Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA

21.2 | 2017 Varia

Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/cem/14724 DOI : 10.4000/cem.14724 ISSN : 1954-3093

Éditeur Centre d'études médiévales Saint-Germain d'Auxerre

Référence électronique Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 [En ligne], mis en ligne le 31 décembre 2017, consulté le 25 novembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/cem/14724 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cem.14724

Ce document a été généré automatiquement le 25 novembre 2020.

Les contenus du Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre (BUCEMA) sont mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International. 1

SOMMAIRE

Recherche active

L’eucharistie, l’apostat et le crapaud. Sur un exemplum de Césaire de Heisterbach François Wallerich

La femme tel un diamant marial : idéal féminin, spiritualité et médecine dans le Livre de la vertu du sacrement de mariage de Philippe de Mézières Marc-André Moreau

La Bourgogne au premier Moyen Âge (VIe‑Xe s.) : approches spatiales et institutionnelles – 1re livraison

Introduction Jessika Nowak et Jens Schneider

Les Chamaves et les autres : une enquête linguistique sur les traces des Chamaves, Hattuaires, Varasques, Scotinges et Burgondes au nord de la Bourgogne Wolfgang Haubrichs

Burgund und das « unsichtbare Römische Reich » im Spiegel der sogenannten merowingischen Monetarmünzen. Eine Anmerkung Jürgen Strothmann

The Burgundian « visage ». Seals between tradition and innovation Jessika Nowak

Dossier cartographique

Chantiers

Saint-Martin de Blanquefort (Gironde) : apport d’une fouille de faible ampleur à la connaissance d’un cimetière paroissial Juliette Masson, Hélène Réveillas et Mikaël Rouzic

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 2

Parutions récentes

Le temps long de Clairvaux. Nouvelles recherches, nouvelles perspectives (XIIe-XXIe siècle)

Les pratiques de l’écrit dans les abbayes cisterciennes (XIIe-milieu du XVIe siècle). Produire, échanger, contrôler, conserver

Ruling the Script in the . Formal Aspects of Written Communication (Books, Charters, and Inscriptions)

Les spectres du Bon Gouvernement

L’arbre et la colonne

Le fou dansant et le mundus inversus

Pour les siècles des siècles. La civilisation chrétienne de l’Occident médiéval

Les saints face aux barbares au haut Moyen Âge. Réalités et légendes

Les marchands du temple. La société chrétienne et le cercle vertueux de la richesse du Moyen Âge à l’époque moderne

Saint-Étienne de Sens. La métropole sénonaise : la première cathédrale gothique dans son contexte. Actes du colloque international en l’honneur du 850e anniversaire de la consécration de la cathédrale Saint-Étienne de Sens, Sens 10, 11, 12 octobre 2014

La malédiction des sept péchés. Une énigme iconographique dans la Bretagne ducale

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 3

Recherche active

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 4

L’eucharistie, l’apostat et le crapaud. Sur un exemplum de Césaire de Heisterbach

François Wallerich

1 Ces dernières années, plusieurs publications ont réévalué la place qui revient aux cisterciens dans la production d’exempla à la charnière des XIIe et XIIIe siècles et, plus généralement, dans le « tournant pastoral1 » qui marque cette époque. L’édition critique de nombreux recueils a été établie2 ; la place de l’ordre dans la société médiévale a été envisagée à nouveaux frais3 ; enfin, l’étude des récits elle-même s’est vue renouvelée. Dans ce mouvement, une place de choix a été faite à Césaire de Heisterbach, ce dont témoigne la dernière publication sur le Dialogus Miraculorum, envisagée par les contributeurs comme un témoin privilégié de « l’art de la persuasion cistercienne »4.

2 Nous voudrions nous intéresser ici à l’autre grand recueil de Césaire, les Libri VIII Miraculorum, dont il a entrepris la rédaction après celle du Dialogus, sans doute en 1225-12275. L’œuvre a logiquement moins attiré l’attention des chercheurs, puisqu’elle est fragmentaire et qu’elle n’a, par conséquent, pas l’ampleur du Dialogus6. Mais, à côté d’histoires qui reprennent des motifs bien connus, l’ouvrage contient quelques exempla singuliers. Il en va ainsi des vingt-trois histoires centrées sur le thème de l’eucharistie que l’on a conservées7. Toutes peuvent être rapportées sans difficulté à des traditions antérieures8. L’une

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 5

d’elles semble plus singulière et mérite, pour cette raison, que l’on s’y attarde. En voici une traduction9 : Du moine qui, fuyant la communion, fut châtié par un crapaud J’ai entendu naguère par Arnaud, abbé de Kamp, qu’un moine de l’ordre de Cîteaux avait si mauvaise conscience qu’il ne souhaitait pas voir venir le moment de la communion sacrée, je veux dire le jour de la Cène du Seigneur, celui où tout le couvent, moines, novices et convers communiaient selon la coutume à l’autel majeur. L’homme mal avisé répugnait à la médecine du salut. Il eut peur que tous le remarquassent et que l’abbé le réprimandât s’il se soustrayait au sacrement. Il eut peur de boire son propre jugement s’il communiait indignement. La malice vainquit la honte et, avant qu’arrivât le moment de recevoir la médecine, il prit la fuite. Comme on le lit au sujet de Jonas, le médecin lui envoya l’envie de dormir profondément (Jon 1, 5) et il se coucha sous un arbre, non loin du monastère. Là, alors qu’il dormait bouche ouverte, arriva aussitôt une vermine qui l’attendait. Un crapaud, vengeur de l’apostat, entra dans la bouche du fugitif. Comme il se déplaçait dans sa gorge, le moine le sentit, se réveilla et prit la bestiole par le pied. Mais, ne pouvant expulser l’intrus, il lâcha le pied du crapaud. Le misérable comprit que la main de Dieu s’abattait sur lui, mais il ne revint ni à résipiscence, ni au monastère. Après avoir enlevé son habit, il parcourait la terre comme un errant et un vagabond. Il souffrait de manière intolérable. Lorsqu’il mangeait, la vermine se nourrissait et, de ce fait, il recevait moins de nourriture. Lorsqu’il ne mangeait pas, elle le tourmentait davantage encore. Or, il arriva qu’un jour il reçût l’hospitalité chez une femme dévote. Remarquant sa pâleur, elle lui en demanda la cause. Il la lui donna, mais tut cependant qu’il avait été moine. Elle lui dit : « Je connais une femme qui peut, je l’espère, t’aider. » On l’y conduisit. Et comme la femme en question réclamait une certaine somme d’argent et qu’il ne l’avait pas, son hôtesse demanda le dimanche ladite somme aux fidèles et la donna à la femme. Celle-ci fit aussitôt une décoction d’herbes, la versa dans un récipient et plaça le jeune homme en position inclinée, de sorte que, bouche ouverte, il pût en respirer les vapeurs. Elle lui enjoignit de ne pas bouger ni d’ouvrir les yeux, au risque de sa vie. Au bout d’une heure et tandis que l’homme en ressentait une douleur extrême, la vermine, attirée par l’odeur des herbes, s’avança jusqu’au seuil de la bouche. Elle s’y tint, vérifia avec soin que personne n’était présent aux alentours pour la saisir et finit par se jeter dans le récipient contenant la décoction. Aussitôt la femme, cachée à proximité, jaillit en un éclair et plaça une planche entre la bouche et la bestiole. Celle-ci perçut que la voie du retour avait été obstruée, tourna sur elle-même et s’attaqua avec beaucoup de force au bois, car elle avait grandi. Elle dépassait en effet la mesure d’un demi-pied. Et parce que la souffrance donne à réfléchir aux gens stupides, l’apostat revint au monastère et raconta par le menu à tous les frères ce qui lui était arrivé sur son chemin et comment il fut horriblement puni de son péché. Un médecin l’ayant entendu lui dit : « Crois-tu être totalement guéri désormais ? » Il répondit : « Je l’espère. » L’autre rétorqua : « En rien. » Et il lui donna une potion qui lui fit vomir plus de soixante-dix crapauds supplémentaires. C’est à bon droit qu’il devint l’immonde réceptacle de la vermine, celui qui, mal avisé, repoussa le très saint corps du Christ. Il répugnait à l’antidote et se précipitait sur le venin. Puisque le sacrement du corps et du sang du Seigneur est pour chaque maladie humaine une médecine plus pure, plus sainte et plus efficace que toutes les médecines ; puisque, pour le salut du corps et de l’âme, il lave des péchés et augmente les vertus, il faut qu’il repose dans une pyxide propre et qu’il soit conservé dans un lieu décent et saint. Qu’entends-je par pyxide propre, si ce n’est un cœur pur et par lieu sacré, si ce n’est un corps chaste ? Ne savez-vous pas que, comme dit l’Apôtre, vos membres sont le temple de l’esprit saint, qui est en vous (1 Cor 6, 19) ? On reçoit le sacramentum du corps par la bouche, mais la res sacramenti, c’est-à- dire la grâce spirituelle, par le cœur10. Rien ne plaît davantage au Christ qu’un réceptacle séant. La pyxide du corps du Seigneur se doit d’avoir une grande beauté,

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 6

avec l’intérieur fait du lin le plus blanc et l’extérieur d’orfroi. Le lin signifie la pureté du cœur, l’or l’éclat de la charité. Celui qui reçoit le corps du Christ sans ces qualités, reçoit le jugement de sa damnation, sauf s’il se repent. J’ai rappelé cela à cause de certains prêtres négligents, qui accordent peu de soin au réceptacle et au lieu dans lesquels la médecine salutaire est conservée. Quels périls il en découle, c’est ce que montre le discours qui suit.

3 Ce récit, relativement long, peut être résumé ainsi. Un moine cistercien se pense en état de péché. Lorsqu’arrive le Jeudi saint, jour où tous les membres de la communauté doivent communier, il décide de fuir pour ne pas encourir la honte d’être écarté de l’autel. Se couchant à l’ombre d’un arbre, il s’endort et, comme il a gardé la bouche ouverte dans son sommeil, un crapaud entre dans son corps. Les souffrances que lui inflige l’animal le conduisent à chercher un remède. Il trouve enfin une femme qui parvient à s’adjoindre les services d’une guérisseuse. Placé devant une décoction d’herbes, ouvrant la bouche et fermant les yeux, le moine sent le batracien sortir de son corps par là où il est entré. Assagi par ces épreuves, il retourne au monastère. Il y relate ses déboires et on lui fait boire une potion qui le purge de plus de soixante-dix petits crapauds qui étaient restés dans son corps. Césaire tire lui-même la leçon de son historiette : c’est à bon droit que celui qui refuse le remède du salut s’expose au danger du poison.

4 La punition du moine qui s’éloigne des autels par un crapaud est un motif tout à fait inédit. Certes, les crapauds interviennent épisodiquement dans les exempla de Césaire. Ainsi, dans le Dialogus Miraculorum, huit récits évoquent l’animal. Mais, si ce dernier y punit divers péchés, il n’est jamais associé au thème de l’eucharistie11. Comment expliquer cette innovation de Césaire, qui semble être le premier compilateur à faire intervenir l’animal dans le cadre d’un récit sur le sacrement de l’autel ? La trame de l’histoire ne pouvant être repérée dans des recueils précédents, il est nécessaire de comprendre comment le compilateur a construit son récit afin de mettre en évidence le sens du motif central du crapaud.

Intertextualités

5 Césaire nous met lui-même sur la piste qu’il a manifestement suivi, à travers une allusion qui semble, à première vue, anecdotique. Une fois que le moine a quitté le monastère, on nous dit que « le médecin [c’est le Christ qui est ici métaphoriquement désigné], comme on le lit au sujet de Jonas, lui envoya l’envie de dormir profondément » (Cui medicus, sicut legitur de Jona, grauissimi soporis appetitum immitens). C’est le seul renvoi textuel explicite qu’effectue Césaire, mais il est d’importance. Toute l’histoire, en effet, semble avoir été bâtie sur la trame du Livre de Jonas. Si l’on excepte la conclusion des deux histoires, on peut repérer dans les deux cas les sept narrèmes suivants. a. Jonas reçoit une mission de Dieu : aller à Ninive. Le moine a, quant à lui, un devoir : celui d’aller communier. b. Au lieu de répondre à l’appel de Dieu, Jonas part dans la direction opposée, vers un lieu mystérieux appelé Tarsis, dont on sait ne sait rien, si ce n’est qu’il est situé « loin de Yahvé » (Jon 1, 3). Dans l’histoire de Césaire, l’épisode trouve son répondant dans la fuite du moine, qui abandonne son monastère et s’éloigne semblablement de Dieu. c. Vient alors le motif central du sommeil : Jonas, qui s’est embarqué, « dormait profondément » (Jon 1, 5) et c’est ce que fait aussi notre moine, assoupi sous un arbre. d. Après avoir été jeté à la mer par les navigateurs, Jonas est gobé par la baleine. Notre moine, lui, gobe un crapaud. e. Les deux protagonistes

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 7

finissent par se sortir du péril dans lequel ils étaient tombés : Jonas sort du poisson et le moine recrache le crapaud. f. Comme le prophète accomplit sa mission à Ninive, le cistercien retourne au monastère. Suite à la prophétie de Jonas, les habitants de la ville se repentent ; notre moine narre par le menu ses déboires et réintègre la communauté.

6 Ainsi, tout se passe comme si Césaire avait coulé son récit dans le moule du livre prophétique. La reprise du schéma narratif biblique peut s’expliquer par l’écho que constitue l’exemplum au message porté par le texte vétérotestamentaire. Ce que Jonas met avant tout en exergue est le pouvoir du repentir : alors que Dieu voulait frapper Ninive, les habitants de la grande ville viennent à résipiscence et le châtiment finit par leur être épargné. N’est-ce pas l’exemple qu’aurait dû suivre le moine angoissé ? C’est ce qui serait laissé à la méditation du fidèle, appelé par le compilateur à se repentir pour ne pas s’éloigner inconsidérément des autels. Cette lecture, sans être totalement erronée, s’accommode cependant mal du peu de relief que le compilateur donne à la confession dans son récit, comme on le verra. Peut-être faut-il simplement y voir la volonté du compilateur d’inscrire dans son ouvrage une série de correspondances subtiles, dans la perspective d’un jeu savant, que les lecteurs avertis sauront décrypter. Césaire semble d’ailleurs poursuivre cette intertextualité, puisque le récit qui suit immédiatement nous place sur un bateau qui transporte des croisés. Il évoque le péril de conserver des hosties à bord d’un navire et, entre autres raisons, indique le fait que « les corps passés par-dessus bord sont souvent dévorés par des baleines » (corpora eiecta frequenter a beluis devorentur)12. Ce rappel ne saurait être le fruit d’un hasard. Le compilateur se fait le subtil architecte d’un ouvrage, dont les renvois, internes et externes, font la richesse.

7 Mais, plus que du texte biblique, Césaire s’est surtout inspiré d’anecdotes rapportées par quelques auteurs médiévaux et largement issues de fonds oraux. Son récit rappelle fortement un passage du De Vita sua de Guibert de Nogent 13. On y lit qu’un paroissien tenta d’empoisonner son curé en introduisant dans le vin de messe les morceaux d’un crapaud qu’il avait préalablement découpé. Le prêtre fut en danger de mort, mais il guérit en avalant de la poussière qu’il avait prise sur le tombeau de saint Marcel. Il vomit alors une multitude de petits crapauds. C’est ce dernier détail en particulier que l’on retrouve dans l’anecdote de Césaire. Semblablement, l’attaque du reptile au milieu du récit évoque un épisode de la Vie de Léon IX, dans lequel un jeune homme subit dans son sommeil l’assaut d’un crapaud qui se colle à son visage14. La fixation d’un reptile sur un individu, qui n’arrive pas à s’en défaire, apparaît dans plusieurs autres textes. En particulier, Gautier Map rapporte qu’un lézard s’était fixé sur l’épaule d’un chevalier qui vivait obstinément dans le péché15. Enfin, le thème de l’insertion d’un animal dans la bouche d’un dormeur figure dans un récit célèbre et très largement diffusé aux XIIe et XIIIe siècles : la légende du roi Gontran16. Paul Diacre, au VIIIe siècle, raconte qu’alors que ce roi s’était assoupi, un serpent sortit de sa bouche, gagna un trou dans une montagne qui se trouvait à proximité avant de revenir dans la bouche du roi. Lorsque ce dernier se réveilla, il dit avoir fait un rêve merveilleux : il serait entré dans une montagne, où il aurait trouvé de nombreuses richesses. On se rendit à l’endroit indiqué par le serpent et on découvrit un trésor.

8 Dans ces derniers exemples, les textes dont on dispose témoignent vraisemblablement d’un fond oral avec lequel Césaire pouvait facilement entrer en contact17. D’une manière générale, le folklore regorge de motifs où le crapaud joue un rôle punitif18. Le compilateur dit d’ailleurs tenir son histoire d’une source orale, puisque ce serait l’abbé

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 8

Arnaud de Kamp qui la lui aurait racontée19. Le récit est donc attesté à la fois par la référence à un personnage jugé digne de foi et par une écriture qui rapproche l’événement de textes connus et largement diffusés.

Le crapaud et l’eucharistie

9 L’irruption du merveilleux à travers la présence du crapaud semble cependant nous éloigner du thème annoncé de l’anecdote, à savoir l’eucharistie. En réalité, il n’en est rien, à condition de prendre, avec Césaire, quelques chemins de traverse.

10 L’exemplum s’inscrit, en effet, dans la tradition des miracles eucharistiques punitifs, dans lesquels les mauvais célébrants ou les mauvais communiants sont châtiés pour avoir manqué de respect envers le sacrement20. Les plus anciens exemples, venus des Pères du Désert, évoquent des communiants recevant un charbon à la place de l’hostie21. Le récit de Césaire s’éloigne cependant de cette tradition pour deux raisons. La première est le lien a priori ténu entre le crime (le refus de communier) et le châtiment (l’introduction du crapaud). La seconde est que, précisément, le moine n’a pas communié et ne peut donc être puni pour avoir profané le sacrement.

11 Au Moyen Âge, la justice divine, qu’elle s’exprime ici-bas ou dans l’au-delà, est fondée sur un principe de correspondance entre le crime et la peine. En enfer, les pécheurs sont punis par là où ils ont péché22. Ici, le rapport entre le crapaud et le refus de communion du moine est triple. Césaire joue d’abord sur l’opposition entre remède et poison, dans une logique de peine inversive. L’eucharistie est qualifiée d’antidotum et de medicina dans le récit23. À l’inverse, le crapaud constitue un uenenum ; il est, en effet, admis au Moyen Âge que l’animal est vénéneux24. Refusant le remède de la communion, le mauvais moine reçoit le poison du crapaud. Dans son Elucidarium, écrit entre 1098 et 1125, peut-être dans un monastère proche de Ratisbonne, Honorius Augustodunensis employait une image similaire au sujet des mauvais communiants : « Et parce qu’ils reçoivent [l’eucharistie] avec négligence, comme du pain et du vin quelconques, [le sacrement] est changé pour eux en un venin de serpent et en un poison d’aspic incurable (Dt 32, 33)25. »

12 Chez Honorius, la mention du fel draconum s’autorisait déjà d’un verset biblique vétérotestamentaire, comme celle du bufo de Césaire. Cette conception du crapaud, image inversée et pervertie de l’eucharistie, gagne à être lue à la lumière de certains récits du Dialogus Miraculorum. Dans l’un d’eux, le crapaud et le serpent sont qualifiés de « repas infernal » (cibus infernalis)26. Dans un autre, le compilateur fait intervenir l’animal dans une cérémonie liturgique juive, qu’il qualifie de sacrifice : « Et comme [les juifs] avaient recouvert l’autel de linges nombreux et propres, alors qu’ils entraient en même temps lors du sacrifice du soir et que le prêtre s’avançait à l’autel, après qu’il eut découvert les linges, il découvrit vers le milieu de l’autel un très grand crapaud27. »

13 L’épisode provoque la confusion des juifs et la moquerie des chrétiens. Césaire, lui, y voit un miracle « propre à détruire l’erreur » (destructivum erroris). Le récit est fondamental pour comprendre celui qui nous intéresse. En plaçant un crapaud sur l’autel, Césaire invite le lecteur à le comparer à l’offrande de la messe, c’est-à-dire à l’hostie. Dans cette histoire, le crapaud est ainsi déjà présenté en filigrane comme un double néfaste de l’hostie.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 9

14 Outre la dialectique du remède et du poison, l’histoire fait correspondre le châtiment au crime par l’opposition entre l’inéluctable et l’évitable, toujours dans une logique de peine inversive. Le moine a jugé qu’il pouvait se soustraire à son obligation de communier. Pour le punir, le crapaud est l’animal idéal en vertu d’une autre de ses propriétés. Il s’agit, en effet, d’un « animal crampon »28. Selon les croyances médiévales, une fois qu’il s’est fixé à un individu, il est très difficile, voire impossible, de s’en débarrasser. Dans le récit, cette dimension est poussée à l’extrême, puisque l’animal entre dans le corps du pécheur et devient une sorte de double qui incarne ses péchés29.

15 Enfin, la correspondance se fonde aussi sur le thème de la nourriture, dans une logique de peine locative. L’animal entre par la bouche, comme aurait dû entrer par la bouche l’hostie consacrée. C’est donc la partie du corps qui a péché qui est frappée30. De plus, à l’intérieur du corps, le batracien se comporte en parasite, comme une sorte de ver solitaire, qui se nourrit des repas ingurgités par le moine. Or, dans d’autres exempla, l’eucharistie est à l’inverse présentée comme une nourriture qui suffit à rassasier certaines mulieres sanctae31. D’un côté, les repas ne peuvent suffire à un ventre, qui, tel le tonneau des Danaïdes, se vide à mesure qu’on le remplit ; de l’autre, une nourriture miraculeuse satisfait instantanément à tous les besoins. C’est sans doute par le biais du rapport à la nourriture que Césaire en est venu à associer le crapaud au thème eucharistique. Car, dans la tradition des exempla, l’animal s’insère fréquemment dans la bouche pour punir la gourmandise32. Sur le même modèle, mais plus rarement, il punit aussi la luxure en s’introduisant ou en sortant de divers orifices corporels33. Dans tous les cas, ceux-ci constituent l’objet paradoxal de la punition : sources d’un plaisir illicite, ils constituent le lieu privilégié du châtiment34. Si Césaire sort l’animal de son contexte habituel (gourmandise, luxure, usure35) pour le greffer sur un récit eucharistique, il conserve la bouche comme lieu de fixation du batracien. Car le péché du moine est un péché de bouche, dans la mesure où l’eucharistie est avant tout un repas. Ainsi, le crapaud suit la logique de rétribution des péchés et des mérites inhérente à la conception médiévale de la justice.

16 L’animal que mobilise Césaire doit donc entièrement se comprendre en fonction de la singularité du crime commis par le moine. Dans la tradition des miracles eucharistiques, on était accoutumé à voir des mauvais communiants punis en recevant l’inverse de la medicina salutis. Ici, ce n’est pas l’indigne communion qui est sanctionnée, mais le refus de communier. À péché nouveau, châtiment nouveau. Césaire devait trouver une punition adéquate et a introduit le crapaud comme instrument de cette punition. Il l’a puisé non pas dans le fonds des motifs qui punissent le mauvais communiant, mais parmi ceux qui châtient les péchés de bouche.

Le moine errant

17 La singularité du crime provient en grande partie du choix radical qu’opère le moine de quitter le monastère afin de ne pas communier. C’est aussi dans la compréhension de cette attitude que réside la clef de l’histoire.

18 Observons d’abord comment Césaire qualifie l’individu. Monachus et homo imprudens avant d’avoir pris la fuite, il est ensuite immédiatement et conjointement désigné comme apostata et fugitivus. Le récit prend acte de l’équation qui s’établit en ce début du XIIIe siècle entre fuite, errance et apostasie36. Si, dès la Règle de saint Benoît, le moine gyrovague fait figure de repoussoir pour le monachisme occidental37, il est encore

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 10

davantage déconsidéré à la période qui nous occupe. Au moment même où Césaire rédige ses Libri VIII Miraculorum, plus précisément entre 1227 et 1234, Grégoire IX publie une décrétale dans laquelle il demande aux abbés et prieurs de tous les monastères de rechercher chaque année les moines qui ont quitté leur établissement. Surtout, il ajoute que les fugitifs récalcitrants sont excommuniés38. Est-ce un hasard, dès lors, si, dans notre exemplum, la fuite de l’abbaye est si étroitement liée à l’absence lors de la communion ? Une équivalence est posée entre l’éloignement de l’autel et celui du monastère, qui conduit à faire aussitôt du fugitif un ex-communié.

19 Césaire n’est du reste pas le seul moine blanc à avoir abordé sous cet angle la question des moines « apostats » – puisque c’est ainsi qu’ils sont désormais désignés. Dans un recueil compilé à Clairvaux un demi-siècle avant les Libri VIII, un exemplum exprimait déjà l’équation entre fuite du monastère et excommunication, en reprenant un motif, certes plus classique, mais tout aussi frappant. Un moine fugitif se confesse à l’article de la mort, mais ne peut recevoir l’eucharistie tant qu’il n’a pas reçu la tonsure une nouvelle fois39. Autrement dit, son excommunication ne peut être levée que par un retour à l’état qu’il a indûment quitté. L’anecdote illustrait ainsi les prescriptions au sujet des moines fugitifs que ne cessaient de répéter conciles et synodes depuis le VIIe siècle : seul le retour au monastère et la réalisation d’une juste pénitence pouvaient mettre un terme à leur péché40. Il faut d’ailleurs noter que les cisterciens ont, semble-t- il, été les premiers à préciser et durcir les mesures prises à l’encontre des fugitifs41. Un statut de 1180 enjoint aux abbés de l’ordre de ne pas cacher les apostats et de les faire rechercher pour les soumettre à la justice42. Dès 1206, le chapitre général autorise les monastères qui le souhaitent à construire des prisons pour enfermer les malfaiteurs, mais aussi les fugitifs43. Enfin, en 1221, des punitions corporelles hebdomadaires doivent être infligées aux apostats à leur retour, pendant une durée d’un an44. Césaire écrit donc peu de temps après un durcissement important de la position de l’ordre à l’égard des fugitifs. Son exemplum prend tout son sens dans cette évolution.

20 Dans le récit qui nous occupe, la fuite du moine est synonyme d’apostasie, mais aussi de vagabondage. Il faut relever à cet égard la citation par Césaire d’un verset de la Genèse : uagus et profugus eris super terram (Gn 4, 12). Ce verset évoque le sort de Caïn après que celui-ci a commis son forfait. Au-delà des considérations juridiques, la fuite du monastère est, par ce biais, présentée dans ses conséquences spirituelles, comme l’errance de celui qui est maudit. Ces considérations peuvent d’ailleurs ramener encore une fois au motif du crapaud. L’animal, auquel la culture du Moyen Âge attribue une fréquentation assidue des cadavres, se loge naturellement dans le corps de notre moine, mort à la vie commune45.

21 D’une manière générale, les motivations des fugitifs sont difficiles à saisir. Sans doute la plupart trouvent-ils trop difficile l’exigence ascétique qui caractérise la vie cistercienne46. Dans l’exemplum de Césaire, le cas est bien différent. Le moine est confronté à une alternative à laquelle il ne peut se résoudre. Soit il ne confesse pas le crime qu’on lui reproche – et que l’auteur, préservant peut-être le secret de la confession, ne nous indique pas – et reste éloigné de l’autel. Mais il craint alors la pression qui s’exercerait sur lui, notamment via l’abbé. Soit il décide de communier en se sachant en état de péché. Mais, dans ce cas, il est retenu malgré tout par la peur de « boire son propre jugement ». La conception de l’eucharistie comme ordalie (ou « jugement »), qui a été élaborée sur les célèbres versets de saint Paul (1 Cor 11, 27-29), a été complètement intégrée par notre malheureux moine47. Il s’attend à être puni s’il

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 11

s’avance indignement à l’autel. Ce qu’il ne sait pas, c’est que l’initiative qu’il prend l’amène à un sort plus funeste encore. C’est précisément l’enseignement que Césaire veut transmettre à ses confrères.

Qui Christi corpus et sanguinem abhorret imprudens est

22 On est désormais en mesure de percevoir l’originalité de Césaire à l’égard de la tradition des miracles eucharistiques punitifs et la distance relative qu’il prend envers eux. En voulant inculquer l’idée que le communiant indigne s’expose au châtiment, les récits de ces miracles n’auraient-ils pas atteint leur objectif au-delà de toute mesure et conduit certains fidèles à s’éloigner avec trop de rigueur des autels48 ? Car rien ne nous dit que notre moine fugitif avait de bonnes raisons de s’abstenir de recevoir le corpus Domini. Césaire, en effet, garde étrangement le silence sur ce point. D’une part, il n’explicite pas la faute supposée du moine ; il n’affirme d’ailleurs pas qu’une faute a été commise. Le moine a « mauvaise conscience », sans que l’on sache si cette attitude est justifiée : on peut se croire en état de péché et ne pas l’être effectivement. D’autre part, l’histoire ne dit rien d’un geste pourtant attendu en pareil cas et qui, à lui seul, aurait mis fin au dilemme du moine : la confession. Le récit ne comporte aucun mot ni aucune périphrase qui laisserait supposer que le moine envisage de se confesser. Même à la fin, lorsqu’il est de retour au monastère, Césaire ne précise pas qu’il se confesse. Un tel silence indique bien que l’exemplum ne porte pas sur la nécessité de se confesser avant de communier.

23 En conséquence, l’anecdote doit tout simplement se comprendre comme une réaffirmation de la nécessité de la communion dans la perspective du salut et de la nocivité d’un éloignement trop systématique de ce sacrement. Dans l’histoire qui précède immédiatement celle que l’on analyse, Césaire l’annonçait déjà clairement : « Celui qui prend en horreur le corps et le sang du Christ est mal avisé, car il est quasiment impossible que l’homme n’encoure pas de péril d’âme ou de corps, si ce n’est des deux. Et à ce sujet je vais donner un exemple vrai et manifeste49. »

24 En ne condamnant pas la communion indigne mais l’absence de communion, afin d’affirmer la nécessité de l’eucharistie dans le salut, Césaire n’enfonce-t-il pas une porte ouverte ? En réalité, il prend à bras-le-corps un problème dont il a pu lui-même être témoin et qui est attesté au sein de l’ordre de Cîteaux. Dans la Vie de Marie d’Oignies, que rédige Jacques de Vitry en 1213-1215, l’auteur évoque un moine cistercien qui se tient éloigné des autels par excès de rigueur : « les fautes vénielles, auxquelles nous ne pouvons absolument pas échapper dans cette vie, il les tenait pour mortelles ; et c’est pourquoi il ne voulait pas recevoir le corpus Christi, même les jours où les statuts de l’ordre l’exigent50. »

25 Et l’hagiographe de conclure en constatant comment, à l’instigation du diable, une « âme malade fuyait la médecine » (que infirma fugiebat medicinam). Plus généralement, les recueils d’exempla cisterciens relient souvent l’éloignement des autels à l’acédie et à la désespérance, qui peuvent mener aux pires extrémités, notamment à l’apostasie51.

26 La figure du moine errant de Césaire est donc à comprendre autant en fonction d’aspects disciplinaires que de considérations spirituelles. L’inculcation, par des miracles punitifs, des exigences de pureté nécessaire à la communion pouvait conduire certains esprits à une interprétation excessive, qui les poussait jusqu’à la désespérance et à des actes inconsidérés. Le Dialogus Miraculorum avait déjà suggéré le problème. Dans

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 12

l’un de ses exempla, un convers qui s’apprête à communier a une vision du Christ ensanglanté. Il croit être en état de péché et, de ce fait, risquer la damnation s’il communie. Il ne le fait donc pas. Plus tard, la Vierge le condamne d’avoir agi de la sorte : « Tu te juges indigne, mais qui, selon toi, peut être digne d’une telle chose ? Je te remettrai cette offense, mais veille à ne plus recommencer52. » Alors que tous les efforts pastoraux cherchent à susciter la terreur d’une indigne communion, Césaire essaie de prendre en compte un problème largement moins abordé et sans doute plus difficile à traiter : celui d’un juste équilibre entre révérence et confiance dans le rapport du fidèle au sacrement.

27 À travers l’exemplum du moine apostat et du crapaud, Césaire élabore un récit qu’il veut à la fois crédible et efficace53. Qu’un moine ait été puni par l’intromission d’un crapaud dans sa bouche est un fait crédible, parce qu’il reprend des motifs largement diffusés, notamment dans le folklore – où le crapaud « crampon » est un instrument fréquent de punition – et qu’il s’appuie sur des propriétés attribuées à l’animal par les savants du temps – le crapaud est venimeux, il aime à s’introduire dans les endroits obscurs et humides. S’y ajoutent l’insertion dans une tradition fermement établie et plus proprement cléricale, celle des miracles eucharistiques punitifs, ainsi que l’attribution à une source orale fiable en la personne d’un abbé. L’efficacité de l’anecdote doit, quant à elle, se comprendre à un double niveau. Sur le plan disciplinaire, le dispositif présente habilement la fuite du monastère comme une excommunication de fait, mettant ainsi en récit les dispositions contemporaines du droit et illustrant le rôle déterminant que jouent à cette époque les cisterciens dans le processus de criminalisation des moines fugitifs. Sur le plan spirituel, tout en rappelant avec saint Paul que celui qui communie indignement provoque sa perte, Césaire réaffirme l’absolue nécessité de la communion sacramentelle dans la perspective du salut. C’est sans doute pour exprimer le difficile équilibre entre peur et espérance, qui doit guider le fidèle dans son approche du sacrement de l’autel, que le compilateur a transposé dans un récit sur l’eucharistie le châtiment du crapaud. Cette punition, courante pour les gourmands, les luxurieux ou les usuriers, est inédite pour ceux qui négligent l’eucharistie.

28 L’innovation de Césaire a-t-elle fait florès ? Le catalogue de Tubach contient bien un motif intitulé « Host and toad »54, qui est attesté dans des recueils du XIVe siècle55. Après avoir enfermé l’hostie dans un coffret avec un crapaud, une femme est punie en proportion de son crime : lorsqu’elle communie, un crapaud entre dans sa bouche en lieu et place de l’hostie et tue la malheureuse. Le Thesaurus Exemplorum Medii Aevi du Groupe d’anthropologie historique de l’Occident médiéval (GAHOM) permet de localiser également cette histoire dans les Dits de Jehan de Saint-Quentin, datés de la première moitié du XIVe siècle56. Cependant, ce miracle fonctionne selon un principe bien plus simple et ne constitue qu’une variante du miracle eucharistique punitif traditionnel, dont les origines remontent à l’Historia monachorum de Rufin. La complexité de l’ exemplum de Césaire, qui en fait pour nous tout l’intérêt, a sans doute fortement contribué à lui ôter toute postérité. On peut aussi penser que son propos, trop ancré dans les problématiques du monde monastique, n’a pu trouver sa place dans la pastorale destinée aux laïcs. Enfin, l’extraction de l’animal, obtenue par une femme à l’aide d’une décoction d’herbes, pouvait poser problème. Le recours à une femme, dont les pratiques ne bénéficient pas de la caution de l’institution ecclésiale, pouvait susciter la méfiance des compilateurs : ne risquait-on pas d’encourager les fidèles à se tourner

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 13

vers des pratiques illictes ? Pour toutes ces raisons, le récit de Césaire est resté un hapax dans la tradition exemplaire. Reçu : 18 août 2017 – Accepté : 5 décembre 2017

ANNEXES

Les miracles eucharistiques des Libri VIII Miraculorum

Résumé Sources ou récits similaires

Une femme détourne l’hostie lors de la La décrétale De Muliere d’Alexandre III [E. I, 1 communion pour l’utiliser à des fins profanes, FRIEDBERG (éd.), Quinque compilationes antiquae mais un miracle l’en empêche. nec non Collectio canonum Lipsiensis, Leipzig, 1882, p. 102] qui avait déjà inspiré trois histoires du Dialogus (livre IX, chapitres 6, 8 I, 2 Miracle similaire. et 9). Tubach, n° 2689A.

Un moine oublie de mettre le vin et l’eau dans Miracle similaire dans la Vie de saint Wulfric le calice. Lors de la fraction, il dépose une (éd. M. BELL, Wulfric of Haselbury, Londres, I, 3 partie de l’hostie dans le calice. De l’eau et du 1933, p. 66-68). sang coulent de l’hostie. Tubach, n° 2689B.

Sur l’apparition des anges lors du sacrifice eucharistique, voir P. BROWE, Die Un moine de Villers devient lumineux lorsqu’il I, 4 eucharistischen…, op. cit., p. 5-13 : célèbre. Des anges adorent l’hostie qu’il élève. « Engelwunder ».

Tubach, n° 236.

Le motif est déjà présent dans les I, 4 Une sainte femme distingue les bons des Apophtegmata Patrum (PL, 73, (bis) mauvais communiants. col. 998A-1000A).

L’histoire reprend la trame de nombreuses Lors de la messe de Noël, une sainte femme a visions mariales. Un exemple ancien figure I, 5 une vision dans laquelle elle donne l’Enfant au dans les Miracula santi Benedicti. Voir Les célébrant. Miracles de saint Benoît, éd. E. DE CERTAIN, Paris, 1858, p. 259. Tubach, n° 1028.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 14

Une partie de l’hostie se place Un miracle similaire est attribué à un I, 6 miraculeusement dans la bouche d’une sainte convers dans le Dialogus (IX, 37). femme à laquelle on a interdit de communier. Tubach, n° 2659.

Variante du précédent. Sur l’eucharistie Une colombe place une hostie et quelques apportée par la colombe, cf. P. BROWE, Die gouttes de vin eucharistique dans la bouche I, 7 eucharistichen…, op. cit., p. 13-16 : d’une sainte femme à laquelle on a interdit de « Taubenwunder ». communier. Tubach, n° 1767.

Lorsqu’un prêtre célèbre, un fidèle voit l’Enfant dans l’hostie n’entrer qu’à HERBERT DE CLAIRVAUX, Liber Miraculorum, I, 20 I, 8 contrecœur dans la bouche du célébrant. (PL, 175, col. 1297A-D). Après que le prêtre s’est amendé, l’Enfant Tubach, n° 2682 et 2689C. entre plus volontiers.

Guérison par l’eucharistie, largement Un prêtre guérit la tumeur d’une femme en la attestée dans l’hagiographie. Cf. P.-A. SIGAL, I, 9 touchant avec le doigt qui a, auparavant, L’homme et le miracle dans la médiévale e e manipulé l’hostie. (XI -XII siècle), Paris, 1985, p. 20-27. Tubach, n° 2688.

Un soldat fou retrouve ses esprits après avoir Même remarque. I, 10 communié. Tubach, n° 1214.

I, 11 L’eucharistie, l’apostat et le crapaud Tubach, n° 4877.

Le péril qu’encourt l’hostie sur un navire Un navire conduisant des croisés à Damiette était déjà le sujet d’un récit du Dialogus (IX, I, 12 subit les tempêtes parce qu’une hostie est à 13). bord, ce qui met en péril le corpus Christi. Tubach, n° 4333.

Le signe à la consécration s’inscrit dans la tradition hagiographique inaugurée par un épisode célèbre des Dialogues de Sulpice Lors de la consécration, un prêtre est entouré Sévère relatif à saint Martin. Voir SULPICE I, 13 d’une grande clarté et reçoit une couronne. SÉVÈRE, Gallus. Dialogues sur les « vertus » de Martin, éd. et trad. J. FONTAINE, Paris, 2006 (Sources chrétiennes, 506), p. 220-223.

Tubach, n° 1364.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 15

L’anecdote est fondée sur l’analogie entre la fleur et le fruit d’une part, le pain et le vin et Une malade demande à ce qu’on lui ramène le corps et le sang du Christ de l’autre. Voir une fleur qui la guérira. Lorsque le prêtre la F. WALLERICH, « “Simile inuenitur in natura”. I, 21 ramène, il en sort une hostie. L’infirme Les analogies de la nature dans la pastorale e e communie et meurt aussitôt. Son âme est de l’eucharistie aux XII et XIII siècles) », portée en paradis. Revue d’histoire ecclésiastique, 111/3-4 (2016), p. 525-550.

Tubach, n° 2646.

Un prêtre boit une bière à la taverne quand on vient le trouver pour qu’il donne le viatique à une mourante. Le prêtre dit qu’il n’a pas le Le prêtre qui refuse de se déplacer pour temps. Mais on revient le trouver en disant donner le viatique figure dans : HERBERT DE II, que la chose ne peut attendre. Se décidant CLAIRVAUX, Liber Miraculorum, III, 24. Le sang 12 alors à partir, le prêtre passe sur un pont où dénonce souvent l’indignité des célébrants. un homme lui demande d’où vient le sang qui Par exemple, Dialogus, IX, 19. coule de sa main. Le prêtre constate alors que, Tubach, n° 2689A. malgré l’absence de blessure, sa main saigne en effet.

Un moine commet plusieurs négligences lors Autre cas de négligence lors de la messe à II, de la messe. C’est cela qui a provoqué une l’origine de catastrophes : Dialogus, IX, 55. 13 tempête terrible, calmée seulement par des prières à la Vierge. Tubach, n° 4167.

Un voleur, condamné à la pendaison, se confesse. Le prêtre lui dit de lui apparaître dans les trente jours pour lui indiquer son état II, spirituel. Le défunt lui apparaît en effet. Il dit Tubach, n° 4785. 14 qu’il est damné parce qu’il a oublié de confesser qu’il n’a jamais cru à la présence substantielle.

Un prêtre donne à sa concubine un corporal II, Dialogus IX, 66 ; Collectaneum, n° 35. afin qu’elle le lave. L’eau dont elle se sert se 15 change en sang. Tubach, n° 2689B.

Un bénédictin ne peut recevoir la communion. On découvre que, originaire de régions II, lointaines et peu christianisées, il n’a pas reçu Tubach, n° 1156. 16 le baptême. Après avoir été baptisé, il peut communier.

Incitation à la communion fréquente similaire dans le Liber Visionum d’Élisabeth Après avoir eu une vision dans laquelle la III, de Schöntau, livre II, chapitre 23 (F. W. E. Vierge l’y incitait, une femme qui communiait 32 ROTH, Die Visionen der hl. Elisabeth…, Brünn, rarement le fait souvent. 1884, p. 50).

Tubach, n° 5130.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 16

III, Une image de la Vierge donne la communion à Tubach, n° 2659. 45 des moniales.

La Vierge donne miraculeusement la III, Dialogus, VII, 32. communion à un moine. Dans l’hostie apparaît 47 le Christ sous la forme d’un Enfant. Tubach, n° 762.

