DES PETITES A AUX PREMIERS PAS DE L’UFOLEP : AUX ORIGINES DU SPORT LAÏQUE EN (1895-1939)

Éric Claverie

L'Harmattan | « Sciences sociales et sport »

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université -Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan 2020/1 N° 15 | pages 43 à 72

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Éric Claverie

« À l’heure où le communisme organise le sport ouvrier avec beaucoup d’intelligence en cherchant à englober le sport dans une politique aveugle de parti, il faut que le gouvernement, s’il veut être fort dans l’avenir, enrôle sous sa bannière les jeunes sportifs. […] Malheureusement, il y a quelques nuages

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan à l’horizon. L’amateurisme marron et le professionnalisme sont deux grands maux1… » Interrogé en 1927 sur sa conception d’un « sport laïque2 » peu avant la création de l’Union française des œuvres laïques d’éducation phy- sique (UFOLEP), le président du Comité national des sports Gaston Vidal imaginait surtout une pratique idéologiquement neutre, abritée par la tutelle

Éric Claverie Professeur EPS et maître de conférence à MCF Staps-Histoire l’UFSTAPS de l’université de Bordeaux, UF-Staps/Université l’auteur développe des recherches historiques de Bordeaux autour des thèmes du courant du sport laïque, du LaCES 7437 sport communautaire en espace postcolonial, et de [email protected] la culture professionnelle des enseignants d’EPS en Aquitaine.

publique et protégée des turpitudes d’un sport spectacle en pleine ascension3. De nos jours, un sport laïque, s’il existe, renvoie-t-il à ces mêmes convictions ? La fédération multisport UFOLEP, sans doute la plus représen- tative4 de ce courant, pose désormais comme axiome le principe constitution- nel de laïcité, augmenté d’une dimension sociale et citoyenne forte : « C’est l’ambition d’un sport vecteur de valeurs telles que la solidarité, le fair-play, le civisme, à travers les principes de laïcité et de citoyenneté5. » Or, répondant aux espoirs de Gaston Vidal, c’est aussi à un sport différent que convient ses dirigeants actuels, comme en atteste le slogan de la fédération : « Tous les sports Autrement ! » 3HXWRQ DORUV HQYLVDJHU GH UHPRQWHU OH ÀO GH O·KLVWRLUH GH FH VSRUW laïque sur notre territoire? Les initiatives en matière d’exercices du corps de OD/LJXHGHO·HQVHLJQHPHQW /( GqVODÀQGX[L[HQHFRQVWLWXHQWHOOHVSDVOHV premiers ferments de cet « autre sport » en France ? Selon Nathalie Sévilla, le sport laïque conjuguerait « morale couber- tinienne et morale laïque » en « une pratique sportive compétitive neutre et pure, moyen d’épanouissement de la personne » (Sevilla, 2013 : 300). Trois

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caractéristiques le singulariseraient : il convierait à une forme d’engagement digne et intégral de la personne, selon des modalités expurgées de déviances morales potentielles, par ailleurs neutres de toute idéologie ou confession. Cette acception contemporaine entre en résonance avec la conception élargie de la laïcité défendue aujourd’hui par la LE, fer de lance de l’idée laïque française depuis le dernier tiers du xixe siècle (Martin, 2016). Pour celle-ci, au-delà du res- pect du principe constitutionnel6, la notion fonderait une philosophie politique faite de « lutte contre les asservissements et les discriminations, promotion de l’esprit critique, et émancipation politique et sociale7 ». Se mettre en quête de l’historicité d’un « sport laïque » exige par ailleurs

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan GHFODULÀHUOHVHQVGHFHSUHPLHUWHUPH(QGpSLWGH©O·LPSRVVLEOHGpÀQLWLRQGX sport » (Darbon, 2008, 581-592), il s’agit ici de focaliser le regard sur l’incorpo- ration de pratiques d’origine anglo-saxonne diffusant en France dans le dernier tiers du xixe siècle, se constituant en « système sportif » plus aisément identi- ÀDEOH8 que l’objet lui-même. Nous chercherons donc à observer l’émergence dans la sphère laïque – scolaire et périscolaire – de pratiques se détachant nette- ment des systèmes gymniques et militaires antérieurs. Dans celles-ci, « la mise en PRXYHPHQWGXFRUSVGDQVGHVSUDWLTXHVpWURLWHPHQWFRGLÀpHVVRXPLVHVjXQ arbitre, dont la compétition interindividuelle constitue l’arrière-plan » fondant « le triomphe de la toute-puissance de l’individu dans un espace idéalement mé- ritocratique » (Bancel & Gayman, 2008 : 203-231) tranche radicalement avec les gymnastiques collectives, dont les principes d’égalité, d’ordre et de ralliement à la communauté nationale faisaient la marque. Dès lors, comment ces pratiques exogènes vont-elles épouser les valeurs de l’écosystème laïque ? À quel rythme et au prix de quelles concessions ou acclimatations du modèle anglo-saxon ? Ce projet consolide et enrichit de précédentes tentatives. Voilà une tren- taine d’années, deux auteurs approchaient partiellement le thème des origines du sport laïque (Maccario, 1987 ; Dubreuil, 1986 : 359-377). L’un comme l’autre, après avoir souligné avec pertinence la place des exercices gymniques et pré- militaires accompagnant les premières décennies d’existence de la Ligue, évo- quaient sans détail l’émergence de velléités sportives au sein de premières struc- tures amicalistes. Bernard Dubreuil décelait plus particulièrement les prémices d’un nouvel argumentaire en faveur du sport à l’orée de la Grande Guerre, WDQGLVTXH%HUQDUG0DFFDULRFRQFOXDLWjODGLIÀFXOWpG·pWXGLHUO·DXWRQRPLHGH diffusion de ces pratiques, trop indissociables du corps doctrinal de la Ligue de l’enseignement. Or, dans un cas comme dans l’autre, l’hypothèse de la naissance d’un sport alternatif dès l’origine du mouvement laïque n’était posée. De manière plus globale, Nathalie Sévilla a récemment réalisé une his- toire politique de la Ligue de l’enseignement dans l’entre-deux-guerres (Sévilla, 2004). Focalisée sur les enjeux idéologiques et les forces sociales et politiques en présence, l’étude n’ignore cependant pas la branche « sportive » de la confédé- ration, traitée au même titre que les autres Unions. On y comprend les enjeux

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nouveaux que sous-tendent les pratiques du corps au sein du mouvement laïque dans les années 1930. Ce travail complète l’essai antérieur de même nature de Jean Paul Martin ((Martin, 1992 ; Martin, 2016). Or, sans relier nécessairement OHVGHX[kJHVGHOD/(HWVDQVVHSUpRFFXSHUVSpFLÀTXHPHQWGHODQDWXUHGHV pratiques sportives qu’elle intègre, ces travaux d’envergure n’excluent pas la possibilité d’une étude plus ciblée vers la genèse d’un sport laïque proposée ici. Celle-ci s’appuie sur la lecture de données archivistiques nouvellement mises à la disposition du public. Ainsi le fonds dit « de Moscou » du fait de son rocambolesque parcours9, constitue désormais une source incontournable pour l’entre-deux-guerres. Il est ici complété par la lecture de la revue de la confédé-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan ration depuis ses origines, consultable au siège de la Ligue de l’enseignement, l’examen des comptes rendus locaux ou nationaux des fédérations des « Petites $ªHWSDWURQDJHVODwTXHVDLQVLTXHGHOHXUVEXOOHWLQV(QÀQODOHFWXUHGHVRU- ganes des fédérations sportives accueillant le sport laïque avant la constitution de l’UFOLEP vient compléter l’investigation de ce corpus. Au regard de ces premières données, peut-on envisager l’existence en France des germes d’un sport laïque dès la diffusion du sport moderne an- glo-saxon ? S’agit-il d’une naissance dont la Ligue de l’enseignement est en droit de revendiquer la maternité, ou plus simplement d’une incorporation de FLUFRQVWDQFH"2EVHUYHUDWRQDORUVSDUIRLVXQpFDUWHQWUHOHVY±X[RIÀFLHOV et les pratiques dispensées dans le champ laïque ? Par ailleurs, de quelle auto- nomie et de quelle marge de manœuvre au regard du mouvement sportif et GHVDXWUHVUpVHDX[DIÀQLWDLUHVFHWWHYRLHVSRUWLYHEpQpÀFLHUDWHOOH /HEHFT 2004)10 ? (QGpÀQLWLYHPDOJUpODVpGXFWLRQRSpUpHFKH]FHUWDLQVGLULJHDQWVGX PRQGHODwTXHGqVODÀQGHVDQQpHVQRXVDGPHWWURQVTXHF·HVWGDYDQ- tage par opportunisme et combat idéologique que la Ligue de l’enseignement reconnaîtra comme siennes des pratiques de nature compétitive et performa- tive se développant à sa base, parfois à son insu. Elle cherchera par la suite à OHVUpYLVHUG·DERUGHQOHVSUpPLFHVG·XQ©VSRUWSRXUWRXVªSXLVÀQDOHPHQW dans une première forme de sport-loisir tous deux conformes à sa doxa. Dans ce mouvement historique, les formes sportives retenues au départ pour leur fonction de rempart au monde catholique seront converties en supports de l’émancipation de l’individu, dans une vision plus sociale et citoyenne de l’exercice de la laïcité. Pour valider cette hypothèse, il nous faudra d’abord éclairer la phase G·XQGLIÀFLOHDFFqVGXVSRUWDXPRQGHODwTXHDYDQWOD3UHPLqUH*XHUUHPRQ- diale11, pour étudier par la suite la poussée d’une demande d’une partie des adhérents et l’adaptation en conséquence d’un discours en faveur d’un sport ODwTXH©SXUªGHWRXWH[FqV(QÀQODSpULRGHFRQWHPSRUDLQHDOODQWGHODQDLV- VDQFHGHO·8)2/(3jOD6HFRQGH*XHUUHPRQGLDOHYHUUDpPHUJHUODGpÀQL- tion d’un sport laïque quasi contemporain.

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I - AVANT 1914 : GYMNASTIQUE PRÉ-RÉGIMENTAIRE MASCULINE ET DÉ- FIANCE VIS-À-VIS DU SPORT

a) L’émergence des œuvres postscolaires laïques

Les 15 premières années de la Ligue de l’enseignement consacrent le passage d’un mouvement d’opinion à une organisation structurée (Martin, 2006 : 18). Sous l’impulsion du socialiste fouriériste et ancien quarante-hui- tard, Jean Macé, la Ligue se donne principalement pour mission l’éducation d’un citoyen éclairé, besoin conséquemment né du rétablissement du principe

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan du suffrage universel. La multiplication des bibliothèques populaires à son initiative est l’un des premiers signes tangibles de cette volonté. La laïcité pour la Ligue s’entend comme « la science à l’école et l’instruction religieuse à l’église, c’est-à-dire la neutralité de l’école12 ». Il s’agit donc prioritairement d’un principe anticlérical plus qu’antireligieux. Le congrès fondateur de 1881 signe l’ancrage dans « la République des républicains » et augure d’un second temps : le projet d’éducation des masses devient le maître mot de la Ligue et la devise « Pour la patrie par le livre et par l’épée » son emblème. Or, après 1894, le projet se renforce par le biais des œuvres postscolaires, nourries des multiples instituteurs et institutrices venus grossir les rangs de la Ligue. Cette phase est marquée d’un combat anticlérical dans un moment crucial allant de l’affaire Dreyfus à la loi de Séparation des Églises et de l’État, en passant par la lutte contre les congrégations religieuses. Conscients, au regard de ces enjeux de la nécessité de toucher l’ensemble de la jeunesse, les dirigeants de la Ligue appellent à la création de « sociétés destinées à combler la lacune qui existe dans l’éducation des jeunes gens de 13 à 20 ans13 ». C’est « la naissance de l’éducation populaire laïque14 ». Ces œuvres proposent des cours du soir, des conférences et lectures, ou déve- loppent des entreprises de mutualité scolaire et des activités de patronage destinées à protéger la jeunesse des périls de sa divagation. Tournées vers le « devoir social », elles sont marquées par l’esprit du solidarisme : « À la dif- férence de l’entreprise uniquement intellectuelle qu’avait tentée Duruy, ces œuvres s’orientent de l’intellectualisme au solidarisme15. » C’est au sein de ce foisonnement nourri de l’esprit laïque que va s’ouvrir un espace de dévelop- pement des pratiques du corps.

b) Les « Petites A16 » : vivier de la jeunesse laïque

Parmi l’ensemble de ces œuvres, les Petites A semblent avoir tenu un rôle essentiel dans la propagation de l’idée sportive au sein du monde laïque. Fon- dées sur le modèle des amicales d’anciens pensionnaires des écoles normales GqVODÀQGX6HFRQG(PSLUHFHVVRFLpWpVG·DQFLHQVpOqYHVGHVpFROHVSULPDLUHV

