Secrétariat général ISSN 1025-742X de la Communauté du Pacifique

Numéro 35 – Juin 2015 LA BÊCHE-DE-MER bulletin d’information

Sommaire Éditorial

Stratégie de gestion spatialisée e des holothuries au Vanuatu et en La 35 édition de La Bêche-de-mer rassemble huit articles originaux, tous très enri- Nouvelle-Calédonie chissants, des informations sur les ateliers et les réunions organisés en 2014 et M. Leopold et al. p. 3 dresse la liste des conférences qui se tiendront en 2015.

Les holothuries (Echinodermata: En ouverture, Marc Léopold présente une stratégie de gestion spatialisée au Holothuroidea) du parc naturel des Vanuatu et en Nouvelle-Calédonie. Cette étude nous livre des conclusions intéres- récifs de Tubbataha (Philippines) santes sur le type d’approche à développer pour permettre la régénération des res- R.G. Dolorosa p. 10 sources d’holothuries et une meilleure gestion des petites pêcheries y afférentes. Recensement des espèces d’holothuries pêchées et transformées en Indonésie Pour sa part, Roger G. Dolorosa étudie la richesse spécifique, la taille et la densité A. Setyastuti et P. Purwati p. 19 des holothuries du parc naturel des récifs de Tubbataha (Philippines). Ces don- nées complètent le suivi national des populations en milieu naturel. Observations in situ d’holothuries dans le nord de l’atoll de Baa (Îles Maldives) Ana Setyastuti et Pradina Purwati établissent ensuite la liste exhaustive de toutes F. Ducarme p. 26 les espèces d’holothuries qui ont été, ou sont encore, pêchées en Indonésie à des fins Induction de la ponte et élevage commerciales en vue de la production de trepang. Cette étude a permis de recenser larvaire chez l’holothurie Holothuria au total 54 espèces, y compris 33 dont on a pu confirmer le statut taxonomique. scabra en Malaisie N. Mazlan et R. Hashim p. 32 Dans son article, Frédéric Ducarme décrit les conclusions d’une étude menée pendant Incidence de l’utilisation de deux mois sur les récifs coralliens au nord de l’atoll Baa (Maldives) en 2014. Cet inven- pouponnières et du poids des taire porte à environ 24 le nombre d’espèces d’holothuries recensées aux Maldives. juvéniles d’Holothuria scabra relâchés sur leur survie et leur croissance Nurzafirah Mazlan et Ridzwan Hashim présentent le premier rapport sur l’in- T. Lavitra et al. p. 37 duction de la ponte et l’élevage larvaire d’Holothuria scabra en Malaisie. Les trois pontes réussies ont permis d’obtenir un taux de survie de l’ordre de 4,2 %. Évaluation de référence de la biomasse vierge des stocks d’holothuries des îles d’Old Providence et de Santa Catalina, Thierry Lavitra et ses coauteurs ont analysé l’incidence du poids des juvéniles dans l’ouest des Caraïbes ensemencés dans des pouponnières et dans des enclos ouverts en mer, à Mada- H. Koike, P. Usseglio et F. Ramos p. 42 gascar. Cette expérience a montré qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser des poupon- nières sur les sites d’élevage présentant une faible densité de prédateurs et que les Nouvelles avancées sur la reproduction spontanée en captivité et les conditions juvéniles de moins de 5 g peuvent être ensemencés sur ces sites. d’élevage des holothuries de la Caraïbe Stichopus sp. Haruko Koike et ses collègues font état des résultats d’une étude de référence V. Agudelo et A. Rodríguez p. 50 indépendante sur les pêcheries, réalisée en 2014 autour des îles d’Old Providence et de Santa Catalina (Colombie). La taille totale de la population a été jugée trop faible pour que l’exploitation de cette pêcherie soit viable.

Éditeur Dans leur article, Vianys Agudelo et Adriana Rodríguez présentent les conditions Igor Eeckhaut Biologie des organismes marins et de manipulation, la qualité de l’eau et les limites associées à la reproduction spon- biomimétisme tanée de Stichopus sp. des Caraïbes (Colombie) et décrivent également son élevage 6, Av. Champ de Mars larvaire. Université de Mons 7000 Mons Belgique Courriel : [email protected] Chantal Conand rend compte des marchés de trepang moins connus, notamment Production ceux de Pyongyang (République populaire démocratique de Corée), de Pusan Section information halieutique (République de Corée) et de San Francisco. Choo Poh Sze et Chantal Conand font CPS, BP D5, 98848 Nouméa Cedex Nouvelle-Calédonie également état des produits d’holothuries présentés au dernier Salon chinois des Fax : +687 263818 produits de la mer. Courriel : [email protected] www.spc.int/coastfish Imprimé avec le concours financier de l’Australie, la France et la Nouvelle-Zélande 2 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

L’année 2014 a été riche en ateliers et réunions sur le sujet des holothuries. Les marchés de la bêche-de-mer Ce numéro récapitule les exposés et discussions qui ont ponctué l’année et moins connus dresse la liste des conférences qui se tiendront en 2015. Le lecteur y trouvera C. Conand p. 58 également des adresses de sites Internet contenant des films sur les holothu- Les holothuries au Salon chinois de la ries ainsi que des informations et des observations d’ordre général sur les pêche et des produits de la mer 2014 holothuries juvéniles. C. Poh Sze et C. Conand p. 60

Observations p. 64 Bonne lecture !

Communications p. 66 Nous souhaitons également féliciter François Michonneau qui a soutenu avec succès sa thèse de doctorat intitulée « limit and diversity in sea Résumés cucumber » à l’University of Florida. et nouvelles publications p. 68 Igor Eeckhaut

Le SIRMIP est un projet entrepris conjointement par à la portée des utilisateurs de la région, afin d’aider à 4 organisations internationales qui s’occupent de la rationaliser la mise en valeur et la gestion. Parmi les mise en valeur des ressources halieutiques et marines activités entreprises dans le cadre du SIRMIP, citons en Océanie. Sa mise en oeuvre est assurée par le la collecte, le catalogage et l’archivage des documemts Secrétariat général de la Communauté du Pacifique techniques, spécialement des documents à usage (CPS), l’Agence des pêches du Forum des îles du interne non publiés ; l’évaluation, la remise en forme et Pacifique (FFA), l’Université du Pacifique Sud et le la diffusion d’information, la réalisation de recherches Programme régional océanien de l’environnement documentaires, un service de questions-réponses et (PROE). Ce bulletin est produit par la CPS dans le de soutien bibliographique, et l’aide à l’élaboration de cadre de ses engagements envers le SIRMIP. Ce projet Système d'information sur les fonds documentaires et de bases de données sur les vise à mettre l’information sur les ressources marines ressources marines des îles du Pacifique ressources marines nationales. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 3

Stratégie de gestion spatialisée des holothuries au Vanuatu et en Nouvelle-Calédonie

Marc Léopold1,2,*, Jayven Ham2, Rocky Kaku2, Sompert Gereva2, Jason Raubani2 et Zacharie Moenteapo3

Résumé

De nombreuses petites pêcheries d’holothuries ont décliné de manière alarmante à l’échelle mondiale suite à une surex- ploitation rapide et une gestion inefficace. Nous présentons ici la nouvelle stratégie de gestion commune au Vanuatu et à la Province Nord de Nouvelle-Calédonie. Cette stratégie a été définie grâce à une démarche empirique initiée en 2008, dans quinze petites pêcheries pilotes mono- et plurispécifiques de ces deux pays. Les résultats ont permis de mettre en évidence quatre principaux facteurs d’efficacité : la gestion spatialisée et la gouvernance partagée des pêcheries, la définition des totaux autorisés des captures (TACs) par espèce et par zone à partir de la biomasse des stocks, la mise en œuvre opérationnelle de la gestion spatialisée par TACs, et l’acquisition des capacités techniques et financières requises par les services gestionnaires. Chacun de ces facteurs fait l’objet d’une analyse à partir des exemples étudiés. Cette étude apporte des résultats intéressants sur le type d’approche à développer pour permettre la régénération des ressources d’holothuries et une meilleure gestion des petites pêcheries associées. Le transfert de cette expérience dans des contextes socio-politiques différents de l’Océanie pourrait être expérimenté compte tenu des résultats encourageants obtenus.

Introduction pour améliorer l’efficacité des mesures de gestion de ces petites pêcheries côtières. La forte diminution des ressources et des débarque- ments d’holothuries commerciales dans la plupart des Dans cette perspective, il est fondamental de détermi- îles du Pacifique depuis une vingtaine d’années a incité ner les échelles spatiale et temporelle, les données bio- les gouvernements à prendre des mesures d’urgence, et logiques et halieutiques, et les modes de gouvernance plus globalement, à réviser leurs modes de gestion des appropriés pour définir et mettre en œuvre des régu- pêcheries d’holothuries (Pakoa et Bertram 2013). Les lations efficaces de la pêche. Compte tenu des risques régulations conventionnelles des petites pêcheries d’ho- avérés d’effondrement des pêcheries d’holothuries et du lothuries concernent les tailles minimales de captures par manque d’informations biologiques et écologiques sur espèce pour réduire la mortalité des individus juvéniles les espèces exploitées, des stratégies de gestion prudentes et subadultes, l’interdiction de techniques destructives sont recommandées pour pouvoir régénérer le potentiel et de certains engins comme les équipements de plon- halieutique et économique. C’est dans cette direction que gée à air comprimé, les licences de pêche, de transport, s’inscrivent nos recherches sur la gestion spatialisée des de transformation et d’exportation, les quotas nationaux pêcheries d’holothuries au Vanuatu et en Nouvelle-Calé- globaux ou par espèce (FAO 2012, 2013). En Océanie donie (Léopold et al. 2013b,c ; Léopold 2014). comme dans d’autres régions tropicales, ces mesures rencontrent cependant de sérieuses difficultés pour être Ces deux pays, qui contribuent marginalement aux effectivement appliquées et respectées, d’où le recours exportations mondiales de bêche-de-mer (FAO 2008 ; ultime aux moratoires dans un nombre croissant de pays Conand et al. 2014 ; Affaires Maritimes de Nouvelle-Calé- (Purcell et al. 2013). Par ailleurs les réglementations natio- donie, com. pers.), présentent des situations différentes nales se superposent souvent à des règles d’usage locales de leurs pêcheries. Au Vanuatu, les stocks se sont effon- qui suivent une logique différente, basée sur des droits drés malgré l’instauration de tailles minimales de capture de pêche territoriaux et des restrictions coutumières. et d’un total autorisé des captures (TAC) national de 26 t La mise en réserve de certaines zones récifales apparaît exportées en 2005, après un pic de production en 1992 et ainsi comme l’une des interdictions de pêche les mieux 1994 (près de 70 t an-1 de bêche-de-mer exportées). Un acceptées socialement et les plus à même d’être en adé- moratoire national a été instauré de 2008 à 2013, pour quation avec des réglementations modernes, comme la permettre la reconstitution des ressources et le lancement gestion rotative et les ouvertures temporaires de la pêche d’un plan de gestion national quinquennal en 2015, après (Aswani 2005 ; Léopold et al. 2013a). Harmoniser ces une phase d’expérimentation en 2014 (présente commu- deux niveaux de gouvernance constitue un enjeu majeur nication). En Nouvelle-Calédonie, les exportations de

1 Institut de Recherche pour le Développement (IRD), UMR 9220 ENTROPIE - LABEX CORAIL, BP A5, 98848 Nouméa Cedex, Nouvelle-Calédonie 2 Département des pêches du Vanuatu, Private Bag 9045, Port-Vila, Vanuatu 3 Province Nord, Service milieux et ressources aquatiques, BP 41, 98860 Koné, Nouvelle-Calédonie * Auteur à contacter : [email protected] 4 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 bêche-de-mer semblent stabilisées entre 20 et 40 t an-1, proximation normale de la distribution de la biomasse en comparaison des 94 t en 2007 (Service des pêches du moyenne des holothuries en raison de la taille élevée des Vanuatu, com. pers.). Mais les services des pêches des échantillons (tableau 1). provinces ont observé une diminution des captures des espèces à forte valeur commerciale, qui les a poussés à Deux caractéristiques majeures des ressources ont ainsi réagir dès les années 2000 par la révision de la réglemen- pu être mises en évidence. D’une part, le niveau des stocks tation, notamment en province Nord où un plan de ges- dans une zone donnée variait fortement entre les espèces tion provincial est en cours de définition, pour une mise commerciales. Cette variabilité s’explique en partie par le en œuvre en 2017. potentiel écologique de la zone (géomorphologie, habi- tats marins, etc.) et l’historique de l’exploitation, les es- Le développement de programmes alternatifs d’élevage pèces à forte valeur marchande étant souvent peu abon- en enclos et en mer, réalisé en parallèle dans les deux dantes et moins abondantes que les espèces à moindre pays, ne sera pas détaillé dans cette publication (Purcell valeur (tableau 1). D’autre part, le niveau des stocks et al. 2012 ; Service des pêches du Vanuatu, com. pers.). d’une espèce donnée pouvait varier fortement entre les zones à l’échelle de l’archipel, en particulier pour les es- Nous présentons la nouvelle stratégie de gestion des pèces à faible valeur marchande (figure 1). Par exemple, pêcheries d’holothuries commune au Vanuatu et à la Pro- les stocks de Holothuria whitmaei et Holothuria atra étaient vince Nord de Nouvelle-Calédonie. Cette stratégie a été compris respectivement entre 0,0 et 3,4 t km-² (± 0,9, inter- définie grâce à une démarche empirique initiée en 2008 valle de confiance à 95 %), et entre 0,0 et 17,8 t km-² (± 2,1). dans quinze pêcheries pilotes. Nous proposons d’ana- Cette tendance a aussi été observée à l’échelle d’une lyser ici quatre facteurs d’efficacité de la démarche: 1) la même province administrative du Vanuatu, voir d’une gestion spatialisée et la gouvernance partagée des pêche- même île (figure 1 et tableau 1). Dans la Province Nord ries ; 2) la définition des TACs par espèce et par zone ; de la Nouvelle-Calédonie, des variations importantes de 3) la mise en œuvre de la gestion spatialisée par TACs ; et la biomasse de Holothuria scabra, principale espèce com- 4) l’acquisition des capacités techniques et financières par merciale, ont également été mises en évidence dans deux les services gestionnaires. Les informations utilisées et les zones distantes à peine de 40 km (figure 1, sites 15 et 16). résultats obtenus sont décrits et discutés successivement pour chacun de ces facteurs afin de clarifier comment cette démarche a été progressivement opérationnalisée sur la période 2008–2014.

Méthodes, résultats et discussion

Pour une gestion spatialisée et une gouvernance partagée des pêcheries d’holothuries

Variabilité géographique et interspécifique des ressources d’holothuries

Dans le cadre de la définition du plan de gestion national au Vanuatu, un programme d’évaluation des ressources des espèces commerciales est mis en œuvre depuis 2011. La biomasse et la structure des stocks de chaque espèce ont été estimées dans 13 zones de l’archipel (figure 1) sui- vant la méthodologie définie par Léopold et al. (2013b). Dans chaque zone, les habitats marins ont été cartogra- phiés par interprétation visuelle d’une image satellite à haute résolution (Quickbird ou WorldView2) pour constituer des strates d’échantillonnage. Lors de cam- pagnes d’évaluation, les holothuries ont été dénombrées et mesurées sur des stations (100 m x 2 m, soit 200 m²) pré-positionnées au hasard dans chaque habitat, à l’aide d’un système d’information géographique (SIG). L’effort d’échantillonnage variait de 8 à 32 stations par km² entre les zones suivant la morphologie et la diversité des habi- tats. Les évaluations ont été réalisées en apnée et à pied Figure 1. Localisation des quinze sites d’étude où une par le service des pêches avec l’appui des pêcheurs locaux évaluation de la biomasse des stocks d’holothuries a été pendant deux à quatre jours. Le poids des individus a été réalisée (à l’exception du site 14) et constituant des zones de gestion des pêcheries au Vanuatu et en Nouvelle-Calédonie estimé à partir des relations taille-poids disponibles pour (Léopold et al. 2013c pour les sites 2, 3, 6, 7, 9, 10 et 15 ; présente chaque espèce suivie (Conand 1989 ; Purcell et al. 2009 ; communication pour les autres sites). Trait pointillé noir : zones Skewes T., com. pers.). La biomasse totale par classe de ouvertes à la pêche en 2014 suivant des TACs (total autorisé de taille et les intervalles de confiance à 95 % correspondants captures) par espèce. Trait plein rouge : zones où une gestion ont été estimés par inférence statistique au prorata de la par TAC devrait être mise en place en 2015. surface des habitats et de la biomasse moyenne par m² pour chaque espèce observée, en considérant une ap- La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 5 2 Site 13 Site n = 273 15,9 km 2 Site 12 Site 5,8 km n = 186 2 n = 54 Site 11 Site 1,8 km 2 Site 10 Site n = 266 11,7 km 2 Site 9 Site n = 171 15,0 km au Vanuatu. L’intervalle de confiance à 95 % la biomasse L’intervalle au Vanuatu. 2 on observée pendant les comptages ; * : biomasse estimée inférieure on observée pendant les comptages ; * : biomasse estimée inférieure Site 8 Site n = 207 16,2 km 2 Site 7 Site n = 286 24,5 km 2 Biomasse totale du stock(t) Biomasse totale Site 6 Site n = 199 14,0 km 2 Site 5 Site n = 81 4,5 km 2 Site 4 Site n = 216 18,6 km 2 Site 3 Site n = 182 14,5 km 2 Site 2 Site n = 76 10,1 km 2 Site 1 Site 9,9 km n = 150 1520 39,6 ±11,4 -20 19,4 ±15,0 54,4 ±48,440 10,8 ±4,7 - *30 8,7 ±6,0 70,7 ±26,320 247,6 ±70,2 -40 86,8 ±21,6 - * * 15,5 ±5,2 - 23,9 ±5,4 - *25 * * - *30 -30 * * 15,6 ±4,5 *30 - * 282,4 ±33,2 - *25 - -20 5,6 ±3,6 * * * *35 - - * - * 7,6 ±4,2 - - * 28,1 ±24,735 - 1,0 ±0,6 * - * * 4,3 ±2,2 * * * - 12,5 ±6,5 *35 * - - *25 * * * - 12,6 ±7,7 7,6 ±4,7 -20 - 16,4 ±7,1 - - 3,0 ±3,330 * * * 11,5 ±7,1 - 10,4 ±8,0 * - * * 31,8 ±14,4 * - - - * 9,4 ±6,4 10,5 ±7,1 * * - 24,4 ±9,0 - * 15,1 ±8,9 18,2 ±7,5 * 14,3 ±9,1 * - * 6,4 ±3,5 * 9,0 ±4,4 * * 40,8 ±31,0 * * * 6,8 ±3,1 14,8 ±4,1 * * - 5,3 ±2,5 * - 2,3 ±1,4 * * - * - - 7,1 ±3,3 5,5 ±5,5 - * * - * * * * 11,1 ±7,2 7,8 ±6,5 - * - 9,5 ±8,8 * 6,8 ±4,5 * * * 16,0 ±9,0 13,6 ±10,4 42,9 ±30,4 40,5 ±11,1 - 10,1 ±6,7 - * * * 5,0 ±4,0 - * 7,0 ±5,0 - - - - * 1,5 ±1,4 * * - * 4,0 ±1,6 * * 10,9 ±9,0 * - 1,5 ±1,1 7,3 ±4,7 - * 55,1 ±15,6 - - - 3,0 ±1,3 - * - * * 2,0 ±2,1 10,4 ±4,0 * * 14,9 ±4,3 * - * - - - * * - * * * * - - 6,3 ±3,6 - - * - - - * - - * * * * - 20,2 ±8,9 - * - - - - - 1,4 ±1,9 - - - (cm) Taille Taille minimale de capture de capture ** 40 ------** 20 ------** 40 ------** 20 ------Biomasse des stocks (t) par espèce d’holothurie commerciale estimée à partir d’évaluations in situ conduites entre 2011 et 2014 2011 estimée à partir d’évaluations in situ conduites entre Biomasse des stocks (t) par espèce d’holothurie commerciale 1. à 1 tonne ; ** : espèce non ciblée par les évaluations. Les sites sont indiqués sur la figure estimée est indiqué, ainsi que la taille minimale légale de capture (cm). n : nombre de stations échantillonnées ; - : espèce n (cm). n : nombre estimée est indiqué, ainsi que la taille minimale légale de capture

Valeur faible Valeur Bohadschia marmorata Holothuria atra Holothuria coluber Holothuria flavomaculata Holothuria fuscopunctata graeffei Pearsonothuria Stichopus vastus Thelenota anax moyenne Valeur lecanora Actinopyga mauritiana Actinopyga miliaris Actinopyga palauensis Actinopyga Bohadschia argus Bohadschia vitiensis Stichopus chloronotus Stichopus herrmanni Stichopus horrens Thelenota ananas forte Valeur Holothuria fuscogilva Holothuria lessonni Holothuria scabra Holothuria whitmaei Holothuria edulis Espèce Tableau 1. Tableau 6 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Délimitation des zones de gestion ou systèmes socio- Les TACs correspondent à la biomasse estimée du stock écologiques locaux exploitable (c'est-à-dire composé de tous les individus ayant atteint la taille légale de capture) au moment des Ces observations biologiques réalisées sur 15 zones au évaluations. Ils sont exprimés en tonnes d’holothuries Vanuatu et en Nouvelle-Calédonie (respectivement 13 et vivantes pour éviter les incertitudes sur les facteurs de deux zones) ont conduit les autorités à percevoir la perti- conversion en poids sec. Plus précisément, c’est la limite nence d’une gestion spatialisée des pêcheries d’holothu- basse de l’intervalle de confiance à 95 % de la biomasse ries, reposant sur des règles de pêche par espèce et par estimée du stock exploitable qui sert de référence pour les zone, pour maintenir les captures à un niveau compatible TACs (Léopold et al. 2013c). De plus, les TACs sont limi- avec les capacités écologiques locales. Par ailleurs, cette tés à 20 à 30 % maximum de la biomasse totale du stock gestion spatialisée a dû être institutionnalisée par des pour prévenir les risques de surpêche dans les cas où peu textes réglementaires qui définissent les conditions de d’individus juvéniles et subadultes ont été observés pen- la pêche et clarifient les rôles et responsabilités aux dif- dant les évaluations. Globalement, les TACs représentent férents niveaux de gestion (local, provincial et national donc un volume de prises très probablement sous-estimé, au Vanuatu, local et provincial en Nouvelle-Calédonie). mais cette précaution est jugée nécessaire pendant la pé- Un régime de gouvernance partagée des pêcheries a ainsi riode de régénération des ressources et a été facilement été formalisé, qui octroie des droits de pêche collectifs acceptée par les communautés de pêcheurs en Nouvelle- exclusifs aux communautés locales et établit leur parti- Calédonie et au Vanuatu. cipation aux décisions relatives à la pêche sur leur zone (période d’ouverture, niveau des captures autorisées, Nous n’avons pas utilisé la densité moyenne d’holo- etc.). L’un des enjeux majeurs concerne en effet l’impli- thuries comme point de référence pour fixer les TACs, cation des pêcheurs et des communautés locales dans le bien que cet indicateur soit souvent recommandé pour dispositif de gestion (Léopold et al. 2013b), tout en recon- la gestion des pêcheries d’holothuries. En effet, la den- naissant la vulnérabilité des engagements informels de sité moyenne des holothuries n’a pas permis de déduire cogestion aux conflits et rivalités internes. Sur l’une des précisément les TACs dans les zones évaluées. De plus, zones de Nouvelle-Calédonie (figure 1, site 15), l’absence pour la plupart des espèces, les données biologiques d’un cadre légal avait en effet permis à une minorité de sont insuffisantes pour déterminer le seuil de densité pêcheurs de contourner les arrangements informels entre à partir duquel une ressource peut être exploitée, et ce la communauté et le service des pêches provincial par le seuil varie probablement d’une zone à l’autre. Pour ces jeu de leurs relations sociales, ce qui avait conduit à des mêmes raisons, nous n’avons pas utilisé de paramètres captures excessives à partir de fin 2011. Répondant à la biologiques hypothétiques de mortalité naturelle, de demande locale, le système de cogestion initié en 2008 croissance des individus, ou de recrutement pour défi- a alors été formalisé en novembre 2014 pour permettre nir les TACs. d’officialiser les décisions de gestion et de faire contrôler les règles de pêche collectives par les autorités publiques. Mettre en œuvre la gestion spatialisée par TAC

Chaque pêcherie constitue in fine un système socio-éco- Expérimentation en Nouvelle-Calédonie et au Vanuatu logique, dont les limites géographiques résultent d’un compromis opérationnel entre différentes considérations La gestion spatialisée par TAC par espèce est mise en parfois antagonistes : i) l’état des ressources ; ii) l’organi- œuvre depuis 2008 sur une pêcherie monospécifique de sation locale des activités de pêche, y compris d’éventuels Holothuria scabra en Nouvelle-Calédonie et depuis 2014 droits d’accès territoriaux ; iii) les limites administratives au Vanuatu (figure 1). et coutumières existantes ; et iv) la rationalisation des coûts de gestion et d’exploitation (voir ci-dessous). Au Va- D’une part, en Nouvelle-Calédonie, les effets biologiques nuatu et en Nouvelle-Calédonie, ces systèmes présentent et économiques positifs de cette approche ont été mesu- des dimensions modestes : ils s’étendent de quelques km rés à la fois sur le stock et les captures de Holothuria sca- à plusieurs dizaines de km et incluent quelques centaines bra. La biomasse totale dans la zone concernée est passée à plusieurs milliers d’habitants. Ils forment globalement de 115 ± 30 t en 2008 à 307 ± 49 t en 2012 et les captures une mosaïque de zones de gestion à gouvernance parta- annuelles cumulées de 20 t (~ 136 000 dollars É.-U.) à gée, qui pourraient à terme être au nombre d’une ving- 50 t (~ 340 000 dollars É.-U.) pour une soixantaine de taine dans chaque pays (figure 1). Le processus de déli- pêcheurs (Léopold et al. 2013b). Une diminution du stock mitation de ces zones est toujours en cours, en particulier (et donc des TACs) a ensuite été enregistrée en 2013, pour en Nouvelle-Calédonie. atteindre 152 ± 36 t en 2014. Cette baisse a coïncidé avec le fort dépassement des TACs entre 2011 et 2013, des Définir des TACs par espèce et par zone de gestion à facteurs naturels pouvant toutefois aussi être évoqués. partir de la biomasse des stocks Malgré cette tendance récente, la dynamique observée a démontré la bonne performance de la gestion par TAC L’objectif général de gestion étant de ne pas compro- de cette espèce sur la période. Cette performance a en mettre le renouvellement naturel des ressources d’holo- retour renforcé la résistance du système de gestion face thuries, la règle la plus efficace a consisté à déterminer un aux tensions sociales internes sur le respect des TACs. Par volume de captures soutenables par espèce et par zone ailleurs, les fluctuations de biomasse suggèrent que l’évo- de gestion. Ces TACs collectifs représentent une mesure lution du stock d’Holothuria scabra après le prélèvement simple à comprendre et jugée très opérationnelle par les du TAC est difficilement prévisible, même à court terme, pêcheurs et les services des pêches, tant au Vanuatu qu’en qu’il ne faut pas appliquer le TAC d’une année sur l’autre Nouvelle-Calédonie. sans évaluation préalable. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 7

D’autre part, au Vanuatu, le service des pêches a révisé de la dispersion des pêcheurs dans les zones de gestion. les tailles minimales de captures de 23 espèces d’holothu- La pêche a été ouverte dans chaque zone pendant une ries en 2014 et autorisé la pêche de 11 espèces dans sept très courte période (i.e., de un à cinq jours), compatible zones de gestion, correspondant à 35 TACs pour un total avec les capacités de contrôle des services des pêches. La de 82 t (tableau 2). Aucun TAC ne dépassait 6 t (sauf dans concentration des activités de pêche pendant une courte une zone pour Holothuria atra, 30 t), voire 1 t dans 60 % fenêtre temporelle a également favorisé le contrôle collec- des cas, témoignant du faible niveau général des stocks. tif des TACs et l’information des pêcheurs. Ces petits prélèvements autorisés visaient à expérimenter le nouveau dispositif de gestion et à procurer un revenu Cette stratégie a été complétée au Vanuatu par un sys- complémentaire aux communautés dans des zones où la tème rotatif des « pulses » de pêche. Ce système implique biomasse des ressources avait été estimée. L’impact de la que plusieurs zones ne peuvent pas être ouvertes simul- pêche pourra être évalué à partir de 2016, lors des pro- tanément à la pêche, ce qui limite de facto leur nombre à chaines évaluations de stocks des zones concernées. l’échelle d’une année, compte tenu des délais réglemen- taires d’information du public avant chaque ouverture. Stratégie pulsatoire contrôlée et rotation des zones de pêche Le dispositif permet au service des pêches de ne pas dis- perser ses ressources humaines et financières annuelles La mise en œuvre des TACs en Nouvelle-Calédonie et au mobilisables pour l’évaluation et le contrôle des TACs. Vanuatu a d’emblée posé la question du suivi des cap- tures et du respect des captures autorisées. Dans les zones Ce système rotatif n’est pas envisagé en Nouvelle-Calé- ci-dessus, les TACs se sont révélés être un moyen efficace donie dans la mesure où l’exploitation des holothuries de limitation des captures lorsqu’un agent ou un repré- n’a pas connu de moratoire qui en faciliterait la mise en sentant assermenté du service des pêches était présent œuvre. Pour des raisons pratiques, la gestion spatialisée pour contrôler les débarquements ou la première vente par TAC n’a pas pu être établie simultanément sur tout aux acheteurs intermédiaires ou aux transformateurs. le territoire maritime provincial, qui couvre des centaines Dans les cas où un contrôle in situ par l’autorité publique de km² de zones favorables à l’exploitation des holothu- n’était pas assuré, des prises irrégulières (i.e., captures ries. Elle est étendue progressivement aux différentes excédant les TACs ou ciblant des espèces interdites) ont zones de gestion identifiées (figure 1), en privilégiant les été constatées a posteriori, malgré la concertation enga- zones dont le potentiel halieutique est le plus élevé et me- gée avec les communautés locales. Ces dernières avaient nacé, ou celles dont la complexité des activités de pêche d’ailleurs approuvé, ou même sollicité, la présence d’un des holothuries est moindre (petit nombre de pêcheurs agent de suivi et de contrôle comme condition à l’ouver- ou faible diversité des espèces ciblées par exemple). Dans ture de la pêche. ces dernières, une stratégie pulsatoire pourrait ne pas être envisagée si le suivi en temps réel des captures pouvait Une stratégie de type pêche pulsatoire a ainsi été mise en être efficacement réalisé auprès des pêcheurs concernés. œuvre avec succès pour optimiser l’efficacité et les coûts Le plan de gestion provincial devrait être opérationnel en du contrôle des TACs, en raison du nombre élevé et/ou 2017 à l’échelle du territoire provincial.

Tableau 2. Total autorisé de captures (TAC) par espèce d’holothurie pour chaque site ouvert à la pêche au Vanuatu en 2014. - : espèce interdite à la pêche ; * : espèce non exploitée malgré le TAC en raison de sa faible valeur. Les sites sont indiqués sur la figure 1.

