Edmond Bocquier (1881-1948) Et La Géologie
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LE NATURALISTE VENDÉEN N° 8, 2008 : 57 – 69 57 Edmond Bocquier (1881-1948) et la géologie Jean-Marc VIAUD & Gaston GODARD Abstract: Better known for his studies on the prehistory of the Vendée (Western France), Edmond Bocquier (1881-1948) also performed some work on the geology of this region, particularly on the Quaternary and its relationship with archae- ology. Beside a few publications on these matters, he left numerous manuscripts, which are now deposited at the archives départementales de la Vendée. Mots clés : géologie, formations superficielles, Quaternaire, Vendée (France), Cantal (France), Edmond Bocquier. Key words: geology, surface formations, Quaternary, Vendée (France), Cantal (France), Edmond Bocquier. UN INSTITUTEUR PASSIONNÉ savantes de la région et se crée un réseau d'amis et de correspondants. En 1899, c'est la société Edmond Bocquier est né à Chaillé-sous-les- d'émulation de la Vendée qui l'accueille, alors Ormeaux, près de La Roche-sur-Yon, le 29 août qu'il n'a que 18 ans. L'année suivante, il devient 1881. Alors qu'il est âgé de 6 ans, ses parents en membre correspondant de la société des sciences confient l'éducation à son oncle maternel, Louis naturelles de l'Ouest de la France, puis, en 1901, Fallourd, un instituteur public qui vient d'être membre de la société botanique des Deux- nommé à La Gaubretière, après avoir terminé sa Sèvres, participant à l'étude de la flore du Poitou. formation à l'école communale de Chaillé-sous- Il fréquente aussi quelques connaisseurs de la les-Ormeaux. Le jeune Edmond parcourt ainsi la géologie vendéenne, comme Clément Chartron, Vendée au gré des mutations de son oncle, dé- receveur municipal à Luçon, qui étudie les ter- couvrant le bocage (La Gaubretière, La Châtai- rains jurassiques de la plaine et s'intéresse à l'ar- gneraie), le Marais poitevin (Damvix), la côte (la chéologie. Il connaît les travaux de Gaston Vas- Chaume et Les Sables-d'Olonne), puis Saint- seur, en particulier l'ouvrage de 1881 sur les Re- Philbert-de-Bouaine et enfin Luçon. L'éducation cherches géologiques sur les terrains tertiaires d'Edmond Bocquier est donc celle de l'école de de la France occidentale, le Traité de géologie la République, ce qui le conduit tout naturelle- d'Albert de Lapparent, les travaux d'Émile Haug ment à l'école normale d'instituteurs de La Ro- sur les cours d'eau et les alluvions, les recherches che-sur-Yon qu'il intègre en octobre 1897 avec plus anciennes d'Henri Fournel sur les terrains quinze autres jeunes hommes. houillers du Bocage vendéen, ainsi que les études À partir de 1896, il fréquente assidûment la de Cressac et Manès. Il lit les publications de Ju- bibliothèque municipale de Luçon, où demeure les Welsch, professeur de géologie à l'université son oncle, s'intéressant aussi bien aux sciences de Poitiers, celles du minéralogiste nantais Char- naturelles, à l'archéologie, à l'histoire et à l'archi- les Baret, et acquiert les premières feuilles de la tecture qu'à l'ethnographie. Il s'adonne aussi au carte géologique de la France au 1/80 000. dessin et à la peinture et aime à croquer les L'intérêt d'Edmond Bocquier pour la géologie paysages et les vieux monuments des environs de et son engouement pour l'archéologie le condui- Chaillé-sous-les-Ormeaux, comme les chaos gra- sent naturellement à entreprendre quelques tra- nitiques de la vallée de l'Yon (pl. I, archives dé- vaux de recherche sur la géologie du Quaternaire partementales de la Vendée, ADV, cote 59 J et ses relations avec l'industrie lithique, essentiel- 127/1). lement en Vendée, mais aussi dans le Cantal où il Edmond Bocquier intègre très tôt les sociétés séjourne de 1919 à 1925. © Les Naturalistes Vendéens 58 Jean-Marc VIAUD & Gaston GODARD LE NATURALISTE VENDÉEN N° 8, 2008 GÉOLOGIE DU PAYS YONNAIS le nord-ouest pour prendre ensuite la direction opposée, vers le Lay. Edmond Bocquier est toujours demeuré atta- ché à sa terre natale. Aussi, ses premiers travaux En septembre 1900, paraît son article Péné- sont-ils consacrés au pays yonnais et plus parti- plaines vendéennes dans le Bulletin de la Société culièrement à la commune de Chaillé-sous-les- des Sciences naturelles de l'Ouest de la France Ormeaux. À l'école normale, sous la direction de [BOCQUIER, 1900b]. Cette étude, qu'il a rédigée son professeur M. Labergère, il rédige une Noti- alors qu'il était encore élève-maître à l'école nor- ce géographique et historique à l'usage des en- male, traduit son souci de comprendre les paysa- fants sur la commune de