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Hexatinellides Cytologie Systématique Caulophacus cyanae, n. sp., une Biogéographie éponge hexactinellide Hexatinellid Cytology Taxonomy des sources hydrothermales. Biogeography Biogéographie du genre Caulophacus Schulze,1887.

Nicole BOURY-ESNAULT a, Louis DE VOS b a Centre d'Océanologie de Marseille, Station Marine d'Endoume, rue de la Batterie des Lions, 13007 Marseille, France. b Université Libre de Bruxelles, Laboratoire de Biologie animale et cellulaire, 50 avenue Franklin D. Roosevelt, 1050 Bruxelles, Belgique.

RÉSUMÉ Une nouvelle espèce de Caulophacus, Caulophacus cyanae (Hexasterophora, Lyssacinosa, Caulophacidae) est décrite en provenance des sources hydrothermales de la ride du Pacifique Est par l3°N. Elle a été récoltée par la soucoupe Cyana à 2660 m de profondeur, et fixée après le retour à bord. Cette espèce est caractéristique des cheminées éteintes et n'a jamais été trouvée à l'extérieur du graben. Au MEB et au MET les chambres choanocytaires sont composées de corps à collerette ("collar bodies" de Mackie, Singla, 1983), bourgeons énucléés des choanoblastes. Les chambres choanocytaires sont ovoïdes et leur plus grand diamètre varie de 80 à 120 J.lID. Les éléments à collerette sont constitués d'une rme lamelle de cytoplasme (0,6 à 0,8 J.lID d'épaisseur), d'une collerette composée d'une quarantaine de microvillosités, atteignant 4,5-5 J.lID de longueur et 1,5-2 J.lID de diamètre, et d'un flagelle lisse de 10 J.lID de long. Dans une coupe d'une chambre choanocytaire on peut observer 5-7 amas de choanoblastes. Chez Caulophacus cyanae, les corps à collerette perdent leur connexion avec leurs choanoblastes d'origine, et les jonctions bouton-pression ne sont présentes qu'au début du bourgeon­ nement, contrairement aux observations de Mackie et Singla dans une autre famille de Lyssacinosa, les . Quatorze espèces de Caulophacus ont été décrites dans la littérature ; deux proviennent de l'Arctique, cinq de l'Antarctique, trois du Pacifique, une de l'Atlantique et trois de l'Océan Indien. Il semble, lorsqu'on rapporte les coordonnées géographiques des auteurs aux cartes actuelles, qu'un grand nombre de ces espèces soient localisées dans des zones accidentées du relief océanique, telles les dorsales et les fosses, et il serait intéressant de rechercher si ce genre d'hexactinellide ne serait pas un indicateur de zones d'hydrothermalisme.

. Oceanol. Acta, 1988. Actes du Colloque Hydrothermalisme, Biologie et Écologie, Paris, 4- . 7 novembre 1985, 51-60.

Caulophacus cyanae n. sp., a new from ABSTRACT hydrothermal vents. Biogeography of the genus Caulophacus Schulze, 1887

A new Caulophacus species, Caulophacus cyanae (Hexasterophora, Lyssacino~, Caulophacidae), from the area of hydrothermal vents of the East Pacific ridge at l3°N, is described. It was collected by the Cyana diving saucer at a depth of 2 660 m,and fixed just after arrival on board. This species is typical of the extinct chimneys, and has never been found outside the graben. In TEM and SEM, the choanocyte chambers are composed of enucleate outgrowths of choanoblasts called by Mackie and Singla (1983) "collar bodies". The choanocyte chambers

51 r N. BOURY-ESNAULT, L. DE VOS

are ovoid and their larger diameter varies from 80 to 120 J.U11. The collar bodies are made of a thin (0.6-0.8 J.U11) sheet of cytoplasm, a collar of approximately 40 microvilli sorne 4.5-5 J.U11 in length and 1.5-2 J.U11 in diameter, and a smooth flagellum 10 J.U11 in length. In one single section of a choanocyte chamber, 5-7 clusters of choanoblasts have been counted. In Caulophacus cyanae, the coIlar bodies lose their connections with the choanoblasts and plug junctions have only been observed at the beginning of budding, contrary to the observations of Mackie and Singla in another family of Lyssacinosa, the Rossellidae. Fourteen Caulophllcus species have been described in the literature : two found in the Arctic Ocean, five in the Antarctic, three in the Pacific, one in the Atlantic and three in the Indian Ocean. If the goegraphical positions given by the authors are plotted on the latest maps, it may be seen that most of these species come from rises and trenchs, and it would be interesting to investigate whether this genus of Hexactinellida could be a good indicator of regions of hydrothermalism.