Total autorisé de captures (t) Espèce Site 2 Site 3 Site 5 Site 6 Site 7 Site 9 Site 10

Valeur faible

Holothuria atra* - 0,5 - 0,5 30,0 6,0 0,5 Holothuria edulis* - - - 0,5 0,5 - 0,5

Valeur moyenne

Actinopyga mauritiana ------1,0 Bohadschia argus - 0,5 6,0 2,0 - 1,5 1,8 Bohadschia vitiensis 0,5 1,3 - 2,5 4,0 - 0,5 Stichopus chloronotus - 0,5 - 1,0 0,5 2,0 3,5 Stichopus herrmanni - - - 0,5 6,0 - 0,5 Thelenota ananas - 0,5 - 0,5 2,0 1,3 -

Valeur forte

Holothuria fuscogilva ----0,5-- Holothuria scabra ----0,5-- Holothuria whitmaei - - - 0,5 1,0 - - 8 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Acquérir les capacités techniques et financières requises du très faible niveau des TACs. Sur le site de Nouvelle- Calédonie en revanche, l’augmentation des captures de Comme tout dispositif de gestion des pêches, la gestion Holothuria scabra entre 2008 et 2012 grâce à la reconstitu- spatialisée des pêcheries d’holothuries par TACs doit tion du stock avait permis de diminuer ce ratio de 11 % être adaptée aux moyens techniques et financiers que les à 2 %. Ces résultats montrent l’importance de rationa- pouvoirs publics et les services des pêches en particulier liser l’ouverture des pêcheries en fonction du niveau peuvent mobiliser sur le long terme, en adéquation avec des ressources, des TACs et des bénéfices économiques le cadre réglementaire local. escomptés. Afin d’améliorer la rentabilité économique de l’exploitation au Vanuatu, les zones de pêche pourraient Renforcer les capacités techniques des administrations ainsi n’être exploitées qu’une fois tous les deux à cinq des pêches ans, avec des TAC par espèce supérieurs à 2 t (alors que 71 % des TAC délivrés en 2014 étaient inférieurs à 2 t). Dans le cadre du développement des plans de gestion Au contraire, dans le site pilote de Nouvelle-Calédonie des pêcheries holothuries, les capacités des services des où la ressource en Holothuria scabra est plus abondante, la pêches de Nouvelle-Calédonie et du Vanuatu ont été pro- pêcherie est ouverte chaque année depuis 2008 un à trois gressivement renforcées en terme de méthodes d’évalua- jours par mois jusqu’à atteindre le TAC. La fréquence des tion des ressources, d’utilisation de SIG (logiciel gratuit périodes de pêche (et donc des évaluations de stock) doit QGIS), et de traitement des données biologiques collec- être réduite autant que possible selon le contexte écolo- tées. En particulier, l’outil de gestion et d’analyse des don- gique et socio-économique local. nées BDMer 2.0 (Léopold 2014) a été développé pour hé- berger les données de comptage d’holothuries et estimer Enfin, ces coûts ont été en partie internalisés en faisant semi-automatiquement les stocks et les TACs pour toutes participer les bénéficiaires au financement du dispositif. les zones de gestion et toutes les espèces commerciales. Au Vanuatu, le coût du suivi des captures in situ en 2014 Grâce à cet outil, les services des pêches ont ainsi accès a été pris en charge par trois opérateurs qui avaient ache- aux résultats des évaluations sans expertise statistique té une licence de transformation des holothuries. Le tarif ou scientifique extérieure et dans un délai de deux jours de cette licence annuelle était par ailleurs proportionnel après les évaluations biologiques. La base BDMer 2.0 est aux quantités autorisées à la transformation, à hauteur de accessible sur PC portable pour réaliser l’analyse des don- 1 dollar É.-U. par kg de poids frais, alors que cette licence nées in situ auprès des communautés (notamment dans est gratuite en Nouvelle-Calédonie. Les pêcheurs et les les zones éloignées) et sur internet (http://bdmer.ird. communautés locales ont pu de leur côté apporter une nc/) pour favoriser le partage à distance des informations aide en nature (participation aux évaluations et mise à et assurer une sauvegarde archivée des données. disposition de moyens navigants notamment). La contri- bution relative des administrations publiques a globale- Ce type d’outil est jugé indispensable à la stratégie de ment été plus élevée en Province Nord de Nouvelle-Calé- gestion adoptée. Il permet en effet aux services des donie qu’au Vanuatu, où le service des pêches dispose de pêches de mettre en œuvre en autonomie des dispositifs dotations budgétaires récurrentes moindres. de gestion plus complexes, nécessitant la collecte récur- rente de données biologiques et des traitements statis- Conclusion tiques plus sophistiqués. Cette étude apporte des exemples sur le type d’approche Optimiser les coûts de gestion et les recettes financières à développer pour permettre une meilleure gestion des ressources d’holothuries. Le suivi de ces dispositifs ex- Outre le financement des capacités techniques des ges- périmentaux au Vanuatu et en Nouvelle-Calédonie per- tionnaires, les coûts associés aux dispositifs mis en œuvre mettra à l’avenir d’évaluer si les objectifs biologiques et concernent principalement les suivis biologiques et le économiques fixés ont été atteints au niveau national contrôle des TACs. Le coût de la cartographie des zones et/ou provincial. Bien que non spécifiques aux petites de pêche préalable à la première évaluation de stock était pêcheries d’holothuries, les fortes pressions exercées par inférieur à 100 dollars É.-U. au km² (Léopold et al. 2013b l’industrie et/ou les pêcheurs locaux pour augmenter pour les sites 6, 7, 9 et 15, figure 1 ; présente communica- le niveau des TACs sont des facteurs de fragilité qu’il tion pour les autres sites (sauf site 14)). Les frais récur- conviendra de maîtriser. rents associés au suivi des stocks dépendaient ensuite de l’étendue et de l’isolement de la zone de pêche. Ils Dans la situation de surexploitation mondiale des petites oscillaient entre 120 et 500 dollars É.-U. au km². Ce coût pêcheries d’holothuries, ces résultats semblent d’ores et au km² était inversement proportionnel à l’étendue de la déjà utiles pour étendre la stratégie de cogestion spatia- zone évaluée. Enfin, les frais récurrents de suivi des cap- lisée par TAC à d’autres pays à faible capacité financière tures se situaient entre 50 à 200 dollars É.-U. au km² envi- et/ou d’expertise. La généralisation des quatre facteurs ron, en fonction du nombre de périodes de pêche autori- d’efficacité mis en évidence reste cependant à expéri- sées pour atteindre le TAC. Ces coûts étaient inférieurs menter dans des contextes socio-politiques différents de lorsque la pêche était concentrée sur une à deux périodes l’Océanie et pouvant impliquer plusieurs centaines ou d’ouverture. milliers de pêcheurs. La progression régulière des com- pétences des services des pêches et des autres services Globalement, les coûts totaux récurrents (suivi des stocks administratifs ou partenaires institutionnels en matière et des captures) atteignaient au Vanuatu près de 60 % à informatique (SIG, banques de données, traitement de 70 % de la valeur des premières ventes en 2014, en raison données, etc.) dans ces pays est un signe encourageant. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 9

Remerciements Léopold M., Beckensteiner J., Kaltavara J., Raubani J. and Caillon S. 2013a. Community-based management Cette étude a été financée par le Ministère français des of fisheries in Vanuatu: What works? Marine Pol- Affaires étrangères (Fonds Pacifique), le Gouvernement icy 42:167–176. de Nouvelle-Calédonie, la Province Nord de Nouvelle- Léopold M., Cornuet N., Andréfouët S., Moenteapo Z., Calédonie et le Gouvernement du Vanuatu (service des Duvauchelle C., Raubani J., Ham J. and Dumas P. pêches). Nous remercions les chefs, les propriétaires fon- 2013b. Comanaging small-scale sea cucumber fish- ciers coutumiers, les pêcheurs et les autres membres des eries in New Caledonia and Vanuatu using stock villages pour leur confiance et leur implication pour amé- biomass estimates to set spatial catch quotas. Envi- liorer la gestion de leurs pêcheries d’holothuries. Nous ronmental Conservation 40:367–379. remercions Kalna Arthur, Georges Amos, Pita Neihapi (service des pêches du Vanuatu) et Loïc Bourgine (Pro- Léopold M., Ham J., Kaku R., Kaltavara J., Raubani J., vince Nord de Nouvelle-Calédonie) pour leur aide. Gereva S., Moenteapo Z., Andréfouët S. et Dumas P. 2013c. Vers une nouvelle stratégie pour la ges- Bibliographie tion des pêcheries d’holothuries des îles du Paci- fique. Lettre d'information sur les pêches de la CPS Aswani S. 2005. Customary sea tenure in Oceania as a case 140:43–48. of right-based fishery management: Does it work? Léopold M. 2014. Guide de l’utilisateur de la base Review in Fish Biology and Fisheries 15:285–307. de données BDMer Version 2.0. 74 p. (avail- Conand C. 1989. Les holothuries Aspidochirotes du lagon able in English at http://bdmer.ird.nc/index1. de Nouvelle-Calédonie: Biologie, écologie et exploita- php?lang=en&pays=vnt). tion. Études et Thèses. Paris, France: ORSTOM. 393 p. Pakoa K. et Bertram I. 2013. État des lieux de la gestion Conand C., Shea S. et To A. 2014. Commerce de la bêche-de- des pêcheries d’holothuries dans le Pacifique. La mer : statistiques de Hong Kong pour 2012. La Bêche- Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS de-mer, Bulletin d'information de la CPS 34:43–46. 33:49–52. FAO. 2008. Sea cucumbers: A global review of fisheries Purcell S.W., Gossuin H. and Agudo N.S. 2009. Status and trade. FAO Fisheries and aquaculture technical and management of the sea cucumber fishery of paper. No. 516. Rome, Italy: Food and Agriculture La Grande Terre, New Caledonia. Studies and Organization. 331 p. Reviews. No. 1901. Penang, Malaysia: WorldFish FAO. 2012. Report on the FAO Workshop on Sea Cucum- Center. 134 p. ber Fisheries: An Ecosystem Approach to Manage- Purcell S.W., Hair C.A. and Mills D.J. 2012. Sea cucumber ment in the Pacific (SCEAM Pacific). FAO Fisher- culture, farming and sea ranching in the tropics: ies and Aquaculture Report No. 1003. Rome, Italy: Progress, problems and opportunities. Aquacul- Food and Agriculture Organization. 56 p. ture 368–369:68–81. FAO. 2013. Report on the FAO Workshop on Sea Cucumber Purcell S.W., Mercier A., Conand C., Hamel J.-F., Toral- Fisheries: An Ecosystem Approach to Management Granda M.V., Lovatelli A. and Uthicke S. 2013. Sea in the Indian Ocean (SCEAM Indian Ocean). FAO cucumber fisheries: Global analysis of stocks, man- Fisheries and Aquaculture Report. No. 1038. Rome, agement measures and drivers of overfishing. Fish Italy: Food and Agriculture Organization. 92 p. and Fisheries 14(1):34–59. 10 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Les holothuries (Echinodermata: Holothuroidea) du parc naturel des récifs de Tubbataha (Philippines) Roger G. Dolorosa1,*

Résumé

Les holothuries, à l’exemple d’autres invertébrés récifaux macrobenthiques de grande taille, n’ont guère été étudiées dans le parc naturel des récifs de Tubbataha (Philippines). Afin d’évaluer l'état des stocks d'holothuries du parc, un échantillonnage des distances et des prélèvements opportunistes ont été effectués entre décembre 2009 et avril 2010. Au total, 18 espèces d’holothuries ont été recensées. Douze d’entre elles n’avaient encore jamais été observées dans le parc, et trois autres étaient inscrites sur la liste de l’UICN. Les colonies de Stichopus chloronotus étaient les plus denses, suivies par Holothuria atra, Bohadschia argus et Thelenota ananas. La densité moyenne de peuplement, toutes espèces confondues, était beaucoup plus importante dans l’atoll du nord que dans l’atoll du sud. C’est sur le récif Jessie Beazley que la densité et la diversité des espèces étaient les plus faibles. Les individus recensés étaient relativement gros et avaient atteint, pour certaines espèces, leur taille maximale. Il ressort de cette étude que les holothuries ne sont pas exploitées dans le parc, mais que des mesures s’imposent malgré tout si l’on veut prévenir tout prélèvement futur et favoriser ainsi la reconstitution des stocks dans le long terme, de sorte que le parc puisse servir de source de réense- mencement des récifs dépeuplés. Il convient par ailleurs d’assurer un suivi régulier des populations d’holothuries et d’autres invertébrés récifaux, y compris des peuplements établis dans le lagon, lequel n’a pas été pris en compte dans le cadre de cette étude.

Introduction densité des peuplements d’holothuries. Elle avait pour objet d’évaluer l’efficacité des mesures de gestion des Les stocks d’holothuries des Philippines sont en très net populations du parc naturel des récifs de Tubbataha et se recul, en raison de l’exploitation non réglementée dont voulait complémentaire du programme national de suivi ils font l’objet et de la dégradation des habitats (Schoppe des stocks sauvages. 2000). Le Bureau des pêches et des ressources aquatiques des Philippines a donc élaboré un décret administratif qui Matériel et méthodes prévoit la mise en œuvre de mesures de conservation as- sorties de limites de taille, l’objectif étant de restreindre et Site d’étude de réglementer les prélèvements d’holothuries en milieu naturel (Pagdilao 2009). Cette mesure se veut une réponse Le parc naturel des récifs de Tubbataha est situé dans le aux deux priorités les plus urgentes en matière de préser- centre de la mer de Sulu (Philippines), par 8°43’–8°57’ N, vation de la ressource — l’établissement de plans de ges- et 119°48’–120°3’ E, à environ 150 km au sud-est de Puer- tion des pêcheries nationales et l’uniformisation des rele- to Princesa (île de Palawan) et à 130 km au sud de Ca- vés statistiques concernant le commerce des holothuries gayancillo. L’étude a été menée sur 15 sites répartis en di- — telles que définies lors de l’atelier international sur la vers points du récif externe (figure 1), à savoir six parois préservation des holothuries pêchées à des fins commer- récifales (une dans l’atoll du nord, une autre sur le récif ciales, organisé en Malaisie en 2004 au titre de la CITES2 Jessie Beazley et quatre dans l’atoll du sud) et plusieurs (Bruckner 2006). pentes récifales. Ces dernières sont constituées de vastes zones sableuses parsemées de colonies de coraux mous La gestion des peuplements sauvages s’est toutefois ré- et durs, tandis que les parois récifales se caractérisent par vélée difficile, compte tenu du caractère très limité des des tombants abrupts parcourus de failles étroites et pro- informations disponibles sur l’écologie et la biologie des fondes qui s’étirent vers les récifs de faible profondeur. holothuries (Pagdilao 2009) et sur l’état des stocks (Bruc- kner 2006). Pour combler cette carence, un programme Diversité des espèces national de suivi des stocks sauvages a été mis en place et des études entreprises sur la production et l’élevage en Le recensement des espèces s’est effectué selon diverses enclos marins des holothuries et sur le repeuplement des méthodes : observations à pied, à marée basse, de jour stocks (Bruckner 2006 ; Pagdilao 2009). comme de nuit, sur les platiers sablo-détritiques proches du poste des garde-pêches ; plongée avec masque et tuba L’étude dont il est question dans le présent article a porté sur les platiers récifaux de faible profondeur ; et plon- sur la diversité des espèces, la taille des individus et la gée en bouteille sur les pentes et parois récifales plus

1 College of Fisheries and Aquatic Sciences, Western Philippines University, Puerto Princesa Campus, Palawan, Philippines 2 Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 11

profondes. Les holothuries ont été identifiées à l’aide de divers documents de référence (Conand 1998 ; Schoppe 2000 ; Purcell et al. 2012 ; Kim et al. 2013). RÉCIF JESSIE BEAZLEY Taille des individus

Les holothuries observées à proximité des transects lors des opérations d’échantillonnage des distances ont été mesurées au repos, au centimètre près, à l’aide d’un mètre ruban. On a procédé de même pour les spécimens recensés dans la zone intertidale au cours des plongées avec masque et tuba ou des échantillonnages à pied.

Densité

Pour estimer la densité des populations d’holothuries, on a procédé à un échantillonnage des distances sur les pentes et les tombants du récif externe. Deux plongeurs autonomes, dont un servant de guide, ont parcouru à la nage la frange du récif, et la distance perpendiculaire entre les holothuries et le plongeur chargé de l’échantil- lonnage a été relevée. La distance parcourue à chaque plongée a été estimée à l’aide d’un GPS Garmin e Trex. Au total, 15 transects linéaires couvrant une distance de 11 909,16 mètres (pour une fourchette de 370,15 mètres à 1 094,35 mètres) ont été étudiés. Les données recueillies Figure 1. Les 15 sites d’échantillonnage sélectionnés dans le ont ensuite été analysées à l’aide du logiciel Distance 6.1 parc naturel des récifs de Tubbataha. (Thomas et al. 2010).

Tableau 1. Espèces d’holothuries recensées dans le parc naturel des récifs de Tubbataha.

No. Espèce Atoll du Nord (AN) Atoll du Sud (AS) Récif Jessie Beazley (RJB)

Famille Holothuriidae

1 Actinopyga lecanora X 2 Actinopyga palauensis X 3 Actinopyga sp. 1 X 4 Actinopyga sp. 2 X 5 Bohadschia argus XXX 6 Bohadschia koellikeri X 7 Bohadschia vitiensis X 8 Holothuria atra XX 9 Holothuria fuscogilva XX 10 Holothuria whitmaei X 11 Pearsonothuria graeffei XXX

Famille Stichopodidae

12 Stichopus chloronotus X 13 Stichopus sp. X 14 Thelenota ananas XXX 15 Thelenota anax X 16 Thelenota rubralineata XX

Famille Synaptidae

17 Euapta godeffroyi X 18 Synaptula sp. X

Total 17 6 4 12 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Résultats de la famille des Synaptidae (11,11 %). C’est dans l’atoll du nord que la diversité des espèces était la plus grande. Composition par espèce Taille Au total, 18 espèces d’holothuries appartenant à huit genres et à trois familles ont été répertoriées dans les Parmi les espèces mesurées (longueur totale), S. chlorono- eaux du parc (tableau 1 ; figures 2, 3 et 4). On a dénombré tus et H. atra sont celles dont on a mesuré le plus grand 11 espèces de la famille des Holothuridae (61,11 %), cinq nombre de spécimens. D’autres espèces, comme A. leca- espèces de la famille des Stichopodidae (27,28 %) et deux nora, B. koellikeri, B. vitiensis et T. rubralineata, étaient très

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Figure 2. (A) Actinopyga lecanora; (B) Actinopyga palauensis; (C) Actinopyga sp. 1; (D) Actinopyga sp. 2; (E) Bohadschia argus; (F) Bohadschia koellikeri; (G) Bohadschia vitiensis; (H) Holothuria atra. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 13 faiblement représentées, si bien qu’un seul spécimen a pu Densité être mesuré pour chacune d’entre elles (longueur totale, voir tableau 2). Les individus les plus grands apparte- La densité totale des populations d’holothuries du parc naient aux espèces H. atra (100 cm), T. ananas (70 cm) et était de 41,93 ind.ha-1 (tableau 3). Les stocks sont relati- T. anax (60 cm). Parmi les espèces pour lesquelles on dis- vement plus denses dans l’atoll du nord que dans l’atoll posait de données de taille, seules H. atra et S. chloronotus du sud et sur le récif Jessie Beazley (tableau 3 ; figure 5). étaient représentées par de petits spécimens (longueur Les densités étaient beaucoup plus fortes sur les pentes minimale : 10 cm). Les autres espèces étaient représentées récifales que sur les parois récifales (figure 5). Dans l’atoll pour la plupart par des spécimens de grande taille. du nord, les trois espèces les plus abondantes étaient S.

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Figure 3. (A) Holothuria fuscogilva; (B) Holothuria whitmaei; (C) Pearsonothuria graeffei; (D) Stichopus chloronotus; (E) Stichopus sp.; (F) Thelenota ananas; (G) Thelenota anax; (H) Thelenota rubralineata. 14 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

AB

Figure 4. (A) Euapta godeffroyi; (B) Synaptula sp.

Tableau 2. Tableau statistique récapitulatif des longueurs totales relevées pour certaines espèces d’holothuries du parc naturel des récifs de Tubbataha.

Longueur Longueur minimale Longueur maximale Intervalle de confiance Espèce n moyenne (cm) (cm) (cm) (95%)

Actinopyga lecanora 1 23,00 Bohadschia argus 36 33,33 20,00 45,00 2,59 Bohadschia koellikeri 1 26,00 Bohadschia vitiensis 1 24,00 Holothuria atra 156 46,66 10,00 100,00 1,31 Holothuria fuscogilva 14 33,57 30,00 40,00 2,87 Pearsonothuria graeffei 19 33,53 30,00 45,00 2,62 Stichopus chloronotus 241 27,63 10,00 40,00 0,89 Thelenota ananas 90 53,20 40,00 70,00 1,54 Thelenota anax 2 60,00 60,00 60,00 Thelenota rubralineata 1 50,00

Total 561

Tableau 3. Densité (ind. ha-1) des populations d’holothuries du parc naturel des récifs de Tubbataha, par espèce. Les trois espèces les plus abondantes sont indiquées en gris. AN = atoll du nord ; AS = atoll du sud ; RJB = récif Jessie Beazley ; LI = limite inférieure, intervalle de confiance de 95 % ; LS = limite supérieure, intervalle de confiance de 95 % ; PNRT : parc naturel des récifs de Tubbataha.

AN AS RJB PNRT Espèce Densité Densité Densité Densité LI–LS LI–LS LI–LS (ind. ha-1) (ind. ha-1) (ind. ha-1) (ind. ha-1)

Bohadschia argus 7,24 5,02–10,44 0,46 0,12–1,81 4,20 2,64–6,67 Holothuria atra 16,73 9,59–29,14 4,38 1,52–12,45 9,65 5,42–17,18 Holothuria fuscogilva 1,04 0,24–4,46 0,39 0,07–2,06 0,71 0,21–2,33 Pearsonothuria graeffei 1,56 0,78–3,12 2,36 1,00–5,55 0,48 2,04 1,17–3,56 Stichopus chloronotus 42,30 24,82–72,05 22,91 12,63–41,55 Thelenota ananas 3,89 1,85–8,17 5,16 1,74–15,31 0,12 4,20 2,23–7,89 Thelenota anax 0,05 0,01–0,22 0,03 0,01–0,12 Thelenota rubralineata 0,46 0,10–2,15 0,19 0,04–0,81

Total 70,27 46,37–106,48 10,21 4,11–25,37 0,24 41,93 27,15–64,74 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 15 chloronotus, H. atra et B. argus, tandis que, dans l’atoll cinq espèces d’holothuries ont été recensées de manière du sud, les occurrences de T. ananas, H. atra et P. graeffei accessoire dans le cadre d’une étude axée sur Tectus (Tro- étaient plus fréquentes. Sur le récif Jessie Beazley, seuls chus) niloticus (Dolorosa et Jontila 2012). Dans l’étude pré- deux individus de deux espèces distinctes, P. graeffei et T. sentée ici, 18 espèces ont été observées, ce qui représente ananas, ont été aperçus lors de l’échantillonnage des dis- 33,96 % des 53 espèces connues de Palawan (Jontila et al. tances (tableau 3). 2014a). Près de 90 % des espèces d’holothuries du parc ont une grande valeur marchande, et trois d’entre elles Discussion sont inscrites sur la Liste rouge des espèces menacées de l'Union internationale pour la conservation de la nature Les récifs du parc ont déjà fait l’objet de plusieurs études, (UICN) : Actinopyga lecanora et Thelenota ananas sont clas- mais seuls les travaux de Estacion et al. (1993) et de Dolo- sées dans la catégorie « En danger », et Bohadschia fusco- rosa et Jontila (2012) mentionnent des espèces d’holothu- gilva dans la catégorie « Vulnérable » (Conand et al. 2014). ries. Le fait que les espèces présentes dans le parc n’aient pas été répertoriées dans les études précédentes pourrait Les longueurs maximales relevées dans le parc sont être dû à leur abondance. Les holothuries sont vulné- proches des longueurs moyennes et maximales connues rables à la surexploitation, et les stocks se reconstituent (tableau 4), voire supérieures. De très grandes Holothuria très lentement (Purcell et al. 2012). Avant la création du atra (pouvant atteindre jusqu’à 100 cm de long) ont été parc national, en 1988, et dans les années qui ont suivi, aperçues sur la pente récifale, tandis que les individus de l’exploitation des ressources marines n’était soumise à petite taille sont plus nombreux dans la zone intertidale aucune restriction particulière (Arquiza et White 1999), située à proximité du poste des garde-pêches. L’absence et cette situation pourrait avoir induit une forte réduc- de toute forme d’exploitation, qui tient à la nature et à tion des stocks d’holothuries. Elle pourrait également la profondeur des habitats, pourrait expliquer le nombre expliquer pourquoi Estacion et al. (1993) n’ont recensé élevé d’individus de grande taille. Les sites d’étude très que deux espèces. Dans la mer Rouge (Égypte), on a éloignés du poste des garde-pêches, dans lesquels la res- également observé une baisse de la diversité des espèces source en troca est déjà épuisée, abritent encore des colo- d’holothuries après la saison de la pêche (Hasan et Abd nies d’holothuries abondantes. Les braconniers appré- El-Rady 2012). La surexploitation des holothuries est un hendés à ce jour dans le parc ciblaient pour la plupart phénomène généralisé qui a entraîné dans certains pays des ressources autres que les holothuries. Pour autant, la la fermeture prolongée de cette pêcherie (Uthicke 2004 ; hausse des prix et de la demande de bêche-de-mer sur les Hasan 2005 ; Friedman et al. 2008 ; Kalaeb et al. 2008 ; marchés mondiaux (Bruckner 2006) pourrait amener les Hasan et Abd El-Rady 2012 ; Purcell et al. 2013). pêcheurs à s’intéresser de plus près aux holothuries. Aus- si importe-t-il de prendre des mesures visant à prévenir La plupart des études réalisées à ce jour sur les récifs du l’exploitation, sous toutes ses formes, des holothuries, qui parc ont été menées le long d’un transect permanent et sont menacées de surpêche en raison de leur croissance portaient pour l’essentiel sur le couvert corallien et la lente, de leur faible fécondité et de leur maturité sexuelle biomasse de poissons (Ledesma et al. 2008). Les inverté- tardive (Bruckner 2006). brés récifaux n’ont été intégrés au programme annuel de suivi des ressources marines qu’à partir de 2005, et seuls Les espèces fouisseuses, à l’exemple de B. koellikeri et de étaient concernés, en un premier temps, les gros gastro- B. vitiensis, sont difficiles à trouver. Seuls deux spécimens podes et bivalves (Dolorosa et Schoppe 2005). En 2008, (un par espèce) ont été observés, à demi enterrés dans les

200

150 ) -1

100 Densité (ind. ha (ind. Densité 50

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 AN (1−8) AS (9−14) RJB (15) Sites

Figure 5. Densité des peuplements d’holothuries, par site. AN = atoll du nord ; AS = atoll du sud ; RJB = récif Jessie Beazley. Les sites 3, 10, 11, 12, 14 et 15 (en orange) sont des parois récifales. Les autres sites (en jaune) sont des pentes récifales. 16 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 fonds sableux du platier, à proximité du poste des garde- D’autres facteurs pourraient également jouer, et notam- pêches. Un spécimen de Stichopus sp. de très petite taille ment la distance qui sépare l’atoll du sud et le récif Jessie (~5 cm) a été aperçu de manière fortuite sous une roche Beazley du poste des garde-pêches : les populations de corallienne (figure 3E). Une bonne connaissance des habi- Tectus (Trochus) niloticus recensées sur les sites très éloi- tats des holothuries juvéniles est essentielle, tant du point gnés du poste des garde-pêches ont été très durement de vue du recrutement des stocks que du suivi de la den- touchées par le braconnage (Dolorosa et al. 2010 ; Jontila sité des stocks. et al. 2014b). À ce jour, les garde-pêches n’ont signalé aucun cas de braconnage d’holothuries, mais on ne peut Les densités de population enregistrées dans l’atoll du exclure la possibilité que les braconniers s’intéressent à nord sont beaucoup plus élevées que dans l’atoll du sud, l’avenir à des espèces marines à forte valeur marchande ce qui n’est sans doute pas sans rapport avec la nature des comme les holothuries. Pour l’heure, les densités relevées sites sélectionnés. En effet, sept des huit sites d’étude de dans le parc pour certaines espèces d’holothuries sont l’atoll du nord étaient des pentes récifales, que nombre toutefois comparables à celles enregistrées dans d’autres d’espèces semblent préférer aux parois récifales (figure 5). pays (tableau 5). La densité exceptionnelle des peuple-

Tableau 4. Tableau comparatif des longueurs moyennes et maximales des holothuries du parc naturel des récifs de Tubbataha et des données recueillies par Conand (1998).

Longueur moyenne (cm) Longueur maximale (cm) Espèce Conand (1998) Cette étude Conand (1998) Cette étude

Actinopyga lecanora 23 Bohadschia argus 36 33 60 45 Bohadschia koellikeri 26 40* Bohadschia vitiensis 32 24 40 Holothuria atra 20 47 45 100 Holothuria fuscogilva 42 34 57 40 Pearsonothuria graeffei 35 34 45 45 Stichopus chloronotus 18 28 35 40 Thelenota ananas 45 53 80 70 Thelenota anax 55 80 60 Thelenota rubralineata 50* 50

* Kerr et al. (2006).

Tableau 5. Tableau comparatif des densités (ind. ha-1 ± écart-type) observées dans le parc naturel des récifs de Tubbataha et de celles relevées sur d’autres sites.

Palau Eritrea Île Maurice Nouvelle-Calédonie Espèce (Pakoa et al. (Kalaeb et al. (Lampe-Randoo et Cette étude (Purcell et al. 2009) 2009) 2008) al. 2014)

Famille Holothuriidae

Actinopyga lecanora 1,5 ±1,1 Actinopyga palauensis > 10 Bohadschia argus 4,5 ±3,2 10–30 4,20 Bohadschia vitiensis 378,0 ±136,4 38 Holothuria atra 3 770,5 ±187,3 295,0 100 424 9,65 Holothuria fuscogilva 3,0 0,71 Holothuria whitmaei > 10 Pearsonothuria graeffei 2,04

Famille Stichopodidae Stichopus chloronotus 6,8 ±3,5 10–100 96 22,91 Thelenota ananas 3,5 > 10 4,20 Thelenota anax 0,03 Thelenota rubralineata 0,19 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 17 ments de H. atra dont il est fait état dans d’autres rapports Friedman K.S., Purcell S., Bell J. and Hair C. 2008. Sea pourrait en fait être liée à la nature des habitats. Les colo- cucumber fisheries: A manager's toolbox. ACIAR nies de H. atra de petite taille établies dans les zones de Monograph No. 132. 32 p. faible profondeur à proximité du poste des garde-pêches Hasan M.H. 2005. Destruction of a Holothuria scabra popu- sont particulièrement abondantes, ce qui cadre avec les lation by overfishing at Abu Rhamada Island in the conclusions de Pakoa et al. (2009). Elles devront toutefois Red Sea. Marine Environmental Research 60:489–511. faire l’objet de mesures de densité quantitatives. Hasan M.H. et Abd El-Rady S.E.D.A. 2012. Les effets de la pression de pêche sur l’écologie des popula- Remerciements tions d’holothuries dans le golfe d’Aqaba, en mer Rouge. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de L’auteur tient à remercier les garde-pêches de Tubbataha, la CPS 32:53–59. et en particulier Segundo Conales, Rowell Alarcon et Noel Bundal, du précieux concours qu’ils lui ont apporté Jontila J.B.S., Balisco R.A.T. and Matillano J.A. 2014a. The lors de la collecte des données. Il remercie en particulier Sea cucumbers (Holothuroidea) of Palawan, Phil- Rodulf Anthony T. Balisco, qui l’a aidé à identifier les ippines. AACL Bioflux 7:194–206. espèces d’holothuries et a bien voulu faire une relecture Jontila J.B.S., Gonzales B.J. and Dolorosa R.G. 2014b. Ef- globale de la première version du rapport d’étude. Jen- fects of poaching on topshell Tectus niloticus popu- nifer Selgrath a fourni la photo du spécimen de Thele- lation of Tubbataha Reefs Natural Park, Palawan, nota rubralineata, et Sabine Schoppe celle de l’holothurie Philippines. The Palawan Scientist 6:14–27. Synaptula sp. L’étude a été financée par la Nagao Natural Kalaeb T., Ghirmay D., Semere Y. et Yohannes F. 2008. État Environment Foundation. et première évaluation de la pêcherie d’holothuries en Erythrée. La Bêche-de-mer, Bulletin d'informa- Bibliographie tion de la CPS 27:8–12. Kerr A.M., Netchy K. and Gawel A.M. 2006. Survey of the Arquiza Y.D. and White A.T. 1999. Tales from Tubbataha. shallow-water sea cucumbers of the central Philip- 2nd edition. Makati City, Metro Manila, Philippines: pines. A Report to the Municipalities of Negros Ori- The Bookmark, Inc. 190 p. ental, Cebu and Bohol, local Bantay Dagat groups, Bruckner A.W. 2006. Proceedings of the CITES work- Coastal Conservation and Education Foundation, shop on the conservation of sea cucumbers in the Inc., and Silliman University-Angelo King Center families Holothuriidae and Stichopodidae. NOAA for Research and Environmental Management. Technical Memorandum NMFSOPR 34, Silver University Of Guam Marine Laboratory. 56 p. Spring, MD. 244 p. Kim S.W., Kerr A.M. and Paulay G. 2013. Colour, confu- Conand C. 1998. Holothurians (Sea cucumbers, Class sion, and crossing: Resolution of species problems Holothuroidea). p. 1157–1190. In: Carpenter K.E. in Bohadschia (Echinodermata: Holothuroidea). and Niem V.H. (eds). FAO species identification Zoological Journal of the Linnean Society guide for fishery purposes. The living marine re- 168(1):81–97. sources of the Western Central Pacific. Volume 2. Cephalopods, crustaceans, holothurians and Lampe-Ramdoo K., Moothien Pillay R. et Conand C. sharks. Rome, Italy: Food and Agriculture Organi- 2014. Évaluation de la diversité, de l’abondance et zation of the United Nations. 709 p. de la répartition des holothuries dans les lagons peu profonds de l’île Maurice. La Bêche-de-mer, Conand C., Polidoro B., Mercier A., Gamboa R., Hamel Bulletin d'information de la CPS 34:17–24. J.F. et Purcell S. 2014. L'évaluation des holothuries aspidochirotes pour la Liste rouge de l'UICN et ses Ledesma M.C., Jontila J.B.S., Dygico M.P., Conales S., implications. La Bêche-de-mer, Bulletin d'informa- Songco A.M., Dolorosa R.G. and Calderon V. 2008. tion de la CPS 34:3–7. Tubbataha Reefs Natural Park: Research and moni- toring report 2008. 65 p. Dolorosa R.G. and Schoppe S. 2005. Focal benthic mol- luscs (Mollusca: Bivalvia and Gastropoda) of select- Pagdilao C. 2009. Saving the sea cucumbers. High prices, ed sites in Tubbataha Reefs National Marine Park, unregulated harvest, drive sea cucumbers to extinc- Palawan, Philippines. Science Diliman 17(2):1–8. tion. Special To The Manila Times. June 14, 2009. http://www.manilatimes.net/national/2009/ Dolorosa R.G. and Jontila J.B.S. 2012. Notes on common june/14/yehey/top_stories/20090614top1.html macrobenthic reef invertebrates of Tubbataha Reefs Natural Park, Philippines. Science Diliman Pakoa K., Lasi F., Tardy E. and Friedman K. 2009. The sta- 24(2):1–11. tus of sea cucumbers exploited by Palau's subsist- Dolorosa R.G., Songco A.M., Calderon V., Magbanua R. ence fishery. Noumea, New Caledonia: Secretariat et Matillano J.A. 2010. Structure des populations of the Pacific Community. 44 p. et abondance de Trochus niloticus dans le Parc na- Purcell S.W., Gossuin H. and Agudo N.S. 2009. Status turel des récifs de Tubbataha, dans la province de and management of the sea cucumber fishery of Palawan (Philippines), et notes sur les effets du La Grande Terre, New Caledonia. Noumea, New braconnage. Le Troca, Bulletin d'information de la Caledonia: WorldFish Center. 140 p. CPS 15:17–23. Purcell S.W., Samyn Y. and Conand C. 2012. Commercial- Estacion J.E., Palaganas V.P., Perez R.E. and Alava M.N.R. ly important sea cucumbers of the world. FAO Spe- 1993. Benthic characteristics of islands and reefs cies Catalogue for Fishery Purposes No. 6. Rome, in the Sulu Sea, Philippines. Silliman Journal Italy: Food and Agriculture Organization of the 36(2):15–44. United Nations. 223 p. 18 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Purcell S.W., Mercier A., Conand C., Hamel J.F., Toral- T.A. and Burnham K.P. 2010. Distance software: Granda M.V., Lovatelli A. and Uthicke S. 2013. Sea Design and analysis of distance sampling surveys cucumber fisheries: Global analysis of stocks, man- for estimating population size. Journal of Applied agement measures and drivers of overfishing. Fish Ecology 47:5–14. and Fisheries 14(1):34–59. Uthicke S. 2004. Overfishing of holothurians: Lessons Schoppe S. 2000. A guide to the common shallow water from the Great Barrier Reef. p. 163–171. In: Lova- sea stars, brittle stars, sea urchins, sea cucumbers telli A., Conand C., Purcell S., Uthicke S., Hamel and feather stars () of the Philippines. J. and Mercier A. (eds). Advances in sea cucumber Singapore Time Media Private Ltd. 144 p. aquaculture and management. FAO Fisheries Tech- Thomas L., Buckland S.T., Rexstad E.A., Laake J.L., nical Paper No. 463. Rome, Italy: Food and Agri- Strindberg S., Hedley S.L., Bishop J.R., Marques culture Organization of the United Nations. 425 p. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 19

Recensement des espèces d’holothuries pêchées et transformées en Indonésie Ana Setyastuti1,* et Pradina Purwati1

Résumé

Comme chacun sait, le trepang (bêche-de-mer) est non seulement considéré comme un mets de choix, mais également utilisé dans la médecine traditionnelle. Dans les données officielles relatives aux exportations indonésiennes, le trepang est assimilé à une seule et même espèce, alors que plusieurs publications scientifiques nationales et internationales démontrent que ce terme générique regroupe en fait de multiples espèces d’holothuries. L’identification des bêches- de-mer transformées (séchées) n’étant pas chose aisée, il est plus simple de considérer qu’elles constituent une seule et même espèce, d’autant qu’elles sont exportées principalement sous forme séchée. L’étude décrite dans le présent article avait précisément pour objet d’établir la liste exhaustive de toutes les espèces d’holothuries qui ont été, ou sont encore, pêchées en Indonésie à des fins commerciales en vue de la production de trepang. Elle a permis de recenser au total 54 espèces, y compris 33 dont on a pu confirmer le statut taxonomique. S’y ajoutent plusieurs espèces qui, bien que commercialisées, n’ont jamais été étudiées à ce jour.