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connaissent un premier développement dès le début des années 1890, le mou- vement diffusant à partir du nord de la France. Si 56 seulement sont recensées en 1889, leur chiffre bondit à 3 761 moins de 10 ans plus tard. Le Nord, la Seine et la Côte d’Or sont les départements les plus touchés17. Relevant l’expansion du phénomène, Jean-Paul Martin en dénombre 6 233 à l’issue de l’année 1905. Au sein de l’ensemble des œuvres péri et postscolaires s’agrégeant au mouve- ment laïque, les Petites A tiennent même la place dominante : elles se veulent instructives (cours pour adultes), éducatives (causeries, lectures…), sociales (aide mutuelle, recherche d’emploi…), mais aussi récréatives (chant, escrime, tir, jeux…). Leurs intentions et le public qu’elles captent semblent a priori en

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan faire un lieu d’accueil privilégié de la pratique sportive. Des premiers regroupements en fédérations locales ou départementales se signalent alors18 (Paris, Bordeaux, Saint-Étienne, Lyon, puis département de la Seine), tandis que s’organisent les premiers congrès régionaux (1896). Le département de la Loire est pionnier dans un mouvement de structuration avec un premier regroupement départemental en 1907 fédérant plus de 200 Petites A. Des fédérations analogues naissent par la suite dans les départements voisins GHO·$LQO·,VqUHHWOH5K{QH3XLVHQXQ2IÀFHUpJLRQDOGX6XG(VWOHV regroupe et ambitionne de s’étendre aux départements limitrophes. Cet orga- nisme possède même son propre bulletin. L’ultime congrès d’avant-guerre signalé comme « le triomphe de l’école laïque19 », patronné par plusieurs ministres et présidé par Édouard Petit20, ré- SHUWRULH3HWLWHV$HQUHJURXSDQWJDUoRQVHWÀOOHVGRQW GDQVODVHXOH1RUPDQGLH'DQVXQVDWLVIHFLWHQÁDPPpSDUXQPHVVDJH G·HQFRXUDJHPHQWGXSUpVLGHQWGHOD5pSXEOLTXH(3HWLWTXDOLÀHFHWWHMHXQHVVH conquise depuis une vingtaine d’années d’« élite de l’enseignement primaire, debout et en marche vers le progrès et l’avenir21 ». Indéniablement, l’appel lancé à la jeunesse en faveur d’une adhésion à l’idée laïque au moyen des œuvres postscolaires22 20 ans auparavant remporte un succès probant. L’enthousiasme local conduit ainsi à des velléités de structu- ration et d’organisation par la base qui dépassent et concurrencent même par- fois la tutelle centrale. Les thèmes de la continuité de l’école républicaine y sont débattus et mis en application : « De l’école au ménage », « De l’école à la cité » et « De l’école au régiment » constituent ainsi les trois piliers de la mission laïque postscolaire. C’est au sein de cette dynamique que vont s’inscrire les exercices du corps, d’abord circonscrits à la tradition de l’éducation prémilitaire.

c) La tradition d’une éducation prémilitaire du garçon

Lors du congrès fondateur de la LE de 1881, Jean Macé déclarait : « L’important, c’est de commencer tout de suite et de donner aux campagnes de France le spectacle de leurs enfants se préparant, dès l’école, à défendre le

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sol de la Patrie, si jamais l’étranger essayait de revenir le fouler. » À l’évidence, dès les prémices de structuration de la Ligue, le ton était donné en faveur d’une éducation patriotique prémilitaire. Aussi, lors de son deuxième congrès (1882), la Ligue décidait-elle de « prendre en main la cause de l’éducation civique et militaire » via la proposition de son membre, le sénateur Émile Eustache George, par ailleurs rapporteur de la loi du 27.01.1880 consacrant l’obligation scolaire de la gymnastique. La Ligue créait donc en son sein une LQÁXHQWHFRPPLVVLRQGHV°XYUHVPLOLWDLUHVVHWURXYDQWSDUDLOOHXUVWUqVVRX- tenue par la franc-maçonnerie à laquelle appartient le sénateur George23. 1pDQPRLQV VXU FH WHUUDLQ G·XQH SUpSDUDWLRQ SUpPLOLWDLUH DIÀUPpH

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan (Chambat, 1980 : 152), en raison d’une concurrence avec la Ligue des patriotes (LP) de Paul Déroulède (Charpier, 2001 : 19-31) et Joseph Sansbœuf, mais aussi d’un manque d’enthousiaste vis-à-vis de bataillons en milieu scolaire, la Ligue leur préfère les « fêtes d’enfants », ou encore les « bataillons d’adultes » entre 13 et 20 ans. Elle encourage ainsi la création de sociétés conscriptives (appelées cercles cantonaux) par du prêt de matériel, la fourniture de statuts types et de directives relatives à l’orientation des exercices à proposer. Or, sans doute par manque d’instructeurs, les réalisations ne sont pas à la hauteur GHVHVSRLUV 0DUWLQ HWLOVHPEOHTXHFHWHUUDLQG·LQÁXHQFHpFKDSSH jOD/LJXHDXSURÀWGHOD/3HWGHO·8QLRQGHVVRFLpWpVJ\PQLTXHVGH)UDQFH (USGF) lors de la crise boulangiste. Le moment correspond par ailleurs à son détachement d’une position radicalement nationaliste et belliqueuse illustrée par l’adhésion en réaction de quelques-unes de ses éminentes personnalités (Ferdinand Buisson, Georges Clemenceau, Jean Macé) à la Ligue nationale d’éducation physique de Paschal Grousset (Lebecq, 2012 : 87-117), nettement anti-boulangiste et républicaine. On comprend néanmoins que, dans un climat patriotique exacerbé, la Ligue se range du côté d’une éducation prémilitaire mesurée, réservée à l’âge postscolaire et circonscrite à un cadre républicain. Même concurrencée par G·DXWUHVRUJDQLVPHVSOXVUDGLFDX[HOOHFRQÀUPHFHWWHRULHQWDWLRQVXUOHWHU- rain, en faisant notamment appel à une gymnastique rationnelle préparatoire. Ainsi M. Morin, rapporteur de la deuxième commission sur l’Éducation phy- sique de la jeunesse, à l’occasion du congrès de la Ligue de 1894 donne ainsi sa préférence aux « exercices de gymnastique, tir et marches à pied », car « les trois exercices… donnent ces trois qualités indispensables au soldat français : force, adresse, agilité sans lesquelles le courage est réduit à l’impuissance24 ». Néanmoins, bien conscient des dérives idéologiques possibles des sociétés GHJ\PQDVWLTXHHWGHWLUD\DQWÁHXULOHUDSSRUWHXUDSSHOOHjODFUpDWLRQGH sociétés postscolaires rattachées à la LE dans un véritable service public de l’éducation populaire. Ainsi, le désir d’offrir à la jeunesse une propédeutique de l’exercice militaire, adossée à une gymnastique rationnelle, reste éminem- PHQWSUpVHQWGDQVOHVGLVSRVLWLIVSUDWLTXHVGHOD/LJXHGHODÀQGXVLqFOH

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d) Le sport : premiers discours, premières contestations 6LO·RVFLOODWLRQGXFRXSOHSDWULRWLVPHSDFLÀVPHHVWXQHFRQVWDQWHGHOD Ligue depuis sa création25, le retour vers une tendance patriotique redevient fortement d’actualité à partir du congrès de 1905, en écho à la loi sur la conscription réduite à deux ans. Il atteint son apogée en 1913 avec le vote du retour aux trois ans de conscription obligatoire et l’élection présidentielle de Poincaré qui fait l’objet d’une manifestation enthousiaste de la Ligue dans un fort climat patriotique. La relance de l’idée de préparation pré-régimentaire devient d’ailleurs l’enjeu d’une concurrence acharnée entre les diverses socié- tés, catholiques notamment, susceptibles de préparer les jeunes gens au Bre-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan vet d’aptitude militaire. L’USGF et l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA), ouvertement républicaines, se rapprochent alors de la Ligue et rompent avec la Fédération gymnique et sportive des patronages de France (FGSPF), grande concurrente proche des autorités catholiques. /RUVGHVRQVHFRQGFRQJUqVGHV°XYUHVSRVWVFRODLUHVGH0RQWSHOOLHU en 190126, les membres de la 2e commission rappellent les vœux passés et notamment celui de 1900 stipulant « que l’éducation militaire préparatoire est comprise dans le plan général des sociétés d’éducation postscolaire pour les jeunes gens de 16 à 21 ans27 ». Constatant qu’un grand pas a été fait par la création dans les villes de garnison des Maisons laïques ou de Foyers du soldat, ils se félicitent que leurs « associations [puissent] distribuer une EP rationnelle qui servira de préparation progressive à un service militaire de plus en plus réduit ». Si, par ailleurs, les exercices du corps peuvent également offrir « à leur jeune public des jeux attrayants et variés : tir, boule, croquet, paume, quilles pour l’arracher aux amusements de la rue et du cabaret29 », en revanche rien n’est envisagé pour les exercices du corps dans le cadre de O·pGXFDWLRQSRVWVFRODLUHGHODMHXQHÀOOH e commission). Plus largement, tous les bulletins locaux des œuvres postscolaires insistent sur la valeur de cette gymnastique prémilitaire à la fois utilitaire (« dégrossir » avant l’entrée au ré- giment), morale (courage, discipline) et patriotique (conscience de la patrie à défendre). Seuls quelques jeux récréatifs, de tradition française, sont parfois évoqués comme complément à l’exercice physique. Quelques années plus tard, lors du congrès de la Ligue en 1906, Ado- lphe Chéron30UDSSRUWHXUGHODFRPPLVVLRQGHV°XYUHVPLOLWDLUHVV·LQVFULW dans la continuité de cette tendance en rappelant la nécessité d’une formation des jeunes hommes lors du temps de vacuité entre école et service militaire. En revanche, il appelle clairement à une pratique d’une nouvelle nature dans les œuvres postscolaires laïques : le cyclisme31. Pourtant, l’orientation reste prioritairement militaire : il s’agira d’apprendre à « se déplacer rapidement, et d’accomplir en un temps relativement court des randonnées étendues, la lecture d’une carte32 » en référence à « l’infanterie cycliste que l’armée semble vouloir ajouter à ses divisions33 ».

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Il ne faut donc pas se méprendre sur l’amorce de l’usage sportif, tel qu’il pourrait être décelé dans le déploiement de cette innovation dans l’es- pace postscolaire. Constatant par ailleurs l’inquiétante dégénérescence de la « race française » révélée par un nombre très élevé de réformés (« 26 213 gens pour l’avant-dernière classe »), Adolphe Chéron exploite cette donnée pour condamner l’exercice sportif, car « le souci de régénération physique fait as- signer aux exercices un objectif différent de celui pour lequel les sociétés de caractère sportif se sont constituées34 ». Par ailleurs, selon le rapporteur, « plutôt que la production d’une élite sportive ou gymnique, [c’est] l’amélio- ration corporelle de la totalité des jeunes Français [qui] retient l’attention35 ».