Oceanol. Acta, 1988. Hydrothermalism, Biology and Ecology Symposium, Paris, 4-7 November, 1985, Proceedings, 51-60.

INTRODUCTION Le spécimen-type a été déposé au Museum National d'Histoire Naturelle de Paris sous le numéro LBIM.NBE­ Au cours des missions Biocyarise et Biocyatherm, sur la LDV.1. La localité-type est la même pour tous les ride du Pacifique Est, par 13°N, dans une zone à fort spécimens, ses coordonnées géographiques sont 12°49' hydrothermalisme, une population relativement importante N-/l03°57'O par 2660 m. d'une hexactinellide blanche en forme de champignon a été observée et récoltée dans le graben, par 2 660 m de profondeur. Ces éponges sont très souvent fixées sur les parois verticales des cheminées éteintes, et n'ont jamais été observées à l'extérieur du graben. Cette espèce fait partie de la sous-classe des Hexasterophora et de la famille des Caulophacidae que Ijima (1926) défmit de la façon suivante: "Éponge en forme de gobelet ou de champignon présentant toujours une tige et solidement fixée au substrat ; solitaire ou formant de petits bouquets branchus ; le squelette ectosamique est constitué de petits hexactines, rarement pentactines, pinules dermiques et de forts pentactines hypodermiques ; ces derniers sont généra-Iement seuls rarement remplacés par des rhabdodiactines hypodermiques. Les mégasclères choanosomiques sont des hexactines et des rhabdodiactines. Les hexasters sont variés, avec ou sans strobiloplumicome."

MATÉRIEL ET MÉTHODES

La Cyana a pu récolter quelques échantillons de cette hexactinellide grâce à l'utilisation de son bras manipulateur et de paniers fermant permettant de ramener en surface les échantillons dans les meilleures conditions possibles. Juste après l'arrivée à bord, 2 heures à 2 heures 30 après la récolte, les spécimens ont été fixés par le glutaraldéhyde à 3 % tamponné au cacodylate, puis postfixé dans une solution Os04 à 2 %. Les échantillons ont ensuite été traités pour la microscopie électronique à transmission et à Ill, balayage (Boury-Esnault et al., 1984). Pour les observations du choanosome au MEB, le squelette siliceux 1 Figure 1 1 a été éliminé par immersion des pièces dans une solution d'acide fluorhydrique à 5 %, avant séchage au point Bouquet de plusieurs individus de taille différente de CauJophacus cyanae. Photographie prise à partir de la Cyana de l' in silu. critique. Les pièces sont observées dans le MEB ISI 130 Bunch of several individua/s of dijferenlS sizes of Caulophacus du service de microscopie électronique de l'Université Libre cyanae. Photograph takenfrom the Cyana. animal in situ. de Bruxelles. Trois échantillons ont ainsi servi aux différentes préparations. 52

'1 - UNE HEXACTINELLIDE NOUVELLE D'UNE ZONE HYDROTHERMALE faisceaux de 5 à 7 spicules. Ces faisceaux ascendants de diactines sont reliés entre eux par les grands hexactines, avec lesquels ils forment un réseau à larges mailles. Dans les mailles de ce réseau principal, les discohexasters forment un réseau secondaire à mailles plus petites qui soutient les chambres choanocytaires (fig. 13). L'ensemble de la surface est soutenue par une couche de pinules (fig. 5), dont l'actine distale hérisse la membrane dermique. Les actines tangentielles forment entre elles, un réseau à petites mailles de 70-90 J.lID de côté qui recouvre toutes les cavités sous jacentes et entre lesquelles s'ouvrent les orifices inhalants. Ces pinules reposent sur une couche plus profonde (fig. 12) de pentactines dans lesquels ils sont fichés par leur actine proximale. Les pentactines soutien­ nent donc les pinules et la membrane dermique ; les actines tangentielles forment un réseau à maille de 300 à 500 J.lID de côté dans lesquelles s'ouvrent les cavités aquifères. L'actine proximale des pentactines ancre tout ce squelette ectosomique dans l'ensemble du squelette choanosomique (fig. 12). ;

