Champion de France de marche : Diniz, maître du monde !

Il nous a refait une Diniz ! Déjà détenteur du record du monde du 50 km marche, Yohann Diniz s’est emparé, ce dimanche à Arles, de la meilleure performance mondiale de tous les temps sur 20 km. Sa séance de travail d’allures, il l’a transformée en record du monde. En 1h17’02’’, il efface des tablettes les 1h17’16’’ de Vladimir Kanaykin*. Une performance stratosphérique, dans la lignée de sa démonstration des championnats d’Europe de Zurich.

Ça devait être une séance d’entraînement. Vraiment. Sur la boucle de 1250 mètres à parcourir seize fois, Yohann Diniz, de retour d’un « stage fructueux » en Afrique du Sud, fait du vite- relâché-vite au cours des premiers kilomètres de ce championnat de France. Un « travail d’allures » à Arles, avant le rendez-vous de Lugano (Suisse) programmé une semaine plus tard, son premier gros objectif de la saison. Malgré un rythme irrégulier (entre cinq et huit secondes d’écart par tour), le marcheur de l’EFS Reims sent, progressivement, qu’il est sur de grosses bases sur ce tracé roulant, sans demi-tour. D’abord celles du record de France, qu’il détient en 1h17’43’’. Puis celles du record du monde, propriété de Valdimir Kanaykin depuis 2007. « Au bout de cinq kilomètres, j’étais largement plus rapide que les allures demandées, raconte le Français, au sortir de sa douche et avant de monter dans le train pour rentrer chez lui. Je me suis dit : « Ecoute, tu as un dossard donc on va changer de stratégie ! » Gilles (Rocca, son entraîneur, NDLR) m’a juste demandé de rester dans ma bulle et de continuer à rester propre techniquement. »

L’impression de voler La suite est époustouflante. Passage au dixième kilomètre en 38’40 puis, au quinzième, en 58’. Yohann Diniz en a encore sous les pieds. Alors il continue à accélérer et boucle les cinq derniers kilomètres en un peu plus de dix-neuf minutes, pour franchir la ligne en 1h17’02’’. « J’avais l’impression de voler, confie-t-il. A l’arrivée, j’étais super content et ému. C’est encore un record du monde ! » Au bout du fil, il parle pourtant sur un ton égal. Il est heureux, oui, mais pas question de s’enflammer. « Je ne suis pas dans l’euphorie. En toute humilité, je sais que je suis peut-être le meilleur marcheur au monde actuellement. Mais il faut que j’arrive à monter sur un podium aux Mondiaux et aux Jeux olympiques et que j’arrête avec la poisse maintenant. Mon leitmotiv, c’est la médaille. » Il préfère retenir la présence, au bord du parcours, des trois entraîneurs qui l’ont accompagné depuis le début de sa carrière de marcheur. Dans l’ordre : Denis Langlois, Pascal Chirat et Gilles Rocca. « Ils m’ont forgé chacun à leur façon, rend hommage le désormais double recordman du monde. Cette nouvelle performance, elle leur appartient à tous les trois. » Le marcheur n’oublie pas non plus ses camarades de l’équipe de France, actuellement en République Tchèque pour le grand rendez-vous continental indoor : « C’est ma médaille pour eux ! Je suis frustré de ne pas être à à leurs côtés. Un vrai collectif est né et c’est dommage que la marche ne soit pas au programme des championnats d’Europe en salle. » Un rire, puis : « Je ne peux pas apporter de breloque mais mon record fera partie du bilan de l’athlétisme du week-end ! » Un test avant Pékin La suite de son programme ? Comme prévu, Yohann Diniz sera au départ, le week-end prochain, des 20 km de Lugano. La semaine à venir sera donc l’occasion de tester son protocole de récupération, avec notamment beaucoup de natation, dans la perspective de son doublé 20 et 50 km Mondiaux de Pékin, en août prochain. Normalement, c’est en Suisse qu’il aurait dû lâcher les chevaux, après une sortie plus en contrôle à Arles. « Mais je vais changer mon fusil d’épaule, explique le protégé de Gilles Rocca. Comme je viens de faire un gros 20 km, je n’aurais peut-être pas autant envie de me dépouiller et je vais plutôt partir sur une séance à l’allure du 50 km, pour voir comment mon corps aura récupéré. » Que ceux qui croient le Rémois lèvent la main !

Florian Gaudin-Winer pour athle.fr

*Les 1h16’43 du Russe Sergey Morozov, qui apparaissent actuellement comme record du monde du 20 km marche sur le site de l’IAAF, ont été invalidés officiellement à la suite du contrôle antidopage positif de ce dernier. §§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§

03.08.15 - Championnats de France des 20 km et 50 km des Marches Arles - PRO – 013

20 km Marche Route | F | 20 km Marche Route | Chr: M | 20 000 m

5/ 3éme F 1h37'47 '' MENUET Emilie Aj Blois-Onzain 041 SEF / 91

9 1h44'14 '' GUILLARD Caroline Fleury Les Aubrais Saran A VEF / 71

35 1h59'33 '' BAEZA Julie Fleury Les Aubrais Saran A ESF / 95

41 2h06'19 '' HERBERT Barbara Aj Blois-Onzain ESF / 94

20 km Marche Route M | M | 20 km Marche Route M | Chr: M | 20 000 m

26 1h39'43 '' SESTIER Anael Fleury Les Aubrais Saran A ESM / 94

27 1h40'24 '' GAUCHET Quentin Aj Blois-Onzain ESM / 93

40 1h49'04 '' GERBAUD-BLIN Pierre Ca VierzonESM / 95 §§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§

Résumé du Dimanche 8 Mars Les Bleues reines d'Europe

Les relayeuses du 4 x 400 m, déjà sacrées à Zurich l’an passé, ont doublé la mise ce dimanche aux championnats d’Europe en salle de Prague, pour conclure en apothéose le week-end et offrir à la France une troisième médaille d’or en trois jours. Floria Gueï, Eléa-Mariama Diarra, Agnès Raharolahy et Marie Gayot sont bien les reines du continent, et permettent à l’équipe de France de terminer à la deuxième place du classement des médailles.

