L'alimentation En Eau De Chaumont
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L'alimentation en eau de Chaumont Au Moyen-Age, un baron féodal choisit, pour bâtir son donjon, le promontoire qui domine les vallées de la Marne et de la Suize. Des habitants désireux de s'établir en lieu sûr se groupèrent bientôt autour du château. Le bourg de Chaumont était né et se développa nor- malement jusqu'à nos jours. Depuis des temps anciens, le problème de l'alimentation en eau de la ville a préoccupé à juste titre les magistrats municipaux. Le plateau chaumontais est calcaire, très perméable en raison des fissures qui cre- vassent sa surface; il est donc absolument sec. Les eaux de pluie s'y infiltrent jusqu'aux couches d'argile imperméable et reparaissent dans les vallées aux sources rares, mais abondantes et très limpides. C'est le cap- tage de ces sources, situées sur un pourtour de trente kilomètres, et leur amenée jusqu'à l'agglomération Chaumontaise, qui constitua l'un des problèmes les plus importants et les plus difficiles à résoudre pour la ville. LA SITUATION AVANT 1867. La ville de Chaumont, d'une population de près de 8 000 âmes, n'était alors alimentée en eau que par les sources de la Buez qui se trouvent au pied du plateau. Les eaux étaient montées au moyen de machines élévatoires établies depuis plus de trente ans et qui ne four- nissaient guère que 80 à 100 m3 d'eau par jour. Le service des machines coûtait à la ville près de 15000 Fr par an. Mais l'eau de ces sources ne suffisait pas aux besoins des habitants et, ce qui était plus grave encore, elle était de qualité assez médiocre. Il est reconnu que les résurgences de la Suize qui coule à proximité troublent l'eau des sources de la Buez. Les services d'hygiène considéraient comme la conséquence directe de cet état de choses les épidémies de fièvre typhoïde et muqueuse, qui se reproduisaient chaque été, ainsi que l'épi- démie de choléra de 1854. Les ravages causés par ces maladies étaient si grands qu'il n'était même plus question d'enterrer décemment les victimes. Les cercueils étaient emportés au cimetière à 4 h. du matin et, après une bénédiction, descendus dans la fosse commune. La situation hydrographique de Chaumont était donc très précaire. Dès juin 1866, le maire de la ville, M. Mion, entrevoyait la nécessité d'une réforme : « L'eau est, sans contredit, l'un des éléments les plus nécessaires à la vie; chaque jour, l'hygiène et les besoins domestiques en exigent une si grande quantité qu'on peut dire à bon droit qu'il faut en avoir trop pour en avoir assez. Aussi, tous mes efforts, toute ma sollicitude tendent- ils à augmenter le volume d'eau que nous procurent nos fontaines publi- ques. Ne pouvant obtenir tout ce qui serait nécessaire de notre établisse- ment actuel où sont installées deux machines à vapeur, j'ai songé à faire amener à Chaumont, au moyen de tuyaux de fonte ou de ciment, les eaux des sources placées à une altitude plus grande que celle du plateau de notre ville ». LE CAPTAGE DES SOURCES DU VAL DARDE ET DE MARNAY (1867-1870), 1° La recherche des sources utilisables et l'élaboration d'un projet. A l'instigation du maire, le Conseil Municipal,confia à l'architecte Monniot et à M. Trautmann, ingénieur en chef des Mines, le soin d'établir des projets en vue de la recherche des sources de leur captage et de l'amélioration dé la distribution d'eau dans la ville. 116 L'ALIMENTATION EN EAU DE CHAUMONT Les sources auxquelles on pouvait songer se trouvaient à une distance de près de 20 km. de la ville et à une altitude moyenne de 340 m. C'étaient les seules qui au captage étaient à une altitude suffisante pour que l'eau pût être amenée aux points les plus élevés du plateau chaumontais. Les ingénieurs ont étudié tour à tour 6 projets dans lesquels ils ont tenu compte de l'altitude du captage, du débit moyen de chaque source et groupement de sources, de l'étiage ordinaire et exceptionnel et de l'estimation des travaux: L'ALIMENTATION EN EAU DE CHAUMONT 117 Par délibération en date du 1er mars 1867, le principe du projet N" 6 fut adopté. Une somme de 300000 F serait consacrée à l'exécution des travaux: captages de Saint-François, les Fontevilles et les Riaux supérieur et amenée des eaux à Chaumont: les sources de Tri meules ne seraient utilisées que plus tard, dès que les ressources le permettraient. Une commission de cinq membres désignés par un scrutin secret fut chargée de préparer, en accord avec l'Administration, un devis qui serait soumis au Conseil municipal avant la réalisation du projet adopté; il fallait en outre faire quelques expropriations. Mais