NOTES

1. L’expression est notamment employée dans : A. VAUCHEZ, « Le tournant pastoral de l’Église en Occident », in J.-M. MAYEUR, C. et L. PIETRI, A. VAUCHEZ et M. VENARD (dir.), Histoire du christianisme, t. 5 (Apogée de la papauté et expansion de la chrétienté), Paris, 2001, p. 737-766. 2. L’édition du recueil d’Herbert de Clairvaux vient tout juste de sortir : HERBERT DE CLAIRVAUX, Liber visionum et miraculorum Clarevallensium, éd. G. FOIS, S. MULA et G. ZICHI, Turnhout, 2017 (Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis, 277). Nous n’avons pas pu y avoir accès et citerons donc le texte d’après la Patrologie latine. Rappelons aussi l’édition du recueil du ms. PARIS, Bibliothèque nationale de France, lat. 15912 : Collectio exemplorum cisterciensis in codice Parisiensi 15912 asseruata, éd. J. BERLIOZ et M.‑A. POLO DE BEAULIEU, Turnhout, 2012 (Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis, 243). 3. Plusieurs articles récents ont notamment appelé à prendre en considération l’implantation urbaine de l’ordre. Voir par exemple, pour le cas de Clairvaux : F. BLARY, « Le domaine de Clairvaux : des granges et des possessions urbaines. À la recherche d’un équilibre entre ruralité et urbanité cistercienne », in A. BAUDIN et A. GRÉLOIS (dir.), Le temps long de Clairvaux. Nouvelles recherches, nouvelles perspectives (XIIe-XXIe siècle), Paris, 2016, p. 183-200. 4. V. SMIRNOVA, M. A. POLO DE BEAULIEU et J. BERLIOZ (dir.), The Art of Cistercian Persuasion in the Middle Ages and Beyond. Caesarius of Heisterbach’s Dialogus miraculorum and its Reception, Leyde/Boston, 2015. 5. Les fragments conservés ont été édités dans : A. MEISTER, Die Fragmente der Libri VIII Miraculorum des Caesarius von Heisterbach, Rome, 1901 et A. HILKA, Die Wundergeschichten des Caesarius von Heisterbach, t. 3 (Die beiden ersten Bücher der Libri VIII Miraculorum ; Leben, Leiden und Wunder des heiligen Engelbert, Erzbischofs von Köln ; Die Schriften über die heilige Elisabeth von Thüringen), Bonn, 1937. On citera d’après cette dernière édition, qui corrige largement la précédente. L’édition de quelques récits d’après un manuscrit antérieur inconnu de Meister et de Hilka a également été donnée dans : P. C. BOEREN, « Ein neuentdecktes Fragment der Libri VIII Miraculorum des Caesarius von Heisterbach », Annalen des historischen Vereins für den Niederrhein insbesondere das alte Erzbistum Köln, 170 (1968), p. 7-21. Sept récits ont été édités comme des possibles fragments de la même œuvre dans : J. VENNEBUSCH, « Unbekannte Miracula des Caesarius von Heisterbach », Annalen des historischen Vereins für den Niederrhein insbesondere das alte Erzbistum Köln, 184 (1981), p. 7-19. 6. On ne sait pas si Césaire a laissé son œuvre inachevée ou si l’état dans lequel on connaît celle- ci est due aux hasards de la conservation. Voir à ce sujet : K. LANGOSCH, « Caesarius von Heisterbach », in W. STAMMLER (dir.), Die Deutsche Literatur des Mittelalters Verfasserlexikon, t. 1, Berlin/New York, 1978, col. 1152-1168. 7. On ne compte pas ici les quatre récits sur ce thème édités par Joachim Vennebusch. Voir n. 5. 8. Voir infra, annexe. 9. CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Libri VIII Miraculorum, éd. A. HILKA, Die Wundergeschichten…, op. cit., p. 30-31 : De monacho, qui communionem fugiens per bufonem punitus est (I, 11). 10. La distinction entre sacramentum (le sacrement comme signe) et la res sacramenti (la chose signifiée par le sacrement) est courante et ancienne ; on trouve ce vocabulaire dès les environs de

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 17

1100 chez Alger de Liège. En revanche, l’identification de la res sacramenti à la grâce spirituelle est plus spécifique des théologies eucharistiques « mystiques ». Voir G. MACY, The Theologies of the Eucharist in the Early Scholastic Period. A Study of the Salvific Function of the Sacrament according to the Theologians, c. 1080-c. 1220, Oxford, 1984, spécialement p. 49-51 (pour la théologie eucharistique d’Alger) et p. 73-105 (« The Mystical Approach to the Eucharist »). 11. Huit exempla du Dialogus Miraculorum font intervenir un crapaud (bufo) : II, 32 (les aumônes d’un usurier se changent en crapauds qui le dévorent) ; IV, 86 (les viscères d’une volaille sont changés en crapaud pour punir des gourmands) ; V, 6 (le diable prend l’apparence d’un crapaud) ; X, 67-69 (un crapaud ne cesse de poursuivre un homme qui a tenté de le tuer ; un prêtre gourmand trouve un crapaud dans sa bouteille de vin ; un crapaud apparaît sur l’autel lors d’une cérémonie juive) ; XI, 39 (un usurier se fait enterrer avec deux bourses, qui se transforment en crapauds) et XII, 18 (les poissons que rapporte un usurier à son fils se transforment en crapauds et en serpents). Le crapaud est absent du livre IX, consacré à l’eucharistie. 12. CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Libri VIII Miraculorum, éd. A. HILKA, Die Wundergeschichten…, op. cit., p. 33. 13. GUIBERT DE NOGENT, Autobiographie, éd. E.-R. LABANDE, Paris, 1981 (Les Classiques de l’histoire de France au Moyen Âge, 34), p. 441-443. 14. La Vie du pape Léon IX (Brunon, évêque de Toul), éd. et trad. M. PARISSE et M. GOULLET, Paris, 1997 (Les Classiques de l’histoire de France au Moyen Âge, 38), p. 15-21. 15. GAUTIER MAP, De nugis curialium, II, 5, éd. M. R. JAMES, rev. C. N. L. BROOKE et R. A. B. MYNORS, Oxford, 1983 (Anecdota Oxoniensa, 4) p. 138-141 et trad. fr. M. PEREZ, Contes de courtisans. Traduction du De nugis curialium de Gautier Map, Lille, [1988], p. 90 ; A. K. BATE, Gauthier Map, Contes pour les gens de cour, Turnhout, 1993, p. 141-142. Le récit est mentionné dans : J. BERLIOZ, « L’homme au lézard. Une légende bourguignonne du XIIe siècle », in Pays de Bourgogne, 146 (octobre 1989), p. 4-6. Voir aussi l’histoire du fils puni parce qu’il refuse de donner de la nourriture à son père ou sa mère, connu pour le XIIIe siècle par nombre d’exempla cités dans : J. BERLIOZ, « L’homme au crapaud. Genèse d’un exemplum médiéval », in Tradition et histoire dans la culture populaire. Rencontres autour de l’œuvre de Jean-Michel Guilcher, Grenoble, 1990, p. 169-203. 16. PAUL DIACRE, Historia Langobardorum, éd. L. BETHMANN et G. WAITZ, MGH, SS rer. Lang., Hanovre, 1878, p. 12-219 et spécialement p. 112-113. 17. Sur la place des sources orales dans l’œuvre de Césaire, voir : B. P. MCGUIRE, « Friends and Tales in the Cloister : Oral Sources in Caesarius of Heisterbach’s Dialogus Miraculorum », Analecta Cisterciensia, 36 (1980), p. 167-247. 18. Voir les nombreux exemples donnés dans : J. BERLIOZ, « Kröte », in Enzyklopädie des Märchens, Berlin/New York, 1998, t. 8, col. 494-499. Voir aussi : V. BOLL, Autour du couple ambigu crapaud- grenouille. Recherches ethnozoologiques, Paris, 2000, p. 25-26. 19. L’abbaye de Kamp, fille de Morimond, fut fondée en 1123 au diocèse de Cologne. 20. Un aperçu sommaire est donné dans : P. BROWE, Die eucharistischen Wunder des Mittelalters, Breslau, 1939, p. 112-113. Sur l’intérêt qu’ont porté les cisterciens à ces motifs, voir F. WALLERICH, « Miracles eucharistiques et prêtres indignes dans quelques recueils cisterciens (1170-1220) », Revue d’histoire de l’Église de France, 101/1 (2015), p. 19-40. 21. Le motif apparaît pour la première fois, semble-t-il, dans l’Historia monachorum de Rufin (IVe siècle), où il est rapporté au sujet de Macaire d’Alexandrie. Voir TYRANNIUS , Historia monachorum sive De vita sanctorum patrum, éd. E. SCHULZ-FLÜGEL, Berlin/New York, 1990, p. 373. Césaire le reprend dans le Dialogus, livre IX, chapitres 54 et 63. Voir CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Dialogus Miraculorum/Dialog über die Wunder, éd. et trad. N. NÖSGES et H. SCHNEIDER, t. 4, Turnhout, 2009, p. 1866 et p. 1882. 22. Sur les différents rapports qui peuvent s’établir entre le châtiment et le crime, voir J. BASCHET, « Les conceptions de l’enfer en France au XIVe siècle : imaginaire et pouvoir », Annales. Économies, sociétés, civilisations, 40/1 (1985), p. 185‑207 et spécialement p. 195-198 : « Du crime au

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 18

châtiment ». Le châtiment dans le récit de Césaire peut s’inscrire dans les logiques de peines inversives et locatives. Voir plus généralement J. BASCHET, Les justices de l’au-delà : les représentations de l’enfer en France et en Italie (XIIe‑XVe siècles), Rome, 1993 (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome, 279). 23. Le thème de l’eucharistie comme médecine et du Christ comme médecin apparaît dans plusieurs récits du recueil. Voir par exemple : CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Libri VIII Miraculorum, éd. A. HILKA, Die Wundergeschichten…, op. cit., p. 28 (« Quam efficax medicina sit et corporis et mentis sacramentum corporis Christi ») et p. 29 (« Christus […] medicus factus est et medicina » ; « medicina Christi corpus »). 24. J. BERLIOZ, « Le crapaud, animal diabolique : une exemplaire construction médiévale », in J. BERLIOZ et M. A. POLO DE BEAULIEU (dir.), L’animal exemplaire au Moyen Âge (Ve‑XVe siècle), Rennes, 1999, p. 267-288 et spécialement p. 269. 25. HONORIUS AUGUSTODUNENSIS, Elucidarium, éd. Y. LEFÈVRE, L’Elucidarium et les lucidaires. Contribution, par l’histoire d’un texte, à l’histoire des croyances religieuses en France au Moyen Âge, Paris, 1954 (Bibliothèque des Écoles françaises d’Athènes et de Rome, 124), p. 399 : « Et quia hoc sumunt negligenter ut alium panem et aliud vinum, vertitur eis in fel draconum, et in venenum insanabile aspidum. » 26. CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Dialogus Miraculorum…, XII, op. cit., t. 5, p. 2216. L’association du crapaud au diable au Moyen Âge est bien attestée par ailleurs. 27. CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Dialogus Miraculorum…, t. 4, ibid., p. 2026 : « Cumque altare pannis multis ac mundis operuissent, tempore sacrificii vespertini simul entrantes, sacerdos ad altare accedens, postquam pannos revolvit, sub eis circa medium altaris maximum bufonem invenit. » Histoire citée dans J. BERLIOZ, « Kröte… », op. cit., col. 497. Voir aussi J. BERLIOZ, « L’homme au crapaud… », op. cit., p. 191. 28. J. BERLIOZ, « Le crapaud, animal diabolique… », op. cit., p. 272. 29. Autres exemples similaires dans : J. BERLIOZ, « L’homme au crapaud… », op. cit., p. 192-194. 30. Le fonctionnement du motif chez Césaire serait alors comparable à celui que l’on retrouve dans la statuaire romane. De nombreuses sculptures présentent des reptiles attachés aux seins ou au sexe de femmes luxurieuses ainsi châtiées. Le thème est étudié dans : J. BERLIOZ, « Le crapaud, animal ambigu au Moyen Âge ? Le témoignage des exempla et de l’art roman », in L. BODSON (dir.), Regards croisés de l’histoire et des sciences naturelles sur le loup, la chouette et le crapaud dans la tradition occidentale, Liège, 2003, p. 85-106 et spécialement p. 94-100 : « Art roman, crapaud et femme luxurieuse ». 31. Sur les formes de jeûne eucharistique en général, on pourra consulter : C. BYNUM, Jeûnes et festins sacrés : les femmes et la nourriture dans la spiritualité médiévale, Paris, 1994 et U. ISRAEL, « Leben vom lebendingen Gott. Hostienesser im Mittelalter », Mediaevistik, 18 (2005), p. 69-81. Le thème est présent dans le Dialogus, notamment au chapitre 47 du livre IX. Voir CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Dialogus Miraculorum…, op. cit., p. 1848-1850. Dans les Libri VIII, voir infra, annexe 1. 32. J. BERLIOZ, « Le crapaud et le prédicateur », in C. N’DIAYE, La gourmandise, Paris, 1993, p. 31-34. Le même auteur a esquissé ce lien entre gourmandise et manquement à l’égard de l’eucharistie dans : J. BERLIOZ, « L’homme au crapaud… », op. cit., spécialement p. 194. Le lien entre l’animal et la bouche est aussi relevé dans : J. BERLIOZ, « Kröte… », op. cit., col. 496. 33. Outre la bouche, le sexe féminin peut être concerné, comme dans une histoire de la Vie de saint Malachie citée et analysée dans : J. BERLIOZ et M. A. POLO DE BEAULIEU, « Le saint, la femme et le crapaud », in J. REVEL et J.-C. SCHMITT (dir.), L’ogre historien. Autour de Jacques Le Goff, Paris, 1998, p. 223-242. 34. Dans son étude des justices infernales, Jérôme Baschet avait déjà insisté sur l’importance des orifices corporels comme lieux de plaisir et de châtiment, en proposant une lecture psychanalytique du phénomène. Cf. n. 22.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 19

35. Sur cette triple association dans le folklore, voir aussi V. BOLL, Autour du couple…, op. cit., p. 101-111. 36. Sur ce point, voir L. MAYALI, « Du vagabondage à l’apostasie. Le moine fugitif dans la société médiévale », in D. SIMON (dir.), Religiöse Devianz. Untersuchungen zu sozialen, rechtlichen und theologischen Reaktionen auf religiöse Abweichung im westlichen und östlichen Mittelalter, Francfort- sur-le-Main, 1990, p. 121-142. 37. Regula sancti Benedicti, éd. et trad. A. de VOGÜÉ et J. NEUFVILLE, t. 1, Paris, 1972 (Sources chrétiennes, 181), p. 438-441. 38. E. FRIEDBERG (éd.), Corpus iuris canonici, t. 2 (Liber extravagantium decretalium), Leipzig, 1881 [reprint. Graz, 1959], col. 578 : « Religiosi fugitivi annuatim sunt requirendi, et cogendi, ut ad monasterium revertantur » (3.21.24). Le pape précise : « si [les abbés] trouvent les fugitifs récalcitrants, qu’ils les excommunient et les fassent déclarer publiquement excommuniés par les prélats des églises, jusqu’à ce qu’ils se soient humblement rendus à leur commandement. » (« Si uero huiusmodi fugitiuos uel eiectos inobedientes inuenerint, eos excommunicent, et tamdiu faciant ab ecclesiarum praelatis excommunicatos publice nunciari, donec ad mandatum ipsorum humiliter reuertantur. ») 39. L’histoire figure dans le recueil contenu dans le manuscrit TROYES, Bibliothèque municipale, 946, qui a été édité sous le titre de : Collectaneum exemplorum et visionum Clarevallense e codice Trecensi 946, éd. O. LEGENDRE, Turnhout, 2005 (Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis, 208), p. 229. 40. C’est au concile de Tolède de 638 que sont fixées les dispositions à prendre à l’égard des moines fugitifs. Voir L. MAYALI, « Du vagabondage à l’apostasie… », op. cit., p. 128. 41. C’est ce qu’indique C. HARPER-BILL, « Monastic Apostasy in Late Medieval England », Journal of Ecclesiastical History, 32/3 (1981), p. 1-18 et spécialement p. 2. 42. J. N. CANIVEZ, Statuta Capitulorum Generalium Ordinis Cisterciensis ab anno 1116 ad annum 1786, t. 1 (Ab anno 1116 ad annum 1220), Louvain, 1933 [éd. Revue d’histoire ecclésiastique], p. 87. Vers la même époque, le pape Alexandre III s’adresse aux abbés de l’ordre pour leur faire part du problème que constitue la circulation de moines blancs dépourvus d’autorisation. Cf. E. FRIEDBERG (éd.), Corpus iuris canonici…, op. cit., col. 570 : « Si Cisterciensis sine licentia sui abbatis ad alium monasterium transit, ad proprium monasterium regredi cogitur. » (3.21.7) Notons au passage que, si les statuts évoquent largement le problème des fugitifs, les Ecclesiastica officia ne l’abordent guère. Il est simplement mentionné, à la rubrique sur les « frères envoyés en voyage » (De dirigendis in uia), qu’« on n’enverra personne en voyage sinon pour l’utilité du monastère ». Cf. D. CHOISSELET et P. VERNET (éd.), Les Ecclesiastica officia du XIIe siècle, Reiningue, 1989, p. 249. 43. É. LUSSET, Crime, châtiment et grâce dans les monastères au Moyen Âge (XIIe-XVe siècle), Turnhout, 2017, p. 263 : « Généralisation de la peine de prison au XIIIe siècle ». 44. J. N. CANIVEZ, Statuta Capitulorum…, op. cit., t. 2, p. 3. 45. Sur le crapaud et les cadavres, cf. J. BERLIOZ, « Crapauds et cadavres dans la littérature exemplaire (XIIe-XIVe siècles) », in Il cadavere, Florence, 1999, p. 231-246. La comparaison de l’apostat à un cadavre se trouve, par exemple, dans la lettre qu’envoie au début du XIIIe siècle Hélinand de Froidmont à Gauthier. Ce dernier a quitté l’ordre cistercien après son noviciat pour vivre dans le siècle après un bref passage à Prémontré. Après avoir énoncé les péchés de Gauthier, Hélinand affirme : « ils forment la tombe dans laquelle on dépose les cadavres des âmes défuntes ». Voir HÉLINAND DE FROIDMONT, De Reparatione lapsi, éd. PL , 212, col. 745-760 et spécialement col. 751A : « Haec est enim tumba, quae supponitur cadaveribus animorum mortuorum. » 46. Cf. HÉLINAND DE FROIDMONT, De Reparatione lapsi…, ibid. C’est la rigueur de la vie cistercienne qui semble avoir justifié le choix de Gauthier d’après la lettre d’Hélinand. 47. 1 Cor 11, 27-29 : « Ainsi donc, quiconque mange le pain ou boit la coupe du Seigneur indignement aura à répondre du corps et du sang du Seigneur. Que chacun donc s’éprouve soi- même, et qu’ainsi il mange de ce pain et boive de cette coupe ; car celui qui mange et boit, mange

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 20

et boit sa propre condamnation, s’il ne discerne le Corps. » Sur l’eucharistie comme jugement : P. BROWE, « Die Abendmahlsprobe im Mittelalter », Historisches Jahrbuch, 48 (1928), p. 193-207. 48. L’hypothèse est suggérée en filigrane dans C. M. A. CASPERS, « Meum summum desiderium est te habere : l’eucharistie comme sacrement de la rencontre avec Dieu pour tous les croyants (ca. 1200-ca. 1500) », in A. HAQUIN et J.-P. DELVILLE (dir.), Fête-Dieu (1246-1296), t. 1, Louvain-la-Neuve, 1999, p. 127-151 et spécialement p. 140. 49. CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Libri VIII Miraculorum…, op. cit., p. 29 : « Qui Christi corpus et sanguinem abhorret imprudens est, quia uix esse potest, quin periculum animae uel corporis siue utriusque homo incurrat. De hac verax et manifestum referam exemplum. » 50. JACQUES DE VITRY, Vita Marie de Oegnies, éd. R. B. C. HUYGENS, Turnhout, 2012 (Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis, 252), p. 114 : « venialia, quibus omnino carere non possumus in hac vita, reputabat mortalia, unde nec corpus Christi aliquo modo, etiam diebus illis quibus institutum est in ordine, volebat recipere ». 51. C’est le cas de deux récits du Collectaneum, n° 48 et n° 88. Dans le premier, « un moine prêtre, sous l’action d’un esprit mauvais, encourut le danger du doute au sujet du sacrement de l’autel. Épouvanté, il commença en désespérant à mettre en danger son salut et à songer à renoncer à la vie religieuse et même, ce qui est terrifiant à entendre, d’abjurer totalement la foi chrétienne et catholique, et d’apostasier avec les juifs et les païens. » (Voir Collectaneum exemplorum…, op. cit., p. 240 : « monachus quidam sacerdos, spiritu nequam agente, de sacramento altaris ut sibi uidebatur incurrit, periculum dubietatis. Quo nimirum uehementer exterritus, cepit funditus de salute sua desperando periclitare et se proposito religionis renunciaturum proponere et quod ualde horrendum est audire, etiam fidem christianam et catholicam penitus abdicare, et cum iudeis uel paganis apostatare. ») Dans le second, un moine « était tellement désespéré qu’il ne voulait pas, ou rarement, entrer à l’oratoire au moment de la prière ou du sacrifice, affirmant qu’il était un fils de la damnation, disant même d’une bouche blasphématrice qu’il lui était impossible de faire son salut. » (Voir Collectaneum exemplorum., ibid., p. 245 : « ita desperatus est ut uix aut raro orationis tempore uel sacrificii oratorium intrare uellet, asserens se filium dampnationis esse, ore etiam blasphemo dicens ut saluus fieret impossibile esse. ») 52. CÉSAIRE DE HEISTERBACH, Dialogus Miraculorum…, op. cit., p. 1834-1836 et spécialement p. 1836 : « Tu te indignum cogas, et quis putas tanta re dignus esse potest ? Hanc igitur offensam tibi condonabo ; sed vide ne de cetero simile feceris. » 53. Ces deux critères rejoignent la célèbre définition de l’exemplum comme « récit bref donné comme véridique et destiné à être inséré dans un discours (en général un sermon) pour convaincre un auditoire par une leçon salutaire », C. BREMOND, J. LE GOFF et J.-C. SCHMITT, L’exemplum, Turnhout, 1996 (Typologie des sources du Moyen Âge occidental, 40), p. 37-38. 54. Fr. C. TUBACH, Index Exemplorum. A Handbook of Medieval Religious Tales, Helsinki, 1969 (FF communications, t. 86, n° 204), n° 2644. 55. Le recueil auquel renvoie Tubach est le manuscrit LONDON, British Library, Harley 2316, que le catalogue de Herbert date de la seconde moitié du XIVe siècle. Le compilateur date l’anecdote du crapaud de 1343. Voir J. A. HERBERT, Catalogue of Romances in the Department of Manuscripts in the British Museum, t. 3, Londres, 1910, p. 576. 56. Cf. http://gahom.huma-num.fr/thema/index.php ; le texte est édité dans B. MUNK OLSEN, Dits en quatrains d’alexandrins monorimes de Jehan de Saint-Quentin, Paris, 1978, p. 246-253.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 21

RÉSUMÉS

L’article s’attache à comprendre le motif atypique d’un exemplum contenu dans les Libri VIII Miraculorum de Césaire de Heisterbach (livre I, chapitre 11). Se sentant en état de péché, un moine quitte le monastère pour ne pas être tenu écarté de l’autel lors de la communion ; un crapaud s’introduit alors dans son corps pour le punir. Pour expliquer cet étrange récit, on montrera que Césaire l’a pensé à la fois comme une réécriture du Livre de Jonas et selon les logiques propres à la conception médiévale de la justice. Une fois les logiques narratives et anthropologiques du récit décryptées, l’article en cerne les enjeux à la lumière du contexte d’écriture. En ne condamnant pas l’indigne communion mais l’absence de communion, Césaire offre un exemplum original, qui semble faire écho à des problématiques qui traversent alors l’ordre cistercien.

The article focuses on an exemplum located in Caesarius of Heisterbach’s Libri VIII Miraculorum (book I, chapter 11). Because a monk feels guilty and fears to communicate, he decides to leave his community. He is punished for his crime, as a toad enters his body by his mouth. To explain this strange story, we will show that Caesarius conceived it as a rewritting of the Book of Jonah and according to the medieval conception of justice. Then the article stresses the main aims of the story. Caesarius does not condemn unworthy communion but non-attendance to communion. Therefore, his exemplum is quite original and probably tries to respond to problems, with which the cistercian order had to deal at the time.

INDEX

Mots-clés : Césaire de Heisterbach, eucharistie, exemplum, monachisme, ordre cistercien

AUTEUR

FRANÇOIS WALLERICH Université Paris Nanterre

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 22

La femme tel un diamant marial : idéal féminin, spiritualité et médecine dans le Livre de la vertu du sacrement de mariage de Philippe de Mézières

Marc-André Moreau

1 Le Livre de la vertu du sacrement de mariage a été rédigé entre 1385 et 1389 par Philippe de Mézières. Dédié à Jeanne de Châtillon et à Pierre de Craon, ce traité est un guide spirituel et conjugal destiné aux élites de la cour de Charles VI1. Plus globalement, il s’inscrit dans une tradition bien établie d’ouvrages didactiques dédiés aux femmes afin de les guider dans leurs rôles d’épouses et de mères. La littérature française de la fin du Moyen Âge accorde une grande importance à la codification des comportements2 et nombreuses sont les œuvres didactiques ayant été dédiées aux femmes aux XIIIe et XIVe siècles3. Les auteurs du XIVe siècle ont généralement accordé une attention particulière aux réalités temporelles et sociales associées au rôle de l’épouse4. Ainsi, le Livre pour l’enseignement de ses filles du Chevalier de La Tour Landry, rédigé vers 1372, et le Mesnagier de Paris, rédigé vers 1394, « se présentent sous forme de manuels dans lesquels les femmes peuvent trouver toute sorte de préceptes, voire de conseils pratiques pour apprendre comment devenir une bonne épouse et réussir son mariage5 ». Rédigée après le premier de ces ouvrages et avant le second, l’œuvre de Mézières se distingue par la grande place qu’elle accorde aux fondements spirituels du sacrement de mariage et le peu d’importance qu’il octroie à la sphère domestique traditionnellement attachée à la

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 23

femme6. Puisque le mariage était alors considéré comme la « vocation naturelle de la femme7 », la représentation de celle-ci dans l’œuvre de Mézières n’a pu qu’être influencée par l’importance que cet auteur accorde à l’aspect spirituel du mariage.

2 Parallèlement, au cours du règne de Charles V, la médecine s’intègre au sein des connaissances générales au point de détenir « un rôle important à Paris sur le monde des idées et sur l’évolution intellectuelle8 ». Omniprésent à la cour du roi, ce « véritable engouement pour la médecine9 » occupe une place importante dans le savoir et déteint sur les théories fondamentales associées non seulement au corps, mais aussi à l’âme10. Fruit de ce rapprochement entre les sciences et les lettres, l’œuvre de Mézières est empreinte d’un vocabulaire emprunté à la médecine. En tant qu’œuvre destinée à codifier le comportement des épouses, le Livre de la vertu du sacrement de mariage offre l’opportunité d’étudier la représentation d’un idéal féminin à travers le prisme d’un discours à la fois moralisant et encyclopédique alliant des idées médicales et spirituelles. Cet article a pour objectif de cerner le portrait de l’idéal féminin reflété dans cette œuvre ainsi que le rôle du vocabulaire médical et lapidaire dans cette représentation.

3 L’hypothèse défendue dans ce texte est que Philippe de Mézières utilise un langage emprunté aux théories médicales et lapidaires en vigueur en France à la fin du XIVe siècle, afin d’encadrer les comportements des femmes mariées. Le discours de Mézières incorpore des thèmes médicaux, parfois savants, dans un discours moral et révèle, par le fait même, un lien étroit unissant la médecine et la culture religieuse dans la représentation des femmes à la cour de France à la fin du XIVe siècle. En évoquant les maladies qui menacent les femmes qui adoptent des comportements excessifs ou immoraux, Mézières leur prescrit les comportements qu’elles doivent rejeter et ceux qu’elles doivent adopter pour veiller à leur santé et à celle de leur couple. Comparée à un diamant et à une pierre d’aimant, la Vierge Marie, épouse et mère du Christ, incarne l’idéal féminin. Appelée à imiter la Vierge Marie, la femme doit avoir un rôle actif dans le maintien de la vertu au sein de la vie conjugale, elle-même représentée sous la forme sotériologique d’un pèlerinage menant à l’union de l’âme chrétienne et Dieu.

4 Né vers 1327 dans le « petit château à moitié en ruines de Mézières près d’Amiens11 », Philippe de Mézières visite la plupart des cours de la chrétienté et devient l’une des figures politiques les plus importantes de son époque12. Homme d’armes et de lettres ayant parcouru l’Occident comme l’Orient13, il devient chancelier de Chypre puis conseiller de Charles V avant de se retirer, en 1380, chez les célestins de Paris. Loin de dissimuler les prémices d’un abandon, la retraite de ce réformateur zélé lui permet de se consacrer à l’écriture dans la plus grande quiétude. Si celui qui se considère comme « un célestin avorté14 » troque l’épée pour la plume, c’est parce qu’il perçoit le livre comme « une construction globalisante porteuse d’un projet de société15 ». Dans la France du XIVe siècle, la lecture est effectivement perçue comme un moyen d’élévation morale, un outil permettant une réforme individuelle16. Puisque toute réforme individuelle suppose avant tout celle de l’esprit, Mézières entreprend d’expliquer le sacrement de mariage à la lumière de l’union entre le Christ et l’âme humaine. Ainsi, espérait-il pouvoir guider les couples mariés et, plus particulièrement, les dames : Cestui gros et rude escripvain, combien qu’il ait pri en cestui livre la matere du sacrement de mariage pour reconforter les dames mariees, toutefois sa devotion et entencion principale estoit et est toujours de venir et par grace au fruit de sacrement de mariage esperituel, si comme de la cause on vient a l’effet, de la matere a la fourme, selonc le philozophe17.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 24

5 À la manière d’un médecin, il cherche à expliquer aux femmes les remèdes à leurs maux18. À celles-ci, il présente son œuvre comme étant « un bel et estrange miroir ou quel elles se pouont mirer et recognoistre a plain leur sante ou maladie19 ».

6 L’intérêt de cet ouvrage contraste avec le nombre limité d’études ayant été écrites à son sujet. C’est en 1933 et en 1937 qu’Élie Golenistcheff-Koutouzoff écrit les deux premières études portant sur le Livre de la vertu du sacrement de mariage20. L’auteur souligne le langage fortement allégorique de cette œuvre, de même que ses références médicales, mais n’y consacre pas une grande part de son ouvrage. Un demi-siècle plus tard, en 1984 et en 1985, Joan B. Williamson étudie cette œuvre dans deux articles et, en 1993, en publie l’unique édition moderne21. Avec elle, Anna Loba est probablement l’historienne ayant contribué le plus à l’étude de ce traité22. Celle-ci a publié des articles 1997 et en 2008 ainsi qu’une monographie en 2013, où l’œuvre de Mézières est étudiée. Le langage médical, qui y est présent, n’a toutefois toujours pas été étudié de façon détaillée depuis qu’il a été souligné par Jean-Louis Picherit en 199423.

7 Le manuscrit français 1175 de la Bibliothèque nationale de France est l’unique copie restante du Livre de la vertu du sacrement de mariage. Cet article s’appuie sur la seule édition moderne de ce manuscrit effectuée par Joan B. Williamson en 1993. Puisqu’elle est centrée sur la compréhension de langages et de représentations et qu’elle cherche à examiner la relation entre le monde social et la symbolique qui lui est attachée, l’approche de cet article peut être associée à celle de la nouvelle histoire culturelle24. Dans son ouvrage portant sur les derniers siècles du Moyen Âge, Johan Huizinga affirme que le symbolisme est alors si vif et omniprésent qu’il est devenu « un second miroir qu’on opposait à celui de la création elle-même25 ». Ainsi, Mézières affirme que ses propos doivent être interprétés à la lumière de leur signification symbolique, comme le proposent l’apôtre Paul26 et Aristote27. Conscient de la dureté de certains des propos de son texte, « qui de prime face ne sonnera pas bien doulx aus oreilles des dames mariees28 », Mézières, qui se considère comme « rude escripvain plastrier29 », s’excuse auprès des femmes, qui, espère-t-il, sauront plutôt bénéficier de ses propos.

8 Bien qu’il ne soit pas exclusivement consacré à l’étude du genre, cet article aborde un thème qui lui est lié. Joan Scott vit dans l’étude des systèmes de représentations une méthode efficace pour analyser les représentations du genre dans les sociétés. Selon elle, cette approche permettrait de « saisir les rôles puissants que les symboles, les métaphores et les concepts jouent dans la définition de la personnalité et de l’histoire humaines30 ». Appuyé sur ces considérations, ce texte prône l’étude contextualisée des représentations symboliques, issues de la culture étudiée, afin de cerner les représentations du féminin31. Les termes médicaux et lapidaires sont analysés en fonction de leurs usages didactiques par Mézières et afin de révéler sa conception de l’idéal féminin et conjugal.

9 La première section de cet article, associée à l’histoire culturelle des sciences, porte sur les savoirs médicaux à la fin du XIVe siècle en France et leur place dans la culture. Ces savoirs médicaux sont analysés dans leurs relations avec le genre, la passion amoureuse et les péchés. La deuxième section consiste en l’analyse du discours didactique et normatif de Mézières. Les femmes qui commettent des excès risquent de menacer leur santé et celle de leur mariage. Ce sont les cas des orgueilleuses, des avares et des colériques qui sont analysés. La troisième et dernière section de ce texte consiste en l’analyse de la Vierge Marie en tant qu’épouse idéale. Les vertus associées à la Vierge Marie, représentée sous la forme d’un diamant et d’une pierre d’aimant, sont analysées,

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 25

de même que son rôle, dans l’obtention du salut. Il s’agit donc, par extension, de connaitre les vertus que doit adopter la femme et de son rôle dans le projet conjugal et sotériologique des mariés dévots.

Genre, passion et péchés à la lumière de la médecine à la fin du XIVe siècle

La fragile complexion des femmes

10 Si Mézières dédie particulièrement son Livre de la vertu du sacrement de mariage aux dames mariées, c’est notamment parce qu’il considère que « la dame a trop plus grant mestier de reconfort pour sa fragilité feminine que l’omme n’a qui est ou doit estre de plus forte complection32 ». Ne reposant pas sur une misogynie idiosyncrasique, cette conception de la santé féminine, comme étant plus fragile que celle de l’homme, était répandue à la fin du Moyen Âge. L’œuvre de Mézières s’inscrit donc, sur ce point, dans une tradition médicale bien établie. Ainsi, la tradition médicale antique justifiait l’infériorité biologique féminine en s’appuyant sur la divergence des complexions entre les hommes et les femmes. S’appuyant sur la tradition galénique, le médecin Pietro d’Abano écrivit que les femmes sont plus froides et humides que les hommes33. C’est un propos répandu, se trouvant également dans les écrits d’Henri de Mondeville, qui considère que les pratiques médicales doivent être adaptées à cette réalité34. Pour Pietro d’Abano, cette différence n’impliquait pas une égalité. Au contraire, il affirme qu’il est plus difficile pour les femmes d’avoir une complexion relativement tempérée que les hommes35. Si l’équilibre humoral est toujours relatif, il serait plus rarement sain chez les femmes. Cet équilibre était pourtant nécessaire à la santé. Ainsi, Mézières affirme, dans son œuvre, que la maladie survient lorsque les proportions des humeurs sont débalancées : Il a ou corps de creature umaine .iiij. complections par lesquelles la creature est gouvernee et soustenue naturelment a parler, c’est assavoir sang, colere, fleume et melencolie. (…) et toutes les fois que les dictes complections habondent outre mesure en l’omme et en la femme, il est necessité ou que la personne soit purgie ou que engendree soit la maladie36.

11 Les comportements des individus auraient une incidence sur leur santé puisque « pour accident survenant ou pour mal gouvernement ou par humour habondant toutes les maladies procedent et sont engendrees37 ». Pour préserver sa santé, la femme doit donc éviter toutes formes d’excès. Le mauvais contrôle de soi pouvant prendre la forme d’un excès émotif, la passion amoureuse est elle-même perçue comme dangereuse. La femme mariée, fragile sans être vierge, s’exposait à un grave péril.

Quand la chair menace l’esprit

12 Selon Howard Bloch, la méfiance des clercs envers les femmes puiserait dans les sources platoniciennes du christianisme qui supposaient que la raison était aux hommes ce que les sens étaient aux femmes38. Dès le XIIe siècle, la passion amoureuse tend à être décrite comme une maladie dans la littérature courtoise39. Dans le Remède de Fortune de Guillaume de Machaut, l’allégorie médicale de la passion amoureuse prend la forme d’une osculation, alors qu’une femme, tâtant le pouls d’un homme, découvre qu’il souffre d’un amour pour elle40. Pareillement, Christine de Pizan, que Philippe de

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 26

Mézières a connue41 et a influencé concernant sa vision du mariage42, compare dans Le Livre du duc des vrais amants la passion amoureuse à une blessure déréglant le comportement du souffrant43. Le Chevalier de La Tour Landry écrit, en 1372, que « le touchier et le bayser esmeuvent le sanc et la char telement que ils font entroblier la crainte de Dieu et honneur de cest monde44 ». En fait, la tradition médicale médiévale puise dans les textes d’Hippocrate, d’Aristote et de Galien une conception de la passion amoureuse comme étant une source de dérèglements humoraux, au point que les médecins la désignent souvent avec le même vocabulaire que les poètes45. Dans son Tractatus de amore heroico, Arnaud de Villeneuve décrit la passion amoureuse comme une maladie pouvant nécessiter des interventions médicales46. S’appuyant sur Avicenne, Évrart de Conty décrit similairement l’amour comme le fruit d’un dérèglement humoral susceptible de plonger celui qui en souffre dans la folie47. L’activité sexuelle en particulier, ne devait pas être excessive, car elle était réputée affaiblissante pour l’homme puisqu’elle pouvait dérégler sa complexion en le privant de sa chaleur naturelle48. Selon Pietro d’Abano, les rapports sexuels pouvaient assécher et refroidir la complexion des hommes au point de pouvoir affecter la qualité de leur vision, qui reposait sur un certain niveau d’humidité corporelle49. Antidote offert par la grâce divine, le sacrement de mariage aurait pour fonction de surveiller et contrôler les excès charnels50. Ainsi, au XIVe siècle, la légitimité du mariage ne repose pas, selon l’Église, sur l’acte charnel, mais plutôt sur le consentement des partenaires51. Pour Mézières, le mariage « n’est autre chose que une doulce compaignie legitime entre l’homme et la femme du consentement de tous deux52 », qui « est es cueurs et corages de l’omme et de la femme et en leur esperit et non pas en l’euvre de la char53 ». Parce qu’il permet d’amoindrir les maux de la concupiscence, le mariage s’apparente, par sa fonction, à la médecine. Hugues de Saint-Victor, auteur très influent au XIVe siècle54, décrit le mariage comme un remède susceptible d’engendrer une chasteté conjugale, là où il n’y aurait autrement qu’une luxure55. Paul de Tarse voit en lui un refuge contre la débauche56. Rempart contre le péché, le mariage pouvait toutefois en subir l’assaut. La sexualité excessive ou déviante était, même dans un cadre conjugal, une source de péchés et un danger pour le corps et l’âme57.

De l’esprit troublé au corps troublé

13 Dans son traité, Mézières établit un parallèle entre le dérèglement des humeurs, les comportements inadéquats et les maladies58. Les mariés ayant des comportements inappropriés mettent en péril la santé de leur mariage, tout comme le déséquilibre humoral compromet la santé des individus. Mézières affirme que si les maladies spirituelles sont beaucoup plus graves que celles du corps, ces dernières peuvent mener à un esprit troublé59. Issue du péché originel, la concupiscence s’opposerait à la raison, et constituerait, selon Augustin d’Hippone, une révolte du corps contre l’âme, une honteuse réminiscence de la désobéissance humaine à l’encontre de Dieu60. Ainsi, Guillaume de Saint-Thierry écrit qu’Adam avait une complexion parfaitement équilibrée, mais que, par sa faute, il a légué à l’humanité le déséquilibre humoral et le fardeau des maladies61. Selon Hugues de Saint-Victor, sans le péché originel, l’humanité ne serait pas poussée à se reproduire par des pulsions animales, mais le ferait rationnellement62. L’humanité formée à l’image de Dieu corrompt la loi de nature lorsqu’elle commet un péché63. Mariée au Christ64, l’âme humaine ferait violence à son époux quand elle commet un péché. Le péché serait un miroir de la faute originelle.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 27

Justes représailles divines, les maladies seraient le fruit du non-respect de leur mariage avec le Christ : Les mariés parfondement examinant leur concience, je pense qu’il trouveront que envers l’Espous de leurs ames, Jesu Crist, il cognoistront et confesseront que non tant seulement une fois mais sans nombre il ont faulsé le sacrement de leur mariage, dont principalement les .vij. maladies (…) sustouchies sont engendrees, voire la divine justice permetant65.

14 Ainsi, pour Mézières, l’homme doit éviter de corrompre les dons qu’il a reçus de Dieu par le péché, sinon son âme est indigne d’être son épouse66. Le mariage de la femme avec le Christ l’emportant sur son union avec l’homme, celle qui a trompé son époux immortel risque très fortement de tromper son époux humain67. Cette idée, que la femme doive plus que tout veiller à son mariage avec le Christ, est également présente dans les écrits de Jean Gerson, qui considérait qu’une épouse ne devait pas obéir à son mari si elle estimait que ce qu’il lui demandait allait à l’encontre de la volonté divine68. Le respect du mariage entre l’âme humaine et le Christ, par l’absence de péché, est donc l’ultime moyen de préserver la santé du sacrement de mariage.

15 Le discours de Mézières est tributaire d’une tradition des sermons et textes religieux et moraux liant les péchés à des maladies. Certains de ses propos sont associés à des théories médicales qui circulaient à la fin du XIVe siècle. Si l’écriture de Mézières se distingue par son encyclopédisme, elle n’a pas une vocation scientifique. Sa finalité est morale et a pour objectif de permettre l’amélioration des comportements des mariés et, en particulier, des épouses. En évoquant les maladies qui menacent les pécheresses, Mézières leur prescrit les comportements qu’elles doivent rejeter. L’orgueil et la colère, en particulier, ont en commun, par leur insolence inhérente, d’être un outrage à l’idéal féminin et un péril à tous mariages.