Le Temps Fort Pour célébrer la journée des droits de la femme, le relais 4x400 m a apporté au clan français la médaille féminine qui manquait pour conclure en apothéose. Championnes d’Europe en plein air l’été passé à Zurich, Marie Gayot, Agnès Raharolahy et Floria Gueï ont rejoué la partition avec mestria, en compagnie d’une Eléa-Mariama Diarra décomplexée. Au terme d’une course pleine de maîtrise tactique, les Bleues ont coupé la ligne en 3’31’’61 pour devancer la Grande Bretagne et la Pologne. C’est le premier titre français dans l’histoire des championnats d’Europe en salle dans cette épreuve, après le bronze obtenu à en 2011 (avec déjà Marie Gayot et Floria Gueï).

La brillante performance du collectif doré était pourtant loin d’être écrite d’avance. Il a fallu composer avec la frustration légitime de Marie Gayot et Floria Gueï, après leurs mésaventures lors de l’épreuve individuelle. Faire sans Muriel Hurtis, la capitaine de route des dernières saisons, aujourd’hui retraitée. Mais les Tricolores ont fait front, avec panache et sang-froid. Après l’échauffement, Djamel Boudebibah et Renaud Longuèvre les ont réunies, en cercle, pour faire corps. « C’est à vous d’écrire l’histoire et de faire rêver les gens ». Floria Gueï s’est donc élancée dans une ambiance survoltée, l’équipe tchèque ayant sur le papier des chances de briller. La Lyonnaise a parfaitement géré les bousculades au rabas, et assuré le lancement du premier étage de la fusée. « Les choses étaient très différentes par rapport à l’an passé, où je concluais. Les coaches voulaient que l’on soit polyvalentes, et il faut savoir faire le travail quelle que soit la position. J’avais un peu d’appréhension de partir avec le témoin, mais une fois le coup de pistolet donné, cela passe très vite. »

Eléa-Mariama, deuxième relayeuse, prend courageusement la tête lors de son premier tour, avant de s’accrocher aux basques de la Britannique Bundy-Davies et de la Russe Renzhina qui tentaient de s’échapper, pour aller trouver Agnès Raharolay en bout de course. « On avait toutes la pression, mais moi peut-être encore plus, en savant que les filles avaient fait un gros truc à Zurich et avaient l’habitude de courir ensemble. Je sors de deux années difficiles à cause d’une mononucléose. C’est avec des moments comme ça qu’on retrouve la confiance et qu’on se remet en selle », confiait-elle.

Pendant ce temps-là, Floria Gueï croise les doigts, aussi stressée que si elle devait finir. Pas très loin, Marie Gayot a « des fourmis qui montent dans les bras ». Partie en quatrième position, au cœur d’une « bagarre » dense, Agnès trouve l’ouverture dans le dernier virage. « J’étais beaucoup plus lucide qu’à Zurich. J’ai vu le trou laissé par l’Anglaise en train de craquer, et sans réfléchir, je passe. Je n’ai pas eu mal aux jambes, et je voulais absolument passer le témoin à Marie en tête », résumait la Nantaise.

Lancée en pole position, Marie Gayot découvre la position de finisseuse. « Tout se bouscule dans la tête. Le regard est totalement différent sur la course. On est dans un autre monde, concentrée uniquement sur la place des filles, à se dire qu’il faudra répondre aussi bien qu’elles ». A chaque attaque, Marie répond. Les mètres rallongent, les secondes défilent toujours plus lentement quand on est dans la position du chassé. Mais Marie ne cède pas un pouce de terrain à la Grande-Bretagne, qui tente de faire les extérieurs, contrôle la Pologne, revenue en trombe. Tout au long de son 400 m, ses coéquipières trépignent. « C’est parfait, c’est parfait, c’est parfait », répète à voix haute Floria. A l’arrivée, les pieds de la Rémoise restent hors de portée de ses adversaires, et les quatre filles en or peuvent savourer d’avoir montré qu’on pouvait s’adapter en donnant toujours le meilleur de nous-mêmes. Et confirmé le statut de reines d’Europe acquis en Suisse il y a sept mois. Ce qui est souvent le plus difficile après un exploit.

Powered by Dailymotion Le Chiffre 2 C’est la place de la France au tableau des médailles de ces championnats d’Europe 2015. Avec trois breloques en or (Pascal Martinot-Lagarde sur 60 m haies, Renaud Lavillenie à la perche et le relais 4x400 m féminin), l’argent de Dimitri Bascou et le bronze de Wilhem Belocian, la France s’intercale sur le podium entre la Russie et la Grande Bretagne. « C’est un bon bilan, auquel il faut ajouter le record du monde de Yohann Diniz, même si ce n’était pas ici, à Prague. L’équipe n’était pas lourde en volume, mais elle avait grand cœur, à l’image de notre exceptionnel relais féminin. Certains étaient en transition, comme Eloyse Lesueur, d’autres étaient absents, comme Mahiedine Mekhissi, Teddy Tamgho, Benjamin Compaoré, qui nous manquent », résume Ghani Yalouz. « Il faut noter que nous terminons cinquième au tableau des finalistes, et que 50 % de nos athlètes se sont qualifiés pour la finale, ce qui est très satisfaisant. Au-delà des résultats, ils ont offert des images extrêmement fortes. Le triplé des garçons sur 60 m haies restera dans l’histoire de l’athlétisme français », souligne Bernard Amsalem, président de la FFA.