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan La critique de l’élitisme corporel accompagne ainsi celle de l’inadaptation de l’effort sportif à la régénération des corps. Apparaissent donc ici, du moins dans les discours, les premières entraves au développement du sport dans la sphère de l’éducation populaire laïque. Quelque temps après, à l’occasion du congrès de 1909, les contestations se précisent. Si l’intention première reste une « éducation préparatoire avant l’in- corporation36 ªODPpÀDQFHjO·pJDUGGHV±XYUHVQRQODwTXHVPRELOLVDQWOHVSRUW HWODJ\PQDVWLTXHjGHVÀQVG·HQGRFWULQHPHQWGHODMHXQHVVHV·DIÀUPHGDQVOH contexte de forte rivalité né des lois de 1904 et 1905 : « Il existe aussi d’autres sociétés, de plus en plus nombreuses, qui sous prétexte de gymnastique, de tir et de sport, sont des foyers d’éducation réactionnaire et cléricale37. » Mais les attaques portent également sur la nature exagérée de l’activité sportive ainsi TXHVXUO·LPPRUDOLWpGHVRQLQÁXHQFH$LQVL5RFKHURQDXQRPGHVPHPEUHV GHODFRPPLVVLRQGHV°XYUHVPLOLWDLUHVGHOD/LJXHpFULW©&HTX·LOIDXWSURV- crire absolument ce sont les exercices athlétiques ou acrobatiques qui déve- loppent surtout la vanité et risquent d’occasionner des accidents graves38. » En revanche, s’associant aux exercices prémilitaires et à la gymnastique rationnelle, le tir trouve toute sa place dans les œuvres. Intégrée aux programmes scolaires GqVODÀQGHO·pSLVRGHGHVEDWDLOORQVVFRODLUHV DUUrWpGXMXLOOHWSXLV instructions scolaires relatives au tir à la carabine Flobert, 16 août 1895), sa pratique ne tarde pas à irriguer les sociétés postscolaires. 'qVORUVGHODÀQGX[L[HVLqFOHMXVTX·jO·DXEHGHOD*UDQGH*XHUUH malgré une phase de recul précédant une réactivation, la priorité est donnée aux exercices prémilitaires masculins dans le champ postscolaire laïque. Cette orientation s’accommode fort bien d’une gymnastique rationnelle propédeu- tique. Les jeux récréatifs, non porteurs d’intentions éducatives, y tiennent la SRUWLRQFRQJUXH4XDQWDX[VSRUWVLOVQHVXVFLWHQWTXHGpÀDQFHHQSDUWLFX- lier au sein de l’institution militaire dont certains membres siègent évidem- PHQW DX VHLQ GH OD WUqV LQÁXHQWH FRPPLVVLRQ GHV °XYUHV PLOLWDLUHV GH OD Ligue. Fidèle à la formule fréquemment présente dans les comptes rendus RIÀFLHOVGHOD/LJXHHQFHGpEXWGHVLqFOH©'HO·pFROHjODFLWpSRXUWRXVª les œuvres postscolaires laïques, dans leurs intentions, restent principalement

50 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

tournées vers le devoir civique tandis que les petites A endossent la fonction de préparation pré-régimentaire. Il semblerait pourtant, à l’observation de données de terrain, que la réalité soit localement différente.

e) L’amorce sportive sur le terrain

Au titre des bonnes relations avec l’USFSA, peut-être en raison des U{OHVKRQRULÀTXHVTX·RQWSX\WHQLU2FWDYH*UpDUGHW-XOHV6LPRQSURFKHV de la Ligue au début du siècle, ou de leur engagement maçonnique, cette der- nière obtient un parrainage de l’Union et la possibilité d’y organiser des ren- 39

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan FRQWUHVVSpFLÀTXHVHQVRQVHLQ . L’autorisation d’y instituer des compétitions nationales d’athlétisme entre œuvres laïques suivra même en 1910. 3RXUWDQWHQFHWWHÀQGHVLqFOHGHWUqVUDUHVDPLFDOHVODwTXHVVRQWPHQ- WLRQQpHVGDQV/HV6SRUWVDWKOpWLTXHV6XUODFHQWDLQHG·DVVRFLDWLRQVDIÀOLpHV en 1896, dont plusieurs dizaines attachées à des établissements scolaires du secondaire, seule l’École normale d’instituteurs d’Arras semble entrer dans cette catégorie. Le développement s’amorce pourtant au tournant du siècle, avec la création de sections sportives au sein des amicales proposant essentiel- lement la pratique de l’athlétisme, du cross-country et du football-association. Le Bulletin de l’Amicale de Roubaix fait par exemple connaître l’existence d’une section cycliste comprenant 37 membres, dont « trois gracieuses sportwomen appartenant au Club des Dames40 », adhérente à l’USFSA à tarif préférentiel, mais également de sections de football-association, de course à pied, de wa- ter-polo et de natation cohabitant avec les traditionnels groupes d’escrime, canne, bâton et tir. Les dirigeants semblent donner une valeur sociale à ces nouveaux usages propices à « retirer les jeunes gens du cabaret ou du beuglant ou même simplement aux malsaines fréquentations de la rue…41 ». En outre, ils invitent à s’inspirer du mouvement catholique : « Pourquoi ne pas imiter les six ou sept cents sociétés de la FGSPF. Les dirigeants des Petites A ne mettent pas assez souvent les sports athlétiques dans leurs programmes42 », WRXW HQ UHJUHWWDQW O·pFKR LQVXIÀVDQW TXH FHX[FL UHFXHLOOHQW GDQV OD VSKqUH laïque : « L’USFSA a essayé sans succès de secouer l’apathie générale du monde laïque43. » /D UpJLRQ QRUPDQGH SDUDvW IDLUH ÀJXUH G·DYDQWJDUGH GDQV OH GR- maine (Loudcher, 2007 : 107-129). L’association sportive Frédéric-Bellanger du Havre remporte ainsi les trois premières éditions du tournoi national des Petites A sous l’égide de l’USFSA de 1911 à 191344. En 1913 est signalée la création locale du Challenge athlétique Brennus, remporté par le même pa- tronage laïque havrais devant les Pupilles de Billancourt. L’année 1914 voit se multiplier les catégories, désormais étendues des seniors aux pupilles. La contagion sportive par la base au sein du mouvement laïque semble toucher d’autres régions : Paris, Nord, Rhône-Alpes, le Sud-Ouest (Hubscher

51 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Revue sciences sociales et sport / Numéro 15

et al., 1992 : 113). La commission ad hoc de l’USFSA est d’ailleurs saisie d’une demande de décentralisation aboutissant à une rencontre nationale à Lyon en 1914, réunissant amicales locales et regroupements similaires en provenance de Roubaix, Paris, Grenoble, Amiens, Dijon, Caen, Lyon…45 Le mouvement semble encore discret et localisé, même si le désir de voir essaimer les pra- tiques sportives au sein des amicales laïques est bien présent dans l’esprit des militants de ladite commission. En témoigne ainsi une circulaire de Léonce Vieillard envoyée aux Comités régionaux USFSA les engageant à « propa- ger les sports dans les petites A46 ». Ainsi, à défaut d’une expansion large, la connexion et l’appui avec le mouvement sportif représenté par l’USFSA

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan sont désormais clairs. Cependant, les intentions du courant sportif laïque demeurent orientées par des intérêts stratégiques.

f) Enjeux de concurrence et de propagande : la perception d’un nouvel intérêt

Dans la querelle née des lois de laïqueisation de la société et du cli- mat anticlérical ambiant, l’intérêt d’un point d’appui sur le sport comme vec- teur de mobilisation idéologique de la jeunesse gagne en évidence. Lors du congrès de la Ligue d’Angers en 1906, le rapporteur de la commission des °XYUHVPLOLWDLUHVH[SULPHODQpFHVVLWpG·XQHUpDFWLRQIDFHDX[°XYUHVFDWKR- OLTXHVGpMjWUqVHQJDJpHVVXUFHWHUUDLQ©1RVÀOLDOHVQHSHXYHQWSDVrWUHHQ infériorité devant les associations confessionnelles47. » Trois années plus tard, son successeur alerte encore sur le retard pris par le mouvement laïque : « Il existe aussi d’autres sociétés, de plus en plus nombreuses, qui sous prétexte de gymnastique, de tir et de sport, sont des foyers d’éducation réactionnaire et cléricale48. » L’année suivante, l’explication est encore plus nette et la né- cessité d’une mobilisation plus ardente : « Quand les évêques se sont aperçus qu’on leur enlevait les écoles, ils ont changé leur crosse d’épaule. À la place des moines-ligueurs ou des moines d’affaires dont parlait Waldeck-Rousseau, ils ont mis des curés acrobates… qui ne redoutent pas de relever leur robe pour faire des exercices physiques49. » En 1910, à l’occasion d’un rapport au FRQJUqVOHSUpVLGHQWGHO·°XYUHGHVSDWURQDJHVODwTXHVGH)UDQFH*%UXQ DIÀUPHQHWWHPHQWODQpFHVVLWpG·XQGpSORLHPHQWGHSUDWLTXHVVSRUWLYHVDX sein des unités laïques dans l’optique de la lutte idéologique qui s’impose dé- sormais : « Que ce mouvement de vulgarisation serve également à combattre, sur le terrain sportif, l’action cléricale et catholique50. » &HFRQJUqVHQO·RFFXUUHQFHRXYUHVHVGpEDWVjXQHSUHPLqUHUpÁH[LRQGH fond sur l’emploi des sports dans la sphère de l’éducation populaire laïque. Les classiques arguments relatifs aux bienfaits de l’exercice physique y apparaissent en phase avec les fantasmes de dégénération de la race française très présents dans les mentalités du moment : les périls sociaux (« éloignement naturel de

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beaucoup de tares trop fréquentes chez les jeunes désœuvrés51 ») rejoignent les DQJRLVVHVGHO·HQIHUPHPHQWVFRODLUH ©DLUYLFLpHWFRQÀQpGHVVDOOHVG·pWXGH52 ») SRXUMXVWLÀHUOHSRXYRLUSURSK\ODFWLTXHHWUpJpQpUDWLI GHO·H[HUFLFH3HXGHGLIIp- rences notables semblent perceptibles de prime abord au regard des précédents raisonnements en faveur des gymnastiques classiques. Or, le discours se précise en différenciant les supports de l’exercice corporel : « Loin de moi l’idée de nier l’utilité de la leçon de gymnastique… mais le jeu libre en plein air est la seule J\PQDVWLTXHQpFHVVDLUHHWVXIÀVDQWHSRXUOHVHQIDQWV53. » Ainsi, de nouvelles vertus sportives voient le jour, au premier rang desquelles la liberté d’exercice face à la gymnastique coercitive : « Il [le sport] forme le corps comme l’impri-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan merie a formé l’esprit : et c’est de leur union que naîtra la race forte et libre qui portera à travers le monde un idéal nouveau : l’idéal de l’effort librement accepté54, noblement consenti, généreusement accepté . » L’aplanissement des différences sociales est également vanté : « Le sport c’est aussi la véritable éga- lité. Toutes considérations d’argent et de naissance abolies, lutter loyalement, se rouler ensemble dans la poussière, n’est-ce pas pratiquer l’égalité absolue ?55 » Des valeurs éducatives inadaptées à l’exercice mesuré de la gymnastique ration- QHOOHYRLHQWpJDOHPHQWOHMRXU©OR\DXWpª©WHPSpUDQFHª©FRQÀDQFHª©VDQJ IURLGª©PDvWULVHGHVHVSDVVLRQVª(QÀQ©ODVDLQHpPXODWLRQªWLHQWWRXWHVD place dans l’argumentation qui rehausse l’initiative individuelle et la volonté au premier rang d’un discours libéral frisant parfois le darwinisme social56 : « Les dures lois de la sélection faucheront les autres, désœuvrés, les chétifs qui n’ont pas voulu être forts57. » Découlant de l’exposé de ces bienfaits éducatifs, la fondation de sec- WLRQVVSRUWLYHVHVWORJLTXHPHQWHQFRXUDJpHDÀQ©TX·LOVRLWFUppWRXVOHVDQV des championnats dans les différentes branches sportives58 ». G. Brun fait G·DLOOHXUVDOOXVLRQjO·pQHUJLTXHFDPSDJQHGHYXOJDULVDWLRQPHQpHSDUO·°XYUH des patronages laïques de France qui, avec le concours du quotidien L’Auto en 1909-1910, est à l’origine des premières rencontres athlétiques laïques de Paris et de la Seine en 1910, manifestations par ailleurs hautement patronnées par Édouard Petit, vice-président de la Ligue, et , président du &RQVHLOGHVPLQLVWUHV(QÀQO·DXWHXUODQFHXQDSSHOHQGLUHFWLRQGHO·pFROH GH-RLQYLOOHDÀQTXHOHVLQVWLWXWHXUVGDQVOHFDGUHGHOHXULQFRUSRUDWLRQGp- couvrent les joies sportives, et de fait « s’exercent à la course à pied, au saut, au lancement du poids, au football, et à la natation59 ». Ce congrès se présente donc comme une date rupture en la matière. Certes ce premier plaidoyer, nous le verrons plus loin, est loin de convaincre O·HQVHPEOHGHVGLULJHDQWVODwTXHV0DLVDVVXUpPHQWLOFRQÀUPHXQPRXYHPHQW local ascendant, lui-même corrélatif d’une franche accélération du phénomène sportif en France. En prenant place au sein du congrès annuel de la puissante Ligue, ce discours occupe en outre une place symbolique nouvelle. Par ail- leurs, en accordant l’idée laïque à un corps de valeurs propre à l’ethos sportif –

53 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Revue sciences sociales et sport / Numéro 15

compétition, individualité, égalité initiale de principe –, il inscrit désormais l’exercice physique dans la sphère laïque sous un nouvel angle face aux enjeux brûlants de la concurrence avec le monde catholique. Trois ans après, à l’occa- sion du congrès régional des Petites A de Caen, le même discours semble percer. Si les classiques vertus prémilitaires de la gymnastique sont encore rappelées, OHVSRUWVHYRLWjQRXYHDXSUpVHQWpVRXVO·DQJOHGHVHVEpQpÀFHVPRUDX[©/HV sports sont une excellente école de volonté, de discipline et de solidarité », « Il faut s’oublier entièrement et chasser toute vanité pour que réussisse un match de ballon », « Les sports… font comprendre et aimer la discipline librement acceptée », « Or c’est là une discipline plus féconde et plus propre à former 60