Chaillé-sous-les- ges de la région. Il s'agit d'un travail de géomor- Ormeaux, qu'il dédie à son oncle et éducateur, phologie, où il décrit les grandes surfaces planes Louis Fallourd. Elle est publiée l'année suivante érodées (ou pénéplaines), entrecoupées de val- dans le Bulletin départemental de l'Enseigne- lées et d'un réseau hydrographique parfois singu- ment primaire [BOCQUIER, 1901b] et fait l'objet lier. Il cherche en particulier à expliquer deux d'un tirage à part (fonds Bocquier, ADV, 59 J phénomènes de captures de rivière, celles de la 127 et BIB 4095). À la suite d'un appel lancé en Sèvre Nantaise et de l'Yon. Après s'être écoulée 1881 par les inspecteurs d'académie à travers vers le bassin versant du Lay par la trouée de toute la France, les instituteurs publics de cette Saint-Mars-la-Réorthe, la Sèvre Nantaise aurait époque publient volontiers des monographies de été obligée de s'écouler en direction du nord, leur village pour leurs élèves. Dans certains dé- pense-t-il, à la suite de mouvements orogéni- partements, c'est plus d'une centaine de mono- ques. Cette conception n'est plus admise aujour- graphies qui sont ainsi réalisées, comme en d'hui, notamment depuis que la trouée de Saint- Deux-Sèvres (71 en 1885-1886). Mais, en Ven- Mars-la-Réorthe a été réinterprétée comme la dée, nous ne connaissons qu'une autre monogra- trace d'une cluse creusée par un paléofleuve phie de ce type, celle de Louis David, instituteur yprésien [GODARD et al., 1994]. Selon BOC- de l'école publique de Moutiers-sur-le-Lay, qui QUIER [1900b], l'Yon devait de même s'écouler publia en 1903 une notice sur cette commune, initialement en direction du nord-ouest, vers la également destinée aux enfants. La monographie Boulogne. Une capture par un affluent du Lay en d'Edmond Bocquier est présentée à l'Exposition aurait finalement dévié le cours vers le sud-est, universelle de 1900, avec une carte géologique expliquant à la fois un cours incurvé et une pente en relief au 1/80 000 de la commune et de ses accusée dans la partie aval [BOUTON, 2006]. environs ; elle y obtient le prix du ministère de l'Instruction publique dans la section de topogra- Cette conception sur l'évolution du cours de phie (ADV, 59 J 127). l'Yon est à nouveau illustrée par des panneaux explicatifs en couleurs, présentés en 1903 à l'ex- Cette notice sur Chaillé-sous-les-Ormeaux est position artistique et scolaire de La Roche-sur- à l'origine d'un travail plus important qui paraît Yon, dans le cadre d'une Étude sur l'Art de terre en trois livraisons, entre 1900 et 1903 dans l'An- rustique aux environs de La Roche-sur-Yon et nuaire de la Société d'Émulation de la Vendée sur l'exploitation de la glaise des plateaux ven- [BOCQUIER, 1900a, 1901a, 1903]. Il dédie cette déens. Une carte géologique manuscrite en publication à ses parents et leur dit : "Séparé dès couleurs de la commune de Chaillé-sous-les- mes premières années de cette bonne terre de Ormeaux est accompagnée de quatre panneaux Chaillé et ne l'ayant revue qu'assez rarement consacrés à la genèse de la vallée de l'Yon dans mon enfance, j'y retourne toujours avec un (ADV, 59 J 11/1-5) (pl. II, a-d). Les commen- doux plaisir ; les moindres détails du paysage, le taires occupent 13 pages d'un cahier manuscrit cours de l'Yon, les chemins creux, les plantes de intitulé Genèse de la vallée de l'Yon – notice ex- nos champs, le patois, les travaux et les soucis plicative des planches – exposition de La Roche- des paysans, tout, là-bas, m'intéresse, tout me sur-Yon (1903) (ADV, 59 J 11). Pour ces parle à l'âme : il me semble que tout cela, c'est travaux, Bocquier obtient la médaille de bronze un peu vous aussi…". Dans la première partie au concours régional de La Roche-sur-Yon. consacrée à l'Étude de la géographie physique ancienne et actuelle de la commune, Edmond BOCQUIER [1900a] traite de la géologie, en parti- culier du cours de l'Yon qui s'écoule d'abord vers Edmond Bocquier (1881-1948) et la géologie 59 FORMATIONS SUPERFICIELLES sées du socle. Elle est aussi souvent associée à QUATERNAIRES des formations sédimentaires plus anciennes, ré- siduelles et plus ou moins remaniées (argiles, sa- Lors de la séance du 1er mars 1901 de la so- bles et cailloutis). Les argiles des plateaux, qu'el- ciété des sciences naturelles de l'Ouest de la les soient sédimentaires ou qu'elles résultent de France, tenue au muséum de Nantes, Edmond l'altération du substratum, sont parfois épaisses Bocquier présente une communication sur Le li- et ont été utilisées pour la poterie et la briquete- mon des plateaux du sud-ouest du Bocage ven- rie à travers les âges.