Cahiers De Doléance Dans Le Toulois 1
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Cahiers de doléance dans le Toulois 1 À l’occasion des Etats Généraux de 1789, les communautés villageoises ont été invitées, dès le mois de mars, à déposer leurs doléances sous forme de cahiers dont beaucoup ont été publiés. Ce fut le cas pour les huit paroisses d’Allain, de Bagneux, Bulligny, Colombey-les-Belles, Crézilles, Dolcourt, Ochey, Thuilley-aux-Groseilles. Ces textes se partagent en gros entre un état des lieux des servitudes de l’Ancien Régime et les souhaits des communautés de voir leurs charges allégées, du moins rendues plus équitables et plus supportables. Il est frappant d’observer que ces sujets de doléance ne font pas consensus, parce que chaque communauté défendait les siens, si bien que toutes ces doléances ne furent en majorité reprises que par une seule communauté, à quatre exceptions près : les corvées en travail, les droits sur les denrées, le moulin banal et les droits en denrées. Pourtant, l’ensemble de ces charges s’appliquait à toutes les communautés du Toulois, partagées entre l’évêché et comté de Toul et la Lorraine. Les mémoires de Joseph Simonin, laboureur de Mont-le-Vignoble, nous ont appris qu’elles n’y étaient pas respectivement les mêmes 2. Les servitudes de l’Ancien Régime Les plaids annaux : assemblées des communautés d’habitants Une situation très atténuée en comparaison de ce qu’Erckmann-Chatrian rapportent pour les pays de Pour commencer, les cahiers de doléances nous Phalsbourg et de Sarrebourg, dans leur récit romancé, permettent de dresser un état partiel du fonctionnement de « L’histoire d’un paysan », dans lequel ils dressent une cette société rurale du Toulois d’Ancien Régime (Lorraine situation très sombre des charges de l’Ancien Régime et Trois Evêchés) devenu français respectivement en dont les pauvres gens étaient accablés : lettres de cachet, 1648 et 1766. Tout d’abord à partir de tenue des plaids de dîmes, de corvées, de frais de barrières douanières annaux, ces plaidoiries annuelles, véritables assemblées intérieures, À Phalsbourg, chaque marchandise payait générales des communautés villageoises lorraines, un droit de passage, en plus de multiples taxes, dont la réunis par les seigneurs, en principe vers octobre, à la gabelle, l’étalage des foires, la mesure des grains, les ¿QGHVJURVWUDYDX[/HVFKHIVGHIDPLOOHVpWDLHQWWHQXV poids de la ville, les droits d’affouage et de foulon, le prix de s’y rendre. Les communautés y traitaient des entrées de l’apprentissage à payer aux maîtres. On ne pouvait et sorties en leur sein, de l’état des familles présentes ; planter ce qu’on voulait, les prés devaient rester en prés, elles évoquaient la situation ou le sort de leurs membres, les labours en labours ; les arbres fruitiers se louaient tous provisoirement éloignés ; déclaraient les amendes et OHVDQVDXSUR¿WGXVHLJQHXURXGHO¶DEED\HOHVVHLJQHXUV les peines prononcées par la justice seigneuriales ; avaient le droit de chasser en traversant les moissons et rappelaient les droits seigneuriaux et communautaires, en ravageant les récoltes. Le paysan qui braconnait, ne tandis que les assemblées élisaient le maire, les échevins, serait-ce qu’une seule pièce de gibier, risquait les galères et les agents communaux tels que les sergents de la justice tandis que le droit de colombier entraînait le pillage des seigneuriales. Il est curieux que seuls en parlent les grains par les pigeons. Le four banal, comme le moulin cahiers de Bulligny pour dire que ce jour-là, le seigneur et le pressoir, était obligatoire, autant, presque, que les exigeait de chaque habitant de Bulligny un chapon et une « cotisations » aux ordres religieux mendiants ; la part de orange pour les dîmes sur les terres, et une gerbe pour un mendicité s’avérait importante et la pauvreté se montrait journal de terre cultivé. Curieux terme, ici, que celui de de toutes façons générale. dîme puisque cet impôt était réservé à l’église comme 1. Étienne (Charles). Cahiers de doléances des bailliages des 1930, Collection de documents inédits sur l’histoire économique de généralités de Metz et de Nancy pour les États généraux de 1789. la Révolution française. XV-486 p. AD Moselle 8° G 153. Première série : département de Meurthe-et-Moselle. Tome troisième : 2. Conf. Etudes Touloises n°144, 149 et 152. cahiers du bailliage de Vézelise, Nancy, Imprimerie Berger-Levrault, Etudes Touloises, 2019, 169, 3-10 3 UHSUpVHQWDQWODSDUWGH'LHXGDQVOHVUpFROWHVDXSUR¿WGX complexité, par exemple, à Bulligny, chaque habitant curé et/ou d’un établissement religieux. Aucune doléance, payait deux réseaux 6 d’avoine et deux poules par an. Les toutefois, il n’y en avait visiblement pas non plus pour habitants fournissaient deux journées de travail, homme et les autres communautés pour lesquelles les plaids-annaux femme, et ceux