez les filles, depuis 1988 et la victoire Millésime 1999 d’, elles sont aussi sept anciennes gagnantes à avoir percé avec plus ou moins de bonheur : , victorieuse en PAR JEAN-DENIS WALTER 1991 et 1992, en 1994, en 1997, Bethanie Mattek en 1999, Dinara Safina en 2000 et , la jeune Lausannoise, qui a réussi le doublé Le tournoi commence par en 2002 et 2003. une cérémonie d’ouverture. Cela laisse quand même plus de vingt lauréats, Du 19 au 29 janvier dernier s’est Ici, les Tchèques avec Tomas Berdych chez les filles comme chez les garçons, déroulée la trentième édition des Petits As, (à gauche ) et Barbora Strycova qui n’ont pas confirmé. rendez-vous incontournable du calendrier (seconde en partant de la droite). Mais revenons à cette édition 1999 qui est une tennistique des jeunes. Que de chemin sorte de contre-exemple. Sur les soixante- parcouru depuis 1982, quand trois joueurs quatre joueurs du grand tableau masculin, du club de Tarbes, Jacques Dutrey, Jean- onze ont fait leur chemin en pro, six ont Claude Knaebel et Hervé Siméon, décident garçons, ont ensuite percé au plus haut même été ou sont encore aujourd’hui classés d’organiser une compétition pour les niveau. en 1986 étant celui qui parmi les dix premiers mondiaux, sans minimes ouverte aux garçons et aux filles. a fait décoller le tournoi, selon Jean-Claude compter Gaël Monfils ou Stanislas Wawrinka, Ils lui envisagent dès l’origine une vocation Knaebel : « Il était venu avec sa maman, c’était éliminés dès les qualifications. Le retour en internationale. Aujourd’hui, ce sont toujours son premier voyage en Europe et, trois ans image sur ce tournoi hors normes est riche les deux premiers et l’épouse du second, plus tard, il gagnait Roland-Garros… » Avant d’enseignements. Il y a le plaisir naturel de Claudine Knaebel, qui gèrent les lui : , en 1985. Après lui : seuls découvrir des champions d’aujourd’hui à l’âge 160 bénévoles et le budget de 850 000 euros. cinq joueurs « connus » ont triomphé : des héros de la Guerre des boutons, de mesurer Les tournois préqualificatifs – il y en a en 1994, – parce que les photos le racontent – leur 42 en France – ont lieu chaque automne. en 1995, Paul-Henri Mathieu en 1996, niveau d’autonomie, d’émancipation. Les vainqueurs y gagnent le droit d’affronter Richard Gasquet en 1999, Rafael Nadal Il y a l’intérêt de constater que ces grands des joueurs étrangers en janvier, durant en 2000 ; , vainqueur en 2003, noms se côtoient depuis leur plus jeune âge et les qualifications qui se tiennent la semaine a seulement commencé à avoir des résultats que les combats qu’ils se livrent aujourd’hui précédant le tournoi. Les huit meilleurs l’été dernier. Il faudra évidemment attendre sont leur quotidien de toujours. Il y a l’émotion Même s’il s’agit d’entre eux rejoindront l’élite française un peu pour juger du réel potentiel de voir transparaître dans leurs expressions et d’un tournoi et internationale de la catégorie dans des vainqueurs les plus récents. réactions de garnements les hommes et individuel, le tableau final. les champions qu’ils sont devenus. Pourquoi les joueurs Combien d’entre eux se feront un nom dans ceux-ci ont-ils réussi et les autres non ? restent groupés quelques années sur les circuits ATP ou WTA ? Physiologie, psychologie, chance, rencontres… par délégations. Jacqueline Adina Cristian, la Roumaine, et Tellement d’éléments peuvent accélérer Ils se déplacent Francis Tiafoe, l'Américain, vainqueurs de ou anéantir un éventuel rendez-vous avec et s’entraînent l’édition 2012, sont-ils mécaniquement promis l’histoire. C’était leur destin. toujours ensemble. Teimuraz Dinara au plus bel avenir ? Rien ne le garantit. L’équipe russe Safina Gabashvili ici au briefing. Depuis l’origine, seuls sept lauréats, chez les

30 Hobo printemps 2012 31 Cinq courts couverts sont réservés aux entraînements. Les terrains sont en dur (Greenset), identiques à ceux où se déroulent les matches. Nicolás Almagro battra au premier tour Jo-Wilfried Tsonga, sorti des qualifications. Almagro sera sèchement battu au tour suivant Nicolás Almagro Jo-Wilfried Tsonga par le russe Pavlioutchenkov.

