Le Statut Du Français Dans L'ouest Canadien : La Cause Caron
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Il est entendu que la présente publication est offerte sous la réserve expresse que ni Éditions Yvon Blais, ni l’auteur (ou les auteurs) de cette publication, ni aucune des autres personnes ayant participé à son élaboration n’assument quelque responsabilité que ce soit relativement à l’exactitude ou au caractère actuel de son contenu ou au résultat de toute action prise sur la foi de l’information qu’elle renferme, ou ne peut être tenu responsable de toute erreur qui pourrait s’y être glissée ou de toute omission. La participation d’une personne à la présente publication ne peut en aucun cas être considérée comme constituant la formulation, par celle-ci, d’un avis juridique ou comp- table ou de tout autre avis professionnel. Si vous avez besoin d’un avis juridique ou d’un autre avis professionnel, vous devez retenir les services d’un avocat, d’un notaire ou d’un autre professionnel. Les analyses comprises dans les présentes ne doivent être interprétées d’aucune façon comme étant des politiques officielles ou non officielles de quelque organisme gouvernemental que ce soit. Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada accordée par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition. Dépôt légal : 4e trimestre 2014 Bibliothèque et Archives nationales du Québec Bibliothèque et Archives Canada ISBN 978-2-89635-568-6 Éditions Yvon Blais, une division de Thomson Reuters Canada Limitée 75, rue Queen, bur. 4700 Service à la clientèle Montréal (Québec) H3C 2N6 Téléphone : 1-800-363-3047 Canada Télécopieur : 1-450-263-9256 Site Internet : www.editionsyvonblais.com Le statut du français dans l’Ouest canadien : la cause Caron Sous la direction de Sophie Bouffard, Ph.D., et Peter Dorrington, Ph.D. Centre canadien de recherche sur les francophonies en milieu minoritaire (CRFM) Institut français Université de Regina Le présent ouvrage est le fruit d’un partenariat entre le Centre canadien de recherche sur les francophonies en milieu minoritaire (CRFM) de l’Institut français de l’Université de Regina et l’Associa- tion des juristes d’expression française de la Saskatchewan (AJEFS). Les partenaires souhaitent remercier les personnes ayant assuré un rôle important dans la réalisation de cet ouvrage : Coordination administrative : Céline Desrosiers (AJEFS) Coordination scientifique : Angeline Dubois et Karin Dupeyron (CRFM) Révision linguistique : Françoise Stoppa Les partenaires souhaitent également remercier le ministère de la Justice du Canada pour sa contribution financière. VII AVANT-PROPOS Yves Frenette* Le 4 décembre 2003, Gilles Caron, un Québécois résidant en Alberta depuis une dizaine d’années, est accusé d’une infraction mineure au Code de la route. Cinq jours plus tard, il avise la Cour pro- vinciale qu’il demande un procès en français et qu’il conteste la vali- dité du billet de contravention, celui-ci n’étant émis qu’en anglais. C’est le début d’une saga judiciaire qui durera encore longtemps. Défendu par le Fransaskois Me Rupert Baudais, Gilles Caron gagne sa cause à la Cour provinciale de l’Alberta en 2008, mais il est débouté par la Cour du Banc de la Reine dans la même province un an plus tard. Au début de 2011, la Cour suprême du Canada rejette la requête du gouvernement albertain à l’effet que Caron doive rembourser la Province pour les provisions pour frais qu’il avait reçues de cette dernière. Le dossier a été entendu en avril 2013 par la Cour d’appel de l’Alberta où Me Roger J.F. Lepage représentait M. Caron. Voilà où en est l’affaire Caron au moment d’écrire ces lignes. Cette cause n’est ni la première ni la dernière à remettre en question l’unilinguisme anglais dans les provinces des Prairies. Pour ne citer que les deux causes les plus célèbres, il y eut l’affaire Forest au Manitoba et l’affaire Mercure en Saskatchewan, qui aboutirent toutes deux en Cour suprême, en 1976 et en 1988 respectivement. Plusieurs des chapitres de ce livre contextualisent le déclin du statut du français dans l’Ouest à partir de 1896 et les tentatives de redresse- ment au cours des cinquante dernières années. Tous font état, direc- tement ou indirectement, de la francophobie inhérente aux lois linguistiques des temps passés et qui persiste, entre autres, dans la résistance acharnée des gouvernements provinciaux à accorder des droits aux francophones. * Ph.D., Université de Saint-Boniface. IX X LE STATUT DU FRANÇAIS DANS L’OUEST CANADIEN Dans le premier chapitre, François