Les Promesses Deux semaines après avoir dépassé pour la première fois de sa carrière la barre des 6 000 points lors de France, Gaël Quérin a récidivé ce week-end. Avec 6115 points, il a largement amélioré son record personnel pour prendre la quatrième place de l’heptathlon, à soixante-dix points d’une breloque. « Forcément, la quatrième place, ça pique. Mais avec le record et le total, c’est à prendre », appréciait le Nordiste. Regrettant de ne pas s’être lâché complètement lors de la première journée, il pouvait néanmoins se montrer satisfait d’avoir pour la première fois été à la lutte pour une breloque en grand championnat. « C’est encourageant pour la suite, et j’ai hâte d’être à cet été ».

Autre combinard engagé dans les travaux multiples, Bastien Auzeil découvrait la saveur des championnats internationaux. « J’ai quelques regrets sur le poids et la longueur qui ne se sont pas très bien passés pour moi, mais j’ai battu cinq records personnels sur sept. J’ai beaucoup appris ces deux derniers jours et c’est bien l’essentiel ! » Cerise sur le gâteau, il a lui aussi dépassé les 6000 points (6011), quinze jours après les avoir frôlés (5999) à Aubière. Cela le place à une excellente sixième place européenne.

Le Coup Dur

Emmanuel Biron savait, avant même de prendre le départ de la finale du 60 m, que ses chances étaient infimes. « Je me suis blessé à l’adducteur droit en fin de course lors de ma demi-finale ce matin. Même en serrant les dents, je savais que je pouvais sortir des blocs correctement, mais que dès que j’aurais fini ma phase de poussée, je serais foutu. Ça n’a pas manqué. » A l’arrivée, son temps en finale de 6’’72 était anecdotique, mais le Lyonnais notait tout de même que son chrono de 6’’60 en demies (le meilleur de sa saison), lui aurait offert une place sur le podium.

Et Aussi

Marion Fiack avait les yeux humides et les joues rougies au moment de se présenter devant les journalistes, après sa finale de la perche, conclue à la cinquième place avec un meilleur saut à 4,50m. « J’ai du mal à l’expliquer. J’ai vraiment tout fait pour aller haut. J’ai pris du levier, j’ai reculé de trois pieds, je courais plus vite. Sauf qu’à trois reprises à 4,60 m, j’étais trop près. C’est mon plus mauvais concours de la saison, et paradoxalement, c’est celui où je me sentais le mieux. Il y avait une troisième, voire une deuxième place à jouer, mais je n’ai pas pu me battre avec les autres filles, c’est ce qui m’énerve le plus. Je suis très, très déçue du résultat final. » La jeune Lorraine aura le temps de peaufiner les réglages avec ses nouvelles perches dans les mois à venir dans son cocon clermontois, pour refleurir au printemps avec plus de vigueur.

Sa camarade Céline Distel-Bonnet n’avait pas non plus le cœur à rire dimanche matin. Eliminée en demi-finales du 60 m malgré un nouveau chrono très convaincant de 7’’26, l’Alsacienne en avait gros sur le cœur. « C’est une grosse déception. Pourtant, je suis plutôt pas mal sortie des blocs, et je me suis bagarrée. Je suis tombée dans une course très relevée, mais c’est le jeu. Les autres ont été meilleures que moi, et leurs chronos sont très bons », soufflait-elle. Sous les yeux de ses parents et de son mari, elle entendait bien réaliser « la meilleure course de ma vie. Malheureusement, ça ne passe pas. » Pour elle comme pour les autres, les autres occasions de briller ne manqueront pas en cette année 2015 qui ne fait que commencer. Et de bonne manière.

A Prague, Etienne Nappey pour athle.fr

Résumé du Samedi 7 Mars Lavillenie à l’infini

Renaud Lavillenie a conquis un quatrième titre consécutif aux championnats d’Europe, et ajouté une ligne à son immense palmarès, avant de faire une tentative plus que convaincante contre son propre record du monde. Invaincu en compétition continentale, le perchiste clermontois a amélioré le record des championnats en franchissant 6,04 m. Les autres Bleus, à l'image d'Eloyse Lesueur, cinquième de la finale de la longueur, ou Marie Gayot, à la même place sur 400 m, ont manqué de réussite.

Le temps fort En plus d’être un perchiste hors du commun, Renaud Lavillenie est un amateur de chiffres, et demande souvent des hauteurs de barre en fonction des statistiques ou de superstitions chiffrées. En voici donc quelques uns pour illustrer sa performance du jour :

6,04 m La hauteur franchie par Renaud Lavillenie, ce qui constitue un nouveau record des championnats, un centimètre plus haut que celle qui lui avait permis d’être champion d'Europe à domicile à Paris-Bercy en 2011. Le tout sous les yeux de ses parents, en tribunes.