Les maladies des dames excessives : médecine et normes comportementales

L’hydropisie des orgueilleuses et avares

16 Mézières affirme que l’épouse orgueilleuse et avide de puissance méprise son mariage avec le Christ et son mari et que, gonflée d’orgueil, elle souffre d’hydropisie : Dont il avien que aucune femme pour son mal gouvernement, pour le sang corrompu et fleume qui habonde en lui, elle a appetit de seignourie (…) dont elle devient ydropique et toute enflee, car le foye est corrumpu, et veult toujours boire et estre remplie des bruvage de ce monde qui ne saoulent pas mais enflent et engendrent pourreture. Ceste femme, pour ce qu’elle a faulsé le sacrement de son mariage a son Espous et mary, elle est devenue ydropique et enflee (…) et qui pis est pour l’ame elle est encheue en pechié d’orgueil, qui est signifié par l’enflure69.

17 Mézières associe l’hydropisie à l’orgueil. Dans les sermons de la fin du Moyen Âge, cette maladie était pourtant traditionnellement liée à l’avarice70. C’est que, à l’image de l’orgueil, l’avarice était perçue comme un rejet de la spiritualité au profit de la matérialité et était donc associée à l’impiété71. Pour Mézières, l’appétit indécent de l’orgueilleuse pour les biens est similaire à celui de l’avare. Ainsi, il affirme que l’épouse qui convoite sans cesse des biens luxueux et inutiles a des désirs démesurés, comparables à ceux de chiens72. L’association de l’avarice à un appétit illimité était, selon Carlos Clamote-Carreto, un thème récurrent des sermons de la fin du Moyen

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 28

Âge73. Dans ces textes et ceux de la tradition dont ils sont issus, l’orgueil fusionnait souvent avec l’avarice et la gourmandise. Ainsi, dans son Liber de planctu naturae, Alain de Lille lie l’avarice à la gourmandise et à l’orgueil en les associant à l’hypertrophie du ventre74. Guillaume Peyraut présente dans sa Summa de vitiis, qui connait un grand succès au Moyen Âge tardif, la gourmandise comme un vice susceptible d’engendrer tous les autres75. Similairement, Thomas d’Aquin écrit, dans sa Somme théologique, que l’orgueil est un des pires péchés, car il est susceptible d’engendrer les autres péchés capitaux76. Le contemporain de Mézières, Eustache Deschamps, associe, dans son Miroir du Mariage, l’orgueil des femmes oisives qui convoitent des robes à leur inclinaison à la luxure77. Se manifestant par l’attachement aux biens matériels, l’avarice et l’orgueil sont, pour Mézières, des maux qui touchent particulièrement les couples aristocratiques, dont il critique l’exubérance choquante, car contrastante avec la misère des pauvres : Il faut au jourd’hui, pour les noces des dames et de leurs filles, grans couronnes, riches chapiaux (…) et grans paremens, qui en brief temps devendront poudre et seront mengiéz de vers et dehors et dedens ; et nos pauvres freres et seurs crestiens meurent de fain, de froit et de mesaise78.

18 Mézières reproche l’obstination des mariés qui convoitent des vêtements luxueux en ne pensant qu’à leur « vile charongne qui sera mengie de vers79 » et leur recommande d’imiter le Christ qui, lorsqu’il épousa l’Église lors de sa Passion, n’avait pour joyaux « que les grans plaies de sa flagellacion80 ».

19 L’orgueil, l’avarice et la gourmandise étaient particulièrement critiqués quand ils étaient réputés contraires à la charité81. Ces vices, nourris des désirs égocentriques et mondains, s’opposaient radicalement à la vertu théologale liée à l’amour de son prochain et de Dieu. Dangereuse pour l’âme, la gourmandise menaçait aussi la santé corporelle. Gilles de Rome, dans son De Regimine Principum, affirme que la gourmandise est dangereuse pour le corps car l’estomac de celui qui mange trop n’a pas une chaleur naturelle suffisante à la digestion82. La chaleur vitale était réputée essentielle au bon fonctionnement du corps. Ainsi, au début du XIVe siècle, le chirurgien Henri de Mondeville prescrivait à ses patients malades des régimes alimentaires, afin d’améliorer leur chaleur vitale et rétablir leur équilibre humoral83. Récupérant cette théorie pour lier l’orgueil et la gourmandise, Mézières affirme que la volonté et l’appétit désordonnés, associés à l’orgueil, engendrent l’hydropisie, car l’estomac d’une femme orgueilleuse ne détient pas la chaleur nécessaire à une bonne digestion, soit la chaleur de l’amour véritable : Il fu dit que la femme malcontente de son mariage pour sa transgression d’amour qu’elle avoit fait contre son Espoulz et mari, par le pechié d’orgueil, elle estoit devenue toute enflee et cheue en ydropisie par un appetit desordené et propre volenté desmesuree. (…) et toujours a boire desiroit et toujours empiroit. Quel merveille! Car la chalour de la vraye amour qui devoi digerer en l’estomac et ou au cuer les humours corrompues estoit toute refroidie comme un glason84.

20 Ce manque d’amour pourrait s’exprimer dans la quête du pouvoir et la recherche du profit. Comme le souligne Carlos Clamote-Carretto, l’argent pouvait être perçu comme contre nature dans la mesure où il amoindrissait les différences de pouvoir considérées comme naturelles entre les sexes et dans la société85. De plus, les femmes, par leur complexion froide, associée à la mélancolie, étaient réputées plus sensibles à l’avarice et à l’oisiveté86. Pietro d’Abano avance toutefois un autre danger lié aux complexions,

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 29

qui, à l’image de celles des femmes, sont froides. Un excès de bile noire, réputée froide et sèche, pouvait rendre un individu colérique ou le faire sombrer dans la folie87.

L’apoplexie des malveillantes et des colériques

21 Reposant sur l’idée que « les mœurs de l’âme suivent les tempéraments du corps88 », la tradition médicale galénique liait les excès émotifs, comme la colère, à des accidents de l’âme susceptibles d’engendrer des maladies89. Ces accidents de l’âme affectaient l’esprit et, par conséquent, le corps et la fonction cognitive des individus90. Rappelant les propos d’Arnaud de Villeneuve au sujet de la passion amoureuse, Arnold von Bamberg affirme, dans son Regimen Sanitatis, composé au début du XIVe siècle, que les accidents de l’âme doivent être évités le plus possible, car ils peuvent mener à une détérioration rapide de la santé d’un individu et nécessiter un traitement thérapeutique91. Ainsi, la femme colérique s’expose, selon Mézières, à la paralysie. Résultant de l’abondance de bile et de flegme, la colère occasionnerait un refroidissement des nerfs et un tremblement des membres susceptible d’engendrer la paralysie : L’autre femme malcontente par l’abondance de la colere dominant et fleume vitelline corrumpue par la seconde condition ou complection – c’est couroux demesuré – chiet en une maladie qui s’appelle paralisie – c’est refroidement de ners et tramblement de membres92.

22 Puisant dans la tradition galénique, l’idée, selon laquelle la colère peut être causée par une abondance de bile, se trouve dans les écrits d’Arnaud de Villeneuve, au début du XIVe siècle93. Similairement, Bernard de Gordon affirme, comme Mézières, que la colère peut mener à la paralysie en engendrant un refroidissement des nerfs occasionnant une incapacité de bouger94. Ce refroidissement des nerfs a pour fondement l’idée que la colère expulse la chaleur corporelle. Selon le Pantegni, la traduction effectuée par Constantin l’Africain de l’encyclopédie médicale d’Haly Abbas, qui est à la fin du Moyen Âge largement diffusée, la colère a pour effet d’expulser la chaleur corporelle95. Cette idée est également présente dans l’Isagogè, un traité contenu dans l’Articella, utilisé pour l’enseignement universitaire de la médecine entre le XIIIe et la fin du XVIe siècle96.

23 Selon Mézières, la colère peut également engendrer l’apoplexie, car la personne colérique perd le contrôle d’une moitié de son individu, soit de son âme : Or vient a la femme malcontente la (…) maladie, qui a nom appoplectie ou epilencie, par laquelle communaument on pert un des lés. A bien venir c’est proprement le péchié d’yre car la personne est composee de .ij. choses conjointes ensamble, c’est assavoir du corps et de l’ame. Celui doncques ou celle qui se laisse cheoir en forte yre, il pert le sens et l’un des lés – c’est l’âme – et souventefois et la moitié ou tout le corps97.

24 L’idée de perte de contrôle d’une partie de soi rapproche la colère de la folie en tant que perte d’humanité98. L’excès de colère est, en effet, rapproché de la bestialité dans l’Éthique à Nicomaque d’Aristote99, traduite au XIIe siècle, puis largement répandue dans l’univers universitaire à partir du XIIIe siècle100. Cette œuvre sera traduite pour la première fois dans une langue vernaculaire, vers 1369, par Nicole Oresme101, que Mézières connaissait et considérait comme « un des meilleurs et authentiques philosophes qui ait vécu depuis Aristote102 ». Thomas d’Aquin décrit également la colère comme un des vices les plus susceptibles d’affecter la raison103. Quant à elle, la colère divine est réputée être toujours animée par un désir de justice et sans cesse retenue et

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 30

modérée jusqu’à ce qu’elle doive éclater pour le bien de l’humanité104. Ainsi, le colérique pécheur est celui qui se fâche sans raison. C’est possiblement pour cela que Mézières lie l’apoplexie à la colère, mais aussi à une mauvaise volonté et à une absence de repentance : Une maladie qui s’appelle appoplecie ou epilencie, engendree de colere noire et fleume corrumpue et ners bleciés (…) assavoir par propre volenté de eslire la pieure partie, de non purgier soy en tamps et en lieu des males humeurs handondants105.

25 Puisque le péché est une violence faite au mariage entre l’âme d’un individu et le Christ, cette absence de repentance et de bonne volonté rapproche dangereusement les femmes colériques de la sorcellerie et de l’impiété106. Bien que les troubadouresses semblent avoir généralement associé la colère au genre féminin107, les hommes étaient traditionnellement réputés avoir des tempéraments plus chauds et secs et étaient donc considérés comme plus enclins à la colère que les femmes108. Les femmes colériques vivaient donc une réalité opposée à leur nature et la colère était réputée provoquer des menstruations anormales et des fausses couches109. L’impétuosité et la déraison des femmes furieuses, présentées dans plusieurs exempla du bas Moyen Âge, contrastent avec la colère des hommes, présentée plus souvent comme légitime110. Ces récits relatent l’histoire de femmes colériques ayant rompu leurs liens avec la société et l’Église, ce qui va non seulement à l’encontre de l’idéal féminin, mais surtout, les mène à la damnation111.

26 La description des maladies qui menacent les femmes orgueilleuses, avares et colériques puise dans la tradition médicale galénique qui était en vigueur à la fin du XIVe siècle. Mézières s’en est inspiré afin de tracer un discours moral et normatif lui permettant de délimiter, à l’aide d’une rhétorique similaire à celle des exempla, les comportements que les épouses devraient éviter. Les pécheresses qui n’éviteraient pas ces comportements le feraient au détriment de la santé de leur corps et de leur âme, de même que celle de leur couple. En décrivant ces maladies et leurs causes, Mézières trace le portrait de femmes déraisonnables et malades par leurs propres fautes. Pour ne pas se limiter à une dénonciation, mais plutôt guider les femmes vers une amélioration morale, Mézières leur propose un idéal à émuler. C’est vers la Vierge que les pécheresses doivent se tourner pour être guéries.

La Vierge Marie et l’épouse idéale

Les vertus du diamant marial et l’épouse idéale

27 Aux femmes mariées, Mézières propose la Vierge Marie pour idéal. À la fin du Moyen Âge, la Vierge constitue un modèle pour les mères et les épouses. Nombreuses sont les veuves, qui, à l’image d’Isabella Beauchamp en 1439, léguent leur alliance à des abbayes et sanctuaires dédiés à la mère du Christ112. Mais Marie n’est pas seulement considérée comme la mère et l’épouse du Christ, elle est aussi vierge. Éclipsé par les états de continence et de virginité, « l’estat de mariage, combien qu’i soit bon et bien approuvé 113 » est considéré comme le moins parfait des trois. Comme l’a souligné Sue Niebrzydowski, le fait que la Vierge ait été une épouse justifie et glorifie le rôle d’épouse dans la tradition cléricale et littéraire valorisant la continence et la virginité 114. Cet idéal de l’épouse vierge ou chaste s’accorde bien avec les propos de Mézières, qui, comme l’a souligné Anna Loba, insiste sur la nécessité d’un perfectionnement et

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 31

d’un engagement mutuel sur la voie de la sainteté115. Les mariées, bien qu’elles soient liées à la sphère temporelle116, doivent chercher à transcender cette réalité et s’améliorer sur le plan spirituel. La Vierge Marie fait alors figure de guide. Ainsi, selon Mézières, l’homme doit s’efforcer d’imiter le Christ, qu’il compare à un rubis, et la femme doit imiter la Vierge Marie, qu’il compare à un diamant : Se nous voulons donques faire une doulce concordance de l’omme a la femme conjoins ensamble par le sacrement de mariage, il est expedient que le mari a son plain pooir et par grace prengne la fourme et conditions, c’est assavoir en vertu morale, du fin rubin, et l’espouse mortele prengne aussy la forme et condition, comme dit est, du fin dyamant117.

28 Le discours affirmant que l’homme doit imiter le Christ n’est pas étranger à la médecine. Pietro d’Abano affirme que le Christ, que tous doivent imiter, a une complexion parfaite118. L’association des hommes et des femmes avec des pierres précieuses n’est pas, non plus, unique à Mézières. Selon Jean-Pierre Poly, l’homme médiéval étendait la distinction sexuelle « à l’univers entier, animaux, plantes et minéraux119 ». Dans le Voir-Dit de Guillaume de Machaut, une dame est comparée à un saphir et à une émeraude pouvant guérir des douleurs de l’amour120. Dans un autre registre, des lapidaires chrétiens liaient, par le biais d’une lecture exégétique, des pierres précieuses à des passages de la Bible121.

29 Il n’en demeure pas moins que l’usage de ce symbolisme lapidaire et la sémantique, qui lui est associée dans le texte étudié, sont originaux. Mézières utilise le symbolisme du rubis et du diamant de façon croisée dans d’autres ouvrages, notamment dans l’épître qu’il dédie en 1396 au roi d’Angleterre pour mettre fin à la guerre de Cent Ans122. Pour comprendre l’écriture symbolique de Mézières, il importe de cerner dans quelle tradition elle s’inscrit. Comme l’a souligné Joel Blanchard, il est fort possible que Mézières ait été influencé par les écrits de Pseudo-Denys l’Aréopagite123. Or, pour cet auteur mystique, les discours symboliques peuvent être élaborés en juxtaposant des références liées à la flore, à la faune, mais aussi au monde minéral et aux humains124. De plus, selon l’Aréopagite, « les symboles dissemblables illustrent les réalités spirituelles mieux que les symboles ressemblants125 », car ils sont plus dissociés du monde matériel. En associant symboliquement la Vierge à un diamant, Mézières a donc trouvé un moyen de véhiculer des idéaux spirituels et moraux dans un texte s’inscrivant dans une tradition typiquement préoccupée par les aspects temporels de la vie conjugale. La dévotion particulière de Mézières à l’endroit de la Vierge fait de l’exemple qu’il propose aux femmes un idéal auquel il accorde une grande valeur126. En 1372, Mézières a d’ailleurs composé une pièce dramatique au sujet de la Présentation de la Vierge Marie au Temple, une célébration qu’il a réussi à faire introduire dans le rite catholique127. Le diamant représenté par la Vierge Marie a le pouvoir de guérir les maux engendrés par les péchés. Les vertus qu’il lui associe sont nombreuses et révèlent un idéal féminin complexe.

30 L’humilité du diamant marial, que doit imiter la femme, lui octroie un teint bruni et terne pour ceux qui le regardent de loin, mais, pour ceux qui l’observent de plus près, « sa couleur brune est resplendissant comme un mirouoir d’acier128 ». Sur l’existence d’un diamant brun, Mézières s’est possiblement inspiré du lapidaire de Marbode, qui stipule l’existence de diamants translucides, mais aussi d’une variété plus sombre129. Mézières l’utilise ici pour indiquer que la femme doit adopter un comportement humble lorsqu’elle est en public ne doit pas laisser voir aux étrangers sa véritable beauté. L’humilité en public était, au Moyen Âge, particulièrement associée aux

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 32

femmes. Le contemporain de Mézières, Geoffroi de La Tour Landry, propose également la Vierge Marie en tant que modèle d’humilité pour les épouses dans le livre qu’il écrit pour ses filles en 1372130. Dans le Mesnagier de Paris, composé vers 1394, l’auteur recommande à sa femme d’être modeste en public et d’éviter le regard des hommes131. Gerson estime que l’humilité naturelle des femmes les prédispose à la contemplation spirituelle plus que l’orgueil des grands prélats et les incline à une piété plus grande que les hommes132. Cette valorisation de l’humilité était telle, que, selon Mary C. Flannery, l’honneur d’une femme médiévale pourrait presque exclusivement être défini par sa capacité à ressentir la honte133.

31 Le diamant aurait également le pouvoir de protéger contre le venin134, qui, selon Mézières, « en l’ame et ou corps d’umaine creature, parlant moralement, n’est autre chose que péchié135. » Dans cette perspective, la femme idéale doit limiter les vices au sein du couple. Sans étudier la symbolique lapidaire et médicale, Anna Loba perçoit également l’importance du rôle de la femme dans le maintien de la chasteté au sein du mariage dans l’œuvre de Mézières136. Les vertus du diamant incarnant l’idéal féminin révèlent d’autres pouvoirs associés aux femmes. Ainsi, le diamant peut protéger contre les tempêtes137, tout comme la Vierge aurait le pouvoir de mettre fin au Grand Schisme et aux luttes entre chrétiens138. La femme devant l’imiter est donc appelée à limiter les dissensions et les conflits au sein de son ménage et de sa famille. Une autre vertu du diamant est qu’il « conforte et conferme parfaitement l’amour de celui qui le donne a l’amour de celui qui le reçoit139 ». La femme cherchant à l’imiter devra, par conséquent, aimer son époux comme celui-ci l’aime. Mézières affirme que la Vierge est celle, qui, en tant que Diamant, témoigne du plus grand amour pour le Christ : Dyamant proprement et a la lettre vaut au tant a dire comme ‘‘Dieu amant’’. Qui est celui ou celle qui onques ama tant Dieu si purement, si ardamment comme fist la royne des noces, l’espouse du doulz Aignelet occys140 ?

32 Le diamant permet également à son propriétaire de multiplier « en tous biens et honnours141 ». Fondamental à l’épanouissement conjugal, selon l’auteur du Mesnagier de Paris, le « bonheur matériel qui combine le plaisir physique avec le confort142 » n’est pas celui que Mézières cherche à valoriser. À ce sujet, il affirme plutôt que la femme, à l’image de l’Église, doit se contenter de la suffisance : Elle se conferme et doit confermer a la volenté divine et est contente des biens de ce monde pour sa necessité et non pas a superfluité, ensivant son doulz Espous, qui vaut eslire vraie et sainte povreté et non pas mendicité143.

33 Dans un cadre domestique, la femme est donc appelée à être satisfaite de ses biens et à veiller en faire une bonne gestion. Mézières estime, par ailleurs, que les mariés devraient généralement être d’un niveau similaire de fortune pour éviter les désaccords et les conflits144. Il offre une réflexion similaire par rapport à la noblesse des mariés. Lui-même issu de l’aristocratie, il estime qu’il faut éviter les grandes divergences entre les rangs de noblesse de mariés, puisque les plus nobles se sentiraient supérieurs à leur partenaire et compromettraient l’amour fondamental au mariage145. Par conséquent, si la Vierge est l’épouse de Dieu, c’est parce « qu’elle estoit issue et descendue de la plus noble lignie qui fust entre les creatures humaines (…) voir par droite ligne de Adam nostre prumier père146. »

34 De façon peut-être un peu plus étonnante, Mézières affirme que la femme doit être forte. Référant à la tradition des neuf preuses, issue de celle de leurs homologues masculins, il mentionne Sémiramis, qui aurait conquis la Judée et soumis ses seigneurs orgueilleux alors que son père en avait été incapable147. Cette référence à une « preuse »

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 33

témoigne de l’engouement rapide de l’aristocratie pour ces femmes issues du Livre de Leesce, rédigé vers 1373 par Jehan Le Fèvre148. La force corporelle de Sémiramis serait toutefois inférieure à la force spirituelle de la Vierge, « car elle vainqui et mist dessouvz se piés le plus fort roy d’orgueuil qui oncques fu creé, c’est Lucifer149 ». La force de la femme doit donc être morale et permettre, tout comme un vrai diamant résiste à une lime d’acier, de résister à l’orgueil et au péché véniel : Le fin dyamant se cognoit des faulx diyamans contrefais (…) quand le fin dyamant est si dur et si ferme que la lyme d’acier n’a sur lui nulle seignourie. Parlant dévotement, moralisant tellement quellement, par la lyme d’acier qui touzjours lyme et ne se puet ployer assés bien se puet entendre le pechié d’orgueuil qui ne se daigne ployer ; et le pechié veniel qui tousjours lyme150.

35 La femme pouvait également être portée vers l’érudition. Selon Mézières, la Vierge est la femme qui sait le mieux écrire, bien que celui-ci affirme connaitre des femmes qui écrivent très bien, dont une ayant écrit une Bible avec grand soin151. Considérant le respect de Mézières pour la Bible, dont il préfère la version latine à toutes traductions, cette affirmation montre qu’il est loin de considérer les femmes comme inaptes à la compréhension des Écritures. Il accorde à Marie, par le biais de la prudence, les pouvoirs de l’éloquence et de la science et le rôle de second dans le gouvernement du monde : Notre Fin Dyamant, l’espouse et mere du Fin Rubin, laquelle entre les planetes est la belle lune plaine, par laquelle aprés le solail le monde est gouverné et de tous biens et vertus gracieusement aourné. Entre les metaulx aussy, c’est le fin argent esmeré, segnefiant vraye science et belle eloquence par laquelle on empetre pardon et de tous péchiés vraye remission152.

36 Cette prudence est liée à la tempérance de la Vierge qui doit inspirer la femme dans la régulation de son mode de vie153. Par sa tempérance, sa prudence et son éloquence, la Vierge se voit accorder un rôle important dans le gouvernement du monde. Mézières considère effectivement que la Vierge modère la justice de Dieu, qui, par sa colère, pourrait détruire l’humanité : La justice de Dieu, par laquelle justice se puet entendre le grant et pesant plonc de l’orloge qui fait tourner les roes (…) est (…) de telle poissance que s’il n’estoit retenus en l’orloge par la petite roe (…) le dit plonc a un moment descenderoit a terre et craventeroit tout ce qu’il trouveroit devant lui (…) Mais nostre precieux Dyamant (…) pour sa grande temperance, pureté et vie nete et honneste, est devenue la petite roe de l’orloge et le biau frain du grant plonc (…) empetrant a son doulz fils que par son grant plonc – c’est par sa justice rigoreuse – il ne veuille destruire le monde plain de pechiés154.

37 Philippe de Mézières a contribué à accorder aux femmes le rôle de médiatrice et de tempérance, notamment en étant le premier traducteur non italien de l’histoire de Grisélidis, qui sera ensuite largement diffusée. Dans cette histoire, Grisélidis, en tant qu’épouse du marquis de Saluces, apaise des conflits politiques155. La femme a donc un rôle de modération dans la vie conjugale des mariés. Dans une perspective sotériologique, la femme, unie à l’homme par le sacrement de mariage, a un rôle important dans la quête d’obtention du salut du couple.

Le couple pèlerin guidé par l’aimant marial

38 L’appartenance de la femme à la sphère domestique est peu visible dans les écrits de Mézières, où elle est présentée, au côté de son mari, en tant que pèlerine :

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 34

Il est assavoir que la dame malcontente doit souvent ymaginer en soy meisme et cognoistre qu’elle est pelerine en ce monde qui est une grant mer salee, dont les ondes orribles, qu’elle ne cet, puet ou veult eschiver, le font malcontente de son mariage et le mari aussy156.

39 L’allégorie de la vie humaine en tant que voyage maritime et pèlerinage était intégrée à la culture littéraire de la fin du Moyen Âge et il s’agit d’un thème récurrent dans l’œuvre de Mézières157. Celui-ci considère la vie conjugale comme un pèlerinage, une odyssée difficile, susceptible d’être violentée par des tempêtes. La finalité de ce périple est la Jérusalem céleste, la « chambre royale des noces pardurables158 », où les vertueux mariés pourront célébrer leur véritable mariage avec Dieu. Pour y parvenir, les mariés doivent veiller au développement de leur spiritualité et chercher à épouser les valeurs chrétiennes préalables au mariage avec Dieu : Tous ceulx qui sont appellés (…) ne seront pas esleux aux noce pardurables de l’Espous immortel, mais seulement ceulx qui s’estudient (…) en l’Esglise – d’être aournés, nettoyés et parés, afin que quant il seront presentés a la presence du roy, il les veuille recevoir et non pas reprouver159.

40 La Vierge Marie, incarnée par le diamant, fait figure de phare dans ce périple qu’est la vie conjugale. Devant guider les pèlerins, elle prend la forme d’une pierre d’aimant. En fait, lorsque représentée sous la forme d’un aimant, Marie partage plusieurs caractéristiques avec sa représentation en tant que diamant, ce qui renforce l’idée que tous deux dressent un idéal du comportement féminin. La pierre d’aimant, par exemple, guérirait le venin160, soit le péché. Ancienne, cette propriété est également attribuée à l’aimant dans le lapidaire du Bestiaire Divin composé vers 1210 par Guillaume Le Clerc161, de même que dans les lapidaires de Solin, Dioscoride et Marbode162. Bue avec du vin aigre, la pierre d’aimant aurait le pouvoir de guérir « d’ydropisie, qui par orgueuil et par avarice est segnefiee163 ». La Vierge, aussi bien sous la forme d’un diamant164 que d’un aimant165, tient sa puissance de l’idéal masculin qu’est le Christ. Si l’âme humaine est toujours « féminine » devant un Dieu toujours « masculin », c’est l’incarnation de l’idéal féminin qui semble être proposée comme le guide le plus direct vers Dieu. La Vierge Marie est l’étoile Polaire aimantée devant guider les pèlerins vers la ville sainte : Se la dame mariee et le mary (…) vauldra (…) tenir la droicte voye pour parvenir a la saincte cité, il est expedient que l’aguille de fer froit et dur – c’est le cuer de chascune creature dur, malcontent et refroidié d’amour et de charité – oit touchie bien et fort et souvent a la pierre d’aymant, c’est a la Vierge Marie (…) et lors par grace elle attraira le fer a lui (…) et telement l’attiraira que la pointe du cuer en toutes tribulation avera toujours son regart et sa doulce et ferme esperance en l’Estoille tremontane166.

41 Le cœur du pèlerin, telle une aiguille de fer, doit donc toujours être inspiré par la Vierge Marie, afin de traverser les épreuves de la vie humaine et conjugale et d’atteindre le Paradis. La Vierge Marie, incarnant l’idéal féminin, infuse de la puissance que lui confie le Christ, représentant lui-même l’idéal masculin, indique la voie au couple marié pour lui permettre de mener une vie conjugale heureuse et, surtout, d’atteindre la chambre nuptiale de la Jérusalem céleste.

42 En somme, dans le Livre de la vertu du sacrement de mariage, Mézières puise, au sein de théories médicales et lapidaires diffusées en France au XIVe siècle, un langage lui permettant de forger un discours normatif définissant les comportements appropriés aux femmes mariées. Ce discours, proche de l’encyclopédisme, incorpore des thèmes savants, afin de véhiculer un message moral et didactique, spécialement adressé à des

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 35

épouses de la cour de Charles VI. Empreint de références spirituelles, ce texte présente un idéal féminin illustrant des points de convergence entre la médecine, la religion et la représentation des femmes dans la culture courtoise en France à la fin du XIVe siècle. Mézières présente la Vierge Marie comme un diamant et une pierre d’aimant pour refléter les vertus d’une épouse idéale. Loin d’être inactive, l’épouse idéale détient un rôle important dans l’épanouissement de la vie conjugale et l’obtention du salut des mariés, finalité espérée de la vie chrétienne. Tel un diamant marial illuminé par un rubis christique, le pouvoir de la femme dépend toutefois de celui de l’homme, qui se doit de la conseiller.

43 Si Mézières a tenu à conseiller les femmes, c’est parce qu’il leur accordait une importance au sein de la société. Dans les Quinzes joies du mariage, une pièce satirique écrite au XVe siècle, où les femmes sont représentées comme rusées et vigoureuses alors que les hommes sont malades, le discours médical dissimule une misogynie importante. Ainsi, Jean Batany souligne que, dans cette œuvre, « les femmes sont un monde extérieur, n’attirant aucune empathie, quelque chose comme les fauves ou les rochers, un monde mécanique sans faille, qu’on ne peut songer à corriger167 ». Si elle peut nous sembler misogyne, la volonté de Mézières de conseiller les femmes peut donc inversement être perçue comme une reconnaissance de leur importance.

44 Vers 1397, près de dix ans après la rédaction de son traité dédié aux femmes mariées, Mézières écrit, dans son Epistre lamentable et consolatoire, que, tout au long de sa vie, la libération de Jérusalem a été « la chose qu’il a plus désirée en ce monde168 ». Toutefois, puisque « pour les péchés de la crestienté169 » la croisade ne pouvait pas avoir lieu, une réforme morale devait la précéder. Comme l’a souligné Léah Otis-Cour, le mariage était, à la fin du Moyen Âge, au cœur de « la construction idéologique d’une société de paix, de justice, et d’amour170 ». Dans cette perspective, le Livre de la vertu du sacrement de mariage peut être considéré comme une œuvre ayant une vocation transcendant celle des traités destinés à former des femmes habiles pour réaliser des tâches domestiques. Loin d’échapper à un projet de réforme morale de la chrétienté, les femmes y tiennent plutôt un rôle important et ce, jusque dans le passage vers les Jérusalem céleste et terrestre. En fait, dans l’Ordre de la Passion de Jésus-Christ, un ordre de chevalerie qu’il a imaginé pour reconquérir Jérusalem, Mézières exige que les femmes des chevaliers accompagnent leurs maris en Terre Sainte. En incluant les femmes dans l’entreprise de la libération de la Terre Sainte, qu’il juge alors la plus noble qui soit, il leur accorde une place importante et rompt avec la tradition des ordres monastiques. Les rôles qu’il leur octroie, soit de limiter les péchés charnels des chevaliers et d’engendrer une lignée en Terre Sainte, semblent toutefois ancrés dans la tradition171. Il serait donc intéressant d’analyser, dans une perspective comparative, la place des femmes dans cet ordre de chevalerie, étudiée en 2007 par Philippe Contamine172, au rôle qu’il octroie aux épouses dans son Livre de la vertu du sacrement de mariage. Reçu : 30 août 2017 – Accepté : 5 décembre 2017

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 36

NOTES

1. S. E. UDRY, The Socio-Economic Implications of Images of Women’s Domestic Conduct in Books of Instruction and Plays from the End of the Fourteenth Century, thèse de doctorat (littérature comparée), Indiana University, 2001, p. 88-91. 2. J. KRYNEN, Idéal du prince et du pouvoir royal en France à la fin du Moyen Âge (1380-1440) : étude de la littérature politique du temps, Paris, 1981, p. 52. 3. Au cours du dernier tiers du XIIIe siècle seulement furent écrits le Chastoiement des Dames de Robert de Blois de même que les Quatre âges de l’homme de Philippe de Novare. Louis IX lui-même aurait possiblement écrit un ouvrage didactique destiné à sa fille. A. VELISSARIOU, « Comment elles se doyvent contenir : règles de conduite et codes gestuels dans le Livre du Chevalier de La Tour Landry pour l’enseignement de ses filles », Le moyen français, 65 (2009), p. 291. 4. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité conjugale : les couples royaux dans Le Livre de la vertu du sacrement de mariage de Philippe de Mézières », Studia romanica Posnaniensia, 35 (2008), p. 83. 5. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », ibid. ; EAD., « Le projet du bonheur conjugal dans Le Mesnagier de Paris », Studia romanica Posnaniensia, 29 (2003), p. 31-40. 6. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », ibid., p. 84. 7. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », ibid., p. 83. 8. J.-L. G. PICHERIT, La métaphore pathologique et thérapeutique à la fin du Moyen Âge, Tübingen, 1994, p. 13. À ce sujet, voir également F. GUICHARD-TESSON et M. GOYENS, « Évrart de Conty et ses contemporains : polyphonie d’un discours encyclopédique », in J. DUCOS et M. GOYENS (dir.), Traduire au XIVe siècle : Évrart de Conty et la vie intellectuelle à la cour de Charles V, Paris, 2015, p. 126-179. 9. J.-L. G. PICHERIT, La métaphore pathologique…, ibid., p. 16. 10. « L’aristotélisme permet à Thomas d’Aquin de pousser cette dynamique a son point extrême. (…) L’âme n’est plus une entité autonome associée au corps, mais la forme substantielle du corps », dans J. BASCHET, « Âme et corps dans l’Occident médiéval : une dualité dynamique, entre pluralité et dualisme », Archives des sciences sociales des religions, 45 (2000), p. 15. 11. P. DE MÉZIÈRES, « Oratio Tragedica, prologue », éd. J. BLANCHARD et A. CALVET, in J. BLANCHARD et R. BLUMENFELD-KOSINSKI (dir.), Philippe de Mézières et l’Europe : nouvelle histoire, nouveaux espaces, nouveaux langages, Genève, 2017, p. 279. 12. Avant même d’avoir vingt et un ans, Mézières avait établi des contacts aux cours de Milan, Naples et Chypre. Voir M. HANLY, « Philippe de Mézières and the Peace Movement », in R. BLUMENFELD-KOSINSKI et K. PETKOV (dir.), Philippe de Mézières and his Age : Politics and Piety in the late 14th Century, Leyde, 2012, p. 61 et 64. 13. « De par son maistre et seigneur le vaillant roy de Chipre par XV ans ou environ, continuelment ne fist autre mestier que d’aler d’Orient en Occident, de Midi en Septentrion, a la plus grant partie des princes de la crestienté », dans P. DE MÉZIÈRES, « Epistre Lamentable et Consolatoire », éd. K. DE LETTENHOVE, Œuvres de Froissart, t. 16, Bruxelles, 1872, p. 507. 14. N. IORGA, « Une collection de lettres de Philippe de Maizières. Notices sur le ms. 499 de la bibl. de l’Arsenal. Suite et fin », Revue historique, 49 (1892), p. 319. 15. A-H. MILLER, « Le poète dans la cité : figures de l’intellectuel vernaculaire au tournant de la fin du Moyen Âge », thèse de doctorat (littératures romanes), University of Washington, 2007, p. 216. 16. A-H. MILLER, « Le poète dans la cité… », ibid., p. 215. 17. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu du sacrement de mariage, éd. J. B. WILLIAMSON, Washington, 1993, p. 195.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 37

18. « Les phisiciens aussy traictent prolixement de la matere et circunstances de la medicine amere pour finablement obtenir la sainté du malade », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 195-196. 19. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 219. 20. E. GOLENISTCHEFF-KOUTOUZOFF, L’histoire de Griseldis en France, au XIVe et au XVe siècle, Paris, 1933 ; Étude sur le « Livre de la vertu du sacrement de mariage et réconfort des dames mariées » de Philippe de Mézières, d’après un ms. du XIVe siècle de la Bibliothèque nationale à Paris, Belgrade, 1937. 21. J. B. WILLIAMSON, « Philippe de Mézière’s book for married ladies : a book from the entourage of the court of Charles VI », in G. S. BURGESS et R. A. TAYLOR ( dir.), The Spirit of the Court : Selected Proceedings of the Fourth Congress of the International Courtly Literature Society (Toronto 1983), Cambridge, 1985, p. 393-408 ; ID., « La première traduction française de l’histoire de Griseldis de Pétrarque : pour qui et pourquoi fut-elle faite ? », in D. BUSCHINGER et A. CRÉPIN (dir.), Amour, mariage et transgressions au Moyen Âge, Göppingen, 1984, p. 447-456. 22. A. LOBA, « L’Estoire de Griseldis, du miroir au spectacle », in A. BARTOSZ, K. DYBEŁ et P. TYLUS (dir.), Jeux de la variante dans l’art et la littérature du Moyen Âge. Mélanges offerts à Anna Drzewicka par ses collègues, ses amis et ses élèves, Cracovie, 1997, p. 231-241 ; A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », op. cit., p. 83-92 ; Le réconfort des dames mariées. Mariage dans les écrits didactiques adressés aux femmes à la fin du Moyen Âge, Poznań, 2013. Cette œuvre de Mézières est aussi intégrée dans le corpus étudié dans la thèse déposée par Susan E. Udry en 2001. Voir S. E. UDRY, The Socio- Economic Implications…, op. cit. 23. J.-L. G. PICHERIT, La métaphore pathologique…, op. cit., p. 40-41. 24. R. CHARTIER, « La nouvelle histoire culturelle existe-t-elle ? », in Les cahiers du Centre de recherches historiques, 31 (2003), p. 1. 25. J. HUIZINGA, Le déclin du Moyen Âge, Paris, 1948, p. 194. 26. « Et vous, mes dames et seculers lisans ceste gracieuse matere, ne pensés pas que tout ce qui est dit (…) soit avenu tout a la lettre, alegant souvent au propos de la sainte Escripture, car saint Paoul l’apostre dit que la lettre occyt et l’entendement et esperit vivifie », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 151-152. 27. « Aristote dit ainsi nous metons les examples non pas pour ce qu’ils soyent vrays mais nous les proposons (…) afin que nous puissions entendre tout ce qu’ils signifient », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 271. 28. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 217. 29. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid. 30. J. W. SCOTT, « Genre : une catégorie utile d’analyse historique », Les cahiers du GRIF, 37-38 (1988), p. 51. 31. J. W. SCOTT, « Genre : une catégorie utile… », ibid., p. 56. 32. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 308. 33. M. KLEMM, « Les complexions vertueuses : la physiologie des vertus dans l’anthropologie médicale de Pietro d’Abano », Médiévales, 63 (2012), p. 63. 34. H. DE MONDEVILLE, Chirurgie de maître Henri de Mondeville, éd. E. NICAISE, Paris, 1893, p. 137. 35. M. KLEMM, « Les complexions vertueuses… », op. cit., p. 71. 36. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 227. 37. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 228. 38. H. BLOCH, « La misogynie médiévale et l’invention de l’amour courtois », Les cahiers du GRIF, 47 (1993), p. 14. 39. J.-L. G. PICHERIT, La métaphore pathologique…, op. cit., p. 3-4. 40. G. DE MACHAUT, Œuvres de Guillaume de Machaut, t.2, éd. E. HOEPFFNER, Paris, 1911, p. 57.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 38

41. L. J. WALTERS, « The Vieil Solitaire and the Seulette : Contemplative Solitude as Political Theology in Philippe de Mézières, Christine de Pizan, and Jean Gerson », in R. BLUMENFELD-KOSINSKI et K. PETKOV (dir.), Philippe de Mézières and his Age…, op. cit., p. 122. 42. C. P. COLLETTE, « Chaucer and the French Tradition Revisited : Philippe de Mézières and the Good Wife », in J. WOGAN-BROWNE et al. (dir.), Medieval Women. Texts and Contexts in Late Medieval Britain. Essays for Felicity Riddy, Turnhout, 2000, p. 153. 43. C. DE PIZAN, « Le livre du duc des vrais amans », éd. M. ROY, t. 3, Paris, 1896, p. 67. 44. A. VELISSARIOU, « Comment elles se doyvent contenir… », op. cit., p. 70. 45. J.-L. G. PICHERIT, La métaphore pathologique…, op. cit., p. 3. 46. M. R. SOLOMON, « Non-Natural Love : Coitus, Desire and Hygiene in Medieval and Early Modern Spain », in E. CARRERA (dir.), Emotions and Health, 1200-1700, Leyde, 2013, p. 156. À ce sujet, pour aller plus loin, on peut notamment consulter D. JACQUART et C. THOMASSET, « L’amour héroïque à travers le traité d’Arnaud de Villeneuve », in J. SÉARD, P. NAUDIN et M. SIMONIN (dir.), La folie et le corps, Paris, 1985, p. 143-158 ; J. LIVINGSTON LOWES, « The Loveres Maladye of Hereos », Modern Philology, 11 (1914), p. 491-546 ; M. F. WACK, Lovesickness in the Middle Ages, The Viaticum and Its Commentaries, Philadelphie, 1990. Je remercie Geneviève Dumas de m’avoir indiqué ces études. 47. L. LAUMONIER, « Au miroir de l’amour : médecine, philosophie et représentation dans l’œuvre d’Évrart de Conty », mémoire de maîtrise d’histoire, université de Sherbrooke, 2008, p. 109. 48. L. LAUMONIER, « Au miroir de l’amour… », ibid., p. 110. 49. G. COUCKE, « From Abstinence to Promiscuity : Men, Beasts and Eunuchs in the Exposotio Problematum of Pietro d’Abano », in P. DE LEEMANS et M. J. F. M. HOENEN (dir.), Between Text and Tradition : Pietro d’Abano and the Reception of Pseudo-Aristotle’s Problemata Physica in the Middle Ages, Louvain, 2016, p. 109-110. 50. D. BOQUET, L’ordre de l’affect au Moyen Âge : autour de l’anthropologie affective d’Aelred de Rievaulx, Caen, 2005, p. 257. 51. L. BRYAN, « Marriage and Morals in the Fourteenth Century : The Evidence of Bishop Hamo’s Register », The English Historical Review, 121 (2006), p. 473-474. 52. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 220. 53. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 222. Même dans le Songe du vieil pèlerin, un ouvrage didactique et politique dédié à Charles VI, il affirme que le mariage « est d’une telle nature qu’il nécessite le consentement et le libre arbitre des deux partis », voir. P. DE MÉZIÈRES, Songe du vieux pèlerin, éd. J. BLANCHARD, Paris, 2008, p. 820. 54. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », op. cit., p. 91. 55. H. DE SAINT-VICTOR, De sacramentis fidei christianae, éd. R. J. DEFERRARI, Eugene, 2007, p. 339. 56. A. DE LIBERA, Penser au Moyen Âge, Paris, 1991, p. 183-184. 57. J. CADDEN, « Sex and Sensibilities in the Medieval Problemata Tradition : Pietro d’Abano and his readers », in P. DE LEEMANS et M. J. F. M. HOENEN (dir.), Between Text and Tradition…, op. cit., p. 57-58, 64 et 65. 58. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 228. 59. « Lesquelles maladies spiritueles sont trop plus perilleuses que les passions corporeles ; dont saint Bernart dit que (…) se la char est malade, l’esperit en est tourblé souventefois », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 266. 60. I. BOCHET, « Le corps : un poids pour l’âme ? L’exégèse augustinienne de Sagesse 9, 15 », Revue des sciences philosophiques et théologiques, 100 (2016), p. 41. 61. A. ROBERT, « Le corps d’après : la Chute entre théologie et médecine (XIIe-XIVe siècles) », in G. BRIGULIA et I. ROSIER-CATACH (dir.), Adam, la nature humaine, avant et après. Épistémologie de la Chute, Paris, 2016, p. 187. 62. L. MOULINIER, « La pomme d’Ève et le corps d’Adam », Micrologus, 45 (2008), p. 135-158.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 39