. Spicules

Pinules (fig. 8) Ils sont constitués d'une actine distale formée d'écailles, de 4 açtines tangentielles et d'une actine proximale finement épineuses ; l'actine proximale peut être atrophiée. Nous Figure 2 n'avons pas trouvé de différences notables entre les pinules Aspect de CauIophacus cyanae. Photographie prise à bord de la de la face inférieure et ceux de la face supérieure du Cyana de l'arùmal in situ. chapeau. Par contre les pinules de la tige ont pratiquement Aspect of Caulophacus cyanae. Phatograph talœn from the Cyana tous l'actine proximale atrophiée. Actine distale: 210-338 animal in situ. . J.lID/16-27 J.lID ; actines tangentielles: 81-109 J.lID/4-6,7 J.lID ; actine proximale : 67,5-102,6 J.lIDI4-6,7 J.lID, qui, DESCRIPTION lorsqu'elle est atrophiée, forme un bouton de 5;2.-7,8 J.lID de haut Les spécimens de l'éponge récoltée· se présentent en bouquets de plusieurs individus de tailles très différentes Pentactines (fig. 11) (fig. 1). Chaque bouquet représente 3 à 10 grands individus Les actines tangentielles sont lisses et égales~ et l'actine sur les tiges desquels sont llXés les individus plus jeunes. proximale est couverte de microtubercules. Actines Chaque individu est constitué d'une tige et d'un chapeau tangentielles 426,4-598 J.lID120,8-26 J.lID actine arrondi comme celui d'un champignon (fig. 2). La tige proximale 291-457,6 J.1ID/15,6-26 J.lID. creuse (fig. 3) peut atteindre 30 à 50 cm de haut et le chapeau, un diamètre de 10 cm. Le plus petit spécimen Hexactines (fig.6) récolté a une tige de 2,5 cm de long et un chapeau de 1 Les actines sont soit lisses soit présentent de très fines cm de diamètre. Le chapeau présente une face supérieure épines à la base ; elles sont égales. Actines : 343-1331 convexe et une face inférieure concave; la tige s'insère au J.lID/20,8-36,4 J.lID. centre de la face inférieure. Le diamètre de la tige varie de 1 à 5 mm et le canal central représente le tiers du diamètre. Diactines lis peuvent être de taille très variable de 1000-9000 J.lID. Squelette Mais ilS: présentent tous la même morphologie. Ils possèdent en leur milieu un renflement dans lequel on peut Le squelette de la tige, constitué de faisceaux de diactines observer une petite vésicule parcourue par le canal central flexueux de plusieurs millimètres réunis entre eux par des longitudinal qui est coupé à angle droit par un second canal synapticulia (fig. 4), présente une grande cohésion et une qui constitue l'axe du renflement. Les extrémités sont grande rigidité. Des pentactines sont fichés dans les arrondies et couvertes de fines épines qui n'atteignent pas mailles du réseau réalisé par les diactines et les tout à fait la terminaison du spicule. Dans le chapeau les synapticulia et soutiennent la couche de pinules dimensions sont: 1103-1701 J.lID/8,1-12,1 J.lID et 9,4-14,9 superficiels qui recouvre toute la tige. Les pinules de la J.lID au renflement Dans la tige ils peuvent atteindre 9000 tige montrent dans la plupart des cas une actine proximale J.lID de long pour 21 J.lID de large. atrophiée. Les faisceaux de diactines de la tige en pénétrant dans le chapeau s'épanouissent comme les baleines d'un Discohexasters 1 (fig. 7) parapluie et s'arrêtent juste sous la surface supérieure. Ils lis sont formés de 6 actines toutes égales, droites ou ne sont plus reliés par les synapticulia et forment de petits courbées, couvertes de fortes épines récurvées et terminées