6,17 m Une nouvelle fois, Renaud a tenté d’améliorer son propre record du monde, en demandant une barre à 6,17 m. « Après, il y a tenter et tenter. Le faire si on sait qu’on ne passera pas, ça ne sert à rien. Sur mon deuxième essai, mon bassin était bien plus haut que la barre, et c’est agréable de voir que je suis en mesure d’aller toujours plus haut, même si le record du monde n’était pas l’objectif prioritaire de l’hiver. »

13,6 L’indice de flexion le plus élevé des perches utilisées par Renaud ce samedi. Après le concours, il a confié être en attente de livraison de perches plus dures. « Il faut toujours avoir avec soi une perche qu’on pense trop dure à utiliser, au cas où. On ne sait jamais ! »

14 Le nombre de sauts à six mètres ou plus, en douze concours, accomplis par Renaud Lavillenie, depuis sa première barre (6,01 m), franchie à Leiria en 2009. Soit autant que Maxim Tarasov et Radion Gatauline réunis, au détour des années 80 et 90. C’est le deuxième total le plus élevé de l’histoire, après celui du Tsar Sergei Bubka (47 !)

4 Le nombre de titres de champion d’Europe en salle consécutifs. C’est une grande première à la perche. Le record absolu est détenu par le spécialiste soviétique du 60 m, Valeri Borzov, qui s’est imposé sept fois dans les années 70.

0 Le nombre de défaite du Clermontois cet hiver, en huit concours. C’est également le nombre de défaites enregistrées par Renaud en championnats d’Europe, indoor et plein air confondus du natif de Barbézieux Saint-Hilaire. En sept participations, il a toujours remporté l’or depuis la première fois à Turin en mars 2009.

5 Le nombre de fois où il a franchi six mètres (ou plus) cette saison. « Cette régularité est très importante. C’est la première fois de ma carrière que je réussis à franchir 6 m cinq fois dans une même saison, et Bubka ne l’a pas fait souvent non plus. Je sais que si je veux être champion du monde à Pékin, ce ne sera pas en faisant un « one shot », mais en étant très régulier sur des barres très élevées.

1 La place occupée par l’équipe de France au tableau des médailles ce samedi soir, après le sacre de Renaud et le fabuleux triplé des hurdleurs vendredi.

La perf En 45’’33, le Tchèque Pavel Maslak a conservé son titre du 400 m, accrochant au passage le record des championnats à son tableau de chasse. Il a surtout fait lever toute la salle pour applaudir la première médaille d’or de la République Tchèque lors de ces championnats.

Les promesses Les sprinteurs ont bien fait de se lever tôt, samedi matin. Lors des séries du 60 m, Céline Distel-Bonnet s’est offert un nouveau record personnel en 7’’25, assorti d’une qualification pour les demi-finales, programmées dimanche après-midi. Et dire que l’Alsacienne n’avait « pas de bonnes sensations, peut-être parce que c’était le matin. Cela devrait aller mieux en demies ».

Tout aussi bien réveillé, Emmanuel Biron a amélioré son meilleur chrono de la saison sur la même distance, en coupant la ligne en 6’’63. Auteur d’un départ canon, il pense pourvoir aller encore plus vite lors du prochain tour, et se frayer un chemin jusqu’à la finale.

Les coups durs En dehors de la perche, la journée a été globalement difficile pour le clan tricolore. L’illustration parfaite est sans doute la mésaventure connue par Marie Gayot lors de la finale du 400 m. Une course qu’elle a maîtrisée pendant 390 m, derrière l’intouchable Ukrainienne (51’’96). Mais à dix mètres de la ligne, l’élève de Laurent Hernu s’est fait marcher sur le pied et a perdu l’équilibre. Le temps de se rattraper, la médaille s’était envolée. « Je commençais à devenir lactique, je le reconnais, mais sans ça, je pense que le podium était tout à fait jouable. C’est frustrant, parce que ce n’est pas lié à mes jambes ou ma tête, mais à un élément extérieur », glissait-elle en zone d’interview. Tout en refusant de verser dans la sinistrose. « Ce sont les aléas de la salle, point barre. J’ai joué et ça n’est pas passé. C’est tout de même encourageant pour la suite, et cet été, quand nous aurons chacune notre couloir… »

Double championne d’Europe en plein air, Eloyse Lesueur nourrissait en arrivant à Prague l’ambition de se parer de sa première couronne hivernale. Mais elle a vite compris que les choses seraient compliquées. La faute à sa nouvelle technique en double ciseau, adoptée il y a quelques mois seulement, et à la Serbe Ivana Spanovic, retombée à 6,98 m pendant qu’Eloyse mordait ses trois premières tentatives. « Physiquement, j'étais vraiment bien, mais je sentais que ma technique n'était pas assez acquise. Cela suffit pour un saut à 6,73 m, mais pour aller chercher des filles au-delà de 6,90 m, il faut être vraiment au point. » Elle se contentera donc d’une cinquième place, avant d’attaquer l’été avec une envie décuplée. Reste à savoir comment elle bondira lors des concours en plein air. « Nous allons avoir un débriefing, au calme, avec Renaud (Longuèvre), et envisager ce qui est possible. Rien n’est arrêté ni enterré. Je n’ai pas de regrets d’avoir essayé le double ciseau, il fallait aller au bout de cette logique aujourd’hui. »

La déveine avait commencé dès les séries du 1500 m, où était engagé le champion d’Europe du 3000 m steeple, Yoann Kowal. Troisième de sa course, alors que seuls les deux premiers passaient en finale, le Périgourdin ne s’est pas caché au moment d’expliquer sa contre- performance. « J’ai vingt-huit ans et trente sélections, et je suis toujours nul dans la gestion d’un 1500 m. Je n’ai jamais pu me replacer correctement, j’ai fait n’importe quoi ! », reconnaissait-il, lucide.