32 Hobo printemps 2012 33 Rafael Nadal

Quarts de finale Ces images se passent de commentaires. Elles en disent tellement sur Rafael Nadal. Il vient de perdre son match contre Richard Gasquet, il passe de la colère à l’anéantissement. Son ami Nicolás Almagro essaie de lui faire relativiser les choses… Cette rage, cette haine de la défaite qui l’habite déjà expliquent notamment le champion qu’il est devenu.

38 Hobo printemps 2012 39 les fastes du palet by Julien Goldstein

En Biélorussie, dans l’une des nations les plus pauvres d’Europe, rien n’est trop beau pour le hockey sur glace, véritable « danseuse » du Président Alexandre Loukachenko. Fou de ce sport, il l’utilise comme un instrument de pouvoir avec deux grands objectifs : cultiver la fierté nationale et valoriser le pays à l’international.

Finale du Tournoi international annuel de Noël. Huit équipes engagées, composées d’anciens pros et d’amateurs encore en activité. Alexandre Loukachenko (photo de gauche, au centre) pose au milieu des vainqueurs. Une victoire programmée. Les responsables de la sécurité parlaient déjà du planning des joueurs biélorusses pour la finale avant même que la demie ne soit jouée.

54 Hobo printemps 2012 55 TOURNOI DE NOËL Le président Loukachenko paye de sa personne et tient sa place dans l’équipe. Il est le seul à porter casque noir et moustaches. L’adversaire ne vient que timidement le contrer et ses partenaires s’évertuent à lui remettre le palet au bon endroit quand il l’égare. Il n’est pas entré en jeu contre la Russie en finale. Le public est nombreux. Des «invitations» ont été envoyées dans toutes les usines, casernes et écoles. Le public est partagé entre dévotion et ironie. Un brouhaha accompagne chacune des montées du Président sur la glace. La sono tente de couvrir les rires et les cris que déclenchent ses maladresses. Impossible d’obtenir des chiffres précis sur le coût global de l’événement. Les seules étoiles blanches pendues au plafond ont coûté 90 millions de roubles biélorusses (8 000€).

56 Hobo printemps 2012 57 Belles de concours by Martin Schoeller/Agence A

artin Schoeller se un sujet et la personne qui rend à un concours de l’observe. C’est un rapport très Mbodybuilding féminin profond qu’il est impossible par hasard et est immédiatement d’obtenir dans la vie de tous fasciné par ces physiques hors les jours. L’impact de ce genre normes, frappé par l’extrême photographique vient du manque dissonance entre les visages et les d’informations données à corps. Pendant cinq ans, il écume l’observateur. Il se doit de lire les compétitions et photographie un visage sans aucun élément ces athlètes professionnelles extérieur, tel qu’un décor par juste avant leur passage sur le exemple. Toutes les photos de podium. Apprêtées, maquillées cette série ont été réalisées avec et ointes, séchées par le régime le même angle, le même éclairage. pour qu’il ne reste que la peau Le plus difficile dans ce travail a sur le muscle. Pour la majorité été d’essayer de saisir ce moment d’entre nous, homme ou femme, infime durant lequel le sujet est ces photos provoquent au premier inconscient, où il oublie qu’il est chef une forme de répulsion. photographié, pour faire ressortir Alors qu’à l’évidence ces dames la personnalité et l’individualité posent devant l’objectif avec de chacune de ces femmes. » la conviction d’être belles. Martin Schoeller a souhaité créer « Nous nous retrouvons tous cette série hors de tout jugement. entraînés dans les mêmes idéaux Même si cette quête de beauté, du bien, du juste, du beau », car c’en est une, peut sembler analyse Martin Schoeller. Pour irrationnelle. Il ne célèbre témoigner, il a choisi de travailler ni ne condamne, il montre. dans son style habituel. Il explique : « Le close up (portrait en studio) est peut-être helle nielsen, Copenhague (Danemark), 28 ans. mercedes bazemore, Virginia Beach (Virginie, USA), âge NC. TAZZIE COLOMB, Metairie (Louisiane, USA), 38 ans. la forme la plus pure et la plus radicale du portrait. « C’est plus qu’un sport, c’est un mode de vie. J’aime l’entraînement, le régime, « Le bodybuilding me donne confiance. Il me discipline et me fait « Le bodybuilding est ce que je fais. J’aime et je déteste à la fois. Il crée une confrontation entre la discipline et la persévérance que cela impose. J’utilise le bodybuilding me sentir bien et sexy. J’ai le physique que je souhaitais. J’aimerais garder Je me fais du mal. C’est comme une guerre intérieure. » pour sculpter mon corps parce que je trouve le résultat plaisant à l’œil. » mon sex appeal et ma féminité tout en étant forte et en bonne santé. »