53 N. BOURY-ESNAUL T, L. DE VOS par une extrémité en forme de cupule denticulée. Le bord s'agissait de cellules ou d'un syncytium, les limites de cette cupule porte 8 épines et le sommet peut être soit cellulaires n'étant pas visibles par cette technique (fig. 12). arrondi soit montrer un mucron. 67,5-118,8 J.Unl4,05-10, 8 JlIIl. Choanosome Le choanosome est constitué par de larges chambres ovoïdes de 80 à 120 JlIIl de diamètre représentant un Discohexasters 2 (fig. 9) volume moyen de 600 000 JlIIl3 (fig. 14,21). Les chambres reposent sur une couche de fibres de collagène Ils sont distribués dans tout le choanosome. Ils sont dense constituant la mésolamelle (fig. 18,22,23). Chaque constitués de 6 actines principales lisses qui se divisent chambre est formée d'une couche de choanocytes anuc1éés chacune en une douzaine d'actines terminales fmement appelés par Mac1cie et Singla "corps à collerette". Chaque épineuses recourbées et terminées en cupule dentelée. corps à collerette est formé d'un disque de cytoplasme de Diamètre total : 51,3-67,7 JlIIl ; actines principales: 4,05- 1,3-2 Jllll de diamètre et de 0,42~I,2 JlIIl de hauteur (fig. 6,7(2-2,7 JlIIl ; actines terminales 21,6-27/1-1,5 JlIIl. Les 14,24), surmonté d'une collerette d'une quarantaine de actines principales sont toujours beaucoup plus courtes microvillosités de 1,5 à 2 Jllll de diamètre, pouvant que les terminales et le rapport se trouve le plus souvent atteindre 4-5 JlIIl de haut Au centre un flagelle de 0,25 Jllll de 1-4. de diamètre et pouvant atteindre 10 JlIIl de long assure par son battement la circulation de l'eau. Chaque chambre est On trouve très souvent une troisième catégorie constituée de 10 000 à 25 000 corps à collerette. Entre la d'oxyhexasters qui se distingue de la précédente seulement couche de collagène et les corps à collerette, on observe de par une taille plus faible (fig. 10) ; leur diamètre varie de place en place autour des chambres des amas de 3 à 6 35-45 JlIIl et les actines terminales ont un diamètre cellules avec un gros noyau (fig. 14,15,24). Ces cellules inférieur au micron. sont des choanoblastes qui par bourgeonnement donnent naissance aux corps à collerette. Un choanoblaste peut bourgeonner 1-3 corps à collerette en même temps (fig. Ectosome 15,16,24). On a pu observer, aussi bien en MET qu'en MEB, que les L'ectosome est constitué d'une membrane dermique fine corps à collerette gardent pendant un certain temps leurs qui est soutenue par la couche de pinules. Lorsque l'on connexions avec le choanoblaste dont ils sont issus par désilicifie un échantillon les pinules disparaissent, mais il l'intermédiaire d'une jonction caractéristique bouton­ persiste leurs fantômes matérialisés par la membrane. pression décrite par Mac1cie et Singla (1983 ; fig. 17,25). dermique qui les recouvre (fig. 20). Les pinules et les Ensuite cette jonction se rompt et chaque corps à collerette actines tangentielles des pentactines recouvrent les cavités devenu indépendant vient rejoindre l'alignement des corps à aquifères sous-dermiques (fig. 12). Celles-ci sont collerette précédemment bourgeonnés. Nous n'avons obser­ également recouvertes d'une membrane fine. Ces vé aucune structure entre la mésolamelle et les corps à membranes n'ont pas pu être observées en microscppie collerette qui reposent directement sur elle sans intermé­ électronique. En microscopie optique on peut observer de diairevisible. place en place sur ces membranes des noyaux colorés par Le mésohyle est très mince. Il est constitué la fuschine, mais nous n'avons pas pu déterminer s'il principalement par des faisceaux de collagène dense, d'une