Les spécialistes du 800 m, qui disputaient cet après-midi les demi-finales, ont connu le même sort, malgré des scénarii différents. Rénelle Lamote (quatrième en 2’09’’06) s’est retrouvé piégée par l’expérience de ses concurrentes lors d’une course tactique où elle a « peut-être manqué de culot. J’avais pourtant les jambes pour passer en finale. Je suis énervée contre moi-même », confiait-elle après coup.

Quelques minutes plus tard, Brice Leroy a pris les choses en main en se retrouvant en tête au rabas. Une position qu’il a conservé jusqu’à l’emballage final, avant de coincer dans les derniers mètres, finissant troisième en 1’50’’72. « Je n’aurais peut-être pas dû mettre la sacoche à 200 m de la ligne, et en garder en attendant qu’on m’attaque », soufflait-il, « complètement mort ». Avant de reconnaître qu’il avait bien progressé depuis sa défaite en séries lors des championnats d’Europe en salle de Bercy en 2011. Paul Renaudie a, lui, connu le jour sans, « le moteur vide ». Jamais dans le coup pour prétendre à un ticket pour dimanche, il a pris la cinquième place de sa demie en 1’53’’14. Même scénario pour la dernière course de la journée, le 3 000 m masculin, lors duquel Florian Carvalho n’a pu suivre le rythme implacable du Turc Ali Kaya, qui a écrasé la course de sa classe. « Je n’avais pas les jambes pour suivre. J’étais venu avec d’autres ambitions, mais il y avait plus fort que moi aujourd’hui, alors je vais retourner au travail, tout simplement. »

Et aussi Pendant que Renaud Lavillenie partait à la conquête des cîmes, son frère Valentin bataillait pour l’accompagner sur le podium. S’il n’a finalement pas réussi à monter sur la boîte, il a tout de même joué sa chance à fond. « Il manque de peu 5,75 m et termine sixième. Lors de son premier championnat international, aux Mondiaux de Moscou, il s’était qualifié en finale, mais n’y avait passé aucune barre. Il est jeune et a encore du travail à fournir, mais les progrès sont là », soulignait son coach, Philippe D’Encausse. Jeanine Assani-Issouf a pris la quinzième place des qualifications du triple saut. « Très déçue », de son concours « le moins bon de ma saison », elle regrettait de n’avoir « jamais réussi à rentrer dans la compétition ». Comme pour Rénelle Lamote, l’expérience s’acquiert parfois dans la douleur.

Enfin, les deux combinards engagés à l’heptathlon sont parfaitement dans le coup au classement provisoire, au soir de la première journée, après avoir tous les deux égalé leur record personnel à la hauteur en franchissant 2,01 m. Bastien Auzeil, qui a également amélioré sa meilleure marque sur 60 m (7’’08) dormira ce samedi à la sixième place avec 3284 points. Avec seulement une unité de moins, Gaël Quérin est septième d’un heptathlon dominé pour l’instant par le Russe Ilya Shkurenyov avec 3512 points.

Résumé du Vendredi 6 Mars Et un, et deux, et trois héros

Les hurdleurs français ont donné une véritable leçon à leurs adversaires sur 60 m haies, pour offrir à la France le tout premier triplé de son histoire en grands championnats. Le miraculé Pascal Martinot-Lagarde (7’’49) a devancé d’un centième Dimitri Bascou, et Wilhem Belocian a battu son record personnel (7’’52) pour prendre la médaille de bronze. Ce final en apothéose a conclu une bonne journée pour l’ensemble des Bleus engagés en qualifications, qui a également vu Antoinette Nana Djimou prendre la cinquième place du pentathlon.

Le Temps Fort « On va tous monter sur la première marche et kiffer la Marseillaise ensemble, parce que de toutes façons, le podium nous appartient. » La formule, signée du nouveau champion d’Europe du 60 m haies, Pascal Martinot-Lagarde, résume parfaitement l’ambiance qui régnait en zone d’interviews après la finale, soldée par un triplé français aussi incroyable qu’inédit. La zone mixte, avec les trois hurdleurs, leurs coaches, un Mehdi Baala en larmes, les membres de l’encadrement et tous les médias français, avait des airs d’ambassade de France un jour de 14 juillet. Certains suiveurs de l’équipe de France en rêvait tout haut, encore plus après les demi-finales, mais personne n’osait vraiment y croire. « J’en avais plus que rêvé, mais ça me paraissait difficilement réalisable », confiait Ghani Yalouz, DTN aux anges. Pourtant, PML (7’’49), Dimitri Bascou (7’’50) et Wilhem Belocian l’ont fait !