81 80 Hobo printemps 2012 irene andersen, Vastra Follunda (Suède), 41 ans. rosemary jennings, Miami Beach (Floride, USA), 40 ans. kim harris, Newport Beach (Californie, USA), âge NC. christine roth, Toronto (Canada), âge NC. « Le bodybuilding est un mode de vie sans lequel je n’existerais pas. » « Je n’arrive pas à trouver les mots pour exprimer ma passion « C’est avec le bodybuilding que j’ai découvert le bonheur. J’adore la concentration, « J'essaye de me réaliser à travers le bodybuilding originel, qui consiste pour ce sport. C’est juste incroyable d’arriver à se construire un physique la discipline et la motivation qu’il faut avoir pour réussir. Il vous faut du cœur ! à mettre en valeur la symétrie et l'équilibre du corps, tout en préservant aussi sculptural. C’est grand. » Ces principes sont présents dans ma vie aussi. C’est un tel accomplissement ma féminité. » personnel. Je considère les personnes qui pratiquent comme faisant partie de ma famille, et les compétitions comme des réunions de cette famille. » 83 82 Hobo printemps 2012 Footof africa by Thomas Hoeffgen/Agence A

« e virus du foot, je l’ai contracté quand je suis Lvenu en 1999 pour un sujet sur le joueur nigérian Jonathan Akpoborie. Il jouait à l’époque pour le VFB Stuttgart C’est à une et je travaillais pour l’édition allemande de Playboy. À la promenade, dernière minute, le joueur n’est une flânerie pas venu et je me suis retrouvé seul à Lagos, sa ville d’origine. photographique Pour m’aider et parce qu’il était que nous convie un peu gêné, il m’a trouvé un chauffeur, un de ses copains Thomas Hoeffgen. qui connaissait bien sa vie, qui Il nous emmène, pourrait m’emmener dans tous les endroits de foot de à travers ses son enfance et de sa jeunesse. arènes de Pour ne pas rentrer les mains vides, je suis donc parti sur football, à ses traces. C’est comme ça, la rencontre en me baladant sur les terrains de foot de Lagos qui avaient vu d’un continent. grandir Akpoborie, que tout a commencé. Ce mélange de vrais stades et d’endroits improbables, tout m’a plu. Ainsi, depuis plus de dix ans, chaque fois que je viens en Afrique, je continue cette histoire. »

Abuja, Nigeria, 1999. Queensmead Stadium, Luzaka, Zambie, 2007.

90 Hobo printemps 2012 91 Lagos, Nigeria, 1999.

92 Hobo printemps 2012 93 Très populaires à La Paz, « Les Déesses du ring », comme d’autres troupes du même genre, ne se produisent pas simplement pour le spectacle Fighting ou l’argent. Elles mènent un combat de tous les jours pour l’émancipation de la femme bolivienne. Pour s’exprimer, elles ont choisi la lucha libre, Cholitas le catch local, qui était, avant elles, le domaine réservé des hommes. by Daniele Tamagni

Julia, Carmen et Yolanda posent en costumes de combat. La tenue traditionnelle des femmes boliviennes.

Julia et Yolanda à l’entraînement. 112 Hobo printemps 2012 113 Avec son mari Oscar, chez eux.