les Chaumontais devaient attendre quelques temps encore avant d'avoir de l'eau en suffisance. Les travaux de captage ne furent com- mencés qu'en 1870. En effet, le Ministre de l'Intérieur critiqua le projet financier élaboré par la commission de cinq membres et désapprouva les combinaisons par lesquelles la ville se proposait de pourvoir aux dépenses. En mars 1869, un projet restreint lui fut soumis, tendant à diminuer les dépenses et à libérer plus promptement les recettes affectées à l'exécution des travaux; un traité à forfait devait être passé avec un entrepreneur. D'autre part, deux propriétaires refusant le passage de la conduite sur leur terrain, il fallait recourir à l'expropriation pour cause d'utilité publique, dont la procédure était assez longue. Cependant la population Chaumontaise s'impatientait. Une pétition, signée d'un grand nombre d'habitants, fut adressée au ministre. Il s'agis- sait d'assurer un service de la première urgence et de faire cesser des rivalités auxquelles la politique n'était pas étrangère et dont le résultat était de nuire à l'intérêt général. L'opinion publique était remuée par les articles parus dans la presse locale. La lettre adressée par les habitants au ministre, le 22 juillet 1869, était ainsi conçue: ... « Deux projets sont en ce moment soumis à votre appréciation. Par le premier projet, la ville serait mise en possession immédiate de toute l'eau nécessaire à ses besoins, an moyen de travaux de canali- sation bien entendu; ce projet assure aussi, sans retard la création d'un réservoir indispensable en cas d'incendie et de plus l'établissement d'un vaste lavoir couvert qu'on aurait près de soi, tandis qu'aujourd'hui la classe nécessiteuse est obligée de parcourir, par les plus mauvais temps de l'hiver, une côte rapide et dangereuse pour rencontrer un lavoir dé- couvert, situé à près d'un kilomètre et demi de la ville. Pour réaliser tous ces avantages, payer les sources à capter, les indemnités qui seront dues aux propriétaires des terrains traverses et les honoraires de l'architecte, la ville aurait à dépenser 300000 Fr dont elle se libérerait en mettant à son budget une somme de 18000 Fr à prendre sur ses revenus libres. L'autre projet n'est que la reproduction du premier: Seulement on l'écourte et on l'amoindrit; on assure que son exécution ne coûterait que 198 000 Fr au lieu de 300 000. Permettez-nous de vous dire, Monsieur le Ministre, l'économie n'est que fictive, ou plutôt n'existe pas: Car d'une part, dans ce projet, on refuse à certains quartiers l'eau qu'on donne aux autres, ce qui n'est ni juste ni équitable ; On supprime la réserve d'eau; On abandonne la construction du lavoir couvert. Toutes ces dépenses, on ne peut s'en affranchir. 118 L'ALIMENTATION EN EAU DE CHAUMONT Le chiffre de 198000 Fr sera donc dépassé. D'un autre côté, pour faire miroiter aux yeux de Votre Excellence de prétendues économies On laisse de côté le prix d'acquisition des sources; Le montant des indemnités à payer aux propriétaires dont les héritages sont traversés par les conduites d'eau sur un parcours d'environ 17 kilo- mètres : Les honoraires de l'architecte; Enfin, l'imprévu toujours important en pareille circonstance. Pour faire réussir ce projet, on allègue aussi qu'au lieu de 37 ans pour la libération de la ville, il n'en faudrait que 13 à 14; mais ce fait n'est pas même exact puisqu'il est certain que le chiffre de 198000 Fr sera forcément dépassé; Puis, si on affectait à son amortissement précisément, les ressources que la ville veut appliquer au projet complet, on ne pourrait réaliser le surplus qu'autant qu'on aurait réglé entièrement le prix du projet écourté, ce qui revient à dire que pendant 14 ou 15 ans, il faudrait encore renoncer aux améliorations indispensables et laisser couler en pure perte l'eau chèrement amenée, et qui serait ailleurs si bien utilisée Peut-on alors hésiter? Du reste il est bon d'ajouter que quand le projet complet sera exécuté et payé, les fonds affectés à son amortissement redeviendront libres puisqu'ils sont pris sur les revenus ordinaires de la ville; et qu'ils pour- ront alors être employés à d'utiles travaux puisque la ville sera à toujours exonérée de cette charge perpétuelle, l'entretien de la machine à vapeur qui monte aujourd'hui une quantité d'eau même insuffisante aux desoins les plus urgents... ». La pétition était signée par au moins 1 200 habitants. Le 9 août 1869, 175 autres chaumontais, regrettant de n'avoir pas eu connaissance de cette démarche, signèrent une seconde lettre où ils déclaraient partager le sentiment de leurs concitoyens.