Figure 3 Figure 7 Section transversale de la tige montrant le canal central et les Discohexaster 1 à épines récurvées. faisceaux de diactines. Discohexaster 1 wilh recurved spines. Transverse section of the stalk showing the central canal and fascicles of diacts. Figure 8 Pinule. Figure 4 Pinule. Les faisceaux de diactines de la tige sont soudés entre eux par des synapticulia. En surface, on peut observer des pentactines fichés Figure 9 dans les mailles formés par les synapticulia. Discohexaster 2. Noter que les rayons principaux sont plus courts The fascieles of diacts are joined by synapticulia. On the surface, que les rayons terminaux. pentacts are pegged into the meshes formed by synaptieulia. Discohexaster 2. The principal rays are smaller than the terminal ones. Figure 5 Une couche de pinules entoure tout le corps. Les actines Figure 10 tangentielles forment en surface un réseau à mailles quadrangulaires Discohexasters 2 et 3 dont les actines terminales sont très fmes. à l'intérieur desquelles s'ouvrent les orifices. Discohexasters 2 and 3. the terminal actins ofwhich are very thin. A layer of pinules surrounding the whole body. The tangential actins form a network with quadrangular meshes. The inhalant Figure 11 apertures open in these meshes. Pentactine. Noter les microtubercules sur l'actine proximale. Pentactin. Proximal actin wilh microtubercles. Figure 6 Hexactine. Hexactin.

54 - UNE HEXACTINELLIDE NOUVELLE D'UNE ZONE HYDROTHERMALE

55 r N. BOURY-ESNAUL T, L. DE VOS 1 1 substance fondamentale, du squelette, de cellules et de subissent un changement drastique de pression. Enfrn la 1 syncytium (ftg. 19,14). Ces syncytium décrits par Pavans ftxation proprement dite ne commence que 2-2 heures 30 1 de Ceccatty (1982) auraient le rôle des archéocytes dans les après la récolte. Ces conditions sont sans doute 1 phénomènes de réagrégation. Les faisceaux de collagène responsables : 1 dense pourraient être l'équivalent des "chord syncytia" de - de la mauvaise préservation des collerettes qui sont Reiswig (1979). partiellement collapsées et qui montrent de très nombreuses vésicules ; DISCUSSION - de l'absence du syncytium mentionné par Maclcie et Singla au sommet des corps à collerette. Mais il faut L'espèce récoltée correspond tout à fait par sa morphologie remarquer qu'Ijima (1901) n'avait pas retrouvé chez et sa composition spiculaire au genre Caulophacus. Euplectella marshalli la "membrane de Sollas" décrite par L'espèce la plus proche est Caulophacus schulzei Wilson, Schulze (1887) et auquel correspond vraisemblablement le 1904. Leur forme générale est assez semblable et elles syncytium des auteurs modernes. Chez les démosponges présentent exactement les mêmes catégories spiculaires. on a pu observer dans un gi'and nombre de cas au niveau Cependant la Caulophacus des sources hydrothermales se des collerettes des choanocytes un feutrage fin de distingue par toute une série de caractères. glycocalyx qui relie les collerettes et qui n'est visible qu'en Le chapeau est toujours convexe et dressé au-dessus du fonction des conditions de ftxation. Ce syncytium pourrait substrat de toute la hauteur de la tige. Les squelettes de la être l'équivalent fonctionnel de cette glycocalyx et soit ne face inférieure et supérieure sont identiques et les pinules pas être présente dans toutes les espèces soit n'être visible qui les constituent ont leurs rayons tangentiels et proximal que dans certaines conditions de fixations. toujours couverts de fmes épines ; un pourcentage Cependant nous pensons pouvoir souligner certaines relativement important de ces pinules présentent l'actine différences entre notre espèce et la Rhabdocalyptus décrite proximale atrophiée dans la tige. Les pentactines ont le par ces auteurs : plus souvent l'actine proximale plus courte que les actines - Les corps à collerette nouvellement produits perdent tangentielles et l'actine proximale porte des leur jonction avec leur choanoblaste d'origine quand ils microtubercules sur toute la longueur. Un nombre s'insèrent entre ceux précédemment bourgeonnés. Il nous important d'hexactines surtout dans les plus petits semble par conséquent difftcile d'appeler la couche de corps montrent des épines à leur base. Les discohexasters 1 sont à collerette un choanosyncytium dans la mesure où : 1) toujours parfaits. Les discohexasters 2 ont des actines chacun des éléments reste indépendant ; et 2) ces corps à principales 4 fois plus petites que les terminales ; le collerette ne présentent pas de noyau comme le soulignent diamètre maximum de ces spicules est de 70 JlID alors que Maclcie et Singla. chez Caulophacus schulzei les plus petits, rares, ne - Nous n'avons pas retrouvé le "chord syncytia" décrit par descendent pas en dessous de 108 JlID et les plus abondants Reiswig (1979). Mais il nous semble que cela correspond atteignent 192-300 JlID. aux faisceaux de collagène que nous avons observés et dans Pour l'ensemble de ces caractères, nous élevons donc ces lesquels on observe des éléments syncytiaux. spécimens de la zone hydrothermale du Paciftque E~t au Il est évidemment prévisible que chaque nouvelle espèce rang d'espèce et nous lui donnons le nom de Caulophacus d'hexactinellide qui pourra être étudiée en MEB et MET cyanae. apportera de nouveaux éléments à leur compréhension et il La remontée de la Cyana dure 2 heures. Durant cette est vraisemblable que l'organisation n'est pas homogène période, les spécimens traversent différentes couches d'eau dans tout le groupe. de température croissante de _20 au fond à 320 en surface et

