Au Pays D'yenne
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AU PAYS D'YEN NE par Joseph René CLOCHER 1985 En hommage à. Jean Létanche et Lucien Lagier Bruno qui ont dévoilé avec beaucoup de passion des pans importants du passé yennois TABLEI MDL t. DESULO MATIERESHrtlitlKLO Pages I - Le tour du propriétaire 3 II - Comme des nids 5 III - Un peu de toponymie 8 IV - Labeye ou 1'abbaye ? 11 V - Les précisions du géologue 13 VI - Géographie rétro 17 VII - Dans 1'histoire à grands pas 20 VIII - Polente ou pomme de terre ? 23 IX - Le pays aux 36 châteaux 27 X - Les maîtres de Yenne 32 XI - Du côté de l'instruction 36 XII - Les signes de la Foi 40 XIII - L'art à la portion congrue 45 C'ETAIT HIER 48 I - La mode 1850 49 II - Quand il fallait tout faire 52 III - Avant le tunnel 54 IV - Le long de l 'An 55 V - L'enfant Jésus 58 VI - La Saint Jean 59 VII - Le Cornavé 60 VIII - Les Rogations 62 IX - Le 15 août 64 X - La Fête Dieu 66 XI - Pain bénit ... pas mort 68 AU TRAVAIL 70 % I - Les Brigands 71 II - Le chaufournier 74 III - Les paniers 76 IV - Les charbonniers 78 V - Faire son huile 81 Pages HISTOIRES DE PIERRES 83 I - La pierre du père 85 II - La pierre des évêques 86 III - La pierre de la rave 88 HISTOIRES EXTRAORDINAIRES 90 I - La statue de Saint Martin 91 II - La chèvre 93 III - La bonnette blanche et la bonnette rouge 94 IV - Hallucination 95 V - Le feu de Choisel 96 VI - La physique 97 VII - Les allumettes 99 VIII - Le Sarvan 102 IX - Après la batteuse 103 DES PETITS BUGISTRES DIGNES DE MEMOIRE 105 I - Une famille d'artistes 106 II - L'agronome en habit de coeur 108 III - Un homme prévoyant 111 IV - Une affaire de seringue 113 V - Le Maître 115 VI - Un bossu nommé Dullin 121 VII - Quand le doute est semé 126 EN FAISANT PARLER LES ARCHIVES 128 I - Question santé 129 II - L'affaire de la Saint Crépin 132 III - Hectare contre journal 134 IV - Au feu ! 136 V - Tout çà pour M'sieur le curé ? 138 VI - Allez donc savoir ... 140 Pages PAGES D'HISTOIRE 143 I - Canossa, vous connaissez ? 144 II - Pierre Châtel 145 III - Une force économique 149 IV - Les hommes à cliquettes 152 V - Quand les moines passaient 154 VI - Un bon calcul 156 VII - Un roi à Yenne 158 VIII - Au Villard, chez le Monchu ... 160 IX - Un état de propriété 163 X - Le trouble venu de France 165 XI - Le chateau qui avait gardé ses tours 169 XII - Les voraces 170 XIII - Au temps des roues à aubes 173 XIV - Histoires de ballon 175 XV - D'aujourd'hui à demain 178 Le pays de Yenne n'a pas de nom particulier. Les géographes ont l'habitude en Savoie d'opposer l'avant-pays à la haute montagne, c'est-à-dire en gros l'arc Vanoise, Beaufortin, massif du Mont Blanc. Dans cet avant-pays ils rangent les préalpes : Chartreuse, Bauges, Bornes, Chablais et puis les chainons jurassiens du Salève, du Vuache, de la Chambotte, de la montagne du Chat. Le Petit Bugey, c'est-à-dire le Bugey savoyard fait partie de cet ensemble aux avants-portes de la Savoie, à l'ouest. Il vient se nicher entre le Rhône, le Cuiers et la barrière Mont du Chat, chaine de l'Epine. L'espace y est mesuré en largeur. Quand on vient par la route de Belley et qu'on franchit le pont de la Balme, un panneau nous apprend que Yenne est la porte de la Savoie. C'est une porte il est vrai qu'il serait facile de fermer tant les falaises de rochers semblent proches mais c'est une porte qui ne débouche pas sur de grands espaces. Une fois sortie du magnifique défilé de Pierre Châtel, la route traverse le vieux bourg moyen^ageux de Yenne, fait quelques lacets dans la campagne verdoyante en suivant le cours de la Méline, puis très vite elle doit s'engouffrer sous le tunnel du Chat car l'horizon est barré à l'ouest. Le pays de Yenne est en Savoie certes, mais il est là un peu comme un appendice. Il n'en a pas toujours été ainsi. Nous verrons pourquoi ici l'histoire et la géographie ne semblent pas tout à fait d'accord. Yenne n'est pas la capitale du Petit Bugey, car de capitale il n'y en a pas. Le terme même de Petit Bugey, trop savant, n'est employé par personne et les gens d'ici sont tout ébahis quand on leur dit que leur région s'appelle ainsi. Les journalistes préfèrent parler de la région des 4 cantons, c'est- à-dire Yenne, St-Genis, les Echelles, le Pont de Beauvoisin. Si l'ensemble n'est pas coiffé par un nom