Introduction L’Indonésie est connue pour la très grande biodiversité marine qu’elle abrite sur une superficie de 5,2 millions de Selon les statistiques de l’Organisation des Nations Unies km2. Il est difficile de localiser avec précision la prove- pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Indonésie est nance de certaines prises, dans la mesure où les pêcheurs le principal producteur, et Hong Kong (Chine) le prin- sont répartis sur une zone très étendue et gardent jalou- cipal importateur de trepang au monde (Bruckner et al. sement les informations relatives à l’emplacement exact 2003 ; Tuwo 2004 ; Choo 2008). En Indonésie, comme dans des sites de pêche (Tuwo 2004 ; Purwati 2005 ; Choo d’autres pays, les stocks d’holothuries ont été durement 2008). Il est tout aussi difficile d’identifier les espèces de touchés par la surexploitation, attribuée principalement bêche-de-mer commercialisées, puisqu’elles répondent à à la pêche non réglementée (Bruckner et al. 2003 ; Tuwo des noms locaux très variables d’une région à l’autre, et 2004 ; Purwati et Yusron 2005 ; Choo 2008 ; Purwati et al. sont vendues sous forme de produits transformés (séchés 2010 ; Purcell et al. 2011). On pense que la ressource fait ou éviscérés et salés), ce qui entraîne une altération des l’objet de prélèvements massifs depuis la fin du XVIIe caractéristiques taxonomiques propres à chaque espèce. siècle, époque à laquelle les pêcheurs d’holothuries in- donésiens ont commencé à pêcher de plus en plus loin, Quatre sites de débarquement offrant un accès aisé à des s’aventurant jusqu’aux côtes septentrionales de l’Austra- spécimens d’holothuries frais et transformés ont été sélec- lie, faute de trouver dans les eaux de Maluku ou de Sunda tionnés en vue de l’établissement d’une liste exhaustive de quoi satisfaire la demande chinoise (Knaap et Suther- des espèces de trepang commercialisées en Indonésie. land 2004 ; Máñez et Ferse 2010). Nous avons ensuite tenté de déterminer si les spécimens séchés et éviscérés-salés pouvaient encore être identifiés. Environ 4,5 % seulement des espèces d’holothuries connues dans le monde sont utilisées pour la production Méthode de bêche-de-mer. À ce jour, 66 espèces ont été exploitées, dont une majorité dans la région Indo-Pacifique (Pur- Entre décembre 2011 et février 2013, nous avons collecté cell et al. 2011; Conand et Byrne 1993). Purwati (2005) a des holothuries sur quatre sites (figure 1) : Karimunjawa, recensé 26 espèces qui ont été, ou sont toujours, pêchées dans le nord du centre de Java (six spécimens frais) ; Si- dans les eaux indonésiennes à des fins commerciales. tubondo, dans le nord-est de Java (11 spécimens frais) ; Dans un autre rapport, Choo (2008) estime à 35 le nombre Spermonde, dans le sud de Sulawesi (neuf spécimens d’espèces d’holothuries originaires d’Indonésie et ven- salés) ; et Ambon, dans les Moluques centrales (huit spé- dues après transformation sur les marchés internatio- cimens séchés). naux. Or, ces deux auteurs se fondent sur des données tirées pour l’essentiel de rapports sur les pêches, lesquels Tous les spécimens ont été collectés auprès de plongeurs/ ne contiennent aucune information sur la taxonomie des pêcheurs d’holothuries, l’objectif étant de s’assurer que spécimens pêchés. Par ailleurs, dans les statistiques d’ex- les espèces capturées étaient bien destinées à un usage portation publiées en 2011 par le ministère indonésien des commercial. Les holothuries fraîches ont été conservées Affaires maritimes et de la Pêche, le trepang est toujours dans de l’alcool à 96 % pendant une semaine, puis dans considéré comme un produit unique (en d’autres termes, de l’alcool à 70 % en vue d’une conservation de longue une seule et même espèce). durée. Les spécimens salés ont été rincés à l’eau du robi-

1 RC. Oceanography-Indonesian Institutes of Sciences (LIPI), Jakarta, Indonésie * Auteur à contacter : [email protected] 20 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Figure 1. Lieux de prélèvement des holothuries. Sites d’étude : 1) Karimunjawa ; 2) Situbondo ; 3) Spermonde ; 4) Ambon. net, puis conservés de la même manière, tandis que les étude, Situbondo n’avait encore jamais fait l’objet de spécimens séchés ont d’abord été placés dans des sacs en recherches sur le trepang ou les holothuries. Sur les huit plastique, puis, une fois identifiés, plongés dans de l’al- espèces recensées dans cette zone, trois (Holothuria tur- cool à 70 % en vue d’une conservation de longue durée. riscelsa, H. excellens et Stichopus noctivagus) n’avaient été Tous les échantillons ont ensuite été confiés au musée observées jusqu’alors que sur l’île de Spermonde, comme zoologique de Bogor. l’indique Massin (1999).

L’identification des espèces s’est effectuée à partir des ca- Les pêcheurs ne savent généralement pas reconnaître les ractéristiques morphologiques des spécimens, ainsi que petites différences distinguant les espèces d’holothuries du type et de la composition des ossicules. Ces derniers qu’ils capturent, et pêchent nombre d’espèces pour les- ont été prélevés sur le tégument dorsal, le tégument ven- quelles il n’y a pas de demande commerciale. Selon les tral, les papilles dorsales, les podia ventraux, les tenta- informations recueillies, Stichopus cf. monotuberculatus cules, la collerette, les papilles anales, les tubes de Cuvier, serait peu commercialisé. Les pêcheurs locaux l’appellent les gonades, le rete mirabile, le muscle longitudinal, la pa- teripang pace, nom qui désigne également Stichopus vas- roi cloacale et le muscle rétracteur du cloaque. De petits tus, les deux espèces présentant des caractéristiques morceaux de tissus ont été prélevés sur chaque échantil- morphologiques externes similaires. Stichopus vastus fait lon puis trempés pendant quelques minutes dans de l’eau apparemment l’objet d’un commerce plus important que de javel. Les ossicules ont ensuite été rincés à l’eau du S. quadrifasciatus. Aisément reconnaissable à ses parti- robinet, puis plongés dans de l’alcool à 70 % avant d’être cularités morphologiques, notamment à son tégument examinés au microscope optique pour identification. dorsal parcouru de motifs réticulés de couleur brun-noir (Massin et al. 2002), S. vastus est l’espèce la plus abon- Résultats dante dans les eaux de faible profondeur. Dans sa liste, Choo (2008) cite S. quadrifasciatus (dont l’Indonésie est un Nous avons identifié 27 espèces d’holothuries originaires des pays d’origine), alors qu’il n’en est pas fait mention des sites d’étude sélectionnés (tableau 1), et dont les carac- dans Purcell et al. (2010), ce que Purwati et ses co-auteurs téristiques taxonomiques ont été décrites dans Setyastuti (2010) attribuent au caractère insuffisant, voire à l’absence (2013). S’y ajoutent les espèces qui ont été ou sont toujours d’approvisionnements réguliers de cette espèce sur les pêchées en Indonésie, soit au total 54 espèces (tableau 2). marchés. En Indonésie, l’espèce a été observée sur deux sites : à Lombok et dans l’archipel de Seribu (Wirawati et Discussion al. 2007 ; Setyastuti 2011).

Commercialisation des holothuries en Indonésie À ce jour, la présence de Stichopus pseudohorrens n’a été signalée que dans les eaux de Kupang. Or, cette espèce Karimunjawa est une des régions de production de tre- peut facilement être confondue avec l’holothurie teri- pang de Java. Purwati et al. (2010) ont réussi à identifier pang nanas (Thelenota ananas), de taille équivalente, qui 18 espèces d’holothuries pêchées et commercialisées dans possède également des papilles proéminentes (Wirawati cette région. Au terme de notre étude, nous avons pu ajou- et Purwati 2012). Seules deux publications (Purcell et al. ter à leur liste deux autres espèces, Holothuria (Metriatyla) 2010, 2012) font état d’un commerce international de cette cf. lessoni (Massin, Uthicke, Purcell, Rowe et Samyn, 2009) espèce. On retrouve la même erreur d’identification pour et Stichopus cf. monotuberculatus (Quoy et Gaimard, 1833). A. miliaris et A. bannwarthi. Cette dernière n’a été observée Contrairement aux autres sites retenus aux fins de cette qu’une seule fois, au Timor en 2007 (Purwati et al. 2008). La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 21 AAAA AAAA AAAA AAAP ; ml = muscle longitudinal ; pc = paroi cloacale ; mrc = muscle cloacale ; mrc ; ml = muscle longitudinal pc paroi v = tégument ventral ; pd papilles dorsales pv podia AAAAAAAPA rete mirabile rete PPPPPPSOSOAA PPPPPSOSOSOSOSOPAPA PPPPPSOSOSOSOSO PPPPPAPSOPSOAAPP PPPPPSOPSOSOSOSOAAA PPPPPSOSOSOSOSO PPPPPSOSOSOSOSOSOAPP PPPPPSOSOSOPAAPPP PPPPPPSOAASOPAPP PPPPPSOSOAAA PPPPPSOSOSOASOPAAA PPPPPSOPSOSOSOPAAA PPPPPSOPSOSOASOAAA PPPPPSOSOSOSOSOSOPPP PPPPSOSOSOSOSOSOSOAPP PPPPPSOSOSOSOSOSOSOSOSO PPPPPSOSOSOSOSOSOSOAA P P SOSOSOSOSOSOSOSOSOSOSOSO PPPPPSOSOSOSOSOSOSOSOSO td tvPPPPP pdPPPPPSOPSOSOAPAPA pv tent. coll. pa tc gon. rm rt ml pc mrc (Ludwig, 1875)(Ludwig, P P SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO (Jaeger, 1833)(Jaeger, P P SO SO P SO P SO SO SO SO SO SO SO (Jaeger, 1833) (Jaeger, (Semper, 1868) (Semper, (Semper, 1868)(Semper, P P SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO (Cherbonnier, 1980) (Cherbonnier, (Ludwig, 1875) (Ludwig, imitans (Selenka, 1867) P P SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO (Selenka, 1867) (Massin, Uthicke, Purcell, Rowe et Samyn, 2009) et Samyn, Rowe Purcell, (Massin, Uthicke, (Jaeger, 1833) (Jaeger, (Lesson, 1830) (Lesson, (Lesson, 1830) (Lesson, (Quoy et Gaimard, 1833) et Gaimard, (Quoy (Jaeger, 1833)(Jaeger, P P coluber coluber ) ) cf. ) cf. (Massin, 1999) albiventer albiventer (Cherbonnier, 1967) (Cherbonnier, turriscelsa turriscelsa excellens excellens ) ) fuscocinerea fuscocinerea (Semper, 1868)(Semper, P P SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO (Semper, 1868) (Semper, nobilis edulis atra atra edulis fuscopunctata fuscopunctata nobilis ) ) ) ) scabra scabra lessoni (Brandt, 1835) P P SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO ) ) ) ) ) ) cf. (Cherbonnier, 1980) (Cherbonnier, 1833) et Gaimard, (Quoy P P SO P P SO SO SO SO SO SO SO SO SO (Jaeger, 1835) (Jaeger, (Semper, 1868) (Semper, (Jaeger, 1833)(Jaeger, A A SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO SO (Sluiter, 1887) (Sluiter, (Clark, 1921) sp. 1 sp. sp. 3 sp. sp. 2 sp. Theelothuria Metriatyla Metriatyla Microthele Stauropora Semperothuria Platyperona Microthele Halodeima Metriatyla Acanthotrapeza Microthele Halodeima Halodeima ( ( ( ( ( ( ( ( ( ( ( ( ( ( rétracteur du cloaque ; P = présent ; A = absent ; SO sans objet. A = présent ; rétracteur du cloaque ; P ventraux ; tent. = tentacules ; coll. = collerette ; pa = papilles anales tc tubes de Cuvier gon. gonades rm ventraux ; tent. = tentacules coll. collerette Ossicules isolés sur les différentes parties du corps de spécimens d’holothuries frais et transformés. td = tégument dorsal ; t Ossicules isolés sur les différentes

Stichopus monotuberculatus Stichopus monotuberculatus Stichopus noctivagus Stichopus quadrifasciatus Bohadschia Bohadschia subrubra Bohadschia vitiensis Holothuria Holothuria Pearsonothuria graeffei graeffei Pearsonothuria Stichopus chloronotus Thelenota ananas Holothuria Holothuria Holothuria Holothuria Holothuria Holothuria Holothuria Pearsonothuria graeffei graeffei Pearsonothuria Stichopus pseudohorrens Stichopus pseudohorrens Stichopus vastus Thelenota anax Bohadschia Holothuria Holothuria Holothuria Actinopyga lecanora lecanora Actinopyga Bohadschia Holothuria Holothuria 11 12 13 de Spermonde Spécimens salés originaires 1 2 3 10 9 6 7 8 8 5 7 4 6 3 5 6 7 8 9 Spécimens séchés originaires d’Ambon Spécimens séchés originaires 1 2 4 5 Spécimens frais originaires de Karimunjawa et Situbondo et conservés dans de l’alcool et Situbondo conservés de Karimunjawa originaires Spécimens frais 1 2 3 No. Espèce 4 Tableau 1. Tableau 22 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 Holothurie rose-F bruneHolothurie cendre Holothurie à mamelles blanche d'éléphantHolothurie trompe Holothurie contractile-F A,C,D - E,F A,C,D,E,F -F A,B,C,D,F A,C,D A,C,E -E -D Holothurie bruneHolothurie caillouHolothurie brune des brisantsHolothurie noire-F -F -F A,B,C,D Holothurie léopard A,B,C,D A,B,C,D,E,F -Holothurie de sable à taches-E,F A,B,C,D,E -Holothurie de sable brune-F B,C A,B,C,D LollyHolothurie serpent-C B,D,E,F A,C,D A,B,C,D,E,F A,C A,B,C,D,E,F tat du spécimen » renvoie à l’état du spécimen au moment de tat du spécimen » renvoie 2006) ; [C] Choo (2008) [D] Máñez et Ferse (2010) [E] Purwati al. Dada / cera / perut /l akling merah, takling, batu keling takling, / perut /l akling merah, Dada / cera Hitam Coklat, lakling coklat Susu putih, bissawa kunyit, Susu putih, kuning, Batuna Coklat Pulut Ugai, gosok Sepatu Kossong kassi bilado, / kapukbillala, kapok ladu-ladu, Kunyit, balibi, hitam Batu, ballang ulu Buntal, hitam gamet, sepatu, lotong, Kapok / kapuk, Bintik Pulut merah Kawasa Ular mata, gamat bati, bintik, cempedak, patola olok-olok,Kawasa, krido polos getah putih, pulut, benang, Karido getah bintik / laos bintik, kapok Teripang Karet Olok-olok, gatta, gama, polos Kunyit cera keling, Lakling hitam, dara, hitam / coklat, talengko Taikokong, - Frais (E,F) Frais - Séché (F) - Séché (E) Frais Frais Frais - - (E,F) Frais - (E) Frais - - - (E), Salé (F) Frais - (E), Salé (F) Frais Séché (E,F) Frais (E,F) Frais - (E,F) et Salé (F) Frais imitans albiventer sp. 1sp. 2sp. 3sp. Salé Frais Séché cf. cf. cf. cf. son identification. Les références citées dans la catégorie « Autres sources » renvoient à : [A] Purwati (2005) ; [B] ( » renvoient sources Autres citées dans la catégorie « son identification. Les références ou nécessitant une confirmation taxonomique. (2010) ; [F] Setyastuti (2013). (*) : dénomination erronée Liste de toutes les espèces d’holothuries pêchées et commercialisées actuellement et dans le passé en Indonésie. La colonne « É Liste de toutes les espèces d’holothuries pêchées et commercialisées

Holothuria excellens Holothuria fuscocinerea Holothuria fuscogilva* Holothuria fuscopunctata Holothuria hilla* Holothuria Holothuria impatiens Holothuria lessoni Actinopyga bannwarthi Actinopyga Actinopyga caerula* Actinopyga echinites* Actinopyga lecanora Actinopyga mauritiana* Actinopyga miliaris Actinopyga Bohadschia Bohadschia Bohadschia Bohadschia argus* Bohadschia marmorata* Bohadschia similis* Bohadschia subrubra Bohadschia tenuissima* Bohadschia vitiensis Holothuria Holothuria atra Holothuria coluber Holothuria conusalba* Holothuria edulis 21 22 23 24 25 26 27 28 No. Espèce1 du spécimen État Nom local Nom commercial sources Autres 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 Tableau 2. Tableau La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 23 C,D Holothurie à filaments blancsHolothurie à mamelles noire-Holothurie léopard- A,C,D,E A,B,D,F C A,C A,C Holothurie de sable A,B,C,D,E,F -F --Holothurie curry bruneHolothurie ananasHolothurie géante rougesHolothurie à lignes C,E,F A,B,C,D,F D A,B,C,D,E,F C,F A,D Holothurie mouton--F -C -C à mamellesHolothurie noire Holothurie fleur C Holothurie verteHolothurie curryHolothurie dragon C -F -F A,C A,B,C,D,E,F A,B,C,D,E,F B,C,D,E A,B,C,D,E Getah, cera, jepun, keling, talengko jepun, keling, Getah, cera, Koro, cera hitam cera Koro, goreng Kacang - - puti Kebo, Gosok, pasir, buang kulit, putih, kamboa Gosok, pasir, Teripang duri Teripang Gamat gama kapok, anjing, taikokong, Gamet, kasur, goreng TKK, kacang gamet, gamet pace, Nanas / nenas, babi Donga, duyung, Bati - krido bintik Krido, Hitam - - - duri, gemuk, bati, donga cera sutra, gombyok, Bintik merah, japon, jepun, Jepung, taikongkong gamet kacang, Gamet emas, rengget susu, kacang, taikongkong, goreng, Kacang Gamet pace Gamat Frais (E) Frais Salé et Séché (F) - - - - Frais (E,F) Frais Frais - (E,F), Salé (F) Frais (F) Frais (E), Salé (F) Frais - - - Frais - - - (E), Salé et Séché (F) Frais (E), Séché (F) Frais (E) Frais (E) Frais Frais Frais Salé versicolor* var. var. . (suite)

Holothuria leucospilota Holothuria nobilis Holothuria ocellata* Holothuria pardalis* Holothuria perficax* Holothuria rigida* Holothuria scabra Holothuria scabra Holothuria scabra Stichopus quadrifasciatus Stichopus variegatus* Stichopus vastus Thelenota ananas Thelenota anax Thelenota rubralineata* Holothuria similis* Holothuria turriscelsa Holothuria vagabunda* Holothuria vatiensis* Holothuria whitmaei* graeffei Pearsonothuria Stichopus chloronotus Stichopus herrmanni Stichopus horrens Stichopus monotuberculatus Stichopus noctivagus Stichopus pseudohorrens No. Espèce29 du spécimen État Nom local Nom commercial sources Autres 30 31 32 33 34 35 36 49 50 51 52 53 54 37 38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 Tableau 2. Tableau 24 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Parmi les espèces qui n’ont jamais été commercialisées vaste pour être à même de recueillir des données plus mais sont néanmoins pêchées sur les différents sites précises sur les différentes espèces de trepang commer- d’étude retenus, figurent : Actinopyga bannwarthi, H. tur- cialisées. Les méthodes d’analyse moléculaire élaborées riscelsa, H. excellens, H. cf. albiventer, H. cf. imitans et Sti- à l’appui de l’identification des espèces pourraient à cet chopus noctivagus. Du point de vue taxonomique, c’est la égard se révéler très utiles pour identifier les animaux deuxième fois que la présence de Holothuria turriscelsa, transformés échangés sur les marchés. H. excellens et Stichopus noctivagus, observées pour la pre- mière fois à Spermonde par Massin (1999), est signalée Bibliographie en Indonésie. Les spécimens de Holothuria excellens et H. turriscelsa ont peut-être été confondus avec des teripang Bruckner A.W., Johnson K.A. et Field J.D. 2003. Conserva- hitam (Holothuria atra), en raison de leur forme et de leur tion des holothuries : une inscription aux listes de couleur. H. excellens n’est pourtant pas noire mais de cou- la CITES pour pérenniser le commerce internatio- leur violet foncé, et ses podia sont plus longs que ceux des nal ? La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la spécimens de H. atra prélevés à Karimunjawa. Au plan CPS 18:24–33. morphologique, H. turriscelsa se distingue très nettement Choo P.S. 2008. Population status, fisheries and trade of de H. atra par ses tentacules jaunes, qui rappellent beau- sea cucumbers in Asia. p. 81–118. In: Toral-Granda coup plus H. coluber. V., Lovatelli A. and Vasconcellos M. (eds). Sea cu- cumbers: A global review of fisheries and trade. État de conservation des bêches-de-mer examinées FAO Fisheries and Aquaculture Technical Paper No. 516. Rome, Italy: Food and Agriculture Organi- Le trepang est principalement commercialisé sous forme zation of the United Nations. 317 p. séchée, et il est donc plus difficile d’identifier les espèces, Conand C. and Byrne M. 1993. A review of recent devel- dans la mesure où la transformation entraîne une altéra- opments in the world of sea cucumber fisheries. tion de la couleur et de la forme des animaux et peut de Marine Fisheries Review 55:1–13. surcroît endommager les ossicules (Uthicke et al. 2010 ; Purwati et al. 2010). Si la plupart des spécimens trans- Knaap G. and Sutherland H. 2004. Monsoon traders: formés que nous avons examinés étaient encore entiers, Ships, skippers and commodities in eighteenth- leur état de conservation n’était pas aussi bon que celui Century Makassar. Leiden, The Netherlands: des holothuries fraîches. Les spécimens salés ont été plus KITLV Press. 269 p. faciles à identifier que les séchés, les téguments, les ossi- Máñez K.S. and Ferse S.C.A. 2010. The history of Makas- cules et plusieurs organes internes étant intacts. Plusieurs san trepang fishing and trade. PloS ONE 5(6): individus ont d’ailleurs pu être identifiés à partir de leur e11346. doi:10.1371/journal.pone.0011346 seule apparence externe. C’est le cas de Thelenota ananas Massin C. 1999. Reef-dwelling Holothuroidea (Echino- (holothurie de grande taille dotée de papilles proémi- dermata) of the Spermonde Archipelago (South- nentes), de Stichopus chloronotus (taille moyenne, couleur West Sulawesi, Indonesia). Zoologische verhan- vert foncé, papilles alignées en trois rangées distinctes) et delingen Vol. 329. Leiden, Netherlands: National de Holothuria edulis (taille moyenne, face ventrale rose). Museum of Natural History. 144 p. Tous les spécimens séchés ramenés d’Ambon ont pu être Massin C., Zulfigar Y., Tan Shau Hwai A. and Rizal Boss identifiés après examen de leurs traits morphologiques S.Z. 2002. The Stichopus (Echinodermata: caractéristiques et des ossicules présents sur les tégu- Holothuroidea) from the Johor marine park (Ma- ments (tableau 1). Deux spécimens (H. cf. albiventer et H. laysia) with the description of two new species. cf. imitans) n’ont pu être formellement identifiés, la trans- Bulletin de l’institut royal des sciences naturelles formation ayant entraîné une altération de leurs caracté- de Belgique 72:73–99. ristiques morphologiques et des ossicules. Purcell S.W., Lovatelli A., Vasconcellos M. and Ye Y. 2010. Managing sea cucumber fisheries with an ecosys- Conclusion tem approach. FAO Fisheries and Aquaculture Technical Paper No. 520. Rome, Italy: Food and L’étude a permis de recenser 54 espèces d’holothuries Agriculture Organization of the United Nations. qui ont été ou sont encore pêchées en Indonésie en vue 171 p. de la production de trepang, et de confirmer le statut Purcell S.W., Mercier A., Conand C., Hamel J.-F., Toral- taxonomique de 33 d’entre elles, dont 12 espèces qui Granda M.V., Lovatelli A. and Uthicke S. 2011. Sea n’auraient que très rarement, voire jamais, été commer- cucumber fisheries: Global analysis of stocks, man- cialisées sur les marchés locaux ou internationaux (Acti- agement measures and drivers of overfishing. Fish nopyga bannwarthi, Bohadschia subrubra, Holothuria lessoni, and Fisheries 14(1):34–59. H. cf. albiventer, H. cf. imitans, H. turriscelsa, H. excellens, Purcell S.W., Samyn Y. and Conand C. 2012. Commercial- H. fuscocinerea, Stichopus noctivagus, S. pseudohorrens, S. ly important sea cucumbers of the world. FAO Spe- monotuberculatus, S. quadrifasciatus). Il en ressort que les cies Catalogue for Fishery Purpose No. 6. Rome, spécimens transformés, salés et séchés peuvent encore Italy: Food and Agriculture Organization of the être identifiés, car ils préservent leurs traits morpholo- United Nations. 150 p. giques caractéristiques (ossicules des téguments, organes internes, notamment). Purwati P. 2005. Teripang Indonesia: Komposisi jenis dan sejarah perikanan. Oseana 30(2):11–18. Du point de vue taxonomique, il faudra collecter davan- Purwati P. 2006. Souvenir de Lombok. La Bêche-de-mer, tage de spécimens dans une zone d’étude beaucoup plus Bulletin d'information de la CPS 23:26–28. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 25

Purwati P. and Yusron E. 2005. Teripang Indonesia, biota Tuwo A. 2004. Status of sea cucumber fisheries and yang terancam. Prosiding Pertemuan Ilmiah Tahu- farming in Indonesia. p. 49–55. In: Lovatelli A., nan ISOI-2005. Surabaya, 5–6 July 2005: 57–64. Conand C., Purcell S., Uthicke S., Hamel J.-F. Purwati P., Wirawati I. and Hendriks D. 2008. Timun laut and Mercier A. (eds). Advances in sea cucumber anggota ordo Aspidochirotida (Echinodermata, aquaculture and management. FAO Fisheries Holothuroidea) koleksi Pusat Penelitian Oseano- Technical Paper No. 463. Rome, Italy: Food and grafi LIPI Jakarta: katalog / penyusun, Pradina Agriculture Organization of the United Nations. Purwati, Ismiliana Wirawati, Dominggus Hen- 425 p. driks. Jakarta, Indonesia: Pusat Penelitian Oseano- Uthicke S., Byrne M. and Conand C. 2010. Genetic bar- grafi, Lembaga Ilmu Pengetahuan Indonesia. 61 p. coding of commercial beche-de-mer species (Echi- Purwati P., Hartati R. and Widianingsih. 2010. Eighteen sea nodermata: Holothuroidea). Molecular Ecology cucumber species fished in Karimunjawa Island, Resources 10(4):634–646. Java Sea. Marine Research in Indonesia 35(2):23–30. Wirawati I. and Purwati P. 2012. Rarely reported species Setyastuti A. 2011. Sea cucumbers (Echinodermata: Holo- of Indonesian sea cucumbers. Marine Resources thuroidea) of Tikus Island, Seribu Archipelago. Os- Indonesia 37(1):9–23. eanologi dan Limnologi di Indonesia 37(2):211–234. Wirawati I., Setyastuti A. and Purwati P. 2007. Timun laut Setyastuti A. 2013. study on trepang collected Anggota Famili Stichopodidae (Aspidochirotida, from Karimunjawa, Situbondo, Spermonde and Holothuroidea, Echinodermata) Koleksi Puslit Os- Ambon. Thesis. Bogor, Indonesia: Bogor Agricul- eanografi LIPI, Jakarta. Oseanologi dan Limnologi tural University. 121 p. Di Indonesia 33(3):355–380. 26 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Observations in situ d’holothuries dans le nord de l’atoll de Baa (Îles Maldives) Frédéric Ducarme1,*

Résumé

Ce rapport décrit les résultats d’une étude sur les holothuries, réalisée en 2014 sur les récifs coralliens des îles situées au nord de l’atoll de Baa pendant une période de deux mois. Le principal constat réside dans la rareté des holothuries — et des échinodermes en général — dans cet atoll, de même qu’une faible diversité, les populations étant essentiellement constituées de l’Holothuriidae Pearsonothuria graeffei, suivie de plusieurs Stichopodidae. Cette étude porte le nombre d’espèces d’holothuries repérées aux Maldives à environ 25, en fonction de la détermination d’observations ambiguës, et à 18 espèces pour le seul atoll de Baa.