La principale inconnue résidait dans l’ischio-jambiers du nouveau champion d’Europe. « Ce titre est magnifique et inespéré pour moi. Il y a quelques semaines, j’étais pété ! J’ai pris la décision de venir à Prague il y a dix jours. Je n’avais pas eu l’odeur de la compétition depuis un long moment, j’étais en manque. Cette blessure m’a peut-être aidé à être plus concentré. En claquant un chrono à moins de 7’’60 en séries, je savais que j’étais en forme. Je me suis arraché la gu***, et le centième qui m’avait manqué aux Mondiaux de Sopot l’an passé m’a souri aujourd’hui », racontait PML, radieux de bonheur et partageur dans sa joie. Auteur d’un nouveau record personnel en 7’’46 lors des demi-finales, Dimitri Bascou, meilleur performeur européen de l’hiver, s’est fait coiffer au poteau. Pas de quoi entamer son bonheur de ramener une première breloque à la maison, quelques mois après sa déconvenue de Zurich. « Ce sont des choses qui arrivent, j’ai fait deux ou trois fautes dans cette course-là. C’est aussi cela notre discipline. Mais ça reste une médaille, je ne crache pas dessus. C’est surtout encore une leçon et de l’expérience pour la suite. J’ai été présent dans cette finale, lors de laquelle je réalise mon troisième chrono de l’hiver. C’est positif ! »

Venu pour « apprendre et gagner en expérience », Wilhem Belocian a, une nouvelle fois, montré qu’il était un élève surdoué. Le champion du monde juniors a battu son record en finale, comme d’habitude, et montré que la maîtrise des haies en France est intergénérationnelle. Avec son parlé tout en mesure, Wilhem a commencé par qualifier sa performance de « plutôt satisfaisante », avant de se mêler à l’euphorie ambiante. « Super content », il va pouvoir « rentrer avec le sourire » en Guadeloupe. Le voyage était initialement prévu après les championnats de France, avant qu’il ne convainque ses coaches de l’intérêt d’une excursion en République Tchèque. La suite lui a donné raison. Ce triplé est également « un message envoyé au monde, soulignait Pascal Martinot-Lagarde. Maintenant, les autres athlètes savent qu’il va falloir compter avec nous. Je suis un grand rêveur, et je suis sûr que l’on peut réitérer ce genre d’exploits ! » Grand rêveur, PML nous a confié qu’avec le statut d’outsider qui était le sien en arrivant à Prague, il avait pour la première fois bien dormi avant un grand championnat. Avec la fête qui s’annonce, pas sûr qu’il en fasse de même ce vendredi soir…

Le Chiffre 5000

Le pentathlon féminin, annoncé comme l’une des épreuves les plus passionnantes et les plus ouvertes de ces championnats, a finalement tourné au récital. La tenante du titre, Antoinette Nana Djimou a, comme les autres, assisté impuissante à la démonstration implacable de l’Anglaise Katarina Johnson-Thompson. « KJT » (prononcez KayJiTi) s’est littéralement baladée, remportant quatre épreuves sur cinq, compilant l’excellent total de 5000 points tout ronds, malgré un concours de poids faiblard (12,32 m), devenant la deuxième femme de l’histoire à franchir cette barrière symbolique. Passée à treize points seulement du record du monde de Natalya Dobrinska, la Liverpuldienne confiait devant les micros être à la fois « dévastée de passer si près, et super heureuse ».

Derrière, la bataille pour les médailles a été palpitante. Nadine Broersen y a laissé sa santé, lors du concours de la hauteur. Antoinette Nana Djimou a, elle, été dans le coup presque jusqu’au bout. A l’aube du 800 m, dernière des cinq épreuves, la Montreuilloise ne comptait que 21 points de retard sur la Tchèque Eliska Klucinova. Portée par la foule, celle-ci n’a pas failli, tandis que « Nana », s’est retrouvée piégée. « Je suis déçue, parce que je pensais faire quelque chose au 800 m, mais les filles m’ont complètement faussée. Je pensais que celles qui étaient devant moi allaient vite, et en fait non. Elles sont passées en 1’06 et moi en 1’10, cela a plombé ma course. ça se joue aussi dès la première épreuve, le 60 m haies. Au poids, ça n’était pas ce que j’attendais non plus. Peut-être que je n’étais pas assez prête pour la suite ? », s’interrogeait-elle.

Mais Antoinette n’était pas non plus abattue (d’ailleurs, l’avez-vous déjà vu faire la tête plus de dix secondes ?), et prenait sa première défaite en championnats d’Europe depuis 2011 comme un signal encourageant. « Cela doit vouloir dire qu’il faut que je retourne travailler pour retrouver mon meilleur niveau. En fait, je suis presque contente qu’on m’ait giflée. C’est bizarre, non ? » Peut-être, oui. Mais c’est surtout le signe qu’elle répondra présente dès cet été.

Les Promesses

Des trois engagés français sur 800 m, les trois ont passé le cut des séries. Rénelle Lamote, la première en action, a choisi l’option risquée de prendre le train à son compte. Bien lui en a pris puisqu’elle a tenu jusqu’au bout, passant même tout près de son record personnel (2’01’’97) en 2’02’’10. « Je savais que j’allais perdre des plumes, mais je voulais assurer le coup, pour que ça passe au moins au temps si ça ne passait pas à la place », glissait l’élève de Thierry Choffin à l’issue de sa course. Son objectif « atteint », elle aura samedi l’opportunité de s’offrir une place en finale. Reste à trouver la bonne stratégie.

Les hommes avaient opté pour une tactique plus prudente. « Philippe Dupont nous avait demandé de rester au contact des deux qualifiés potentiels par la place, et d’essayer de se glisser dedans », résumait Paul Renaudie. Le Bordelais a parfaitement réalisé son contrat en prenant la deuxième place de sa course en 1’49’’61. Brice Leroy sera également au rendez- vous des demi-finales, samedi. Mais il a dû attendre le verdict des qualifications au temps, après s’être classé troisième de sa série en 1’49’’09. Bousculé à cent mètres de la ligne après avoir produit son effort à l’amorce du dernier tour, le Martégal accompagnera son camarade au tour suivant.