Figure 12 Figure 16 Ectosome constitué d'une membrane dermique renforcé par les BOUIgeon constitué de 3 corps à collerette non encore séparés. pinules et les actines tangentielles des pentactines recouvrant les Budformed by 3 collar bodies not yet separated. espaces aquifères. Ectosome constiJuted by dermal membrane strengthened by pinuIes Figure 17 and tangential aclins of the pentactin. Bourgeon d'un corps à collerette encore relié au choanoblaste par une jonction bouton-pression. Figure 13 Bud of a collar body still connected ta choanoblast by a plug Choanosome : les chambres flagellées sont soutenues par les junetion. discohexasters 1. Choanosome " the jlagellated chambers are supported by Figure)8 discohexasters 1. Détail des faisceaux de collagène. Detail of the collagen fascicles. Figure 14 Portion d'une chambre flagellée : les corps à collerette reposent sur Figure 19 une couehe de collagène dense. Noter l'amas de choanoblastes. Détail d'un syncytiurn dans le mésohyle entre les chambres Part of a·flagellated chamber. The collar bodies rest on a layer of flagellées. dense collagen. Note the elusters of choanoblasts. Detail of a syncytium in the mesohyl between the jlagellated chambers. Figure IS Détail de choanoblastes bouIgeonnant les corps à collerette. Detail of choanoblasts budding collar bodies.

56 UNE HEXACTINELLIDE NOUVELLE D'UNE ZONE HYDROTHERMALE

57 ~" - t

1 1 N. BOU RY-ESNAUL T, L. DE VOS 1

BIOGÉOGRAPHIE DU GENRE CAULOPHACUS modernes, on se rend compte qu'un grand nombre de ces 1 espèces ont été trouvées dans des fosses ou au niveau de 1 Quatorze espèces de Caulophacus ont été décrites dans la dorsales. Cette répartition nous amène à suggérer qu'il 1 littérature : deux proviennent de l'Arctique, six de serait intéressant de rechercher si ce genre d'hexactinellides 1 l'Antarctique, quatre du Pacifique, une de l'Atlantique et ne serait pas un bon indicateur d'une zone d'hydrother­ 1 'trois de l'Océan Indien. La plupart du temps ces espèces malisme. n'ont été trouvées qu'une seule fois, les missions abyssales étant depuis toujours très rares. Il serait sans doute Remerciements nécessaire de faire une révision du genre à l'échelle mondiale à partir des spécimens types pour confirmer la Ce travail a été réalisé dans le cadre de l'Unité Associée nO diversité spécifique du genre. 41 du Centre National de la Recherche Scientifique, du En observant le tableau de répartition des espèces, et en Groupement de Recherches Coordonnées (GRECO) reportant les coordonnées géographiques sur des cartes Écoprophyce 130068 et du contrat OTAN nO 0134/85.