Introduction Matériel et méthodes

La République des Maldives est connue des spécialistes L’étude de la répartition et de l’abondance des holothu- des holothuries en raison de l’essor récent, mais néan- ries a été menée de juillet à septembre 2014 sur 13 sites moins spectaculaire, de la pêche de l’holothurie. Bien que au large de neuf îles, toutes situées au nord-est de l’atoll la filière n’ait vu le jour que vers 1985, on a constaté une de Baa (figure 1). Les habitats ont été décrits selon une surexploitation massive dès 1990 (Joseph 1992), qui s'est hiérarchie de la couverture corallienne (de 0, absence de traduite par un effondrement des populations de la plu- couverture corallienne, à 5, couverture > 90 %, comme part des espèces à forte valeur marchande (James et Ma- dans les travaux de Jimenez et al. 2012), qui a également nikfan 1994), d’où une contraction des exportations dans été appliquée aux coraux endommagés et au sable. Une un contexte caractérisé par une réglementation insuffi- échelle analogue a aussi été utilisée pour la rugosité (de sante (FAO 2013). Pendant des années on a manqué d’in- 1, surface plane, à 5, architecture tridimensionnelle extrê- formations sur la diversité et l’abondance des holothuries mement rugueuse, comme dans Jimenez et al. 2012), la dans le pays, mais quelques études récentes ont contribué richesse de l’habitat (1 pour les habitats homogènes à 5 à faire en partie la lumière sur la situation (Muthiga 2008). pour les habitats fortement hétérogènes) et l’hydrodyna- misme (de 1 pour les eaux calmes à 5 pour les courants de Cette partie de l’atoll de Baa, réserve de biosphère de moyenne intensité, à savoir le maximum dans cette zone l’UNESCO, est très isolée et a été peu étudiée au plan plutôt calme). biologique (Jimenez et al. 2012). Elle était exclue du champ d’investigation de la principale étude scientifique Sur chacun des sites, des prospections de 45 minutes ont été sur les invertébrés marins de cet atoll (Andréfouët 2012). effectuées le long d’un transect parallèle à la crête récifale, Par comparaison avec les études générales sur les Mal- en plongée autonome ou avec un masque et un tuba selon dives et l’atoll de Baa, elle se singularise pourtant par les profondeurs. Sur certains sites, les observations ont été ses caractéristiques propres, notamment ses populations répétées à plusieurs reprises, à différentes heures du jour d’échinodermes. et de la nuit, pour éviter les biais d’échantillonnage. Au to- tal, 45 opérations ont été réalisées, dont neuf la nuit et 11 en La présente étude décrit les résultats d'un inventaire des plongée à des profondeurs supérieures à 10 mètres. Toutes holothuries, réalisé sur une période de deux mois en les observations consistaient à examiner le benthos, à ex- 2014, sur les récifs coralliens des îles du nord de l’atoll de plorer les roches et anfractuosités du récif, et à identifier Baa. Le seul récif situé dans une zone habitée est celui de et répertorier toutes les holothuries repérées. Aux fins de l’île de Landaa Giraavaru où un hôtel de villégiature a été confirmation des identifications, chaque nouvelle espèce construit en 2006. Trois études analogues ont été entre- rencontrée a été photographiée (figure 2). L’occurrence prises à titre de contrôle sur trois sites distincts de l’atoll correspond au pourcentage de sites où chaque espèce a été de Malé où les observations ont corroboré les résultats de répertoriée (un site représentant 7,5 %). Muthiga (2008), ce qui indique que la disparité des résul- tats obtenus lors d’études antérieures ne peut être impu- Cette zone est surtout composée de minuscules îlots dé- tée à un biais méthodologique. pourvus de lagon et ceinturés par d’étroits platiers réci-

1 Centre d’écologie et des sciences de la conservation, UMR 7204, Museum national d’histoire naturelle (Paris) * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 27

n’ont pas été observées pendant les prospections. Elles sont reportées au tableau 3 avec la mention « signalée ». Aucune des espèces observées durant cette étude n’a de réelle valeur mar- chande, et, d'après la littérature, trois seulement sont exploitées commer- cialement aux Maldives, à savoir S. chloronotus, H. atra et T. anax (Joseph 1992), bien que toutes soient consi- dérées comestibles et exploitées dans certaines régions (Purcell et al. 2012). Sur les sept espèces repérées, cinq sont des stichopodidés et deux des holothuridés. Au total, 308 holothu- ries ont été observées sur l’ensemble des sites, pour une durée totale de 33 heures de prospection. La densité globale était de 6,8 individus pour 45 minutes de recherche. La plus forte densité a été constatée à Thiladhoo, avec une moyenne de 14,25 individus par mission d’observation.

La densité des observations était très variable et s’échelonnait de 0 à 20 in- dividus par prospection de 45 mi- nutes. Pearsonothuria graeffei était de Figure 1. Emplacements des stations d’échantillonnage (nord-est de l’atoll de Baa), et situation de l’atoll dans l’archipel des Maldives. loin l’espèce la plus abondante, avec 291 observations sur 308 (= 94,5 %), et a été repérée sur l’ensemble des sites sauf un qui était dépourvu de faux bornés par d’abruptes pentes récifales qui plongent corail vivant. Venait ensuite Stichopus chloronotus (2,3 % directement à une profondeur d’une trentaine de mètres des observations, présente sur trois sites, soit 23 %). Des (Kench 2012). En dépit de l’action modérée des vagues individus plus nombreux ont été observés sur les subs- dans cette partie de l’atoll, le courant peut être régulier, trats de corail vivant (particulièrement l’espèce la plus ce qui est propice au développement de vastes popula- abondante), mais les fonds meubles abritaient une plus tions d’organismes sessiles filtreurs tels que les crinoïdes grande diversité spécifique. Les sites caractérisés par une (Kench 2012). forte couverture de corail vivant (et un relief important) comptaient de vastes populations de P. graeffei, tandis que Résultats S. chloronotus a été observée sur des sites plus simples, présentant un paysage corallien moins complexe et da- Description des sites d’étude vantage d’algues filamenteuses. H. atra n’a été repérée qu’une seule fois, sur un platier récifal sablonneux pré- Les caractéristiques des sites, notamment les principaux sentant une abondance de matériaux détritiques (d’ori- éléments écologiques composant le substrat présents gine corallienne, mais aussi anthropique). Des stichopo- dans le couvert benthique, font l’objet du tableau 1. Le didés de grande taille, tels que T. anax, S. herrmanni et S. cf. substrat benthique est surtout constitué de corail vivant horrens, ont été observés sur les larges zones sablonneuses (plus de 50 % et souvent jusqu’à 80 %), suivi de corail des récifs ouverts, mais jamais sur les platiers détritiques mort plus ou moins recouvert d’algues filamenteuses et sablonneux. La quasi-totalité des observations ont été de sable dans certains sites. Aucun herbier ou mangrove faites en plongée ave masque et tuba à des profondeurs n’a été observé, et les algues charnues étaient également oscillant entre 1–7 m, et les plongées plus profondes ont très rares. La rugosité, la richesse de l’habitat et l’hydro- été caractérisées par une diminution rapide des obser- dynamisme étaient fortement hétérogènes, d’où une vations sans qu’aucune espèce supplémentaire ne soit grande diversité de niches écologiques. découverte. Dans l’ensemble, les observations nocturnes révélaient une moindre abondance, mais une diversité Abondance et diversité des holothuries aspidochirotes accrue du fait que certaines espèces, notamment les gros stichopodidés, s'observent mieux la nuit. Sept espèces d’holothuries aspidochirotes ont été obser- vées durant l’étude (tableau 2), dont une probablement Une espèce inconnue (figure 2G) a été observée à trois re- non identifiée et une autre que ne signalait aucune des prises sur le même site, dans le sud de Landaa Giraavaru, études antérieures (Stichopus cf. horrens). Sept autres avec au moins deux spécimens différents. L’un d’eux a espèces ont été mentionnées par des collègues et des été prélevé et il est en cours d’examen au Musée natio- villageois (d’après des photos ou des spécimens), mais nal d’histoire naturelle : c’est un stichopodidé robuste 28 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

AB

CD

EF

G

Figure 2. Photos des sept espèces observées : A) Holothuria atra; B) Pearsonothuria graeffei; C) Stichopus chloronotus; D) Stichopus herrmanni; E) Stichopus cf. horrens; F) Thelenota anax; G) Stichopodidé non identifié (photos : Frédéric Ducarme).

de grande taille (20–30 cm), présentant de grosses taches (comme l’avait déjà noté Andréfouët 2012), suivies par foncées sur une peau vert pâle. ordre d’abondance par Fromia indica, Linckia guildingi, Cho- riaster granulatus, Fromia nodosa, Gomophia egyptiaca et Fro- Diversité globale des échinodermes sur les sites étudiés mia nodosa ; de gros spécimens de clavigera et de Leiaster cf. speciosus ont également été observés la nuit (il Les populations d’échinodermes étaient particulièrement s’agissait dans les deux cas d’observations nouvelles dans rares sur les sites étudiés par comparaison avec les don- cette zone). Bien que précédemment recensée (Andréfouët nées recueillies dans d’autres atolls des Maldives (obser- 2012), Acanthaster planci n’a pas été observée à Baa (alors vations de terrain et Muthiga [2008]). Les astéroïdes que plusieurs individus ont été vus lors des missions de constituaient la classe la plus abondante, avec une large contrôle réalisées à Kuda Huraa, à l’est de l’atoll de Malé). population de Linckia multifora et de Culcita schmideliana La deuxième classe la plus abondante était les crinoïdes, La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 29

Tableau 1. Caractéristiques des sites étudiés et diversité des holothuries. Observations de la couverture de corail vivant, de la rugosité (complexité tridimensionnelle), de la richesse des habitats et de l’hydrodynamisme dans les stations d’échantillonnage, par rapport au nombre d’espèces observées.

Algues Richesse Nombre de Diversité Corail Sites d’étude filamenteuses et Sable Rugosité des Hydrodynamisme missions des vivant corail dégradé habitats d’observation holothuries

Angafaru 2 2 1 1 3 1 1 1 Funadhoo 5 1 0 4 4 3 1 1 Hulhudhoo 5 1 0 4 4 3 3 1 Landaa south 4 2 1 5 4 2 15 5 Landaa east 2 2 1 2 2 4 3 4 Landaa north 0 3 3 1 1 2 1 0 Landaa NE 3 2 2 3 3 3 1 1 Landaa SE 2 2 2 2 4 2 1 2 Madhirivaadhoo 4 2 1 4 3 2 4 1 Milhadhoo 3 3 1 3 4 2 6 2 Thiladhoo 4 2 1 4 4 3 4 1 Veyofushi 2 1 3 3 3 3 1 1 Voavah 5 1 2 5 5 1 3 1

Tableau 2. Abondance et occurrence (nombre de sites abritant l’espèce / nombre total de sites) de chaque espèce d’holothurie sur les sites d’étude. Angafaru Funadhoo Hulhudhoo Landaa south Landaa east Landaa north Landaa NE Landaa SE Madhirivaadhoo Milhadhoo Thiladhoo Veyofushi Voavah totale Abondance (%) Occurrence

Pearsonothuria graeffei 7 3 10 90 21 5 6 30 50 57 5 7 291 92,0 Stichopus chloronotus 1 1 5 7 23,0 Holothuria atra 1 1 7,5 Thelenota anax 1 1 2 15,0 Stichopus herrmanni 2 2 7,5 Stichopus cf. horrens 2 2 7,5 Unidentified sp. 3 3 7,5

représentés par au moins six morphotypes différents, dont Discussion probablement Lamprometra, Himerometra, Comanthus, Oxy- comanthus, Stephanometra et Commissia sp. Les échinoïdes Le principal constat réside dans la rareté des holothuries étaient étonnamment cryptiques et n’ont quasiment pas — et des échinodermes en général — dans l’atoll de Baa, été observés de jour, à l’exception d’espèces fouisseuses de même qu’une faible diversité, les populations étant comme Echinostrephus molaris (la plus abondante) et de essentiellement constituées de l’Holothuriidae Pearso- rares spécimens d’Echinometra mathaei de petite taille. En nothuria graeffei, suivie de plusieurs Stichopodidae. Le revanche, d’importantes populations d’Heterocentrotus ma- nombre d’espèces enregistrées par mission d’observa- millatus (le morphe blanc et rouge ainsi que le violet) et de tion ainsi que l’abondance générale étaient tous deux Phyllacanthus imperialis ont été observées la nuit. Parmi les notablement plus faibles que ceux constatés dans l’atoll autres espèces observées figurent de très rares et petits spé- de Malé et rapportés par Muthiga (2008) (tableau 3). Ce cimens de Diadema savignyi et d’, ainsi résultat est conforme à la rareté globale des organismes que des tests de Fibularia sp. (communément échoués sur benthiques signalée par Andréfouët (2012) pour cet atoll les plages), de Metalia sternalis et de Clypeaster humilis. Les où la plupart des espèces n’ont été repérées qu’une seule ophiures, extrêmement rares et cryptiques, n'étaient repré- fois. Dans cette étude, les Stichopodidae étaient plus pré- sentées que par un très petit nombre d'Ophiothrichidae. sents que des travaux antérieurs ne le laissaient présager, 30 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 tandis que les Holothuriidae affichaient une moindre di- très pustuleux (figure 2E). C’est la première fois que cette versité alors qu’elles prédominent dans l’assemblage des espèce est recensée dans l’atoll de Baa, et la plupart des espèces observées dans la plupart des autres études réali- études récentes n’en font pas état (Muthiga 2008 ; André- sées aux Maldives. Ce résultat tranche avec les précédents fouët 2012). Comme la taxonomie de ce groupe et sa rela- travaux conduits dans l’atoll de Baa (Andréfouët 2012) tion à la morphologie font toujours l’objet d’un débat (By- ainsi que dans l’atoll de Malé (Muthiga 2008), dans celui rne et al. 2010), il n’a pas été possible de procéder à une de Laamu (Reichenbach 1999) et aux Maldives en géné- détermination exacte de cette espèce. Les caractéristiques ral (Joseph 1992 ; James et Manikfan 1994), où les espèces externes de ces animaux évoquent un nouveau morphe dominantes étaient sans conteste Holothuria, Actinopyga ou une sous-espèce, voire une espèce, et des travaux com- et Bohadschia (tableau 3). La prédominance de P. graeffei plémentaires pourraient leur être consacrés. C'est aussi est conforme aux constats d’Andréfouët 2012, mais elle la première fois qu'Actinopyga caerulea est recensée dans est plus marquée dans notre étude avec une occurrence cette région. de 92 %, contre 53,5 % dans l’étude antérieure. Il est sur- prenant que Stichopus chloronotus soit la deuxième espèce La rareté des holothuries peut en partie s’expliquer par par ordre d’abondance (avec sept observations sur trois les caractéristiques de l’écosystème. On a ici affaire à des sites dans notre étude) étant donné qu’elle n’est même îlots peu végétalisés et dépourvus de mangroves, de vrais pas mentionnée dans les travaux d'Andréfouët 2012 (ta- lagons et d’herbiers. Or, c'est dans ces habitats que l'on bleau 3). Au total, 18 espèces ont donc été recensées dans retrouve une grande partie de la biodiversité des holo- l’atoll de Baa au cours des deux études, dont 11 Holothu- thuries. Même les algues charnues étaient très rares, ce riidae, six Stichopodidae et une espèce de Synaptidae. qui explique aussi l’absence quasi totale de tortues vertes qui contraste avec d’importantes populations de tortues Deux individus de Stichopus cf. horrens ont été observés, bonne écaille. Les plus fortes couvertures de coraux durs tous deux d’assez grande taille, uniformément clairs et ont été constatées sur les sites de Hulhudhoo, Voavah et

Tableau 3. Comparaison des résultats actuels et des précédents recensements. Quatre espèces signalées par des villageois (d’après des photos ou des spécimens) n’ont pas étés repérées pendant les missions d’observation.

Prsente Andréfouët Muthiga Reichenbach James Joseph étude (2012) (2008) (1999) (1994) (1992) (Baa atoll) (Baa atoll) (Malé atoll) (Malé & Laamu atolls) (Maldives) (Maldives)

Holothuria atra ** * * * Pearsonothuria graeffei * ** Stichopus chloronotus ** ** Stichopus herrmanni ** Stichopus cf. horrens * Thelenota anax ** * * * Espèce non identifiée * Actinopyga lecanora Observée * * * * Actinopyga mauritiana ** * ** Bohadschia argus * Bohadschia marmorata *** Holothuria edulis Observée * * * Holothuria fuscogilva ** Thelenota ananas Observée * * * * Synaptula sp. Observée * Actinopyga caerulea Observée Actinopyga echinites ** Actinopyga miliaris Observée * * * Bohadschia atra * Bohadschia vitiensis * Holothuria fuscopunctata Observée *** Holothuria hilla * Holothuria leucospilota ** Holothuria nobilis *** Synapta maculata * La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 31

Thiladhoo (tableau 1), et la plus faible à l'est de Landaa Bibliographie Giraavaru (substrat sablonneux et détritique), soit des résultats nettement supérieurs à ceux signalés pour la Ahmed H., Mohamed S. and Saleem M. 1996. Exploita- plupart des récifs des Maldives (Muthiga 2008). tion of reef resources: Beche-de-mer, reef sharks, giant clams, lobsters and others. p. 137–167. In: Cette tendance peut également être associée à la rareté Nickerson D.J. and Maniku M.H. (eds). Workshop relative des invertébrés benthiques diurnes, qui pour- on Integrated Reef Resources Management in the rait être due à une forte prédation comme le suggèrent Maldives, Bay of Bengal Programme. 16–20 March la rareté et le comportement cryptique de la plupart des 1996. Madras, India: Food and Agriculture Organi- animaux benthiques et les signes de prédation sur les zation of the United Nations. gros et solides invertébrés benthiques (particulièrement Andréfouët S. 2012. Biodiversity, resources, and conser- H. mamillatus). vation of Baa atoll (Republic of Maldives): A UN- ESCO Man and Biosphere Reserve. Atoll Research Néanmoins, l’exploitation humaine pourrait elle aussi Bulletin 590. être à l’origine de cette faible diversité et expliquer en par- Byrne M., Rowe F. and Uthicke S. 2010. Molecular tax- tie l’absence d’espèces à forte valeur marchande comme onomy, phylogeny and evolution in the family Thelenota ananas (la cible privilégiée des pêcheurs locaux Stichopodidae (Aspidochirotida: Holothuroidea) d’après James et Manikfan [1994] et la FAO [2013]), une es- based on COI and 16S mitochondrial DNA. Mo- pèce connue dans la région, mais qui n’a pas été observée lecular Phylogenetics and Evolution 56(3):1068–81. durant cette étude. Cela pourrait traduire une activité de pêche intense, même sur les récifs d’îles inhabitées d’une FAO. 2013. Report on the FAO Workshop on sea cucum- réserve de biosphère faiblement peuplée de l’UNESCO. ber fisheries: An ecosystem approach to manage- Selon des informations obtenues sur le terrain, les acti- ment in the Indian Ocean (SCEAM Indian Ocean), vités de transformation des holothuries signalées par Mazizini, Zanzibar, the United Republic of Tanza- la FAO (Joseph 1992) à Hithaadhoo et à Thulhaadhoo nia, 12–16 November 2012. FAO Fisheries and Aq- auraient été interrompues, mais peu d’informations ont uaculture Report. No. 1038. ood and Agriculture pu être recueillies localement sur les activités de pêche Organization of the United Nations. 92 p. actuelles. Quoi qu’il en soit, on sait que la pêche illicite est James D.B. and Manikfan M.A. 1994. Some remarks on chose fréquente dans l’ensemble du pays (Ahmed et al. the present status of beche-de-mer industry of Mal- 1996 ; FAO 2013). dives and its lesson for the Lakshadweep. Bulletin of the Center for Marine Fishery Resources Insti- Cette étude porte le nombre d’espèces d’holothuries en- tute 46:101–105. registrées aux Maldives à environ 25, en fonction de la Jimenez H., Bigot L., Bourmaud C., Chabanet P., Gravier- détermination des observations ambiguës, et à 18 espèces Bonnet N., Hamel and Andréfouët S. 2012. Multi- pour le seul atoll de Baa. taxa coral reef community structure in relation to habitats in the Baa Atoll Man and Biosphere UN- Remerciements ESCO Reserve (Maldives), and implications for its conservation. Journal of Sea Research 72:77–86. L'équipe qui a réalisé cette étude a été accueillie par le Joseph L. 1992. Review of the beche-de-mer (Sea Cucum- bureau d’études marines des Maldives, Seamarc/Marine ber) Fishery in the Maldives. Bay of Bengal Work- Savers, et hébergée au Four Season Resort des Maldives, à ing Paper Vol. 79. 34 p. Landaa Giraavaru. Nous les remercions chaleureusement et adressons nos remerciements particuliers à Thomas Le Kench P.S. 2012. The geomorphology of Maa (south Maal- Berre. Nous exprimons aussi notre gratitude à l’équipe hosmadulu) atoll and its reef islands. Biodiversity, du Marine Discovery Center, en particulier Sébastien Resources, and Conservation of Baa Atoll (Repub- Stradal, Julien Bidet, Alexia Pihier et Ahmed Abdul Rah- lic of Maldives): A UNESCO Man and Biosphere man, pour leur aide, leur soutien, leurs connaissances et Reserve, 590, 1–30. leur amitié, ainsi qu’à Paul Chabre pour les précieuses Muthiga N. 2008. Observations in situ d’holothuries au informations qu’il nous a communiquées d’après ses large de l’atoll de Malé Nord (République des Mal- observations d’holothuries. La supervision scientifique dives). La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la de cette étude par Chantal Conand a été déterminante et CPS 27:33–37. nous lui adressons nos plus chaleureux remerciements. Purcell S.S.W., Samyn Y. and Conand C. 2012. Commer- La précieuse assistance de Gustav Paulay pour la confir- cially important sea cucumbers of the world. FAO mation et la détermination des espèces a également été Species Catalogue for Fishery Purposes No. 6. très appréciée. Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of the United Nations. 223 p. Reichenbach N. 1999. Ecology and fishery biology of Hol- othuria fuscogilva (Echinodermata: Holothuroidea) in the Maldives, Indian Ocean. Bulletin of Marine Science 64(1):103–113. 32 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Induction de la ponte et élevage larvaire chez l’holothurie Holothuria scabra en Malaisie Nurzafirah Mazlan 1,* et Ridzwan Hashim 1

Résumé

La ponte de l’holothurie Holothuria scabra a été induite par stimulation thermique et par adjonction d’algues. La stimu- lation thermique s’est révélée être la méthode la plus efficace. Les larves ont reçu un mélange de micro-algues, dont la concentration était déterminée en fonction de leur croissance. Des larves doliolaria sont apparues onze jours après la fécondation et sont ensuite devenues des pentactula, 18 jours après la fécondation. Un taux de survie de 4,2 % a été enregistré sur les trois épisodes de pontes induites.

Mots-clés : Holothuria scabra, technique d’induction, taux de survie, induction de la ponte par stimulation thermique.

Introduction ont été placés dans des bassins à circulation d’eau conti- nue de 10 m3 remplis d’un substrat sableux. Chaque bac La bêche-de-mer issue de la transformation d’Holothuria contenait entre 30 et 40 animaux nourris de micro-algues, scabra est une source de revenus et de nourriture pour les de macro-algues et de vase et le substrat était remplacé communautés côtières de Malaisie orientale. Toutefois, toutes les deux semaines. une forte surpêche a conduit à une diminution importante des populations naturelles d’holothuries. Cette surexploi- Induction de la ponte tation continue risque d’avoir un impact considérable sur l’écosystème et l’environnement marin dans son ensemble Nous avons utilisé deux méthodes pour induire la ponte : (Conand 2004). Dans de nombreux pays tropicaux, des la stimulation thermique et la stimulation par adjonction recherches sont menées pour déterminer s’il est possible d’algues. La stimulation thermique s’est avérée être la de reconstituer et d’améliorer les stocks d’holothuries meilleure méthode et a été utilisée par la suite. tropicales (Purcell et al. 2011, 2014 ; Eriksson et al. 2014 ; Watanabe et al. 2014). Il est également urgent de recons- Pour la stimulation thermique, 30 à 40 holothuries ont été tituer et d’améliorer les stocks d’holothuries en Malaisie. lavées avec précaution et préparées pour la ponte. La tem- Le présent article porte sur la reproduction et l’élevage pérature du bac de ponte a été augmentée de 3 à 5 °C par de H. scabra, une espèce de grande valeur et largement rapport à la température ambiante de 27–28 °C pour in- répandue, actuellement la seule espèce tropicale pouvant duire la ponte. Les mâles ont émis leur sperme 30 minutes être produite en masse dans des écloseries. Il s’agit du après l’application du traitement thermique, pendant deux premier rapport sur la reproduction par induction de la heures, et ensuite, après une heure, les femelles ont pondu. ponte et l’élevage larvaire de H. scabra en Malaisie. Pour la stimulation par adjonction d’algues, 100 g de Matériel et méthodes spiruline séchée ont été mélangés à de l’eau de mer et dis- sous dans un bac de ponte d’un litre. On a ajouté davan- Collecte des géniteurs tage de spiruline séchée lorsque la concentration n’était pas suffisante pour déclencher la ponte. Trente à quarante En avril 2012, des spécimens Holothuria scabra en bonne holothuries ont été introduites dans le bac, où on les a santé, pesant entre 450 et 750 g, ont été recueillis dans leur laissées pendant une heure pour la ponte. Une fois cette milieu naturel par des plongeurs. Les géniteurs prélevés dernière terminée, les géniteurs ont été replacés dans les dans la zone côtière voisine ont ensuite été soigneuse- bacs qui leur étaient réservés. ment transportés à l’écloserie dans des bacs contenant de l’eau de mer fraîche, alors que ceux qui avaient été Trois essais de ponte ont été réalisés pour chacune des récoltés dans des zones plus éloignées ont été emballés méthodes d’induction de la ponte. Après chaque ponte dans des sacs en polyéthylène alimentés en oxygène et réussie, les œufs ont été recueillis, lavés avec des tamis de en eau de mer fraîche. Une fois à l’écloserie, les géniteurs 75 μm et comptés à l’aide d’un hémocytomètre.

1 Department of Biomedical Science, Kulliyyah of Allied Health Science, International Islamic University Malaysia, Jalan Sultan Ahmad Shah, 25200 Kuantan, Pahang * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 33

Élevage larvaire été placé à l’intérieur des bacs pour éviter que les larves ne soient emportées. Le fond des bacs a été siphonné chaque Les larves ont été stockées dans un bac d’élevage larvaire jour pour éliminer tout sédiment. Les larves ont atteint de 1 000 litres, avec une densité de stockage de 200 à le stade doliolaria après onze jours en bac. Elles ont été 250 larves par litre. Le bac contenait de l’eau de mer fil- transférées dans des bacs d’élevage des juvéniles, dans trée à 1 μm et stérilisée aux UV, maintenue à une tempé- lesquels des plaques de fixation couvertes de feuilles de rature comprise entre 26 et 30 °C. La salinité oscillait entre spiruline avaient été installées. Après sept jours, les larves 32 et 36 ppm et le pH entre 8,0 et 8,2. Chaque jour, on a doliolaria sont passées au stade pentactula et ont com- vérifié les changements intervenus au niveau de la forme, mencé à se nourrir activement de diatomées benthiques, de la taille et du stade de développement des larves, ainsi d’algues mortes, de graminées marines, de poudre d’al- que la présence éventuelle de bactéries et de prédateurs. gues et de spiruline. Une fois qu’elles ont atteint une lon- gueur moyenne de 15 mm, les larves ont été récoltées. On a nourri les larves auricularia avec des micro-algues. La concentration d’algues dans les bacs d’élevage larvaire Résultats a été maintenue à 20 000–35 000 cellules par ml, selon le stade de développement. Un régime de micro-algues est Les résultats présentés dans le tableau 1 et à la figure 1 composé d’Isochrysis galbana, de Pavlova lutheri, de Chae- montrent que l’induction par stimulation thermique a été toceros muelleri, de Nitzschia acicularis et de Navicula sp. la méthode la plus efficace. Elle a permis de produire un total de 1 073 000 œufs issus de trois essais de ponte, alors L’eau des bacs était aérée en permanence et renouvelée que pour l’adjonction d’algues, seul un essai sur trois a chaque jour par circulation continue. Un tamis de 75 μm a abouti, avec 120 000 œufs produits.

Tableau 1. Nombre d’œufs d’Holothuria scabra produits avec les deux méthodes d’induction de la ponte.

Méthode d’induction de la ponte Date Nombre de géniteurs Nombre d’œufs

Stimulation thermique 28-05-2012 30 154 000 Stimulation thermique 01-06-2012 30 385 000 Stimulation thermique 25-07-2012 30 534 000 Adjonction d’algues 28-05-2012 30 0 Adjonction d’algues 01-06-2012 30 0 Adjonction d’algues 25-07-2012 30 120 000

600 000 Induction thermique Adjonction d'algues 500 000

400 000

300 000

Nombre d'œufs Nombre 200 000

100 000

0 25/05/2012 06/01/2012 27/07/2012 Date de ponte

Figure 1. Nombre d’œufs d’Holothuria scabra produits avec les deux méthodes d’induction de la ponte. 34 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Le taux d’éclosion larvaire a été calculé à l’apparition des larves auricularia, environ 48 heures après la féconda- tion. Si l’on tient compte des trois essais de ponte, 92 % (± 2,9) des œufs ont éclos et donné naissance à des larves auricularia. Le stade auricularia correspond au début du stade d’alimentation, au cours duquel les larves ont reçu 20 000 cellules par ml de micro-algues. La quantité de nourriture a ensuite été augmentée en fonction des besoins des larves. Les larves auricularia mesuraient entre 425 et 450 μm. Les larves de stade auricularia inter- médiaire étaient plus grandes, avec des tailles comprises entre 750 et 950 μm (figure 2).

Figure 3. Larves doliolaria d’Holothuria scabra.

Le 18e jour, les larves doliolaria se sont métamorphosées pour atteindre le stade de la larve rampante pentactula, visible sur les plaques de fixation, dans le fond et sur les parois des bacs, où elle cherche un substrat adapté pour se fixer. Les larves pentactula mesurent entre 350 et 750 μm. Pour les larves d’Holothuria scabra, on a constaté un taux de survie de 4,2 % (± 0,5) (figure 4).