63. « L’omme raisonnabe fourmé à l’ymage de Dieu, helas ! Par sa male inclination de pechié (…) en usant mal de son franc arbitre (…) sans ignorance pervertist et corront la belle loy de nature », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 242. 64. « Il doit souvenir a la dame mariee qu’elle n’a pa un mari seul, car elle en a .ij. auxquelx elle a promis et foy et loyauté », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 229. 65. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 230. 66. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 348. 67. « La femme doncques mariee qui n’a pas tenu loyaulté a son Espoulz immortel, ce n’est pas grant merveille se elle l’a faulsé a son mari mortel », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 230. 68. Y. MAZOUR-MATUSEVICH, « La position de Jean Gerson (1363-1429) envers les femmes », Le Moyen Âge, 112 (2006), p. 349-350. 69. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 233-234. 70. V. LANGUM, Medecine and the Seven Deadly Sins in Late Medieval Literature and Culture, New York, 2016, p. 134. 71. C. F. CLAMOTE-CARRETO, « La parole dérobée. Économie du silence et rhétorique de l’avarice d’après quelques récits en vers du XIIe et du XIIIe siècles », Micrologus, 18 (2010), p 121. 72. « Elles ont encores un appetite insaciable de belles robes multiplies, de grans atours et riches joyaux (…) Encores ceste femme malcontente a un apetit desordené (…) c’est assavoir de riens faire (…) de bien boire et de bien mengier les grandes viandes chieres et delicieuses (…) telle malcontente femme a un appetit canin, c’est appetit de chien qui jamai ne puet ester saoulé », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 232. 73. C. F. CLAMOTE-CARRETO, « Anatomie de la différence. Le corps déréglé et les outrances de l’écriture épique (XIIe-XIIIe siècles) », Micrologus, 20 (2012), p. 207-208. 74. C. F. CLAMOTE-CARRETO, « Anatomie de la différence… », ibid., p. 208. 75. S. VECCHIO, « La faute de trop manger : la gourmandise médiévale entre éthique et diététique », in J. CSERGO (dir.), Trop gros ? L’obésité et ses représentations, Paris, 2009, p. 33. 76. T. D’AQUIN, La somme théologique de Thomas d’Aquin, éd. A. DRIOUX, t. 10, Paris, 1856, p. 179. Il reprenait alors les propos de Grégoire le Grand. Voir V. LANGUM, Medecine and the Seven Deadly Sins…, op. cit., p. 13 et 83-84. 77. « Les estas veulent avoir grans de draps de robe (…) Elles desirent les citez, festes, marchiez et le theatre (…) D’oiseuse femme l’apresure est engendrement de luxure », dans E. DESCHAMPS, Le Miroir de Mariage, éd. G. RAYNAUD, Paris, 1894, p. 180-181. 78. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 157. 79. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 82. 80. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 83. 81. S. VECCHIO, « La faute de trop manger… », op. cit., p. 41. 82. S. VECCHIO, « La faute de trop manger… », ibid., p. 42-43. L’envie aussi était considérée comme opposée à la charité. Voir V. LANGUM, Medecine and the Seven Deadly Sins…, op. cit., p. 110. Il s’agit d’un ouvrage auquel Mézières put avoir accès, puisqu’un inventaire de la bibliothèque de Charles V, réalisé en 1373, révèle que le roi en avait dix copies. Mézières le recommande par ailleurs dans l’Epistre lamentable et consolatoire qu’il a composé en 1397. Voir N.-L. PERRET, Les traductions françaises du Regimine principum de Gilles de Rome : parcours matériel, culturel et intellectuel d’un discours sur l’éducation, Leyde, 2011, p. 133 ; P. DE MÉZIÈRES, « Epistre Lamentable… », op. cit., p. 463. 83. M.-C. POUCHELLE, « Une parole médicale prise dans l’imaginaire : alimentation et digestion chez un maître chirurgien du XIVe siècle », in J.-C. MARGOLIN et R. SAUZET (dir.), Colloque de Tours de mars 1979 organisé par le Centre d’études supérieures de la Renaissance, Paris, 1981, p. 183. 84. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 272-273.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 40

85. C. F. CLAMOTE-CARRETO, « La parole dérobée… », op. cit., p 115. 86. C. F. CLAMOTE-CARRETO, « La parole dérobée… », ibid., p 122. 87. M. KLEMM, « Medicine and Moral Virtue in the Expositio Problematum Aristotelis of Peter of Abano », Early Science and Medicine, 11 (2006), p. 329. 88. N. PALMIERI, « Tempéraments du corps et caractères de l’âme dans le commentaire à l’Ars Medica d’Agnellus de Ravenne », in N. PALMIERI (dir.), L’Ars Medica (Tegni) de Galien : lectures antiques et médiévales, Saint-Étienne, 2008, p. 32. 89. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body Connection in Medieval and Early Modern Medecine », in E. CARRERA (dir.), Emotions and Health, 1200-1700, Leyde, 2013, p. 116. Ce thème inquiétera les théologiens qui craignaient que le lien étroit entre l’âme et le corps mène à une croyance en la matérialité de l’âme. Voir A. ROBERT, « Médecine et théologie à la cour des Angevins de Naples », in A. ROBERT et J. CHANDELIER, (dir.), Frontières des savoirs en Italie à l’époque des premières universités (XIIIe- XVe siècles), Rome, 2015, p. 329. Plus généralement, GALIEN, L’âme et ses passions, éd. V. BARRAS, T. BIRCHLER et A.-F. MORAND, Paris, 1995 ; V. NUTTON et G. BOS, Galen. On Problematical Movements, Cambridge, 2011. 90. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body… », op. cit., p. 117. 91. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body… », ibid. 92. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 234. 93. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body… », ibid., p. 129. 94. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body… », ibid., p. 132. 95. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body… », ibid., p. 118. 96. E. CARRERA, « Anger and the Mind-Body… », ibid. 97. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 276. 98. J.-C. MÜHLETHALER, « De ira et avaritia ou les faiblesses des grands à l’épreuve de l’actualité : des miroirs des princes à l’engagement politique sous Charles VI », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 9 (2002), p. 6. 99. « La colère, en effet, semble bien prêter jusqu’à un certain point l’oreille à la raison, mais elle entend de travers (…) à la façon des chiens, qui avant même d’observer si c’est un ami, au moindre bruit qui se produit, se mettent à aboyer », dans ARISTOTE, Éthique à Nicomaque, éd. J. TRICOT, Paris, 1959, p. 344. 100. Un statut promulgué en 1255 à l’université de Paris consacre l’importance de l’œuvre d’Aristote en rendant obligatoire ses œuvres dans les curriculums en arts, mais aussi en droit, en médecine et en théologie. Voir L. BIANCHI et E. RANDI, Vérités dissonantes : Aristote à la fin du Moyen Âge, trad. C. POTTIER, Fribourg, 1993, p. 2. 101. C. R. SHERMAN, Imagining Aristotle : Verbal and Visual Representation in Fourteenth-Century France, Berkeley, 1995, p. 25. 102. P. DE MÉZIÈRES, Songe…, op. cit., p. 557. 103. V. LANGUM, Medecine and the Seven Deadly Sins…, op. cit., p. 122. 104. J.-C. MÜHLETHALER, « De ira et avaritia… », op. cit., p. 7. 105. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 234. 106. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 277. 107. H. VAN HOREN VERHOOSE, « Is She Angry or Just Sad ? Grief and Sorrow in the Songs of the Trobairitz », in J. RIDER et J. FRIEDMAN (dir.), The Inner Life of Women in Medieval Romance Literature : Grief, Guilt and Hypocrisy, New York, 2011, p. 142. 108. V. LANGUM, Medecine and the Seven Deadly Sins…, op. cit., p. 125. 109. V. LANGUM, Medecine and the Seven Deadly Sins…, ibid.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 41

110. M. LAMBERG, « Anger as a Spiritual, Social and Mental Disorder in Late Medieval Swedish Exempla », in S. KATAJALA-PELTOMAA et S. NIIRANEN (dir.), Mental (Dis) Order in Later Medieval Europe, Leyde, 2014, p. 89. 111. M. LAMBERG, « Anger as a Spiritual… », ibid., p. 80-83. 112. S. NIEBRZYDOWSKI, « Secular Women and Late-Medieval Marian Drama », The Yearbook of English Studies, 43 (2013), p. 133. 113. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 217. 114. S. NIEBRZYDOWSKI, « Secular Women… », op. cit., p. 133. 115. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », op. cit., p. 91. 116. Référant à un passage célèbre de l’Évangile selon Luc, Mézières considère que « l’estat des mariés représente la vie temporele qui est prise pour Marthe, l’empechie et travaillie » alors que « l’estat de continence et de virginité plus parfait représente la vie spirituele qui est prise pour Marie », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 217. 117. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 308-309. 118. M. KLEMM, « Les complexions vertueuses… », op. cit., p. 71-72. 119. J.-P. POLY, « L’amour et la cité de Dieu. Utopie et rapport des sexes au Moyen Âge », Clio. Histoire, femmes et sociétés, 22 (2005), p. 1. 120. G. DE MACHAUT, Le livre du Voir-Dit, éd. La Société des bibliophiles françois, Paris, 1875, p. 4-5. 121. V. GONTERO, « Un syncrétisme pagano-chrétien : la glose du Pectoral d’Aaron dans le lapidaire chrétien », Revue de l’histoire des religions, 4 (2006), p. 420. 122. P. DE MÉZIÈRES, Epistre au roi Richart, éd. G. W. COOPLAND, Liverpool, 1975, p. 90. Remarquablement, dans ce livre, le roi d’Angleterre est comparé au diamant et le roi de France, Charles VI, au rubis. 123. J. BLANCHARD, « Les hiérarchies de l’honneur. Avatars d’une grille conceptuelle à la fin du Moyen Âge : Mézières et le Pseudo-Denys », Revue historique, 648 (2008), p. 789-814. 124. P. CALIXTO-FERREIRA FILHO, « Symbolisme et métonymies du sensible au divin chez Denys l’Aréopagite », Revue des sciences philosophiques et théologiques, 95 (2011), p. 283. 125. P. KUNSTMANN, « Vertus et propriétés de la Vierge dans le Bestiaire, le Lapidaire et le Plantaire du Rosarius (BnF, fr. 12483, ms. du XIVe siècle) », Le moyen français, 55-56 (2004), p. 216. 126. « La royne, espouse du biau Rubin (…) est ma dame singuliere, ma maistresse, m’avocace, m’esperance, ma joie, mon confort et ma doulce conseillere », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 159. 127. P. DE MÉZIÈRES, Philippe de Mézières’ Campaign for the Feast of Mary’s Presentation, éd. W. E. COLEMAN, Toronto, 1981. 128. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 68. 129. I. DRAELANTS, « Encyclopédistes et lapidaires médiévaux : la durable autorité d’Isidore de Séville et de ses Étymologies », Cahiers de recherches médiévales et humanistes, 16 (2008), p. 88. 130. S. NIEBRZYDOWSKI, « Secular Women… », op. cit., p. 133. 131. A. LOBA, « Le projet du bonheur conjugal… », op. cit., p. 39. 132. Y. MAZOUR-MATUSEVICH, « La position de Jean Gerson… », op. cit., p. 346-349. 133. M. C. FLANNERY, « A Bloody Shame : Chaucer’s Honorable Women », The Review of English Studies, 62 (2011), p. 342. 134. « La premiere vertu du vray diamant est qu’il vault asséz et a poissance contre venin », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 68. 135. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 177. 136. A. LOBA, « Exemple au service de la spiritualité… », op. cit., p. 90. 137. « La seconde si est qu’il vaut contre temps orrible », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 68.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 42

138. « La plus grant tempeste si est la division des vrays catholiques en l’Esglise de Dieu (…) Or prions donques a nostre Dyamant, a nostre mere de gloire, que par sa grant misericorde elle veuille (…) apaisier ceste tempeste », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 178-179. 139. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 68. 140. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 167. 141. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 68. 142. A. LOBA, « Le projet du bonheur conjugal… », op. cit., p. 34. 143. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 121. 144. « Quand un riche homme prent par mariage une tres povre femme ou une riche femme prent un povre homme, le riche comme dessus vaudra touzjours avoir la seignourie, et le povre n’osera dire mot, et sa povreté sera maintefois recitee », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 251. 145. « Quand l’un est de grant lignie et l’autre si est de basse, de commun cours celui ou celle qui sera plus noble voudra avoir la seignourie et le hault parler, et ne vaudra pas tant souffrir de sa compaigne comme il deveroit », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid. 146. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 135. 147. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 171. 148. D. FRAIOLI, « Nine Worthy Women », in M. SCHAUS (dir.), Women and Gender in Medieval Europe : An Encyclopedia, Londres, 2006, p. 608. 149. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 171. 150. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 180. 151. « Onques femmes en ce monde ne sot si bien escripre. Je eus une fois une Bible toute entiere et de tres belle menue lettre que une femme avoit ecripte (…) et maintes femmes se treuvent qui cevent bien escripre ; mais c’est sans comparaison faire », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 173. 152. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 303. 153. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 170. 154. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid. 155. N. OFFENSTADT, « Les femmes et la paix à la fin du Moyen Âge : genre, discours, rites », Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public, 31 (2000), p. 329. 156. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 315. 157. P. CONTAMINE, « Entre Occident et Orient. Philippe de Mézières (vers 1327-1405) : itinéraires maritimes et spirituels », in R. BLUMENFELD-KOSINSKI et K. PETKOV (dir.), Philippe de Mézières and his Age…, op. cit., p. 19. 158. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 352. 159. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 351. 160. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 325. 161. « La Letre dit de l’aimant qu’il est contre venin puissant », dans G. LE CLERC, Le Bestiaire Divin, éd. C. HIPPEAU, Caen, 1852, p. 297. 162. I. DRAELANTS, « Encyclopédistes et lapidaires médiévaux… », op. cit., p. 88. 163. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 324. Le vin sert peut-être à souligner le caractère eucharistique du mariage, car les lapidaires octroient généralement ce pouvoir à l’aimant lorsqu’il est mélangé avec du lait. Voir I. DRAELANTS, « Encyclopédistes et lapidaires médiévaux… », ibid., p. 89. 164. « Les sages orfevres ont accoustumé de mettre une feuille d’acier bien polie entre l’or et le dyamant, laquelle feuille donne coulour au fin dyamant telle qu’i li appartient. (…) Par la feuille d’acier polie (…) je n’entens autre chose que la divinité de nostre doulz Rubin, enluminant le Dyamant et donnant lui sa clarté », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, op. cit., p. 176.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 43

165. « La pierre d’aymant prise pour l’umanité de la Vierge Marie conjointe au dyamant, qui a esté pris pour sa poissance et gloire, monstre clerement que sa vertu d’attraire le fer a lui ne vient pas de son humanité mais de la gloire et vertu qu’elle a reçu du Ciel », dans P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 324. 166. P. DE MÉZIÈRES, Le Livre de la vertu…, ibid., p. 320. 167. J. BATANY, « Peut-on rire de la description médicale d’un syndrome ? Les Quinze joies de mariage », in A. P. TUDOR et A. HINDLEY (dir.), Grant risee ? : The Medieval Comic Presence/La présence comique médiévale. Essays in Memory of Brian J. Levy, Turnhout, 2006, p. 50. 168. P. DE MÉZIÈRES, « Epistre Lamentable… », op. cit., p. 507. 169. P. DE MÉZIÈRES, « Epistre Lamentable… », ibid. 170. L. OTIS-COUR, « Mariage d’amour, charité et société dans les “romans de couple” médiévaux », Le Moyen Âge, 111 (2005), p. 291. 171. P. DE MÉZIÈRES, De la Chevallerie de la Passion de Jesus Christ, éd. M. J. ANDERSON BROWN, Lincoln, Thèse de doctorat (Langue et littérature), University of Nebraska, 1971, p. 176-177. 172. P. CONTAMINE, « La place des femmes dans les deux premières règles (1367-1368 et 1384) de l’ordre de la chevalerie de la Passion de Jésus-Christ de Philippe de Mézières », in P. HENRIET et A.- M. LEGRAS (dir.), Au cloître et dans le monde : femmes, hommes et sociétés, IXe-XVe siècle. Mélanges en l’honneur de Paulette L’Hermite-Leclercq, Paris, 2007, p. 79-88.

RÉSUMÉS

Cet article a pour objet d’étude la représentation de l’idéal féminin présenté, par le biais d’un symbolisme médical et lapidaire, dans le Livre de la vertu du sacrement de mariage rédigé par Philippe de Mézières entre 1385 et 1389. La première partie consiste en l’analyse des liens entre la médecine, les péchés et la passion amoureuse dans la culture chrétienne européenne du XIVe siècle. Appuyée sur cette contextualisation, la suite de l’article porte plus directement sur l’œuvre de Mézières. Dans la deuxième section sont analysés les comportements que les épouses doivent éviter afin de maintenir leur santé. Cette section est suivie par une analyse de l’idéal féminin et du rôle qui lui est associé dans l’obtention sotériologique de la vie éternelle.

The purpose of this article is to study the representation of the feminine ideal presented, through a medical and lapidary symbolism, in the Livre de la vertu du sacrement de mariage written by Philippe de Mézières between 1385 and 1389. The first part consists of an analysis of the links between medicine, sins and love passion in the European Christian culture of the fourteenth century. Based on this contextualization, the rest of the article deals more directly with the work of Mézières. In the second section are analyzed the behaviors that brides must avoid in order to maintain their health. This section is followed by an analysis of the feminine ideal and its associated role in the soteriological attainment of eternal life.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 44

INDEX

Mots-clés : diamant, femmes, France, genre, lapidaires, littérature didactique, mariage, médecine, péchés, Philippe de Mézières, religion, représentations, spiritualité, symbolisme, Vierge Marie, XIVe siècle Keywords : Diamond, Didactic Literature, France, Gender, Lapidaries, Marriage, Medicine, Philippe de Mézières, Religion, Representations, Sins, Spirituality, Symbolism, Virgin Mary, Women, XIVth Century

AUTEUR

MARC-ANDRÉ MOREAU Université de Sherbrooke (Canada)

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 45

Recherche active

Jessika Nowak et Jens Schneider (dir.) La Bourgogne au premier Moyen Âge (VIe‑Xe s.) : approches spatiales et institutionnelles – 1re livraison

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 46

Introduction

Jessika Nowak et Jens Schneider

NOTE DE L’ÉDITEUR

Cette introduction fait référence aux cartes 2 et 6 du dossier cartographique. Ces cartes sont réinsérées dans le corps du texte et les liens vers le dossier cartographique sont donnés en documents annexes. La carte 2 a été modifiée le 25 juillet 2018.

1 Évoquer la « Bourgogne », c’est mettre l’eau à la bouche des gourmets et des gourmands qui commencent à rêver du Kir, du Nuits-Saint-Georges, du Vosne- Romanée, du coq au vin, de la moutarde dijonnaise et des repas si délicieux préparés à la bourguignonne1. Pour l’historien de l’art, c’est songer à Cluny, Tournus, Paray-le- Monial ou Autun, s’extasier au vu des œuvres de Rogier van der Weyden, de Jan van Eyck ou de Claus Sluter2. Et qu’en est-il de ceux qui s’intéressent à l’histoire médiévale ? Ils seront le plus souvent emportés par les mythes ou par la magnificence. Soit ils penseront au célèbre poème héroïque allemand, la Chanson des Nibelungen (vers 1200), et verront ressusciter devant leurs yeux l’assassin Hagen ou Kriemhild désireuse à venger le meurtre insidieux dont son mari Siegfried était la proie ; soit ils se mettront à songer aux Grands Ducs de Bourgogne, de Philippe le Hardi à Charles le Téméraire, dont la splendeur était si éclatante et éblouissante que leurs cours connurent un grand rayonnement3. Les somptueuses fêtes et les fastueux banquets célébrés à la cour bourguignonne – ne mentionnons que le fameux banquet du faisan célébré en 14544 avec ses entremets inoubliables – qui ne rêverait pas d’y avoir participé ? Qui n’est pas fasciné par l’ordre de la Toison d’or ? En revanche, rares sont ceux, qui, à l’évocation du mot Bourgogne, songeront d’emblée aux royaumes du premier millénaire. Ceux-ci furent pourtant nombreux. L’ensemble des régions associées au nom des Burgondes ou de Bourgogne, royaume, duché, comté est vaste5. Dans ce dossier, qui sera publié en deux livraisons du Bucema, dans ce numéro 21.2 et dans le prochain 22.1, nous nous limiterons à n’en considérer que quelques-unes.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 47

2 Retraçons d’abord, brièvement et de manière assez simplifiée, l’histoire des Bourgognes au premier Moyen Âge6. Au début du Ve siècle, les Burgondes7, que Pline l’Ancien avait déjà mentionné au Ier siècle dans son Historia naturalis en tant que Burgo(n)diones ou Burgu(n)diones8, arrivent dans la vallée moyenne du Rhin et s’installent probablement autour de Worms, où un palais des rois burgondes est attesté dans ladite Chanson des Nibelungen9. L’expansion du territoire occupé par les Burgondes se fait en plusieurs étapes. À la suite des sanglantes défaites des Burgondes, causées par Aetius et par les Huns en 435/437 et qui entraînent la fin du premier royaume (rhénan), les Burgondes survivants s’avancent dans la direction sud-ouest. On les localise, à partir du traité négocié avec l’empire en 443, comme foederati dans la fameuse Sapaudia autour du lac Léman10. Ils y établissent le second royaume qu’ils parviennent à étendre jusqu’à la vallée de la Rhône. Ce royaume (rhodanien) persiste jusqu’au début des années 530 quand les Burgondes n’arrivent plus à résister à l’expansion franque et quand leur royaume est englobé par les fils de Clovis Ier dans le royaume des Francs. Le nom Burgundia subsiste pourtant après l’annexion. Bientôt, il désigne, outre la Neustrie et l’Austrasie, l’un des tria regna qui forme le royaume mérovingien 11. Au cours des divisions du regnum mérovingien, survenues entre le VIe et le VIIIe siècle, le territoire de la Burgundia est modifié 12, le nom pourtant demeure. Il désigne désormais surtout le bassin de la Saône et du Rhône et, progressivement, pareillement la Provence13. Quand les Carolingiens prennent la place des Mérovingiens14, ils conservent initialement l’intégrité de la Burgundia lors des partages du royaume15. Charlemagne rompt pourtant avec cette coutume. Dans sa divisio regnorum, il redécoupe la Burgundia en plusieurs espaces16. Cette tradition subsiste. Quand le traité de Verdun est conclu en 843, la Saône sert grosso modo de ligne de démarcation. La Burgundia est alors partagée entre Lothaire Ier et son frère Charles le Chauve 17. De la partie dévolue au dernier va se former le duché de Bourgogne18. Lorsque Lothaire Ier décède en 855, son royaume est divisé entre ses trois fils. Pendant que l’aîné Louis reçoit l’Italie, Lothaire II obtient l’espace septentrional qui est désigné plus tard comme Lotharingia et Charles, qui iunior natu erat19, recueille la Provincia20, respectivement Provintiae regnum21 et partem Burgundiae22. En 856, les frères aînés faillissent quand ils tentent de se procurer le royaume du frère cadet (Karolus puer)23. Les grands de son règne arrivent à le soustraire aux mains de Lothaire II, qui avait l’intention de l’emprisonner dans un cloître24. Évidemment, ils préfèrent avoir un roi jeune et malade, souffrant d’épilepsie25, pour ainsi agrandir leurs propres marges de manœuvre. Quand Charles meurt en 863, son royaume est divisé entre ses frères26. Progressivement, tirant profit des décès de ses neveux Lothaire II (869) et Louis (875), Charles le Chauve s’en empare. Boson, issu de l’aristocratie lotharingienne, s’il en est, et beau-frère de Charles le Chauve, acquiert sous son règne une position prépondérante qu’il garde durant le court règne de Louis le Bègue. À la mort de Louis, en 879, Boson se fait couronner roi (rex Provinciae) à Mantaille27. À cette époque, il est le premier non Carolingien à se proclamer roi dans l’ancien territoire burgonde, mais il ne reste pas le seul. À peine une décennie plus tard, en 888, Rodolphe, comte et marchio28, fonde le regnum Jurense ou la Burgundia Transjurensis29. Ces deux regna, la Haute-Bourgogne et la Basse-Bourgogne, sont fusionnés définitivement vers 942, sous le règne du petit-fils de Rodolphe Ier, Conrad « le Pacifique ». Après la mort de Rodolphe III, fils de Conrad, en 1032, ce royaume est intégré dans l’empire germanique, une incorporation qui ne se passe pas sans contestation ni résistance30.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 48

3 Si l’on ajoute la formation du duché et de la Franche-Comté31, il est sans doute légitime de constater que l’éventail des régions associées au nom des Burgondes ou de Bourgogne au premier Moyen Âge est bien large. Ce n’est pas sans raison que James Bryce écrivait déjà en 1862 : « It would be hard to mention any geographical name which, by its application at different times to different districts, has caused, and continues to cause, more confusion than this name Burgundy […]32. » Un tel discours est récurrent. Ainsi, Constance Brittain Bouchard avait-elle remarqué en 1999 : « The region known as Burgundy has had some of the most elastic borders of any region of France, and some of the various regions called “Burgundy” at different times barely overlap at all33. » Comme cela a été également démontré pour l’exemple lotharingien34, il s’avère donc parfois difficile de s’entendre sur ce que comporte, à un moment donné, la désignation de Burgundia. La « Bourgogne », que nous allons aborder dans ce dossier, est également multiple. Parmi les nombreuses régions et royaumes énumérés ci-dessus, nous n’avons pas opté pour l’un ou l’une d’entre elles, mais décidé plutôt de nous focaliser sur l’espace situé entre Alsace et Provence – à l’exclusion de cette dernière, dont les évolutions lui sont propres –, ce qui nous permet d’en suivre le renouvellement durant le premier Moyen Âge. Le créneau chronologique des études et essais réunis dans ce dossier s’ouvre donc avec l’époque mérovingienne, en prenant en compte l’héritage romain ; il se termine avec la période rodolphienne, qui se clôt par l’intégration du royaume de Bourgogne à la Germanie. La Bourgogne que nous allons scruter est donc chronologiquement mérovingienne, carolingienne et rodolphienne et, géographiquement, nord-alpine, jurassienne et lotharingienne : elle est jurassienne au sens géographique et terminologique, puisque les dénominations médiévales – les sources historiographiques ainsi que les chartes – jouent sur le mot Jura35 ; elle est lotharingienne dans l’idée du royaume de Lothaire II allant, initialement, du long du Rhône jusqu’à la Méditerranée et, au vu de la revendication d’un héritage lotharingien, évoqué à plusieurs reprises36 ; et elle est, enfin, rodolphienne, car c’est le pouvoir de quatre générations de rois rodolphiens qui en a donné le cadre institutionnel, pendant plus d’un siècle (888-1032).

4 Il y a encore dans ces regna, que l’on dirait peu étudiés en les confrontant avec la Bourgogne des Grands Ducs Valois, tant de facettes intéressantes à découvrir. Ces formations fascinantes du premier Moyen Âge sont pourtant encore assez inexplorées, au regard de la Bourgogne du bas Moyen Âge. Pourquoi sont-elles si peu présentes dans la mémoire collective ? À part des sources tardives abondamment exploitées pour le duché de Bourgogne et qui captivent les lecteurs – n’évoquons qu’Enguerrand de Monstrelet, Jean le Fèvre de Saint-Remy, Jean de Wavrin, Mathieu d’Escouchy, Jacques du Clercq, Georges Castellain, Jean Molinet et Olivier de la Marche37 – et qui furent utilisées par des courants nationalistes des XIXe et XXe siècles et dans la constitution des récits nationaux38. En Allemagne, la Chanson des Nibelungen atteint, au début du XIXe siècle, le rang d’une épopée nationale, on y découvre les ancêtres des Allemands39. L’adaptation musicale de « L’anneau du Nibelung », par Richard Wagner, fait le reste pour élever ce royaume mythique, situé sur le Rhin, au rang d’un lieu de mémoire allemand40. En Belgique et au Pays-Bas, par contre, on a recours au duché de Bourgogne du XVe siècle pour mettre en relief ses propres racines. En Belgique, royaume fondé seulement en 1830 et pays bilangue, où la base linguistique ne sert donc pas à créer l’identité, on se met à chercher des origines communes. On les trouve au temps de Philippe le Bon et de Charles le Téméraire, qui étaient considérés comme les premiers à être parvenus à fusionner ces territoires de traditions gallo-romanes et de traditions

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 49

flamandes41. Avec la publication de son histoire de Belgique, Henri Pirenne apporte, vers 1900 une contribution énorme à cette lecture qui souligne le rôle de Philippe le Bon en tant que « père » de la Belgique ou bien en tant que conditor Beligii42. Aux Pays- Bas, en revanche, c’est l’œuvre de Johan Huizinga qui rend les ducs Valois de Bourgogne immortels et leur dresse un monument en tant qu’« accoucheurs de la nation néerlandaise »43. La Bourgogne des Grands Ducs devient le berceau de deux nations. Et qu’en est-il du royaume de Bourgogne des rois rodolphiens pour ne choisir qu’une des formations invoquées ci-dessus44 ? Il a moins de résonance, malgré les grandes monographies qui lui sont consacrées autour de 1900 grâce aux études infatigables de René Poupardin45. Aucune nation moderne ne réclame l’héritage du royaume rodolphien pour appuyer son identité. Le territoire de ce royaume est, en effet, dispersé entre la Suisse et la France, ce qui le rend beaucoup moins attractif et intéressant pour les nations en développement. En outre, s’identifier avec un royaume qui a été englobé dans l’empire et dont le dernier roi, Rodolphe III, a, de plus, la réputation d’être mou et efféminé (mollis et effeminatus)46 n’est pas envisageable en France, ni au XIXe ni au XXe siècle. La même position vaut pour la Confédération suisse, qui est et était tout autre qu’un pays royaliste. En Suisse, on tend alors à ne pas étudier le royaume en tant que tel, mais à analyser l’histoire d’une région ou d’une institution spécifique47. Le royaume des Burgondes (mythiques) et surtout le duché des Grands Ducs, ce royaume inachevé48, dont les ducs se géraient quasiment comme les rois49, éclipsent donc le royaume des Rodolphiens.

5 Le « Centre européen d’études burgondo-médianes », fondé en 1958 à Bâle50, aspire un temps à se servir des différentes Bourgognes comme d’un modèle pour une union européenne, en avançant l’idée de promouvoir une Bourgogne fédérale s’étendant de la mer du Nord à la Méditerranée, en tant que contrepoids face à la France et à l’Allemagne51. Lorsque cette vision d’une « Europe médiane » se propage, la Bourgogne des Grands Ducs Valois l’emporte pourtant sur le royaume des rois rodolphiens. Du « Centre européen d’études burgondo-médianes » résulte le « Centre européen d’études bourguignonnes », dont le siège est transféré à Neuchâtel et dont l’attention va dorénavant être dirigée sur la période du XIVe au XVIe siècle52. La/les Bourgogne(s) du premier millénaire a/ont de nouveau le dessous.

6 C’est ici que nous intervenons. Certes, nous ne sommes pas les premiers à nous intéresser à la Bourgogne rodolphienne et aux royaumes du premier millénaire. L’édition des chartes rodolphiennes, qui présente en elle-même une historia calamitatum et qui fut entreprise par Theodor Schieffer avec l’aide d’Hans Eberhard Mayer53, engendra beaucoup de recherches, non seulement en Allemagne – par exemple Hans Eberhard Mayer54 ou Laetitia Boehm 55 –, mais aussi en Italie. Pensons surtout à Giuseppe Sergi56 et son élève Guido Castelnuovo57, qui, à son tour, a impulsé et stimulé les recherches en France. À Clermont-Ferrand, à Nice, à Chambéry et à Lyon on commença à prêter attention à ce(s) royaume(s). Évoquons seulement les thèses inédites de Pierre Ganivet58 et de Laurent Grimaldi59 sur l’évolution des pouvoirs dans le pays lyonnais et sur le Viennois, ainsi que la thèse de Laurent Ripart sur les fondements idéologiques du pouvoir des premiers comtes de Savoie60 et les monographies de François Demotz61, de Nicolas Carrier62, ainsi que de Nathanaël Nimmegeers63. L’intérêt, lentement réveillé au cours des dernières décennies, se reflète également dans les actes de colloques traitant le(s) royaume(s) de Bourgogne, dont le nombre augmente à partir de l’an 2000. Ne rappelons que trois volumes clés : « Des Burgondes au royaume de

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 50

Bourgogne (Ve-Xe siècle). Espace politique et civilisation », édité par Pierrette Paravy en 200264 ; « Le royaume de Bourgogne autour de l’an Mil », volume dirigé par Christian Guilleré, Jean-Michel Poisson, Laurent Ripart ainsi que par Cyrille Ducourthial, paru en 200865 ; et, enfin, dans une autre perspective, « De la mer du Nord à la Méditerranée. Francia Media, une région au cœur de l’Europe », volume édité par Michèle Gaillard en 201166. Les actes d’une conférence organisée par Anne Wagner et par Nicole Brocard en 2014 et nommée « Les royaumes de Bourgogne jusqu’en 1032. L’image du royaume de Bourgogne à travers sa culture et sa religion », actes qui sont actuellement sous presse, s’y adjoignent67. En outre, quelques volumes gravitant autour des établissements importants situés dans le royaume de Bourgogne ou en contact avec celui-ci, tels que l’abbaye de Saint-Maurice68 ou Cluny 69, ou bien des œuvres mettant l’accent sur une ville ou un (archi-)diocèse clé70 pourraient y être ajoutés. On voit que le(s) royaumes de Bourgogne(s) recommence(nt) peu à peu à sortir des ténèbres.

7 Nonobstant, malgré toute l’attention qui s’est récemment focalisée sur les royaumes de Bourgogne, il y reste encore tant de facettes assez inconnues à discerner, des facettes qui méritent d’être mieux éclairées. Les auteurs des sept contributions de ce dossier, dont quatre paraîtront dans la prochaine livraison, essaient donc, chacun à leur manière, notamment méthodologique, de revoir les Bourgognes du premier Moyen Âge en prêtant une attention particulière à une éventuelle inscription spatiale des entités analysées. Cela peut s’articuler autour des informations toponymiques, choronymiques, institutionnelles, diplomatiques ou numismatiques.

8 Nous croisons par conséquent différentes méthodes et disciplines, avec, notamment, quelques sciences auxiliaires. Ainsi, les auteurs observent différentes inscriptions spatiales, symboliques et terminologiques, qui se traduisent parfois par la revendication nostalgique d’un héritage romain, burgonde, franc et carolingien. Le point de départ du dossier présenté ici est donc de tenter une approche multiple et équilibrée d’un « espace » qui est difficile à cerner. Le dossier s’ouvre avec une étude sur l’espace linguistique, voire l’inscription spatiale terminologique par Wolfgang Haubrichs. C’est grâce à ses travaux que nous sommes aussi bien renseignés que possible sur la langue burgonde, dont peu d’éléments sont conservés71. Dans cette étude intitulée « Les Chamaves et les autres : une enquête linguistique sur les traces des Chamaves, Hattuaires, Varasques, Scotinges et Burgondes au nord de la Bourgogne », qui reprend des travaux antérieurs de l’auteur, mis à jour pour l’occasion, l’héritage toponymique des gentes barbares, à l’exemple de quelques pagi, est discuté. Elle démontre la faible présence de noms de lieu d’origine burgonde (germanique orientale) par rapport à ceux de provenance gallo-romaine ou franque (germanique occidentale) dans le pagus Hamavorum (voir cartes 2 et 6).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 51

Carte 2 – Les pagi du diocèse de Besançon et de sa marge occidentale (VIIe-XIe s.)

Carte 6 – Archidiaconés et doyennés du diocèse de Besançon (XIIe s.)

9 Les actes performatifs et le langage symbolique ayant eu une telle portée sur les royaumes médiévaux, on aimerait également s’intéresser sur ce que nous révèlent les

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 52

sciences auxiliaires quant à l’inscription symbolique. Aussi, s’est-on intéressé aux monnaies et aux sceaux. Jürgen Strothmann prolonge ces réflexions sur la numismatique et la transition de l’Antiquité au premier Moyen Âge72 avec un essai sur la continuité romaine en Bourgogne mérovingienne, en dépit du fait que la Bourgogne n’a jamais été une province romaine. En fait, c’est justement cette position de « couloir » ou de « carrefour » qui caractérise la « Bourgogne ». Son étude intitulée « Burgund und das “unsichtbare Römische Reich” im Spiegel der sogenannten merowingischen Monetarmünzen. Eine Anmerkung » fournit une première analyse monétaire, mettant en relation facteurs économiques et consistance territoriale, en lien avec le faible nombre d’ateliers de frappe monétaire. Jessika Nowak, dont les recherches actuelles portent sur le royaume des rois rodolphiens73, propose dans son article intitulé « The Burgundian “visage”. Seals between tradition and innovation » une étude du langage symbolique employé par les quatre rois rodolphiens ; procédant à une analyse des sceaux conservés, elle arrive à mettre en évidence différents positionnements d’autonomie ou de dépendance par rapport aux royaumes voisins. Cet article sera prolongé dans la seconde livraison par une contribution d’Andrea Hauff, qui prépare actuellement le volume des Regesta Imperii portant sur le royaume des Rodolphiens74. Dans son article intitulé « Carolingian Traditions and New Beginnings in the Kingdom of Upper Burgundy from a Religious Perspective. The Coronation of Rudolph I of Upper Burgundy », elle discute de la tension dialectique entre la réclamation des traditions carolingiennes et le renouveau bourguignon affiché par Rodolphe Ier. À travers une analyse des conditions de son couronnement en 888, elle revoit la question de l’accès à la royauté à la fin du IXe siècle, en comparant l’exemple de Rodolphe Ier à d’autres rois et reguli (Annales de Fulda) contemporains. Les études de Jessika Nowak et d’Andrea Hauff réunies dans ce dossier remontent à une série de sessions proposées à l’International Medieval Congress en 2015 sous le titre « Reform and Renewal in Burgundy »75. Parmi les neuf exposés présentés à Leeds76, se trouvaient également ceux de Jens Schneider et de Karl Weber relatifs aux problématiques gravitant autour de l’inscription spatiale, qui seront publiés dans le prochain numéro du Bucema, ce qui vaut également pour la contribution de François Demotz. Les contributions de la seconde livraison seront donc surtout centrées sur une approche spatiale, expérimentée sous un nouvel angle depuis une vingtaine d’années environ. Ce que l’on a appelé le spatial turn, a déjà été appliqué aux régions avoisinantes les Bourgognes, notamment la Lotharingie77, l’Alsace, qui est au centre des travaux de Karl Weber78, et la région du Rhin supérieur, qui a été l’objet d’un colloque fribourgeois, dont les actes viennent d’être publiés79.

10 Qu’en est-il des Bourgognes du premier millénaire ? Dans le prochain numéro du Bucema, il sera question des implications spatiales et institutionnelles des catégories pagus et ducatus, qui seront au centre du premier article intitulé « Alsace and Burgundy : Spatial Patterns in the Early Middle Ages, c. 600-900 ». Karl Weber y constate un « lien administratif » en discutant la genèse des deux espaces, alsacien et rodolphien, dès les provinces romaines jusqu’à leur relative consolidation au cours de la seconde moitié du IXe siècle. Dans une démarche de projection spatiale de ce que l’on sait sur les institutions monastiques au diocèse de Besançon depuis les premières fondations, Jens Schneider essaie, à son tour, de préciser nos connaissances sur les traités de partage carolingiens, notamment ceux de Verdun (843) et de Meersen (870). Son article « Monasteries around Besançon : a spatial reading of the Meersen treaty (5th-9th C.) » propose une nouvelle identification de Polemniacum, mentionné dans le

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 53

traité de Meersen, ayant pour conséquence une reconstruction modifiée du partage conclu entre Charles le Chauve et Louis le Germanique au niveau du diocèse de Besançon (voir cartes 8 et 9). Notre dossier se clôturera par l’étude de François Demotz, spécialiste de la Bourgogne rodolphienne80, sur l’espace social, les réseaux de parenté et les stratégies de seigneurialisation aux Xe-XIe siècles : « Les Mont, première famille seigneuriale en Transjurane ? Les ambiguïtés d’une évolution en zone royale ». En prolongeant vers le XIe siècle, cet article décrit les évolutions de l’ancrage territorial de la famille des Mont autour du lac Léman en comparaison avec d’autres régions voisines et en rivalité avec la prédominance de la famille royale rodolphienne.

11 À côté de ces sept articles discutant différents aspects des espaces bourguignons au premier Moyen Âge, ce dossier thématique comporte également une contribution cartographique, réalisée par Anthony Dumontet (UMR ArTeHis). Il s’agit là d’un ensemble de quatorze cartes communes aux deux livraisons (à l’exception de la 14e qui sera ajoutée à la 2de livraison), qui font partie de la documentation sur laquelle se sont appuyés les auteurs ou qui sont issues de leur travail. Une première série de cartes, utilisées ou fournies par les auteurs, a pu être adaptée et recomposée pour notre dossier (cartes 1, 3, 4, 5, 9, 11 et 12). Une seconde série a été retravaillée et mise à jour en fonction des sujets étudiés (cartes 6, 7, 8 et 10). Quelques-unes, enfin, sont inédites (cartes 2, 13 et 14). Nous remercions notre collègue Thomas Bauer (université de Münster), qui nous a fourni les données pour la réalisation de la carte des pagi de l’espace comtois (carte 2), pour sa collaboration à ce dossier. Plus qu’une simple illustration, ce dossier cartographique constitue une partie intégrale de l’ensemble des contributions rassemblées en ces deux livraisons du Bucema ; en témoignent les multiples renvois. Nos remerciements vont donc à Anthony Dumontet, qui a, en quelque sorte, complété l’ensemble textuel par un travail de cartographe, mettant en lumière les différents ancrages spatiaux d’une gens, d’un regnum ou d’une famille ; ceci particulièrement pour les trois cartes inédites (cartes 2, 13 et 14), qui sont ainsi mises à la disposition de la communauté scientifique.