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan des soldats consciencieux que la discipline toute extérieure ». L’intériorisation G·XQHGLVFLSOLQHFRQVHQWLHYLHQWPrPHFRPSOpWHUOHVSURÀWVSUpFpGHPPHQWHV- comptés, y compris en faveur de la préparation militaire. On voit clairement que le recours aux pratiques sportives fragmente le discours habituel sur les gym- nastiques qui faisaient de l’ordre et de la discipline imposés le label. Une partie du monde laïque semble alors s’accommoder de l’innovation sportive, comme l’institution militaire l’avait consentie précédemment61.

g) Les obstacles de l’immoralité et de l’élitisme sportif

Ce n’est pourtant pas en faveur de ces nouvelles valeurs éducatives du sport que s’accordent les instances décisionnaires de la Ligue. Nous avons déjà H[SRVpOHVUpVLVWDQFHVGHVUHVSRQVDEOHVGHODFRPPLVVLRQGHV°XYUHVPLOLWDLUHV de la Ligue « rejetant les spécialisations outrancières du gymnase, du stade ou du stand comme inutiles et dangereuses62 ». Quelque temps après, Maurice Brai- bant, député radical et commissaire de la Ligue, déplace la contestation à l’oc- casion du congrès d’Aix-les-Bains de 1913. Moins sensible à l’argumentation militaire, il reproche plutôt au sport ses origines anglo-saxonnes : « Le jeune Français a voulu imiter le sportsman anglais. Cette exagération a abouti de nos jours aux combats de boxe, triomphe de la brutalité réglementée, et à l’athlète complet que je considère comme un monstre63. » La critique se veut également sociale, renvoyant le sport à son caractère élitiste : « À mon avis la culture phy- sique ne doit pas être l’apanage d’une élite spécialement douée… la culture physique doit être donnée à tous, surtout aux moins forts, aux malingres, aux HQIDQWVHWDX[MHXQHVJHQVG·XQGpYHORSSHPHQWLQFRPSOHWHWGLIÀFLOH64. » Car il s’agit bien, selon le rapporteur, de dispenser une éducation physique rationnelle de base, « dans l’intérêt de la race d’abord », et de porter l’effort sur les plus faibles, puisque « les champions sauront bien sortir du rang sans que nous nous consacrions exclusivement ou trop spécialement à eux65 ».

(Q GpÀQLWLYH HQ FH GpEXW GH VLqFOH OD VLWXDWLRQ TXDQW j O·XVDJHGHV pratiques compétitives anglo-saxonnes dans le monde laïque paraît « confuse

54 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

et contradictoire à beaucoup d’égards (Martin, 2006 : 58) ». Si la Ligue refuse de militariser à l’excès la formation physique des jeunes, notamment en la cantonnant au temps postscolaire, on a pourtant l’impression que le poids GHODWUDGLWLRQPLOLWDLUHDMRXUQHODUpÁH[LRQVXUO·DXWRQRPLVDWLRQGHVVSRUWV dans ses œuvres. La situation est au demeurant disparate à l’échelle du terri- toire national, avec toutefois des points d’ancrage régionaux notables : Paris, Normandie, Nord, Lyonnais. Les foyers particulièrement actifs semblent par ailleurs se situer dans les espaces urbains de moyenne ou grande envergure. Dans ce cas, les dirigeants locaux du mouvement laïque, ainsi que les res- ponsables nationaux des œuvres postscolaires laïques, manifestent cependant

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan un intérêt pour l’usage du sport dans leur cadre. Toutefois, c’est davantage par opportunisme au regard du combat contre les forces catholiques, ou par sensibilité de certains dirigeants à des pratiques incarnant la modernité, que par réelle concordance avec les valeurs laïques. À l’inverse, à l’échelle des dirigeants nationaux de la Ligue, la réticence la plus vive s’exprime encore à la Belle Époque. Les critiques de l’excès sportif – dépassement suggérant le risque corporel – sont fortes, tandis que celles renvoyant aux origines d’Outre- 0DQFKHSOXVIHXWUpHVUHVWHQWSUpVHQWHV0DLVF·HVWÀQDOHPHQWO·DVSHFWpOLWLVWH d’une pratique non pensée pour la plus grande partie de la population qui focalise la contestation, semblant sous-entendre l’incompatibilité entre les va- leurs d’émancipation populaire du mouvement laïque et l’idéologie libérale anglo-saxonne qu’elle véhicule. Il reste néanmoins que ces réticences portées par des dirigeants d’âge avancé, n’ayant pas connu l’émergence sportive dans leur jeunesse, paraissent fortement contestées par une dynamique et une ap- SpWHQFHGHODEDVHTXLQHIHUDTXHVHFRQÀUPHUSDUODVXLWHXQHIRLVGLVVLSpHV OHVPHXUWULVVXUHVUpVXOWDQWGXSUHPLHUJUDQGFRQÁLWPRQGLDO

II - POUSSÉE DE LA BASE ET REVENDICATION EN FAVEUR D’UN SPORT LAÏQUE « PUR » (1914-1927)

D /D/LJXHHWOHV±XYUHVODwTXHVDSUqVOHFRQÁLW

/HVVWUXFWXUHVLQVWLWXWLRQQHOOHVGHOD/LJXHGHO·HQVHLJQHPHQWVHPRGLÀHQW profondément après-guerre. Les instances dirigeantes nationales se heurtent en effet aux velléités d’autonomisation des fédérations départementales des œuvres postscolaires. En conséquence, l’organisation centrale opte pour une réforme d’ampleur, transformant le dispositif originel en une confédération d’œuvres départementales dont le poids décisionnaire des délégués sur la gou- vernance nationale se trouve augmenté. Celles-ci prennent leur essor (de 1921 à 1926), à partir de quatre départements historiques (Loire, Rhône, Isère, Ain), vite rejoints par la Somme, les Bouches-du-Rhône et le Puy-de-Dôme.

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D’un point de vue doctrinal, l’idée laïque se renouvelle dans cette pé- ULRGHHQVHGRWDQWG·XQHLQWHQWLRQSROLWLTXHSOXVDIÀUPpHOHVROLGDULVPHHWOH rationalisme fondateurs s’enrichissent « d’une croyance en l’achèvement d’une démocratie sociale » (Sévilla, 2004 : 301). En outre, si l’anticléricalisme reste vif, opposant l’émancipation laïque au prétendu obscurantisme catholique, il n’est plus le seul à fonder la morale laïque. En effet, le souci d’émancipation des masses ainsi que la revendication de la paix marquent l’orientation d’après FRQÁLW©$QWLFOpULFDOLVPHDVSLUDWLRQVVRFLDOHVHWSDFLÀVPHVRQWGpVRUPDLV indissociables » (Martin, 2006 : 198). Loin de ces intentions, les œuvres laïques locales ayant initié les pre-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan mières tentatives sportives vont cependant souffrir de la guerre. Leur avenir est alors hypothéqué, en conséquence de la terrible amputation connue par le corps des instituteurs réduit de 23 % à l’échelle nationale, première caté- gorie civile touchée. La Ligue se voit ainsi privée d’une force vive qui avait IRUWHPHQWLQYHVWLOHVDPLFDOHVODwTXHVjO·DSSURFKHGXSUHPLHUFRQÁLW­WLWUH d’illustration, la présence de 32 amicales ou Petites A était signalée à Lyon en 1914 (Dessertine et Maradan, 2001, 301-325). Or le vivier s’éteint à 10 unités seulement en 1919. La renaissance est cependant progressive à compter de 1920, et plus sûrement à partir de la réorganisation de la Ligue en Confédéra- tion en 1925. Résultat de la fusion entre patronages laïques et Petites A, leur nom générique est désormais souvent celui d’amicales laïques. Ce nouveau départ est également l’occasion pour les œuvres de s’ouvrir à un public fémi- QLQDXPR\HQGHVHFWLRQVVSpFLÀTXHV/·H[HPSOHGH/\RQYLOOHSRXUODTXHOOH ODÀQGHVDQQpHVPDUTXH©O·DSRJpHGHVDPLFDOHVODwTXHVª 'HVVHUWLQH 2007 : 301-325) est représentatif d’un redressement du mouvement à l’échelle nationale.

b) Au plan sportif, un statut institutionnel fragile

Avec le morcellement de l’USFSA entre 1919 et 1920, les sections spor- tives des œuvres laïques perdent un relais institutionnel précieux. Transfuge de l’USFSA, Léonce Vieillard se replie à la Fédération française d’athlétisme en 1921 pour y prolonger son rôle de conseiller technique et de coordonna- teur des compétitions entre œuvres laïques66. Mais il doit constater « la si- WXDWLRQSUpFDLUHGHV3HWLWHV$ªDXUHJDUGGH©ODVLWXDWLRQÁRULVVDQWHDYDQW guerre ». À peine 19 Petites A sont ainsi recensées à la FFA en 1919. Leur statut est alors repensé : il s’agit d’associer patronages laïques et as- sociations d’anciens élèves des écoles publiques sous une même bannière. La commission de la FFA créée pour gérer l’organisation du sport postscolaire laïque décide également d’une licence spéciale à tarif privilégié, en contre- SDUWLHG·XQHREOLJDWLRQG·DIÀOLDWLRQjOD))$(OOHIpGqUHDLQVLFKDTXHDQQpH trois critériums nationaux réservés à ces associations, ne pouvant prétendre

56 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

au nom de championnat : basket-ball, athlétisme, cross-country. Des com- missions régionales sont invitées à se fonder67. Peu de temps avant, un accord était par ailleurs signé au niveau national entre la FFA et la Fédération des œuvres postscolaires (FOPS) permettant d’accepter dans les championnats RUJDQLVpVSDUOD))$OHVSHWLWHV$HWOHVDPLFDOHVDIÀOLpHVjFHWWH)23668. En dépit de cette amorce de restructuration s’engage un débat au sein GHFHWWHQRXYHOOHLQVWLWXWLRQG·DFFXHLO)DXWLOVRQJHUjPRGLÀHUOHVWDWXWVSp- FLÀTXHGHVUHJURXSHPHQWVODwTXHVDÀQGHOHXUSHUPHWWUHXQHSDUWLFLSDWLRQj tous les championnats fédéraux d’athlétisme ? Faut-il permettre aux plus de 20 ans d’y adhérer, ce qui n’était pas le cas jusqu’alors ? Si Léonce Vieillard

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan SODLGHODFDXVHGHODVSpFLÀFLWpGXPRXYHPHQWVSRUWLI ODwTXHOHVHFUpWDLUHJp- néral de la fédération, Paul Méricamp, le freine par crainte que ces amicales ne se substituent aux clubs FFA. En 1924, il propose aux adhérents des Petites A d’être reversés dans les clubs FFA, ou mieux, de constituer de nouveaux clubs FFA69. Le développement par le haut semble souffrir de cette position bancale. L’année d’après, si le nombre d’amicales adhérentes a augmenté, il reste très modeste au regard des chiffres nationaux70 et des multiples regrou- pements laïques locaux non nécessairement adhérents à la fédération. À peine 3HWLWHV$DIÀOLpHVVRQWDLQVLUHFHQVpHVHQ/DFURLVVDQFHV·DFFpOqUH néanmoins dans les années suivantes avec 378 unités adhérentes à la FFA en 1928. Le basket-ball, à la suite d’un accord avec la commission de cette activité hébergée au sein de la FFA71, y trouve de plus en plus souvent sa place. Mais O·RUJDQLVDWLRQQDWLRQDOHUHVWHOLPLWpHGDQVVRQDPSOHXU/DGLIÀFXOWpG·XQH incorporation à un organisme national ne reconnaissant pas pleinement la VSpFLÀFLWpGXPRXYHPHQWO·LQFOXDQWPrPHSRXUGHVUDLVRQVVWUDWpJLTXHVGH GpYHORSSHPHQWWRXWHQV·HQPpÀDQWHVWSDWHQW,OQ·HQYDSDVQpFHVVDLUHPHQW de même à l’échelle locale où la situation paraît plus favorable. La Région Nord témoigne ainsi d’un dynamisme important. L’Union des amicales du Nord fait par exemple état de sa seconde Fête fédérale en 1926, réunissant « plus de 60 sections sportives ». À côté des traditionnels concours d’escrime et de tir qui perdurent, coexistent « des concours olym- piques » combinant des épreuves athlétiques et de la natation72. La région havraise déjà mentionnée avant-guerre pour ses initiatives, paraît également représenter un pôle de relance locale important. L’existence d’une commis- sion sportive au sein de la Fédération régionale havraise des Petites A, celle d’une fête fédérale depuis 1917 incluant des exercices compétitifs, indiquent une appétence sportive marquée. Celle-ci s’illustre par l’institution de challen- ges régionaux : ainsi le challenge Sternberger – il ne peut pas porter le nom de championnat, toujours pour des raisons de concurrence avec les champion- nats sportifs fédéraux – existe depuis 1924. Épreuve combinée (tir, course à pied et cyclisme), il oppose des équipes composées d’éléments d’âge divers. De même le challenge Meyer73HVWXQHFRPSpWLWLRQVSpFLÀTXHPHQWDWKOpWLTXH