Discussion

Figure 2. Larve auricularia d’Holothuria scabra. La reconstitution, le réensemencement et l’amélioration des stocks peuvent être envisagés en cas d’épuisement des stocks d’holothuries sauvages. De nombreux pays ont lancé leur propre programme d’amélioration des stocks Après 11 jours, environ 38 % (± 12,9) des larves auricu- et explorent les potentiels de l’holothurie en milieu tropi- laria se sont transformées pour passer au stade doliola- cal (Purcell et al. 2011, 2014 ; Eriksson et al. 2014 ; Wata- ria, pendant lequel elles sont très actives, cessent de se nabe et al. 2014). De nombreux rapports font état de cas nourrir, se déplacent rapidement et mesurent entre 450 et de reproduction par induction de la ponte et la plupart 650 μm (figure 3). des auteurs affirment que la stimulation thermique est

100

80

60

40 Taux de survie (%) Taux 20

0 024681012141618 Jours

Figure 4. Taux de survie des larves d’Holothuria scabra. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 35 la meilleure méthode pour provoquer la ponte chez les Dans le cadre de notre étude, nous avons constaté une holothuries (Battaglene 1999 ; Battaglene et al. 2002 ; Lax- baisse du taux de survie au fil de la métamorphose. Sur les minarayana 2005 ; Ivy et Giraspy 2006 ; Eeckhaut et al. 92 % de larves écloses, seules 38 % des larves auricularia 2012). Dans le cadre de la présente étude, deux méthodes sont passées au stade doliolaria. Ce taux de survie est tom- ont été comparées et la stimulation thermique a donné bé à 4,2 % au stade pentactula. Dans cette expérience, le de meilleurs résultats que la stimulation par adjonction taux de mortalité a atteint 96 %, de la fécondation des œufs d’algues. Si la stimulation thermique s’est avérée efficace à la formation des larves pentactula. Battaglene (1999) a sur la plupart des espèces d’holothurie, on a constaté mentionné que le taux de mortalité le plus élevé corres- qu’elle l’était moins sur Holothuria fuscogilva (Battaglene pondait au premier nourrissage et à la première fixation. et al. 2002). Cela peut également être lié à la demande alimentaire et à l’induction de la métamorphose larvaire. La présence Il existe d’autres méthodes d’induction de la ponte, de bactéries et de prédateurs dans le bac a également une telles que la projection d'un jet d'eau puissant sur des incidence sur la mortalité et le taux de survie, qui peuvent individus mis à sécher (James 1996 ; Liu et al. 2004 ; en outre être influencés par l’anatomie et la physiologie Wang et Yuan 2004) et l’utilisation d’un mélange de des larves des différentes espèces d’holothuries. gonades comme stimulant (Battaglene 1999). La ponte de Stichopus sp. (holothuries curry) a été induite par sé- Remerciements chage à l’air libre puis stimulation par circulation d’eau de mer continue. Nous tenons à remercier nos collaborateurs Benih Jaya Aqua Sdn Bhd et Beni Giraspy de l’assistance technique Des cas de ponte et d’élevage larvaire réussis de diffé- qu’ils nous ont apportée dans le cadre de ce projet. La rentes espèces d’holothuries ont été mentionnés dans présente étude a été financée par MOSTI Technofund plusieurs études (Battaglene et al. 2002 ; Chen 2003 ; Lax- (subvention n° TF0409E086). minarayana 2005 ; Giraspy et Ivy 2005; Ivy et Giraspy 2006 ; Dabbagh et al. 2011). Cependant, la seule espèce Bibliographie tropicale pouvant être produite en masse dans des éclo- series est H. scabra (Battaglene et Bell 1999). Les premiers Asha P.S. et Muthiah P. 2003. Ponte et élevage de larves de élevages commerciaux d’Holothuria scabra sont apparus l'holothurie Holothuria (Theelothuria) spinifera Theel. en Inde en 1988, mais l’objectif d’amélioration des stocks La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS a aussi été évoqué (James et al. 1988, 1994 ; James 1996). 16:11–15. Cette espèce semble capable de pondre toute l’année sans Battaglene S.C. 1999. Culture of the tropical sea cucumbers que le cycle lunaire ait une quelconque influence (Ong for the purpose of stock restoration and enhance- Che et Gomez 1985 ; Conand 1993). Les holothuries Holo- ment. Naga, the ICLARM Quarterly 22(4):4–11. thuria scabra sont dioïques, très fécondes et émettent libre- Battaglene S.C. and Bell J.D. 1999. Potential of the tropi- ment leurs gamètes dans l’eau. Le cycle de vie des spé- cal Indo-Pacific sea cucumber, Holothuria scabra, for cimens d’élevage commence avec l’apparition des larves stock enhancement. p. 478–490. In: Howell B.R., auricularia du stade initial, 48 heures après la fécondation Moskness E. and Svasand E. (eds). Stock enhance- des œufs. Viennent ensuite les phases intermédiaires et ment and sea ranching. Oxford, United Kingdom: finales, puis, onze jours après la fécondation, les larves Blackwell Science. 606 p. se métamorphosent pour passer au stade doliolaria, pendant lequel elles cessent de se nourrir. Les premières Battaglene S.C., Seymour T.E., Ramofafia C. and Lane larves pentactula apparaissent 18 jours après la féconda- I. 2002. Spawning induction of three tropical sea tion. Les caractéristiques de la croissance larvaire varient cucumbers, Holothuria scabra, Holothuria fuscogilva d’une espèce à l’autre. Ainsi, Holothuria atra et Bohadschia and Actinopyga mauritiana. Aquaculture 207:29–47. marmorata mettent 20 jours à atteindre le stade pentactula Chen J. 2003. Aperçu des méthodes d’aquaculture et de (Laxminarayana 2005), contre 19 jours pour H. lessoni (Ivy mariculture d’holothuries en Chine. La Bêche-de- et Giraspy 2006). mer, Bulletin d'information de la CPS 18:18–23. Conand C. 1993. Reproductive biology of the holothuri- Dans le cadre de la présente étude, on a constaté que le ans from the major communities of the New Cal- taux de survie de H. scabra était de 4,2 % (± 0,5). Purcell edonia Lagoon. Marine Biology 116:439–450. et ses co-auteurs (2012) ont fait état du faible taux de sur- vie des espèces d’holothuries tropicales, tandis qu’Ivy et Conand C. 2004. Present status of world sea cucumber Giraspy (2006) ont signalé que le taux de survie de H. sca- resources and utilization: An international over- bra versicolor était de 1,12 % en 2004 et de 4,53 % en 2005. view. p. 13–23. In: Lovatelli A., Conand C., Purcell Les taux de survie de B. marmorata et H. atra se montaient S., Uthicke S., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds). quant à eux, respectivement, à 12,5 % et à 6,4 % (Laxmi- Advances in sea cucumber aquaculture and man- narayana 2005). Dans quelques études, une corrélation agement. FAO Fisheries Technical Paper. No. 463. entre taux de survie et concentration d’algues est évo- Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of quée. Pour H. lessoni, un bon taux de survie a été obtenu the United Nations. 425 p. avec une concentration d’algues de 4 x 104 cellules par ml Dabbagh A., Sedaghat A.R., Rameshi H. et Kamrani E. 2011. (Ivy et Giraspy 2006), alors que pour Holothuria spinifera, Reproduction et élevage des larves de l’holothurie le taux de survie le plus élevé a été enregistré avec une Holothuria leucospilota Brandt (Holothuria vegabunda Se- concentration d’algues comprise entre 2 et 3 x 104 cellules lenka) dans le nord du golfe persique (Iran). La Bêche- par ml (Asha et Muthiah 2003). de-mer, Bulletin d'information de la CPS 31:35–38. 36 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Eeckhaut I., Lavitra T., Léonet A., Jangoux M. and Raso- Laxminarayana A. 2005. Induction de la ponte et élevage lofonirina R. 2012. In vitro fertilization: A simple, des larves des holothuries Bohadschia marmorata et efficient method for obtaining sea cucumber lar- Holothuria atra à l’île Maurice. La Bêche-de-mer, vae year round. p. 40–49. In: Hair C.A., Pickering Bulletin d'information de la CPS 22:48–52. T.D. and Mills D.J. (eds). Asia-Pacific tropical sea Liu X., Zhu G., Zhao Q., Wang L. and Gu B. X. 2004. Stud- cucumber aquaculture. Proceedings of an inter- ies on hatchery techniques of the sea cucumber national symposium held in Noumea, New Cal- Apostichopus japonicus. p. 287–296. In: Lovatelli A., edonia. ACIAR Proceedings No. 136. Canberra, Conand C., Purcell S., Uthicke S., Hamel J.-F. and Australia: Australian Centre for International Ag- Mercier A. (eds). Advances in Sea Cucumber Aq- ricultural Research. 209 p. uaculture and Management. FAO Fisheries Techni- Eriksson H., Torre-Castro M., Purcell S.W. and Olsson cal Paper. No. 463. Rome, Italy: Food and Agricul- P. 2014. Lessons for resource conservation from ture Organization of the United Nations. 425 p. two contrasting small-scale fisheries. Ambio. Ong Che R.G. and Gomez E.D. 1985. Reproductive perio- doi:10.1007/s13280-014-0552-5. dicity of Holothuria scabra Jaeger at Calatagan, Batan- Giraspy D.A.B. et Ivy G. 2005. Le projet commercial d’éle- gas, Philippines. Asian Marine Biology 2:21–29. vage et de mariculture d’holothuries à Hervey Bay, Purcell S.W., Mercier A., Conand C., Hamel J., Toral- au Queensland : une première pour l’Australie. La Granda M.V., Lovatelli A. and Uthicke S. 2011. Sea Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS cucumber fisheries: Global analysis of stocks, man- 21:29–32. agement measures and drivers of overfishing. Fish Ivy G. et Giraspy D.A.B. 2006. Dans le Queensland (Aus- and Fisheries. doi:10.1111/j.1467-2979.2011.00443.x. tralie), élaboration de techniques de production en Purcell S.W., Hair C.A. and Mills D.J. 2012. Sea cucumber écloserie à grande échelle de Holothuria scabra var. culture, farming and sea ranching in the tropics: versicolor (Conand, 1986), espèce très prisée sur les Progress, problems and opportunities. Aquacul- marchés. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information ture 368/369:68–81. de la CPS 24:28–34. Purcell S. W., Lovatelli A. and Pakoa K. 2014. Constraints James D.B. 1996. Culture of sea cucumber. p. 120–126. In: and solutions for managing Pacific Island sea cu- Rengarajan K. (ed.). Artificial reefs and sea farming cumber fisheries with an ecosystem approach. Ma- technologies. Bulletin of The Central Marine Fish- rine Policy 45:240–250. eries Research Institute, Vol. 48. Wang R. and Yuan C. 2004. Breeding and culture of the James D.B., Rajapandian M.E., Baskar B.K. and Gopi- sea cucumber, Apostichopus japonicus, Lio, 2004. p. nath C.P. 1988. Successful induced spawning 277–286. In: Lovatelli A., Conand C., Purcell S., and rearing of holothurian, Holothuria (Meriatyla) Uthicke S., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds). Ad- scabra, Jaegar at Tuticorin. Marine Fisheries Infor- vances in Sea Cucumber Aquaculture and Man- mation Service, Technical and Extension Service agement. FAO Fisheries Technical Paper. No. 463. 87:30–33. Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of James D.B., Gandhi A.D., Palaniswamy N. and Rodrigo the United Nations. 425 p. J.X. 1994. Hatchery techniques and culture of the Watanabe S., Sumbing J.G. and Lebata-Ramos M.J.H. sea cucumber Holothuria scabra. Cochin, India: Cen- 2014. Growth pattern of the tropical sea cucumber, tral Marine Fisheries Research Institute, Special Holothuria scabra, under captivity. Japan Agricul- publication. No. 57. tural Research Quarterly 48(4):457–464. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 37

Incidence de l’utilisation de pouponnières et du poids des juvéniles de Holothuria scabra relâchés sur leur survie et leur croissance Thierry Lavitra1,*, Gaetan Tsiresy1,2, Richard Rasolofonirina1 et Igor Eeckhaut2

Résumé

À Madagascar, lorsque l'on transfère les juvéniles d’Holothuria scabra (15 g) dans des fermes de grossissement en mer, on constate un fort taux de mortalité pendant les deux premiers mois, principalement en raison de la prédation par les crabes Thalamita crenata. L’utilisation de pouponnières (enclos couverts) est considérée comme la meilleure manière de protéger ces juvéniles des prédateurs. Une expérience a été menée à Tampolove, un site d’élevage d’holothuries présen- tant une très faible densité de prédateurs. L’objectif de l’expérience était de déterminer en quoi l’utilisation de poupon- nières et le poids des juvéniles au moment de leur entrée dans ces dernières influent sur leur survie et leur croissance.

Pour les besoins de l'expérience, huit pouponnières et huit enclos marins de 16 m² chacun ont été construits et des tests ont été réalisés sur quatre groupes de juvéniles de poids différents : 0–5 g, 5–10 g, 10–15 g et 15–20 g. La densité d’éle- vage était de 3 individus par m2. Après trois mois, les taux de survie moyens oscillaient entre 78,00 % et 83,75 %, ce qui montre que le poids des juvéniles relâchés n’a eu aucune incidence sur leur taux de survie. De même, l’utilisation de pouponnières n’a pas entraîné de hausse significative des taux de survie, qui étaient de 87,5 % pour les juvéniles élevés dans les pouponnières et de 78,88 % pour ceux élevés dans les enclos marins.

Cette expérience a montré qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser des pouponnières sur les sites d’élevage présentant une faible densité de prédateurs et que les juvéniles de moins de 5 g peuvent être relâchés sur ces sites.

Introduction et à Andrevo, deux villages proches de Toliara qui avaient perdu de nombreux juvéniles. L’introduction des pou- Le recours à des enclos en filet placés en mer ou dans ponnières a permis de considérablement limiter les pertes des bassins en terre permet d’accroître la production de le premier mois. L’idée était d’empêcher physiquement juvéniles d’holothuries de sable, car le coût des filets et les crabes Thalamita crenata (le plus grand prédateur des du renouvellement de l’eau est relativement bas (Juinio- juvéniles d’holothuries de sable dans la région, Lavitra et Meñez et al. 2012 ; Purcell et al. 2012 ; Purcell et Agudo al. [2009]) d’approcher les juvéniles pendant les premières 2013). Pitt et Duy (2004) ont réalisé des travaux d’avant- semaines de grossissement en mer. Avec ce nouveau sys- garde en élevant des juvéniles d’holothuries de sable tème, 15 jours après l’ensemencement, les taux de sur- dans des enclos en filet placés dans des bassins en terre. vie observés étaient de 79 % pour Sarodrano et de 70 % Ce système de pouponnière comprend deux étapes : pour Andrevo. Malheureusement, ces bons résultats ont les petits juvéniles mesurant quelques millimètres sont conduit les aquaculteurs à délaisser la chasse aux crabes, prélevés des bacs d’écloserie pour être élevés dans des tant dans les pouponnières que dans le reste des enclos, enclos à maille fine jusqu’à ce qu’ils atteignent une taille et les pertes au-delà des premiers jours furent massives. d’environ 20 mm (ce qui correspond à un poids de près d’un gramme). Ils sont ensuite transférés dans des enclos Juinio-Meñez et al. (2012) ont testé différents systèmes d’en- à grosse maille et y grossissent jusqu’à atteindre une taille clos aux Philippines pour élever des juvéniles d’holothu- suffisante pour être stockés dans des bassins ou en mer. ries de sable mesurant entre 4 et 10 mm au départ, sur une période d’un à deux mois. Ils ont constaté un faible taux de Tsiresy et al. (2011) ont été les premiers à utiliser les pou- survie (18 %) chez les juvéniles élevés dans des enclos ins- ponnières (enclos marins couverts d’un filet) pour assurer tallés sur le fond marin. Des taux plus élevés ont été obser- les premiers mois de développement des juvéniles d’Ho- vés avec les enclos flottants (12–44 %), mais les meilleurs lothuria scabra après leur transfert depuis des bassins en taux ont été obtenus avec les enclos mis en place dans les terre dans le sud-ouest de Madagascar. Les juvéniles de bassins en terre (57–73 %). En Nouvelle-Calédonie, Purcell H. scabra sont relâchés dans les pouponnières lorsqu’ils at- et Agudo (2013) ont utilisé des enclos marins à grosse maille teignent un poids de 15 g. Les premiers essais impliquant renfermés dans leur partie supérieure et fixés aux herbiers, l’utilisation de pouponnières ont été réalisés à Sarodrano mais ce dispositif s’est révélé peu fiable. En effet, au vu des

1 IHSM (Institut halieutique et des sciences marines), Université de Toliara-Madagascar, Route du Port Mahavatsy, B.P. 141, Toliara 601, Madagascar 2 Laboratoire de Biologie des Organismes Marins et Biomimétisme, Université de Mons, Mons, Belgique * Auteur à contacter : [email protected] 38 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 faibles taux de croissance mesurés, ce système freinerait la car ils s’enfouissent dans le sédiment pendant la journée. production de juvéniles d’holothuries de sable prévue dans Le taux de survie a été déterminé à la fin de chaque mois le cadre des programmes de reconstitution des stocks. en comptant le nombre de spécimens vivants.

À l’heure actuelle, les résultats des essais de grossisse- Analyse des données ment réalisés dans des pouponnières sont contradictoires. Dans la présente étude, nous avons étudié l’incidence Les tests de Kolmogorov-Smirnov et de Levene ont i) de l’utilisation des pouponnières marines et ii) du poids confirmé la normalité des distributions et l'homogénéité des juvéniles des H. scabra relâchés sur leur survie et leur des variances pour tous les échantillons. Un test ANO- croissance à Tampolove, un site d’élevage de la côte nord- VA à deux facteurs a donc été effectué pour analyser les ouest de Toliara (Madagascar) où les prédateurs que sont données. L’analyse statistique a été réalisée au moyen du les crabes T. crenata sont rares. logiciel SYSTAT v12.

Matériel et méthodes Résultats

Construction des enclos et des pouponnières Survie

Les enclos et les pouponnières ont été construits à marée Après trois mois d’élevage, les taux de survie moyens basse, au printemps. Les enclos étaient constitués de filets étaient de 83,75 % (± 6,18), 88,00 % (± 13,88), 78,00 % en plastique fixés à des pieux en bois espacés de 50 cm (± 17,49) et 83,00 % (± 13,63), respectivement pour les et plantés à une profondeur de 25 cm pour empêcher les quatre catégories de poids (juvéniles relâchés dans des juvéniles de s’échapper (figure 1A). Une pouponnière est pouponnières et dans des enclos ; figure 2). L’analyse sta- un enclos recouvert d’un filet de pêche local (figure 1B). tistique a révélé que le poids des juvéniles de H. scabra au Pour cette expérience, huit enclos et huit pouponnières moment du lâcher n'affectait pas leur survie (P = 0,7640). ont été construits et installés au village de Tampolove. De même, on a constaté que le recours à une pouponnière Chaque enclos / pouponnière avait une surface de 16 m2 n’entraînait pas de hausse des taux de survie (P = 0,226). (4 x 4 m) et une hauteur de 50 cm. Ils étaient de 87,50 % (± 11,42) pour les juvéniles élevés en pouponnière et de 78,88 % (± 12,87) pour ceux élevés en Juvéniles enclos (tous poids confondus ; figure 2).

Les juvéniles d'Holothuria scabra ont été offerts par Mada- Croissance gascar Holothurie Société Anonyme (MHSA) et les tests ont été réalisés sur quatre groupes de poids différents : 0–5 g, Une croissance légèrement exponentielle a été obser- 5–10 g, 10–15 g et 15–20 g. La densité d’élevage était de 3 in- vée pendant les trois mois d’expérience pour les quatre dividus par m2, soit 48 juvéniles par enclos / pouponnière. groupes de juvéniles de H. scabra de poids différents : 0–5 g, 5–10 g, 10–15 g et 15–20 g (figure 3). Comme les Mesures juvéniles relâchés au début de l’expérience étaient de poids différents, les poids moyens variaient également Cette expérience a été réalisée sur une période trois mois après trois mois (P = 0,0001). Ils étaient de 35,25 g (± 4,14), (de juin à septembre 2012). Pour calculer le taux de crois- 48,80 g (± 3,80), 58,32 g (± 5,72) et 62,99 g (± 4,02) pour les sance, on a pesé les juvéniles chaque mois, pendant la nuit, quatre catégories, respectivement (figure 4).

AB

Figure 1. Enclos expérimentaux construits sur un herbier. A : Enclos non couvert ; B : Pouponnière (enclos couvert par un filet de pêche). La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 39

Aucune différence significative n’a été observée entre sablo-vaseux dans des bassins en terre jusqu’à ce qu’ils les juvéniles de H. scabra élevés en pouponnières atteignent une taille de 6–8 cm (soit un poids d’environ (51,66 g ± 13,39) et ceux élevés en enclos (51,01 g ± 10,59) 15 g) (Eeckhaut et al. 2008 ; Lavitra 2008). Ils sont alors (P = 0,794). placés dans des enclos marins. En dessous de cette taille, les prédateurs tels que les crabes et les poissons pour- Discussion raient les attaquer (Battaglene 1999 ; Lavitra 2008 ; Eec- khaut et al. 2008). Par conséquent, le recours à des enclos Dans les fermes d'holothuriculture de Madagascar, les ju- couverts (pouponnières) a été suggéré pour les premiers véniles de H. scabra de 2 cm sont élevés sur des substrats mois du transfert (Tsiresy et al. 2011) afin de protéger les

120 Pouponnière Enclos 100 Moyenne

80

60

40 Taux de survie (%) moyen Taux 20

0 [0−5] [5−10] [10−15] [15−20] Poids des juvéniles (g)

Figure 2. Taux de survie moyens des juvéniles de Holothuria scabra de différents poids après trois mois d’élevage en enclos et en pouponnières.

ABPouponnière 80 Enclos 70 Moyenne 60 50 40 30

Poids moyen (g) moyen Poids 20 10 0 CD 80 70 60 50 40 30

Poids moyen (g) moyen Poids 20 10 0 Juin Juillet Août Septembre Juin Juillet Août Septembre Mois Mois

Figure 3. Croissance moyenne des juvéniles de Holothuria scabra pendant les trois mois d’élevage en enclos et en pouponnières. Les premières pesées ont été réalisées en juin. Poids des individus au moment où ils ont été relâchés : A : 0-5 g ; B : 5-10 g ; C : 10-15 g ; D : 15-20 g. 40 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 juvéniles nouvellement livrés. Notre expérience a mon- Bibliographie tré qu’il n’était pas nécessaire d’utiliser des pouponnières à Tampolove, étant donné que ni le taux de survie, ni Battaglene S.C. 1999. Culture of the tropical sea cucumbers la croissance des juvéniles de H. scabra élevés dans des for the purpose of stock restoration and enhance- enclos marins normaux ne différaient de manière signifi- ment. Naga, the ICLARM Quarterly 22(4):4–11. cative. De même, cette expérience a montré que le poids des juvéniles relâchés n’avait aucune incidence sur leur Eeckhaut I., Lavitra T., Rasolofonirina R., Rabenevanana survie, ce qui laisse penser que les juvéniles de H. scabra M.W., Gestin P.G. et Jangoux M. 2008. Madagascar de moins de 5 g pourraient être relâchés directement dans Holothurie SA : la première entreprise commerciale des enclos marins dans les régions présentant une faible axée sur l’aquaculture des holothuries à Madagas- densité de prédateurs, comme les crabes T. crenata dans le car. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la sud-ouest de Madagascar. Ainsi, le temps nécessaire pour CPS 28:22–23. que les juvéniles de H. scabra atteignent un poids de 15 g Juinio-Meñez M.A., de Peralta G.M., Dumalan R.J.P., dans des bacs externes (à savoir deux à trois mois) peut Edullantes C.M. and Catbagan T.O. 2012. Ocean être ramené à seulement un mois s’ils sont élevés sur des nursery systems for scaling up juvenile sand- sites en mer appropriés dépourvus de prédateurs. Cette fish (Holothuria scabra) production: Ensuring op- expérience nous a appris que la présence de prédateurs portunities for small fishers. p. 57–62. In: Hair est l’un des critères les plus importants dans le choix : C., Pickering T. and Mills D. (eds). Asia-Pacific i) du site d’holothuriculture ; ii) du type d’enclos ; et Tropical Sea Cucumber Aquaculture. ACIAR iii) de la taille des juvéniles relâchés. Proceedings No. 136. Canberra, Australia: Aus- tralian Center for International Agricultural Re- Remerciements search. 210 p.

Les auteurs remercient le Gouvernement malgache du Lavitra T. 2008. Caractérisation, contrôle et optimisation soutien financier qu’il a apporté par l’intermédiaire de des processus impliqués dans le développement l’Agence malgache pour la pêche et l’aquaculture. Ils re- postmétamorphique de l’holothurie comestible mercient également Madagascar Holothurie Société Ano- Holothuria scabra (Jaeger, 1833) (Holothuroïdea: nyme (MHSA) pour l’assistance technique dispensée et Echinodermata). Thèse de Doctorat, Université de les juvéniles de H. scabra fournis à titre gracieux. Mons-Hainaut, Belgique. 166 p.

80 Pouponnières 70 Enclos

60

50

40

30 Poids moyen (g) moyen Poids 20

10

0 [0−5] [5−10] [10−15] [15−20] Poids des juvéniles (g)

Figure 4. Poids moyen des juvéniles de Holothuria scabra de différentes tailles après trois mois d’élevage en enclos et en pouponnières. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 41

Lavitra T., Rasolofonirina R., Jangoux M. et Eeck- Purcell S.W., Hair C. and Mills D. 2012. Sea cucumber cul- haut I. 2009. Problèmes liés à l’élevage aquacole ture, farming and sea ranching in the tropics: Progress, d’Holothuria scabra (Jaeger, 1833). La Bêche-de-mer, problems and opportunities. Aquaculture 368:68–81. Bulletin d'information de la CPS 29:20–30. Purcell S.W. and Agudo N.S. 2013. Optimisation of mesh Pitt R. and Duy N.D.Q. 2004. Breeding and rearing of enclosures for nursery rearing of juvenile sea cu- the sea cucumber Holothuria scabra in Viet Nam. cumbers. PLoS ONE 8(5): e64103. doi:10.1371/jour- p. 333–346. In: Lovatelli A., Conand C., Purcell S., nal.pone.0064103. Uthicke S., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds). Ad- Tsiresy G., Pascal B. et Plotieau T. 2011. Analyse du gros- vances in Sea Cucumber Aquaculture and Man- sissement d’Holothuria scabra exploitée en micro agement. FAO Fisheries Technical Paper No. 463. fermes marines (région Sud-Ouest de Madagas- Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of car). La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la the United Nations. 425 p. CPS 31:17–22. 42 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Évaluation de référence de la biomasse vierge des stocks d’holothuries des îles d’Old Providence et de Santa Catalina, dans l’ouest des Caraïbes Haruko Koike1,*, Paolo Usseglio1,2 et Francisco Ramos2

Résumé

Cet article rend compte des résultats d’une évaluation de référence indépendante réalisée en 2014 dans les îles d’Old Providence et de Santa Catalina (Colombie) en vue d’établir une caractérisation spatialement explicite de l’abondance et de la distribution des communautés d’holothuries.

Nous avons associé les petits pêcheurs locaux aux phases de planification et de collecte des données. Nos résultats témoignent d’une très faible diversité spécifique, Holothuria mexicana étant l’espèce la plus abondante. Les densités de H. mexicana étaient plus élevées dans les habitats sableux et détritiques que dans les herbiers et les zones soumises à une bioturbation. Nous avons repéré des sites de concentration d’holothuries présentant une densité beaucoup plus forte ; ces habitats consistaient en une étroite bande entre les zones d’herbier et les fonds sableux et détritiques. La taille globale des populations a été jugée insuffisante pour soutenir une exploitation, et, dans cette région, tout protocole d’élevage expérimental d’holothuries en mer devra impérativement tenir compte du nombre d’organismes pouvant être prélevés sur les stocks.

Mots clés : récifs coralliens, holothuries, pêche artisanale, bêche-de-mer, services écosystémiques.

Introduction Les habitants d’Old Providence et de Santa Catalina, deux îles situées à près de 300 km des côtes d’Amérique Il y a environ dix ans que l’exploitation des holothuries a centrale dans l’ouest des Caraïbes, ont un lien étroit avec débuté en Colombie, essentiellement de façon illicite, et la le milieu marin. La plupart pratiquent la pêche à temps filière ne fait à ce jour l'objet d'aucune réglementation ou plein ou partiel. Le récent recul des captures provoqué système de déclaration (Toral-Granda 2008 ; Rodriguez et par la surexploitation des stocks a incité les pêcheurs al. 2013). Alors que les espèces exploitées dans les eaux locaux à envisager d’autres activités. Persuadés que les caribéennes de la Colombie sont principalement Isosticho- holothuries se vendent à bon prix sur les marchés asia- pus badionotus, Stichopus herrmanni et Stichopus variegatus tiques, certains considèrent l’élevage marin des holothu- (Rodriguez et al. 2013), les rapports concernant la grande ries comme une option possible. Comme les holothuries Caraïbe font état de six espèces (Toral-Granda 2008). Dans sont des espèces sensibles à la surpêche (Toral-Granda les premiers temps, les pêcheurs étaient recrutés par des 2008), la population locale envisage avec intérêt l'amé- intermédiaires pour ramener autant d’holothuries que nagement de fermes en mer. Cette étude, réalisée avec possible ; à mesure que les densités baissaient, la pêche la collaboration de pêcheurs locaux, visait à dresser un est devenue une activité à la demande rémunérée à envi- état des lieux des stocks naturels d’holothuries en vue de ron 3 dollars des États-Unis kg-1 (Rodriguez et al. 2013). démarrer une filière d'aquaculture marine dans la zone L’absence de réglementation et le manque de connais- d’Old Providence et de Santa Catalina. sances sur les populations d’holothuries ont suscité des inquiétudes sur l’état de la ressource. Comme la demande Méthodes commerciale ne cesse de croître, certains auteurs ont proposé de substituer l’élevage marin des holothuries à Zone d’échantillonnage l’exploitation des stocks sauvages, ce qui permettrait de donner une nouvelle source de revenus aux pêcheurs, de L’archipel de San Andrés, Providencia et Santa Cata- remettre en service les installations aquacoles abandon- lina est situé dans l’ouest des Caraïbes, par 13°17’ N et nées et d’établir des programmes de conservation (Rodri- 81°22’ O, à 190 km du plateau continental d’Amérique guez et al. 2013). centrale, et à 720 km de la Colombie continentale (Geister

1 )LVKHULHV(FRORJ\5HVHDUFK/DE'HSDUWPHQWRI%LRORJ\8QLYHUVLW\RI+DZDL·LDW0ąQRD+RQROXOX+,eWDWV8QLVG·$PpULTXH 2 Proyecto Maricultura, Fish and Farm Coop. Old Providence, Colombie * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 43

1992). Les îles d’Old Providence et de Santa Catalina se entre les différentes strates d’habitat identifiées à l’aide trouvent à 80 km au nord de San Andrés ; Old Providence de l’outil de conception de plans d’échantillonnage du est la deuxième île de l’archipel, avec une superficie de logiciel ArcGIS (Menza et Finnen 2007). Par ailleurs, étant 17 km2, tandis que Santa Catalina est un îlot satellite situé donné la propension des holothuries à se rassembler à 150 mètres au nord d’Old Providence. Les deux îles dans les habitats favorables (Shiell et Knot 2010 ; Young communiquent par une passerelle piétonnière flottante et Chia 1982), il était important d’estimer la taille totale et présentent 32 km de récifs coralliens qui s’étendent du des populations en incluant les sites de concentration nord au sud-est. Le récif- barrière compte de multiples qui peuvent abriter de nombreux individus. Comme ces pâtés récifaux, des fonds sableux et des zones d’herbier sites résultent souvent d’une combinaison de multiples (Gómez-López et al. 2012) (figure 1). facteurs environnementaux, ils risquent peu d’être inclus dans les études fondées sur des échantillons aléatoires. Nous avons donc fait appel aux pêcheurs locaux et à leur connaissance du milieu pour identifier trois sites d’échan- 81.44° O 81.36° O tillonnage présentant de fortes densités de population. Dans le reste de ce document, ils sont appelés « sites CEL », pour connaissances écologiques locales (figure 1). 13.52° N 13.52°

^

Tableau 1. Espèces d’holothuries signalées pour l’île d’Old Providence (Borrero-Perez et al. 2012).

Espèce

13.44° N 13.44° Actinopyga agassizii Holothuria (Cystipus) cubana Holothuria (Halodeima) floridana Holothuria (Halodeima) grisea Holothuria (Halodeima) mexicana Holothuria (Thymiosycia) thomasi Isostichopus badionotus 13.36° N 13.36° Échantillonnage CEL Random Habitat Sable exposé à la bioturbation Sable et débris Herbier 0 5 Méthode d’étude km La diversité et l’abondance des holothuries d’Old Pro- Figure 1. Emplacement de l’île d’Old Providence et points vidence et de Santa Catalina ont été estimées au moyen d’échantillonnage autour de l’île. Petit encadré : Golfe du de comptages à vue en plongée le long de transects. Sur Mexique et région de la mer des Caraïbes (World Vector chaque site d’échantillonnage, deux plongeurs ont par- Shorelines, National Imagery and Mapping Agency, couru un transect couloir de deux mètres de large pen- anciennement Defense Mapping Agency des États-Unis dant vingt minutes et dans une direction aléatoire, tout en d’Amérique). veillant à demeurer dans le même habitat. La profondeur d’échantillonnage a été limitée à 20 mètres pour des rai- sons de logistique et de sécurité. Pour chaque transect, Plan de l’étude et participation des communautés les plongeurs ont enregistré les espèces d’holothuries repérées, et mesuré la longueur totale et le diamètre des Cette étude a été pilotée par les communautés ; les pê- individus, au centimètre près, à l’aide d’un mètre-ruban cheurs ont été associés à toutes ses étapes et nous avons en fibre de verre. La longueur des transects a été calcu- privilégié une démarche fondée sur la collaboration plu- lée avec un GPS (système mondial de localisation) tracté tôt que sur la coopération (Yochum et al. 2011). réglé en mode poursuite, avec activation du système de renforcement à couverture étendue (WAAS) pour une Neuf espèces d’holothuries (tableau 1) ont été réperto- meilleure précision. Le problème de la variabilité inter- riées dans la région par Borrero-Pérez et al. (2012). Elles observateurs a été contourné en organisant des séances sont principalement réparties dans des habitats sableux préalables de formation pour expliquer les méthodes bioperturbés, des fonds sableux et détritiques et des her- d’échantillonnage et l’identification des espèces. Comme biers. Sur la base des cartes d’habitat fournies par CORA- des pêcheurs locaux étaient inclus dans les équipes, LINA, l’agence locale de protection de l’environnement, aucun effort n’a été épargné pour s’assurer que tous nous avons élaboré un plan d'échantillonnage aléatoire les plongeurs étaient conscients des limites des zones stratifié, axé sur ces habitats. L’évaluation de référence d’échantillonnage et ne comptabilisaient pas les holothu- portait au total sur 40 sites d’échantillonnage répartis ries repérées hors des transects. 44 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Comparaison des tailles le progiciel ggplot2 a été utilisé pour le traçage (Wickham 2009) ; la manipulation des données a été effectuée avec Les différences significatives entre les longueurs et les le progiciel reshape2 (Wickham 2007) ; le modèle linéaire largeurs moyennes des holothuries observées dans les généralisé de la distribution binomiale négative a été sites d’échantillonnage aléatoires et les sites CEL ont été ajusté au moyen du progiciel pscl (Jackman et al. 2012) ; évaluées au moyen d’une analyse de variance suivie d’un et le test du rapport de vraisemblance a été réalisé à l’aide test HSD de Tukey. du progiciel lmtest (Hothorn et al. 2010).