12 Ce dossier thématique ne prétend nullement pouvoir couvrir l’intégralité du sujet ; parmi les voix qui manquent, citons notamment l’archéologie81 et l’approche juridique82. Le but sera atteint si les textes réunis arrivent à éveiller l’intérêt des lecteurs et à les stimuler à se pencher sur cet espace moins bien documenté et moins étudié que d’autres.

13 Avant de clore ces observations introductives, nous aimerions remercier les auteurs qui ont bien voulu partager l’aventure de cette approche à plusieurs voix. Une des contributions a pu être traduite en français grâce au soutien financier de l’EA 3350 ACP [http://acp.u-pem.fr/] (université Paris-Est Marne-la-Vallée). Nos vifs remerciements vont également au Bucema pour avoir accepté ces contributions plurilingues au sein de la revue, ainsi qu’à l’UMR 6298 ArTeHis à Dijon [http://artehis.u-bourgogne.fr/] pour le précieux soutien cartographique. En dernier lieu, nous tenons à exprimer toute notre reconnaissance à Noëlle Deflou-Leca, qui a accompagné, avec soin et patience, ce dossier composite de textes et de cartes historiques. Reçu : 1er octobre 2017 – Accepté : 15 décembre 2017

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 54

NOTES

1. H. MÜLLER et J. NOWAK, « Burgundische Tafelfreuden. Das Fasanenfest von Lille (1454). Ein Augenschmaus », in E. SEITZ, Cotta’s kulinarischer Almanach, 11, Stuttgart, 2003, p. 172-186. 2. Cf. par exemple B. FRANKE et B. WELZEL (dir.), Die Kunst der burgundischen Niederlande. Eine Einführung, Berlin, 1997. 3. W. PARAVICINI, T. HILTMANN et F. VILTART (dir.), La cour de Bourgogne et l’Europe : le rayonnement et les limites d’un modèle culturel, Ostfildern, 2013. 4. M.-T. CARON, Les vœux du Faisan, noblesse en fête, esprit de croisade. Le manuscrit français 11594 de la Bibliothèque nationale de France, Turnhout, 2003. 5. Ainsi, Norman Davies, par exemple, a récemment consacré, dans son étude sur les royaumes disparus et presque oubliés, tout un chapitre aux Bourgognes, intitulé « Burgundia : Five, Six or Seven Kingdoms », cf. N. DAVIES, Vanished Kingdoms. The History of Half-Forgotten Europe, Londres, 2011. La traduction allemande, publiée en 2013 sous le titre Verschwundene Reiche. Die Geschichte des Vergessenen Europa [Darmstadt, 2013], est même plus drastique. On y omet la tournure « à moitié » avant le mot « oublié ». Le chapitre « Burgund : Fünf, sechs oder sieben Königreiche (um 411-1795) » s’y trouve p. 101-171. 6. Pour une vue générale plus approfondie, cf. L. BOEHM, Geschichte Burgunds : Politik – Staatsbildungen – Kultur, Stuttgart et al., 1971 [Stuttgart et al., 1979 ; Wiesbaden, 1998] ; H. KAMP, Burgund. Geschichte und Kultur, Munich, 2007 [22011] ; N. DAVIES, Verschwundene Reiche…, op. cit., p. 101-171. 7. Pour plus d’information, cf. B. DUMÉZIL (dir.), Les Barbares, Paris, 2016, p. 350-352 ; M. MARTIN, « Les Gallo-Romains et l’établissement des Burgondes et des Alamans jusqu’à 534 », in M. MARTIN, R. MARTI et T. MEIER (dir.), Kleine Schriften, Heidelberg et al., 2016, t. 1 (Die Jahre 1962-1979), p. 377-380 ; I. N. WOOD, « L’installation des Burgondes dans l’Empire romain : histoire événementielle », in P. PORENA et Y. RIVIÈRE (dir.), Expropriations et confiscations dans les royaumes barbares. Une approche régionale, Rome, 2012, p. 69-90 ; V. GALLÉ (dir.), Die Burgunder : Ethnogenese und Assimilation eines Volkes, Worms, 2008 [entre autres la contribution de H. GAILLARD DE SÉMAINVILLE, « Zur Ansiedlung der Burgunden in den Grenzen ihres zweiten Königreiches », p. 237-284] ; K. ESCHER, Les Burgondes : Ier-VIe siècles apr. J.-C., Paris, 2006 ; EAD., Genèse et évolution du deuxième royaume burgonde (443-534). Les témoins archéologiques, 2 vol., Oxford, 2005 ; W. POHL, Die Völkerwanderung. Eroberung und Integration, Stuttgart et al., ²2005, surtout p. 154-164 ; R. KAISER, Die Burgunder, Stuttgart, 2004, surtout p. 15-34 ; J. FAVROD, Les Burgondes. Un royaume oublié au cœur de l’Europe, Lausanne, 42011 ; ID., Histoire politique du royaume burgonde (443-534), Lausanne, 1997 ; F. PASSARD, S. GIZARD, J.-P. URLACHER et A. RICHARD (dir.), Burgondes, Alamans, Francs, Romains dans l’Est de la France, le Sud-Ouest de l’Allemagne et la Suisse (Ve-VIIe siècles après J.-C.), Besançon, 2003 ; L. BOEHM, Geschichte Burgunds…, op. cit., chap. 3 : « Regnum Burgundiae. Die ostgermanischen Burgunder und ihre “Reichsgründungen” an Rhein (413-435/6) und Rhône (443-543) », p. 41-68 ; O. PERRIN, Les Burgondes. Leur histoire, des origines à la fin du premier royaume (534), Neuchâtel, 1968. 8. PLINE L’ANCIEN, Histoire naturelle, livre IV. 9. Ze Wormez bî dem Rîne : Das Nibelungenlied, éd. K. BARTSCH et al., Mannheim, 1988, strophe 6, traduit dans l’allemand moderne par H. BRACKERT, Francfort/Main, 1970. Cf., entre autres, P. WACKWITZ, Gab es ein Burgunderreich in Worms ? Beiträge zu den geschichtlichen Grundlagen der Nibelungensage, Worms, 1964. 10. Sapaudia Burgundionum reliquiis datur cum indigenis dividenda (« Chronica Gallica a. 452 »), éd. T. MOMMSEN, MGH Auct. ant, 9, Berlin, 1892, p. 660.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 55

11. K. F. WERNER, Naissance de la noblesse, Paris, 1998, p. 161. Cf. R. KAISER, Burgunder…, op. cit., p. 177-180 ; L. BOEHM, Geschichte Burgunds…, op. cit., chap. 3 : « Burgund im Frankenreich der Merowinger (534-687) », p. 70-85 ; H. KAMP, Burgund…, op. cit., p. 32. Pour la Bourgogne mérovingienne, voir, entre autres, S. ESDERS, Römische Rechtstradition und merowingisches Königtum. Zum Rechtscharakter politischer Herrschaft in Burgund im 6. und 7. Jahrhundert, Göttingen, 1997 ; B. LÉVÊQUE, « La Bourgogne à l’époque mérovingienne », Annales de Bourgogne, 55/2 (1983), p. 133-137. 12. Cf. E. EWIG, « Die fränkischen Teilungen und Teilreiche 511-613 », Akademie der Wissenschaften Mainz. Abhandlungen der Geistes- und Sozialwissenschaftlichen Klasse, 9 (1952), p. 651-715 [de nouveau dans E. EWIG et H. ATSMA (dir.), Spätantikes und fränkisches Gallien. Gesammelte Schriften, t. 1, Munich, 1976, p. 72-113] ; ID., « Die fränkischen Teilungen und Teilreiche im 7. Jh. », Trierer Zeitschrift für Geschichte und Kunst des Trierer Landes und seiner Nachbargebiete, 22 (1953), p. 85-144 [de nouveau dans E. EWIG et al. (dir.), Spätantikes und fränkisches Gallien…, ibid., p. 172-230]. 13. V. TÜRCK, Beherrschter Raum und anerkannte Herrschaft. Friedrich I. Barbarossa und das Königreich Burgund, Ostfildern, 2013, chap. 3.1.1 : « Die Entstehung des Königreichs Burgund in Antike und Frühmittelalter », p. 56-62, ici p. 58. 14. Voir, entre autres, J. SEMMLER, « Die Aufrichtung der karolingischen Herrschaft im nördlichen Burgund im 8. Jahrhundert », in Aux origines d’une seigneurie ecclésiastique. Langres et ses évêques VIIIe-XIe siècles, Langres, 1986, p. 19-40 ; G. MOYSE, « La Bourgogne septentrionale et particulièrement le diocèse Besançon de la fin du monde antique au seuil de l’âge carolingien (Ve- VIIIe siècle) », in J. WERNER et E. EWIG (dir.), Von der Spätantike zum frühen Mittelalter. Aktuelle Probleme in historischer und archäologischer Sicht, Sigmaringen, 1979, p. 467-488 ; J. CALMETTE, « Bourgogne et Midi à l’époque carolingienne », Annales de Bourgogne, 13 (1941), p. 265-273. 15. Parmi les tria regna de la Neustrie, l’Austrasie et la Bourgogne franque, la dernière semble, en quelque sorte, avoir été négligée par l’histoire, au point d’être la moins étudiée. Pour l’époque carolingienne, on a analysé le « souvenir austrasien » et le « souvenir des Carolingiens à Metz », mais aussi la construction d’une mémoire franque centrée sur la tradition neustrienne à travers la réécriture historiographique. Cf. M. PARISSE, « Noblesse et monastères », in R. KOTTJE et H. MAURER (dir.), Monastische Reformen im 9. und 10. Jahrhundert, Sigmaringen, 1989, p. 167-196, ici p. 170-171. Pour l’Austrasie, cf. R. LE JAN, « Austrasien – Versuch einer Begriffsdefinition », in A. WIECZOREK et al. (dir), Die Franken – Wegbereiter Europas. Vor 1500 Jahren : König Chlodwig und seine Erben, Mayence, 1996, p. 222-226 [article non compris dans le catalogue français de l’exposition : Les Francs, précurseurs de l’Europe, Paris, 1997] ; F. CARDOT, L’espace et le pouvoir. Étude sur l’Austrasie mérovingienne, Paris, 1987. Pour le « souvenir des Carolingiens à Metz », cf. Le souvenir des Carolingiens à Metz au Moyen Âge. Le Petit Cartulaire de Saint-Arnoul, éd. M. GAILLARD, Paris, 2006. Voir l’article clé d’O. G. OEXLE, « Die Karolinger und die Stadt des heiligen Arnulf », Frühmittelalterliche Studien, 1 (1967), p. 250-364. Pour la réécriture historiographique, cf. H. REIMITZ, History, Frankish identity, and the framing of Western ethnicity, 550-850 AD, Cambridge, 2015 ; ID., « Livres d’histoire et histoire du livre à l’époque carolingienne », in C. DENOËL, A.-O. POILPRÉ et S. SHIMAHARA (dir.), Imago libri. Représentations carolingiennes du livre, Turnhout, 2018 (sous presse) ; R. MCKITTERICK, History and memory in the Carolingian world, Cambridge, 2004. 16. Voir, entre autres, les études « classiques » de : D. HÄGERMANN, « Reichseinheit und Reichsteilung. Bemerkungen zur Divisio regnorum von 806 und zur Ordinatio imperii von 817 », Historisches Jahrbuch, 95 (1975), p. 278-307 ; P. CLASSEN, « Karl der Große und die Thronfolge im Frankenreich », in Festschrift für Hermann Heimpel, t. 3, Göttingen, 1972, p. 109-134 [de nouveau dans P. CLASSEN et J. FLECKENSTEIN (dir.), Ausgewählte Aufsätze von Peter Classen, Sigmaringen, 1983, p. 205-229] ; W. SCHLESINGER, « Kaisertum und Reichsteilung. Zur Divisio regnorum von 806 », in R. DIETRICH et G. OESTREICH, Forschungen zu Staat und Verfassung. Festgabe für Fritz Hartung, Berlin, 1958,

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 56

p. 9-51 [de nouveau dans G. G. WOLF (dir.), Zum Kaisertum Karls des Großen. Beiträge und Aufsätze, Darmstadt, 1972, p. 116-173]. 17. Cf. T. BAUER, « Die Ordinatio Imperii von 817, der Vertrag von Verdun 843 und die Herausbildung Lotharingiens », Rheinische Vierteljahrsblätter, 58 (1994), p. 1-24 ; voir également les études « classiques » : P. E. HÜBINGER, « Der Vertrag von Verdun und sein Rang in der abendländischen Geschichte », Düsseldorfer Jahrbuch, 44 (1947), p. 1-16 [de nouveau dans P. E. HÜBINGER, M. DITSCHE et R. KOTTJE (dir.), Ausgewählte Aufsätze und Vorträge. Beiträge zur Geschichte Europas und der Rheinlande in Mittelalter und Neuzeit, Siegburg, 1990, p. 185-201] ; T. MAYER, Der Vertrag von Verdun 843. 9 Aufsätze zur Begründung der europäischen Völker- und Staatenwelt, Leipzig, 1943. 18. M. CHAUME, Les origines du duché de Bourgogne, 5 vol., Dijon, 1925-1931 ; J. RICHARD, Les ducs de Bourgogne et la formation du duché du XIe au XIVe siècle, Paris, 1954. 19. Chronicon Reginonis, éd. F. KURZE, MGH SS rer. Germ., 50, Hanovre, 1890, ad a. 855, p. 77. 20. Annales de Saint-Bertin, éd. F. GRAT, J. VIELLIARD et S. CLÉMENCET, Paris, 1964, p. 71. 21. Chronicon Reginonis…, op. cit., ad a. 855, p. 77. 22. ADON DE VIENNE, « Chronique », éd. G. H. PERTZ, MGH SS 2, Hanovre, 1829, p. 324. 23. Annales de Saint-Bertin…, op. cit., ad a. 856, p. 73. 24. Karolo tamen… Provinciam et ducatum Lugdunensem iuxta paternam dispositionem distribuunt, eripientibus eum a frate Lothario optimatibus, qui illum moliebatur in clericum tonsurare (ibid.). 25. Diu epeleptica infirmitate vexatur (Annales de Saint-Bertin…, op. cit., ad a. 863, p. 96). 26. H. ZIELINSKI, Niederburgund bis zur Vereinigung mit Hochburgund (855-940er Jahre) [J. F. Böhmer, Regesta Imperii, I. Die Regesten des Kaiserreichs unter den Karolingern 751-918 (926), III : Die Regesten des Regnum Italiae und der burgundischen Regna, part 4 : Die burgundischen Regna (855-1032), fasc. 1], Cologne/Vienne, 2013, p. 41-67. 27. Ce regnum engloba la Provence, le Dauphiné, les parties méridionales de la Savoie ainsi que l’espace situé entre la Saône et le Jura pour utiliser une terminologie à la fois géographique et politique. Voir, entre autres, L. BOEHM, Geschichte Burgunds…, op. cit., chap. 5 : « Burgund im Frankenreich der Karolinger. Die Entstehung der Königreiche “Niederburgund” (879) und “Hochburgund” », p. 87-104. 28. Die Urkunden der burgundischen Rudolfinger, éd. T. SCHIEFFER, MGH Diplomata regum Burgundiae e stirpe Rudolfina Diplomata et Acta, Munich, 1977, n° 1 et n° 2, p. 91-95. 29. Notons bien que les intitulationes de Rodolphe Ier mentionnent simplement rex et que seul son fils Rodolphe II figure comme rex Iurensium dans une lettre de 932, affichant ainsi une dimension géographique de son royaume savoyard et jurassien. Die Urkunden der burgundischen Rudolfinger…, op. cit., n° 23, p. 125-127 ; voir l’introduction (p. 77) et les cartes 5, 11 et 12. 30. R. GROSSE, « Heinrich III., Burgund und Frankreich : Beziehungsgeflechte und ihre Träger », in G. LUBICH (dir.), Heinrich III. (1016/7-1056). Kaiser am Beginn eines neuen Jahrtausends, Cologne, 2018 (sous presse). 31. R. FIÉTIER (dir.), Histoire de la Franche-Comté, Toulouse, 1977. 32. J. BRYCE, The Holy Roman Empire, Londres, ³1871, p. 175. 33. C. B. BOUCHARD, « Burgundy and Provence », in T. REUTER, The New Cambridge Medieval History, t. 3 (c. 900-c. 1024), Cambridge, 52014, p. 328-345, ici p. 328. 34. M. PARISSE, « La Lotharingie : naissance d’un espace politique », in H.-W. HERRMANN et R. SCHNEIDER (dir.), Lotharingia. Eine europäische Kernlandschaft um das Jahr 1000/Une région au centre de l’Europe autour de l’an Mil, Sarrebruck, 1995, p. 31-48 ; T. BAUER, Lotharingien als historischer Raum. Raumbildung und Raumbewußtsein im Mittelalter, Cologne/Weimar/Vienne, 1997 ; J. SCHNEIDER, Auf der Suche nach dem verlorenen Reich. Lotharingien im 9. und 10. Jahrhundert, Cologne/Weimar/Vienne, 2010. Cf. M. MARGUE, « “Nous ne sommes ni de l’une, ni de l’autre, mais les deux à la fois.” Entre France et Germanie, les identités lotharingiennes en question(s) (2e moitié du IXe-début du XIe

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 57

siècle) », in M. GAILLARD et al. (dir.), De la mer du Nord à la Méditerranée. Francia Media, une région au cœur de l’Europe (c. 840-c. 1050), Luxembourg, 2011, p. 395-427 ; T. MARTINE et J. NOWAK (dir.), D’un regnum à l’autre : la Lotharingie, un espace de l’entre-deux ? Vom Regnum zum Imperium : Lotharingien als Zwischenreich ? (sous presse). 35. Dans son ouvrage, aujourd’hui classique, paru en 1901, René Poupardin aborde la question de la dénomination des « espaces bourguignons » pour la période rodolphienne afin de la clarifier. Il résume l’origine et l’emploi du vocabulaire rencontré depuis les sources mérovingiennes et carolingiennes jusqu’aux auteurs humanistes pour justifier l’abandon des termes cisjuran, transjuran et ultrajuran, comme étant trop imprécis (R. POUPARDIN, Le Royaume de Provence sous les Carolingiens, 855-933, Paris, 1901, Appendice 1, p. 281-290). On gardera toutefois en mémoire que la désignation « Transjurane », si elle apparaît déjà chez Adon de Vienne († 875) pour les diocèses de Belley et de Tarentaise, est nonobstant une « expression usitée par les modernes » (R. POUPARDIN, Le Royaume…, ibid., p. 288 ; ADON DE VIENNE, Chronique…, op. cit., p. 323 : Transiurensis Burgundiae. Cf. K. WEBER, « Alsace and Burgundy » [à paraître, à l’adresse http:// journals.openedition.org/cem/14838]). Le titre de la reine Ermengarde « de Transjurane », que l’on rencontre en marge d’un diplôme de 1019, est bien un ajout du XVIIe siècle (Die Urkunden der burgundischen Rudolfinger…, op. cit., n° 136, p. 311 : Munificae litterae Ermengardae reginae Transiuranae Burgundiae…). 36. Mentionnons seulement le couronnement « lotharingien » de 888 de Rodolphe de Bourgogne, volontiers administré par l’évêque de Toul en sa cité. Même s’il est resté sans conséquences pour Rodolphe, cet acte articule la légitimité réclamée par ce nouveau roi sur une terre carolingienne. Cf. A. HAUFF, « Carolingian Traditions and New Beginnings in the Kingdom of Upper Burgundy from a Religious Perspective. The Coronation of Rudolph I of Upper Burgundy » [à paraître, à l’adresse http://journals.openedition.org/cem/14839]. 37. M. ZINGEL, Frankreich, das Reich und Burgund im Urteil der burgundischen Historiographie des 15. Jahrhunderts, Sigmaringen, 1995. 38. H. KAMP, Burgund…, op. cit., chap. IV.3 « Das Nachleben Burgunds in der Moderne », p. 117-123. 39. K. VON SEE, « Das Nibelungenlied – ein Nationalepos ? », in J. HEINZLE et al. (dir.), Die Nibelungen. Ein deutscher Wahn, ein deutscher Alptraum. Studien und Dokumente zur Rezeption des Nibelungenstoffs im 19. und 20. Jahrhundert, Francfort/Main, ²1994, p. 43-110 ; Ze Wormez bî dem Rîne, éd. K. BARTSCH et al., op. cit., strophe 6. 40. Cycle de quatre opéras composé par Wagner entre 1853 et 1876. Voir H. KAMP, « Burgund », in J. FRIED et O. B. RADER, Die Welt des Mittelalters. Erinnerungsorte eines Jahrtausends, Munich, 2011, p. 25-44, ici p. 26. 41. J. HUIZINGA, L’automne du Moyen Âge, traduit du hollandais par J. Bastin, précédé d’un entretien de C. Mettra avec J. Le Goff, Paris 2015 [original : Herfsttij der Middeleeuwen, Haarlem, 1919]. 42. H. PIRENNE, Histoire de Belgique. Des origines à nos jours, t. 1 (Des origines à l’État bourguignon), Bruxelles, 51928 [paru en 1900 sous le titre Des origines au commencement au XIVe siècle] ; t. 2 (De la mort de Charles le Téméraire à la paix de Munster), Bruxelles, 1949. 43. H. KAMP, Burgund…, op. cit., p. 122. Cf. É. BOUSMAR, « Siècle de Bourgogne, siècle des Grands ducs : variations de mémoire en Belgique et en France du XIXe siècle à nos jours », in J.-M. CAUCHIES et P. PÉPORTÉ (dir.), Mémoires conflictuelles et mythes concurrents dans les pays bourguignons (ca. 1380-1580), Neuchâtel, 2012, p. 235-250 ; É. LECUPPRE-DESJARDINS, Le royaume inachevé des ducs de Bourgogne (XIVe-XVe siècles), Paris, 2016, chap. VII : « La “Burgondisation” ou le fantasme de la nation bourguignonne », p. 313-344. 44. Au sujet d’une conscience burgonde, cf. M. CHAUME, Le sentiment national bourguignon de Gondebaud à Charles le Téméraire, Dijon, 1922 ; S. ESDERS, Römische Rechtstradition…, op. cit., p. 463 ; R. KAISER, Burgunder…, op. cit., p. 184-200 ; V. GALLÉ (dir.), Die Burgunder…, op. cit.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 58

45. R. POUPARDIN, Le Royaume de Provence…, op. cit. ; ID., Le royaume de Bourgogne (888-1038). Étude sur les origines du royaume d’Arles, Paris, 1907. Cf. G. DE MANTEYER, La Provence du Ier au XIIe siècle, 2 vol., Paris, 1908 [Charleston, 2009]. 46. Die Chronik des Bischofs Thietmar von Merseburg und ihre Korveier Überarbeitung. Thietmari Merseburgensis episcopi chronicon, éd. R. HOLTZMANN, MGH SS rer. Germ., NS 9, Berlin, 1935 [Munich, 1980], VII, 30. 47. Voir, par exemple, R. WALPEN, Studien zur Geschichte des Wallis im Mittelalter (9. bis 15. Jahrhundert), Berne, 1983 ; M. ZUFFEREY, Die Abtei Saint-Maurice d’Agaune im Hochmittelalter (830-1258), Göttingen, 1988 ; J.-D. MOREROD, Genèse d’une principauté épiscopale. La politique des évêques de Lausanne (IXe-XIVe siècles), Lausanne, 2000. 48. É. LECUPPRE-DESJARDIN, Le royaume inachevé…, op. cit. Cf. H. MÜLLER, « Warum nicht einmal die Herzöge von Burgund das Königtum erlangen wollten und konnten : um 1473 », in B. JUSSEN (dir.), Die Macht des Königs. Herrschaft in Europa vom Frühmittelalter bis in die Neuzeit, Munich, 2005, p. 255-274 [de nouveau dans H. MÜLLER, Frankreich, Burgund und das Reich im späten Mittelalter. Ausgewählte Aufsätze, dir. par G. ANNAS, P. GORZOLLA, C. KLEINERT et J. NOWAK, Tübingen, 2011, p. 421-462]. 49. Ainsi, en 1459, par exemple, au congrès de Mantoue, Philippe le Bon était assis aux places qui revenaient aux rois, cf. J. HUIZINGA, Burgund. Eine Krise des romanisch-germanischen Verhältnisses, Munich, 1933 [Tübingen, 1952 ; Darmstadt, ²1967], p. 21 n. 16. En 1461, lors du couronnement de Louis à Reims, Philippe était vêtu « en habit royal », cf. M. AWERBUCH, Über die Motivation der burgundischen Politik im 14. und 15. Jahrhundert, Berlin, 1970, p. 103. Ses banquets ont eu lieu « en salle non d’un duc, par semblant, mais d’un empereur », cf. J. HUIZINGA, « L’État bourguignon, ses rapports avec la France, et les origines d’une nationalité néerlandaise », Moyen Âge, 41 (1931), p. 10-35, 84-96, ici p. 24. Le chaperon que le Grand Duc du Ponant avait coutume de porter à partir de 1448 avait une forte ressemblance à une couronne, cf. Y. LACAZE, « Philippe le Bon et l’Empire. Bilan d’un règne », Francia, 9 (1981), p. 133-175 et 10 (1982), p. 167-227, ici p. 175. De plus, son trône n’avait pas trois marches, mais il en comportait six, comme celui d’un vrai roi, cf. B. RILL, Friedrich III. Habsburgs europäischer Durchbruch, Graz-Vienne-Cologne, 1987, p. 217. 50. Fondation par François Drion du Chapois et Gonzague de Reynold, professeur à l’université de Fribourg. A. CHARDONNENS, Une alternative à l’Europe technocratique : le centre européen d’études burgondo-médianes, Bruxelles/Neuchâtel, 2005. 51. F. DRION DU CHAPOIS, La vocation européenne des Belges, Bruxelles, 1958, p. 73 ; J. NOWAK et J. RÜDIGER, « Am Horizont Burgund, oder : Wieso nicht die Rudolfinger ? Zur Einführung », in J. NOWAK et J. RÜDIGER (dir.), De Bâle à Marseille, l’espace bourguignon à l’époque rodolphienne (IXe-XIe siècles). Zwischen Basel und Marseille : das Burgund der Rudolfinger (9.-11. Jahrhundert), sous presse. 52. Quant au « Centre européen d’études bourguignonnes » , cf. http://www.unine.ch/ceeb/ (2-12-2017). Le « Centre européen d’études bourguignonnes » organise chaque année des rencontres gravitant autour de ce duché fascinant. Voir récemment A. MARCHANDISSE et al. (dir.), Les cultures de la décision dans l’espace bourguignon : acteurs, conflits, représentations, Neuchâtel, 2017. 53. Die Urkunden der burgundischen Rudolfinger…, op. cit. ; voir l’histoire du projet entre 1938 et 1977 racontée par T. Schieffer, p. VII-XV. 54. H. E. MAYER, « Ein Rundschreiben Rudolfs II. von Burgund aus dem Jahre 932 », Deutsches Archiv für Erforschung des Mittelalters, 17 (1961), p. 507-517 ; ID., « Die Politik der Könige von Hochburgund im Doubsgebiet », ibid., 18 (1962), p. 530-539 ; ID., « Die Alpen und das Königreich Burgund », in T. MAYER (dir.), Die Alpen in der europäischen Geschichte des Mittelalters. Reichenau- Vorträge 1961-1962, Constance/Stuttgart, 1965, p. 57-76. 55. L. BOEHM, Geschichte Burgunds…, op. cit. ; EAD., « Rechtsformen und Rechtstitel der burgundischen Königserhebungen im 9. Jahrhundert. Zur Krise der karolingischen Dynastie », Historisches Jahrbuch, 80 (1960), p. 1-57.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 59

56. G. SERGI, Potere e territorio lungo la strada di Francia. Da Chambéry a Torino fra X e XIII secolo, Naples, 1981 ; ID., « Genesi di un regno effimero. La Borgogna di Rodolfo I », Bollettino storico- bibliografico subalpino, 87 (1989), p. 5-44 ; ID., « Istituzioni politiche e società nel regno di Borgogna », in Il secolo di ferro : mito e realità del secolo X, Spolète, 1991, t. 1, p. 205-242 ; ID., « Assetti politici intorno al mille : ricerche sui regni di Borgogna e d’Italia », in F. LEPORI et F. SANTI (dir.), Il mestiere di storico del medioevo, Spolète, 1994, p. 5-38. 57. G. CASTELNUOVO, L’aristocrazia del Vaud fino alla conquista sabauda (inizio XI-metà XIII secolo), Turin, 1990 [traduction partielle en français sous le titre Seigneurs et lignages du pays de Vaud. Du royaume de Bourgogne à l’arrivée des Savoie, Lausanne, 1994] ; ID., « Les élites des royaumes de Bourgogne (milieu IXe-milieu Xe siècle) », in R. LE JAN (dir.), La royauté et les élites dans l’Europe carolingienne (du début du IXe siècle aux environs de 920), Lille, 1998, p. 383-408 ; ID., « Un regno, un viaggio, una principessa. L’imperatrice Adelaide e il regno di Borgogna (931-999) », in R . DELLE DONNE et A. ZORZI (dir.), Le storie e la memoria. In onore di Arnold Esch, Florence, 2002, p. 215-234 ; ID., « La Burgondie carolingienne et rodolphienne. Prémices et développement d’un royaume », in P. PARAVY, Des Burgondes au royaume de Bourgogne (Ve-Xe siècle). Espace politique et civilisation, Grenoble, 2002, p. 183-210. 58. P. GANIVET, Recherches sur l’évolution des pouvoirs dans les pays lyonnais de l’époque carolingienne aux lendemains de l’an Mil, thèse de doctorat, université de Clermont 1, 2000. 59. L. GRIMALDI, Le Viennois du monde carolingien au début des temps féodaux (fin du IXe-XIe siècle), thèse de doctorat, université de Clermont 1, 2002. 60. L. RIPART, Les fondements idéologiques du pouvoir des premiers comtes de Savoie (de la fin du Xe au milieu du XIIIe siècle), thèse de doctorat, université de Nice, 1999. 61. F. DEMOTZ, La Bourgogne transjurane (855-1056). L’évolution des rapports de pouvoirs dans le monde post-carolingien, thèse de doctorat, universités de Neuchâtel et Lyon 3, 2002 [https://doc.rero.ch/ record/10633 (18-09-17)] ; version imprimée : La Bourgogne, dernier des royaumes carolingiens (855-1056). Roi, pouvoirs et élites autour du Léman, Lausanne, 2008 ; ID., L’an 888, le royaume de Bourgogne. Une puissance européenne au bord du Léman, Lausanne, 2012. 62. N. CARRIER, Les usages de la servitude. Seigneurs et paysans dans le royaume de Bourgogne (VIe-XVe siècle), Paris, 2012. 63. N. NIMMEGEERS, Évêques entre Bourgogne et Provence (Ve-XIe siècle). La province ecclésiastique de Vienne au haut Moyen Âge, Rennes, 2014. Certes, d’autres articles pourraient être ajoutés, tel que celui de B. BLIGNY, « Le royaume de Bourgogne », in H. BEUMANN (dir.), Karl der Große. Lebenswerk und Nachleben, t. 1, Düsseldorf, 1965, p. 247-268. 64. P. PARAVY (dir.), Des Burgondes au royaume de Bourgogne…, op. cit. 65. C. GUILLERÉ et al. (dir.), Le royaume de Bourgogne autour de l’an Mil…, op. cit. 66. M. GAILLARD et al. (dir.), Francia Media…, op. cit. Voir ici, par exemple, la contribution de L. RIPART, « Le royaume rodolphien de Bourgogne (fin IXe-début XIe siècle) », p. 429-452, avec la carte p. 452. 67. A. WAGNER et N . BROCARD, Les royaumes de Bourgogne jusqu’en 1032. L’image du royaume de Bourgogne à travers sa culture et sa religion (sous presse). 68. N. BROCARD, F. VANNOTTI et A. WAGNER (dir.), Autour de saint Maurice, Saint-Maurice, 2012 ; L’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, 515-2015, t. 1 [B. ANDENMATTEN et L. RIPART (dir.), Histoire et archéologie, Gollion, 2015] ; F. VANNOTTI (dir.), Honneur à Saint-Maurice ! 1500 ans de culte. Lieux et supports de la liturgie [Actes du colloque, Paris, 2-4 avril 2015] (sous presse). 69. D. IOGNA-PRAT et al. (dir.), Cluny. Les moines et la société au premier âge féodal, Rennes, 2013. Dans ce volume, se trouve, entre autres, une contribution de L. Ripart : « Le premier âge féodal dans des terres de tradition royale. L’exemple des pays de la Bourgogne rhodanienne et lémanique », p. 229-249.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 60

70. A. CHARANSONNET, J.-L. GAULIN, P. MOUNIER et S . RAU, Lyon, entre Empire et Royaume (843-1601). Textes et documents, Paris, 2015. 71. W. HAUBRICHS, « Akkulturation und Distanz. Germanische und romanische Personennamen im regnum der Burgunden », in M. BECHER et S. DICK (dir.), Völker, Reiche und Namen im frühen Mittelalter, Munich, 2010, p. 191-222 ; ID., « Sprachliche Integration, Sprachinseln und Sprachgrenzbildung im Bereich der östlichen Gallia. Das Beispiel der Burgunden und der Franken », in T. KÖLZER et R. SCHIEFFER (dir.), Von der Spätantike zum frühen Mittelalter : Kontinuitäten und Brüche, Konzeptionen und Befunde, Ostfildern, 2009, p. 63-100 ; ID., « Ein namhaftes Volk. Burgundische Namen und Sprache des 5. und 6. Jahrhunderts », in V. GALLÉ (dir.), Die Burgunder…, op. cit., p. 135-184 ; M. PFISTER, « Das Erbe der Burgunder im Frankoprovenzalischen », in V. GALLÉ (dir.), Die Burgunder…, ibid., p. 185-214 ; ID., « Warasken, Chamaven, Skudingen, Sarmaten, Taifalen und andere. Von der Bedeutung ethnischer Bezeichnungen in der Galloromania », in H. REICHERT et C. SCHEUNGRABER (dir.), Germanische Altertumskunde. Quellen, Methoden, Ergebnisse, Vienne, 2015, p. 95-124 ; ID., « Burgundische und intergentile Rechtswörter des “Liber Constitutionum” (a. 517) im Kontext der Burgundenforschung », Sprachwissenschaft, 40 (2015), p. 127-146 ; W. POHL, I. HARTL et W. HAUBRICHS (dir.), Walchen, Romani und Latini : Variationen einer nachrömischen Gruppenbezeichnung zwischen Britannien und dem Balkan, Vienne, 2017. 72. Ne citons que quelques études récentes : J. JARNUT et J. STROTHMANN (dir.), Die Merowingischen Monetarmünzen als Quelle zum Verständnis des 7. Jahrhunderts in Gallien, Paderborn, 2013. Dans le volume, se trouvent deux articles de J. STROTHMANN : « Einleitung : Münzen, Epochenwandel und Interdisziplinarität », p. 13-20 ; « Civitas-Hauptorte und ihre Benennungen als Quelle für den Wandel der politischen Struktur Galliens bis zum 8. Jahrhundert », p. 613-628 ; J. STROTHMANN, « Das 7. Jahrhundert in neuem Licht. Merowingische Monetarmünzen als Quelle für eine nachantike Gesellschaftsordnung Galliens », La nouvelle revue d’onomastique, 54 (2012), p. 89-110 ; N. ELLER, S. HACKL-RÖSSLER et J. STROTHMANN, « Personen- und Ortsnamen auf merowingischen Münzen des 7. Jahrhunderts. Das interdisziplinäre DFG-Projekt “Die merowingischen Monetarmünzen als interdisziplinär-mediävistische Herausforderung – eine Projektskizze” », in A. GREULE et M. SPRINGER, Namen des Frühmittelalters als sprachliche Zeugnisse und als Geschichtsquellen, Berlin, 2009, p. 121-136 ; ID., « Königsherrschaft oder nachantike Staatlichkeit ? Merowingische Monetarmünzen als Quelle für die politische Ordnung des Frankenreiches », Millennium-Jahrbuch, 5 (2008), p. 353-382. 73. Elle est un train de publier avec Jan Rüdiger un volume dont le titre sera De Bâle à Marseille…, op. cit. (sous presse). En 2017, est paru un article intitulé « Imperial Aspirations in Provence and Burgundy », in C. SCHOLL, T. GEBHARDT et J. CLAUSS (dir.), Transcultural approaches to the concept of imperial rule in the Middle Ages, Francfort/Main, 2017, p. 139-156 [Ce volume résulte également de quelques sessions auprès de l’International Medieval Congress qui ont eu lieu à Leeds en 2014 sous le titre « To be or not to be emperor »]. Un autre article, intitulé « Prekäre Macht – changierender Raum. Überlegungen zum Königreich Burgund (888-1032) », paraîtra dans un volume dirigé par C. Ehlers traitant les « Rechtsräume » (sous presse). 74. Dès lors, elle a publié quelques articles traitant de la Bourgogne : « The Kingdom of Upper Burgundy and the East Frankish Kingdom at the beginning of the 10th century », History Compass, 15/8 (2017) ; « Die Stellung des Erzbischofs und Erzkanzlers Dietrich von Besançon zwischen Rudolf I. von Hochburgund und Zwentibold », in J. NOWAK et J. RÜDIGER, De Bâle à Marseille…, op. cit. (sous presse). 75. Pour les trois sessions, cf. http://acp.u-pem.fr/rencontres/archives/reform-and-renewal-in- burgundy/ (15-11-2017). 76. Des neuf exposés présentés à Leeds, nous n’avons gardé que quatre, en resserrant l’attention sur la période du premier Moyen Âge. Ce choix a pu être complété par trois articles

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 61

supplémentaires provenant des plumes de Wolfgang Haubrichs, de Jürgen Strothmann et de François Demotz, élargissant le dossier à d’autres approches méthodologiques. 77. T. BAUER, Lotharingien als historischer Raum…, op. cit. ; J. SCHNEIDER, Auf der Suche nach dem verlorenen Reich…, op. cit. ; J. SCHNEIDER, T. MARTINE, « La production d’un espace : débuts lotharingiens et pratiques de la frontière (IXe-XIe siècle) », Revue de géographie historique, 4 (2014) en ligne [http://rgh.univ-lorraine.fr/articles/view/43/ La_production_d_un_espace_debuts_lotharingiens_et_pratiques_de_la_frontiere_IXe_XIe_siecle (15-11-2017)] ; T. MARTINE, Ancrage spatial et politique territoriale de l’aristocratie comtale en Lotharingie méridionale (fin IXe-mi XIe siècle), thèse de doctorat, université de Marne-la-Vallée, 2017. 78. K. WEBER, « “Pagus” und “ducatus” am südlichen Oberrhein in merowingischer und karolingischer Zeit », in S. BRATHER et J. DENDORFER (dir.), Grenzen, Räume und Identitäten. Der Oberrhein und seine Nachbarregionen von der Antike bis zum Hochmittelalter, Ostfildern, 2017, p. 411-434 ; ID., Die Formierung des Elsass im Regnum Francorum : Adel, Kirche und Königtum am Oberrhein in merowingischer und frühkarolingischer Zeit, Ostfildern, 2011. 79. S. BRATHER et J. DENDORFER (dir.), Grenzen, Räume und Identitäten…, ibid. 80. F. DEMOTZ, La Bourgogne, dernier des royaumes carolingiens…, op. cit. ; ID., L’an 888, le royaume de Bourgogne…, op. cit. ; ID., « De l’alliance politique à l’affinité spirituelle : l’amitié entre les rois de Bourgogne et les abbés de Cluny », in D. IOGNA-PRAT et al. (dir.), Cluny. Les moines et la société…, op. cit ., p. 249-260 ; ID., « Saint Maurice et les rois de Bourgogne du lien identitaire à la sainteté symbolique », in N. BROCARD et al. (dir.), Autour de saint Maurice…, op. cit. , p. 147-160 ; ID., « La Transjurane de l’an Mil : la transition post-carolingienne », in C. GUILLERÉ et al. (dir.), Le royaume de Bourgogne…, op. cit., p. 27-59. 81. Cf. K. ESCHER, Genèse et évolution…, op. cit. ; voir les nombreux rapports et études publiés dans le Bucema, en dernier lieu n° 16 (2012), « Opérations archéologiques 2010-2011 », par S. BULLY et al. [en ligne http://cem.revues.org/11848 (18-09-17)]. 82. S. ESDERS, Römische Rechtstradition…, op. cit. ; C. EHLERS, Rechtsräume. Ordnungsmuster im Europa des frühen Mittelalters, Berlin/Boston, 2016.

AUTEURS

JESSIKA NOWAK Université de Bâle

JENS SCHNEIDER Université Paris-Est Marne-la-Vallée/Institut historique allemand de Paris

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 62

Les Chamaves et les autres : une enquête linguistique sur les traces des Chamaves, Hattuaires, Varasques, Scotinges et Burgondes au nord de la Bourgogne1

Wolfgang Haubrichs Traduction : Philippe Thierry

NOTE DE L’ÉDITEUR

Traduit de l’allemand. Cet article fait référence aux cartes 2, 6 et 7 du dossier cartographique. Ces cartes sont réinsérées dans le corps du texte et les liens vers le dossier cartographique sont donnés en documents annexes. La carte 2 a été modifiée le 25 juillet 2018.