Le Coup Dur Médaillé en plein air à Zurich, Kevin Menaldo ne récidivera pas cet hiver. Grippé depuis jeudi, le perchiste de l’EFCVO n’avait pas assez récupéré pour passer les qualifications de la perche. « J’ai compris dès l’échauffement que je n’avais pas les jambes, et on en peut pas lutter contre son corps », analysait-il. Dans l’incapacité de franchir 5,45 m, il a regardé de loin les frères Lavillenie se faire quelques frayeurs eux aussi. Renaud, le recordman du monde, a eu recours à un troisième essai pour passer 5,70 m, sa barre d’entrée dans le concours. « J’étais sans doute trop en forme, et j’ai utilisé une perche trop souple. C’est pourtant celle avec laquelle j’avais déjà passé six mètres à Rouen. Même sur le troisième essai, j’ai dû beaucoup travailler pour ne pas faire tomber la barre. » La catastrophe a donc été évitée de justesse, mais l’essentiel est fait. Le Clermontois sera accompagné en finale par son frère Valentin, huitième ex-aequo du concours de qualif’ grâce à un sans-faute jusqu’à 5,60 m.

A son arrivée en zone mixte, Floria Gueï avait le sourire, et la certitude d’avoir fait le boulot. S’en est suivi l’un des moments les plus gênants dans la carrière d’un journaliste : devoir annoncer à une athlète que la réalité est tout autre. Incrédule, Floria s’est alors faufilée entre les reporters de tous les pays jusqu’au moniteur où était affichés les résultats officiels. Elle l’a longuement regardé, avant de réaliser, hébétée, qu’elle n’avait pris que la quatrième place de sa série, et qu’elle en serait donc pas en finale du 400 m samedi. « J’étais pourtant sûre d’être devant l’Anglaise. Je tombe des nues, c’est horrible. » Excentrée au couloir trois pour dépasser ses concurrentes, la Lyonnaise n’a pas vu le cassé rageur d’Iveta Putalova et de Seren Bundy-Davies à sa gauche, qui la privent d’une place en finale. Elle y aurait rejoint sa compatriote Marie Gayot. La Rémoise a parfaitement géré sa demie, ne quittant pas la foulée de la lièvre de luxe qu’était l’Ukrainienne Natalya Pyhyda, pour prendre la deuxième place en 52’’53.

Et Aussi

Le scénario du concours de perche féminin a été similaire à celui des hommes pour Marion Fiack, qui a elle aussi échappé de peu à la sortie de piste prématurée. Parfaite jusqu’alors, la Thionvilloise n’a franchi 4,55 m à son dernier essai. Neuvième à ce moment-là, ce sursaut lui a permis de retrouver de l’allant pour franchir la hauteur suivante, qualificative pour la finale, du premier coup. « J’ai eu un peu de mal à régler tous les paramètres, mais tout est rentré dans l’ordre et je vais disputer ma première finale internationale. Je suis au niveau des meilleures, et je vais pouvoir utiliser mes nouvelles perches, longues de 4,40 m. J’ai hâte ! », souriait-elle.

Les qualifications, ce n'est jamais vraiment la tasse de thé d’Eloyse Lesueur. En quête d’un premier titre européen en indoor, la double tenante du titre en extérieur a eu la bonne idée de se simplifier la tâche ce vendredi. « A mon premier essai, j'ai mis beaucoup d'engagement sur mes premières foulées, et ma consigne est d'éviter les premiers essais mordus, alors quand je me suis rendue compte que j'étais vraiment trop près, je me suis débrouillée pour mettre le pied où il faut. » Retombée à 6,59 m, Lesueur n’a pas eu besoin de puiser plus avant dans ses réserves pour rallier la finale, où les six essais garantis devraient lui permettre d’exprimer au mieux le potentiel de sa nouvelle technique en double ciseau.

Enfin, Florian Carvalho a complété le bon bilan d’ensemble des Bleus pour cette première journée, en se qualifiant au temps pour la finale du 3000 m. Bien que s’étant élancé sans savoir à quel niveau chronométrique il devait courir pour décrocher son ticket, il a tenu la foulée de ses adversaires, ne craquant qu’au finish. Comptant sur sa grosse caisse pour enchaîner un deuxième 3000 m à 24 h d’intervalle, il compte bien « faire mieux qu’une cinquième place en séries ». La journée de vendredi l’a prouvé : les Bleus peuvent rêver.

Résumé du Jeudi 5 Mars Les Bleus sont prêts

Les vingt-sept athlètes composant l’équipe de France d’athlétisme sont bien arrivés à Prague, bien disposés à vendre chèrement leur peau lors des championnats d’Europe en salle. Ils essaieront de faire aussi bien qu’à Göteborg, il y a deux ans, où ils avaient récolté neuf breloques, dont deux d’or. Les premières épreuves, disputées en lever de rideau de la cérémonie d’ouverture, n’ont guère souri aux trois Tricolores engagés.

Le Temps Fort Après un voyage paisible, au cours duquel le pilote de l’avion qui amenait les Bleus dans capitale tchèque leur a souhaité « bonne chance pour les championnats d’Europe de perche », la délégation française a pris ses quartiers d’hiver à Prague. Logés dans le même hôtel que presque toutes les équipes du continent, à quelques minutes de l’02 Arena, outil habituel du club de hockey du Slavia Prague, et qui peut accueillir jusqu’à 18 000 spectateurs, les Français ne peuvent pas échapper au regard de leurs concurrents du week-end. Cela tombe bien, « tous sont prêts et sont venus pour chercher la confrontation, résume Ghani Yalouz. C’est une équipe très hétérogène, avec des jeunes, des plus anciens avec un gros palmarès. Ce n’est peut-être pas la grosse équipe de France, mais elle aura du cœur, et elle est composée de champions qui ne sous-estiment pas la valeur de ces championnats d’Europe. Nous sommes sur la route de Pékin et Rio, et rien ne remplace la compétition pour préparer la compétition », assure le directeur technique national.