Calcul des densités et estimation de la taille des Résultats populations Bien que neuf espèces d’holothuries aient été décrites Afin d’estimer la densité des holothuries, nous avons pour Old Providence et Santa Catalina (Borrero-Pérez et utilisé la méthode de sélection de modèles qui nous per- al. 2012 ; tableau 1), nous n’en avons repéré que deux dans mettait de tenir compte de la distribution irrégulière des notre évaluation de référence. L’espèce la plus courante holothuries (Campagna et Hand 1999). Nous avons créé était Holothuria mexicana, suivie par Holothuria thomasi qui un ensemble de modèles linéaires généralisés prenant a été occasionnellement observée. La densité globale était pour hypothèse quatre distributions : normale, loi de faible, avec 82 holothuries dénombrées au total. Nous Poisson, binomiale négative et à inflation en zéro. Nous avons repéré 43 holothuries (41 spécimens de H. mexicana avons aussi testé l’influence des strates d’habitat sur la et 2 de H. thomasi) sur les transects aléatoirement tracés densité. Au total, huit modèles ont été établis (tableau 2). (n = 40), et 39 spécimens de H. mexicana sur les transects CEL (n = 3). Comme H. thomasi était peu abondante, nous La sélection de modèles était fondée sur le critère d’infor- avons axé toutes les autres analyses sur H. mexicana. mation d’Akaike (AIC) qui permet de calculer la proba- bilité log du modèle tout en affectant une pénalité pour Répartition des tailles le nombre de paramètres (Akaike 1973). Nous avons re- tenu le meilleur modèle explicatif fondé sur le plus petit Les holothuries H. mexicana observées à Old Providence nombre de paramètres au sein de deux unités présentant et à Santa Catalina mesuraient entre 15,0 et 46,5 cm, avec le score AIC le plus faible (Burnham et Anderson 2002). une moyenne de 29,66 cm ± 0,75 ÉT, pour une largeur al- Nous avons aussi appliqué le test de rapport de vrai- lant de 2 à 15 cm, avec une moyenne de 8,25 cm ± 0,23 ÉT. semblance aux modèles concurrents présentant le meil- Les différences de longueur étaient significatives d’un leur ajustement pour mettre en évidence les différences habitat à l’autre (P < 0,01), avec des individus nettement significatives. Cette démarche a été appliquée aux sites plus grands dans les habitats sableux et détritiques et d’échantillonnage aléatoires comme aux sites CEL. dans ceux exposés à la bioturbation que dans les habitats CEL et les herbiers (P < 0,05 avec le test HSD de Tukey) La taille totale des populations a été calculée en multi- (figure 2). pliant la densité résultante estimée pour chaque habitat par la superficie de l’habitat. Pour les sites CEL, les super- Évaluation de référence des stocks d’holothuries ficies étaient données par les cartes de l’habitat benthique. La superficie totale a été calculée en délimitant le péri- La procédure de sélection a montré que le modèle 7 (dis- mètre des habitats sur une photographie aérienne numé- tribution binomiale négative tenant compte de l’habitat) risée et géoréférencée au moyen du logiciel ArcGIS 10.2. était le plus parcimonieux, avec le plus faible score AIC (tableau 2). Pour chaque strate d’habitat, la densité esti- Toutes les analyses statistiques ont été réalisées avec le lo- mée à l’aide du modèle 7 se présente telle qu’énumérée : giciel en libre accès R (R Development Core Team 2009) ; les zones sableuses et détritiques représentaient la densité

Tableau 2. Types de modèle utilisés pour tester les effets de l’habitat et les distributions. dl = degré de liberté ; AIC = critère d’information d’Akaike.

Modèle Effet de l'habitat Distribution dl Score AIC

1 Non Normale 2 245,94 2 Non Loi de Poisson 1 274,86 3 Non Binomiale négative 2 151,55 4 Non Normale à inflation en zéro 2 210,52 5 Oui Normale 5 210,91 6 Oui Loi de Poisson 4 153,86 7 Oui Binomiale négative 5 136,96 8 Oui Normale à inflation en zéro 8 137,54 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 45 la plus élevée avec 6,38 ind. ha-1 ± 3,01 ÉT, suivies des her- Évaluation des sites de concentration biers avec 1,56 ind. ha-1 ± 0,66 ÉT, et des habitats sableux soumis à la bioturbation, avec 1,47 ind. ha-1 ± 0,63 ÉT (ta- Les sites de concentration — que les pêcheurs qualifient bleau 3). Les zones sableuses et détritiques présentaient de « bons sites » — étaient systématiquement situés entre une densité supérieure (bien que non significative) à celle les herbiers et les zones sableuses et détritiques, à proxi- constatée dans les deux autres habitats (tableau 3). mité de la côte est d’Old Providence (figure 1). Ils consis-

30

Mesures Longueur

20 Largeur Mesures (cm)

10

Sable et débris Sable exposé à la bioturbation CEL Herbier n = 21 n = 10 n = 39 n = 11 Strate d’habitat

Figure 2. Longueur et largeur (cm) de l’holothurie Holothuria mexicana pour chaque strate d’habitat. Les encadrés illustrent la limite de l’intervalle de confiance de 95 %. La taille de l’échantillon pour chaque strate d’habitat est indiquée en bas.

Tableau 3. Informations sur les différents types d’habitat étudiés, notamment : nombre de transects, densité estimée avec un intervalle de confiance (IC) de 95 %, superficie de chaque strate d’habitat, et taille estimée des populations. Des données sont également fournies pour les sites de concentration (notés CEL).

Habitat n Densité (ind. ha-1) IC 95% Superficie (ha) Taille de la population

CEL 3 32,99 17,97–60,56 29,59 976 Sable et débris 8 6,38 2,53–16,07 1 183,14 7 550 Herbier 16 1,56 0,68–3,59 1 563,78 2 444 Sables exposé à la bioturbation 16 1,47 0,63–3,43 5 405,30 7 928 46 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 taient en d'étroites bandes de trois à six mètres de large, et individus pour les habitats sableux et détritiques ; 2 444 ne représentaient que 0,3 % de la superficie dans les deux ± 1 037 ÉT individus pour les herbiers ; 7 928 ± 3 431 ÉT îles (tableau 3). individus pour les habitats sableux soumis à la bio- turbation ; et 976 ± 302 ÉT individus pour les sites CEL Le modèle offrant le meilleur ajustement montre que les (concentration) (tableau 3). En conséquence, les îles d’Old données provenant des sites CEL ont une distribution Providence et de Santa Catalina abritent une popula- binomiale négative. La densité estimée y était signifi- tion totale estimée à 18 898 individus, avec un intervalle cativement plus élevée que dans les sites aléatoirement de confiance de 95 %, soit 7 994–44 959. L’intervalle de sélectionnés, avec une densité moyenne de 32,99 ind. ha-1 confiance a été calculé en tenant compte de l’écart-type ± 10,22 ÉT (figure 3). pour chaque strate d’habitat.

Taille totale des populations d’Old Providence et de Discussion Santa Catalina À Old Providence et à Santa Catalina, H. mexicana présen- La densité totale estimée de chaque habitat a été calcu- tait une distribution très irrégulière, avec d’évidents sites lée comme étant la densité estimée par strate d’habitat, de concentration au nord de l’île d’Old Providence, le long multipliée par la superficie. La taille de la population de d’habitats en bande très étroite, logés entre les herbiers et chaque habitat se présente comme suit : 7 550 ± 3 558 ÉT les zones sableuses et détritiques. Même en tenant compte

60

40

20 Densité estimée moyenne Densité

0 CEL Sable et débris Herbier Sable exposé à la bioturbation Habitat

Figure 3. Densité estimée de l’holothurie Holothuria mexicana pour chaque strate de l’étude dans les îles d’Old Providencia et de Santa Catalina.

Tableau 4. Densités estimées de l’holothurie Holothuria mexicana dans plusieurs lieux des Caraïbes.

Pays Année Abondance (ind. ha-1) Référence

Panama, Bocas del Toro 2000 161,8 Guzman and Guevara (2002) Venezuela, Isla de Cubagua 2008 7,7 Trigliafico et al. (2011) Jamaica 1981 70 Hammond (1981) Venezuela 1998 110–210 Rodríguez-Milliet et Pauls (1998) Venezuela 1999 13 500 Bitter (1999) Venezuela, Isla de Cubagua 1987 7 000–9 400 Sambrano (1987) Venezuela 1988 1 400–19 700 Bitter (1988) Venezuela 1997 9 400 Conde (1997) Cuba 2006 0–17 000 Alfonso-Hernandez (2006) La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 47 de sa distribution binomiale négative, l’espèce était pré- sance de l’état des stocks locaux. Sur la base de nos résul- sente à de faibles densités par rapport à d’autres sites des tats, nous formulons les recommandations ci-après. Caraïbes (tableau 4). D'après les différences de densité et de taille entre les strates d’habitat (figures 2 et 3), nous pou- ‡ /·H[SORLWDWLRQ GHV VWRFNV QDWXUHOV GH O·KRORWKXULH H. vons interpréter que les herbiers abritaient probablement mexicana ne doit pas être envisagée dans les îles d’Old les individus les plus jeunes (d’où les tailles nettement Providence et de Santa Catalina. plus petites observées chez les individus présents dans les ‡ /HVSUpOqYHPHQWVDQQXHOVGHH. mexicana dans le mi- sites CEL et les strates d’herbier), bien qu’aucun juvénile lieu naturel en vue d’activités aquacoles devront être n’ait été repéré pendant les missions d’observation. limités à 944 individus. ‡ 6·LO HVW HQYLVDJp G·pWDEOLU GHV pOHYDJHV PDULQV GHV L’estimation de l’abondance totale des holothuries à Old mesures devront être prises pour prévenir le bracon- Providence et à Santa Catalina (tant du point de vue de nage d’animaux sauvages et leur commercialisation la richesse spécifique que de la taille du stock) exclut la en tant qu'animaux d’élevage. possibilité d’une exploitation commerciale des stocks ‡ %LHQTXHOHVVLWHVGHFRQFHQWUDWLRQSXLVVHQWFRQVWLWXHU naturels. Dans le domaine de la pêche, la règle générale une source de géniteurs, ils ne doivent pas être épui- est qu’il faut une biomasse vierge de 20 % pour garantir sés. Les prélèvements pourraient plutôt être effectués une exploitation viable (Restrepo et al. 1998). Dans le cas dans les zones de faible densité, de manière à protéger des holothuries, il a aussi été démontré que l’exploita- les sites de concentration et à assurer un approvision- tion d’une biomasse vierge de seulement 5 % a conduit nement suffisant en larves. à l’épuisement des stocks (Uthicke 2004). Si nous appli- quons ces principes à la taille estimée des populations ac- Remerciements tuelles, une pêche durable impliquerait de limiter les pré- lèvements annuels à seulement 944 holothuries, à savoir Nous souhaitons témoigner notre profonde gratitude aux un chiffre trop faible pour assurer la viabilité économique pêcheurs d’Old Providence et de Santa Catalina qui ont d’une exploitation des stocks naturels. pris part à tous les aspects de ce projet et l’ont considé- rablement amélioré en partageant leurs connaissances Malgré sa petite taille, cette population pourrait toutefois avec nous. Nous remercions aussi le personnel de Fish supporter la capture de géniteurs en vue de l’établisse- and Farm Cooperative Enterprise et de Sony dive shop, ment de fermes aquacoles en mer. L’objectif serait alors de en particulier Rosana Torres et June Marie Mow. Nous prélever des holothuries adultes dans le stock sauvage et remercions l’agence CORALINA du soutien logistique de les conditionner en bacs dans le but de recueillir des qu’elle nous a apporté. Nos remerciements vont éga- œufs viables, un aspect déterminant pour l’élevage (Mor- lement à Julio Andrade pour l’aide qu’il nous a fournie gan 2000). Or, les larves planctoniques d’holothuries ont sur le terrain, ainsi qu’à Laura Rodriguez pour son as- un très faible taux de survie, et l’on estime parfois qu’un sistance lors des recherches pratiques et documentaires. seul individu de la cohorte parvient au stade de juvénile Ce projet s’inscrit dans le cadre de l’initiative publique (Purcell et al. 2012), d’où une relation négative entre la Plan San Andrés, et a été financé au titre du programme densité de stockage des larves et la survie jusqu’à la fixa- Fase I de un Proyecto de Ciencia, Tecnología e Innovación tion (Battaglene et Bell 2004). De plus, ce faible taux de para el desarrollo de técnicas de cultivo de especies mari- survie au stade larvaire est suivi d’une prédation impor- nas a escala de laboratorio y de planta piloto con fines tante des juvéniles par les poissons carnivores, les oiseaux, comerciales, accord de coopération n° 9677-20-822-2013 les tortues, les étoiles de mer, les crabes, les gastéropodes entre Fish and Farm Cooperative Enterprise et Unidad et autres invertébrés (Dance et al. 2003 ; Francour 1997). nacional para la gestion del riesgo de desastres — Fondo Ce problème se pose quand les enclos sont aménagés nacional de gestión del riesgo de desastres, Presidencia en pleine eau, où il est difficile de se prémunir contre de la República. ces prédateurs (Purcell et al. 2012). Le prélèvement d’un stock de géniteurs assez nombreux pour garantir l’appro- Bibliographie visionnement en larves d’un élevage aquacole risquerait donc de réduire le nombre de larves disponibles pour la Akaike H. 1973. Information theory as an extension of population sauvage. Toute décision concernant le nombre the maximum likelihood principle. p. 267–281. In: d’adultes prélevés dans le milieu naturel devra donc Petrov B.N. and Csaki F. (eds). Second Internation- être prise avec grande prudence. Par ailleurs, les sites de al Symposium on Information Theory. Budapest, concentration où les densités sont beaucoup plus fortes Hungary: Akademiai Kiado. (figure 3) risquent d’être davantage ciblés dès qu’il y aura Alfonso-Hernandez I. 2006. National Report Cuba. p. une demande commerciale, car la pêche y est bien plus 141–144. In: Bruckner A.W. (ed.). Proceedings of facile et rapide. L’épuisement de ces sites à forte densité the CITES workshop on the conservation of sea cu- pourrait avoir des effets préjudiciables sur les populations cumbers in the families Holothuriidae and Sticho- d’holothuries d’Old Providence et de Santa Catalina, voire podidae. 1–3 March 2004. Silver Spring, United provoquer un effet Allee (Uthicke 2004), et il faudra abso- States of America: NOAA Technical Memorandum lument en tenir compte si la pêche venait à être autorisée. NMFS-OPR 34. 244 p. Battaglene S.C. and Bell J.D. 2004. The restocking of sea Étant donné la demande toujours plus forte de bêche-de- cucumbers in the pacific islands. p. 109–132. In: mer, il est inévitable que l’exploitation des holothuries Bartley D.M. and Leber K.L. (eds). Case Studies in soit considérée comme une nouvelle source de revenus. Marine Ranching. FAO Fisheries Technical Paper Toutefois, la mise à l'étude de cette possibilité économique No. 429. Rome, Italy: Food and Agriculture Organi- doit impérativement s’appuyer sur une bonne connais- zation from the United Nations. 213 p. 48 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

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Nouvelles avancées sur la reproduction spontanée en captivité et les conditions d’élevage des holothuries de la Caraïbe Stichopus sp. Vianys Agudelo1, * et Adriana Rodríguez1

Résumé

On sait peu de choses sur le comportement reproducteur en conditions contrôlées de laboratoire de l’holothurie Sti- chopus sp., une espèce vivant dans les eaux caribéennes de la Colombie. En 2012 et 2013, de juillet à octobre, plusieurs épisodes spontanés de ponte et d’émission de sperme se sont produits au laboratoire d'aquaculture de l'Université de Magdalena (Santa Marta, Colombie). Le nombre moyen d’œufs fécondés à atteindre la fin du stade auricularia fut de 48,4 x 106. Cette étude décrit les conditions de manipulation, la qualité de l’eau et les limites relatives à la reproduction et à l'élevage larvaire.

Mots clés : reproduction, phase lunaire, ovocyte, Stichopus.

Introduction 2000 ; Hamel et al. 2001 ; Battaglene et al. 2002 ; Asha and Muthiah 2008 ; Hu et al. 2013). Les pays asiatiques se livrent à une production maîtrisée d’holothuries dans le cadre de programmes de recons- Malgré les nombreux documents existants, très peu d’in- titution des stocks, de conservation et de fabrication de formations sont disponibles sur le comportement repro- produits de santé naturels (Sicuro et Levine 2011). De leur ducteur et les techniques d’induction de la ponte chez les côté, les pays d’Amérique du Sud commencent à mener holothuries de la Caraïbe. Cette étude décrit brièvement des études sur l'élevage d'espèces d’importance commer- la reproduction et le développement larvaire de Stichopus ciale (Guzman et al. 2003 ; Guisado et al. 2012 ; Rodríguez sp., une espèce peuplant les eaux caribéennes de la Colom- et al. 2013 ; Zacarías-Soto et al. 2013). En Colombie, très bie, et relève les problèmes rencontrés lors de son élevage. peu d’informations sont disponibles sur les espèces d’ho- lothuries, leur biologie, leur taxonomie, la dynamique de Matériel et méthodes leurs populations, la gestion des pêches et leur élevage (Caycedo 1978 ; Borrero-Pérez et al. 2004 ; Rodríguez et Collecte des animaux al. 2013). Pendant la saison de reproduction (de juillet à octobre) On a constaté que la reproduction naturelle des holothu- de 2012 et 2013, deux cents Stichopus sp. ont été ache- ries était possible en conditions contrôlées. À cet égard, tées à des petits pêcheurs de la baie de Rodadero à Santa plusieurs auteurs présentent des résultats probants (Sicu- Marta, en Colombie (11°13'22,73" N–74°13´32,59" O). Les ro et Levine 2011 ; Soliman et al. 2013 ; Zacarías-Soto et holothuries ont été rapidement transportées au labora- al. 2013), tandis que d’autres ont obtenu des œufs par des toire d’aquaculture de l’Université du Magdalena, dans moyens artificiels, tels que les hormones, les substances des bacs en plastique de 20 litres remplis d’eau de mer. chimiques, la stimulation thermique, la fécondation in Elles ont été pesées avec une balance analytique Ohaus vitro, la photopériode ou l’apport contrôlé de nourriture (0,001 g) et leur longueur totale a été mesurée à l’aide (Ong Che and Gomez 1985 ; Hamel et al. 1993 ; Conand d’un ichtyomètre standard (en mm). Ensuite, les holo- and Byrne 1993 ; Morgan 2000 ; Ramofafia et al. 2000 ; thuries ont eu la possibilité de s’adapter progressivement Fajardo-León et al. 2008 ; Eeckhaut et al. 2012). C’est la aux conditions d’une cuve de 550 litres remplie d’eau de raison pour laquelle on considère que l’environnement et mer ambiante (température de 26 °C, pH de 7,8), conser- les substances chimiques sont des facteurs déterminants vée au laboratoire d’aquaculture. pour la reproduction contrôlée de ces organismes marins. Par ailleurs, plusieurs auteurs ont démontré l’influence Gestion du stock de géniteurs des phases lunaires lorsque les variables environnemen- tales n’induisaient pas de réaction chez des organismes Après cette période d’acclimatation en laboratoire, les placés dans des environnements contrôlés (Mercier et al. animaux ont été séparés de manière aléatoire et placés à

1 Aquaculture Laboratory, Group of Research and Development Technology in Aquaculture, Fisheries Engineering Program, Univer- sidad del Magdalena, Cra 32 No. 22–08, Santa Marta, Colombie * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 51 une densité de 0,1 ind. l-1 dans six bacs circulaires en plas- de Spirulina, Artemia-International®), tandis qu’en 2013, tique de 550 litres, répartis dans un système de recircu- ils ont été nourris avec un mélange de sédiments marins lation. Les bacs ont été remplis d’eau de mer stérilisée, (lavés et séchés au préalable) et de poudre de Spirulina à équipés d’un filtre biologique et aérés à l’aide de diffu- raison de 0,5 g par 100 g de sédiments. seurs d’air. La température de l’eau a été maintenue à 26,68 °C (ÉT de ± 0,79). Les holothuries ont été exposées à Larves une photopériode de 12 heures de lumière pour 12 heures d’obscurité grâce à des plafonniers fluorescents. Les fèces Deux protocoles d’alimentation ont été testés. Pendant ont été siphonnées chaque jour et la salinité de l’eau ajus- la période de ponte de 2012, les larves ont été nourries tée si nécessaire (figure 1). avec de la poudre d’algues, Spirulina (Artemia-Interna- tional®), tandis qu’en 2013, on a utilisé des algues vivantes (Chlorella sp.) à une concentration de 5 000 cellules ml-1.

Suivi des conditions d’élevage

En 2012, les paramètres de qualité de l’eau ont été contrôlés chaque jour avec un multiparamètre HandyLab : tempéra- ture de 25,14 °C ± 2,02, pH de 6,96 ± 0,13, salinité de 36,4 g l-1 ± 0,27 et concentra- tion en oxygène dissous de 6,40 mg l-1 ± 0,16. En 2013, ces paramètres ont été modifiés afin d’améliorer la survie des larves : température de 28,51 °C ± 0,17, pH de 8,18 ± 0,07, salinité de 36,96 g l-1 ± 0,42 et concentration en oxygène dissous de 5,56 mg l-1 ± 0,28. La photo- période se composait de 12 heures de lumière et 12 heures d’obscurité. L’aéra- tion était assurée par des ventilateurs (Hitachi Iced Série G). Figure 1. Géniteurs de Stichopus sp. Pendant l’incubation, un siphonnage de l’aquarium a été effectué chaque jour Gestion des œufs et des larves afin d’éviter l’apparition de parasites. On a également remplacé 30 % de l’eau de mer tous les Les géniteurs ont été contrôlés en permanence afin d'ob- jours jusqu’au stade blastula, puis 20 % après le début du server leur comportement reproducteur, tel qu'une éléva- stade auricularia. tion de l'extrémité antérieure, un gonopore proéminent ou une érection du tégument. Résultats et discussion

Une fois la présence de gamètes observée dans les bacs Ponte des holothuries d’élevage, ceux-ci ont été enlevés par siphonnage et on a remplacé 80 % de l’eau des bacs. Les œufs fécondés De juillet à octobre 2012 et d’août à octobre 2013, on a ont été lavés avec de l’eau de mer filtrée, stérilisés, puis observé seize pontes et émissions de gamètes spontanées. sélectionnés à l’aide d’un maillage de 60 microns. Pour Les épisodes de reproduction se sont présentés dans les estimer le nombre total d’œufs, des échantillons ont été deux semaines qui ont suivi l’arrivée des holothuries au prélevés à l'aide d'une aliquote de 1 ml. Ensuite, ils ont laboratoire, pendant la nuit et à l’aube. Les individus ont été placés en incubation dans un aquarium de 50 litres, présenté un comportement normal. Les holothuries ont légèrement aéré à température ambiante (26 °C). Pendant parcouru les parois des bacs avec un pore génital proé- les deux premiers jours de développement embryon- minent et visible (figure 2). Certains auteurs ont identifié naire, on a prélevé des échantillons toutes les 30 minutes le comportement et l’état du pore génital comme afin d'observer les transformations morphologiques au étant des indicateurs de reproduction de certaines es- microscope optique (Carl Zeiss, Modelo Primo Star) et on pèces telles que Holothuria scabra, Actinopyga mauritiana a pris des photos avec une caméra vidéo et un appareil et Stichopus sp. (Ramofafia et al. 2003 ; Hu et al. 2010). photo numérique (Axiocam ERC 5S). Comme les femelles et les mâles ont été placés dans le même bac, la fécondation s’est produite librement et la Nourrissage quantification a posteriori a permis de chiffrer la produc- tion moyenne totale à 48,4 x 106 ovocytes fécondés. Stock de géniteurs Dans cette étude, il semble que la nouvelle lune ait exercé À partir du troisième jour suivant leur arrivée au labo- une influence considérable sur la reproduction des holo- ratoire, les géniteurs ont été alimentés comme suit : en thuries. Le pic de reproduction se situe en septembre 2012, 2012, ils ont reçu une poudre de microalgues (5 g 100 l-1 pendant la phase de nouvelle lune (tableau 1). Durant 52 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 cette période, une ponte naturelle a été observée pendant Larviculture trois jours consécutifs (figure 3). Ces épisodes ont permis d’enregistrer le plus grand nombre d’ovocytes fécondés Le développement embryonnaire de Stichopus sp. est par mois (17,1 x 106). Le comportement reproducteur de représenté dans la figure 4 et le tableau 2. En 2012, une cette espèce est similaire à celui qui a été signalé pour fois que les larves ont atteint le stade initial d’auricula- Isostichopus badionotus et qui se caractérise par des pics de ria, elles n’ont pas poursuivi leur métamorphose et une reproduction entre juillet et novembre, d’après plusieurs mortalité de 100 % a été constatée après un mois. Par ail- auteurs (Guzman et al. 2003 ; Foglietta et al. 2004 ; Zaca- leurs, durant cette période, les larves n’ont pas changé de rias-Soto et al. 2013). stade. En 2013, dix jours après la fécondation, les larves se sont bien développées jusqu’au stade final d’auricu- laria (figure 4), mais une infestation par les copépodes et les protozoaires a provoqué une mortalité de 100 %. Par conséquent, pendant l’élevage larvaire, on a enregistré

Tableau 1. Production d’œufs fécondés de Stichopus sp. en conditions de laboratoire.

Phase lunaire Date de ponte Œufs fécondés x106

Le dernier quartier juill.-10-2012 1,2

août-20-2012 4,0 sept.-17-2012 12,3 Nouvelle lune sept.-18-2012 2,1 sept.-20-2012 3,3

Lune décroissante oct.-10-2012 5,3

août-6-2013 2,4 août-7-2013 1,5 août-8-2013 1,7 août-9-2013 1,8 sept.-5-2013 2,1 Figure 2. Adulte mature présentant Nouvelle lune sept.-6-2013 1,8 un pore génital proéminent (flèche). sept.-7-2013 3,2 oct.-5-2013 3,0 Dans le cadre d’autres études, on a constaté que le cycle oct.-6-2013 1,2 lunaire jouait un rôle majeur dans la reproduction de cer- oct.-7-2013 1,5 taines espèces, telles que Stichopus sp., H. scabra, I. fuscus et I. badionotus, ce qui a permis de prévoir les épisodes de reproduction en fonction de ce cycle (Babcock et al. 1992 ; Mercier et al. 2000). Par conséquent, cette influence est probablement liée aux rythmes endogènes de chaque espèce. La ponte de Stichopus sp. se produit entre la pre- mière et la deuxième nuit suivant la nouvelle lune entre mai et août, que ce soit en captivité ou en milieu naturel. Cette caractéristique a également été référencée pour les espèces A. japonicus, H. scabra, I. fuscus, Polycheira rufes- cens, Pearsonothuria graeffei, S. herrmanni (Kubota et Toma- ri 1998 ; Morgan 2000 ; Hamel et al. 2002, 2003 ; Mercier et al. 2007 ; Hu et al. 2013 ; Soliman et al. 2013), et en milieu naturel, pour B. argus, Euapta godeffroyi, S. chloronotus et H. tubulosa (Babcock et al. 1992 ; Andrade et al. 2008). Bien que l’épisode de ponte présenté dans cette étude soit lié à la phase lunaire, il est indispensable d’évaluer une période plus longue pour vérifier s’il s’agit d’une caracté- ristique de reproduction de l'espèce, étant donné que les phases lunaires ont été associées à la reproduction et que leur influence peut varier en fonction des espèces. Figure 3. Ponte femelle de Stichopus sp. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 53 une mortalité élevée probablement liée à la gestion de larves dans un délai d'un à trois jours. Les deux actions la qualité de l’eau. La présence de parasites protozoaires préventives dans l’élevage de I. fuscus consistent à dimi- pendant l’élevage de larves d’holothuries est un problème nuer la température de l’eau et à augmenter l’aération. courant qui a été décrit par plusieurs auteurs (Purcell et Cependant, les températures plus froides et l’agitation Eeckhaut 2005 ; Raison 2008 ; Hu et al. 2010, 2013). Becker plus forte produisent un effet néfaste se traduisant par et al. (2009) ont signalé que ces micro-organismes appa- un retard ou une interruption du développement larvaire raissent après la période d’éclosion et qu'une fois que les (Becker et al. 2009 ; Mercier et al. 2012). Par ailleurs, au Ja- larves commencent à s’alimenter, ils se nourrissent des pon et en Inde, des traitements chimiques sont appliqués contenus et tissus intestinaux, ce qui provoque un rétré- pour éliminer les copépodes dans les écloseries (James cissement et une rupture de la paroi intestinale tuant les 1994 ; Ito 1995 ; Yanagisawa 1998 ; Ito et Kitamura 1997).

AB

CD

EF

Figure 4. Développement embryonnaire et larvaire de Stichopus sp. Phases embryonnaires : A) Œuf fécondé ; B) Blastula ; C) Gastrula. Phases larvaires planctoniques ; D) Stade initial d’auricularia ; E) Stade intermédiaire d’auricularia ; F) Stade final d’auricularia (échelle graphique de 20 μm). 54 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Tableau 2. Caractérisation du développement embryonnaire de Stichopus sp.

Phase Caractéristiques Taille (μm) Moment

Œuf fécondé Sphérique. 138,02–175,05 0 Sphérique. Recouvert par des cils qui le maintiennent dans un mouvement de Blastula 262,72–302,79 4–5 (h) rotation permanent autour de son axe. Gastrula Invagination du pôle végétal. Apparition des rudiments du tube digestif. 287,40–356,30 8–10 (h) Stade initial Allongement de la larve. Présence de cils buccaux, de l’intestin et du cloaque. 425,30–476,50 30–40 (h) d’auricularia Stade Larve plus grande, avec les côtés des replis plus grands et un tube digestif mieux intermédiaire 609,28–788,83 50–60 (h) différencié et développé. d’auricularia Stade final Accumulation de nodules hyalins, développement et axo-hydrocoelome. 787,59–1 087,66 21–23 (j) d’auricularia

Comme l’indiquent Batagglene et Bell (2004), on utilise microalgues vivantes (Chlorella sp.) et la température plus du Trichlorfon ou du Dipterex pour maîtriser les infesta- élevée (28 °C) ont permis d’améliorer les conditions d’éle- tions par les copépodes. Dans cette étude, la stérilisation vage larvaire et de faire progresser le développement des et le filtrage de l’eau de mer n'ont pas suffi pour éliminer larves jusqu’au stade final d’auricularia. Les tailles des ce problème. Par conséquent, il faudra effectuer des tests larves sont reproduites dans la figure 5. en utilisant plusieurs doses de Trichlorfon/Dipterex afin de déterminer la concentration optimale nécessaire pour Becker et al. (2009) ont constaté que les larves en pleine lutter contre les infestations de copépodes. croissance doivent être nourries avec une quantité impor- tante de microalgues vivantes de qualité, surtout pendant Plusieurs auteurs ont constaté que le développement le stade auricularia. Si cette condition n’est pas remplie, larvaire est directement lié à la gestion de la qualité de la croissance et la métamorphose des larves sont consi- l’eau, comme la température, le pH ou la salinité. Par ail- dérablement retardées, comme ce fut le cas durant la pre- leurs, la quantité et la qualité de l’apport de nourriture mière année de notre étude. Certains auteurs ont suggéré sont des facteurs déterminants pour le développement une alimentation constituée de certaines algues du genre des holothuries d'écloserie. Comme l’ont signalé James Spirulina durant les stades larvaires initiaux (Agudo 2006 ; (1994), Ramofafia et al. (1995) et Battaglene (1999), qui ont Zacarías-Soto et al. 2013). Cependant, elles ne peuvent être étudié certaines holothuries (respectivement H. scabra, utilisées que pendant le stade pentactula ou juvénile, étant A. echinites et H. atra), la température optimale de l’eau donné qu’il s’agit d’algues benthiques (la Spirulina ajou- pour les larves d’holothuries tropicales se situe entre 27 tée se dépose au fond du bac). Par conséquent, en 2013, on et 30 °C, valeurs qui ont été respectées dans cette étude. a cultivé l’algue Chlorella sp. pour alimenter les larves au D’après des auteurs tels que Hamel et Mercier (1996) ou stade auricularia. Comme l’ont indiqué Xilin (2004), Asha Asha et Muthiah (2005), un pH de 7,8 à 8,0 permet d’obte- (2004) et Asha et Muthiah (2006), cette algue mélangée à nir une croissance larvaire optimale de C. frondosa et H. d’autres (comme Dunaliella euchlaia, Chaetoceros gracilis, C. spinifera. Dans la partie de notre étude portant sur 2012, muelleri, Isochrysis galbana, Nanochloropsis salina, Dicrateria ce facteur est resté inférieur à la valeur optimale suggérée zhanjiangensis, Pavlova lutheri et Tetraselmis chuii) joue un par d’autres auteurs. Dans le cadre de cette étude, il n’a rôle déterminant à ce stade de développement. pas été possible de déterminer s’il a directement influencé le développement et la survie des larves, bien qu’en 2013, En 2013, la couleur verte des viscères (figure 6) nous a le pH soit resté constant (8,18) et les conditions d’élevage permis d’établir que les larves ingéraient de la nourriture. aient été améliorées. En outre, la salinité est également Au dixième jour d’élevage, ces larves avaient atteint une un facteur déterminant pour le développement larvaire taille maximum de 888,71 μm ± 106,71, quand leur déve- des holothuries, puisque les larves ne supportent pas des loppement a été interrompu par une nouvelle infestation valeurs inférieures à 32 g l-1. En effet, celles-ci peuvent par les copépodes, qui a bloqué le cycle larvaire et la mé- provoquer des malformations et une mortalité élevée, tamorphose des larves. comme pour les espèces H. spinifera, A. echinites et A. japonicus (Chen et Chian 1990 ; Asha et Muthiah 2003 ; Conclusion Kashenko 2003). Dans cette étude, la salinité n’a eu aucun effet sur les larves ; ce paramètre est resté constant et opti- La reproduction de Stichopus sp. est possible en condi- mal pour les deux périodes d’éclosion (2012 et 2013). tions de laboratoire puisque cette espèce se manipule facilement et s’adapte à la captivité. De plus, la ponte est Au cours de l'étude, le développement larvaire a été permanente entre juillet et novembre. Nos conclusions influencé par la température et l’apport de nourriture : serviront de point de départ à leur reproduction en condi- pendant la première ponte obtenue entre juillet et sep- tions de laboratoire et, par conséquent, favoriseront la tembre 2012, le développement larvaire s’est interrompu réalisation d’autres études portant sur le nourrissage des au stade initial d’auricularia et la taille des larves était larves afin d’optimiser la production et la survie des holo- inférieure à celle atteinte par les larves en 2013 (août– thuries d’une part, et de répondre aux besoins des larves octobre). Durant cette année, l’alimentation constituée de pour leur croissance et leur métamorphose d’autre part. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 55

A 1 200 2012

1 000

800

600

400 Taille des larves (μm) Taille

200

0

B 1 200 2013

1 000

800

600

400 Taille des larves (μm) Taille

200

0 Œuf fécondé Blastula Gastrula Stade initial Stade Stade final d'auricularia intermédiaire d'auricularia d'auricularia Stade

Figure 5. Taille des larves à chacune des périodes de reproduction en conditions d’élevage : A) 2012 : Température de 26 °C et alimentation constituée de poudre de Spirulina ; B) 2013 : Température de 28 °C et alimentation constituée de Chlorella sp. à une densité de 5 000 cellules ml-1.

