Le Jeu De Paume Fête Ses 20 Ans De Cinéma !
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i cinéma Le Jeu de Paume fête ses 20 ans de cinéma ! mars – juin 2011 i auditorium 20 ans de cinéma au Jeu de Paume : La réflexion critique s’est aussi invitée au un inventaire contemporain Jeu de Paume avec le lancement de la revue En 1991, l’ouverture du Jeu de Paume, Trafic par Serge Daney, suivi des projections de alors Galerie nationale consacrée à films rares ou films cultes (Adolfo Arrieta, James l’art contemporain, engendre l’invention Agee, Monte Hellman, João César Monteiro, impromptue d’une salle de projection et d’une Sergueï Paradjanov…), commentées par Paul programmation de cinéma dont le ton et la Otchakovsky-Laurens, son éditeur, et Raymond direction vont être vite donnés malgré – ou Bellour, Jean-Claude Biette, Sylvie Pierre et grâce à – un mélange des genres, des points Patrice Rollet, ses rédacteurs. Ces rendez-vous se de vue et des disciplines. renouvellent par la suite avec la revue Cinéma, Une conversation avec l’artiste canadien Léo Scheer, son éditeur, et ses rédacteurs, et plus Stan Douglas, premier vidéaste exposé tard avec la revue Vertigo et Cyril Neyrat autour au Jeu de Paume, suggère l’idée de la d’Albert Serra, Todd Haynes, Bob Dylan. programmation d’ouverture : les pièces de Dès 2002, les « Inventaires contemporains » Samuel Beckett réalisées pour la télévision cherchent à mettre en évidence les liens entre les allemande et inédites en France. arts plastiques et le cinéma décliné sous toutes C’est ensuite avec Arthur Pelechian et Jonas ses formes par de jeunes artistes, vidéastes, Mekas que naît l’habitude d’inviter les cinéastes cinéastes… C’est ainsi qu’on découvre les films à venir présenter leurs films ou d’ouvrir leur et les vidéos de Pierre Alféri, Alice Anderson, rétrospective – souvent la première en France ou Erik Bullot, Hélène Delprat, Arnaud des à Paris –, comme celles d’Atom Egoyan, Patrick Pallières, Vincent Dieutre, Camille Henrot, Isilde Bokanowski, Edgardo Cozarinsky, Lionel Rogosin, Le Besco, Henri Foucault, Mounir Fatmi, Keja Jean-Claude Biette, André S. Labarthe, Yervant Kramer, Lech Majewski, Ariane Michel, Valérie Gianikian et Angela Ricci Lucchi, Harun Farocki, Mrejen, Leighton Pierce, Rafi Pitts, Anri Sala, Jean Rouch – qui pendant près de deux mois Karim Zeriahen… Liens avec les arts plastiques vient commenter ses films tous les soirs –, Pierre également établis avec les films de leurs illustres Perrault, Otar Iosseliani, Yoko Ono, Anne-Marie aînés, Marcel Broodthaers, Martial Raysse, Erró, Miéville, Alain Fleischer, le chorégraphe Angelin Robert Frank ou William Kentridge, projetés en Preljocaj, Philippe Collin, Johan Van der Keuken – complément de leurs expositions. sujet central du Mois de la Photo de 1998 –, Par ailleurs, les correspondances entre Jean-André Fieschi, Pierre Léon et Vladimir la programmation du cinéma et les installations Léon, Daniel Schmid, Naomi Kawase – après sa de cinéastes a commencé dès l’ouverture du Caméra d’or au Festival de Cannes –, Nurith Aviv, Jeu de Paume avec L’Expulsion des Maures, Marc Recha, Robert Cahen, Vittorio de Seta…. l’installation de Raoul Ruiz, qui occupait tous les Avec des cinéastes encore peu montrés ou des espaces du sous-sol, puis avec D’Est de Chantal rétrospectives jusqu’alors jamais envisagées, se Akerman, présentée au premier étage pendant crée la particularité d’une programmation de la rétrospective de ses films. familles de cinéastes dont les œuvres relèvent Après 20 ans, se dessinent les lignes de de formats différents comme le documentaire, force et les points de convergence de ce qui la fiction et surtout le genre, peu repéré, des n’apparaissait au départ comme intuitions, goûts « essais cinématographiques », dont ceux de et opportunités : mettre en valeur des familles de Jean-Luc Godard, qui firent l’objet, en 1997, cinéastes, méconnus en France et parfois même d’une séance mémorable par sa présence dans leur pays d’origine, à travers leurs présences imprévue, un soir de neige. et leurs œuvres, croiser ces rétrospectives avec La collaboration avec le Festival d’automne, d’autres disciplines artistiques, donner la parole à à partir de 1995, donne l’occasion de faire des critiques, des écrivains, des historiens de l’art, découvrir à Paris les œuvres complètes d’artistes des philosophes – ainsi Jean Narboni, Jacques comme Rebecca Horn et de cinéastes comme Aumont, Jean Louis Schefer, Hubert Damisch, Carmelo Bene – qui, parallèlement, met en Georges Didi-Huberman, Peter Szendy… et scène Macbeth au théâtre de l’Odéon –, Shinji bien d’autres sont devenus des familiers du Aoyama, James Benning ou Alexandre Sokourov. Jeu de Paume. Tout ce qui semblait innovations, propositions programme originales, choix singuliers est aujourd’hui tendance générale dans les lieux de diffusion quasiment instantanée de « l’image en Chantal Akerman mouvement » (salles de