Carmen La patronne Carmen De son vrai nom Polonia Ana Choque dans son Silvestre, Carmen Rosa est une pionnière. restaurant. Elle est à l’origine, il y a dix ans, de la création de la troupe « Las Diosas del ring » (les déesses du ring). À 41 ans, elle veut pratiquer encore longtemps avant de se consacrer au développement de son sport. Forte du succès des « Déesses du ring », sa troupe qui fait de temps en temps des déplacements en province et même à l’étranger, elle veut surfer sur la considération et les encouragements que leur témoignent aujourd’hui les instances politiques qui, soucieuses de donner une vraie place aux femmes, accompagnent le phénomène. Oscar, son mari avec lequel elle a eu deux enfants, est un peu l’agent, le manager, l’entraîneur et Dans l’atelier l’homme à tout faire de la troupe. Sa fille aînée de couture participe à la conception de la mise en scène. qui fabrique les tenues. Son fils, Wismar Junior, vingt ans, est déjà un très bon catcheur. « Toute ma famille est derrière moi », lance Carmen, qui précise tout de même que son mari ne voulait pas suivre, au début. Carmen poursuit en évoquant l’origine de la démarche : « Avec les autres filles, nous montrons que nous, femmes boliviennes, sommes fortes et pouvons faire beaucoup. » Hors du ring, Carmen tient un restaurant familial. Il n’offre que deux tables. Elle travaille dans sa propre cuisine, où elle a aménagé un petit comptoir. Elle y sert principalement des plats à emporter. Chez elle, Sur le ring, Carmen et ses acolytes portent se préparant les vêtements traditionnels des cholitas, les femmes au combat. indiennes indigènes. Elles les achètent dans un atelier de couture d’El Alto, leur quartier, situé sur les hauteurs de La Paz. Elle poursuit : « C’est une partie de notre identité et c’est aussi une manière de montrer que vous pouvez faire tout cela sans trahir vos racines. »

114 Hobo printemps 2012 115 uneune vie en en imagesimages

coach emblématique

, s on gu Textes et propos recueillis par Erik Bielderman recueillis et propos Textes nited, un des clubs les plus prestigieux denited, un des clubs les plus prestigieux Alex Fe r Alex SIR Sir Alex Sir de Manchester U de Manchester À plus de soixante-dix ans, pas raccroché. la planète foot, n’a une sélection d’images à travers évoque de G lasgow l’enfant un parcours hors du commun...un parcours Après plus de cinquante ans de carrière comme joueur puis plus de cinquante ans carrière Après manager, ’ é quipe

130 Hobo printemps 2012 131 L Prevost/ Jérôme une vie en images Saint Johnstone 1960-1964

Pas question pour Alex de refuser une Un essai infructueux offre pour jouer en Première Division. avec les Rangers ne dissuade pas Alex Elle vient de Saint Johnstone. Adieux de continuer à jouer avec larmes et regrets à Queens Park : au foot. À Govan High (photo du haut) « Ce fut un long cauchemar. Il me fallait puis avec Harmony deux heures pour rejoindre l’entraînement Row. Il devient vite la vedette après mon boulot chez Remington. Le club de Govan avant refusait de me payer les frais de transport. d’être remarqué J’ai joué trois ans avec la réserve et

DR par Drumchapel (photo du bas), « Je suis un fils de Govan, sur les bords de la Clyde, une songé à abandonner le foot et à émigrer un des meilleurs cité dans la ville de Glasgow. Traiter Govan de quartier clubs formateurs au Canada. Une épidémie de grippe va est une insulte. C’est ici que mon père travaillait sur les de l’époque. Il chantiers navals. J’ai été élevé dans le respect de la sueur, changer ma vie. Je suis convoqué pour signe ensuite à mais aussi la crainte de la prison et de l’alcool. J’ai eu la Queens Park FC jouer avec l’équipe première à Ibrox Park chance d’être entouré par des parents qui se saignaient et se rapproche pour que leurs enfants aient une chance de réussir. » contre les Rangers. Je réussis un hat- de son rêve de devenir footballeur trick (trois buts consécutifs), le premier professionnel. de l’histoire pour un joueur face aux L’équipe, pourtant en DR Deuxième Division, Rangers dans leur stade. Le lendemain, évolue à Hampden je fais la une. Ma vie bascule. » Park, le stade de l’équipe nationale : « Lorsque j’ai marqué mon premier but, de la tête, face à Alloa Atletic, j’ai cru que 100 000 personnes hurlaient et que je venais de battre l’Angleterre. » ou p DR