Remerciements

Ces travaux ont bénéficié d’une bourse de Colciencias (No 1117-521-28356) et du Vicerrectoría de Investigación (Université de Magdalena). Les auteurs tiennent à remer- cier les pêcheurs d’holothuries Eng. Yahir Mendoza Vane- gas et Jorge Polo Ramírez qui a participé à la collecte des spécimens.

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Les marchés de la bêche-de-mer moins connus Chantal Conand1,*

Introduction (figure 2) étaient consommées crues. Urechis unicinctus se consomme également cru (figure 3). Dans le Pacifique tropical, la bêche-de-mer de la région Indopacifique a beaucoup attiré l’attention ces derniers 3. San Francisco temps (Purcell et al. 2010 ; Purcell 2014a,b), suite aux tra- vaux de Conand 1979, 1990, et de Skewes et al. 2004. Cet La communauté chinoise de San Francisco achète des article fait suite à des rapports d’observation succincts produits secs de nombreuses espèces provenant de divers réalisés dans d’autres pays du bassin Pacifique et présen- pays, à des prix allant jusqu’à 268 dollars des États-Unis tés dans de précédents bulletins d’information La Bêche- par livre (figure 4). de-mer de la CPS. Traduction des noms chinois fournie par marielle.du- On constate que les produits traditionnels issus des [email protected]. espèces tropicales de l’Indopacifique ne sont plus aussi présents sur les marchés de bon nombre de pays et qu’il est désormais nécessaire de se concentrer plus particuliè- rement sur l’identification spécifique des produits secs. Ainsi, dans les nouveaux pays producteurs de bêche-de- mer, il serait bon que les transformateurs et les chercheurs lancent de petits projets de recherche sur les variations de longueur et de poids des espèces pendant les différentes phases de transformation. Quelques spécimens par caté- gorie de taille (petite, moyenne et grande) seront néces- saires pour établir le modèle de régression de chaque espèce. Des photographies de chaque étape seront éga- lement utiles.

Rapports

1. République populaire démocratique de Corée, Figure 1. marché de Pyongyang Apostichopus japonicus transformée, sur le marché de Wonsan (photo : M.J. Chalvin, 2014). Très peu d’informations circulent sur l’exploitation des holothuries dans ce pays. Dans le rapport de la FAO (To- ral-Granda et al. 2008), Poh Sze cite un rapport anonyme dans lequel on peut lire qu’entre 1985 et 1990, les débar- quements ont chuté et que la Réserve naturelle de Oruji a été créée en 1996, notamment à des fins de conservation des holothuries. Lors d’une récente visite dans le pays, on a pu observer au marché de Wonsan (figure 1) des Apostichopus japonicus transformées, séchées et vendues 25 euros le grand sac et 10 euros le petit.

2. République populaire démocratique de Corée

Les statistiques de la FAO permettent à Poh Sze (Toral- Granda et al. 2008) de faire état d’une baisse d’un tiers des captures entre 1995 et 2005 (environ 1 100 t.). Lors de cette même visite, on a constaté à Pusan que les mêmes Figure 2. Spécimen d’Apostichopus vivant, espèces appelées « gingseng de la mer » ou « Hai-som » sur le marché de Pusan (photo : M.J. Chalvin, 2014).

1 Laboratoire Ecomar, Université de la Réunion, 97715 Saint-Denis, France * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 59

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Les holothuries au Salon chinois de la pêche et des produits de la mer 2014 Choo Poh Sze1,* et Chantal Conand2,3,*

Introduction 2. Amérique du Sud

La 19e édition du Salon chinois de la pêche et des produits Nom scientifique : Isostichopus badionotus de la mer, le plus grand Salon commercial des produits de Nom usuel : Holothurie à points la mer de toute l’Asie, s’est tenue au Centre des congrès Séchée (si la commande dépasse les 20 kg) : 1 100 yuans de Qingdao en novembre 2014. Ce Salon a réuni un ou 179,3 dollars des États-Unis le kg nombre record de participants, à savoir 1 206 entreprises et quelque 27 490 visiteurs venus de 114 pays. « Un Salon 3. Canada et États-Unis d’Amérique comme celui-ci permet aux acheteurs, aux vendeurs et aux représentants des pouvoirs publics de se rencontrer, Nom scientifique : Parastichopus californicus de réfléchir à de nouvelles opportunités commerciales et Nom usuel : Holothurie rouge de trouver des solutions aux défis actuels », précise Peter Séchée (si la commande dépasse les 20 kg) : 1 600 yuans Redmayne, président de « Sea Fare Expositions ». ou 260,8 dollars des États-Unis le kg

Le Salon a exposé quelque 67 espèces de poissons et Parastichopus californicus, que l’on trouve en Colombie 34 d’invertébrés, dont des holothuries. La Chine a pour britannique (Canada) et aux États-Unis d’Amérique, est habitude de se procurer ses holothuries dans les eaux tro- une espèce unique en son genre. Elle est composée de picales de pays comme les Philippines, l’Indonésie ou les deux parties, à savoir un tégument externe ferme et un pays insulaires océaniens, mais la surpêche a fait chuter muscle interne épais, qui constitue la chair de l’holothu- cette ressource désormais remplacée par des espèces tem- rie. Cette holothurie est parfois appelée holothurie rouge pérées du Canada, des États-Unis d’Amérique, d’Europe grande ou géante et son aspect est habituellement rou- et d’Amérique du Sud, mises en avant lors de ce Salon geâtre ou brun foncé. On peut la trouver tout le long du pour attirer l’acheteur chinois. littoral de la Colombie britannique ; la longueur moyenne de l’espèce récoltée à des fins commerciales est de 30 à Rapport 40 cm. Son tégument est très prisé pour ses vertus thé- rapeutiques alors que sa chair ou son muscle est d’une Ce document, assorti de photographies prises lors du Sa- grande valeur nutritive et s’utilise dans de nombreux lon, présente certains des produits, leur nom usuel, leur plats très goûteux. La Colombie britannique est réputée nom scientifique dans la mesure du possible ainsi que de par le monde pour la clarté et la pureté de ses eaux, leur origine et leur prix. Il a été difficile d’obtenir des ren- ce qui permet aux plongeurs expérimentés de récolter à seignements des vendeurs qui détiennent très peu d’in- la main ces holothuries qui sont ensuite remontées à la formations sur les produits à vendre. Des informations surface et immédiatement découpées, vidées de leur eau plus récentes sur le mode d’exploitation et de commer- et conservées pour être livrées sur un quai, puis envoyées cialisation des holothuries sont fournies dans les publica- à une usine de traitement agréée. À quai, l’inspecteur tions de Lovatelli et al. (2004), Toral-Granda et al. (2008) indépendant pèse le produit débarqué et déduit le total et Purcell et al. (2012, 2014). obtenu du quota individuel afin de garantir l’absence de surpêche dans une zone donnée. À l’usine de traitement, 1. Amérique du Sud le muscle est séparé du tégument, puis emballé sous vide et congelé alors que le tégument est cuit et conditionné Nom scientifique : Isostichopus fuscus pour être expédié. Chaque étape de ce procédé est sou- Nom usuel : Holothurie brune mise à une surveillance et à un contrôle attentifs afin de Séchée (si la commande dépasse les 20 kg) : 1 440 RMB le veiller au respect des réglementations les plus strictes. La kg (sans précision de taille) ; 1 440 yuans ou 234,72 dollars récolte de Parastichopus californicus a lieu entre les mois des États-Unis le kg d’octobre et d’avril. Les produits sont vendus séchés,

1 Asian Fisheries Society, c/o Laboratory of Marine Biotechnology, Institute of Bioscience, University Putra Malaysia, 43400 UPM, Serdang, Selangor, Malaisie 2 Laboratoire Ecomar, Université de La Réunion, 97715 Saint-Denis, France 3 Département Milieux et peuplements aquatiques, MNHN, 43 Rue Cuvier, 75005 Paris * Auteurs à contacter : [email protected] ; [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 61 sous la forme de tégument partiellement séché, ou bien ils sont cuits, salés et congelés (figure 1). (Source : Pacific D Sea Cucumber Harvesters Association : Association des pêcheurs d'holothuries du Pacifique, site Internet : www. pscha.org) A

B

C

Figure 2. Différents produits d’holothuries dérivés d’Apostichopus japonicus, notamment le sel solaire (A), le savon (B), l’holothurie prête-à-consommer (C) et la bêche-de-mer (D).

5. Canada

Nom scientifique : Cucumaria frondosa Nom usuel : néant Congelée : 3 dollars des États-Unis la livre Prête-à-consommer : 1 400 yuans ou 228,20 dollars des États-Unis le kg

Cette espèce d’holothurie sauvage se pêche dans l’Atlan- tique Nord, le long du littoral canadien. On la trouve à environ 10 mètres de fond, là où la température de sur- face maximale ne dépasse pas les 14 °C. Elle est récoltée dans des eaux très éloignées de toute activité industrielle et qui ne sont pas sujettes aux activités humaines. Une fois délestées de leurs parties antérieure et postérieure et de leurs organes internes, ces holothuries sont cuites sans Figure 1. Poster représentant Parastichopus californicus conservateur ni colorant, ni gélatine. Ce type de traite- (photographie prise au stand de l’Association des pêcheurs ment produit des holothuries à la forme irrégulière et de d’holothuries du Pacifique lors du Salon des produits de la mer niveau dix en termes de qualité de séchage, ce qui permet 2014 à Qingdao). de les conserver plus longtemps. Les produits sont ven- dus sous la forme de tégument séché, avec ou sans chair (figure 3). (Rosalyn United Trans Limited ; site Internet : www.unitedtrans.ca) 4. Corée du Sud

Nom scientifique : Apostichopus japonicus Nom usuel : Holothurie japonaise à piquants Prête-à-consommer : 1 680 yuans ou 273,84 dollars des AB États-Unis le kg Séchée : 1 998 yuans ou 325,67 dollars des États-Unis le kg

Le Salon des produits de la mer était l’occasion d’exposer différents produits à valeur ajoutée comme l’holothurie emballée et prête-à-consommer, le sel solaire agrémenté d’extraits d’holothurie séchée et le savon aux extraits d’holothurie, censé empêcher le vieillissement et aider la peau à se régénérer (figure 2). Pour l’holothurie séchée, l’entreprise Haeser Products Co., créée en 2011 et dont le siège social se trouve à Busan, se targue de commer- Figure 3. Cucumaria frondosa. cialiser des holothuries sauvages récoltées dans des eaux A) tégument séché ; B) produit entier séché. cristallines et d’être la seule entreprise coréenne à propo- ser une holothurie séchée et sans sel, grâce à une techno- logie brevetée. 62 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

6. Caraïbes Discussion

Nom scientifique : Holothuria mexicana (figure 4) Comme l’indique ce tour d’horizon succinct, la garantie Vendue sous le nom usuel : bêche-de-mer des Caraïbes de salubrité et la valeur nutritive de ces nouveaux pro- Séchée avec la peau : 53 dollars des États-Unis le kg duits sont de plus en plus mises en avant, de même que Séchée sans la peau : 70 dollars des États-Unis le kg les questions de sécurité alimentaire et de durabilité dans le domaine de la pêche aux holo- thuries. Les produits nord-amé- ricains et canadiens mettent en évidence les conditions parfaites des zones dans lesquelles les holo- thuries sont récoltées, alors que les produits chinois ou sud-coréens semblent indiquer que les holo- thuries pêchées en milieu naturel sont plus nutritives que les pro- duits issus de l’aquaculture qui peuvent avoir été traités à l’aide de produits chimiques non approu- vés. La question de la durabilité est également invoquée, entre autres, par l’Association des pêcheurs Figure 4. Bêche-de-mer des Caraïbes, Holothuria mexicana. d’holothuries du Pacifique de Co- lombie britannique.

7. Europe

Nom scientifique : Holothuria tubulosa Vendue sous le nom usuel : holothurie tubulaire Séchée : 1 360 yuans ou 221,68 dollars des États-Unis le kg, s’est vendue comme des petits pains lors du Salon chinois des produits de la mer

Un des stands proposait des produits italiens alors qu’un autre vendait des produits grecs.

8. Mer Rouge

Nom scientifique : Holothuria scabra Nom usuel : Holothurie de sable

Le groupe national d’aquaculture d’Arabie saoudite est une entreprise pleinement intégrée qui possède des pro- venderies, des écloseries ainsi que des installations de grossissement et de traitement. Le processus de grossis- sement s’opère sans intervention extérieure dans les eaux cristallines de la mer Rouge. Après avoir été récoltées, les holothuries sont rapidement transportées vers les usines de traitement. L’holothurie de sable grossit dans des bas- sins à faible concentration, sa traçabilité est entière et elle répond aux normes de biosécurité les plus strictes.

9. Produits chinois

Nom scientifique : Apostichopus japonicus (figure 5) Nom usuel : Holothurie japonaise à piquants Séchée : le prix varie entre 700 et 8 000 yuans ou 114,1 et Figure 5. Bêche-de-mer séchée à partir de l’espèce Apostichopus 1 304 dollars des États-Unis les 500 g japonicus à Dalian et à Qingdao (Chine). La valeur des produits récoltés dans leur milieu naturel est supérieure à celle des holothuries d’élevage. La taille des produits influe également sur le prix. Les prix affichés correspondent à une quantité de 500 g. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 63

Par conséquent, dans les pays tropicaux, la filière tradition- Bibliographie nelle de la bêche-de-mer doit combler son retard et s’assu- rer de mettre l’accent sur des produits salubres et nutritifs, Lovatelli A., Conand C., Purcell S., Uthicke S., Hamel J.- récoltés de manière durable. Les producteurs d’holothuries F. and Mercier A. 2004. Advances in sea cucumber des mers tropicales pourraient également ajouter de la va- aquaculture and management. FAO Fisheries Tech- leur à leurs produits en explorant une plus grande gamme nical Paper No. 463. Rome, Italy: Food and Agri- de produits transformés, plutôt que de se cantonner à la tra- culture Organization of the United Nations. 425 p. ditionnelle bêche-de-mer. Purcell S.W. 2014. Value, market preferences and trade of Une récente publication de Purcell (2014), fondée sur des beche-de-mer from Pacific Island sea cucumbers. observations directes, dresse l’inventaire des produits ex- PLoS One 9: e95075. portés des marchés océaniens et chinois à Hong Kong et Purcell S.W., Samyn Y. and Conand C. 2012. Commercial- Guangzhou (respectivement, 5 et 11 magasins). Cette étude ly important sea cucumbers of the world. FAO Spe- montre que ces produits dont la production et l’importa- cies Catalogue for Fishery Purposes. No. 6. Rome, tion ne datent pas d’hier sont bien acceptés. Les produits d’autres marchés (États-Unis d’Amérique, Corée du Nord, Italy: Food and Agriculture Organization of the Corée du Sud) font également l’objet d’observations di- United Nations. 150 p. rectes dans une autre publication (Conand, ce numéro). En Purcell S., Choo P.S., Akamine J. et Fabinyi M. 2014. Nou- dépit des récentes informations et photographies publiées velles formes de produit, de conditionnement et de dans l’ouvrage de la FAO (Purcell et al. 2012), il semble plus commercialisation des holothuries tropicales et de difficile de confirmer l’identité des espèces provenant des leurs composés dérivés. La Bêche-de-mer, Bulletin autres pays. De plus amples études sont nécessaires afin d'information de la CPS 34:47–52. d’obtenir davantage de données précises sur les pays et les océans d’où proviennent les produits vendus sur les mar- Toral-Granda V., Lovatelli A. and Vasconcellos M. 2008. chés chinois. Sea cucumbers. A global review of fisheries and trade. FAO Technical Paper No. 516. Rome, Italy: La 20e édition du Salon chinois de la pêche et des produits Food and Agriculture Organization of the United de la mer se tiendra du 4 au 6 novembre 2015 dans le ma- Nations. 319 p. gnifique Centre des congrès de Qingdao. « Seafood Fare China » annonce dès maintenant la prochaine édition de ce Salon à l’adresse Internet suivante : http://www.chinasea- foodexpo.com. 64 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Observation d’une holothurie juvénile d’espèce indéterminée à La Réunion (océan Indien) Bourjon P.1 et Conand C.2

À la suite de la publication du questionnaire de Shiell (2004), plusieurs rapports d’observation d’holothuries juvéniles ont été établis et colligés par Shiell (2005) et James (2005). Le présent article porte sur l’observation récente, sur un récif frangeant de La Réunion, d’un juvénile appartenant à une espèce indéterminée de Stichopodidae, qui a pu être photographié (figure 1).

Espèce : espèce indéterminée de la famille des Stichopodidae

Nombre d’individus observés : 1

Taille approximative : 2,5 cm

Lieu : platier récifal externe, Saint-Gilles / La Saline (La Réunion)

Habitat : le spécimen était enfoui dans le sable, à proximité de la zone de ressac, sous du corail mort

Heure : 11h00

Date : 21 septembre 2014

Des individus adultes étaient-ils présents dans le même habitat ou à proximité ? Quelques Stichopus chloronotus et Holothuria pervicax ont été aperçus.

Les photos prises in situ mettent en évidence un corps de section carrée, un tégument transparent et la présence de petites taches blanches. Le bivium est couvert de nombreuses papilles de grande taille à bouts blancs, entourées à la base d’un cercle noir (figure 1A). Le trivium porte trois rangées de podia (figure 1B). On n’a pas observé de désagrégation du tégument pendant la manipulation, comme c’est le cas pour Stichopus chloronotus, qui se reproduit par voie sexuée au cours de la saison chaude (Conand et al. 2002). Les autres espèces de Stichopodidae présentes à La Réunion sont S. herrmanni, S. monotuberculatus et Thelenota ananas (Conand et al. 2010), dont les juvéniles diffèrent du spécimen observé (Trentin 2011). Il faudra procéder à des observations complémentaires pour en savoir plus sur cette phase encore mal connue mais néanmoins importante du cycle de vie des holothuries.

AB

Figure 1. Holothurie juvénile de la famille des Stichopodidae observée à La Réunion : A) bivium ; B) trivium (photos : P. Bourjon).

1 Réseau d’observateurs volontaires « Les Sentinelles du Récif », RNMR 2 Laboratoire Ecomar, Université de La Réunion, 97715 Saint-Denis, France * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 65

Bibliographie

Conand C., Uthicke S. and Hoareau T. 2002. Sexual and asexual reproduction of the holothurian Stichopus chloronotus (Echinodermata): A comparison between La Réunion (Indian Ocean) and east Australia (Pacific Ocean). Inverte- brate Reproduction and Development 41:235–242. Conand C., Michonneau F., Paulay G. and Bruggemann H. 2010. Diversity of the holothuroid fauna (Echinodermata) in La Réunion (Western Indian Ocean). Western Indian Ocean Journal of Marine Science 9(2):145–151. James D.B. 2005. Informations sur les juvéniles d’holothuries. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS 21:26. Shiell G. 2004. Questionnaire sur l’observation in situ de juvéniles de concombre de mer. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS 19:43. Shiell G. 2005. Observations in situ de juvéniles d’holothuries. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS 20:6–11. Trentin F. 2011. Observation de juvénile de l’espèce commerciale Thelenota ananas, à La Réunion, Océan indien. La Bêche- de-mer, Bulletin d'information de la CPS 31:56. 66 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 Communications...Communications

Frédéric Ducarme1,* Sciences participatives et biologie naturaliste

Les nouvelles technologies offrent à la science des données et des possibilités nouvelles. Sur son site Web Echinoblog (http://echinoblog.blogspot.fr/), C. Mah (Mah 2008) a montré l’utilité de certains sites publics, tels que FlickR (https:// www.flickr.com/), qui mettent en ligne des milliers de photos sous-marines prises dans le monde entier, permettant ainsi aux chercheurs de découvrir des comportements inconnus, des schémas physiques étonnants, des aires de répar- tition insoupçonnées chez les échinodermes, mais aussi de nouvelles espèces potentielles. Wikipédia (www.wikipedia.org), une encyclopédie libre en ligne, gagne aussi en importance en faisant le lien entre recherche et vulgarisation. L’exactitude du contenu scientifique s’améliore à grands pas, même s’il reste hétérogène. Les contenus de Wikipédia sont de plus en plus souvent repris par d’autres sites et bases de données spécialisés, tels que Encyclopaedia of Life (http://eol.org/) ou iNaturalist (http://www.inaturalist.org/). Wikipédia est également une pro- metteuse plateforme pour faire découvrir des groupes d’animaux moins connus, notamment les invertébrés. Certains chercheurs ont donc commencé à écrire des articles scientifiques sur les échinodermes en vue de leur publication dans Wikipédia, y compris des articles labellisés (voir par exemple la référence Acanthaster planci). Quelques plongeurs et taxo- nomistes ont généreusement mis en ligne des centaines d’images spécialisées libres de droit pour illustrer ces articles, ou contribué à identifier les espèces figurant sur des photos mises en ligne par d’autres. Il reste toutefois beaucoup à faire, et la plupart des espèces ne font pas l’objet d’un article ou d’une image de qualité professionnelle. Les connaissances sur les holothuries restent disparates, et ne sont pas toujours aisément accessibles pour les chercheurs qui travaillent sur le terrain ou les non spécialistes. C’est pourquoi il serait utile de faire évoluer Wikipédia en une source fiable de connaissances offrant des images, des descriptions et des informations accessibles. Comme l’encyclopédie est disponible dans plusieurs langues et que les traductions vers d’autres langues sont réalisées d’après les articles les plus complets, elle pourrait aussi devenir un puissant outil de vulgarisation et de sensibilisation sur les espèces protégées et les problèmes écologiques. Les articles concernant les holothuries sont disponibles à l’adresse suivante : https:// en.wikipedia.org/wiki/Sea_cucumber. Nombre de chercheurs possèdent des photos, des données et des connaissances qui pourraient être mises en commun. Il est facile de créer un compte et de transmettre des fichiers, surtout des photos professionnelles d’animaux rares, et d’autres contributeurs à Wikipédia sont prêts à expliquer les règles de fonctionnement, à participer à l’identification des espèces, à réviser les contributions ou à corriger des erreurs. Nous sommes fermement convaincus qu’accorder un peu de son temps à un projet tel que Wikipédia fait partie intégrante du travail des scientifiques. Remerciements

Nos remerciements vont à tous les contributeurs de Wikipédia qui participent à l’un des projets scientifiques les plus pas- sionnants jamais menés. Je souhaite personnellement exprimer toute ma gratitude à Chantal Conand, Philippe Bourjon, Christopher Mah, François Michonneau et Gustav Paulay pour l’aide qu’ils y ont apportée.

Bibliographie

Mah C.L. 2008. The Flickr Field Guide Challenge. The Echinoblog.http://echinoblog.blogspot.fr/2008/11/flickr-field- guide-challenge.html Wikipedia (French version). 2011. Acanthaster planci, labelled as "Featured article". https://fr.wikipedia.org/wiki/ Acanthaster_planci Wikipedia (English version). 2011. Acanthaster planci. https://en.wikipedia.org/wiki/Acanthaster_planci Wikipedia (English version). Sea cucumber. https://en.wikipedia.org/wiki/Sea_cucumber

1 Centre d’écologie et des sciences de la conservation, UMR 7204, Museum national d’histoire naturelle (Paris) * Auteur à contacter : [email protected] La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 67 Choo Poh Sze1,* Comme le rapporte le Beijing Morning Post, l’abus de médicaments dans les élevages d’holothuries du Liaoning (province côtière du nord-est de la Chine) a été révélé par la China Central Television (CCTV) après la découverte de la pollution des eaux locales et la mort de nombreux animaux marins

De très nombreuses fermes holothuricoles ont été établies à Pikou Town, un faubourg de la ville de Dalian sur la mer de Bohai. Selon les journalistes, ce n’est un secret pour personne que les holothuries d’élevage sont maintenues en vie à grand renfort de médicaments. Des fioles étiquetées Ceftriaxone sodique (un type d’antibiotique) sont souvent jetées hors de l’une des exploitations de la ville. Les journalistes ont découvert que les aquaculteurs emploient plusieurs types d’antibiotiques et des préparations d’herboristerie chinoise pour protéger les holothuries de la maladie. L’un d’eux a même révélé qu’ils ajoutent un peu de pesticide dans l’eau pour tuer les organismes susceptibles de concurrencer les holothuries et de les priver de nutriments. De plus, aux dires de ce même exploitant, les excréments des animaux marins sont nettoyés au désinfectant, dont de l’hypochlorite de sodium et du dextran à usage clinique. Tous les trois ou quatre jours, les exploitants rejettent cette eau contaminée en mer, polluant ainsi les eaux environnantes. Les bassins sont géné- ralement nettoyés tous les quatre ans. Après avoir récolté toutes les holothuries et asséché les bassins, les aquaculteurs lo- caux recouvrent le sol de chaux, à raison de 150 à 160 kg par mu (666 m2), et attendent que les vagues entraînent la chaux et les déchets au large. À l’époque de ces grands nettoyages, on voit des dizaines de poissons morts flotter en surface. D’autres animaux marins comme les calmars et les crevettes sont également décimés aux alentours, a encore déclaré un exploitant. Pour de plus amples informations, consulter l’adresse : http://www.thefishsite.com/fishnews/24073/antibiotic-ove- ruse-causing-species-extinction-in-china#sthash.R5dkFPU6.yIfzXVgk.dpuf

1 Asian Fisheries Society, c/o Laboratory of Marine Biotechnology, Institute of Bioscience, University Putra Malaysia, 43400 UPM, Serdang, Selangor, Malaisie * Auteur à contacter : [email protected] 68 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 Résumés et nouvelles publications...

Réunions tenues en 2014 et communications sur les holothuries

1) 47e Conférence nord-américaine sur les échinodermes, University of West Florida, Pensacola, Floride (États-Unis d’Amé- rique), 1–6 juin 2014 ‡ Paulay Gustav, Scott Smiley, David L. Pawson, Mandy Bemis — Echino-WoRMS and beyond: Tracking sea cucumber nomenclature from 1765 to the future. ‡ 0LNH5HLFK³2QWKHUHODWLRQVKLSVRIHDUO\KRORWKXULDQVDQGRSKLRFLVWLRLGV$TXHVWLRQRIZKHHOV" ‡ 7DQMD56WHJHPDQQ30DUN2·/RXJKOLQ0LNH5HLFK³+DUGSDUWPRUSKRORJ\RIVRPHOLYLQJTaeniogyrus species (Holothuroidea: Apodida: Chiridotidae). ‡ -RKQ6WDUPHU*XVWDY3DXOD\³(YROXWLRQDU\UHODWLRQVKLSVZLWKLQStichopus (Holothuroidea: Stichopodidae): A combined approach using genetics and morphology. ‡ -XOLR$GULiQ$UULDJD2FKRD)UDQFLVFR$6ROtV0DUtQ0DULDQR0DUWtQH]³Psolus squamatus (Müller, 1776): A species complex (Echinodermata: Holothuroidea). ‡ )UDQoRLV0LFKRQQHDX*XVWDY3DXOD\³&U\SWLFDQGQRWVRFU\SWLFVSHFLHVLQVHDFXFXPEHUV ‡ /LOLDQH9HUDV/HLWH-RVpGH6RXVD-XQLRU5HQDWD9LHLUDGR1DVFLPHQWR0DULD(GXDUGD0DJDOKmHVGH6RX]D-~OLD Trugilio Lopes, Carminda Sandra Brito Salmito-Vanderley, Annie Mercier, Jean-François Hamel — Reproductive seasonality of Holothuria grisea in northeastern Brazil. ‡ 9ODGLPLU60DVKDQRY2OJD5=XHYD-RVp(*DUFtD$UUDUiV³'LIIHUHQWLDOJHQHH[SUHVVLRQGXULQJQHXUDOUHJHQ- eration in a sea cucumber. ‡ 9ODGLPLU60DVKDQRY2OJD5=XHYD-RVp(*DUFtD$UUDUiV³0\FUHJXODWHVSURJUDPPHGFHOOGHDWKDQGUDGLDO glia dedifferentiation after neural injury in sea cucumbers. ‡ $OOLVRQ.0LOOHU$OH[DQGHU0.HUU*UHJ:5RXVH³+LJKHUOHYHOV\VWHPDWLFVRIWKHZDONLQJVZLPPLQJDQG burrowing Holothuroidea (Echinodermata): A six-gene molecular phylogenetic approach. ‡ 6XQ:.LP$OOLVRQ.0LOOHU$OH[DQGHU0.HUU³+RORWKXURLGIDXQDRI&KXXN )HGHUDWHG6WDWHVRI0LFURQHVLD  ‡ /XFLDQD0DUWLQV&DPLOOD6RXWR0DUFRV7DYDUHV³5HYLVLRQRIWKHZHVWHUQ$WODQWLF“Ocnus” species (Dendrochi- rotida: Cucumariidae). ‡ &DPLOOD6RXWR/XFLDQD0DUWLQV³0RUSKRORJ\RIWKHDendrochirotida calcareous ring: Phyllophorus occidentalis Ludwig (Phyllophoridae) as a Sclerodactylid. ‡ -LQJ :HQ &KDRTXQ +XD 6LJDQJ )DQD ³ &KHPLFDO FRPSRVLWLRQ DQG QXWULWLRQDO TXDOLW\ RI VHD FXFXPEHUV (wileyonlinelibrary.com) doi:10.1002/jsfa.4108.