Larocque, Mark C. Power et Michel Doucet font l’archéologie de la Proclamation royale du 6 décembre 1869, qui est au cœur de la cause Caron ; ils font ressortir sa signification pour les acteurs historiques de l’époque, montrent son importance juridique jusqu’à la Première Guerre mondiale et expliquent l’oubli dont elle a été l’objet depuis lors. Les trois juristes sont suivis par le politologue Edmund A. Aunger ; ce professeur du Campus Saint-Jean analyse les débats entourant la constitutionnali- sation des droits acquis dans la Terre de Rupert et le Territoire du Nord-Ouest et montre clairement que lesdits droits comprenaient les droits linguistiques. Dans le troisième chapitre, un autre politologue, Raymond Hébert, se livre à une synthèse de l’histoire politico-juri- dique de la langue française dans l’Ouest avant la création du Mani- toba, en 1870. Hébert fait la preuve que, depuis au moins le milieu du XIXe siècle, il y avait égalité de statut entre l’anglais et le français dans les institutions politiques, judiciaires et administratives de la colonie de la rivière Rouge. Pour sa part, l’historien Gratien Allaire utilise la notion d’aménagement linguistique pour comprendre la continuité linguistique des francophones des Prairies au tournant du XXe siècle. Il avance que les différences entre les provinces étaient, somme toute, mineures ; les grandes orientations étant partout les mêmes. Dans le cinquième chapitre, le juriste Pierre Foucher pose la question de la nature de la Proclamation de 1869. S’agit-il d’une garantie constitutionnelle de droits linguistiques préexistants ? S’agit-il d’un texte qui a déjà eu force de loi, mais qui a été supplanté par d’autres textes dans lesquels les garanties des droits linguisti- ques sont absentes ? Ou s’agit-il d’un document à connotation poli- tique sans aucun effet normatif ? Pour répondre à ces questions, Foucher se livre à une véritable radioscopie de la Proclamation de 1869. La contribution du sociologue Wilfrid Denis se situe à un autre niveau, celui des paradigmes antagoniques qu’il décèle dans les deux jugements de la cause Caron et qu’il situe dans le choc multiséculaire des civilisations : si elles adhèrent toutes deux à un fondement positi- viste du droit, la décision de la Cour provinciale et la décision de la Cour du Banc de la Reine diffèrent en ce qu’elles représentent respec- tivement une approche canadienne métissée tournée vers l’avenir, et une perspective européenne figée dans le passé, rigide et réduction- niste. L’ouvrage se termine par une étude de Rodrigue Landry sur les relations entre l’État et les minorités linguistiques. Le chercheur de l’Université de Moncton utilise son concept bien connu d’autonomie culturelle pour montrer que le rôle de l’État est essentiel pour la pro- motion de la vitalité d’une minorité, sans quoi sa langue n’a pas de légitimité. AVANT-PROPOS XI Plus que dans les autres affaires juridico-constitutionnelles, la recherche historique a joué un rôle central dans la cause Caron.Nese contentant pas de remonter à la fondation des provinces de la Saskat- chewan et de l’Alberta en 1905 ou même à la Loi de 1870 sur le Mani- toba, les défenseurs de Gilles Caron se sont plongés dans l’histoire des Prairies depuis le début du XIXe siècle et y ont trouvé matière à étayer leur argument à l’effet que bien avant la Confédération, une société bilingue s’épanouissait dans la région et que les institutions mises sur pied par la Compagnie de la Baie d’Hudson, elles aussi bilingues, reflétaient cette réalité. Edmund Aunger, chercheur prin- cipal et témoin expert pour la défense, a ainsi découvert des centaines de documents qui constituent des preuves irréfutables à cet égard, tellement irréfutables que le juge Eidsvik de la Cour du Banc de la Reine n’a pas remis en question leur pertinence. La magistrate a plu- tôt fait reposer sa décision sur la nature de la Proclamation royale de 1869, qu’elle interprète dans un sens étroit, comme on vient de le voir. Sans vouloir minimiser l’impact négatif de son jugement, je suis d’avis que, à long terme, les preuves historiques pèseront beaucoup plus dans la balance. Même si ce n’était pas l’objectif visé, les recherches d’Aunger ont mis à jour des aspects inconnus de l’histoire des Métis du nord-ouest de l’Amérique. En général multilingues, ces derniers étaient porteurs d’une identité distincte, comme en fait foi, entre autres, l’appari- tion dans les grandes plaines de la langue métchif, un phénomène complexe que les linguistes n’ont pas fini de comprendre.