Prodrome D'une Histoire De La Bryologie Idanienne
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Les Nouvelles Archives de la Flore jurassienne et du nord-est de la France, 13, 2015 Prodrome d’une histoire de la bryologie idanienne par Marc Philippe, Gilles André, Michel Hoff et Mélanie Thiébaut Gilles André, 76 rue du Hurepoix, F-91470 Limours Courriel : [email protected] Michel Hoff, Herbier de l’Université de Strasbourg, Institut de Botanique, 28 rue Goethe, F-67083 Strasbourg Courriel : [email protected] Marc Philippe, Université Lyon 1, 7 rue Dubois, F-69622 Villeurbanne cedex. Courriel : [email protected] Mélanie Thiébaut, Herbiers de l’Université Lyon 1, 9 rue Dubois, F-69622 Villeurbanne cedex Courriel : [email protected] Résumé – L’histoire des connaissances sur la bryoÅore de l’Ain est retracée. De nouveaux éléments sont apportés sur ses prémices, à la Än du XVIIIe siècle, notamment grâce à la découverte, aux Herbiers de l’Université Lyon-1, d’un moussier attribué à Claret de La Tourrette et Gilibert. Puis sont listés les botanistes ayant collecté, déterminé ou publié des données bryologiques pour l’Ain. Leur biographie est esquissée, notamment pour ceux qui ne sont pas inclus dans les sources classiques. Leur contribution à la bryologie idanienne est décrite. EnÄn, le lieu de conservation de leurs récoltes est précisé, si possible. Abstract – The history of bryological knowledge is traced for the Ain department. In particular, new data about its very beginning, at the end of the XVIIIth century, are described. They mostly come from a newly rediscovered Lyon-1 university moss-herbarium attributed to Claret de la Tourrette and Gilibert. Then the bryologists whose collected, determined or published bryological data for this department are listed. Their biography is shortly described, especially for those whose are not included in classical compendia. Their contribution to bryology is described. Eventually, available informations are given about the place where their collections are kept. Mots-clés : bryologie, département de l’Ain, histoire, botanique, Claret de La Tourrette, Touton. épourvu de centre de tra- tions selon les époques inopéran- logues de l’Ain jusqu’en 1906. Il dition universitaire, l’Ain tes ou efficaces. Cet état de fait est n’est cependant pas exhaustif et l’in- D n’est cependant pas resté particulièrement marqué pour le croyable richesse des documents à l’écart du grand mouvement de domaine de la bryologie. accessibles sur le web permet aussi recensement naturaliste qui a couru L’histoire de la bryologie de l’Ain bien de compléter pour la période e e de la fin du XVIII au XX siècle. n’est donc pas celle d’une tradition postérieure à 1906 que d’appor- En effet, à ses portes, les villes de linéaire où se succèdent des com- ter nombre d’éléments nouveaux Genève et de Lyon ont fourni des pétences locales et il faut mobili- concernant la période antérieure. compétences qui ont exploré l’Ain. ser de nombreuses sources pour La visite des archives a également Les Francs-Comtois ont également tenter d’en brosser les grandes apporté son lot de surprises. visité la Haute-Chaîne du Jura pro- lignes. A. Magnin, né dans l’Ain Parallèlement à la préparation d’un longement naturel de leurs monta- puis successivement professeur à catalogue des bryophytes de l’Ain gnes. Des naturalistes de l’Ain, enfin, Lyon, à Besançon avant de revenir (Philippe et al., 2014), une com- ont apporté leurs contributions. Il à Montluel dans l’Ain, a, en 1906, pilation des données a permis de résulte de ce processus tripolaire publié un Prodrome d’une histoire regrouper les éléments d’une his- une littérature disséminée dans de des botanistes lyonnais. Celui-ci est toire de la bryologie idanienne. Ces nombreuses sources, des collabora- largement pertinent pour les bryo- éléments sont présentés ici, même 51 Prodrome d’une histoire de la bryologie idanienne s’il reste quelques zones d’ombre. de la Tourrette dans son « Voyage au et al., 2006). L’étude de la partie Les bonnes volontés qui auraient Pilat » (1770) nommait déjà douze bryophytique montre : envie de les éclairer sont chaude- espèces de bryophytes et ajoutait – un ordre et une liste de taxons ment bienvenues. « On voit au Pilat un grand nombre traités quasi-identiques à ceux de d’autres mousses que je n’ai pas eu le la Chloris de La Tourrette mais temps de déterminer en herborisant ». aussi à ceux de la 4e édition des La bryologie pré- Dans sa Chloris lugdunensis (1785), Démonstrations élémentaires de hedwigienne dans quinze ans plus tard, il citait une Botanique en 1796 (un ouvrage de centaine de bryophytes. La Chloris l’Ain, un démarrage La Tourrette et de l’abbé Rozier, ini- lugdunensis a eu un retentissement tialement publié en 1766, complè- relativement précoce national. Depuis Linné, on pen- tement revu par Gilibert) ; sait en effet que l’Europe du Sud Les premières données sur des mous- était pauvre en bryophytes. Les – une numérotation