57 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Revue sciences sociales et sport / Numéro 15

mise sur pied en 1927, comprenant des épreuves de courses, sauts et lancers. (QÀQ VLJQDORQV O·H[LVWHQFH GX FKDOOHQJH *UXIID] VSpFLÀTXHPHQW RULHQWp vers le cross-country. L’organe de communication74 qui recensait 18 sections sportives en 1921, mais 72 en 1927, fait également état de rencontres spéci- ÀTXHVGH)%$VVRFLDWLRQHWGHEDVNHWEDOOGqVFHVGHUQLqUHVpWDQWSDU- ticulièrement intégrées dans la Section des Dames de la fédération régionale. Achevons ce rapide tour d’horizon des implantations locales avec l’em- blématique région stéphanoise. L’Action laïque, organe de l’Union fédérale des associations des anciens et anciennes élèves des écoles laïques de la ville de Saint-Étienne, donne quelques indications à ce sujet. Le 19 août 1922 ap-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan paraît ainsi une première fête sportive et gymnique des œuvres postscolaires ODwTXHVGHOD/RLUH2XWUHOHVGpÀOpVHWGpPRQVWUDWLRQVJ\PQLTXHVHOOHFRP- porte des épreuves d’athlétisme : courses du 100 au 5 000 mètres, trois sauts, et deux lancers75. Lors de la troisième manifestation en 1925 s’invitent égale- ment des rencontres de basket-ball. L’Union se dote par ailleurs en 1922 d’un Comité d’éducation physique et musicale76 présidé par le Dr Michot. À cette occasion, on apprend qu’une rencontre de football entre joueurs sélectionnés par les fédérations parisiennes et de la Loire fut disputée à Saint-Étienne le 22 février 1925 sous la présidence de M. Delarbre, commissaire à l’éducation physique77. Selon toute vraisemblance, des poussées locales en faveur de ren- contres sportives laïques marquent les années 1920. Il faudrait très certai- nement compléter cet inventaire par l’état de la région parisienne au sein de laquelle les nombreux patronages, cercles, amicales sont diversement ratta- chés à la Fédération des œuvres postscolaire laïques basée à Paris, à la Ligue parisienne d’athlétisme, à l’Union des sociétés de tir de France ou encore à la nouvelle Fédération française de football-association. Cependant, la géogra- phie de cette expansion, qui n’est pas sans rappeler celle repérée par Eugen Weber, puis Richard Holt (Holt, 1980 : 260) à l’égard de l’ensemble des pra- tiques sportives, manque encore de maillage, et d’autre part de centralisation. C’est à cette tâche que vont s’adonner certains acteurs décisifs. Parmi ceux-ci, évoquons d’abord Léonce Vieillard, déjà cité comme ac- teur de la pérennisation de la commission sportive des Petites A lors du pas- sage de l’USFSA à la FFA. Cet ancien secrétaire, devenu président des années 1910 aux années 1925, est l’un des maillons ayant, à son échelle, contribué à ODUHODQFHGXPRXYHPHQWGDQVOHVGLIÀFLOHVDQQpHVG·DSUqVJXHUUH/·DFWLRQGX Dr Frédéric Michot, auteur d’une thèse sur les effets des diverses méthodes d’éducation physique (1913), se situe à un autre niveau. En tant que président de la puissante Fédération des œuvres postscolaires de la Loire, il est l’un des missionnaires de l’idée sportive que sa légitimité de médecin accrédite78. Il SHXWDLQVLDIÀUPHUVDIHUYHXUSDUWLVDQHG·XQHGpPRFUDWLVDWLRQGXIDLWVSRUWLI  au sein du champ postscolaire laïque : « Les amicales laïques qui s’adressent

58 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

particulièrement aux milieux populaires pourront y répandre utilement le goût des sports accessibles à tous : football, athlétisme, culture physique. Le JR€WGHVH[HUFLFHVVSRUWLIVVHUpSDQGUDHQÀQGDQVODPDVVH79. » Il est égale- ment convaincu d’anticiper un mouvement social inéluctable : « Nulle autre forme de société que celle des amicales ou patronages postscolaires ne me semble mieux préparée à jouer un rôle prépondérant pour la diffusion et la pratique prochaine des sports80. » Son militantisme se traduit par des actions visant à connecter le mouvement sportif laïque local à l’échelon national. L’espoir qui se dessine déjà sous sa présidence est de « travailler à mettre sur pied une fédération nationale sportive réservée aux sociétés postscolaires 81

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan ayant un traité d’entente avec les fédérations nationales purement sportives ». 0DUFHO'HODUEUHHQÀQTXLH[HUFHUDSOXVSOHLQHPHQWVRQLQÁXHQFHGDQVOHV années suivantes, est un insatiable défenseur de la cause sportive. Président du Club d’athlétisme de Montrouge, il est diversement impliqué dans l’USF- SA, la Fédération française de natation, et la FFA, tandis qu’il chronique les faits sportifs au sein de divers journaux. En entrant au sein de la commission des Petites A de la FFA en 1923 pour en devenir président quelque temps DSUqVLODIÀUPHVDVHQVLELOLWpHQIDYHXUGXVSRUWODwTXHVDQVGRXWHFDWDO\VpH par son engagement maçonnique qui le rapproche d’un grand nombre de personnalités de la Ligue82. (QGpÀQLWLYHQRXVFRQVWDWRQVODUHQDLVVDQFHGXPRXYHPHQWVSRUWLI  laïque après sa déstructuration consécutive de la Première Guerre mondiale. Les linéaments tracés au début du siècle réapparaissent après un estompement imposé d’une dizaine d’années. Toutefois, malgré l’action militante d’acteurs impliqués, un double obstacle à ce renouveau est à retenir. D’une part l’ab- sence de structure centrale dévolue conduit au mieux à des compromis avec les fédérations hébergeuses, au pire à une marginalisation obérant le plein dé- veloppement espéré ; d’autre part des réticences à l’emploi des activités spor- tives subsistent au sein du mouvement laïque lui-même. Ainsi, les propos du 'U-HDQ(GZDUG5XIÀHUWDQoDQWHQFRUHOHVRULJLQHVDQJORVD[RQQHVGXVSRUW DXSURÀWG·XQHWUDGLWLRQIUDQoDLVH©$XPRGHUQHHVSULWVSRUWLI G·RULJLQH anglo-saxonne, ne peut-on préférer, pour animer nos jeux athlétiques, l’esprit chevaleresque d’origine française ?83 » En outre les attaques s’inscrivent égale- PHQWGDQVOHFOLPDWSDFLÀVWHLPSUpJQDQWOHPLOLHXHQVHLJQDQW /H%DUV  DXVRUWLUGXFRQÁLWUHQYR\DQWIUpTXHPPHQWOHFDUDFWqUHDJRQLVWHGXVSRUWj sa symbolique guerrière (Loudcher, 2007 : 112). Rejoignant les condamna- tions liées aux dérives professionnelles du sport et leur cortège de méfaits déjà évoqués, les réserves continuent donc à limiter son plein usage éducatif au sein des œuvres laïques. (QÀQLOHVWHVVHQWLHOGHUHSpUHUOHGLYRUFHVRXYHQWDFFHQWXpGDQVFHV années d’entre-deux-guerres entre les responsables de niveau national, et la demande de la base constituée des amicales. L’appétence de la jeunesse en

59 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Revue sciences sociales et sport / Numéro 15

direction d’une culture sportive au seuil de sa sédimentation en France tranche avec les positions restées traditionnelles de dirigeants encore atta- chés à une gymnastique civique de masse, pourvoyeuse de santé, et particu- OLqUHPHQWYLVLEOHjO·RFFDVLRQGHVIrWHVDQQXHOOHV&HWLUDLOOHPHQWLGHQWLÀpSDU d’autres chercheurs en territoire lyonnais (Dessertine et Maradan, 2001 : 95), déjà en germe avant-guerre, semble désormais se constituer en catalyseur du changement. L’intérêt sportif local de la jeunesse, concernant essentiellement l’athlétisme, le cross-country, le football-association, puis plus tardivement le basket-ball, reste cependant toujours en retrait au regard du mouvement catholique plus prompt à incorporer le sport dans ses patronages dès le début

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan du xxe siècle (Hubscher, 1992 : 118). Notons cependant la très vraisemblable antériorité du mouvement laïque à accueillir dans ses rangs des sections spor- tives féminines84, là où son concurrent plus frileux cantonnait encore ce pu- blic à une stricte gymnastique85. Finalement, la période des années 1920 construit les soubassements plus solides d’une doctrine d’éducation physique laïque, élément d’une édu- cation intégrale ne reniant plus le sport comme point d’appui potentiel86. Rejoignant les premiers argumentaires isolés des années 1910, les propos pa- raissent cette fois-ci s’appuyer sur des pratiques locales vivaces, en phase avec l’imprégnation culturelle croissante que constitue le phénomène sportif en France. Ce sport éducatif espéré, dont le credo serait l’accessibilité à tous, tient cependant à exploiter l’« intérêt des phénomènes sportifs et du spectacle sportif pour la propagande87 » comme facteur de séduction de la jeunesse vis-à-vis du rival catholique. Or, il désire néanmoins manifester fermement sa différence au regard des potentielles dérives – narcissisme, vénalité et spécia- OLVDWLRQ²HWDQQRQFHHQFHODODVSpFLÀFDWLRQG·XQVSRUWpGXFDWLI ODwTXHTXLYD V·DIÀUPHUjO·RUpHGHVDQQpHV

III - L’UFOLEP ET LA RECHERCHE D’IDENTITÉ D’UN SPORT LAÏQUE APRÈS 1927

a) La Ligue après 1927 et la création de l’UFOLEP

L’introduction du principe fédératif au sein de la Ligue à partir de YDPRGLÀHUVRQPRGHGHJRXYHUQDQFHGDQVOHVHQVG·XQH©PXWDWLRQ démocratique » (Sévilla, 2006). Celle-ci permet au corps des enseignants du primaire, dans sa représentation militante et syndicalisée, d’y être bien plus présent et d’en devenir la force vive. C’est dans le cadre de cette réforme qu’éclosent les diverses UFO88 qui prendront un poids croissant par la suite. Du point de vue de sa doctrine, l’ouverture à une vision plus sociale de l’idée laïque donne lieu à un réformisme actif, en particulier dans l’organisation des loisirs de la jeunesse, s’opérationnalisant au travers de multiples partenariats

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(syndicats enseignants, syndicats ouvriers, partis politiques de gauche…). L’idée laïque poursuit donc sa mutation sous le double angle de l’ouverture à une diversité de points de vue89 et à l’accomplissement d’une démocratisation culturelle et sociale. C’est de ce changement de modèle de gouvernance qu’émerge l’Union française des œuvres laïques d’éducation physique (UFOLEP) en 1928. Consécutive d’un rapport présenté par Gaston Vidal90 au congrès de la Ligue à Strasbourg en 1927, la création est l’aboutissement du travail d’une commis- sion présidée par le Dr Michot. En réponse à l’accueil insatisfaisant réservé aux amicales sportives au sein de la FFA, elle se veut désireuse de développer

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan les activités physiques laïques de manière autonome, tout en propageant les valeurs de la Ligue dont elle reste tributaire. En partenariat avec les fédéra- tions dirigeantes avec lesquelles elle signe rapidement des protocoles d’accord (Fédération française d’athlétisme et de basket-ball, avril 1930), elle n’est ce- pendant acceptée au Conseil national des sports en 1929 qu’au titre de « fédé- ration d’application ». À cette date, elle déclare 167 000 membres adhérents, et engage des représentants dans des championnats d’athlétisme, de football, de basket-ball et de cross-country… à l’exception notable du rugby91. Plus tardivement s’y agrégeront des sections de natation, tennis et tennis de table, boules, ski, cyclotourisme et pelote basque. Désormais doté d’une structure VSpFLÀTXHFRQVpFXWLYHGHODUpIRUPHGHOD/LJXHOHVSRUWODwTXHVHYRLWWRX- jours toutefois pris entre deux tutelles : celle de la Ligue et celle des fédéra- tions dirigeantes référentes des sports qu’elle mobilise. Son développement néanmoins spectaculaire92 lui permet de se positionner en 1935 à la troisième place des fédérations françaises avec 2 359 sociétés derrière la FFFA (4 437) et la FGSPF (2 872)93. Forte de son succès, l’Union se transforme alors en un acteur impor- tant de la politique nationale de l’éducation physique et des sports, plus par- ticulièrement à partir du succès électoral du Front populaire avec lequel elle entretient des liens étroits94. Elle est porteuse de l’idée d’un service public de l’éducation physique au ministère de l’Éducation nationale, non dénuée G·LQWpUrWÀQDQFLHUVFRPSWHWHQXGHVVXVSLFLRQVUpFXUUHQWHVGHWUDQVIHUWGH crédits du ministère de la Guerre vers la concurrente FGSPF95. Partenaire de diverses fédérations avec lesquelles elle signe des accords dans la deuxième moitié des années 1930 (Éclaireurs, Fédération française de ski et École na- tionale de ski, FSGT…), elle est également un très actif relais pour la certi- ÀFDWLRQGX%UHYHWVSRUWLI SRSXODLUH(OOHGHYLHQWPrPHjSDUWLUGHOD SUHPLqUHIpGpUDWLRQHQQRPEUHGHGLSO{PHVREWHQXV(QÀQHOOHUHYHQGLTXH l’organisation du sport scolaire, rêvant même parfois de la gestion complète GHO·pGXFDWLRQSK\VLTXHVFRODLUHHWSRVWVFRODLUHHWREWLHQWÀQDOHPHQWODFUpD- tion de l’Usep pour le premier degré (1939) tout en regrettant de ne pouvoir asseoir son emprise sur la totalité du sport scolaire.