cinéma, festivals, musées, z Toute une nuit galeries, Internet et même téléphone portable). France-Belgique, 1982, 35 mm, couleur, 90’ Il n’en reste pas moins que le Jeu de Paume, avec Aurore Clement, Tchéky Karyo, Christiane Cohendy, celui des débuts comme celui dévolu depuis Jan Decorte, Hélène Lapiower, Véronique Silver, 2004 à la photographie et à l’image, est Samy Szlingerbaum, Natalia Akerman, souvent évoqué, en France et à l’étranger, Benedicte Paquay, Gabriele Claes comme un lieu de découvertes et de révélations Dans la touffeur d’une nuit d’été, à travers les cinématographiques. rues de Bruxelles, dans les cafés, les chambres, Comment rendre compte de plus de les cages d’escalier, des couples se croisent, 140 programmes sinon à travers une quinzaine se séparent, se retrouvent, s’étreignent, se de rendez-vous, certains évoquant des fuient en un ballet indécis, à la fois exaspéré découvertes étonnantes pour tous, comme le et fragile. Jusqu’au petit matin, la ville livre travail insoupçonné de Samuel Beckett pour la ces fragments de scènes amoureuses : télévision, d’autres rappelant les rétrospectives rencontres, retrouvailles et ruptures. « La nuit dont le travail de préparation a donné naissance est plus longue que le désir, la caméra est à une fidélité admirative et amicale, comme ceux plus patiente que la nuit, la ville se réveille : avec Chantal Akerman, Edgardo Cozarinsky, Bruxelles va brusseler. » (Serge Daney, les Gianikian, Jonas Mekas, Wang Bing ou Ciné-journal, éd. Cahiers du cinéma) Manoel de Oliveira (qui, à 102 ans, tenait à venir fêter les 20 ans du cinéma du Jeu de Paume) et, enfin, un dernier rendez-vous pour honorer Jean-Claude Biette, Jean-André Fieschi, Jean Rouch, Johan Van der Keuken, autant de cinéastes qui, au Jeu de Paume, ont accompagné leur première rétrospective de leur présence quotidienne. En hommage à leur goût commun d’une vie créative, offerte à travers leurs œuvres, nous avons choisi de présenter Trois Ponts sur la rivière de Jean-Claude Biette. Danièle Hibon Toute une nuit de Chantal Akerman, 1982 © Cahiers du cinéma w Samuel Beckett z Film 1966, 35 mm, noir et blanc, silencieux (un son), 30’ scénario et direction : Samuel Beckett mise en scène : Alain Schneider avec Buster Keaton Esse est percipi, « être c’est être perçu », disait le philosophe Berkeley. Film est l’histoire de « la recherche du non-être par suppression de toute perception de soi », écrit Beckett. Le personnage O (Buster Keaton) « s’efforce de ne pas être vu » et se précipite aveuglément dans une course « allant du maximum d’exposition à l’intérieur, d’enfermement, d’isolement dans sa chambre, cet endroit qui est un piège préparé. » Film, « le plus grand film irlandais », selon Gille Deleuze. z Pièces pour la télévision direction : Samuel Beckett directeur de la photo : Jim Lewis production : SDR Production « Beckett saisit immédiatement ce qui dans la télévision rencontre son écriture : la continuité fluide, le ressassement hémorragique. C’est le propre de l’enregistrement de la télévision que de proposer cet état de “voyeurisme” interminable, sans coupure, sans changement de plans, sans variation du point de vue afin de “ne pas explorer mais simplement regarder”. De ce fait, Beckett comprend bien la caractéristique de la caméra de télévision qui peut, plus encore que celle du cinéma, être mobile, “subreptice ou fulgurante”. “Elle avance ou recule pour se trouver aux endroits déterminés afin d’obtenir les points fixes les plus significatifs”, dit-il encore Film de Samuel Beckett, 1966 à propos de Ghost Trio… Film avec le concours muet, bien entendu, de Buster Keaton ou Quad sont exemplaires de ces métaphores rendues l’inventaire. Puis elle introduit le protagoniste : concrètes à l’image en échappant aux pesanteurs un vieil homme penché sur un objet… De l’objet de la langue, qu’il a tant traquées par ailleurs. (un magnétophone) s’échappe un passage du La télévision, cet “œil sauvage” selon Beckett, trio Fantôme de Beethoven. Le visage ravagé du aurait-elle été pour lui l’occasion de règlements de vieil homme se relève puis disparaît en fondu. compte inattendus avec le théâtre ? » (Jim Lewis) But the Clouds Ghost Trio 1977, vidéo, noir et blanc, 15’46’’, vo allemande 1977, vidéo, noir et blanc, 31’30’’, vo allemande Comme dans Ghost Trio, la voix introduit les Une voix féminine accueille le téléspectateur, éléments de l’image, puis se tait pour laisser ce n’est plus la voix intérieure de Eh Joe, c’est l’image parler seule. Ici la voix s’exprime à la la voix objective du maître de cérémonie première personne du singulier : c’est celle qui décrit l’intérieur de la chambre, en fait d’un vieil homme qui rentre chez lui, enlève son w manteau, met sa robe de chambre et s’installe personnages : au théâtre on voit apparaître pour tenter d’évoquer le visage de la femme quatre personnages, Bam, Bem, Bim et Bom, aimée. C’est alors que le visage aimé apparaît en robe grise et cheveux gris.