Introduction

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 63

1 C’est une particularité du nord de la Bourgogne, c’est-à-dire des régions bordant la Saône et le , autour de Besançon en Franche-Comté et de Dijon, d’y trouver jusqu’à nos jours, outre la strate germanique orientale qui s’est constituée aux Ve-VIe siècles avec l’extension du regnum burgonde et se manifeste avant tout dans les noms des établissements, des noms de contrées prouvant la présence dans le haut Moyen Âge d’autres gentes germaniques, en partie franques2 (cf. carte 2) : • les Varasques (Warasci), probablement venus à la fin du Ve ou au début du VIe siècle d’une contrée nommée Stadevanga < *Staþa-wangaz, située sur les bords de la rivière Regen, qui se jette dans le Danube à Ratisbonne – en allemand Regensburg : « la forteresse sur le Regen » –, impliqués dans des combats contre les Burgondes, par la suite tombés sous l’influence d’une hérésie bonosiaque (arienne ?) combattue par l’abbé Eustase de Luxeuil. Les Varasques sont attestés dans des noms de contrées et de pagi depuis le VIIe siècle ; leur pagus s’étendait sur la région située à l’est de Besançon, sur les deux rives du Doubs, du sud de la métropole de la provincia Sequanorum jusqu’au cœur du Jura, jusqu’à Arbois et , villes toutes deux situées dans le département du Jura. Le nom de ce pagus a survécu dans le nom de pays Varais3 ; • les Scotinges (Scutingi, Scudingi), attestés depuis le début du VIIe siècle4 en tant qu’éponyme d’un pagus qui comprenait la région située dans le cours supérieur de la Seille, autour de Lons-le-Saunier (dép. du Jura), dans la haute vallée de l’Ain et tout autour de Salins-les-Bains (dép. du Jura), localité qui devait son importance à l’extraction très ancienne du sel. Les Skut-ingōs – à rapprocher du germanique *skut- « lancer, tirer, tir » – continuent à vivre dans les noms de la contrée d’Écouens ou Escuens5 ; • les Hattuaires (Attuarii), attestés depuis le milieu du VIIe siècle (en 658 : pagus Attuariorum) en tant qu’éponyme d’un pagus qui comprenait la région à l’est de Dijon et qui existe encore dans le nom de contrée Attuyer6 ; • les Chattuarii, Hattuarii < *Hattu-warijōz – en vieil-anglais au datif pluriel Haetwerum, nominatif pluriel *Hetware –, mot signifiant probablement « les hommes originaires du pays des Chattes » ou bien « les habitants du pays des Chattes », sont attestés depuis le Ier siècle dans la basse vallée du Rhin et appartenaient au IVe siècle à la confédération franque7.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 64

Carte 2 – Les pagi du diocèse de Besançon et de sa marge occidentale (VIIe-XIe s.)

Une enquête linguistique : le pagus *Hamavorum

2 À l’est de l’Attuyer, au nord de l’Écouens et à l’ouest du Varais s’étendait un autre pagus qui tirait son nom d’un ethnonyme et qui s’est perpétué dans le nom de la contrée d’ Amous. C’est avant tout de cette contrée qu’il s’agira ici.

3 Le nom de ce pagus est attesté dans la série suivante de documents, seules les mentions n° 9 et 10 étant originales et toutes les autres des copies8 : (1) a. 719 : in pago Amavorum [var. Amaorum]…9 (2) a. 717 : in pago Comavorum… [< * Camavorum]… in pago Ammaviorum… in pago Amavorum10 (3) a. 779/780 : in pago Scudengorum, et Amaorum, sed in Salinense…11 (4) a. 784 : in pago Amaorum…12 (5) a. 787 (version courte) : in pago Scudengorum et Amaorum, seo et in Salinensium…13 (6) a. 787 (version longue) : in pagos Escodingorum et Amaorum…14 (7) a. 839 (partage de l’Empire) : comitatum Amaus, comitatum Hatoariorum…15 (8) a. 863 : pagi Amausensis…16 (9) a. 866 : in pago… Amausensi, Scudensi…17 (10) a. 868 : Amausensi, Scudensi…18 (11) a. 870 (Traité de Meersen) : Warasch, Scudingum, Emaus…19 (12) IXe/Xe siècle : in comitatu Amauso…20 (13) a. 953 (?) : in comitatu Amauvensi…21 (14) a. 951 : in comitatu Amanuense [< *Amauvense]…22 (15) a. 1040 : in comitatu… Amosensi…23

4 Les attestations du nom du pagus énumérées ci-dessus peuvent s’expliquer à partir d’un ethnonyme latinisé *Hamavi ou respectivement d’un adjectif roman dérivé Hamavensis. Le nom de pays Amous, qui s’est créé en langue vernaculaire, tire son origine de

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 65

*(ad)Hamavos transformé en Amavos (n° 1 et 2) puis en Amaus (n° 7, 11 et 12), le [h] initial et le [v] intervocalique tombant en langue romane. Les formes en langue vernaculaire ont à leur tour influencé les formes latinisées contenues dans les diplômes (cf. n° 3, 4, 5, 6 et 8, 9, 10, 13, 14 et 15). L’hypothèse selon laquelle il faut placer le phonème germanique [x] à l’initiale de *Hamavi pour retrouver sa forme d’origine repose sur l’existence de la forme *Camavi datée de 717 et particulièrement précieuse pour la recherche étymologique. Le roman substituant par un autre phonème le phonème germanique présupposé [x], qui fut transcrit sous la forme ou bien encore , comme dans Charibert, Caribert < Haribert, les formes écrites Chamavi, Camavi étaient donc également possibles24. Nous trouvons ces formes écrites avec Chamavi depuis Tacite, en grec depuis Ptolémée avec Καµανοι, Χαµάβους, puis en avec Camari [< * Camavi] dans le Laterculus Veronensis (a. 425), finalement avec Matronis Hamavehis (CIL XIII 7864), noms de matrones dérivés de l’ethnonyme et inscrits sur la pierre votive d’Altdorf, village situé au sud de Jülich. Toutes ces formes désignent la gens25 qui était établie au IVe siècle autour de l’Yssel et qui donna plus tard son nom au Hama-land < *Hamawa-land « pays des Chamaves » situé autour de Deventer et dans la partie occidentale du diocèse de Münster en Westphalie26. On en tire la conclusion irréfutable que l’ethnonyme employé pour construire les expressions pagus Hamavorum, Amavorum se rattache bien à la gens des Chamaves ; on peut faire un parallèle avec l’expression pagus Attuariorum pour la gens des Hattuaires, ces deux gentes appartenant en outre au IVe siècle à la confédération des tribus franques27.

Sur les traces des Chamaves

5 L’étendue géographique du pagus *Hamavorum peut être correctement reconstituée à partir de la situation des localités identifiables apparaissant dans les diplômes cités ci- dessus, car elles sont en nombre considérable (cf. carte 2).

6 Ces localités sont les suivantes28 : • dans le département du Jura : • Amange (canton d’Authume) • Annoire (canton de Tavaux) • Auxange (canton d’Authume) • Bans (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Belmont (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Chamblay ?, a. 863 Campus Vellii (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Chassey (commune de Mutigney, canton d’Authume) • Chatelay (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Chevigny (canton d’Authume) • Chissey-sur-Loue ? (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Dammartin-Marpain (canton de Montmirey-le-Château) • Dole (ch.-l. d’arr.) • Staulin, aujourd’hui Port-Lesney (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Falletans (canton d’Authume) • -les-Meulières (canton d’Authume) • Gendrey (canton d’Authume) • Germigney (canton de Mont-sous-Vaudrey) • Gevry (canton de Dole)

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 66

• Grozon (canton de Bletterans) • Longwy-sur-le-Doubs (canton de Tavaux) • Ougney (canton d’Authume) • Pagney (canton d’Authume) • Louvatange (canton d’Authume) • Peseux (canton de Tavaux) • Saint-Vivant-en-Amous (commune de Biarne, canton d’Authume), le prieuré y compris ses dépendances • Salins ? (canton d’Arbois) • Santans (canton de Mont-sous-Vaudrey) • †Savigny, près de Dole Dans la du comes Fridericus de 784, les villae non identifiées d’Alblinus, Reccus et Tingus, d’après les localités les entourant, sont probablement à joindre à la liste ci- dessus. • dans le département de la Haute-Saône : • Bucey-lès-Gy (canton de Marnay) • Chassey-lès-Scey (canton de Scey-sur-Saône-et-Saint-Albin) • Choye (canton de Marnay) • Gray (ch-l. de canton) • Gy (canton de Marnay) • Maizières (canton de Rioz) • dans le département de Saône-et-Loire : • Charnay-lès-Chalon (canton de Gergy) • Chazelles (commune de Mont-lès-Seurre, canton de Gergy) • Pourlans (canton de Gergy) • dans le département de la Côte-d’Or : • Jallanges (canton de Brazey-en-Plaine) • †Latrecey, près de Tichey (canton de Brazey-en-Plaine) • Pontailler-sur-Saône, paroisse Saint-Maurice (canton d’Auxonne) • dans le département du Doubs : • ? (canton de ), a. 717 Vigris

7 Le pagus des Chamaves s’étendait donc pour l’essentiel à l’ouest de Besançon, entre la Saône et le Doubs, jusqu’à leur confluence, et au sud du Doubs autour de la forêt de Chaux jusqu’à la vallée de la Loue. Depuis Auguste Longnon, les chercheurs pensent communément que l’Amous correspond, en termes de circonscriptions ecclésiastiques, à trois doyennés du diocèse de Besançon : ceux de Gray, Dole et Amous, avec Neublans comme siège pour ce dernier (cf. carte 6)29.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 67

Carte 6 – Archidiaconés et doyennés du diocèse de Besançon (XIIe s.)

Gallo-romain et germanique : un héritage toponymique varié

8 Comme dans toute la Franche-Comté et toute la Gaule, les noms d’établissements en - (i)acum30, que l’on trouve aussi dans l’Amous, constituent la strate gallo-romaine de l’Antiquité tardive et peut-être même du très haut Moyen Âge. En voici quelques exemples tirés de notre documentation : • a. 719 : Cariniaco (Charnay-lès-Chalon) • a. 787 : Caviniaco (Chevigny) • a. 787 : Cattiliago (Chatelay) • a. 787 : Saviniacho (Savigny) • a. 787 : Geveriaco (Gevry) • a. 787 : in fine Latriacense < *Latriacum (Latrecey) • a. 787 : Germiniaco (Germigney) • a. 951 : Gradiacus (Gray) • a. 951 : Pontiliacus (Pontailler-sur-Saône), etc.

9 Ces noms contenaient toujours dans la première partie de leur composition un nom de personne (NP) latin ou celtique, parfois aussi germanique, d’où était dérivé le nom d’un domaine rural par adjonction du suffixe -(i)acum à l’origine celtique, mais devenu rapidement gallo-romain : Carinius + -acum = Carini-acum Cassius + -acum = Cassi-acum Cavinius + -acum = Cavini-acum

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 68

Germinius + -acum = Germini-acum Pontilius + -acum = Pontili-acum

10 Avec les autres noms de lieux préromans, la plupart celtiques (Bisuntione > Besançon ; Luxovium > Luxeuil) et romans (Cassellas de cas-ella « la maisonnette » > Chazelles ; Salinas « les salines » > Salins ; Macerias « les murs » > Maizières), ces noms en -(i)acum constituent le socle de la structure toponymique de la région héritée de l’Antiquité tardive et qui a continué à évoluer sous l’influence romane.

11 Avec l’arrivée des Burgondes, une gens germanique orientale pour l’essentiel31, apparaissent dans le pays depuis le Ve siècle de nouveaux noms de personnes, parmi lesquels des noms germaniques spécifiquement orientaux, comme ces noms de personnes masculins en -a (germ. occidental en -o) à déclinaison faible – c’est-à-dire celle des noms dont le radical se terminait à l’origine par -n –, tels Gibica, Sunja, Adica, Athala, Effa, Eudila, Fagila, Fastila, Goma, Chunna, Walista, Trapsta et Vulfia. Parallèlement, apparaissent de nouveaux noms d’établissements composés du suffixe -ingen en germanique commun, le suffixe -ingos étant particulier au germanique oriental, et d’un nom de personne germanique, le suffixe se transformant en -ens et -ans dans le parler roman de la région32. Font partie, par exemple, de ces nouveaux noms d’établissements dans l’Amous, les noms suivants : • a. 722 : Stolingus, -as (Staulin, aujourd’hui Port-Lesney) < *Stōl-ingos du NP *Stōla formé sur *stōl- « siège, trône » – gotique stōls, got. de Crimée stul « siège »33 ; • a. 787 : Sentincus, a. 1179 Sentens (Santans) < *Sinþ-ingos du NP Sinþa « compagnon »34 ; • a. 787 : Badenenc (Bans) < *Badīn-ingos du NP Bad-īn formé sur le germanique *badwō (vieil-angl. beadu) « combat, querelle »35, élément très répandu dans les noms de personnes en germanique oriental – cf. par exemple dans Gundo-bad36, nom des rois et fils de roi burgondes ou respectivement le nom de lieu Combadens, commune d’Ambérieu-en-Bugey (dép. de l’Ain), formé sur le même nom ; • a. 1040 Feletens, a. 1275 Falatens (Falletans) : < *Feluthew-ingos formé sur le NP Felu-þewa- « bon serviteur » avec l’élément de nom -þewaz « serviteur »37, très répandu dans les NP en germanique oriental.

12 D’autres éléments de noms spécifiques du germanique oriental se trouvent dans la toponymie et l’anthroponymie de Franche-Comté et de Bourgogne : • a. 1147 : Trestudens (Tretudens, Territoire de Belfort) < *þrafstwald-ingos du NP *þrafst- walda-38, formé sur le germanique *þrafsta- « consolation » + * walda- « souverain », auquel correspond à son tour le nom d’un Burgonde, un certain Trapsta Burgundio, mentionné en l’année 523 dans la Passio Sigismundi regis39 < *þrafsta- – du got. þrafstjan « consoler, avertir, exhorter ». La racine *þrafst- n’est attestée qu’en germanique oriental40 : cf. un Goth du nom de Thraustila, cité en l’année 454, beau-frère d’Aetius ; un certain Thraust-ilas, impliqué dans une conjuration contre l’empereur Zénon (474-491) ; le prince des Gépides Thrafst-ila (variantes Trapstila, Thraustila) au VIe siècle ; voir aussi le nom wisigotique Trasta-mirus41 ; • XIIe siècle : Tramoens (Trémoins, dép. de la Haute-Saône, canton d’Héricourt) < *þrasmōd-ingos du NP þrasa-môda- formé sur le germanique *þrasa- (got. þrasa- « querelle », vieux norrois þrasa « se quereller, être agité »42) + *mōþa- « sens, esprit, âme »43. Le premier élément est jusqu’au VIIe siècle attesté exclusivement en germanique oriental44. Cf. par exemple aussi le Burgonde Trasulfus ± a. 602, presbyter dans le vicus Prissianicum, c’est-à-dire Saint-Didier-sur-Chalaronne (dép. de l’Ain,

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 69

canton de Châtillon-sur-Chalaronne) < *þrasa-wulfa- formé sur le germanique *þrasa- « querelle » + *wulfa- « loup » (Vita S. Treverii)45 ; • a. 1239 Tracendans, a. 1467 Trassandans (Tressandans, dép. de la Haute-Saône, canton de Rougemont) : < *þrasaswind-ingos du NP þrasa-swinþa- formé sur le germanique *þrasa- « querelle »46 + *swinþa « fort, vigoureux » (got. swinþs, vieux-saxon swiđ)47.

13 Le germanique oriental et, par conséquent, la langue burgonde également se distinguent du germanique occidental, par exemple du francique et de l’alémanique, en plus par des caractéristiques phonétiques, par exemple la conservation du phonème germanique [z], un s sonore qui s’est transformé en [r] en germanique occidental48 : • a. 606/607 : Gaissefredo datif, comes dans la région de Vienne49 < *Gaiza-friþu- formé du germanique *gaiza- « javelot » (vieux-norrois geirr, vieil-angl. gār, vieux-saxon et vha gēr)50 + friþu- « paix »51 ; • a. 517 : Usgildi génitif, comes52 < *Uz-gelda- « vengeur »53, formé avec le préfixe germanique *uz-, en germ. occidental ur- « dès le début » (préfixe utilisé également pour exprimer une intensification comme dans le got. us-gildan « rendre la pareille, venger »)54 ; en outre avec la transformation du [e] en [i] en germanique oriental55 ; • le nom de lieu Oysenans (dép. du Jura, canton de Bletterans, commune de Ruffey-sur- Seille) : a. 852 Ausinincus < *Auzīn-ingôs du NP Auz-īn formé sur le germanique *auza- « briller » + suffixe -n56 ; • le nom de lieu Beaumotte-Aubertans (dép. du Jura, canton de Montbozon), a. 1170 Ozbatens, a. 1231 Ozbartans, a. 1242 Ozbertans : < *Auzberht-ingôs du NP *Auza-berhta- formé sur le germanique *auza- « briller » + germanique *berhta- « brillant, célèbre »57 ; • le nom de lieu (dép. du Doubs, canton de ) : a. 1293 Ayssens, a. 1441 Yssans < *Aiz-ingôs du NP Aiza formé sur le germanique *aizō- (vha ēra) « honneur »58.

14 Il ne peut donc y avoir de doute que les porteurs de NP contenus dans les noms de lieux en -ingos en Bourgogne, plus précisément dans le pays des Dombes, en Franche-Comté et dans la partie occidentale de la Suisse étaient pour l’essentiel des Germains orientaux, surtout des Burgondes probablement, qui, depuis leur installation par le général romain Aetius en 443 dans la Sabaudia autour du lac de Genève, étendirent leur regnum aux cités romaines de Lyon, Vienne, Mâcon, Chalon, Langres (Dijon) et Besançon, jusqu’à ce qu’il fût définitivement incorporé en 534 au grand royaume mérovingien59. Certes, le suffixe -ingos a bien pu vivre encore quelque temps après la fin du royaume des Burgondes et était peut-être encore productif dans des bouches romanes après la disparition définitive de la langue burgonde dans la seconde moitié du VIe siècle60. Toutefois, les découvertes archéologiques réalisées dans les nécropoles de plein champ appartenant aux lieux en -ingos montrent que ces nécropoles existent dès les Ve-VIe siècles61.

15 Dans la couche supérieure de la société burgonde, mais pas uniquement dans ce groupe62, on trouvait aussi des noms contenant des éléments germaniques occidentaux : par exemple dans la liste des comtes du Liber constitutionum – c’est-à-dire la lex Burgundionum63 – de l’année 517, qui comprenait aussi des comites portant des noms masculins germaniques occidentaux en -o, peut-être originaires du pays des Hattuaires et des Chamaves, comme Siggo et Offo, et on trouve même un nom roman Silvanus parmi les trente et un comtes64. De même, on rencontre des noms germaniques occidentaux, dont on suppose qu’ils sont ceux des propriétaires fonciers, dans les noms d’établissements en -ingos, par exemple :

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 70

• nom de lieu Augerans (dép. du Jura, canton de Montbarrey), a. 1092 Algerens < *Alagair- ingôs du NP germ. occidental *Ala-gaira- avec germanique occidental [r] < [z] < * -gaiza formé sur le germanique *ala- « plein, entier »65 + *gaiza- « lance, javelot »66 ; • nom de lieu (dép. du Doubs, canton de Marchaux), a. 1284 Germondans < *Gairamund-ingôs du NP *Gaira-munda formé sur le germanique occidental *gaira- < germ. *gaiza- « lance, javelot » + *munda- « protection »67.

16 On remarque tout de suite que se trouve en plein pagus des Chamaves, directement au nord du Doubs et de la forêt de Chaux, un groupe très compact de noms d’établissements se terminant par le suffixe germanique occidental -ingas, qui, comme ailleurs dans le royaume franc, a évolué en bouche romane en -enge(s), -ange(s) (cf. carte 7)68 : 1. Amange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 784 Emeningas, a. 1275 Amenges, a. 1280 Amanges < *Em(m)īn-ingas du NP Emmīn(o) avec assimilation de [rm] > [mm] formé sur le germanique *ermina- « grand, sublime » 69. Si la référence de 784 ne se rapporte pas à Amange, il faut reconstruire *Am-ingas à partir du NP Amo formé sur le germanique *ama- (vieux-norrois ama « presser, tracasser » ; vha emmizîg < emiz- < amiz « persistant, assidu »)70 ; 2. Archelange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 1250 Archeleinges, a. 1263 Archeleinge < *Erkil-ingas du NP Erkil(o) formé sur le germanique *erk- < *erkna- « sublime »71 + suffixe -l ; 3. Audelange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 1177 Audelengis < *Audil-ingas du NP Audilo < germ. *auda- « possession »72 + suffixe -l ; 4. †Autange (dép. du Jura, canton de , commune de Frasne) : < *Aust-ingas du NP Austo ? formé sur le germanique *austa- « Osten »73 ; 5. Auxange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 784 Autsidingus < *Audasid-ingas du NP *Auda-sedu- formé sur le germanique *auda- « possession » + *sedu- « usage, coutume »74 ; 6. (dép. du Doubs, canton de Saint-Vit) : a. 1160 Bertelenges, a. 1271 Berthelainges < *Berhtil-ingas du NP Berhtilo formé sur le germanique *berhta- « brillant, célèbre »75 + suffixe -l ; 7. Berthoulange, Bathoulange (dép. du Jura, canton d’Authume, commune d’Auxange) : a. 1130 Bertoldenges, ± 1150 Bertoldenges < *Berhtwald-ingas du NP *Berht-walda- < germ. *berhta- « brillant, célèbre » + *-walda- « souverain »76 ; 8. †Bulliange (dép. du Jura, canton d’Authume, commune d’Amange) : probablement du NP *Budil(o) ; 9. (dép. du Doubs, canton de Saint-Vit) : a. 1089 et 1111 Gelerengis, a. 1137 Jalerenges, a. 1275 Galerenges < *Gailhar-ingas du NP Gaila-harja- < germ. *gaila- « vivant, joyeux » (got. gailjan « réjouir »)77 avec substitution phonétique romane [a] pour germ. [ai] + *harja- « armée, guerrier »78 ; 10. Louvatange (dép. du Jura, canton d’Authume) : déjà mentionné en 933 comme Louetenges dans le comitatus d’Amous, XIIe siècle Lovatenges < *Laubahad-ingas du NP *Lauba-hadu- < germ. *lauba- « cher »79 + *hadu- « combat, combattant »80 ; 11. Malange (dép. du Jura, canton d’Authume) : avant a. 1000 Malingus, a. 1120 Malanges, XIIe siècle Maalenges < *Madal-ingas du NP Madalo formé sur le germanique *maþal- « assemblée, tribunal, discours devant le tribunal »81 ;

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 71

12. Offlanges (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 908 Offanengos, a. 1120 Offange, XIIIe siècle Offlange < *Offan-ingas du NP Offan, Uffan < germ. oriental (got.) ufjo « superflus, surabondant, riche, fier »82 + suffixe -n ; 13. Romange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 852/855 Romingus, XIIe siècle Reumanges < *Hrōm-ingas du NP *Hrōmo formé sur le germanique *hrōma- « gloire »83 ; 14. Rouffange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 1140 Rofenges < du NP Rōf(fo) ; probablement une abréviation de deux radicaux provenant d’un NP comme Rōd-frid, etc., ce type d’abréviations se rencontrant surtout en germanique occidental et se manifestant relativement tard84 ; 15. Sermange (dép. du Jura, canton d’Authume) : a. 1120 Sarmangis, Salmangis, a. 1351, Sermanges, XIVe siècle Sermaige < *Sarw-ingas du NP *Sarwo formé sur le germanique *sarwa- (got. sarwa pluriel « armure, arme », vha saro « armure »)85 ; 16. Vassange (dép. du Jura, canton d’Authume, commune de Gendrey) : a. 1141 Waschenges, a. 1204 Waschenges < *Wask-ingas du NP Wasko « Basque »86 ; 17. Vriange (dép. du Jura, canton d’Authume) : XIIe siècle Wurrienges, a. 1339 Verranges < *Wulþar-ingas du NP Wulþar formé sur le germanique *wulþar « valeur, gloire » (got. wulþrs)87 ; 18. †Walerange (dép. du Jura, canton d’Authume, commune de Sermange) : a. 1182 Valirenges < Walahar-ingas du NP *Wala-harja- formé sur le germanique *wala- « mort » + *-harja- « guerrier »88 ; 19. †Willaufange (dép. du Jura, canton d’Authume, commune de Gendrey) : a. 1140 Willelfenges, a. 1181 Willerfenges < *Wiljawulf-ingas du NP *Wilja-wulfa- formé sur le germanique occidental *wiljôn « volonté, souhait » + *wulfa- « loup »89 ; 20. †Woufflange (dép. du Jura, canton d’Authume, commune de Montmirey-le- Château) : a. 1172 Vofflenges, a. 1182 Wufflenges, Wulliflengis < *Wulfil-ingas du NP Wulf-ilo < germ. *wulfa- « loup » + suffixe -l90.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 72

Carte 7 – Toponymes de l’Amous

17 Quelques-uns des noms en -ange se trouvent aussi à l’extérieur de cette aire compacte, aux marges de l’Amous : 21. Vellefrange (dép. de la Haute-Saône, canton de Mamay, commune de Vellefrey-et- Vellefrange) : a. 1189 Vilefrainge, XIIIe siècle Vilefrange < *Wiljafrid-ingas du NP *Wilja- friduz < germ. occidental *wilja- « volonté, souhait »91 + *-fridu- « paix »92 ; 22. Bantanges (dép. de la Saône-et-Loire, canton de Cuiseaux) : a. 833 Bandingas, XIIIe siècle Bandenges < *Band-ingas du NP Bando < germ. *bandwa- « signe, bannière »93 ; 23. Branges (dép. de la Saône-et-Loire, canton de Louhans) : a. 926 Brilanga, a. 957 Brengis, a. 1200 Brengiae < *Bridil-ingas du NP *Bridil(o) < germ. occidental *brigdila- (vha brîdil, ancien saxon briddil, ancien angl. brîdel, moyen français bride) « bride ». Cf. le nom de lieu bavarois Prittriching (arr. Landsberg), XIIe siècle Bridirich-ingen94 ; 24. Louhans (sous-préfecture du dép. de la Saône-et-Loire) : a. 878 Louingum (dat. plur.), a. 915 Lauuingum, a. 941 Louincum < *Laub-ingum (dat. plur.) du NP *Laubo < germ. *lauba- « cher »95 ; 25. Bousselange (dép. de la Côte-d’Or, canton de Brazey-en-Plaine) : a. 1170 Bocelenges < *Bôdsil-ingas du NP Bôd-s-o, forme hypocoristique du nom Bôdo < germ. *bauda- « commander » + suffixe -l96 ; 26. Jallange (dép. de la Côte-d’Or, canton de Brazey-en-Plaine) : a. 784 Jadangos (< *Jalangos ?), a. 1294 Jaulanges < *Gail(l-)ingas du NP Gail(l)o < germ.*gaila- « vivant, joyeux » (avec substitution romane [a] pour germ. [ai])97.

18 La carte 7 montre nettement que les noms d’établissements en -ange se concentrent sur les terres de colonisation situées entre deux rivières, l’Ognon et le Doubs, entre le massif forestier de la Serre, la forêt d’Arne et la forêt de Chaux, tandis que les toponymes en -ans se trouvent bien plus concentrés dans le secteur des anciens noms gallo-romains en -(i)acum. On ne pourra guère s’interdire de mettre en relation ce

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 73

groupe germanique occidental de noms d’établissements en -ingas avec les Chamaves, en tant que groupe donnant son nom à ce pagus. Sont aussi à prendre en considération les trois noms d’établissements en germanique -þorpa, qui ont des équivalents anciens dans la basse vallée du Rhin, en Westphalie et aux Pays-Bas98 : 27. Torpes (dép. de la Saône-et-Loire, canton de Pierre-de-Bresse), au sud de Neublans- Abergement : a. 1111 Torpa, a. 1315 Torpe ; 28. Torpes (dép. du Doubs, canton de Besançon), sur le Doubs, au nord de Boussières : a. 1187 Torpa, a. 1292 Torpe ; 29. Antorpe (dép. du Doubs, canton et commune de Saint-Vit), sur le Doubs, à l’est d’Évans et Salans : a. 1293 Entorpes, à rapprocher de *ana « en haut, placé plus haut ». Le village surplombe une voie romaine de Besançon à Chalon-sur-Saône99.

L’implantation des Chamaves

19 À partir de quand doit-on faire commencer l’implantation des Chamaves ? On cite volontiers la nouvelle rapportée par le panégyriste Eumenius, selon qui Constance Chlore (293-306), à la fin du IIIe siècle, après ses victoires dans la basse vallée du Rhin, a transplanté des Chamaves et des Frisons dans la région de Langres100. Cependant est-on vraiment autorisé, sans autres indices, à assimiler cette nouvelle à une implantation de Chamaves dans la civitas de Besançon ?

20 On a effectivement recouru à différents toponymes formés sur des noms de peuples, dans le secteur de Besançon et dans toute la Séquanie, pour prouver l’installation par les Romains de lètes et de déditices (dediticii). Ainsi Bourguignon près de Chatey (dép. du Doubs, canton de Pont-de-Roide-Vermondans) pour prouver une « implantation des lètes burgondes », Goux-lès- < *Gothis (ibid.) celle des lètes gotiques101 ; Franxault (dép. de la Côte-d’Or, canton de Brazey-en-Plaine), vers 1113-1119 Franceis < *(apud) Franciscos celle des lètes franques102 ; Soissons-sur-Nacey (dép. de la Côte-d’Or), a. 1239 Saixons, a. 1243 Sessons, ca. 1250 Saissuns < *(apud) Saxones celle des lètes saxons103. Même Amage près d’Annegray (dép. de la Haute-Saône, canton de Faucogney) < *Hamāvia (?) a été considéré comme un « établissement de déditices chamaves »104. Toutefois, là aussi, il faut se demander si ces hypothèses peuvent être établies avec certitude sans un éclairage extra-linguistique. On ne peut certainement pas exclure si facilement une implantation conduite par les rois mérovingiens au haut Moyen Âge. Et l’implantation de Goths près de Dambelin sur le Doubs et dans d’autres lieux de la Séquanie ne peut-elle pas être due à l’afflux de Wisigoths dans le regnum des Burgondes, comme le Liber constitutionum de l’année 517 le mentionne ?

21 Par conséquent, la coïncidence et la corrélation avec des facteurs extra-linguistiques, par exemple avec des découvertes archéologiques, doivent rester des paramètres déterminants. Et ces découvertes parlent effectivement un langage très clair : quatre sur vingt, soit 20 % des toponymes en -ingas analysés ci-dessus, sont à mettre en corrélation avec des nécropoles de l’époque mérovingienne. Or, celles-ci ne commencent à exister qu’au début du VIIe siècle105. À cette époque, les chroniques commencent aussi à témoigner de la présence des Scotinges et des Varasques. Cependant, l’arrivée de ces derniers, à la lumière de leur adhésion à la doctrine bonosiaque, devrait remonter au début du VIe siècle, c’est-à-dire à l’époque du regnum burgonde et, comme d’après leur Origo ils ont combattu les Burgondes, elle devrait être en rapport avec les tentatives des rois francs d’endiguer l’expansion burgonde106. La

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 74

genèse du pagus Chamavorum pourrait être due à de telles tentatives, peut-être un peu plus tardives, de contrôler la turbulente Bourgogne. Reçu : 27 juillet 2017 – Accepté : 2 septembre 2017

NOTES

1. Le présent article est un remaniement de W. HAUBRICHS, « Chamaven, Hattuarier, Warasken, Skutingen und Burgunden in der Onomastik Nordburgunds. Eine linguistische Spurensuche », in W. CZACHUR et M. CZYZEWSKA (dir.), Vom Wort zum Text. Studien zur deutschen Sprache und Kultur. Festschrift J. Wiktorowicz, Varsovie, 2008, p. 621-637. Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à Philippe Thierry (Paris) pour l’excellente traduction de ce texte. 2. K. ZEUSS, Die Deutschen und ihre Nachbarstämme, Munich, 1837, p. 585 ; A. LONGNON, Atlas historique de la France, Paris, 1907, p. 154 sq. ; M. CHAUME, Les origines du duché de Bourgogne, seconde partie (géographie historique), Dijon, 1927 et 1937, réimpr. Aalen, 1977, p. 771 ; O. PERRIN, Les Burgondes. Leur histoire, des origines à la fin du premier Royaume (534), Neuchâtel, 1968, p. 352 sq. ; G. MOYSE, « La Bourgogne septentrionale et particulièrement le diocèse de Besançon », in E. EWIG et J. WERNER (dir.), Von der Spätantike zum frühen Mittelalter. Aktuelle Probleme in historischer und archäologischer Sicht, Sigmaringen, 1979, p. 467-480 : pour aller plus loin cf. J. MEYNIER, « Limites des anciennes divisions de la Séquanie », Mémoires de la Société d’émulation du Doubs, 6e série, 1 (1886), p. 98-107 ; J. MARILIER, « Testamentum Wideradi coenobii Flaviniacensis abbatis », Mémoires de la Société pour l’histoire du droit et des institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands, 23 (1970-1971), p. 57-72 ; K. WEBER, Die Formierung des Elsass im Regnum Francorum. Adel, Kirche und Königtum am Oberrhein in merowingischer und frühkarolingischer Zeit, Ostfildern, 2011, p. 46-48 ; ID., « Pagus und ducatus am südlichen Oberrhein in merowingischer und karolingischer Zeit », in S. BRATHER et J. DENDORFER (dir.), Grenzen, Räume und Identitäten. Der Oberrhein und seine Nachbarregionen von der Antike bis zum Hochmittelalter, Ostfildern, 2017, p. 411-434 ; ID., « Alsace and Burgundy : Spatial Patterns in the Early Middle Ages, c. 600-900 » [à paraître, à l’adresse http:// journals.openedition.org/cem/14838]. 3. W. GISI, « Scutingi und Warasci », in Anzeiger für Schweizerische Geschichte, 15 (1884), p. 383-392 ; J. MEYNIER, « Limites des anciennes divisions… », ibid., p. 102-104 (avec d’autres diplômes du XIIIe siècle) ; M. CHAUME, Les origines du duché…, ibid., p. 209 sq. ; W. HAUBRICHS, « Warasci », in Reallexikon der Germanischen Altertumskunde, 33 (2006), p. 258-261 ; cf. aussi J. MARILIER, « Testamentum Wideradi… », ibid. ; G. MOYSE, « Les origines du monachisme dans le diocèse de Besançon (Ve-Xe siècles) », Bibliothèque de l’École des chartes, 131 (1973), p. 21-104, 369-485, ici p. 26, n° VII (Tarcenay) ; p. 26 sq., n° XI (Reugny) ; p. 30, n° XXX (avec de nouveaux documents concernant la période avant 929, les années 944 et 941-942). Étymologiquement les Varasques, au sens vraisemblablement de « les vigilants », sont à rapprocher du germanique *wara- « attentif, vigilant ». On doit considérer comme erronée l’étymologie Waeraeskas « Les Frênes de l’alliance » proposée par J.-P. POLY et P. RICHÉ dans « Le Christ qu’aimaient les Francs », in Y. LEQUIN (dir.), Histoire des étrangers et de l’immigration en France, Paris, 1988, p. 81-103, ici p. 91. 4. Chronique de Frédégaire, éd. B. KRUSCH, MGH, Scriptores rerum Merovingicarum, 2, Hanovre, 1888, p. 130 : in pago… Scotingorum (vers 603-604).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 75

5. J. FINOT, « Note sur la contrée du comté de Bourgogne appelée pagus Scodingorum », Bibliothèque de l’École des chartes, 33 (1872), p. 289-294 ; W. GISI, « Scutingi… », op. cit. ; J. MEYNIER, « Limites des anciennes divisions… », op. cit., p. 104 sq. ; M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 185 ; W. HAUBRICHS, « Scutingi », in Reallexikon der Germanischen Altertumskunde, 27 (2004), p. 633-634, ici p. 633 sq. On doit considérer comme erronée l’étymologie *ScuwOdingas, qui signifierait « d’Odings qui surveillent », proposée par J.-P. POLY, « Le premier roi des Francs. La loi salique et le pouvoir royal à la fin de l’Empire », in G. CONSTABLE et M. ROUCHE (dir.), Auctoritas. Mélanges offerts à Olivier Guillot, Paris, 2006, p. 97-128, ici p. 110. 6. M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 895-908 ; G. NEUMANN et H. VON PETRIKOVITS, « Chattwarier », Reallexikon der Germanischen Altertumskunde, 4 (1981), p. 391-393, ici p. 392 sq. 7. M. SCHÖNFELD, Wörterbuch der altgermanischen Personennamen und Völkernamen, Heidelberg, 1911 [réimpr. 1965], p. 131 ; G. NEUMANN et H. VON PETRIKOVITS, « Chattwarier », ibid., p. 391 sq. On doit considérer comme erronée l’étymologie « des Francs Hattehare “les Gris de Hatti” » chez J.-P. POLY, « Le Christ qu’aimaient les Francs… », op. cit., p. 92, qui, il est vrai, dans son article « Le premier roi des Francs… », op. cit., p. 110, avec *Hatteware « les habitants (chez) les Hatte » s’approche de la dérivation acceptable en linguistique. 8. J. MEYNIER, « Limites des anciennes divisions… », op. cit., p. 104 sq. ; cf. les vues d’ensemble chez J. MEYNIER, ibid., p. 105 sq. ; M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 1245-1249. Il existe encore un diplôme de l’année 933 dans lequel le diacre Alcherius offre à l’Église de Besançon ses possessions à Louvatange (dép. du Jura, canton d’Authume) situé dans le comitatus de l’Amous. Cf. G. MOYSE, « Les origines du monachisme… », op. cit., p. 27, n° XVI. 9. J. M. PARDESSUS, Diplomata, chartae, epistolae, leges aliaque instrumenta ad res gallo-francicas spectantia, t. 2, Paris, 1849 [réimpr. Aalen, 1969], p. 399-402, n° 587 ; The Cartulary of Flavigny 717-1113, éd. C. B. BOUCHARD, Cambridge (Mass.), 1991 (Medieval Academy Books, 99), n° 2 et 58. 10. J. M. PARDESSUS, Diplomata…, ibid ., p. 323-327, n° 514 ; J. MARILIER, « Notes sur la tradition textuelle des testaments de Flavigny », Mémoires de la Société pour l’histoire du droit et des institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands, 23 (1962), p. 185-199 ; ID., « Testamentum Wideradi… », op. cit. ; U. NONN, « Merowingische Testamente. Studien zum Fortleben einer römischen Urkundenform im Frankenreich », Archiv für Diplomatik, 18 (1972), p. 1-129, ici p. 110-121 ; The Cartulary of Flavigny…, ibid., n° 1 et 57. 11. G. MOYSE, « Les origines du monachisme… », op. cit., p. 36 sq., n° LV ; R. LOCATELLI et G. MOYSE, « Le “Cartulaire de Saint-Claude” constitué par Pierre-François Chifflet », in L. DELOBETTE et P. DELSALLE (dir.), Autour de Chifflet. Aux origines de l’érudition en Franche-Comté, Besançon, 2007, p. 165-202, n° 6 ; B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden des Jura-Klosters Saint- Claude », Archiv für Diplomatik, 58 (2012), p. 15-56, ici p. 39-41, n° 1. 12. R. LOCATELLI et G. MOYSE, « Le “Cartulaire de Saint-Claude”… », ibid., n° 5 ; B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden… », ibid., p. 41-45, n° 2. 13. G. MOYSE, « Les origines du monachisme… », op. cit., p. 37, n° LVII (version courte) ; R. LOCATELLI et G. MOYSE, « Le “Cartulaire de Saint-Claude”… », ibid., n° 4 ; B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden… », ibid., p. 45-47, n° 3. 14. G. MOYSE, « Les origines du monachisme… », op. cit., p. 37, n° LVII (version longue) ; M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 1247 ; B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden… », op. cit., p. 47-50, n° 4. 15. R. POUPARDIN, Le royaume de Bourgogne (888-1038). Étude sur les origines du royaume d’Arles, thèse, Paris, 1907 [réimp. Genève, 1974], p. 3 ; B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden… », op. cit., p. 30. Annales de Saint-Bertin, éd. F. Grat et alii, Paris, 1964, a. 839. 16. M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 1247.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 76

17. Die Urkunden Lothars I. und Lothars II., éd. T. SCHIEFFER, MGH, DD Karolinorum, 3, Berlin/Zurich, 1966, Lothaire II, n° 27, p. 429. 18. Die Urkunden Lothars…, ibid., n° 32, p. 437. 19. R. POUPARDIN, Le royaume de Bourgogne…, op. cit., p. 4 ; B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden… », op. cit., p. 30. Annales de Saint-Bertin…, op. cit., a. 870. 20. M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 1248 sq. 21. M. CHAUME, Les origines du duché…, ibid., p. 1249. 22. M. CHAUME, Les origines du duché…, ibid. ; cf. G. MOYSE, « Les origines du monachisme… », op. cit., p. 27, n° XIII. 23. Gallia Christiana in provincias ecclesiasticas distributa, tomus quintus decimus, ubi de provincia Vesuntionensi agitur, condidit Bartholomaeus Hauréau, Paris, 1860, ici XV, p. 8, n° VII. 24. H. REICHERT, Lexikon der altgermanischen Namen, t. 1, Vienne, 1987, p. 170 (Cariatto a. 529 ; Cariatto < *Hariatto a. 585 ; Cariobaud < Hariobaud a. 383/392, etc.). 25. H. REICHERT, Lexikon…, ibid., p. 175. 26. R. E. KÜNZEL, D. P. BLOK et J. M. VERHOEFF, Lexicon van nederlandse toponiemen tot 1200, Amsterdam, 1988, p. 163. 27. G. NEUMANN et H. VON PETRIKOVITS, « Chamaver », Reallexikon der Germanischen Altertumskunde, t. 4 (1981), p. 368-370 ; R. SCHMIDT-WIEGAND « Lex Francorum Chamavorum », Handbuch zur Deutschen Rechtsgeschichte, 2 (1978), p. 1915-1916. Étymologiquement, *Hamawōz peut se rattacher probablement à *hamaz « vêtement, peau » (vieux-norrois hamr « peau », vieil-angl. hama « vêtement », moyen-bas-allemand ham « vêtement », vieil-haut-allemand [désormais vha] hamo « filet de pêche », vieux-frison hama « robe, habit », vha gund-hama « chemise de combat, cotte de mailles ») ; voir aussi got. ga-hamon « se vêtir » ; vieil-islandais hamask ganga « l’allure d’un Berserker, c’est-à-dire d’un guerrier-fauve ; s’envelopper (dans une figure d’animal) ». S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch der gotischen Sprache, Leyde, 1939, p. 6 ; V. OREL, A Handbook of Germanic Etymology, Leyde/Boston, 2003, p. 158 ; M. SCHÖNFELD, Wörterbuch , op. cit., p. 125 sq. ; voir aussi P. VON POLENZ, Landschaftsnamen und Bezirksnamen im frühmittelalterlichen Deutschland, t. 1, Marbourg, 1961, p. 20. Les Chamaves se considéraient vraisemblablement comme « des guerriers enveloppés de peaux (de bête) ». On doit considérer comme totalement erronée l’interprétation non explicitée *Ham-hàwe « éclaireurs (restés) à la maison », donnée par J.-P. POLY, « Le premier roi des Francs », op. cit., p. 108 ; elle n’est juste ni phonétiquement ni morphologiquement ni lexicologiquement. 28. Cf. pour les identifications M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 1245-1249 avec des corrections chez J. MARILIER, « Testamentum Wideradi… », op. cit. ; voir aussi des indications sur des diplômes tardifs du XIe siècle chez J. MEYNIER, « Limites des anciennes divisions… », op. cit., p. 105 sq. ; voir, en outre, B. KASTEN et W. HAUBRICHS, « Unedierte Privaturkunden… », op. cit., p. 39-56. 29. A. LONGNON, Atlas historique…, op. cit., p. 154 sq. ; M. CHAUME Les origines du duché…, op. cit., p. 1245 ; J. CALMETTE et E. CLOUZOT, Pouillés des provinces de Besançon, de Tarentaise et de Vienne, Paris, 1940, XXVII, XXIX sq. (en 1238 archidiaconatus de Amoys et non pas de Neublans). 30. Cf. pour ce type de nom M. BUCHMÜLLER-PFAFF, Siedlungsnamen zwischen Spätantike und frühem Mittelalter. Die -(i)acum-Namen der römischen Provinz Belgica Prima, Tübingen, 1990. 31. Cf. au sujet des Burgondes J. FAVROD, Histoire politique du royaume burgonde (443-534), Genève, 1997 ; L. STEINER, « Burgondes et Francs en Suisse Occidentale (Ve-VIIe siècle) : une présence germanique précoce, mais discrète », Revue suisse d’art et d’archéologie, 60 (2003), p. 65-74 ; R. KAISER, Die Burgunden, Stuttgart, 2004 ; K. ESCHER, Les Burgondes, Ier-VIe siècle après J.-C., Paris, 2006 ; V. GALLÉ (dir.), Die Burgunder : Ethnogenese und Assimilation eines Volkes, Worms, 2009 ; D. BILLOIN, K. ESCHER, H. GAILLARD DE SEMAINVILLE et P. GANDEL, « Contributions à la connaissance de l’implantation burgonde en Gaule au Ve siècle », Revue archéologique de l’Est, 59 (2010), p. 567-583.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 77