unique c'est que cela correspond à une réalité profonde qui est l'émiettement. Ici pas de grande voie routière unifiant l'ensemble, pas de rivière drainant la région en son coeur, pas de chemin de fer mais au contraire une mosaïque de territoires dont les quatre bourgs principaux qui sont aussi des chefs lieu de canton sont au fond de cuvettes séparées entre elles par des versants et des lignes de crête. La règle c'est la diversité. Même le patois va se retrouver différent à Yenne et à Novalaise pourtant bien proches. Le pays de Yenne, c'est-à-dire en gros le canton, est donc un petit monde, non pas clos mais bien rencoigné, ayant sa propre individualité : à deux pas de Belley, mais aussi à deux pas de Chambéry depuis qu'à coups de mines en 1929, les ingénieurs ont percé la montagne du Chat. I LE TOUR DU PROPRIETAIRE Commençons par faire le tour du propriétaire. La montagne du Chat est une imposante barrière de terre et de rochers qui ferme l'horizon vers Chambéry. Les pentes sont raides, le terrain y est plutôt avare pour l'agriculture. Sous la muraille sommitale des calcaires gris, la forêt recouvre presque tout l'ensemble d'un manteau sombre. Dans les temps anciens, disons jusque vers le 13ème siècle, on l'appelait le Mont Muni. A l'époque romaine le col du Chat était une route très fréquentée puisqu'il était sur la grande voie de passage de Vienne en Italie par Chambéry et le petit Saint-Bernard. C'était une "via munita", c'est-à-dire une voie qui avait exigé pour sa réalisation des travaux audacieux. De via munita à mons munitus - le Mont Muni - il n'y a qu'un pas que l'on peut franchir sans trop de risque de se fourvoyer. Par contre le mystère reste entier pour la suite. Pourquoi le Mont Muni devint-il le Mont du Chat ? Il faut beaucoup d'imagination pour reconnaitre dans le doigt de pierre pointé vers le ciel au-dessus de Chevelu, le croc d'un chat. Les chroniqueurs du Moyen-âge font mention dans leurs écrits de l'existence d'un affreux matou qui terrorisait tout le monde au passage du col. Il laissait passer 19 personnes mais dévorait toujours la 20ème. Heureusement un soldat qui s'en revenait chez lui, courageux et bien inspiré, eut l'idée de faire bénir son fusil par le curé avant d'escalader les pentes de la montagne. La bête frappée en plein coeur roula jusque dans le lac. Peut- être n'en serions-nous pas encore vraiment débarrassé ? Au dire de certains, elle ne serait pas morte et les jours d'orage, par ses colères elle fait chavirer les barques sur le lac du Bourget. Est-ce ce maudit chat qui par ses exploits a donné le nom à la montagne ? ou plutôt est-ce le nom de la montagne qui a inspiré la naissance et la propagation de la légende ? Gardons-nous de trancher entre ces deux graves hypothèses. La montagne d'en face, le Mont Tournier s'appelait autrefois le Mont Dronier et la forêt du sommet porte encore le nom de Dronière. Au pied de la montagne du côté de Yenne se trouve le château de la Dragonnière et de l'autre cote près de St-Genix il y avait le château de Montdragon maintenant ruiné. On le voit, il y avait du dragon dans l'air. Les gens qui devaient traverser la montagne, afin de se mettre à l'abri des attaques du monstre invoquaient le secours du bon Saint-Georges, garde du corps réputé. On le vénérait avant d'entreprendre la traversée à Yenne ou à Champagneux et la paroisse de Gerbaix lui est encore dédiée. Que de soucis pour nos ancêtres, toujours tourmentés par des animaux fabuleux et mal intentionnés 1 Le Mont Tournier est le premier bastion élevé en avant du donjon savoyard. En bon stratège, le grand constructeur a tourné le côté abrupt vers l'extérieur. Heureusement que le Rhône a eu assez d'acharnement pour se frayer un passage à Pierre- Châtel sans quoi la Savoie aurait eu l'air de refuser jalousement son accès à l'étranger. Sur son autre versant, à l'est, il est plus accueillant, moins farouche. Les ondulations molles de ses terres ont permis le défrichement, l'installation des cultures et des villages. Entre les deux montagnes le Flon est un torrent bouillonnant mais secret. Il cache ses eaux vives, ses gouilles et ses cascades sous les épaisses frondaisons des châtaigners, des saules et des érables de toutes sortes . Prolongeant le mont du Chat, les pentes de la Charve ont le parfum du midi.