semblable ses du Jura sont probablement celles investigations bryologiques limi- à celle qu’a pratiquée Gilibert rapportées par Haller (1768). Ce tées des botanistes montpelliérains dans plusieurs de ses publications botaniste suisse a eu un rayonne- n’avaient pas remis cette idée en (Tableau I) ; ment immense en Europe. Il men- cause. Pourtant, avec ses cent espè- – des numéros exactement inter- tionne la présence de plusieurs espè- ces de bryophytes (dont cinquante médiaires entre ceux utilisés par ces de mousses « in Jura monte » sans mentionnées du Bugey), la Chloris Gilibert en 1798 puis plus tard plus de précision (les monts Jura démontrait clairement le contraire en 1806. sont sensu stricto la Haute-Chaîne pour les connaissances de l’épo- au sud du Col de la Faucille) mais que. Le catalogue de l’Ain compte Gilibert et La Tourrette travaillaient également de la « Dolaz » (ancien aujourd’hui, en effet, environ 600 ensemble, avant comme après la nom du massif de la Dôle). À l’in- espèces (Philippe et al., 2014) (la période lituanienne de Gilibert certitude géographique s’ajoute Scandinavie plus d’un millier) mais (Gilibert, 1798), aussi est-il très une incertitude nomenclaturale, e à la fin du XVIII siècle, on était difficile de dire qui est le collec- les noms utilisés par Haller étant encore loin de ce niveau de complé- teur des échantillons de ce mous- pour beaucoup intransposables dans tude. Au niveau national, la Chloris sier et qui a assuré les détermina- la nomenclature actuelle. Comme a certainement stimulé les recen- tions. La numérotation étant pos- la majorité des données bryophy- sements bryologiques même si les térieure à l’ouvrage de 1798, La tiques du XVIIIe siècle, celles de publications bryologiques ont été Tourrette décédant en 1793 et quel- Haller (1768) sont sujettes à cau- peu nombreuses durant la période ques échantillons datant de 1810, tion et peu utilisables. révolutionnaire. c’est bien Gilibert qui a confec- En quelques années à la fin du tionné le moussier. Cependant, on XVIIIe siècle, paraissent deux ouvra- Un moussier a été récemment ana- note que la seule personne citée, ges fondamentaux pour la bryo- lysé aux Herbiers de l’Université de rares fois, comme collecteur est logie (Sloover & Bogaert-Damin, Lyon-1. Provenant, avec l’herbier « .Do St-Victor » (Jean Mathieu de 1995) : le Muscorum frondosum Jordan, des collections de l’Univer- Varennes Bissuel de Saint-Victor, d’Hedwig (1787, 1789) puis le sité Catholique de Lyon, il est pro- Thizy (69), 11/11/1738 -Lyon, Muscologia recentiorum de Bridel bablement dû à Gilibert puisque 04/12/1793), jamais mentionné (1797, 1798, 1801, 1803). Villars, les indications manuscrites sont par Gilibert mais que La Tourrette alors à Grenoble (1789), pressent de sa main et qu’il s’insère dans un indique comme ami (1785) et qui clairement combien ces travaux vont herbier de 26 volumes dont l’un collabora avec La Tourrette à partir révolutionner la bryologie, notam- signé de lui. Ceci était inattendu de 1771 (Magnin, 1884a). De ment grâce à leurs illustrations. Il dans la mesure où, d’après Roux plus, de nombreux échantillons ajoute que La Tourrette s’occupe de (1905), les herbiers et manuscrits sont indiqués comme provenant mousses et qu’il va sans doute faire de Gilibert furent vendus à la mort du « Bugei » (sic, les étiquettes avancer beaucoup les connaissan- de son fils comme vieux papiers. mêlent le latin et le français mais ces sur la bryologie de la région de Cependant, on sait que Jordan a les noms de lieux sont en français Lyon grâce aux ouvrages d’Hedwig récupéré quelques collections de et d’orthographe variable) ou de et de Bridel. Effectivement Claret Gilibert (Magnin, 1906a ; Faure « Dortan ». La Tourrette avait, du 52 Les Nouvelles Archives de la Flore jurassienne et du nord-est de la France, 13, 2015 Tableau I : analyse du traitement des dix premières espèces du genre Mnium (genre 1310 de Linné) dans la Chloris Lugdunensis (La Tourrette, 1785) puis dans les diverses publications de Gilibert (1792, 1796, 1798, 1806, 1809) ainsi que dans le moussier de l’Université Lyon 1 (date de confection estimée vers 1802). Pour les publications les indications données sont rapportées. Pour le moussier ce sont les numéros de parts, l’éventuelle indication de provenance et la détermination proposée (MP). Abréviations de La Tourrette : Bell = Beaujolais ; Bell.M = Monts du Beaujolais ; Beug.M = Monts du Bugey ; Delph. = Dauphiné ; For.M = Monts du Forez ; Lugd. = Lyonnais ; Lugd.M = Monts du Lyonnais. Abréviations de Gilibert : Lugd. = Lyonnais (au sens large, Pilat, Forez et Beaujolais inclus). A part quelques inversions (logique ?) l’ordre est le même. À son retour de Lituanie, Gilibert ne semble avoir qu’une connaissance réduite de la bryoÅore régionale. Celle-ci s’améliore progressivement à partir de 1798 (La Tourrette est décédé en 1793, Dejean est rentré à Lyon en 1796) où l’on voit apparaître des localités de Gilibert (ex.