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E /DGpÀQLWLRQG·XQHGRFWULQHVSRUWLYHODwTXH

$SUqVDYRLUFRQTXLVVRQDVVLVHLQVWLWXWLRQQHOOHOHVSRUWODwTXHLGHQWLÀH PLHX[VRQSURMHWjO·DXQHG·XQHGRFWULQHRIÀFLHOOHTXLYRLWSURJUHVVLYHPHQW le jour. Dès 1932, Marcel Delarbre et Gabriel Beauville établissent un « Plan constructif pour une éducation physique et sportive dans une démocratie ». 3UpVHQWpDX&RQJUqVGHSXLVDPHQGpHWGpÀQLWLYHPHQWDGRSWpHQLO sert de base à la réalisation d’un « Plan de réorganisation de l’EP et des sports » présenté par le Conseil supérieur des sports en 1939. Celui-ci contient des pré- conisations de réformes structurelles importantes : demande de substitution

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan de la responsabilité civile de l’État à celle de l’instituteur, notation des épreuves d’éducation physique scolaire, respect d’un programme minimum d’EP à tous les niveaux de la scolarité, continuité du scolaire et postscolaire assurée par la Ligue, création d’un livret social à la place du livret militaire où seront notam- ment consignés les examens médicaux et la valeur physique des élèves… Forte GHVDVLWXDWLRQGpVRUPDLVÁRULVVDQWHO·8)2/(3VRXWHQXHSDUOD/LJXHGHO·HQ- seignement exprime donc des revendications ambitieuses, voire omnipotentes, à tous les niveaux : scolaires, postscolaire et périscolaire96. Or, ce qui nous intéresse plus particulièrement ici est la nature de l’exercice physique suggéré. Une première indication tient dans le choix du titre même de l’Union mère, dans lequel le vocable d’éducation physique est préféré à celui de sport. Concession au passé, volonté de ne pas heurter les réfractaires d’hier ou priorité à une formation physique de base ? Sans doute les facteurs convergent pour tenter d’emprunter une troisième voie qui n’est ni celle de la formation prémilitaire ou de l’hygiène, ni celle non plus du sport de compétition. Car il s’agit d’abord d’une éducation physique intégrale, s’ar- ticulant aux autres facultés habituellement visées par l’œuvre éducative. L’ar- ticle 1 des statuts fondateurs de l’UFOLEP résume bien ce projet : « Cette association a pour mission d’encourager et d’organiser l’éducation physique dans ses rapports avec la formation intellectuelle et morale de l’individu. » On UHFRQQDvWUDOjO·LQÁXHQFHSOXVRXPRLQVGLUHFWHGH*HRUJHV+pEHUWGRQWOD maxime est fréquemment rappelée dans les colonnes de L’Action laïque97, mais aussi celle d’Ernest Loisel, franc-maçon proche de la Ligue de l’enseigne- ment, ou encore de Jean Gotteland98LQVSHFWHXUG·DFDGpPLHLQÁXHQW Le second paramètre tient à une répulsion repoussant simultanément le professionnalisme sportif comme ses déviances mercantiles. Les critiques qui prolongent celles apparues dans les années 1920 dans les rangs de la Ligue UHÁqWHQWDLVpPHQWOHGpEDWGHVDQQpHVTXLGRQQHOLHXjGHYLIVDQWDJR- nismes (Mendiague, 2004). Léon Douarche, commissaire général de l’UFO- LEP, expose ainsi la nuisance éducative d’un sport dévoyé : « Nous combat- tons le sport spectaculaire, producteur de grosses recettes, qui entraîne au professionnalisme et peut aussi fausser les idées des enfants99 », tandis que

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O·$FWLRQODwTXHGHYHQXHRUJDQHRIÀFLHOGHOD/(HPSUXQWHj*HRUJHV'XKD- mel la vision de « la plus étonnante école de vanité100 » pour mieux le stigma- tiser. A contrario, si une référence au sport doit être faite, c’est en souvenir de ses glorieux promoteurs parmi lesquels on préfère taire les aristocrates GHODÀQGX[L[eDXSURÀWGHÀJXUHVSOXVRXYHUWHPHQWUpSXEOLFDLQHV©/H sport tel que l’ont rêvé les précurseurs de la première heure, les Grousset, les Bourdon101, les Reichel et d’autres n’est plus. L’orgueil, l’égoïsme, la veulerie, l’argent l’ont avili et réduit à la plus lamentable des foires102. » Si le sport d’élite est honni, en revanche, l’exercice physique offert à la plus grande masse est vanté. L’élévation d’un niveau moyen, souvent assor-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan tie d’intentions hygiéniques concordantes avec celles du BSP, est promue en même temps que la polyvalence est louée : « Que la compétition ne doit pas être la méthode essentielle en éducation sportive… il faut s’efforcer d’amener l’ensemble de la jeunesse à réaliser des performances minima dans le cadre de plusieurs sports103. » Dès 1932, le Plan constructif pour une éducation phy- sique et sportive dans une démocratie de la Ligue pose d’ailleurs les enjeux nouveaux de la démocratisation scolaire : « Et voilà, la question de l’obli- gation résolue, ce n’est plus qu’une question d’égalité sociale104. » En outre, la pratique sportive, nécessairement raisonnée et désintéressée, doit égale- PHQWVHPRQWUHUXWLOHHWUXUDOHDÀQGHWRXFKHUHQSULRULWpOHVSRSXODWLRQV les moins servies par l’offre sportive. Ainsi, l’investissement majeur consenti par l’UFOLEP en faveur du ski alpin (Sévilla, 2004), tant organisationnel que pédagogique, et à degré moindre celui auprès des activités cyclotouristes témoignent bien de la prédilection accordée à la démocratisation d’activités à caractère utilitaire.

c) Intérêts stratégiques et résistances

« Mais le sport à l’UFOLEP devrait être aussi un moyen : moyen de com- pléter l’éducation intellectuelle et morale de l’école ; moyen d’entretenir l’esprit laïque au sens le plus noble chez les adolescents qui ont quitté l’école ; moyen HQÀQGHFRQVHUYHUODSUDWLTXHGXVSRUWDPDWHXUOHVHXOYpULWDEOHPHQWpGXFDWLI  et vraiment moral105. » On le voit bien, une doctrine autour d’un sport laïque VHGHVVLQHSOXVIHUPHPHQW1RQFRQVLGpUpFRPPHXQHÀQDOLWpHQVRLLOHVW appréhendé comme moyen éducatif intégré à une formation générale. Il se ca- ractérise par une approche polyvalente et raisonnée ; il est par ailleurs riche des YHUWXVP\WKLÀpHVGHO·DPDWHXULVPHVSRUWLIHWGpVLUHX[GHVDWLVIDLUHOHVEHVRLQV premiers de la plus grande masse106. Ce projet désormais admis au rang le plus élevé de la Ligue, porteur de considérables ambitions sociales, ne doit pourtant pas cacher des intérêts moins avoués comme des résistances persistantes. En effet, l’intérêt central réside toujours dans la puissance de capta- tion de la jeunesse par les activités sportives. Dans un climat concurrentiel

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ravivé107, les progrès réalisés par le mouvement laïque pour l’organisation des activités postscolaires ne passent pas inaperçus. Le père jésuite et historien Joseph Lecler perçoit le danger menaçant que constituent désormais les œuvres laïques : « Comme nous l’avons déjà noté dans cette lutte qui se pré- cise entre les organisations catholiques et le Front commun laïque, pour la conquête de la jeunesse en dehors de l’école, les premières jouissent encore d’un avantage marqué. […] Il y a lieu toutefois de se demander si l’action uni- ÀpHHWJUDQGLVVDQWHGHV±XYUHVODwTXHVSRVWVFRODLUHVULVTXHGHFUpHUXQGDQJHU sérieux de concurrence pour le présent ou pour un avenir prochain108. » La concurrence s’illustre notamment dans les fêtes de la Jeunesse ré-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan SRQGDQWDX[FRQFRXUVHWGpÀOpVRUJDQLVpVSDUOHVJ\PQDVWHVFDWKROLTXHV'pMj implantées localement avant-guerre, elles prennent une ampleur considérable au milieu des années 1930109. Un comité des fêtes de la Jeunesse est même créé à la Ligue en 1935, tandis qu’un partenariat se tisse avec l’Union fédérale des œuvres laïques d’éducation artistique (Ufolea) pour leurs organisations. Lors de ces manifestations qui exaltent la santé d’une jeunesse laïque, les dé- monstrations d’éducation physique succèdent aux mouvements gymniques d’ensemble chorégraphiés et répétés depuis plusieurs mois. La participation féminine, quasi ignorée des rassemblements catholiques ou encouragée selon un modèle masculin « teinté de conservatisme » dans le mouvement ouvrier (Gounot, 2016 : 89), y tient au contraire une part conséquente, faisant la ÀHUWpGHVPRXYHPHQWVODwTXHV/HVSRUW\WURXYHpJDOHPHQWWRXWHVDSODFHDX travers de concours athlétiques divers, « carrousel cycliste », tournois de foot- ball ou autres évènements, comme à l’occasion de la Fête nationale de 1937. 6HVYHUWXVpGXFDWLYHVSRXUXQWHPSVHQUHWUDLWV·HIIDFHQWLFLDXSURÀWGHOD démonstration de force que constitue « ce puissant moyen d’action laïque et d’éducation populaire110 ». La rivalité mesurée à l’aune des exercices physiques ne s’en tient pas à ces rassemblements périodiques. Elle s’exprime également dans les réputa- WLRQVGHVpTXLSHVOHVXQHVDIÀOLpHVjO·8)2/(3OHVDXWUHVjOD)*63)DXVHLQ des centres urbains (Dessertine, 2007: 312) voire à l’échelle départementale (Demeyer et Dumas, 2007). Le comparatif indirect tient alors dans le nombre de sociétés représentant un même sport – le basket-ball semblant être l’ac- tivité ayant attiré conjointement les milieux laïques et catholiques – et plus UDUHPHQW GDQV GHV FRQIURQWDWLRQV GLUHFWHV G·pTXLSHV SDUHLOOHPHQW DIÀOLpHV dans un championnat fédéral111. Ici encore, les équipes sportives féminines adhérentes à l’UFOLEP s’avèrent quasiment sans concurrence (Dessertine et Maradan, 2001 : 114). L’avance du mouvement laïque en faveur du sport IpPLQLQ VH FRQÀUPH LQWpJUDQW OD IRUPDWLRQ VSRUWLYH GDQV XQ SURJUDPPH émancipateur parfois d’une étonnante modernité : « Nous encourageons la création de sections sportives aussi, non seulement parce que nous savons le U{OHTXHOHVSRUWGRLWMRXHU«,OQHV·DJLWSDVGHWUDQVIRUPHUWRXWHVOHVÀOOHWWHV

64 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

HQEDOOHULQHVQLGHIDLUHGXUHFRUGOHEXWpGXFDWLIGHODMHXQHÀOOHHQWUHHW 18 ans ; mais il s’agit d’organiser des compétitions qui à la fois en servent le développement physique et son goût légitime pour le développement d’un spectacle où elle se sent à son avantage112… » Néanmoins cet usage du sport mobilisé par de louables intentions édu- FDWLYHVRXRULHQWpjGHVÀQVSURSDJDQGLVWHVQHYDWRXMRXUVSDVVDQVSUREOqPH DXVHLQPrPHGXPRQGHODwTXH/HVGLIÀFXOWpVSRUWHQWG·DERUGVXUOHVSUR- tocoles d’accord avec certaines fédérations « mères ». Les tensions concur- rentielles d’hier précédemment évoquées vis-à-vis de l’USFSA ou de la FFA ne font que se reproduire malgré la création de l’UFOLEP. Ainsi, les parte-

