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Document generated on 09/24/2021 5:19 a.m. Vie des Arts Art-actualité Volume 18, Number 71, Summer 1973 URI: https://id.erudit.org/iderudit/57829ac See table of contents Publisher(s) La Société La Vie des Arts ISSN 0042-5435 (print) 1923-3183 (digital) Explore this journal Cite this review (1973). Review of [Art-actualité]. Vie des Arts, 18(71), 70–83. Tous droits réservés © La Société La Vie des Arts, 1973 This document is protected by copyright law. Use of the services of Érudit (including reproduction) is subject to its terms and conditions, which can be viewed online. https://apropos.erudit.org/en/users/policy-on-use/ This article is disseminated and preserved by Érudit. Érudit is a non-profit inter-university consortium of the Université de Montréal, Université Laval, and the Université du Québec à Montréal. Its mission is to promote and disseminate research. https://www.erudit.org/en/ (1931), le peintre nous fait deviner le jaillis sement d'une eau captée le long d'une allée automnale et que protège une niche de pierre. art-actualité Jean Hugo aime les sources et les bois, niciens, mais dont le délire assez souvent non pas uniquement pour leur secret et leur TORONTO calculé n'écarte pas toujours la recette. Jean fraîcheur; mais parce qu'ils constituent des Hugo a baigné son rêve dans un rayon qui éléments de ce vrai paganisme qui attendent vient d'ailleurs, un rayon qui nous purifie et une bénédiction. A L'ART GALLERY OF ONTARIO: nous anime. Ce rayon traverse la nature qui Depuis de nombreuses années, la peinture JEAN HUGO manifeste ainsi le respect du regard qui l'a vit dans la hantise du tumulte et de ses Une affirmation est devenue aujourd'hui contemplée, respect devant la nature qui a pu manifestations; elle se veut dans l'état d'une courante, celle de parler de la peinture tradi être comparé à celui des Chinois ou de nébuleuse qui porte en gestation tous les tionnelle, entre laquelle et la leur propre les Brueghel. mondes. Projet ambitieux et parfois simplisteI artistes contemporains auraient creusé un Dans ses oeuvres plus anciennes Jean La véritable audace ne consiste-t-elle pas gouffre, sans possibilité de retour. Cette affir Hugo s'était plongé dans le fantastique; c'est aujourd'hui à laisser l'action s'apaiser, à mation résulte bien souvent d'une envie à l'époque où les morceaux de la terre qu'il mettre entre la pensée et le mouvement de la l'égard des oeuvres réalisées par les maîtres; recrée devant nos yeux sont habités par des main la lenteur d'une distillation spirituelle? pour Nietzsche, le dédain est la flèche du centaures ou des licornes; celles-ci sont éclai L'homme commence à ressentir, dans sa vie, désir vers l'autre bord. rées par une lumière qu'adoucit une brume, le besoin de ralentir le temps; et la peinture, Il est difficile de définir la peinture tradi elle-même produite par la respiration d'arbres elle aussi, veut redécouvrir cette suspension tionnelle, puisqu'elle comprend tout; mais en dont les troncs et les branches défoliés se du temps. C'est ce qu'ont fort bien compris réalité ce qu'elle représente s'identifie plutôt déploient comme des poumons. Dans Le Café, Richard Wattenmaker et l'Art Gallery of Onta à un art contemplatif, qui est un art de tou la nuit (1926), si les consommateurs attablés rio en consacrant à Jean Hugo une exposition jours. Pour beaucoup, la peinture contempla se profilent dans l'irréel, en revanche le fais — du 18 mai au 27 juin. tive, la peinture d'un Fra Angelico qui nous ceau lumineux que laisse passer une petite Jean MOUTON baigne dans sa lumière, s'oppose aujourd'hui lucarne sur le fond d'un mur noir projette la à la peinture active, non pas tellement d'ail réalité la plus tangible de ce nocturne. leurs à la peinture qui serait en voie de Dans la suite, c'est le monde quotidien, LA GALERIE AGGREGATION disparition, mais à cet « art du corps » qui sans aucun symbole, que nous aurons devant Le quartier de Front Street, à Toronto, est aurait poussé Van Gogh à se couper une nous; mais ce monde directement regardé, un des plus intéressants de la ville. Il garde, oreille pour la porter chez une prostituée. Un sans aucun intermédiaire, deviendra le rêve malgré la présence des centres St-Laurent et jeune peintre viennois, mort martyr de cet art le plus hallucinant; ainsi, cette Rue à la O'Keefe, un caractère très victorien; les à l'âge de 29 ans, n'a-t-il pas mutilé son corps chaise, Estartit (1953), entre des maisons à façades de brique peinte de ses anciens entre pour le faire photographier après l'avoir en la fois vivantes et transfigurées, cette rue où pôts y témoignent d'un temps où Toronto touré de bandelettes? une chaise abandonnée sert de support à était une ville britannique, comparable (par Sommes-nous arrivés à un terme