« J’étais amoureux de mon institutrice Elizabeth Thomson, S g r comme tous les garçons de la classe. Lorsqu’elle s’est S N mariée en 1953, il n’était pas question qu’avec mon frère, Martin, on loupe la sortie de l’église. On a pris le ferry pour traverser la Clyde et on a fini en stop. Nous sommes arrivés juste à temps pour être sur la photo. Grâce à elle, je me suis vaguement réconcilié avec l’école. » À l’école, ça ne suit pas et, à 16 ans, il est contraint de travailler. Il sera

ou p apprenti outilleur chez Wickman avant de poursuivre chez Remington Rand.

les jeunes années 1941-1960 S g r DR S N

132 Hobo printemps 2012 133 by Harald Hauswald/Ostkreuz Rien que De l’Amour Le FC Union, un des clubs de football de Berlin, rassemble les nostalgiques de la RDA, les « Ostalgiques ». Gangrené à la fin des années 1980 et au début des années 1990 par une frange de ses ultras convertis au hooliganisme, le FC Union est aujourd’hui le refuge de ceux qui, tout en reniant le système est-allemand, regrettent cette époque plus solidaire où l’argent comptait moins. Le photographe Harald Hauswald raconte l’histoire d’un club pas comme les autres. Une immersion de vingt-cinq ans. parmi les fans.

1988. Derby entre le FC Union et le Dynamo Berlin, les deux clubs voisins. Les chocs entre l’Union, club populaire et ouvrier, et le Dynamo, équipe financée par la Stasi, étaient toujours très rudes, sur le terrain comme en dehors. à tel point qu’il fallait parfois les délocaliser, pour raisons de sécurité, au stade du Weltjugend (le stade de la jeunesse mondiale), le plus grand stade de RDA. La sécurité y était assurée par l’armée et non par la police.

154 Hobo printemps 2012 155 Harald photographié, Harald aujourd’hui, Hauswald par sa compagne. « cycliste » PAR anna hartmann en Allemagne. C’est au printemps 1990 qu’avec un groupe de sept photographes de l’ancienne RDA il décide de créer une agence qui aiderait les photographes de l’est à trouver leur voie dans un nouveau système politique avec une esthétique différente. L’agence Ostkreuz est née. Son nom signifie Né en 1954, à Radebeul, près de Dresde. hooligans, sans-abri ou dissidents. Surveillé « croix de l’Est », du nom d’une station de Formé à la photographie dans le magasin de près par la Stasi, ciblé sous le nom de code métro à Berlin qui part de l’Est dans toutes de photo tenu par son père, il se lasse vite « Cycliste », Harald ne peut pas publier ses les directions, précisément ce que veulent des longues heures passées dans la chambre photos. Il noue des contacts clandestins avec faire les sept photographes. Et ils ont réussi. noire. Il découvre Deep Purple, se laisse des journalistes de la RFA qui l’aident à placer Aujourd’hui, l’agence compte 18 membres pousser les cheveux et part suivre la tournée ses photos dans la presse de l’Ouest. de toutes les générations, provenant du groupe de rock est-allemand, La réunification bouleverse sa vie. Son travail, de différents pays européens. Ils travaillent Bürkholzformation, dont il devient l’un considéré comme une chronique visuelle de la pour les grands médias internationaux des roadies. Après l’interdiction du groupe vraie RDA, est désormais reconnu. Ses photos et font régulièrement des expositions en 1973, Harald enchaîne les petits boulots. sont publiées dans tous les grands journaux collectives. Quant à Harald Hauswald, En marchant à travers les rues miteuses et de la République, exposées à l’étranger et, en sa façon de travailler n’a pas changé. Il reste les sombres arrière-cours du quartier de 1997, il reçoit la croix fédérale du mérite, la un photographe de la rue, qui passe ses Prenzlauer Berg à Berlin-Est, il redécouvre plus haute distinction journées à marcher à travers Berlin et la photographie. Il recherche ses sujets qui à capturer ce que les autres ne voient pas. contredisent l’idéologie officielle prônée par le Toujours en argentique, toujours gouvernement est-allemand. Ce qui l’intéresse, en noir et blanc. ce sont les marginaux, ceux qui sont censés ne pas exister dans l’état socialiste, punks,

Harald Hauswald au début des années 90, en déplacement à Wolfsburg avec les supporters.

156 Hobo printemps 2012 157