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan nariats avec les comités régionaux de basket-ball ne tombent pas sous le sens (Dessertine et Maradan, 2001 : 108), tandis que la Fédération française de ce même sport, proche des milieux chrétiens de par son origine et son dévelop- pement113, ne s’empresse pas d’ouvrir ses portes au sport laïque. Par peur de ne pas contrôler la formation de ses jeunes adhérents, la Fédération française de ski exprime également ses réticences à voir l’UFOLEP marcher sur ses terres lorsque l’Union parvient à signer un accord avec l’École nationale de ski et l’OSSU pour l’organisation du ski scolaire (Sévilla, 2004). Parfois, les obstacles tiennent aux contacts que peuvent provoquer les rencontres sportives et au risque de dévoiement de la doctrine laïque dont HOOHVSRXUUDLHQWrWUHUHVSRQVDEOHV$ÀQGHOHSUpYHQLUODVHFWLRQ8)2/(3GX Rhône adopte par exemple une clause de non-conclusion de matchs avec des équipes issues de patronages catholiques en 1930. Et face au risque de trans- gression de ce principe, elle instaure un pacte laïque auquel tout pratiquant se doit de prêter serment en début de saison. Ceci n’empêche cependant pas la fuite de pratiquants en recherche d’excellence sportive (Dessertine et Mara- dan, 2001 : 114) préférant les championnats fédéraux, voire catholiques plus étoffés en nombre, et souvent plus performants. (QRXWUHLOIDXWHQUHJLVWUHUODSHUVLVWDQFHG·XQFOLPDWGHGpÀDQFHFKH] plusieurs dirigeants au début des années 1930. L’analogie entre sport et guerre reste vivace, tandis que le « culte du muscle » et le risque du « champion- nisme114 » continuent à imprégner l’esprit de certains responsables, limitant le développement d’un entre-soi sportif laïque favorable à la performance et à la compétition. /HVDQQpHVVHFUqWHQWGRQFXQVSRUWODwTXHPLHX[GpÀQL6RQLGHQ- tité émerge plus clairement sous l’effet de la réussite indéniable de l’UFO- LEP, même si des résistances internes à l’institution mère (LE) continuent G·DOLPHQWHUOHGRXWHRXODGpÀDQFH3DUODVXLWHOHSURORQJHPHQWGHO·DFWLRQ de l’Union en faveur d’une offre de démocratisation des loisirs115 accompa- gnant l’action du Front populaire, et parmi lesquels les activités physiques HWVSRUWLYHVÀJXUHQWHQERQQHSODFHDVVXUHVDFRQVpFUDWLRQ'qVORUVO·LGpH d’un sport postscolaire, accessible à tous et épuré de ses excès, vient plus

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QHWWHPHQWVHMXVWLÀHUDXUHJDUGG·XQHSROLWLTXHGHGpPRFUDWLVDWLRQFXOWXUHOOH concomitante des premières conquêtes du temps libre.

CONCLUSION

À l’approche de la Seconde Guerre mondiale, la construction du sport laïque semble avoir atteint, non un achèvement, mais un palier après un de- PLVLqFOHG·KpVLWDWLRQV6DGpÀQLWLRQFRQWHPSRUDLQHQHSDUDvWG·DLOOHXUVSDVWUD- hir les fondements posés à cette date : « Faire le choix d’une pratique sportive

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan respectueuse de l’intégrité physique des personnes, d’une compétition désin- téressée, du partage des responsabilités, de l’alliance du corps et de la pensée, de l’effort pour la rencontre gratuite…, c’est une façon de nourrir le projet contemporain d’une société laïque116. » Le sport laïque représenterait donc l’ac- tion globale, mesurée et désintéressée d’un individu, orientée prioritairement dans une perspective sociale et citoyenne. Ces traits qui relient l’acception ac- tuelle à la version échafaudée dans les années 1930 dépeignent son identité historique. Au-delà de ce constat, concluons alors en deux temps sur le chemi- nement parcouru. Observons d’abord que la genèse longue et accidentée que nous sou- haitions relater est loin de se présenter comme un processus dont l’aboutisse- PHQWÀQDOOHVSRUWODwTXHVHUDLWOHSURGXLWSHQVpSDUGHVGLULJHDQWVQDWLRQDX[ soucieux de l’accorder au corps doctrinal de la Ligue de l’enseignement. Bien davantage, il fut l’émanation d’une demande de la base locale, en particulier DXVHXLOGHVDQQpHVRFHOOHFLV·LQWHQVLÀD$LQVLIDFHjXQHMHXQHVVHSR- pulaire éveillée au phénomène sportif par des animateurs locaux convaincus (Prost, 1987 : 35-44), les instances centrales, peu prêtes à faire cas de ce mouve- PHQWFXOWXUHOGHYURQWLQH[RUDEOHPHQWFpGHUDÀQGHO·LQWpJUHU *RXQRW 81). N’oublions cependant pas que cette voie représenta aussi, à l’échelle locale des amicales ou des Petites A, la conséquence d’un recours opportun et cir- constanciel permettant de s’ériger face au sport catholique, lui-même pionnier dans l’exercice de mobilisation de la jeunesse par le corps. Remarquons en second lieu que l’incorporation quelque peu obligée du VSRUW PRGHUQH VLJQLÀDLW ÀQDOHPHQW XQH LPSDVVH  FHOOH FRQVLVWDQW j YRXORLU faire cohabiter les valeurs d’élitisme et de compétition avec la doxa de la Ligue de l’enseignement. La nostalgie d’un retour aux origines sportives en France, celles de l’amateurisme pur, assez présentes dans l’argumentaire des fondateurs de l’UFOLEP, est un indicateur de la recherche d’une seconde voie. Or, en condamnant le caractère commercial du sport, celle-ci n’éludait pourtant pas la problématique de la sélection d’une élite. Alors le sport « autre » proposé par le mouvement laïque sera davantage la conséquence d’un travail idéologique sur le modèle libéral issu de la société anglo-saxonne (Callede, 1987 : 84) que

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la préservation d’un outil éducatif dont la noblesse originelle avait été quelque peu fantasmée. Même si certains auteurs117RQWSXUHOHYHUGqVODÀQGX[L[HVLqFOHHQ)UDQFH la présence à la marge d’autres formes d’exercice sportif nourries de solidarisme ou porteuses de vertus sociales118, observons pourtant qu’il ne s’agissait dans ces cas ni d’un désir de démocratisation pour le plus grand nombre (Hubscher et al., 1992 : 128) ni de l’espoir de véhiculer un message fort par son intermédiaire. En GpÀQLWLYHOD/LJXHG·DERUGVHXOHSXLVSDUOHELDLVGHO·8)2/(3VHSUpVHQWHELHQ comme le vecteur essentiel et original de transmission d’une pensée laïque par le sport, devenue avec le temps plus sociale et citoyenne qu’anticléricale. Concluons

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan cependant, pour ce qui concerne cette institution, à l’idée d’un sport laïcisé plus que laïque, c’est-à-dire modulé et adapté à son corps doctrinal. Les dirigeants actuels en reconnaissent d’ailleurs pleinement le principe lorsqu’ils estiment que « s’il n’existe pas de courses à pied laïques, il existe bien une façon laïque de faire du sport119 ». Accompagnant l’émergence du sport pour tous, cette étroite voie trouvera son plein épanouissement dans le second XXe siècle.

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NOTES

1 VIDAL, Gaston. 1927. « Le sport laïque ». Les Cahiers de la République des Lettres, des Sciences et des Arts, Les Beaux-Arts, Paris, n° 6, p. 68. Ancien instituteur, parlementaire et sous-secré- taire d’État à l’enseignement technique sous les gouvernements Briand, puis Poincaré, il est DXVVLXQIUDQFPDoRQDIÀFKpHWXQLPSRUWDQWGLULJHDQWVSRUWLI GHVDQQpHVHW,O préside notamment l’USFSA en 1919. 29UDLVHPEODEOHPHQWO·XQHGHVSUHPLqUHVIRLVGXUDQWODTXHOOHFHVGHX[PRWVVRQWRIÀFLHOOH- ment associés pour forger cette idée. 3 Déviances mercantiles ou immorales diversement relevées par Georges Hébert dans Le sport contre l’éducation physique en 1925, Georges Duhamel dans Scènes de la vie future en 1930 ou Jean Giraudoux dans Le sport en 1928. 4 Ainsi que son ancienne commission l’Usep, désormais autonome depuis 2004, toutes deux issues de la Ligue de l’enseignement. 5 www.ufolep.org 6 Contenu dans le premier alinéa de l’article 1 de la Constitution française de 1958 renvoyant au caractère laïque de la République, à l’égalité des citoyens et au respect de toutes les croyances. 7 Ligue française de l’enseignement, « La laïcité pour faire société », https://150ans-laligue. org 8$SUqV*XWWPDQQDÀQGHTXDOLÀHUFHV\VWqPHVSRUWLI'DUERQFRQÀUPHOHVVHSWFULWqUHVGH l’historien américain, tout en y adjoignant la caractéristique d’une nouvelle relation à l’es- pace et au temps. Il est en revanche plus circonspect sur le paramètre de sécularisation non évident pour les pratiques pré-sportives des Iles Britanniques (DARBON, 2008). 9 Ces archives ont longtemps été considérées comme détruites sous l’occupation, en raison de la mise sous séquestre de l’immeuble de la Ligue rue Récamier en faveur de l’instal- lation des « Jeunes du Maréchal » dans ces lieux. D’abord enlevées par les Allemands et transportées à Berlin, elles seront ensuite déplacées à Moscou par les Soviétiques lors de la débâcle du IIIe Reich. Leur existence fut découverte après la chute du système soviétique. Ce fonds – essentiellement constitué des papiers personnels de François Brenier, président de la Ligue de 1933 à 1943 offrant des documents datés de 1855 à 2013 – est revenu après

68 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

de nombreuses tractations rue Récamier, avant un dépôt aux Archives nationales en 2009. 10 Et notamment du mouvement sportif ouvrier et du sport corporatif en éclosion à la Belle Époque (GOUNOT, 2016). 11 En référence aux travaux de Jean-Paul Martin, notre étude débute aux alentours de 1895, année du virage de la LE en direction d’un fort soutien aux œuvres péri et postscolaires comme canal de diffusion de l’idée laïque. 12'pÀQLWLRQGRQQpHSDU9DXFKH]FKHYLOOHRXYULqUHGHOD/LJXHjO·LVVXHG·XQHHQTXrWHHQ 1872. Cité par Jean-Paul MARTIN (2006 : 22). 13 BOURGEOIS, Léon. 1994. Congrès de la Ligue de l’enseignement de Nantes. Bulletin de la Ligue de l’enseignement. 1994. 14 L’émergence de cette « laïcité française » se fait selon l’hypothèse de Jean-Paul Martin par rupture avec le modèle anglo-saxon d’une religion civile. Vient s’y substituer une « morale laïque » dont la pierre de touche est « la liberté de conscience fondée sur l’égalité entre ARTIN Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan croyants et non croyants ». (M Jean-Paul, op. cit., p. 32). 15 BUISSON, Ferdinand. 1911. Nouveau dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire. Entrée : Post-scolaires (œuvres) : Article de E. Petit, Paris, Hachette. http://www.inrp.fr/ edition-electronique/lodel/dictionnaire-ferdinand-buisson/document.php?id=3424. 166DQVTX·LOVRLWSRVVLEOHGHO·DIÀUPHUOHQRPGH3HWLWH$HVWYUDLVHPEODEOHPHQWO·DEUpYLDWLRQ de Petite Amicale, abréviation liée au fait qu’elle est une initiative de regroupement asso- ciatif de la jeunesse en milieu scolaire public. Elle est donc au départ une amicale laïque en réduction. 17 Rapport Édouard Petit, 1896. Congrès de la LE, Bulletin de la LE. Bibliothèque nationale de France. 8R 4136 18 PETIT Édouard, ibid., p 32. 19 Congrès régional des Petites A de Normandie, Caen, 1913. p. 8. http://gallica.bnf.fr/ ark:/12148/bpt6k56582608/f76.image 20 Universitaire, vice-président de la LE, et théoricien de l’idée du postscolaire. Continuer l’École : Édouard Petit, la post école et la République 1895-1917, Journée d’étude d’histoire de l’éducation 15 novembre 2017, ESPE Avignon. 21 Congrès régional des Petites A de Normandie, ibid., p. 8. 22 Ibid., p. 70. 23 Il est membre de la Fraternité vosgienne issue du Grand Orient de France. 24 PETIT, Édouard, op. cit., p. 430. 25 MARTIN, Jean-Paul, op. cit., p. 197. 26 Dénomination remplaçant celle de Congrès des Petites A existant depuis 1897. 27 Congrès national des œuvres postscolaires, Montpellier, 1901. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k55444354 28 Congrès national des œuvres postscolaires, Montpellier, ibid., p. 26. 29 Ibid., p. 40. 30,QÁXHQWSUpVLGHQWGHO·8QLRQGHVVRFLpWpVG·pGXFDWLRQSK\VLTXHHWGHSUpSDUDWLRQPLOLWDLUH futur député et sénateur. 31 À propos de l’usage vélocipédique militaire, dont les premiers essais datent de 1886 : CHAR- BON, Paul. 1998. « Aux couleurs de la Poste », Les cahiers de médiologie, vol. 5, n° 1, p. 129-139. 32 CHERON$GROSKH5DSSRUWSUpVHQWpDXQRPGHODFRPPLVVLRQGHV°XYUHVPLOL- taires. Bulletin de la LE, n° 216, octobre, p. 600. 33 CHERON, Adolphe, ibid., p. 600. 34 Ibid., p. 604. 35 Rapport commission militaire, op. cit., p. 604. 36 Rapport commission militaire, Bulletin de la LE, n° 228, 1/1909, p. 373. 37 Ibid. 38 Ibid. 39 USFSA. 1890. Annuaire, Paris, Bibliothèque nationale de France, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k898104t/f11.image. 40 Bulletin mensuel de l’amicale des arts de Roubaix, n° 3, mars 1909,