où, comme une nappe, dont les amples plis semblent l'architecture comme par le protestantisme le rappelait récemment un critique, la question préparés pour on ne sait quelle mystérieuse militant) à Glasgow ou à Belfast plus qu'aux n'est plus de savoir si l'empereur n'a plus cérémonie d'incantation. Dans Ramsgate métropoles nord-américaines. C'est dans ce de vêtement, mais si, sous le vêtement, il y a (1959), les façades, métarmorphosées par un quartier que se dressent le vieux marché encore un empereur. Ainsi l'oeuvre de Jean soleil qui ne marque plus les heures, se haus couvert St-Laurent, et le remarquable Gooder- Hugo, qui atteint l'homme au plus profond de sent côte à côte, comme des topazes, des ham Building (en forme de fer à repasser) lui-même, ressurgit à la lumière; elle est de opales ou des rubis. dont le mur occidental est maintenant peint ces oeuvres dont une époque, qui a mécanisé Suprême aboutissement de la fusion du de couleurs vives par les soins de Dan jusqu'à l'amour, a soif. réel et du surréel, c'est lorsque Jean Hugo Solomon. C'est dans ce quartier que se trouve Jacques Maritain rappelait avec justesse nous montre l'homme tentant d'établir une depuis plus de quatre ans la Galerie Aggrega qu'il y a, d'un côté, les fils de la Musique, communication avec son Créateur. Dans la tion, fort originale parmi les galeries de pein les créateurs qui peuvent être en même temps villa de Meudon se trouvait un Ermite de ture de Toronto, et non seulement par son de parfaits artisans, et, d'autre part, les fils Meudon (1933); à l'abri d'un bosquet dans emplacement inhabituel (loin de Yorkville ... ). de la Technique, les professionnels qui peu un creux de terrain, qui forme une petite La Galerie Aggregation a quitté ses anciens vent aussi être de mauvais artisans. Jean cellule comme celle d'une abeille dans son locaux de Jarvis Street à l'automne dernier, Hugo se range parmi les fils de la Musique. alvéole, l'homme agenouillé travaille patiem mais elle est demeurée fidèle au quartier, Il fut très lié avec les poètes et les peintres ment pour que s'écoule le miel de son oraison. puisqu'elle s'est installée 83, Front Street Est, surréalistes, tous en général d'excellents tech Dans La Fontaine miraculeuse de Kerinec précisément dans un de ces anciens entrepôts Le peintre Jean HUGO. Jean HUGO (Phot. Claude O'Sughrue) L'Ermite de Meudon, 1933. Détrempe sur toile; 10% PO. x 13%, (26 x 33.6 cm.) Coll. Jacques Maritain. 70 à la glorieuse façade ornementée. le minimalisme. Particulièrement remarquables il s'agit d'un courant qui importe aujourd'hui, L'originalité de cette galerie tient d'abord à sont les peintures acryliques sur plexiglass de et le contenu canadien y serait naturellement sa politique. Elle entend montrer les oeuvres Gabriele Abel (jeune femme d'origine tchèque) mis en valeur. La diffusion serait ensuite de « jeunes artistes canadiens ». Lynne Wynick, à la technique pointilliste, aux couleurs écla assurée non seulement par des expositions, qui anime la galerie en compagnie de David tantes, aux formes pures inspirées de coquil mais aussi par des programmes éducatifs où Tuck, nous explique qu'il s'agit de nationa lages et da figures géométriques; les abstrac jouerait un grand rôle la collection de diapo lisme bien entendu et non de chauvinisme: tions de paysages du Torontois Bob Jordan, sitives que la galerie a d'ores et déjà com les artistes représentés résident en principe qui, après une période de purs aplats, mani mencé à constituer systématiquement pour au Canada; peu importe d'ailleurs qu'ils s'y festent à nouveau un élément plus expressif servir à la défense et illustration de ces trouvent depuis quelques mois ou de nom sinon expressionniste dans le coup de pin artistes. breuses années. L'essentiel est que leur oeuvre ceau; l'oeuvre de Robert Sinclair, artiste des Ajoutons que la galerie s'intéresse aussi reflète l'influence du milieu canadien, qu'on Prairies dont le chemin a curieusement croisé bien aux oeuvres d'art réalisées en verre, en y puisse lire la trace de I' « environnement x celui de Jordan, et qui a une prédilection pour tissage, en poterie, qu'aux tableaux, sculptures canadien, soit naturel, soit culturel et idéolo le thème épuré de la route, qu'il traite en et gravures ou dessins. Les animateurs jugent gique. Quant à la «jeunesse, » elle n'est pas aquarelle et en sculpture de plastique; les que les arts appliqués ont tendance à être davantage affaire d'état-civil; il convient sim gravures d'Ed Bartram (né à London) qui sont maltraités de ce côté-ci de l'Atlantique, n'ont plement que ces artistes ne soient pas connus, essentiellement des détails très agrandis de pas conquis un statut équivalent à celui des établis, lorsqu'ils commencent d'exposer à la lichens ou de veines rocheuses et qui com oeuvres d'art pur.