qui labouraient devaient trois journées de représentaient visiblement un rituel allant de soi. charrue. Il était dû huit gros 7, un gros deux blancs 8 pour chaque cheval tirant. Un gros deux blancs pour chaque Souvent acensées à un laboureur par leur muid 9 de vin. Quatre gros deux blancs pour chaque boeuf, attributaire, les dîmes étaient en gros de l’ordre de 10 de même ceux qui n’avaient pas de boeuf, appelés « bœuf à 12 % des récoltes. Universelles, il est surprenant que sans corne ». Pour chaque vache, le seigneur prélevait seules les communautés d’Allain et d’Ochey en parlent. deux deniers 10. A Noël et à Pâques, chaque conduit À Allain, l’évêque de Meaux, abbé de Saint-Epvre, (ménage) payait deux gros en monnaie barroise. seigneur haut justicier 3 du village, était ainsi décimateur des grosses et menues dîmes 4 en blé, orge, avoine, Certains droits consistaient en denrées : à pois, fèves, lentilles, pommes de terre et autres denrées Allain, à la Saint-Rémy, tous les habitants délivraient plantées et semées. Le tout se payait au 11e, de même deux bichets 11 d’avoine à la mesure de Nancy, avec une que les agneaux et les cochons de lait. La dîme de foin poule pour M. le Comte de Ludres, par ses fermiers, se payait en 25e. Pour Ochey, le cahier de doléance se et le 1/12e à M. de Saint-Léger. Les habitants et les limitait à déclarer l’obligation, pour ceux qui cultivaient étrangers devaient quatre-vingt dix-neuf mesures, ou des pommes de terre et autres légumes dans les versaines bichets d’avoine, en proportion de ce qu’ils faisaient (les jachères), à en payer la dîme, sans plus de précisions. sur le ban, soit environ seize réseaux d’avoine pour Aucune revendication dans ces articles, mais un simple l’abbé de Saint Epvre, dix poules à la Saint-Thomas sur état des lieux que nous aurions voulu plus complet, étant l’héritage. A la Saint-Martin d’hiver, le 11 novembre, ils donné la diversité des situations relatives au prélèvement devaient cinq bichets d’avoine, une poule et trois deniers des dîmes dont les ecclésiastiques avaient depuis d’argent à l’abbé et aux seigneurs. Les laboureurs faisant longtemps renoncé à faire l’exploitation directe 5. D’aide trézeaux 12 déliés délivraient une gerbe d’avoine et un DOLPHQWDLUHODGvPHpWDLWGHYHQXHXQSUR¿WSpFXQLDLUH denier en argent pour l’abbé de Saint-Epvre. Un autre intérêt serait de connaître l’identité de leurs amodiateurs, les plus gros laboureurs, sans aucun doute, Sur les vins, le seigneur de Bulligny prélevait mais était-ce toujours les mêmes d’un bail à l’autre ? un gros, huit deniers par muid et prenait le 16e du vin tiré aux pressoirs banaux. À Colombey-les-Belles, à Des droits seigneuriaux omnipotents la Saint-Rémy, chaque habitant devait deux mines 13 d’avoine rase et une poule ; à la Saint-Martin, cinq Les droits seigneuriaux représentaient mines d’avoine, une poule, trois deniers d’argent ; à la l’ensemble des droits que la communauté d’habitants Saint André, vingt réseaux d’avoine ras, à la mesure de devait collectivement ou individuellement au seigneur, Nancy ; le Vendredi Saint, une demi ou une poule, avec YRLUHDX[VHLJQHXUVFDUFHVGURLWVDI¿FKDLHQWXQHFHUWDLQH dix œufs par poule. 3. Haute justice, le seigneur (ou plus exactement le juge seigneurial) moyen de 180 livres, mesuré avec une mesure cylindrique qui en peut juger toutes les affaires et prononcer toutes les peines, dont la était le huitième. peine capitale ; moyenne justice, il peut juger les rixes, injures et 7. Le gros représente un ensemble très divers de pièces d’argent à vols, délits qui ne peuvent être punis de mort, il juge en matière de valeurs locales très variables. successions et de protection juridique des intérêts des mineurs ; basse 8. Blanc, ou douzain, monnaie de cuivre couchée d’argent, d’une justice, il juge des affaires relatives aux droits dus au seigneur : cens, valeur de douze deniers, il équivalait donc à un sol. rentes, exhibition de contrats et héritages sur son domaine, ainsi que 9. Futaille de taille variable selon les régions, qui se divise en demi- des délits et amendes de faibles valeurs. muid ou feuillettes, quarts de muid ou quarteaux, et demi-quarts ou 4. Les grosses dîmes se perçoivent sur les principaux revenus de la huitièmes de muid. paroisse, le seigle ou l’avoine ; les menues dîmes sur les denrées 10. Denier, le douzième du sol, lui-même vingtième de la livre. moins considérables, le chanvre ou les légumes, et les dîmes novales 11. Mesure pour la capacité des grains, pouvant aller de 11 à 27 kg, sur le produit de terres récemment mises ou remises en culture depuis dont il faut apprécier la valeur locale. moins de 40 ans, ou nouvellement chargées de fruits sujets à la dîme. 12.Treize gerbes de blé ou autres céréales. 0LVHVjEDLODXSUR¿WGHVSOXVJURVODERXUHXUV 13. Ancienne unité de volume de matières sèches valant à Paris un 6.