32. Cf. W. HAUBRICHS, « Burgundian Names, Burgundian Language », in I. N. WOOD (dir.), The Burgundians from the Migration Period to the Sixth Century. An Ethnographic Perspective, Woodbridge [sous presse] ; ID., « Ein namhaftes Volk, Burgundische Namen und Sprache des 5. und 6. Jahrhunderts », in V. GALLÉ (dir.), Die Burgunder…, ibid., p. 135-184 ; ID., « Akkulturation und Distanz. Germanische und romanische Personennamen im regnum der Burgunden », in M. BECHER (dir.), Völker, Reiche und Namen im frühen Mittelalter, Munich, 2010, p. 191-222 ; ID., « Sprachliche Integration, Sprachinseln und Sprachgrenzbildung im Bereich der östlichen Gallia. Das Beispiel der Burgunden und der Franken », in T. KÖLZER et R. SCHIEFFER (dir.), Von der Spätantike zum Frühmittelalter : Kontinuitäten und Brücken, Konzeptionen und Befunde, Ostfildern, 2009, p. 61-100 ; W. HAUBRICHS et M. PFISTER, « Burgundisch (Burgundian) », in U. AMMON et H. HAARMANN (dir.), Wieser- Enzyklopädie der Sprachen Westeuropas, Klagenfurt, 2016, t. 1, p. 73-80 ; voir aussi au sujet des noms d’établissements en -ingos E. GAMILLSCHEG, Romania Germanica. Sprach- und Siedlungsgeschichte der Germanen auf dem Boden des alten Römerreichs, t. 3, Berlin/Leipzig, 1936 ; M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 167-171 ; T. PERRENOT, La toponymie burgonde, Paris, 1942 ; cf. note 67. 33. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 455 sq. ; F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch der deutschen Sprache, Berlin/New York, 2002 (24e éd.), p. 893 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 379 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband zu Ernst Förstemann, Personennamen, Munich/ Hildesheim, 1968, p. 328, indique un parallèle alémanique avec le nom d’établissement Stühlingen (district de Waldshut), au XIe siècle Stuolingen à rapprocher du NP en vha. Stuolo formé par diphtongaison < *Stôlo. 34. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 423 sq. ; F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, ibid., p. 352 (Ge-sinde) ; M. SCHÖNFELD, Wörterbuch…, op. cit., p. 202 (Sende-fara), p. 207 sq. (Sinde-rith, Sind-ila, Sind-val) ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, ibid., p. 315 sq. 35. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 32 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 51 sq. 36. R. KAISER, Die Burgunden…, op. cit., p. 265. 37. Sur l’extension de *þewaz cf. W. HAUBRICHS, « Scutingi… », op. cit., p. 157-165 ; ID., « Warasci… », op. cit., p. 300-303. 38. Sur *walda- cf. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 443 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 379 sq. 39. Passio Sancti Sigismundi regis, Fredegarii et aliorum Chronica. Vitae sanctorum, éd. B. KRUSCH, MGH, Scriptores rerum Merovingicarum, 2, Hanovre, 1888, p. 329-340, c. 9, ici p. 338. 40. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 500. 41. M. SCHÖNFELD, Wörterbuch…, op. cit., p. 237 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 358 ; H. REICHERT, Lexikon der altgermanischen Namen, t. 1, p. 701 sq. ; N. WAGNER, « Gaisericus und Gesiric. Zu ai und au im späteren Ostgermanisch und bei Wulfila », Beiträge zur Namenforschung, 37 (2002), p. 259-270, ici p. 267. 42. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 501 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 424 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 358 sq. 43. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 365 sq. ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 274 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 259 sq. 44. M. SCHÖNFELD, Wörterbuch…, op. cit., p. 237 sq. et p. 240 ; H. REICHERT, Lexikon der altgermanischen Namen…, op. cit., p. 699-701, 713 sq. 45. Vita sancti Treverii monachi, c. III, 13, AA SS Januarii, t. 2, p. 399. Au sujet de *wulfa- « loup » cf. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 473 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 416 sq. 46. Cf. n. 41 et 43. 47. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 468 sq. ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 394 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 336 sq. 48. W. BRAUNE et I. REIFFENSTEIN, Althochdeutsche Grammatik, t. 1, Tübingen, 2004, § 77 sq.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 78

49. Vita Desiderii episcopi Viennensis (II), in Passiones vitaeque sanctorum aevi Merovingici, éd. B. KRUSCH, MGH, Scriptores rerum Merovingicarum, 3, Hanovre, 1896, p. 626-645, c. 8, ici p. 641. 50. F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit., p. 347 sq. ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 123 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 132-134. 51. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 115 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 124 sq. 52. Leges Burgundionum (Lex Gundobada), éd. L. R. VON SALIS, MGH, Leges nationum Germanicarum, 2.1, Hanovre, 1892, p. 34. 53. Sur *gelda-, *geldana- « rendre la pareille, venger », cf. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 130 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 146 sq. 54. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 161 et 532. 55. W. BRAUNE et I. REIFFENSTEIN, Althochdeutsche Grammatik…, op. cit., § 10. 56. H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 47 ; cf. F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit., p. 672 (Osten). 57. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 76 sq. ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 42 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 56. 58. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 27 sq. ; F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit., p. 228 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 11 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 105. 59. R. KAISER, Die Burgunden…, op. cit. 60. La conception privilégiée et défendue par les romanistes [E. SCHÜLE « Le problème burgonde vu par un romaniste », in Z. MARZYS (dir.), Actes du colloque de dialectologie franco-provençale, Neuchâtel/Genève, 1971, p. 27-55 ; W. MÜLLER, « Siedlungsgeschichte und Ortsnamen in der Suisse romande », in P. ERNST et al. (dir.), Ortsnamen und Siedlungsgeschichte, Vienne, 2002, p. 83-94 ; ID., « Alemannische Doppelnamen in der Suisse romande ? », in W. HAUBRICHS (dir.), Interferenz- Onomastik. Namen in Grenz- und Begegnungsräumen in Geschichte und Gegenwart, Sarrebruck, 2011, p. 151-162 ; A. KRISTOL et al., Lexikon der schweizerischen Gemeindenamen, Frauenfeld, 2005, p. 175 et passim], selon laquelle -ingôs est un suffixe d’emprunt originaire du royaume franc mérovingien, repris relativement tard et utilisé par les Gallo-Romains, ne résiste pas à l’épreuve des faits. Cette théorie n’est pas en mesure non plus d’expliquer comment il se fait qu’en dehors du territoire burgonde les noms d’établissements en -ens < *-ingos ne se rencontrent plus que dans la région wisigotique-germanique orientale autour de Toulouse, alors qu’en territoire véritablement franc on trouve seulement des formes en -enge, -ange < -*inga(s). Elle n’est pas en mesure non plus d’expliquer pourquoi dans ces noms d’établissements on trouve un nombre si élevé de noms de personnes spécifiquement germaniques orientaux. 61. Dans un colloque commun interdisciplinaire (1er semestre 2005-2006) sur « Les noms de lieux et l’histoire des implantations en Franche-Comté », Frauke Stein (université de la Sarre), que je remercie pour la communication de ses résultats, a pu dater les nécropoles mérovingiennes appartenant aux établissements en -ans (9 cas) dans trois cas, soit 33 %, de la seconde moitié du ve siècle ou du VIe siècle et, dans un cas, de la période entre 610 et 640. Les noms de ces établissements sont 1) Cramans, 2) †Vaddans, commune de Rochefort, 3) Évans, tous situés dans l’Amous, pour la strate la plus ancienne, le cas à dater plus tard se rapporte à 4) Bavans. 62. Des noms germaniques occidentaux sont aussi présents de manière caractéristique dans le groupe des liberti dans les inscriptions de l’espace burgonde autour de Vienne et Lyon. 63. G. BAESECKE, « Verhältnis der Handschriften der Lex Gundobada nach der Grafenliste », Zeitschrift der Savigny-Stiftung für Rechtsgeschichte, Germ. Abt., 59 (1939), p. 233-249. 64. W. HAUBRICHS « Akkulturation und Distanz… », op. cit. 65. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 13 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 27 sq. ; W. HAUBRICHS, « Nomen gentis. Die Volksbezeichnung der Alamannen », in J. JAEHRLING, U. MEVES et E. TIMM (dir.), Röllwagenbüchlein. Festschrift für Walter Röll, Tübingen, 2002, p. 19-32.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 79

66. Cf. n. 49. 67. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 13 ; F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit., p. 637 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 262. 68. Sur les noms en -ange, cf. E. MURET, « Les noms de lieu germaniques en -ens ou -ans ou -anges dans les pays de domination burgonde », Revue de linguistique romane, 4 (1928), p. 209-221, ici p. 217 sq. ; M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 173-177 ; F. LASSUS et G. TAVERDET, Noms de lieux de Franche-Comté. Introduction à la toponymie, Paris, 1995, p. 65 sq. ; X. GOUVERT, Problèmes et méthodes en toponymie française. Essais de linguistique historique sur les noms de lieux du Roannais, thèse de doctorat Paris-Sorbonne, 2008, p. 1011-1018 : ce travail méritoire souffre malheureusement d’un relatif manque de connaissances concernant la linguistique historique germanique, la recherche allemande récente et souvent les recherches régionales récentes. 69. Sur *ermena-, cf. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 85 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 108 sq. ; X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1015) identifie Emeningas avec Menange, « lieu-dit de la commune d’Annoire…, dont la forme actuelle s’explique aisément par une déglutination ». En l’absence de documentation ancienne, cette identification n’est que pure hypothèse. 70. H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit. , p. 31 sq. ; A. L. LLOYD, R. LÜHR et O. SPRINGER, Etymologisches Wörterbuch des Althochdeutschen, t. 2, Goettingen/Zurich, 1998, c. 1065-1067. La dérivation de Amanges d’un ancien *Amage < *Hamavia « lieu des Hamaves » (altéré « par le jeu de l’attraction paronymique »), postulé par X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1056) est invraisemblable. 71. Sur *erkna-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 25 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 84 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 107. Cf. aussi X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1012. 72. Sur *auda-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, ibid., p. 63 ; V. OREL, A Handbook…, ibid., p. 28 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, ibid., p. 43 sq. ; X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1012) reconstruit *Aldal-ingas du NP *Aldal non attesté, reconstruction qui n’est pas nécessaire. 73. X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1012. Sur *austa-, cf. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 30 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 48. 74. Sur *sedu-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 418 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 321 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 311. Cf. aussi X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013. 75. Cf. n. 55. X. GOUVERT ( Problèmes et méthodes…, op. cit. , p. 1012) reconstruit comme NP un *Berhtal non attesté. 76. Cf. n. 37 ; X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013. 77. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 185 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 122 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 131 sq. 78. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 247 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 163 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 174-176 ; X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit. , p. 1012. 79. Sur *lauba-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 188 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 273 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 227 sq. 80. Sur *haþu-, cf. V. OREL, A Handbook…, ibid., p. 165 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 177-179. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013) dérive le toponyme d’un NP *Hluda- hwat, qui n’est pas attesté, et, en outre, invraisemblable. 81. Sur *madal- < *maþlan (got. maþl), cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 349 sq. ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 263 sq. ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 254. Cf. aussi X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 80

82. Cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 512 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 364 ; F. HEIDERMANNS, Etymologisches Wörterbuch der germanischen Primäradjektive, Berlin/New York, 1993, p. 638 sq. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013) reconstruit *Audulf-ingas du NP *Audulf, reconstruction qui n’est pas nécessaire. 83. Sur *hrōma-, terme uniquement germ. occidental, cf. F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit., p. 775 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 201 sq. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013) reconstruit *Hrôdamod-ingas du NP *Hrôdamôd, reconstruction qui n’est pas nécessaire. 84. Sur les abréviations de deux radicaux, cf. H. KAUFMANN, Untersuchungen zu altdeutschen Rufnamen, Munich, 1965, p. 32 sq. ; S. SONDEREGGER, « Prinzipien germanischer Namengebung », in D. GEUENICH, W. HAUBRICHS et J. JARNUT (dir.), Nomen et gens. Zur historischen Aussagekraft frühmittelalterlicher Personennamen, Berlin/New York, 1997, p. 1-29, ici p. 20-22. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013) reconstruit *Rolfenges < *Hrôdulf-ingas du NP *Hrôdulf, reconstruction qui semble un peu trop compliquée. 85. Sur *sarwa-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 411 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 319 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 303. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1019) privilégie la forme tardive Sermaige : « Il est hors de doute que Sermange doit être ramené au prototype latin *Sarmaticas (terras) “terre des Sarmates” et interprété comme le vestige toponymique » d’un établissement de lètes iraniens du Bas-Empire. Pour Gouvert, « le passage de la finale -aige à -ange est évidemment l’effet de l’attraction analogique des vingt toponymes en - ange qui entourent Sermange ». Vu les formes assez anciennes en -angis, cette théorie reste bien problématique. 86. Je suis ici X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013), mais la forme a. 1182 Wasilenges, qu’il cite, ne peut être identifiée avec Vassange. 87. Sur *wulþar-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 577 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 417. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1013) reconstruit *Werrienges < Werrowig-ingas du NP impossible et non attesté *Werro-wig-. 88. Sur *wala- « mort », cf. F. KLUGE et E. SEEBOLD, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit., p. 970. Cf. aussi X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1014. 89. Cf. n. 44 ; X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1014. 90. Cf. X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1014. 91. Sur *welja-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 563 ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 453 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 403 sq. 92. Cf. n. 49. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1011 sq.) croit que Vellefrange, comme nom de lieu, « ne saurait être séparé de Vellefrey… avec lequel il forme un couple toponymique référant primitivement à un fundus bicéphale ». Mais cette théorie me semble impossible à prouver. Cf. contre cela : La Haute-Saône, nouveau dictionnaire des communes, t. 6, Vesoul, 1974, p. 52. 93. Sur *bandwa-, cf. S. FEIST, Vergleichendes Wörterbuch…, op. cit., p. 79 sq. ; V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 35. Cf. aussi X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1014. 94. H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 71 ; A. L. LLOYD, R. LÜHR et O. SPRINGER, Etymologisches Wörterbuch…, op. cit. , t. 2, c. 349 sq. ; E. GAMILLSCHEG, Etymologisches Wörterbuch der französischen Sprache, Heidelberg, 1969 (2e éd.), p. 152. X. GOUVERT ( Problèmes et méthodes…, op. cit. , p. 1014) reconstruit un NP *Brâdo, non attesté et invraisemblable, qui, en outre, ne convient pas avec le [i] dans Brilanga. 95. Cf. n. 78 ; H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 227. 96. H. KAUFMANN, Ergänzungsband…, op. cit., p. 56. Cf. X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1014.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 81

97. Cf. n. 77 ; X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1014. 98. Cf. F. LASSUS et G. TAVERDET, Noms de lieux de Franche-Comté…, op. cit ., p. 68 ; X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1025 sq. et 1039. Les formes avec initial sont témoins d’une substitution phonétique romane pour la fricative dentale germanique. Pour la Rhénanie, cf. H. DITTMAIER, Die linksrheinischen Ortsnamen auf -dorf und -heim, Bonn, 1979. 99. V. OREL, A Handbook…, op. cit., p. 17 ; A. L. LLOYD et O. SPRINGER, Etymologisches Wörterbuch des Althochdeutschen, t. I, Goettingen/Zurich, 1988, p. 213-215. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1026) pense à une dérivation du germ. *anda- « contre, vis-à-vis ». 100. K. ZEUSS, Die Deutschen und ihre Nachbarstämme, Munich, 1837, p. 582 ; M. CHAUME, Les origines du duché…, op. cit., p. 148 sq. ; G. MOYSE, « La Bourgogne septentrionale… », op. cit., p. 468. 101. J.-P. CHAMBON, « Zones d’implantation publique au haut Moyen Âge précoce dans le nord de la cité de Besançon. L’apport de l’analyse diachronique des noms de lieux », in D. HÄGERMANN, W. HAUBRICHS et J. JARNUT (dir.), Akkulturation. Probleme einer germanisch-romanischen Kultursynthese in Spätantike und frühem Mittelalter, Berlin/New York, 2004, p. 221-256, ici p. 228 sq. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1029 sq.) trouve un autre Goux dans la commune de Dole « au confluent du Doubs et de la Loue ». 102. X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1031 et 1050. 103. X. GOUVERT, Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1050 sq. 104. J.-P. CHAMBON, « Sur quelques toponymes de la région de Luxeuil (Haute-Saône) », Bulletin de la Société d’histoire et d’archéologie de l’arrondissement de Lure, 20 (2001), p. 9-18, ici p. 11 sq. X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1055-1058) dérive encore d’autres toponymes (presque toujours en l’absence de documentation ancienne) de l’ethnonyme des Hamaves. Toutes ces reconstructions sont problématiques. 105. D’après la communication amicale de Frauke Stein (université de la Sarre), ce sont pour la période 610-640 : Vriange dans l’Amous et †Boulange (commune de Saint-Germain-lès-Arlay) au nord de Lons-le-Saunier ; pour la période 640-680 : †Bulliange dans l’Amous, pas spécifiques du VIIe siècle, Audelange et Malange dans l’Amous, ce qui convient bien avec la datation philologique des toponymes en -ange par X. GOUVERT (Problèmes et méthodes…, op. cit., p. 1042 et 1049) : « On peut par conséquent tenir pour acquise, avec un assez haut degré de certitude, la fourchette ca 550 - ca 700 comme date de fixation des toponymes en ingas de la Séquanie. » 106. W. HAUBRICHS, « Warasci… », op. cit., p. 260.

RÉSUMÉS

Dans le nord de la Bourgogne, entre Besançon et Dijon, notamment dans la région de la Franche- Comté, on trouve quatre pagi mérovingiens, dont la dénomination rappelle celle des petites gentes germaniques : le Varais, les Varasques, qui, selon leur origo, sont venus après la fin du Ve siècle de la région de Ratisbonne (sur le Danube) ; l’Écouens, les Scotinges, attestés depuis le VIIe siècle ; l’Attuyer, près de Dijon, les Hattuariens attestés depuis le milieu du VIIe siècle ; et, enfin, peu étudié jusqu’ici, l’Amous – autour de Gray, Dole et Neublans –, rappelant les Chamaves, attestés en 717. On rencontre ces deux dernières gentes également en Rhénanie septentrionale et en Westphalie en lien avec les Francs. Cet article cherche d’abord à définir l’extension spatiale du pagus *Hamavorum par l’analyse et l’identification linguistiques des lieux attestés dans les chartes. À l’inverse du reste de la Franche-

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 82

Comté, la plupart des noms de lieux y sont d’origine gallo-romaine, peu relèvent du germanique oriental/bourguignon. On trouve cependant de nombreux toponymes en germanique occidental/ francique terminant en -ingas (-ange en français) et en *thorpa- (hameau, village). La comparaison avec les études archéologiques et historiques conduit à comprendre cette occupation du sol par les Chamaves, qui est attestée relativement tard, dans le contexte des tentatives franques de pacification du royaume des Burgondes, soumis seulement en 534 de façon définitive.

INDEX

Mots-clés : Amous, Besançon, Burgondes, Chalon, Germanique occidental, Germanique oriental, Saint-Claude, toponymes

AUTEURS

WOLFGANG HAUBRICHS Professeur émérite de philologie germanique, université de la Sarre, Sarrebruck

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 83

Burgund und das « unsichtbare Römische Reich » im Spiegel der sogenannten merowingischen Monetarmünzen. Eine Anmerkung1

Jürgen Strothmann

NOTE DE L’ÉDITEUR

Cet article fait référence à la carte 1 du dossier cartographique. Cette carte est réinsérée dans le corps du texte et le lien vers le dossier cartographique est donné en document annexe.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 84

1 Burgund ist im Frühmittelalter wohl nur als Bezeichnung für einen Raum verstehbar, der sich unmittelbar aus einem politischen Zusammenhang ergibt und auch nur über diesen definierbar ist. Als absolute geographisch fassbare Größe möchte ich es nicht definieren müssen. Denn die geographische Zugehörigkeit zum Reich der Burgunder ist zunächst nur als ein Ausdruck eben dieser politischen Gruppe greifbar2, wird dann im Reich der Merowinger zwar zunächst im Ganzen erhalten, um dann bereits im 7. Jahrhundert keine geographische Integrität mehr aufzuweisen. An Burgund zeigt sich sehr deutlich, dass die fränkischen Teilreiche in der Zeit der Merowinger keine unmittelbare politische Qualität und schon gar keine geographische Integrität besitzen. Sie sind Ergebnisse eines beständigen – nicht immer friedlichen – sozialen Aushandlungsprozesses unter den Eliten.

2 Die Teilreiche sind in der Merowingerzeit eben nicht die politischen Grundeinheiten, als die sie seit der Karolingerzeit gelten können. Das hat mit der politischen Überformung dieser sozialen Aushandlungsprozesse zu tun, die in der Karolingerzeit letztlich zu neuen Reichsbildungen führten.

Abb. 1a-b – Triens, Chalon-sur-Saône, 1,21 g, 14 mm

OABIL-ONNO / AVSTADIVS M, CA im Punktkreis für « Cabilonno ». Münzkabinett der Staatlichen Museen zu Berlin, Objektnummer 18207480. Abbildung und Beschreibung in K. DAHMEN und B. KLUGE, « Bestandskatalog der merowingischen Münzen des Münzkabinetts der Staatlichen Museen zu Berlin », in A. GREULE, J. JARNUT, B. KLUGE und M. SELIG (Hg.), Die merowingischen Monetarmünzen als interdisziplinär-mediaevistische Herausforderung, Paderborn, 2017, S. 155-292, Nr. 300, S. 234 / Tafel XIV (Foto von Lutz-Jürgen Lübke).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 85

Abb. 2a-b – Triens, Chalon-sur-Saône, 1,18 g, 12 mm

CABIL-ONN / VVINTRIO MON. Münzkabinett der Staatlichen Museen zu Berlin, Objektnummer 18202306. Abbildung und Beschreibung in K. DAHMEN und B. KLUGE, « Bestandskatalog der merowingischen… », op. cit., Nr. 307, S. 237 / Tafel XIV (Foto von Lutz-Jürgen Lübke).

Abb. 3a-b – Triens, Lausanne, 1,21 g, 13 mm

LAVSONAN – CI -V[E]TAI[..]IZ / RAGNVIFVS MVNETARIVS. Münzkabinett der Staatlichen Museen zu Berlin, Objektnummer 18207494. Abbildung und Beschreibung in K. DAHMEN und B. KLUGE, « Bestandskatalog der merowingischen… », op. cit., Nr. 315, S. 239 / Tafel XIV (Foto von Lutz-Jürgen Lübke).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 86

Abb. 4a-b – Triens, Sion (Valais), 1,22 g, 12 mm

GRATVS MVNITARIVS / SIDVNIS CIVETATE FIT. Münzkabinett der Staatlichen Museen zu Berlin, Objektnummer 18207526. Abbildung und Beschreibung in K. DAHMEN und B. KLUGE, « Bestandskatalog der merowingischen… », op. cit., Nr. 326, S. 243 / Tafel XV (Foto von Lutz-Jürgen Lübke).

3 Die sogenannten « merowingischen Monetarmünzen »3 zeigen für das 7. Jahrhundert sehr deutlich, dass die politischen und wirtschaftlichen Grundeinheiten Galliens in der Merowingerzeit die civitates waren, aus deren Bestand sich die Teilreiche zusammensetzten, die in einem ganz römischen Sinn als Provinzen aufgefasst wurden, nämlich als Aufgabenbereiche der Könige und damit als Verwaltungsbezirke4. Darauf gründet ein wesentliches Argument für die Annahme eines « unsichtbaren Römischen Reiches », dass nämlich die Grundstruktur dieses Reiches im Westen alle völkerwanderungszeitlichen Stürme und auch die Reichsbildungen der Barbaren weitgehend unbeschadet überstanden hat. Unter dem Schlagwort des « unsichtbaren Römischen Reiches » lassen sich die Siegener Bemühungen fassen, ein auf den Erkenntnissen des Monetarmünzprojektes beruhendes Konzept zu verfolgen, nach dem die Kontinuität vom (sichtbaren) Römischen Reich im Westen zu den frühmittelalterlichen regna aus einer inneren kommunikativen Struktur unter den Eliten und der daraus folgenden politischen Ordnung von Kleinstaaten, den civitates nämlich, heraus zu verstehen ist. Diese Strukturen sind aufgrund ihrer kommunikativ- sozialen Basis mit dem Wegbrechen der römischen politischen Suprastruktur kaum substanziell in Mitleidenschaft gezogen worden. Das erklärt die Funktionsfähigkeit, die Gestalt und die maßgebliche kulturelle Orientierung der Nachfolgereiche des Römischen Reiches5. Schon das Römische Reich besteht aus den politischen und wirtschaftlichen Einheiten der civitates, die den Vorzug haben, dass ihre Politeia auf sozialen Grundbedingungen basiert und deshalb später unabhängig von der steuereintreibenden Behörde, ob Römer, Burgunder oder Franken, sich selbst erhält. Genau das lässt sich eben auch an den Merowingischen Monetarmünzen erkennen, deren Hauptfunktion in der Abgabenerhebung bestand und die mutmaßlich die Abgabenorte auf ihrem Revers nennen6, weshalb hier auch nicht von Prägeorten, sondern von Münzorten die Rede ist. Dieses Münzsystem nennt keine Teilreiche und lässt auch sonst nicht erkennen, dass das Frankenreich in Teilreiche gegliedert war. Lediglich regionale Unterschiede in der Ikonographie sind zu beobachten, die jedoch keine klaren Teilreichsgrenzen erkennen lassen. Das System funktioniert reichsweit bis

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 87

zum Rhein und zeigt ein unmittelbares Verhältnis von Hauptorten und dem Gesamtreich. Unter den Orten befinden sich nahezu alle römischen civitas-Hauptorte, mehrere hundert pagus-Hauptorte und einige Klöster, Kirchen sowie Häfen und fisci, augenscheinlich alle Orte, von denen Abgaben irgendwelcher Art erhoben wurden.

4 Der von den Burgundern belegte geographische Raum bildet insofern eine bereits bestehende Größe, als dass er schon im Römischen Reich als eine Art « Wegeraum » verstehbar ist. Er verbindet die Rhône und damit Arles und das Mittelmeer über die Saône mit dem Rhein, der Seine und der Loire, so dass man durch Burgund muss, wenn man auf schnellem (Wasser-)Wege Nordgallien, das Rheinland und Britannien erreichen will. Außerdem gehören zu Burgund der westliche Hauptweg über die Alpen, nämlich über den großen St. Bernhard, den Poeninus, sowie die Wege über die Graischen Alpen nach Segusio (Susa). Nicht umsonst liegt das geistliche Zentrum des burgundischen Reiches am Weg vom St. Bernhard nach Gallien, in Acaunum, wo gegen Ende des 5. Jahrhunderts das dauerhaft bedeutende Kloster Saint-Maurice d’Agaune gegründet wurde7. So ist Burgund zwar nicht identisch mit antiken Provinzeinteilungen, die ja eine gewisse Willkürlichkeit auszeichnet, sondern basiert auf einer Kontinuität von civitates, also römischen Kleinstaaten, deren Hauptorte an den großen Straßen liegen. Unter ihnen befinden sich mehrere ausgesprochen bedeutende römische Städte, etwa Lyon und Vienne.

5 Burgund ist aber nicht nur das Herrschaftsgebiet und der Kommunikationsraum der gens burgundionum, sondern durch seine Einrichtung seit den 40er Jahren des 5. Jahrhunderts ein gallischer Teilraum, der lange vor der territorialen Hegemonie der Franken in Gallien politische Strukturen aus dem noch bestehenden römischen Westreich unmittelbar übernahm8 und damit mutmaßlich einen Zustand der sozialen und institutionellen sowie politischen Ordnungen teilweise einfror, der eben nicht als eigentlich poströmisch bzw. nachantik einzuschätzen ist. Sollte diese Vermutung zutreffend sein, hieße dies, dass das ehemalige Reich der Burgunder in Gallien einen besonderen Kontinuitätsraum geschaffen haben würde, der bei der reibungslosen Übernahme durch die Franken als ein der antiken Ordnung sehr nahestehender Raum anzusehen ist.

6 Das lässt sich überprüfen, nämlich anhand der « Merowingischen Monetarmünzen », die die politische und wirtschaftliche Substruktur Galliens im 7. Jahrhundert abbilden. Im Laufe der römischen Kaiserzeit und mutmaßlich auch danach noch wird die Integrität der ursprünglichen politischen Subsysteme, der civitates nämlich, beschädigt, indem aus ihnen neue politische Subsysteme herausgelöst werden9. Das scheint ein kontinuierlicher Prozess zu sein, der im Wesentlichen der Effizienz von Abgabenerhebung und politischer Kontrolle geschuldet ist.

7 Die Münzen tragen allesamt Ortsnamen, oft mit Qualifikationen ihres politischen bzw. wirtschaftlichen Status, etwa als civitas-Hauptort (s. Abb. 4), als pagus-Hauptort oder als basilica oder als pons. Wenn im Raum Burgund die Zahl der neben den civitates in der Münzprägung sichtbaren Orte deutlich niedriger sein sollte als in anderen wirtschaftlich prosperierenden Regionen Galliens, müsste man daraus schließen, dass es entweder weniger solcher sekundär bedeutender Orte gegeben haben müsste oder aber diese tatsächlich noch Teil der civitates waren. Letzteres lässt sich für die Provence vermuten, in der sogar mehrere civitates wohl unter dem Münzort Marseille figurieren10. Beides spräche dafür, dass eine wahrscheinliche weitere Auflösung der

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 88

civitas-Integrität in den letzten Jahrzehnten römischer Herrschaft in Burgund nicht mehr stattgefunden haben würde.

8 Leider fehlt aktuell ein präzises Instrument, mit dem man dieses Phänomen sicher feststellen könnte, denn die numismatischen corpora der Merowingischen Monetarmünzen leiden allesamt an einer gewissen Intransparenz, was die Identifizierung von Orten und damit ihre Lokalisierung betrifft. Das auf Vollständigkeit ausgelegte Werk von De Belfort enthält zwar eine große Zahl an erfassten Münzen, zugleich aber auch Dubletten ; manche Verzeichnungen sind nicht mehr überprüfbar11. Die Arbeit von Prou beschränkt sich auf den Bestand der Bibliothèque nationale de France12, der immerhin der größte und zudem seit dem Erscheinen des Katalogs auch um einiges gewachsen ist. Obwohl die große sprachwissenschaftliche Untersuchung von Egon Felder die Neuzugänge berücksichtigt und auch die Münzorte weitgehend lokalisiert, ist sie doch, weil es dem Autor vornehmlich um die Personennamen geht, ebenfalls in den Lokalisierungen nicht ausreichend transparent13. Es gibt zwar von Depeyrot einen mehrbändigen Ersatz für die Arbeit von De Belfort, aber auch hier finden sich in besonderem Maße Intransparenzen, die Lokalisierungen sind z. T. eigenwillig und entsprechen mitunter nicht den Anforderungen der Sprachwissenschaften14.

9 Überhaupt sind Lokalisierungen nur sinnvoll im Verbund mit den Sprachwissenschaften zu leisten. Es müssten dabei numismatische, sprachwissenschaftliche und rein geschichtswissenschaftliche Kriterien mit- und gegeneinander abgewogen werden. Und dennoch war es in einem interdisziplinären von der Deutschen Forschungsgemeinschaft geförderten Projekt zu den « merowingischen Monetarmünzen als interdisziplinäre Herausforderung », das vor allem den Personennamen galt, nicht möglich, die Zahl der sicher lokalisierten Münzorte signifikant zu erhöhen15. Wollte man eine wissenschaftlich brauchbare Karte zeichnen oder auch nur die Orte in einem Raum sicher feststellen, ginge dies nur mit einem System, in dem Unsicherheiten in der Identifizierung der Orte nach Grad der Unsicherheit ausgewiesen wären oder aber zumindest ein Bestand von Namen verhältnismäßig sicher identifizierter Orte manifest wird. In der Tat gibt es eine Datenbank, die zumindest dem zweitgenannten Prinzip folgt, die aber bisher nur die Daten der Münzbestände der Bibliothèque nationale de France und des Münzkabinetts der Staatlichen Museen zu Berlin enthält und deshalb ebenfalls noch nicht für eine auch nur annähernd präzise Feststellung der Zahl von Ortsnamen für einen bestimmten Raum nutzbar ist16.

10 Ein Survey auf der Basis des Katalogs von Depeyrot hat ergeben, dass in der Tat signifikante Unterschiede zwischen den verschiedenen Regionen bestehen. Depeyrot gliedert anders als Prou nach Departements, was den Nachteil hat, dass eben nicht die absolute Zahl von Münzorten in einer civitas erfassbar ist. Das wird vermutlich auch nicht möglich sein, weil die antiken civitas-Grenzen nicht unbedingt mit den modernen Bistumsgrenzen deckungsgleich sein müssen. Verglichen wurde Burgund mit dem Maas-Moselraum und Zentralfrankreich um Limoges.

11 Burgund weist eine Münzortdichte von im Durchschnitt 4,3 auf ein Departement auf – mit den Schweizer Kantonen –, Zentralfrankreich von 11,5 und der Maas-Mosel-Raum von 10. Das scheint durchaus weitere Untersuchungen zu rechtfertigen. Während das Departement Saône-et-Loire in Burgund mit 9-11 Münzorten – allein drei Münzorte sind unmittelbar mit dem civitas-Hauptort Chalon-sur-Saône verbunden (Cabillonum,

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 89

vgl. Karte 1 und Abb. 1-2), nämlich ein palatium, die civitas und Saint-Marcel – die meisten solcher Orte aufweist und dabei drei civitas-Hauptorte beherbergt, nämlich Autun und Chalon-sur-Saône sowie Mâcon, das jedoch in der spätantiken « Notitia Galliarum » noch als castrum figuriert, finden sich im Departement Indre-et-Loire mit dem civitas-Hauptort Tours sogar 33 Münzorte. Burgund kommt mit 13 civitas- Hauptorten auf 52 Münzorte, der Raum im Nordwesten (Maas-Mosel) kommt mit 7 civitas-Hauptorten auf 70 Münzorte. In Zentralfrankreich sind 5 civitas-Hauptorte unter 143 Münzorten, dies in 11 Departements.

Karte 1 – Die Provinz Maxima Sequanorum in der Spätantike (um 395 u. Z.)

12 Bernd Kluge hat in einer umfassenden Untersuchung der Prägeintensität zu allen bekannten Münzorten ein Punktesystem entwickelt, das sowohl die bekannte Stempelzahl als auch die bekannten Münzen selbst in ihrer Menge bewertet und dabei nach Gold- und Silberprägungen differenziert17. Bei den Goldprägungen steht Marseille an der Spitze der Münzorte mit 694 Punkten. Dies ist in besonderer Weise dem Mittelmeerhandel geschuldet. Außerdem scheint Marseille als Münzhauptort der Provence zu fungieren18. Unmittelbar darauf folgt Chalon-sur-Saône mit 587 Punkten. Ähnlich wie Marseille scheint Chalon-sur-Saône in besonderer Weise eine zentralörtliche Funktion zuzukommen. An neunter Stelle steht Lyon mit 206 Punkten. Aber auch Autun (153), Sion (152) und Vienne (116) zählt Kluge unter die « großen Münzstätten » (Abb. 4). Lausanne (44) und Genf (46) sortiert Kluge immerhin noch unter die « mittelgroßen Münzstätten » (Abb. 3). Das korrespondiert mit dem dargelegten Befund zu der Zahl der Münzorte insofern, als dass diese Zahlen nahelegen, dass die civitas-Hauptorte offensichtlich der Prägemenge nach fehlende weitere Münzorte in ihrem (ehemaligen) Territorium kompensieren. Das könnte man im Einzelnen zusammenrechnen und vergleichen. Da wir aber nicht genug über die Relation der Regionen im Hinblick auf ihre absolute Wirtschaftskraft wissen, würde der

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 90

Aussagewert des Ergebnisses gering sein. Es mag genügen, dass im Falle von Chalon- sur-Saône jedenfalls die Prägemenge so hoch ist, dass es nur mit Marseille überhaupt vergleichbar ist, in dessen Umgebung sich mutmaßlich keine kleineren Münzorte befinden. Die nächst geringeren Münzorte sind Banassac mit 438 Punkten und Clermont-Ferrand mit 314 Punkten. Alle anderen Münzorte in Gallien liegen unter 300 Punkten.