69 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Revue sciences sociales et sport / Numéro 15

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6107671r/f6.image 41 VIEILLARD, Léonce. 1910. Tous les sports, 25 novembre, p. 6. Léonce VIEILLARD est alors chargé de la commission des Petites A à l’USFSA. 42 Ibid., p. 6. 43 Ibid. 44 BEAUVILLE, Gabriel. 1937. « D’où vient… où va l’UFOLEP », Les petites A sportives, dé- cembre, AN 20140057/21 45 Ibid. p.12. 46 VIEILLARD, Léonce, op. cit., p. 6. 47 CHERON$GROSKH5DSSRUWSUpVHQWpDXQRPGHODFRPPLVVLRQGHV°XYUHVPLOL- taires. Bulletin de la LE, n° 219. Octobre. Congrès d’Angers, p. 602. 48 ROCHERON, M. 1909. Rapport pour la commission des œuvres militaires. Bulletin de la LE, n° 228, janvier. p. 373. 49

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Bulletin de la LE, n° 223, 1/1910. Communication du Dr Lachaud, député de Corrèze, à la réunion des délégués cantonaux du Congrès de Tourcoing. p 228. 50 BRUN, G. 1910. Rapport de G. Brun, Président de l’œuvre des Patronages laïques de France Rapporteur de la 2e commission. Congrès de la Ligue de Tourcoing, Bulletin de la LE, n° 223, janvier. p. 461. 51 Ibid., p. 461. 52 Ibid., p. 461. 53 Ibid., p. 462. 54 Ibid. 55 Ibid. 56 Les propos rejoignent ici les positions du baron de Coubertin se prononçant au même moment en faveur d’une lutte individuelle dont le sport serait l’un des ingrédients essentiels. « Que seule- ment le sport apporte une chance de succès dans le struggle for life et il s’imposera sans peine. » DE COUBERTIN, Pierre. 1909. Une campagne de 21 ans, Paris, Librairie d’éducation physique, p. 183. 57 BRUN, G., ibid., p. 463. 58 Ibid. 59 Ibid., p. 461. 60 PETIT Édouard. 1913. Congrès régional des petites A de Caen, p. 68. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k56582608/f76.image. 61(QO·pFROHGH-RLQYLOOHLQWqJUHRIÀFLHOOHPHQWOHVH[HUFLFHVVSRUWLIVjVHVSURJUDPPHV de formation après les avoir discrètement introduits depuis 1906. CLAVERIE, Éric. 2009. Du ripopo au jeu libre : soixante ans de basket-ball à la française : une histoire du jeu et de ses techniques (1920-1980, thèse STAPS, Bordeaux, université Victor-Segalen Bordeaux 2. 62 CHERON, Adolphe, op. cit., p. 606. 63 Bulletin de la LE, n° 240, 1/1913. Rapport de la troisième commission au congrès d’Aix-les- Bains par le député Maurice Braibant, p. 281. 64 PETIT, Édouard, op. cit., p. 30. 65 Bulletin de la LE, n° 240, op. cit., p. 283. 66 Une commission scolaire, universitaire et des Petites A apparaît dès octobre 1921. L’Ath- létisme, n° 3, octobre 1921. 67 L’Athlétisme, 26/8/22. 68 L’Athlétisme, 11/7/25. 69 Bulletin de la LE du 11/1925. 70 1 174 associations sportives étaient ainsi recensées dans l’unique USFSA en 1920. L’Ath- létisme, 22/10/1921. 71 La création d’une Fédération française de basket-ball autonome ne date que de 1932. 72 Douai sportif, 1/4/1926. 73 Du nom de l’ancien édile radical-socialiste local. 74 Les petites A, organe de la Fédération régionale havraise des œuvres laïques, n° 8, août 1927. http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k982646t/f1.image. 75 L’Action laïque, n° 10, 9/1923.

70 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Des Petites A aux premiers pas de l’UFOLEP : aux origines du sport laïque en France (1895-1939)

76 L’Action laïque, n° 35, 12/1925. 77 L’Action laïque, op. cit., n° 10, 9/1923. 78­VLWXHUGDQVOHFRXUDQWGHVPpGHFLQVVSRUWLIVLGHQWLÀpSDU*$QGULHX$NDRIEU, Gilbert. 1990. L’éducation physique au XXe siècle. Une histoire des pratiques, Joinville-le-Pont, Librairie du sport. 79 L’Action laïque n° 35, 12/1925 p. 10. 80 Ibid. 81 Ibid., p. 9. 82 Selon Jean-Paul Martin, la présence maçonne dans la Ligue se monte a minima à 40 ou 45 % de ses membres avant la Première Guerre mondiale. 83 L’Action laïque$UWLFOHGX'U-HDQ(GZDUG5XIÀHUIRQGDWHXUGHOD&XOWXUHSK\VLTXH fondamentale et futur médecin du Collège national des moniteurs et athlètes d’Antibes en 1941. 84

Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Principalement des sections de basket-ball. Notons également l’accueil réservé à ces sec- tions par la FSFSF d’Alice Milliat. Dans la cinquantaine de sociétés participant à la Fête de 3ULQWHPSVRUJDQLVpHSDUOD)6)6)HQÀJXUHQWWURLVVHFWLRQVODwTXHVLa Femme sportive, n° 1, 1921. 85 DESSERTINE, Dominique, op. cit., p. 315. L’auteur montre qu’à Lyon, pourtant haut lieu du développement sportif, les premières sociétés féminines catholiques ne datent que de 1938. 86 Le Dr Michot, dont le rôle essentiel sera relaté plus loin, exalte par exemple les vertus des sports collectifs : « Il semble que dans le sport d’équipe comme le football où l’individu est moins mis en valeur et où chaque participant, si médiocre soit-il, trouve son intérêt, on doit mieux arriver à instaurer la notion de culture physique générale indispensable ». MICHOT Frédéric, L’Action laïque, n° 35, 12/25 p. 24. 87 MICHOT Frédéric, op. cit., p. 23. 88 UFOLEP, Ufolea, Ufocel, Ufoval… 89 REMOND, René. 2004. « Cent ans de laïcité française », Études, tome 400, no 1, p. 55-66. 90 L’éducation physique dans une démocratie. AN, 20140057/6. 91 Cette exclusion est plusieurs fois exprimée sans plus d’explications au sein des bulletins de la Ligue. Le développement de cette activité en Aquitaine en étroit lien avec une notabilité républicaine laïque (relevé entres autres par Jean-Pierre Augustin, Ronald Huscher ou Jean 3DXO&DOOqGH jODÀQGXXIXe semble donc constituer une exception à cette réticence. 92 De 167 000 membres en 1928, 182 000 en 1929, 201 000 en 1930, 213 000 en 1931, 229 000 en 1932, 243 000 en 1933, 250 000 en 1934, et 310 000 en 1938. AN, 20140057/5. 93 Causerie radiophonique de J. Brenier, président de la Ligue, 18 septembre 1938, AN, 20140057/6. 94 La personne de Léo Lagrange incarne cette proximité d’idées. Après avoir été, comme Jean Zay, membre du conseil général de la Ligue avant l’avènement du Front populaire, il prend en main les destinées de l’UFOLEP en 1939. 95 « Si l’on peut regretter la parcimonie avec laquelle ils ont attribué de maigres subventions, les laïques ont du moins cette consolation, c’est qu’elles ne sont plus dispensées, comme il y a quelques années, presque uniquement à des œuvres qui, sous le couvert de l’éduca- tion physique, dissimulent à peine leur caractère confessionnel. » BRENIER, Jacques. 1933. « Quelques notes sur la LE », L’Action laïque, octobre. 96 BEAUVILLE, Gabriel. 1934. Projet de réorganisation du sport scolaire et universitaire, pré- senté au Congrès de Reims, AN, 20140057/5. 97 « L’éducation physique est une œuvre scolaire, aux maîtres de la réaliser. » 98 GOTTELAND, Jean. 1928. Pour l’éducation intégrale, physique, intellectuelle et morale, Paris, Nathan. 99 L’Auto, 4/12/1931. 100 DUHAMEL, Georges. 1930. Scènes de la vie future, Paris, Mercure de France. 101 Considéré comme le « père du journalisme » en France. Très proche des milieux maçon- niques, tout comme Paschal Grousset, maçon, Gaston Vidal, membre de la grande loge de France, Marcel Delarbre président de « L’Amicale (maçonnique) des sportifs », membre de « l’Association fraternelle (maçonnique) des journalistes », Joseph Brenier président

71 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan Revue sciences sociales et sport / Numéro 15

du Conseil de l’ordre du Grand Orient. Reichel fut fondateur du syndicat de la presse sportive. 102 Plan de réorganisation de l’éducation physique et du sport. Projet présenté au congrès de la Ligue, 1939, AN 20140057/11. 103 « L’orientation de la Confédération dans l’éducation physique et sportive de la jeunesse ». Rapport de Ch. Trochon au Congrès de 1937. L’Action laïque, juin-août 1937. 104 Plan constructif de la question de l’EP et du sport dans une démocratie. Ibid. 105 BEAUVILLE, Gabriel. 1934. Projet de réorganisation du sport scolaire et universitaire. Pré- senté au Congrès de Reims. AN 20140057/21. 106 Les principes d’une éducation intégrale non spécialisée, et d’une ouverture au plus grand nombre trouvent ici des convergences avec le corpus idéologique des différentes branches du sport ouvrier, son accent marxiste en moins. 107 MARTIN, Jean-Paul (MARTIN, 2006 : 235). 108 LECLER, Joseph. 1938. « L’effort laïque dans les œuvres postscolaires », Études, 5 mars. AN Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan 20140057/7. 109 La Ligue décompte 90 450 enfants ou jeunes gens ayant participé aux différentes Fêtes de la jeunesse en 1937 et recense 77 fêtes dans l’année écoulée. L’Action laïque, décembre 1937, p. 97. 110 CASSONNET, L., président du comité des fêtes de la Ligue, circulaire interne, 25/11/1935, AN 20140057/25. 111 DESSIS, Jean. 1976 ; DESSIS, Jean. 1977. Un demi-siècle de basket landais. Mont-de-Marsan, comité des Landes. Affrontements entre Étoile amoloise et SS souprossaise par exemple. 112 La Ligue de l’enseignement préconise une action concertée en faveur de la laïqueisation de la femme. Dossiers d’action populaire du 11/8/1935. AN 20140057/5. 113 BOSC, Gérard. 1999. Une histoire du basket français, tome 1, Paris, Seort. 114 Cité par Dessertine et Maradan (DESSERTINE et MARADAN, 2001 : 114). 115 BRENIER, Jacques. 2005. « L’organisation des loisirs dans une démocratie », L’Action laïque, juillet-août. 116 Ligue française de l’enseignement, Laicité nous écrivons ton nom, Les idées en mouvement, hors-sé- rie n° 6, mars 2005, p. 68. 117 HOLT, Richard, op. cit., p. 265. 118 DE SAINT-CYR, Charles. 1908. Le sport éducateur social, Paris, édition inconnue ; DIDON, Hen- UL©/·LQÁXHQFHPRUDOHGHVVSRUWVDWKOpWLTXHVªGLVFRXUVDXFRQJUqVRO\PSLTXHGH 1897, https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k73110q.pdf 119 Ligue française de l’enseignement, Laicité nous écrivons ton nom, Les idées en mouvement, hors- série n° 6, mars 2005, p. 68.

72 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université Paris-Sud 11 129.175.48.218 22/01/2020 10:54 © L'Harmattan