Le Chiffre 95

C’est la largeur maximale des couloirs de la piste rouge (et non bleue clair, comme a cru la voir Marion Fiack lors du warm up ce jeudi matin, toute ressemblance avec l’affaire de la robe bleu ou blanche vendue par Roman Originals serait purement fortuite), mesurée par Eric Jaffrelot, le délégué technique de la FFA sur la compétition. « Habituellement en France, les couloirs sont larges d’un mètre. Là, ils font entre 90 et 95 cm », précise-t-il.

Par ailleurs, les virages paraissent moins relevés qu’à Eaubonne ou Aubière, par exemple, vus depuis les tribunes. Peut-être une illusion d’optique, mais « la pente en sortie de virage est plus douce que d’habitude », confirme Eric Jaffrelot. Cela ne devrait pas gêner les spécialistes du 400 m, Marie Gayot et Floria Gueï. « La principale difficulté sera plutôt le rabat. La ligne est plus avancée que d’habitude », a remarqué le manager des relais, Djamel Boudebibah.

Les Promesses Comme beaucoup d’autres, les quatre perchistes de l’équipe de France, Valentin et Renaud Lavillenie, Kevin Menaldo et Marion Fiack, sont venus repérer les lieux lors du warm up officiel, ce jeudi matin. Ils ont beaucoup plu à la nouvelle recordwoman de France. « J’adore ! C’est une piste qui sonne creux, mais elle rebondit bien. On a le pied actif au sol, et cela permet d’aller vite, sans rien faire ou presque. Elle sera peut-être un peu plus difficile à gérer en cas de fatigue, mais elle est propice à la performance », salive la Lorraine.

Renaud Lavillenie, invaincu en salle depuis trois ans, est loin d’avoir l’appétit rassasié, et entend bien « faire grandir ma collection de médailles. Je ne m’entraîne pas pour m’entraîner. J’aime la compétition et je ne veux rien laisser à mes adversaires. » Les qualifications de la perche masculine débutent vendredi matin à 10h15.

Les Coups Durs Trois Français étaient engagés ce jeudi soir en ouverture du programme. Le moins que l’on puisse écrire est que cela n’a pas souri aux Tricolores, qui ne verront pas les finales de leur épreuve respective. Premier à entrer en lice, Kafétien Gomis n’a pas réussi à dompter le rebondissant tartan pragois au saut en longueur. « Ma foulée, allongée par la piste, m'attirait vers la planche, sans que je puisse modifier ça, ce qui donne deux essais mordus. Au troisième, j'ai essayé de m'adapter, mais il me manque de la vitesse en sortie de planche, ce qui est habituellement ma force. »

Meilleur performeur des engagés, le Nordiste ne cachait pas sa déception de terminer quatorzième des qualifications, avec 7,65 m. « Être en tête des bilans ne garantit rien, je le savais bien. Je suis déçu car ma saison hivernale avait été bonne jusque-là », confiait-il en zone d’interviews.

Assurant qu’il ne s’était pas mis plus de pression qu’à l’accoutumée, l’élève de Renaud Longuèvre préfère prendre la chose avec le recul propre à l’athlète expérimenté qu’il est. « A force de dire que je suis spécialiste du dernier essai, il fallait que cela tombe un jour. Je suis tombé aujourd'hui, mais j'ai encore ma tête. Je vais retourner dans l'ombre, c'est là que je suis le plus à l'aise, et j'essaierai de surprendre à nouveau cet été. »

Dans la foulée, les lanceurs de poids n’ont pas fait mieux que le Saint-Quentinois de naissance. Gaëtan Bucki, onzième malgré un premier essai encourageant à 19,73 m, et Tumataï Dauphin (21e avec 18,95 m) ne prendront pas part non plus à la grande explication finale de demain. Eux aussi affichaient la mine des mauvais jours sur le chemin de la douche. Sans pour autant se chercher des excuses, telle que la longueur du concours (33 engagés sur le même concours, soit un jet tous les trois quarts d’heure environ).

« Je suis carrément déçu. Ce qui me fait ch***, c'est que ce concours est à l'image de ma saison : il y a plein de bonnes choses, mais il n'y a rien qui passe. Après le premier essai, je me suis dit que je n'avais pas osé, et qu'il fallait lâcher les chevaux. Au deuxième essai, je me retrouve dos à l’aire de lancer après mon changement de pied. Je ne sais pas comment c’est possible. En fait, j'ai refusé de lancer. C'est dommage, voilà », soufflait Gaëtan Bucki.

« Ce n'est pas de rater la finale qui me déçoit, c'est de passer à côté de mon concours, tout seul, pestait Tumataï Dauphin. Je n'ai aucune excuse, j'ai été nul, et je le reconnais. Le plus frustrant, c'est de ne pas être régulier dans la haute performance technique. Là, j'étais au plus bas à ce niveau-là. Le seul point positif, c'est que je prends de l'expérience. Je n’avais pas peur des mecs en face, je suis aussi fort qu’eux. Mais j’ai besoin d’apprendre », raisonnait le natif de Papeete. Ce jeudi soir, le Polynésien a appris, beaucoup. C’est aussi à cela que servent ces championnats.