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Figure 20 Figure 24 Membrane dermal,. après désilicification, fantôme de pinules. Choanob1astes et bourgeons venant juste d'être formés. Observer la Dermal membrane after desilicification, with ghosts of pinules. fracture longitudinale dans un corps à collerette. Choanoblasts and new buds. Note the longitudinal fractUl'e in a new Figure 21 collar body. Cryofracture de chambres flagellées après désilicification. Cryofracture offlagellated chambers after desi/icification. Figure 25 Bourgeons encore réunis aux choanoblastes par l'intermédiaire d'une Figure 22 jonction bouton-pression. Fracture de trois chambres permettant d'observer la couche de Buds still connected to choanoblasts by a plug junction. collagène et les prosopyles. Cryofracture . of three chambers. Note the layer of collagen and prosopyles.

Figure 23 Mésolamelle de collagène soutenant une chambre flagellée dans laquelle on voit encore la trace des prosopy1es. Collagen mesolamella sustaining a flagellated chamber in which the prosopyles are visible.

58 - UNE HEXACTINELLIDE NOUVELLE D'UNE ZONE HYDROTHERMALE

59 t1, 1 1 1 N. BOURY-ESNAUL T, L. DE VOS i 1 1 Tableau 1 Répartition géographique des espèces du genre Caulophacus , Geographical distribution of species from genus Caulophacus 1 1 Localisation Coordonnées Profondeur Espèces Auteurs géographique géographiques (m) Arctique C. arcticus 63°17'N - 1°27'0 1977 Hansen. 1885 (Hansen. 1885) Mer d'Okhotsk C. schulzei 3400 Koltun, 1967 hyperboreus (Koltun, 1967) . Antarctique

C. antarcticus o etN Gauss 2450 Schu1ze, Kirkpatrick, (Schulze. Kirk-Patrick, 1910) Station 3397 1910

C. instabilis 62°10'S - 41°20'0 3246 Topsent, 1910, 1913 (fopsent, 1910) Schulze, 1887· 3614 C. oviformis Dorsale antarctico· 62°20'S - 95°44'0 (Schulze, 1887) pacifique

C. pipetta Dorsale antarctico- 53°55'S - 108OJ5'0 3566 Schu1ze, 1886, 1887, (Schulze. 1886) pacifique. dorsale 62°26'S - 95°44'0 3614 1897 île de Pâques C. scotiae 71 °22'S - 163°4'0 2579 Topsent, 1910, 1913, (fopsent, 1910) 1915

C. valdiviae 63°16'S - 57°50'0 4636 Schulze, 1904 (Schulze, 1904) Pacifique

C. elegans NO Japon 35°41'N - 157°42'E 4206 Schulze, 1887 (Schulze, 1886) Mer de Bering ? 3680 Koltun, 1967

C. hadalis Kermadec Trench 35°51'S - 178°31'0 5900 Lévi, 1964 (Lévi, 1964)

C. lotifolium Sagami Bay, Japon 572 Ijima, 1903 (Ijima, 1903)

C; schulzei NE Panama 6~1'N - 80°41'0 3279 Wilson, 1904 (Wilson, 1904) 1°7'N - 81°4'0 SE Galapagos 5°41'S - 82°59'0 4064 Lendenfeld, 1915 SO Tasmanie 43°58'S - 165~4'E 4400 Lévi, 1964 mais 45°47'S - 164OJ9'E 4390 semble différent de 45°51'S - 164OJ2'E 4510 l'espèce de Wilson C. cyanae Dorsale Pacifique E 12°49'N - 103°57'0 2660 n.sp. Atlantique

C. agassizi SO du Massachussets 400 29'N - 66°4'0 3235 Schulze, 1899 (Schulze, 1889) Océan Indien

C. basispinosus Cape Town, Durban 35.0 44'S - 34°16'E 3800 Lévi,1964 (Lévi, 1964)

C. galathae Cape Town, Durban 33°28'S - 38°32'E 5110 Lévi,1964 (Lévi, 1964) 5340

C. latus SO dorsale S de 46°16'S - 48~7'E 2926 Schu1ze, 1886 (Schulze, 1886) Madagascar, île Pingouin

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