2) 2e Congrès mondial des pêches à petite échelle, Mérida (Mexique), 21–26 septembre 2014 Organisé par le réseau Too Big to Ignore : http://toobigtoignore.net; https://2wsfc.files.wordpress.com/2013/10/congress-schedule- final.pdf Informations communiquées par Marc Léopold, IRD, U227 COREUS2, BP A5, 98848 Nouméa cedex (Nouvelle-Calédo- nie) ; Service des pêches de Vanuatu, Private Bag 9045, Port-Vila (Vanuatu), [email protected] ; et Jim Prescott, Austra- lian Fisheries Management Authority, PO Box 131 Darwin, NT 0801 Australie, [email protected]. Exposés sur les holothuries ‡ Léopold Marc, Ham Jayven, Kaku Rocky, Moenteapo Zacharie — Putting spatial management into practice: A case study of sea cucumber fisheries in New Caledonia and Vanuatu (Southwest Pacific). ‡ %HQQHWW$ELJDLO%DVXUWR;DYLHU³&RRSHUDWLYHVILVKEX\HUVDQGSHSLQHURV*HRJUDSKLFDOO\GLIIHUHQWLDWHGHIIHFWV of neoliberal policy reform on local responses to contemporary market pressures in Mexican small-scale fisheries. ‡ 5RGUtJXH]/XLV$OIRQVR5H\HV6RVD&DUORV)UDQFLVFR']LE6DUD1DKXDW³'LDJQRVHGLVWULEXWLRQDQGD6:27 analysis of the economic benefits generated by sea cucumber fisheries in a fishing cooperative in the Yucatán, Mexico. ‡ *XDUQHURV3iYHO*DOHDQD*XUUL)UDQFLVFR³'HSOHWLRQRIVHDFXFXPEHUVLQ,VOD$UHQDPD\KDYHHQKDQFHGORFDO governance to promote resilience in the social-ecological system. ‡ -DPHV 5LZX -DPHV 3UHVFRWW 1DWDVKD 6WDFH\$QGKLND 3UDVHW\R 'LDQ 2NWDYLDQL$QWKRQ\ 3DQJJEHDQ ³$Q unlikely partnership: Data collection in a small scale fishery in the Timor Sea. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 69

Discussions sur les holothuries Dans le cadre du Congrès, une excursion a été organisée non loin de là, au port de pêche de Progresso sur la péninsule du Yucatán (Mexique) où 27 participants (dont des pêcheurs locaux) ont organisé un cercle de parole sur la question des holothuries. La discussion a été animée par Alvaro Hernandez (Mexique) et Juan Carlos Murillo (Équateur), qui ont expliqué le fonctionnement du cercle de parole et présenté les problèmes communs aux pêcheries d’holothuries, puis ouvert le débat pendant lequel les informations suivantes ont été rapportées : Galápagos Juan Carlos Murillo a évoqué l’état des stocks de l’holothurie Isostichopus fuscus aux Galápagos (Équateur). Il a rappelé que les essais de pêche exploratoire avaient démarré en 1995 et que la pêche avait été légalement autorisée en 1999. De fortes captures ont d’abord été enregistrées (environ 5 millions d’holothuries par an) avant de commencer à décliner en 2003. Le dispositif de cogestion mis en place en 1998 fonctionne imparfaitement. Le premier plan de gestion, établi en 2008, reposait sur le premier seuil de référence (défini d’après des données historiques) qui subordonnait l’ouverture de la pêche à une densité minimale de 11 holothuries par 100 m2. Depuis 2009, la pêche n’a été autorisée qu’une seule année, car ce seuil n’a jamais été atteint le reste du temps. Les faibles densités tiennent au fait que la reproduction de ces espèces est dépendante de la densité. En 2012 et 2013 respectivement, les densités étaient de l’ordre de sept et huit holothuries par 100 m2. La pêche illicite ne serait pas significative, et le plan de gestion vise à rétablir la population au niveau de 15 holothuries par 100 m2 d’ici 2017. Il n’y a pas eu d’effondrement économique de la pêche compte tenu des prix de vente actuellement élevés (les prix sont passés de 0,80 à 4,00 dollars des États-Unis le kg (poids humide) entre 1999 et 2011). Les mesures recommandées consistent notamment à proposer de nouveaux moyens de subsistance aux pêcheurs pendant les périodes de clôture de la pêche, par exemple en les rémunérant pour participer aux activités de suivi, de recherche et de conservation. Il a aussi été recommandé de vendre les holothuries aux enchères pour faire monter les prix, de reconstituer les stocks et de prolonger les périodes de clôture. Yucatán Alvaro Hernandez a présenté la situation des holothuries dans la péninsule du Yucatán où la pêche à petite échelle est pratiquée. Comme ailleurs, la forte demande asiatique pousse les prix à la hausse et les stocks sont très vulnérables à la surexploitation. En 1990, Zetina et al. ont réalisé la première étude des holothuries dans cette région tandis qu’en 2005, Cervera-Cervera (2007) y a décrit une forte demande pour ce produit. En mai 2006, cinq licences de pêche ont été délivrées. L’année 2008 a été caractérisée par une faible abondance due à une marée rouge. Une analyse prospective démarrée en 2010 dans la péninsule et l’État adjacent de Campeche a conduit à l’établissement de quotas de prises. Selon les estimations, les prélèvements seraient cinq fois supérieurs au niveau des quotas. Pour les espèces habituelles (poissons, poulpe, etc.), on estime qu’une sortie de pêche rapporte 1 500 pesos, contre 11 500 pesos pour les holothuries, ce qui en fait une activité très lucrative. Cette situation génère un sérieux pro- blème social, car de nombreux pêcheurs demandent des licences de pêche pour cibler des holothuries, et ils ont même organisé des manifestations. Isostichopus badionotus est l’espèce recherchée dans le Yucatán, tandis que dans l’État de Campeche, les pêcheurs ciblent Holothuria floridana. L’état des stocks d’Isostichopus badionotus sur le littoral du Yucatán en 2013 est illustré au tableau 1. Tableau 1. Zones de pêche et estimations de la biomasse (t) d’Isostichopus badionotus et estimation connexe des densités dans la péninsule du Yucatán en 2013.

Zone Biomasse (t) Densité (ind. m-2)

I 3 261 0,027 II 714 0,026 III 5 667 0,152 IV 3 697 0,110 V 437

Durant les dernières années, la pêche a été interdite dans le port d’Isla Arena (État de Campeche) en raison d’un conflit entre les grands bateaux titulaires d’une licence d’exploitation et les pêcheurs locaux qui ne pouvaient les concurrencer pendant l’ouverture de la pêche. Au total, 200 licences de pêche ont été délivrées (200 bateaux et 600 pêcheurs). Or, ils seraient aujourd’hui environ 1 000 bateaux et 3 000 pêcheurs à exploiter ces stocks. Le New York Times s’est même fait l’écho de la situation, en évoquant les violences, les accidents de décompression et les problèmes sociaux associés à cette pêche. 70 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 3) ATELIER CUMFISH, Faro (Portugal), 14–15 mai 2014 CUMFISH — Holothuries : nouvelle ressource pour une pêche vorace Informations communiquées par Mercedes Wangüemert, CCMAR, Université d’Algarve, Faro (Portugal) La surexploitation des holothuries a réorienté la pêche vers d’autres espèces, notamment celles de la Méditerranée et de l’Atlantique Nord où de nouvelles opérations se développent. Les pêcheurs sont toutefois confrontés à un sérieux problème, car plusieurs espèces d’holothuries de la même région présentent des ressemblances morphologiques, ce qui rend leur identification particulièrement difficile, sans compter qu’il existe très peu d’informations sur les stades de leur cycle biologique, la dynamique des populations et leur évolution passée. Le projet CUMFISH vise donc principalement à étudier les nouvelles pêcheries d’holothuries de la Méditerranée et de l’Atlantique et à évaluer la structure génétique de ces espèces, notamment les effets de sélection dus à la pêche. À cette fin, nous avons réalisé des études sur l’écologie, la reproduction, la génétique, le comportement, la croissance et les stocks des six espèces ciblées en Méditerranée et dans l’Atlantique Nord. Présentations ‡ Mercedes González-Wangüemert — CUMFISH Project. Sea cucumbers: the new resource for a hungry fishery. ‡ &KDQWDO&RQDQG³,QWHUQDWLRQDOUHJLRQDODQGORFDOHIIRUWVGXULQJWKHODVWGHFDGHWRSURPRWHWKHFRQVHUYDWLRQRI commercial sea cucumbers. ‡ 6DUD9DOHQWH³:HVWYHUVXV(DVW0HGLWHUUDQHDQ6HDRULJLQDQGJHQHWLFGLIIHUHQWLDWLRQRIWKHVHDFXFXPEHUHolo- thuria polii. ‡ )LOLSH+HQULTXHV³*HQHWLFFRQQHFWLYLW\SDWWHUQVLQHolothuria mammata considering different spatial scales. ‡ &DPLOOD0DJJL³3RSXODWLRQDQGJHQHWLFVWUXFWXUHRIParastichopus regalis (Cuvier, 1817) from the Mediterranean Sea and its commensal Carapus acus (Brünnich, 1768). ‡ 0HUFHGHV*RQ]iOH]:DQJHPHUW³6HDFXFXPEHULQWKH$HJHDQ6HD 7XUNH\ $VVHVVPHQWRIILVKHU\SURWHFWLRQ on growth and genetic structure. ‡ /XLVD&XVWRGLR³1XWULWLRQDOSURILOHDQGDQWLR[LGDQWDFWLYLW\RIVHDFXFXPEHUVIURPWKH0HGLWHUUDQHDQ6HDDQG north-eastern Atlantic. ‡ 6LONH%RVVHUV³7KHVHDFXFXPEHUPLFURELRPHSURMHFW ‡ 1XQR9DVFR³&80),6+LQ3HQLFKH:HVWRI3RUWXJDO ‡ 7LDJR%UDJD³&80),6+JHWLQYROYHGDVDYROXQWHHU ‡ 1DWKDOLH0DUTXHW³7KHUHSURGXFWLYHF\FOHRIWKHVHDFXFXPEHUHolothuria arguinensis in the Algarve (Southern Portugal): Preliminary results. ‡ -XOLDQ2OD\D³(FRORJ\RIHolothuria arguinensis: Estimation of population parameters and relation with subtrate types. ‡ &KLDUD0DJOLR]]L³7KHDQDO\VLVRIWKHHFRORJLFDOQLFKHRIHolothuria arguinensis for conservation purposes. ‡ -RUJH'RPtQJXH]³6HDFXFXPEHUV1HZSHUVSHFWLYHVIRU,QWHJUDWHGPXOWLWURSKLFDTXDFXOWXUH 6(&8,07$  ‡ 0DWWKHZ6ODWHU³,QWHJUDWHGDTXDFXOWXUHUHVHDUFKZLWKVHDFXFXPEHUVLQ(XURSH$IULFDDQG2FHDQLD ‡ &ROLQ+DQQRQ³'HYHORSLQJVHDFXFXPEHUDTXDFXOWXUH6SDZQLQJDQGODUYDOUHDULQJRIHolothuria forskali. Visite au laboratoire de terrain de Ramahete La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 71

Les participants à l’atelier.

Visite au laboratoire de terrain de Ramahete : examen d'Holothuria arguinensis.

4) Résumé de la réunion co-organisée par les gouvernements des Fidji, des Tonga et de la République des Îles Marshall sur le thème « La bêche-de-mer et l’avenir des pêcheries côtières du Pacifique », à Nadi (Fidji), 6–8 août 2014 Communiqué par A. Lovatelli, [email protected] ; S.W. Purcell, [email protected] ; C. Conand, [email protected] ; et H. Govan, [email protected]. L’Océanie arrive à un tournant critique dans la gestion de ses pêcheries côtières, notamment les holothuries. Vitale pour les communautés côtières de tous les pays de la région, la pêche côtière est synonyme à la fois de sécurité alimentaire et d'activité économique. Voilà plus de 150 ans que les holothuries sont exploitées dans les pays insulaires océaniens, comme aliment et produit d’exportation (Conand 1990 ; Kinch et al. 2008). Pour beaucoup de pays et d’innombrables communautés, les holothuries sont les plus précieuses des ressources d’invertébrés. Comme le disait un ancien directeur de la Division pêches de la CPS, si l’on ne peut gérer convenablement les pêcheries d’holothuries, on peut sérieusement 72 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 s’inquiéter du sort qui sera réservé aux autres pêcheries côtières. Or, il est consternant de voir que la gestion des pêche- ries d’holothuries a connu un échec retentissant dans la plupart des pays insulaires océaniens. Au cours des dix dernières années, la surexploitation des stocks n’a pas laissé aux gestionnaires d’autre choix que de fer- mer les plus grandes pêcheries d’holothuries du Pacifique : celles de la Papouasie-Nouvelle-Guinée et des Îles Salomon. Les pêcheries de Vanuatu et des Tonga sont elles aussi fermées depuis de nombreuses années en raison de l’épuisement des stocks (Pakoa et Bertram 2013). Parmi les quelques pays qui n’ont pas encore décrété de moratoire sur la pêche, les Fidji et Kiribati ont vu leurs stocks s’amenuiser à un rythme inquiétant. Ailleurs dans le Pacifique, les petites pêcheries sont soumises à d’intenses pressions et à une incidence croissante de la pêche illicite (Pakoa et Bertram 2013). En outre, dix espèces d’holothuries du Pacifique ont récemment été inscrites sur la Liste rouge des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) dans la catégorie des espèces « Vulnérables » et « En danger » (Conand et al. 2014). Cette récente inscription atteste que la disparition de la biodiversité constitue une menace supplémentaire, qui vient s'ajouter à la diminution des prises et au recul de la productivité. En réalité, les mesures et approches de gestion de la pêche des holothuries en Océanie sont insuffisantes et souvent inadaptées. Comme de nouvelles modalités de gestion de la pêche des holothuries devaient être trouvées d’urgence, une réunion ministérielle a été organisée en 2014 aux Fidji à l’initiative de l’UICN. Elle avait pour objectifs de : ‡ WURXYHUXQWHUUDLQG·HQWHQWHVXUO·pWDWGHVSrFKHULHVG·KRORWKXULHVHWOHVUHWRPEpHVVRFLRpFRQRPLTXHVGHO·H[SORL- tation de ces stocks et d’autres pêcheries côtières pour les pays insulaires océaniens, et reconnaître la nécessité de mesures urgentes ; ‡ GLVFXWHUGHVSUREOqPHVHWGHVSRVVLELOLWpVDILQGHV·DWWDTXHUHQVHPEOHHWDYHFHIILFDFLWpDX[PHQDFHVSHVDQWVXU ces stocks et aux difficultés rencontrées dans la gestion des holothuries et des autres pêcheries côtières ; et ‡ VXVFLWHUXQHYRORQWpSROLWLTXHHWGHVHQJDJHPHQWVDXQLYHDXPLQLVWpULHOHQYXHGHO·DGRSWLRQGHPHVXUHVHIILFDFHV de gestion de la pêche des holothuries et des autres espèces côtières, au niveau national et régional, dans le but de soutenir plus efficacement l’action menée à l’échelon national et local. Les principales déclarations présentées portaient sur les aspects suivants : ‡ (QYDOHXUOHVKRORWKXULHVYLHQQHQWHQGHX[LqPHSRVLWLRQGHVSrFKHULHVGX3DFLILTXHDSUqVOHVWKRQLGpVHWOD vente du produit séché (bêche-de-mer) sur les marchés asiatiques rapporte chaque année environ 50 millions de dollars des États-Unis aux communautés côtières. ‡ /DSrFKHGHO·KRORWKXULHUHVWHPDMRULWDLUHPHQWQRQUpJOHPHQWpHHWSHXV€UHTXDQGHOOHHVWSUDWLTXpHHQHDXSUR- fonde par des plongeurs sans brevet ou matériel adapté, qui mettent en danger leur santé, voire risquent leur vie dans les cas extrêmes. ‡ /·DGRSWLRQGHPRGDOLWpVGHJHVWLRQGXUDEOHDpWpDXF±XUGHVGpEDWVGHODUpXQLRQVXUODErFKHGHPHUHWO·DYHQLU des pêcheries côtières du Pacifique qui s’est tenue à Nadi (Fidji). Elle visait à bâtir dans la région une volonté collective pour gérer ces ressources efficacement afin que les générations futures puissent en profiter. ‡ /HVUpXQLRQVUpJLRQDOHVVXUODSrFKHRUJDQLVpHVGDQVOH3DFLILTXHVRQWPDMRULWDLUHPHQWFRQVDFUpHVDX[WKRQLGpV alors que les communautés côtières locales sont dépendantes de ressources côtières de plus en plus menacées. ‡ /HV pFXHLOV j VXUPRQWHU VRQW O·DOORFDWLRQ PDODYLVpH GHV UHVVRXUFHV GLVSRQLEOHV SRXU OD JHVWLRQ j WRXV OHV niveaux, l’absence de volonté politique pour l’adoption de nouvelles mesures de gestion et l’insuffisance de la gestion communautaire. Quelques idées et solutions potentielles sont ressorties des discussions, inspirées par les exposés et les contributions des chercheurs et des projets récents (Carleton et al. 2013 ; Purcell et al. 2014) : ‡ 0LVHHQSODFHG·XQUpJLPHUpJLRQDOGHFHUWLILFDWLRQRXGHODEHOOLVDWLRQGHVSURGXLWVLVVXVGHO·pOHYDJHRXGHOD pêche durable. Il faudrait ensuite intervenir sur les marchés de consommation pour encourager l’achat de pro- duits certifiés. ‡ &UpDWLRQG·XQHEDVHGHGRQQpHVUpJLRQDOHGHVH[SRUWDWHXUVGHErFKHGHPHUHWpWDEOLVVHPHQWG·XQHOLVWHQRLUH des entreprises qui encouragent les pratiques non viables. À l’inverse, celles qui contribuent à la gestion durable de la ressource pourraient être inscrites sur une liste blanche. ‡ 3DUWDJHGHVLQIRUPDWLRQVUpJLRQDOHVVXUOHVSUL[DILQGHV·DVVXUHUTXHOHVSD\VHWOHVFRPPXQDXWpVUHoRLYHQWOD juste valeur pour leurs ressources. ‡ 2UJDQLVDWLRQGHFRXUVGHIRUPDWLRQUpJLRQDX[VXUGHVDVSHFWVVSpFLILTXHVGHODFRPPHUFLDOLVDWLRQSRXUDSSRUWHU aux pays les compétences nécessaires à la gestion de la chaîne de valeur, notamment l’acquisition de bonnes tech- niques de traitement. ‡ &RRUGLQDWLRQGHVVDLVRQVGHSrFKHHWGHVPRUDWRLUHVGDQVO·HQVHPEOHGHODUpJLRQDILQTXHWRXWFRPPHUFHSUDWL- qué en dehors de la saison de pêche soit réputé illégal, sans qu’il soit nécessaire d’identifier l’origine du produit. Le Gouvernement australien a annoncé pendant la réunion qu’il fournirait au Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS) un important financement destiné à apporter aux pays insulaires océaniens une assistance technique et des informations fondées sur la science en vue de la gestion durable et de la conservation de leurs pêcheries côtières. La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 73

À la fin de la réunion, les ministres des Îles Cook, des Fidji, des Îles Marshall, de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, du Samoa, des Tonga et de Vanuatu ont signé un accord appelant à l’adoption de mesures pour contrer les menaces pesant sur les holothuries et les autres pêcheries côtières de la région. Cet accord s'articule autour de plusieurs élé- ments clés, notamment : i. montrer la voie au plan politique en instaurant d’urgence des régimes plus efficaces de gestion de la pêche côtière au niveau national et infranational tout en veillant à l’existence et au respect de mesures efficaces, pratiques et applicables, axées sur les capacités essentielles au niveau national et infranational, en examinant les engagements budgétaires et en renforçant la coordination entre les partenaires chargés de l’application de ces mesures ; ii. harmoniser le cadre régional de la pêche côtière, notamment le rôle des institutions, agences et ONG régionales et internationales afin de promouvoir la collaboration et l’intégration et de s’assurer que les pays bénéficient d’un appui vigoureux, coordonné et efficace en vue de la gestion de la pêche côtière ; iii. améliorer les structures et processus de partage des données et des informations sur les acheteurs, les marchés et les meilleures pratiques à l'échelle régionale, avec la CPS et avec les partenaires intéressés ; axer la recherche sur les débouchés et les mécanismes de marché susceptibles d’accroître la valeur de la bêche-de-mer pour les pays insulaires océaniens, et sur d’autres domaines contribuant à l’amélioration des connaissances et de la gestion des holothuries ; et iv. tenir une réunion ministérielle de suivi sur la pêche côtière en 2015. Rappelons qu’en 2011, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a organisé un atelier de formation sur la gestion des pêcheries d’holothuries au profit de nombreux pays insulaires océaniens, en concerta- tion avec la CPS, l’ACIAR et l’Université Southern Cross (FAO 2012 ; Purcell et al. 2014). Nous espérons que ces efforts aideront les pays à appliquer l’accord signé, en tenant compte parallèlement des orientations fournies dans la publica- tion qui récapitule les résultats de l’atelier (Purcell et al. 2014). Bibliographie

Carleton C., Hambrey J., Govan H. and Medley P. 2013. Effective management of sea cucumber fisheries and the beche- de-mer trade in Melanesia: Bringing the industry under rational control. A report prepared by Nautilus Consult- ants on Behalf of the Secretariat of the Pacific Community (SPC). Conand C. 1990. The fishery resources of Pacific island countries. Part 2. Holothurians. FAO Fisheries Technical Paper No. 272.2. Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of the United Nations. 143 p. Conand C., Polidoro B.A., Mercier A., Gamboa R.U., Hamel J.-F. et Purcell S.W. 2014. L'évaluation des holothuries aspi- dochirotes pour la Liste rouge de l'UICN et ses implications. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS 34:3–7. FAO. 2012. Report on the FAO Workshop on Sea Cucumber Fisheries: An Ecosystem Approach to Management in the Pacific (SCEAM Pacific). Nadi, Fiji, 15–18 November 2011. FAO Fisheries and Aquaculture Report. No. 1003. Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of the United Nations. 43 p. Kinch J., Purcell S., Uthicke S. and Friedman K. 2008. Population status, fisheries and trade of sea cucumbers in the Wes- tern Pacific. p. 7–55. In: Toral-Granda V., Lovatelli A. and Vasconcellos M. (eds). Sea cucumbers: A global review on fisheries and trade. FAO Fisheries Technical Paper No. 516. Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of the United Nations. 317 p. Pakoa K. et Bertram I. 2013. État des lieux de la gestion des pêcheries d’holothuries dans le Pacifique. La Bêche-de-mer, Bulletin d'information de la CPS 33:49–52. Purcell S.W., Lovatelli A. and Pakoa K. 2014. Constraints and solutions to managing Pacific sea cucumber fisheries with an ecosystem approach. Marine Policy 45:240–250.

5) Réunion des pays d’Amérique latine et des Caraïbes sur l’amélioration de la gestion et l’exploitation durable des holothuries, La Havane (Cuba), 30 avril 2014 Information communiquée par A. Lovatelli Plus de 50 spécialistes de 14 pays se sont réunis à La Havane (Cuba) pour partager leur expérience et faire progresser la gestion durable des pêcheries d'holothuries. Durant l'exposé sur la pêche de l’holothurie dans la région, il a été abondamment souligné que la surexploitation de ces animaux découle de leur commerce, le plus souvent illicite. Il a également été question de l’extension géographique de la filière bêche-de-mer, depuis les zones proches des principaux marchés consommateurs (à savoir la Chine) jusqu'à d’autres régions de production. Les Caraïbes étaient l’unique région encore épargnée, mais les négociants internationaux ont fini par s’y établir il y a deux ans, d’où la surexploitation des pêcheries. Du fait de leur sédentarité et des caractéristiques de leur cycle biologique, les holothuries sont vulnérables à la surpêche. Il a été rappelé que l’instauration et l'application de plans de gestion en rapport avec les moyens des orga- nismes compétents étaient les clés d’une action durable. 74 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015

Il a aussi été question de la récente évolution de l’holothuriculture, notamment des difficultés rencontrées dans les éle- vages, des possibilités d’élevage polyspécifique et de la nécessité de définir des objectifs réalistes avant de développer l’holothuriculture dans les Caraïbes. Enfin, les participants ont adopté la « Résolution sur la gestion et l’aquaculture des holothuries » qui sera présentée pour examen à la Commission des pêches pour l’Atlantique Centre-Ouest (COPACO). La résolution comprend les recommandations suivantes : i. recherches biologiques sur les caractéristiques du cycle biologique et la biologie de la reproduction des espèces d’intérêt commercial, notamment la taille à maturité sexuelle, la longévité, le recrutement et le taux de croissance ; ii. mise au point de techniques aquacoles pour l’élevage d’espèces autochtones dans le respect du principe de précaution ; iii. études socioéconomiques sur les communautés de pêcheurs et les intervenants de la chaîne de valeur ; iv. suivi des pêcheries d’holothuries et lutte contre la pêche et le commerce illicites ; v. recherche sur l’élaboration de nouveaux produits, dont les applications pharmaceutiques, et l’utilisation des sous-produits ; vi. études de marché et recherche sur le commerce international des holothuries et sa dynamique ; vii. renforcement du suivi et des contrôles par les autorités internationales, régionales, nationales et locales ; viii. élaboration et application de plans de gestion fondés sur une approche écosystémique de la pêche ; ix. collecte de données sur les captures, les prix, la transformation et le commerce international des holothuries ; x. renforcement des capacités sur l’ensemble des questions mentionnées ci-dessus ; xi. coordination des efforts dans le cadre de la COPACO ; et xii. mobilisation de financements auprès des gouvernements et des organisations régionales et internationales en vue de la mise en œuvre de mesures efficaces répondant aux différents points soulevés dans cette résolution.

Photo des participants à l’atelier.

6) Projet CUMFISH Portugal : Conférence sur la santé et la conservation des écosystèmes marins, Olhão (Portugal), 17–21 novembre 2014 Posters sur les holothuries ‡ 'RPtQJXH]*RGLQR-$6ODWHU06HUUmR($*RQ]iOH]:DQJHPHUW0³6HDJUDVVDVQHZSRWHQWLDOIRRG resource for sea cucumber aquaculture. ‡ *RQ]iOH]:DQJHPHUW0$\GLQ00DJJL&9DOHQWH6&RQDQG&³6HDFXFXPEHUVLQWKH0HGLWHUUDQHDQ Sea: Effects of their fishery on growth and genetic structure. ‡ 9DOHQWH6%RUUHUR3pUH]*6HUUmR($*RQ]iOH]:DQJHPHUW0³*HQHWLFSDWWHUQVDQGJURZWKSDUDPHWHUV of two new target sea cucumber species of the Mediterranean Sea fishery. ‡ *RQ]iOH]:DQJHPHUW0&iQRYDV)9DOHQWH6+HQULTXHV)5RGULJXHV)0DJJL&(U]LQL.*RQoDOYHV- 6HUUmR(&RQDQG&³&80),6+SURMHFW6HD&8FXPEHUVWKHQHZUHVRXUFHIRUDKXQJU\),6+HU\

7) Atelier sur la rascasse et l’holothurie, La Havane (Cuba), 29–30 avril 2014 http://www.infopesca.org/content/taller-sobre-pez-le%C3%B3n-y-pepino-de-mar-0#Publicaciones%20y%20 materiales La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 75 8) Deuxième cours de formation international sur la taxonomie moléculaire marine, Mostaganem (Algérie), 18–25 octobre 2014 Préparé par Abdelouahab Chouikhi, Réseau interislamique pour la science et la technologie sur l’océanographie, Izmir (Turquie), et Karim Mezali, Université d’Abdelhamid Ibn Badis, Mostaganem (Algérie). Les formateurs invités, Ahmed S. Tandar, Alexander Kerr et Igor Eeckhaut, ont présenté les holothuries au moyen de nombreux exemples pratiques et théoriques.

Réunions 2015 1) BEM Society — 44th Annual Benthic Ecology Meeting, Quebec City, Canada, 4–8 March 2015 Registration: 15 January 2015, http://www.bemsociety.org/ 2) Aquaculture 2015 — Cutting Edge Science in Aquaculture, Montpellier, France, 23–26 August 2015 www.aquaculture-conference.com 3) ICCB and ECCB, Montpellier, France, 2–6 August 2015 Registration: 1 December 2014, http://iccb-eccb2015.org/content/about-meeting 4) Progress in Echinoderm Palaeobiology, 2015 (PEP´15) in honour of Dr Andrew B. Smith, Zaragoza, Spain, 14–21 June 2015 5) Ninth WIOMSA Scientific Symposium, Durban, South Africa, 26–29 October 2015 WIOMSA secretariat ([email protected]) for more details 6) IEC Mexico 2015, Playa del Carmen, Mexico, May 25–29 May 2015 Contact: Francisco A. Solís-Marín, [email protected] 7) China Fisheries and Seafood Expo, Qingdao, China, 4–6 November 2015 http://www.chinaseafoodexpo.com/

Documentaires sur les holothuries 1) L’or noir du Pacifique Réalisateurs : Dominique Roberjot/Christine Della-Maggiora (information communiquée par C. Conand) Les bêches-de-mer ou holothuries sont assez peu connues. Elles viennent pourtant en deuxième position des exporta- tions océaniennes de produits de la mer après les thonidés. Elles sont exploitées depuis le XIXe siècle pour les marchés asiatiques. Avec la croissance économique de la Chine, la demande a récemment explosé au point que plusieurs pays du Pacifique ont surexploité leurs ressources. En Nouvelle-Calédonie, plusieurs initiatives ont été lancées pour protéger les holothuries, veiller à leur exploitation durable et protéger la santé des lagons. Ce documentaire, L’or noir du Pacifique, permettra d’en apprendre davantage sur cet étrange animal, de la Nouvelle-Calédonie à Vanuatu, en passant par Hong Kong et les Fidji. 52 minutes ; Format HD 1 920 x 1 080 ; Son AIFF ; Documentaire ; Tous publics ; Bêche-de-mer ; Langues : français, anglais, chinois, bislama, fidjien ; Sous-titres français ; Année de production 2014, Nouvelle-Calédonie (France) ; Société de production : Latitude 21 Pacific, 1768 rue du pic Kou, la Coulée, 98809 Mont-Dore (Nouvelle-Calédonie). Tél. : +687 446827 ou +687 504938 ; Distribué par Latitude 21 Pacific ; Première diffusion télévisée sur NC 1ère : mars 2014 ; Diffusion non commerciale par l’IRD Calédonie, Service des pêches de la Province Nord de Nouvelle-Calédonie ; Sélec- tionné au Festival Les ÉCRANS DE LA MER 2014. Le film a été présenté le 11 octobre au Palais Longchamp, à Marseille (France), à l’occasion de la Fête de la science, et commenté par C. Conand pour le compte de l’IRD. 2) Découverte de l’emploi massif d’antibiotiques dans un élevage d’holothuries CRJ English.com (Information communiquée par S. Purcell) Un article a été publié dans la presse chinoise sur l’emploi d’antibiotiques dans l’holothuriculture. Voir l’adresse : http://english.cri.cn/12394/2014/09/10/3781s843618.htm 3) La chasse à l’holothurie à l’origine d’un marché noir CCTV America sur Youtube Nouveau documentaire sur la pêche de l’holothurie dans le Yucatán (Mexique). À la fois prenant et bien filmé, il présente la situation du point de vue des pêcheurs. Disponible à l’adresse : https://www.youtube.com/watch?v=XUWtMZpBov4 76 La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 Livres 1. The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. 2015 – Academic Press. 454 p. Chapitres de l’ouvrage : 1. Yang H. and Bai Y. 2015. Chapter 1. Apostichopus japonicus in the life of Chinese people. p. 1–23. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 2. Liu G., Sun J. and Liu S. 2015. Chapter 2. From fisheries toward aquaculture. p. 25–36. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 3. Zhao H. 2015. Chapter 3. Taxonomy and identification. p. 37–52. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 4. Gao F. and Yang H. 2015. Chapter 4. Anatomy. p. 53–76. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 5. Liu J. 2015. Chapter 5. Spatial distribution, population structures, management, and conservation. p. 77–86. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 6. Wang Q., Zhang T., Hamel J.-F. and Mercier A. 2015. Chapter 6. Reproductive biology. p. 87–100. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 7. Liu S., Sun J., Ru X., Hamel J.-F. and Mercier A. 2015. Chapter 7. Broodstock conditioning and spawning. p. 101–110. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 8. Qiu T., Zhang T., Hamel J.-F. and Mercier A. 2015. Chapter 8. Development, settlement, and post-settlement growth. p. 111–132. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: His- tory, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 9. Zhang L., Pan Y. and Song H. 2015. Chapter 9. Environmental drivers of behaviour. p. 133–152. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 10. Xu Q., Hamel J.-F. and Mercier A. 2015. Chapter 10. Feeding, digestion, nutritional physiology, and bioenergetic. p. 153–176. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biol- ogy and aquaculture. Academic Press. 454 p. 11. Wang T., Sun L. and Chen M. 2015. Chapter 11. Aestivation and regeneration. p. 177–210. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 12. Zhao H., Chen M. and Yang H. 2015. Chapter 12. Albinism. p. 211–228. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. (eds.). The sea cucumber Apostichopus japonicus: History, biology and aquaculture. Academic Press. 454 p. 13. Gao F. and Yang H. 2015. Chapter 13. Tissue biochemistry. p. 229–241. In: Yang H., Hamel J.-F. and Mercier A. 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La vidéo de formation a été réalisée en anglais et les trois versions océaniennes sont en cours de finalisation. Un petit nombre d’exemplaires sur DVD sera distribué. La vidéo sera mise en ligne sur le site Web de l’ACIAR, et sera également disponible sur YouTube à l’adresse : https://www.youtube.com/watch?v=P4KdY68ktsk. Les collaborateurs du projet ont commencé à dispenser les ateliers de formation dans les villages des Fidji, des Tonga et de Kiribati. Il s’agit d’ateliers pratiques d’une journée, durant lesquels les pêcheurs peuvent découvrir toutes les méthodes de transformation des différentes espèces d’holothuries, et d’une courte session de suivi deux jours plus tard. Les recherches prévues serviront à valider les interventions menées au titre du projet afin de les transposer ensuite dans d’autres pays insulaires. L’évaluation des impacts permettra d’apprécier dans quelle mesure l’aide fournie aux pêcheurs les a incités à se consacrer davantage à la transformation des captures, et, donc, d'estimer les effets indirects sur la pérennité de la ressource. Le projet est dirigé par l’Université Southern Cross et réalisé avec la collaboration de l’ONG Partners in Community Development Fiji, du ministère de l’Agroalimentaire, des Forêts et des Pêches des Tonga, du ministère des Pêches et des Ressources marines de Kiribati, de l’Université James Cook et du Secrétariat général de la Communauté du Pacifique.

Les ateliers de formation sur la valorisation après récolte dispensés aux Fidji (gauche), aux Tonga (centre) et à Kiribati (droite). La Bêche-de-mer, Bulletin de la CPS N°35 - Juin 2015 79 Articles scientifiques Bahrami Y., Zhang W., Franco C. 2014. Discovery of novel saponins from the viscera of the sea cucumber Holothuria les- soni. Marine Drugs 12(5):2633–2667. Bahrami Y., Zhang W., Chataway T. and Franco C. 2014. Structural elucidation of novel saponins in the sea cucumber Holothuria lessoni. Marine Drugs 12(8):4439–4473. Díaz-Balzac C.A., Vázquez-Figueroa L.D. and García-Arrarás J.E. 2014. Novel markers identify nervous system compo- nents of the holothurian nervous system. Invertebrate Neuroscience 14(2):113–125. Dolmatov I.Y. 2014. New data on asexual reproduction, autotomy, and regeneration in holothurians of the Order Den- drochirotida. Russian Journal of Marine Biology 40(3):228–232. Eriksson H., de la Torre-Castro M., Purcell S.W. and Olsson P. 2014. 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