13 Vorbehaltlich einer Untersuchung der Münzortdichte im Verhältnis zu antiken politischen Strukturen und damit vor allem den civitates und ihren Hauptorten, die jeweils auch die Lokalisierungen nach dem Forschungsstand bewertet, lässt sich aber doch feststellen, dass Burgund ein Raum ist, in dem die Zerstückelung der politischen bzw. wirtschaftlichen Landschaft augenscheinlich nicht in dieser Weise vonstatten ging, wie in anderen Regionen Galliens. Im Maas-Mosel-Raum liegt dies mutmaßlich an der besonders exponierten Lage gegenüber den einfallenden Barbaren und an der wirtschaftlichen Prosperität der Seille-Region (dép. Moselle), die nicht unwesentlich vom Salz lebte. In Zentralfrankreich mit einer mittleren Münzortdichte pro Departement von über 10 lässt sich zunächst vermuten, dass eben dies – wie vermutlich auch im Norden – an einer längeren Phase ohne konsolidierte civitas-übergreifende territoriale Herrschaft liegen wird19, wie eben der Blick auf Burgund nahelegt, das vermutlich kontinuierlich eine solche civitas-übergreifende Herrschaft kannte20. Reçu : 27 juillet 2017 – Accepté : 4 novembre 2017

NOTES

1. Der Beitrag sei Jörg Jarnut gewidmet, in Dankbarkeit, auch für intensive Gespräche über ein « unsichtbares Römisches Reich » als Konzept für den Epochenwandel. Karsten Dahmen und dem Münzkabinett der Staatlichen Museen zu Berlin danke ich für die Abbildungen. 2. S. zur burgundischen Sprache und dem ihr zuzuordnenbaren Raum W. HAUBRICHS, « Sprachliche Integration, Sprachinseln und Sprachgrenzbildung im Bereich der östlichen Gallia. Das Beispiel der Burgunden und der Franken », in T . KÖLZER und R. SCHIEFFER (Hg.), Von der Spätantike zum Frühen Mittelalter : Kontinuitäten und Brüche, Konzeptionen und Befunde, Ostfildern, 2009, S. 61-100 ; ID., « Les Chamaves et les autres : une enquête linguistique sur les traces des Chamaves, Hattuaires, Varasques, Scotinges et Burgondes au nord de la Bourgogne », http:// journals.openedition.org/cem/14779. S. zu den methodischen Implikationen, v. a. zur Integration von Räumen und Personen C. EHLERS, Rechtsräume. Ordnungsmuster im Europa des frühen Mittelalters, Berlin/Boston, 2016, S. 102. 3. Zwischen etwa 585 und 670 wurden in Gallien ausschließlich Trienten geprägt, Drittelsolidi, die die weitaus stärker an den byzantinischen Prägungen orientierten « pseudoimperialen » Solidi des 6. Jahrhunderts ablösten und die selbst nahezu schlagartig in eigentlich mittelalterliche Denarprägungen übergingen, nachdem bereits über Jahrzehnte eine vermutlich kontinuierliche Verringerung des Feingehaltes vorgenommen worden war. Diese Münzprägung kann unterteilt werden in solche mit Königsnamen und solche ohne, wobei die allermeisten Prägungen nur einen oder zwei Monetare nennen und die « königlichen » Prägungen auf wenige Münzorte beschränkt sind. Die Gestaltung ist insofern einheitlich, als dass die

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 91

« Monetarmünzen » alle einen Ortsnamen und mindestens einen Personennamen mitteilen, sie in aller Regel ein Herrscherbild auf der Vorderseite führen, das zwar als Kaiserbild gestaltet ist, aber durchaus auch für die Königsherrschaft stehen kann, und sie auf der Rückseite in der Regel ein Kreuz tragen, oft auf mehreren Stufen. Hinzu kommen häufig Ortsqualifikationen, wie CIVITAS und VICVS. Gelegentlich kommt noch ein Kürzel hinzu, das auf einen Hauptort verweist. S. die Münzkommentare von K. DAHMEN und B. KLUGE, « Bestandskatalog der merowingischen Münzen des Münzkabinetts der Staatlichen Museen zu Berlin », in A. GREULE, J. JARNUT, B. KLUGE und M. SELIG (Hg.), Die merowingischen Monetarmünzen als interdisziplinär-mediaevistische Herausforderung, Paderborn, 2017, S. 155-292, und die Abbildungen auf den Tafeln ebenda. Der Katalog ist auch online verfügbar : http://ikmk.smb.museum/home?lang=de–. S. auch P. GRIERSON und M. BLACKBURN, The Early Middle Ages, 5th – 10th centuries, Cambridge, 1986. 4. J. STROTHMANN, « Merowingische Monetarmünzen und die Gallia im 7. Jahrhundert », in A. GREULE u. a. (Hg.), Merowingische Monetarmünzen…, op. cit., S. 11-69, hier S. 56. Unsere Erkenntnisse basieren auf einem von der Deutschen Forschungsgemeinschaft in den Jahren 2007-2009 geförderten interdisziplinären Projekt zum besseren Verständnis der Merowingischen Monetarmünzen und vor allem der auf ihnen in großer Zahl mitgeteilten Personennamen. 5. S. dazu J. STROTHMANN, « The Evidence of Numismatics. Merovingian Coinage and the Place of Frankish Gaul and its Cities in an “invisible” Roman Empire », in B. EFFROS und I. MOREIRA (Hg.), The Oxford Handbook of the Merovingian World, Oxford [im Druck]. S. programmatisch J. STROTHMANN, « Das “unsichtbare römische Reich”. Zum Fortbestehen eines Raumes über seine Todesanzeige hinaus », in C. EHLERS (Hg.), Rechtsräume [im Druck]. 6. J. STROTHMANN, « Königsherrschaft oder nachantike Staatlichkeit ? Merowingische Monetarmünzen als Quelle für die politische Ordnung des Frankenreiches », Millennium, 5 (2008), S. 353-381, hier S. 366f. S. auch ID., « Das 7. Jahrhundert in neuem Licht. Merowingische Monetarmünzen als Quelle für eine nachantike Gesellschaftsordnung Galliens », Nouvelle revue d’onomastique, 54 (2012), S. 89-110 ; s. aber auch schon I. H. GARIPZANOV, « The Coinage of Tours in the Merovingian period and the Pirenne thesis », Revue belge de numismatique, 147 (2001), S. 79-118 und dezidiert zur Münzprägung im Zusammenhang mit der Steuererhebung in Limoges J.-F. BOYER, « À propos des triens mérovingiens : approche du système de collecte et de traitement de la recette fiscale en Limousin aux VIe-VIIe siècles », Annales du Midi, 119 (2007), S. 141-157. Zur Deutung der Ortsnamen als Abgabenerhebungsorte s. auch schon A. M. STAHL, The Merovingian coinage of the region of Metz, Louvain-la-Neuve, 1982. Vgl. auch K. DAHMEN, « Zum Münzwesen des Merowingerreiches », in A. GREULE u. a. (Hg.), Merowingische Monetarmünzen…, op. cit., S. 71-124 ; und mit einer eigenen Deutung des Systems B. KLUGE, « Die merowingischen Monetarmünzen : Epochenwandel im Münzwesen – Münzwesen im Epochenwandel. Numismatische Handreichungen für Historiker », in J. JARNUT und J. STROTHMANN (Hg.), Die Merowingischen Monetarmünzen als Quelle zum Verständnis des 7. Jahrhunderts in Gallien, Paderborn, 2013, S. 33-92. M. F. HENDY, « From Public to Private : The Western Barbarian Coinages as a Mirror of the Disintegration of Late Roman State Structures », Viator, 19 (1988), S. 29-78. 7. M. ZUFFEREY, Die Abtei Saint-Maurice d’Agaune im Hochmittelalter (830-1258), Göttingen, 1988, S. 30ff. 8. W. HAUBRICHS, « Ein namhaftes Volk – Burgundische Namen und Sprache des 5. und 6. Jahrhunderts », in V. GALLÉ (Hg.), Die Burgunder. Ethnogenese und Assimilation eines Volkes, Worms 2008, S. 154f. sieht im burgundischen regnum « eine von Romanen maßgeblich mitgestaltete Misch-Gesellschaft ». S. zu einer solchen sehr frühen Akkulturation auch I. WOOD, « Gentes, Kings and Kingdoms – The Emergence of States : The Kingdom of the Gibichungs », in H.-W. GOETZ, J. JARNUT und W. POHL (Hg.), Regna and Gentes. The Relationship between Late Antique and Early Medieval Peoples and Kingdoms in the Transformation of the Roman World, Leiden/Boston, 2003, S. 243-269, S. 262f.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 92

9. J. STROTHMANN, « Civitas-Hauptorte und ihre Benennungen als Quelle für den Wandel der politischen Struktur Galliens bis zum 8. Jahrhundert », in J. JARNUT und J. STROTHMANN (Hg.), Die Merowingischen Monetarmünzen…, op. cit., S. 613-628, hier S. 617. S. zu den civitates und ihrem Wandel v. a. C. WITSCHEL, « Die spätantiken Städte Galliens : Transformationen von Stadtbildern als Ausdruck einer gewandelten Identität », in S. DIEFENBACH und G. M. MÜLLER (Hg.), Gallien in Spätantike und Frühmittelalter. Kulturgeschichte einer Region, Berlin/Boston, 2013, S. 153-200. 10. S. dazu den Ortskommentar zu Marseille bei J. STROTHMANN, « Kommentare zu einigen Hauptorten », in J . JARNUT und J. STROTHMANN (Hg.), Die Merowingischen Monetarmünzen…, ibid., S. 403-446, hier S. 420f. S. zu Marseille v. a. S. T. LOSEBY, « Marseille and the Pirenne Thesis, I : Gregory of Tours, the Merovingian kings and “un grand port” », in R. HODGES und W. BOWDEN (Hg.), The Sixth Century. Production, Distribution and Demand, Leiden, 1998, S. 203-229 und ID., « Marseille and the Pirenne Thesis, II : “Ville Morte” », in I. L. HANSEN und C. WICKHAM (Hg.), The Long Eighth Century, Leiden/Boston/Köln, 2000, S. 167-193. 11. A. DE BELFORT, Description générale des monnaies Mérovingiennes, Bd. I-IV, Paris, 1892-1894. 12. M. PROU, Catalogue des monnaies françaises de la Bibliothèque Nationale. Les monnaies mérovingiennes, Paris, 1892. 13. E. FELDER, Die Personennamen auf den merowingischen Münzen der Bibliothèque nationale de France, München, 2003. 14. G. DEPEYROT, Le numéraire mérovingien. L’âge de l’or, Bd. 1-4, Wetteren, 1998. 15. Vg. Anm. 2. S. nun den v. a. sprachwissenschaftlichen Versuch von R. EUFE, Die Ortsnamen auf den merowingischen Monetarmünzen des Münzkabinetts der Staatlichen Museen Berlin, Berlin/New York, elektronische Vorabversion : http://nbn-resolving.de/urn/resolver.pl? urn=urn:nbn:de:bvb:355-epub-309258 (zuletzt 31. 5. 2017). Zu den Ortsnamen der Auvergne s. J.- P. CHAMBON, « L’identification des noms d’ateliers monétaires mérovingiens (Arvernie et entours) : point de vue de linguiste », Revue numismatique, 2001, S. 347-405. 16. Die Datenbank wird der Datenbank von « Nomen et Gens » angeheftet werden : http:// www.neg.uni-tuebingen.de/?q=de/datenbank (zuletzt 31. 5. 2017). 17. B. KLUGE, « Die merowingischen Monetarmünzen », in J. JARNUT und J. STROTHMANN (Hg.), Die Merowingischen Monetarmünzen…, op. cit., S. 33-92, S. 66ff. 18. J. STROTHMANN, « Kommentare zu einigen Hauptorten », in A. GREULE u. a. (Hg.), Merowingische Monetarmünzen…, op. cit., S. 403-446, S. 420 « MASILIA ». 19. S. die Annahme von J. STROTHMANN, « Civitas-Hauptorte… », op. cit., auf der Basis des Ortsnamenwandels. Über das Maß der inneren Ordnung der frühen regna im Westen müsste man folglich genauer nachdenken. 20. S. zu dem Prozess der Aneignung des Raumes durch die Burgunden I. WOOD, « Gentes, Kings and Kingdoms – The Emergence of States : The Kingdom of the Gibichungs », in H.-W. GOETZ, J. JARNUT und W. POHL (Hg.), Regna and Gentes…, op. cit., S. 243-269, hier S. 259ff.

RÉSUMÉS

La Bourgogne n’a jamais eu le statut de province romaine, mais elle représente un espace économique, qui, pendant le haut Moyen Âge, prend une certaine importance territoriale, et ceci n’est pas seulement dû à la domination par les Burgondes. En raison de la prise de pouvoir des

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 93

Burgondes, qui a eu lieu relativement tôt et de façon organisée, le processus de désintégration des structures politiques a été ici interrompu plus tôt qu’ailleurs en Gaule. Ce constat est illustré par la situation monétaire du VIIe siècle en Bourgogne, où l’on trouve bien moins d’ateliers de frappe en dehors des chefs-lieux de cités que dans les autres régions de la Gaule. Cela semble indiquer une très forte continuité du monde romain en Bourgogne, tant sur le plan monétaire que dans d’autres domaines.

The Burgundians became part of the Roman Empire before it collapsed as a political system in the West. Therefore, in terms of civilisation and political organisation Burgundy appears to have been more Roman than other parts of Gaul. This can be demonstrated by a survey of the mints in the different regions and a comparison of their number. In Burgundy, most of the places of lower rank were not mentioned on the coins. That’s why we can assume that the fragmentation of the city-states did not go as far as in other Gaulish regions, where the cities had remained independent for some time after the end of the Western Roman Empire.

INDEX

Mots-clés : cité, Gaule mérovingienne, monnaies mérovingiennes, état, administration Schlüsselwörter : civitas, römisches Reich, merowingisches Gallien, Staat, Verwaltung

AUTEUR

JÜRGEN STROTHMANN Historisches Seminar, Université de Siegen

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 94

The Burgundian « visage ». Seals between tradition and innovation1

Jessika Nowak

Like master, like man ?

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 95

1 In 888, Charles III died, the Carolingian

empire fell apart2 and several reguli3 emerged. Among those, we find the aristocrat Rudolph who had been count, margrave and lay-abbot of Saint-Maurice d’Agaune during the lifetime of Charles the Fat. Rudolph’s ancestors were Welfs4, and the family had come to the Transjurane region only some decades before, when the area had been assigned to Rudolph’s father Conrad by Louis II5. But how did an « outsider » get a royal crown ? How could someone, who had no Carolingian blood in his veins and who could not therefore boast direct Carolingian descent claim (royal) legitimacy in 888 ? How did he increase his legitimacy so that he was accepted and could seek to establish a new dynasty and to set up a new kingdom6 ? Unsurprisingly, Rudolph I tried to signal that he aspired to continue the Carolingian tradition7. He chose a prestigious and deeply symbolic place for his coronation8, the abbey of Saint-Maurice d’Agaune9. Thanks to the Merovingian and Carolingian kings, the abbey had a long royal tradition10, and it had been entrusted to Rudolph by Charles the Fat. « Le choix d’Agaune évoque donc également la légitimité d’un grand commandement de l’empire, une aura royale et, partant de là, une continuité carolingienne » writes François Demotz who has published – about a hundred years after the last monography dealing with Burgundy11 – a monumental volume whose title « Bourgogne, dernier des royaumes carolingiens » toys with the Rudolfian strive for Carolingian continuity12. Rudolph’s effort to inscribe himself into the Carolingian tradition became even more evident if we consider his anointment which took place in all likelihood at Toul, « [au] cœur de la Francia, (…) [dans] une zone de forte tradition carolingienne et donc fortement légitimante », as Demotz put it13.

2 In the year of his coronation(s), on the 10th of June 888, Rudolph I ceded the abbey of Romainmôtier to his sister Adelheid14. In this first charter that we possess from his kingship, the royal seal is announced – manu nostra subter firmavimus et de anuli nostri inpraessione sigillari praecepimus15 – and the original seal survived alongside the document. Of course, the seals are also a visual means of communicating legitimacy and authority. The performance of the rituals of sealing « generated authenticity of a royal ruler »16.

3 Even if seals in the post-Carolingian time did not have the very strong symbolic value that they had possessed in the Merovingian period, as Bedos-Rezak stresses17, it is quite fascinating to look at the seals of the four Burgundian kings18 which « functioned as

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 96

well as a juridical and diplomatic instrument of authentification as well as a mark of identity »19.

Rudolph I’s seal

4 Can Carolingian traditions be identified in Rudolph I’s seal20 ? Even if the way of the mounting of the seal resembles the West Frankish style21, it is not surprising to see that the East Frankish seals bear Rudolph’s orientation mark. The East Frankish influence is apparent and unmistakeable. Rudolph’s seal – as the East Frankish ones – is nearly round, while the West Frankish ones are oval22. On Rudolph’s seals – as on the East Frankish ones – the circumscription « RODVLFVS REX » is located on the same surface as the seal image, whereas on the West Frankish ones there is a dividing line between the seal legend and the seal image. Moreover, the circumscription on Rudolph’s – and on the East Frankish – seals extended from one shoulder of the portrait bust to the other shoulder, whereas the circumscription on the West Frankish ones was circumferential, starting on the top23. Furthermore, in the West Frankish seals, the legend includes a religious symbol, a Greek cross, and a formula of intercession, whereas the East Frankish seal legends – as well as Rudolph’s – include only the title and the name, without any territorial designation. The East Frankish influence is therefore undeniable. But which East Frankish model did Rudolph I imitate24 ? Who does the seal image, a portrait bust turned to the left in the heraldic sense, remind us of ? Apparently, Rudolph’s seal is inspired by one of Charles the Fat’s seals25, a seal which the latter seems to have used between the 7th of July 877 and the 29th of December 880, before being crowned emperor. Rudolph’s seal shows a male bust which is presumably beardless. The hair is short and possibly covered with a laurel wreath with flying ribbons. Moreover, the bust is dressed in an antique garment, a paludamentum, held together on the shoulder26.

5 What is remarkable is that Charles’ seal that served as an archetype for Rudolph’s seal does not correspond to the seal of Charles the Fat27 which inspired the seal of Arnulf of Carinthia. The latter had replaced Charles the Fat in the East Frankish kingdom in 887 and tried to confine Rudolph I’s influence28. Arnulf and his son, Louis the Child, chose Charles’ « imperial versions » with the buckler and the lance29 ; in Burgundy, in contrast, these military emblems did not appear on the king’s seal. Astonishingly, Zwentibold, Arnulf’s illegitimate son, whom his father would have liked to become king of Lotharingia and Burgundy, renounced these attributes of a military leader, too30. Perhaps the buckler and the lance were seen as references to imperial aspirations, an objective which the Burgundian kings never pursued31. As François Demotz emphasises, the Rudolfian kingship is to be considered in its beginnings as « une monarchie modeste », or as « une monarchie modérée », a moderate and modest kingdom with greater resemblance to a « royal princedom » than to a « monarchic kingdom »32 : There was neither a desire to demonstrate glamour or splendour nor a need to produce historiographical sources in order to disseminate a certain glamorous image of Burgundian kingship. No spectacular secular buildings were constructed in the king’s name, and the Burgundian chancellery was relatively modest, as the archbishop of Besançon33 was rapidly replaced with the bishop of Sitten and then with a simple notary. This unpretentiousness is also reflected in the naming of the royal family. The Rudolfian kings avoided imperial names like Charles or Judith for their descendants34.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 97

For the first Burgundian king, who was fought initially by the Carolingian Arnulf, legitimacy had to be established by stressing the Carolingian tradition, but it had to occur in an unobtrusive, modest way.

Rudolph II’s seal

6 Some rulers – as Louis the German’s son Louis the Younger – maintained the seals of their homonymous fathers35. Rudolph II, on the other hand, did not. He did not « recycle » it or if he did so – which we are unable to verify due to a lack of original charters – he employed another seal, too36.

7 Douet d’Arcq and Stückelberg mistakenly attribute an oval seal, which appears in a charter from the 21st of June 932, to the second Rudolfian king37. It is not the seal of Rudolph II of Burgundy, however, but of Rudolph, the king of the Francia occidentalis, who ruled at the same time38.

8 Rudolph II of Burgundy also managed to be offered the crown of the Regnum Italiae which he was able to keep for a short period39. He is known to have used a completely different seal during his reign in the Regnum Italiae40. This seal neither looks like the one his predecessor and opponent Berengar usually employed41 – in Berengar’s seal the simplified circumscription goes from shoulder to shoulder and the buckler and the lance are displayed –, nor does Rudolph II’s seal replicate elements of the seal of Louis the Blind, who had also ruled over the Regnum Italiae for some years and had even become emperor42. Rudolph II’s seal depicts a beardless profile bust which is turned to the left. The hair is cut in a different way and the bust is not wearing a laurel wreath, but instead a crown, a circlet with three lilies. Instead of being clothed in a paludamentum, the bust is dressed in a garment consisting of squares containing little rosettes which probably represent a corazza, a cuirass. There is a dividing line between the seal image and the circumferential legend which starts with a Greek cross « + RODULFUS GR(ATI)A DEI PIUS REX »43. The pellets or pearls surrounding the seal ring bear some resemblance to the globules on the border of Merovingian seals44.

9 The Burgundian realm was stabilized during Rudolph’s II reign. His position in Burgundy was uncontested, although it was not advisable for him to compete in the Regnum Italiae with his rival in « appearing Carolingian ». He was supposed to succumb due to his inferior lineage. After all, Berengar, Rudolph II’s opponent in the Regnum Italiae, was a Carolingian through the female line45. Following Charles the Fat’s seal meant stability once for Rudolph I, but, for Rudolph II, « appearing Carolingian » was tantamount to precariousness. It is likely that Rudolph II and his chancellery therefore decided to opt for a completely different seal image.

Conrad’s seals

10 While the cross and the circumscription « GRATIA DEI PIUS REX » were maintained in the seals in the Regnum Italiae46, Rudolph’s son Conrad omitted the « PIUS »47. The circumscription in his seals is known from some of his charters which date from 943, 946 and 94948. The legend reads « + CHVUONRADUS G(RATI)A D(E)I REX ». As for the image, the seal is showing a very tiny beardless profile bust swathed in a paludamentum and turned to the left. The intaglio that might result from an antique or a medieval gem is surrounded by

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 98

a huge frame. The round seal’s diameter is about 41 mm and it is bordered by a punctured line. The seal differs from the seals used by Conrad’s father and grandfather as well as from those utilised in these years in the Francia occidentalis and orientalis. Conrad had spent several years during his childhood at the Ottonian court, and Otto the Great supported him when he turned to rule in Burgundy at the beginning of the 940s49. But obviously, Conrad did not imitate the Ottonian seals50 at the beginning of his reign. What might have been the motives for his chancellery ? Which models gave them inspiration ? One might imagine that the fusion of Upper and Lower Burgundy which took effectively place under his rule51 might have played a decisive role. It is probably not a mere coincidence that the first two charters, which we are acquainted with and which display the seals, concern property in Lower Burgundy. On the 23rd of April 943, Conrad endowed the villa Bouligneux which was situated in pago Lugdunense, to the abbey of Cluny52; whereas on the 18th of May 946 (?) he transferred the Chapel of St Genesius which belonged to the comitatus Uienensis to his chaplain Ermentheus 53. Most likely the style of the seal follows the seal of Boso of Vienne who had been crowned king of Provence in 879 and who had been the first non-Carolingian who had managed to become king54.

11 Eventually Conrad whose sister Adelheid had married Otto the Great and who had, for his part, wedded in his second marriage Mathilda, the sister of the West Frankish king, had another seal at a later date. At least two copies55 made from a charter which was issued on the 4th of September 967 in favour of the canons of Saint-Étienne (Besançon) have the indication Sigillum Chuonradi regis pergameno affixum cum sceptro liligero56 respectively Et sigillum sigillo affixo impresso uno capite cum sceptro et in circonferentia est scriptum : Conradus rex57. Otto the Great changed his seal in 962 ; it was inspired by Byzantium, and more specifically by the Byzantine imperial bulls58. Having been crowned emperor Otto the Great or his chancellery effectuated that the ancient type of effigy was abandoned. The ruler was not represented any longer as a profile bust with a lance and a buckler, but he appeared in front view, styled en face with a crown, a sceptre and a sphere, first without a cross, subsequently ornamented with a cross. The king’s forearms were almost vertical59. The new seal was replicated : It is known that Lothar, the king of the West Frankish kingdom, followed the Ottonian example after 966 supplanting the globe with a baton60. It is possible that Conrad imitated Otto’s new seal ; remarks in copies which date from the 17th century, which denote a sceptre, suggest that he did. It is also likely that he also reduced the circumscription. The mention of the circumscription « + CHVONRADVS REX » is found in a charter issued by Conrad between 981 and 990 in favour of Saint-André-le-Bas. Ulysse Chevalier, who made a copy in the 19th century from another copy which is now lost61, described the seal as follows « où il était représenté assis sur son trône, la couronne en tête, tenant de la droite une épée et de la main gauche une main de justice »62.

Rudolph III’s seal

12 Rudolph III who was definitively under the Ottonian influence did imitate the Ottonian seals63. We have two versions of his seals which differ slightly. The first, which might be the one of the royal chancellery, is found for example in a charter issued on the 24th of April 1011 in favour of Rudolph III’s second wife, Irmingard64. The second, which might be the one of the chancellery of Saint-Maurice d’Agaune, is placed on a charter from

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 99

the 15th of February 101865, in which Rudolph III made a restitution of several possessions to Saint-Maurice d’Agaune. In both seals the Burgundian king is shown en face. He has a thin and long face and a beard, and he is wearing a crown with spikes extending into the circumscription. While the Ottonian king is holding a sceptre and the orb, the Burgundian king is holding two sceptres66 or a sceptre and a baton67. In the version of Saint-Maurice which is completely round – while the other one is slightly oval – the sceptre in the right hand is more perpendicular than in the version of the royal chancellery, whereas the sceptre in the left hand is more inclined68.

13 However, both seals whose circumscription was « + RODVLFVS PIVS REX » remind of the one of Robert69 in the Francia occidentalis70.

Conclusion

14 Undoubtedly, seal images are of importance for getting an idea of how the kings sought legitimation and for shedding light on which image of royal power they wished to achieve. The particular nature of this power as well as important stages of the kingship might be revealed by the sigillographic symbolism. Even if the kings did not themselves participate in shaping the iconography or if their environment was for the most part responsible for the choice of the programmatic elements, it is certainly no coincidence that the four seals that we know in case of the four Burgundian kings were dissimilar in size, shape and the use of props and symbols, whereas in the Francia orientalis or occidentalis, when the reign was passed from the father to the son, the style of the seal was often maintained. While the Francia orientalis or occidentalis had persisted with little modifications since 843, a new kingship had to be formed in Burgundy. A new « ruling class » respectively a new elite had to be configured, and a territory had to be shaped. Rudolph I’s seal attests the wish and the need to join the Carolingian line, to continue and to incarnate the Carolingian tradition for securing legitimation and gaining recognition. Rudolph II, whose Burgundian reign was stabilized, expanded his radius and even became king of the Regnum Italiae for a short period. His son Conrad managed to merge the kingdom of Upper Burgundy and the kingdom of Provence and had a predilection for Vienne, the centre of the kingdom of Provence. Conrad oriented himself to the local traditions whereas Rudolph III’s position was enfeebled due to the lack of male heirs and slanted towards the Ottonians – their influence is undeniable in his seals. The facets of Burgundy were manifold and multidimensional and the features changed over the years, as did the seals. The Burgundians never copied someone else’s style completely, neither at the beginnings the style of the Carolingians, nor at the end the one of the Ottonians. It was less an imitation than an emulation. We are reminded of the bee-metaphor that is used by Seneca and in his succession by Petrarch according to which a bee collects honey from different flowers in order to transform each individual part into a whole : « in inventiveness one must imitate the bees, who do not make an offering of flowers just as they have found them, but through a wondrous blending produce wax and honey »71. We may hope that in the future these fascinating Burgundian wax seals will attract and lure many researchers like the flavoursome honey. This article was intended to give a taste, to offer a glance into the Burgundian strategies for gaining recognition and to sketch the rough outlines.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 100

Fig. 1 – Rudolph I

Figure according to M. DALAS, Corpus des sceaux français du Moyen Âge, t. 2 (Les sceaux des rois et de régence), Paris, 1991 [St 8037].

Fig. 2 – Charles III

Figure according to M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit. [St 7982] ; cf. O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser und Könige von 751 bis 1806, t. 1 (751-1347. Von Pippin bis Ludwig den Bayern), Dresden, 1909, table 3, fig. 5 (https://de.wikisource.org/wiki/ Die_Siegel_der_deutschen_Kaiser_und_K%C3%B6nige_Band_1/Tafel_3 [1-05-2017]).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 101

Fig. 3 – Charles III

Figure according to M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit. [St 7818] ; cf. O. POSSE, Die Siegel…, op. cit., t. 1, table 3, fig. 7 and 8 (https://de.wikisource.org/wiki/ Die_Siegel_der_deutschen_Kaiser_und_K%C3%B6nige_Band_1/Tafel_3 [1-05-2017]).

Fig. 4 – Arnulf

Figure according to O. POSSE, Die Siegel…, op. cit., t. 1, table 4, fig. 8 (https://de.wikisource.org/wiki/ Die_Siegel_der_deutschen_Kaiser_und_K%C3%B6nige_Band_1/Tafel_4 [1-05-2017]).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 102

Fig. 5 – Rudolph II

Figure according to E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund, vornehmlich in der Westschweiz (888-1032), Zurich, 1925, table 5, fig. 1a and 1b.

Fig. 6 – Conrad

Figure according to M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit. [B 5].

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 103

Fig. 7 – Otto I

Figure according to O. POSSE, Die Siegel…, op. cit., t. 1, table 7, fig. 6 (https://de.wikisource.org/wiki/ Die_Siegel_der_deutschen_Kaiser_und_K%C3%B6nige_Band_1/Tafel_7#/media/ File:Posse_Band_1_b_0041.jpg [15-11-2017]) ; cf. ibid., t. 1, table 7, fig. 5 and fig. 7.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 104

Fig. 8 – Rudolph III

Figure according to M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit. [St 7890] ; cf. E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund…, op. cit., table 5, fig. 4 and fig. 5.

Reçu : 15 août 2017 – Accepté : 11 octobre 2017

NOTES

1. I would like to thank Victoria Barnes and Carla Teresa Roth for the corrections of my English text. 2. S. MACLEAN, Kingship and Politics in the Late Ninth Century. Charles the Fat and the End of the Carolingian Empire, Cambridge, 2003. 3. Annales Fuldenses cont. Ratisb., ed. F. KURZE, MGH SS rer. Germ., 7, Hanover, 1891, a. 888, p. 116. 4. B. SCHNEIDMÜLLER, Die Welfen. Herrschaft und Erinnerung (819-1252), Stuttgart, ²2014, esp. chap. 2 « Wege in die Geschichte : Die Welfen im karolingischen Frankenreich (819-886) », p. 40-72 ; for the following see likeweise chap. 3 « Königtum : Die welfische Herrschaft in Burgund (888-1032) » , p. 72-105. 5. Louis II, for his part, had received the land from his brother Lothar II who tried to get rid of his wife Theutberga. Louis II asked Conrad to shield the region against Theutberga’s battlesome brother Hucbert who had been named lay-abbot of Saint-Maurice d’Agaune by Lothar’s and Louis’ uncle Charles the Bald. For further detail, cf. M. ZUFFEREY, Die Abtei Saint-Maurice d’Agaune im Hochmittelalter (830-1258), Göttingen, 1988, p. 54-58, and the contribution of K. WEBER, « Alsace and

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 105

Burgundy : Spatial Patterns in the Early Middle Ages, c. 600-900 », in the next volume [upcoming http://journals.openedition.org/cem/14838]. 6. For the beginnings, cf. L. DUPRAZ, « L’avènement de Rodolphe I et la naissance du royaume de Bourgogne transjurane (6 janvier 888) », Schweizerische Zeitschrift für Geschichte, 13/2 (1963), p. 177-195. The date of the 6th of January is disputed. The coronation probably took place between the 13th and 28th of January. 7. G. SERGI, « Genesi di un regno effimero. La Borgogna di Rodolfo I », Bollettino storico-bibliografico subalpino, 87 (1989), p. 5-44. 8. For the coronation, cf. A. Hauff’s contribution, « Carolingian Traditions and New Beginnings in the Kingdom of Upper Burgundy from a Religious Perspective. The Coronation of Rudolph I of Upper Burgundy », in the next volume [upcoming http://journals.openedition.org/cem/14839]. 9. B. H. ROSENWEIN, « One Site, many Meanings. Saint-Maurice d’Agaune as a Place of Power in the Early Middle Ages », in M. DE JONG, F. THEUWS and C. VAN RHIJN (ed.), Topographies of Power in the Early Middle Ages, Leiden et al., 2001, p. 271-290. 10. L. RIPART, « Saint Maurice et la tradition régalienne bourguignonne (443-1032) », in P. PARAVY (ed.), Des Burgondes au Royaume de Bourgogne (Ve-Xe siècle). Espace politique et civilisation, Grenoble, 2002, p. 211-239 ; F. DEMOTZ, « Saint Maurice et les rois de Bourgogne du lien identitaire à la sainteté symbolique », in N. BROCARD, F. VANNOTTI and A. WAGNER (ed.), Autour de saint Maurice. Actes du colloque Politique, société et construction identitaire : autour de saint Maurice, Saint-Maurice, 2012, p. 147-160. 11. R. POUPARDIN, Le royaume de Bourgogne (888-1038). Étude sur les origines du royaume d’Arles, Paris, 1907. 12. F. DEMOTZ, La Bourgogne, dernier des royaumes carolingiens (855-1056). Roi, pouvoirs et élites autour du Léman, Lausanne, 2008, p. 84. And Demotz had good reasons to entitle the first of the four main parts of his book « la force des traditions carolingiennes » (p. 41-137). 13. F. DEMOTZ, La Bourgogne…, ibid., p. 86. 14. Die Urkunden der burgundischen Rudolfinger, ed. T. SCHIEFFER, MGH DD Burg., Munich, 1977, n° 3, p. 95-98. 15. Die Urkunden…, ibid., n° 3, p. 98. For an illustration, cf. appendix, fig. 1 ; A. J. BERNARD and A. BRUEL, Recueil des chartes de l’abbaye de Cluny, t. 1 (802-954), Paris, 1876 (Reprint Frankfurt am Main, 1974), table 2, fig. 1 [gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k28908j/f907.image (17-07-2017)] ; A. STEYERT, Nouvelle histoire de Lyon et des provinces de Lyonnais – Forez – Beaujolais – Francs-Lyonnais et Dombes, t. 2 (Moyen Âge), Lyon, 1897, p. 190, fig. 175. 16. B. M. BEDOS-REZAK, When ego was imago : signs of identity in the Middle Ages, Leiden et al., 2011, p. 84. 17. « (…) seal usage was consistently articulated around the concept of kingship, evolving from a symbolic usage in Merovingian times, to ritualistic and administrative uses for the first Carolingians, to formulaic usages in the time of the later Carolingians, the Robertians and the early Capetians… » [B. M. BEDOS-REZAK, « Ritual in the royal chancery. Text, image, and the representation of kingship in medieval French diplomas (700-1200) », in H. DUCHHARDT et al. (ed.), European Monarchy. Its Evolution and Practise from Roman Antiquity to Modern Times, Stuttgart, 1992, p. 27-40, here p. 27 sq.]. For the Merovingian seals, cf. A. STIELDORF, « Gestalt und Funktion der Siegel auf den merovingischen Königsurkunden », Archiv für Diplomatik, 47-48 (2001-2002), p. 133-166. 18. For the importance of royal seals, cf. H. KELLER, « Zu den Siegeln der Karolinger und Ottonen. Urkunden als Hoheitszeichen in der Kommunikation des Herrschers mit seinen Getreuen », Frühmittelalterliche Studien, 32 (1998), p. 400-441 ; R.-H. BAUTIER, Chartes, sceaux et chancelleries. Études de diplomatique et de sigillographie médiévale, 2 vol., Paris, 1990.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 106

19. B. BEDOS-REZAK, « Suger and the Symbolism of Royal Power : The Seal of Louis VII », in P. L. GERSON (ed.), Abbot Suger and Saint-Denis. A Symposium, New York, 1986, p. 95-103, here p. 95 (again in B. M. BEDOS-REZAK, Form and order in medieval France. Studies in social and quantitative sigillography, Aldershot et al., 1993, p. 1-18). 20. The charter issued on the 10th of June is a charter in which the archbishop of Besançon, Dietrich, appeared as cancellarius, a strong indication for Rudolph’s aspiration to Lotharingia. Cf. A. HAUFF, « Die Stellung des Erzbischofs und Erzkanzlers Dietrich von Besançon zwischen Rudolf I. von Hochburgund und Zwentibold », in J. NOWAK and J. RÜDIGER (ed.), Zwischen Basel und Marseille. Das Burgund der Rudolfinger (9.-11. Jahrhundert) (= Itinera) [in print]. 21. For the position and the mounting, cf. E. GEIB, « Siegel deutscher Könige und Kaiser von Karl dem Grossen bis Friedrich I. im allgemeinen Reichsarchive », Archivalische Zeitschrift, NF 2 (1891), p. 78-183, here p. 104. 22. For the West Frankish seals, cf. M. DALAS, Corpus des sceaux français du Moyen Âge, t. 2 (Les sceaux des rois et de régence), Paris, 1991. 23. M. DALAS, Corpus des sceaux…, ibid. This is valid for the seals of the Francia media, too. For Lothar II’s seal, cf. G. KORNBLUTH, « The Seal of Lothar II : Model and Copy », Francia, 17/1 (1990), p. 55-68. 24. He probably took an effigy of an emperor originating from a coin or a locket dating from the third or fourth century (T. SCHIEFFER, « Historisch-diplomatische Einleitung », MGH DD Burg., Munich, 1977, p. 1-87, here p. 86). 25. For an illustration, cf. appendix, fig. 2 ; O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser und Könige von 751 bis 1806, t. 1 (751-1347. Von Pippin bis Ludwig den Bayern), Dresden, 1909, table 3, fig. 4 (https:// de.wikisource.org/wiki/Die_Siegel_der_deutschen_Kaiser_und_K%C3%B6nige_Band_1/Tafel_3 [1-05-2017]) ; for a description of Charles’ seal, cf. Diplomata Karoli III, ed. P. F. KEHR, MGH DD Karl, Berlin, 1937 [Reprint Berlin, 1974], p. LXIII, SI. 1 ; P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser und Könige in Bildern ihrer Zeit, Leipzig, 1928, t. 1 (Text : Bis zur Mitte des 12. Jahrhunderts, 751-1152) [New edition, F. MÜTHERICH, Munich, 1983], p. 182 ; O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., t. 5, Dresden, 1913, p. 8. 26. T. SCHIEFFER, « Historisch-diplomatische… », op. cit., p. 86. 27. For an illustration of Charles’ seals with buckler and lance, cf. appendix, fig. 3 ; O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., t. 1, table 3, fig. 7 and 8 ; for a description of Charles’ other seals, cf. Diplomata Karoli III…, op. cit., p. LXIII, SI. 2, SI. 4 and SI. 5 ; B. J. RÖMER-BÜCHNER, Die Siegel der deutschen Kaiser, Könige und Gegenkönige, Frankfurt am Main, 1851, p. 15 ; O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., t. 5, p. 9. 28. For Arnulf, cf. for example, F. FUCHS (ed.), Kaiser Arnolf. Das ostfränkische Reich am Ende des 9. Jahrhunderts, Munich, 2002. 29. For an illustration of Arnulf’s seal, cf. appendix, fig. 4 ; O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., table 5, fig. 1 [https://de.wikisource.org/wiki/ Die_Siegel_der_deutschen_Kaiser_und_K%C3%B6nige_Band_1/Tafel_5 (1-05-2017)] ; for a description of his seal, cf. B. J. RÖMER-BÜCHNER, Die Siegel…, op. cit., p. 16 ; Arnolfi Diplomata, ed. P. F. KEHR, MGH DD Arn, Berlin, 1940 [Reprint Munich, 1988], p. XXXLIII, SI. 2 and SI. 3 ; P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., t. 1, p. 183 ; O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., t. 5, p. 9 sq. For an illustration of Louis the Child’s seal, cf. O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, ibid., t. 1, table 5, fig. 9 and 10 ; for a description of his seals, cf. B. J. RÖMER-BÜCHNER, Die Siegel…, op. cit., p. 17 ; Zwentiboldi et Lvdowici infantis diplomata, ed. T. SCHIEFFER, MGH DD Zw/DD LK, Berlin, 1960 [Reprint Berlin, 1963], p. 93, SI. 2 and SI. 3 ; P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., t. 1, p. 183. With Louis the Child, the seals displayed a taller buckler and revealed a bigger part of the torso and the entire right arm. These seals remained in use until the time of Otto the Great (E. GEIB, « Siegel deutscher Könige… », op. cit., p. 123).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 107

30. For an illustration of Zwentibold’s seal, cf. O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., t. 1, table 5, fig. 7 ; for a description of his seals, cf. ed. T. SCHIEFFER, MGH DD Zw, op. cit., p. 15 ; P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., t. 1, p. 183. For further information, cf. C. ROBERT, « Sceau et monnaie de Zuentibold, roi de Lorraine (895-900). Monnaie de son successeur Louis, fils d’Arnould (900-911) », Mémoire de la Société d’archéologie et d’histoire de la Moselle (1893), p. 273-276. 31. For these non-existent aspirations, cf. J. NOWAK, « Imperial Aspirations in Provence and Burgundy », in C. SCHOLL, T. R. GEBHARDT and J. CLAUSS (ed.), Transcultural Approaches to the Concept of Imperial Rule in the Middle Ages, Frankfurt am Main, 2017, p. 139-156. 32. F. DEMOTZ, « Burgund – zwischen Tradition und Innovation. Diversität der Modelle und der Eliten an einer europäischen Drehscheibe », in J. NOWAK and J. RÜDIGER (ed.), Zwischen Basel und Marseille…, op. cit. (in print). 33. A. HAUFF, « Die Stellung des Erzbischofs… », op. cit. (in print). 34. F. DEMOTZ, « Burgund… », op. cit. (in print) ; J. NOWAK, « Imperial Aspirations… », op. cit., p. 153. 35. Even Louis the Child should (re)use Louis the German’s (and Louis the Younger’s) seal as one of his seals later on, even it had already cracked under Louis the German (E. GEIB, « Siegel deutscher Könige… », op. cit., p. 92). 36. It is an interesting question asking what happened to the Burgundian seals after the kings’ death. Roman Emperors and Empresses had sometimes been buried with their jewellery and signet rings, as grave finds illustrate ; the Merovingians retained eventually this custom, as findings in Childerich I’s tomb show ; contrariwise the pope’s signet ring, the fisherman’s ring, was broken after his death ; several French kings meanwhile bequeathed their signet rings to nunneries (E. GEIB, « Siegel deutscher Könige… », ibid., p. 93). 37. L. DOUET D’ARCQ, Collection de sceaux, t. 1, part 1, Paris, 1863 [Reprint Munich, 1980], p. 270, n° 30 ; E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund, vornehmlich in der Westschweiz (888-1032), Zurich, 1925, p. 20 ; for the illustration, cf. A. J. BERNARD and A. BRUEL, Recueil des Chartes de Cluny…, op. cit., t. 1, table 2, n° 3 (gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k28908j/f907.image [17-07-2017]). 38. Diplomata Karolinorum. Recueil de reproductions en fac-similé des actes originaux des souverains carolingiens conservés dans les archives et bibliothèques de France, part 8 : Raoul, Louis d’Outre-Mer, Lothaire, Louis V (927-985), Pépin I et Pépin II d’Aquitaine (827-848), ed. F. LOT and P. LAUER, Toulouse, 1945, table 2 ; M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit., p. 120. 39. R. POUPARDIN, Le Royaume de Bourgogne…, op. cit., p. 34-58 ; H. ZIELINSKI, J. F. Böhmer, Regesta Imperii, I : Die Regesten des Kaiserreichs unter den Karolingern 751-918 (926), vol. 3 : Die Regesten des Regnum Italiae und der burgundischen Regna, part 2 : Das Regnum Italiae in der Zeit der Thronkämpfe und Reichsteilungen 888 (850)-926, Vienna et al., 1998, esp. n° 1372-1374, 1381-1383, 1385, 1388, 1390-1392 and 1419-1434 ; ibid., part 3 : Das Regnum Italiae vom Regierungsantritt Hugos von Vienne bis zur Kaiserkrönung Ottos des Großen (926-962), Vienna et al., 2006, esp. n° 1469-1471, 1473 and 1477. 40. For an illustration of Rudolph II’s seal, cf. appendix, fig. 5 (for a description, cf. E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund…, op. cit., p. 19 sq.) ; P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., p. 329, n° 71 ; I diplomi italiani di Lodovico III e di Rodolfo II, ed. L. SCHIAPARELLI, Rome, 1908 [Reprints Turin, 1960 and Rome, 1970], n° 8, p. 117-120. 41. P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., p. 328, n° 65-66 ; for his charters, cf. I diplomi di Berengario I, ed. L. SCHIAPARELLI, Rome, 1903 [Reprints Turin, 1960 and Rome, 1966] ; ID., « I diplomi dei re d’Italia. Ricerche storico-diplomatiche 1 : I diplomi di Berengario I », Bullettino dell’Istituto storico italiano, 23 (1902), p. 1-167. 42. In Louis the Blind’s seals which tended to be oval with the circumscription « + XPE SALVA HLVDOVVICVM AVG(us)T(u)M » the influence of the kings of the Francia occidentalis is evident. It’s perceptible in Louis’ charters from 903 and from the 4th of April 912, and it’s even more obvious in a document from 924. For Louis the Blind’s charters and seals, cf. P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., p. 329, n° 69-70 ; R. POUPARDIN, Recueil des actes des rois de Provence

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 108

(855-928), Paris, 1920, esp. pl. II, 3 and pl. III, 1 and 2 ; I diplomi italiani di Lodovico III…, op. cit. ; L. SCHIAPARELLI, « I diplomi dei re d’Italia. Ricerche storico-diplomatiche 3 : I diplomi di Ludovico III », Bullettino dell’Istituto storico italiano, 29 (1908), p. 105-207. 43. On one of Arnulf’s seals the circumscription had been « ARNOLFVS PIVS REX » (O. POSSE, Die Siegel der deutschen Kaiser…, op. cit., t. 1, table 5, fig. 1 ; Arnolfi Diplomata…, op. cit., p. XXXIX, SI. 3), and one of his bulls shows him with a circlet with three lilies (Arnolfi Diplomata…, ibid., p. XXXIX, B. 1). 44. For some examples, cf. M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit. 45. For Berengar whose mother Gisela was the daughter of Louis the Pious, cf. G. ARNALDI, « Berengario I, duca-marchese del Friuli, re d’Italia, imperatore », in Dizionario Biografico degli Italiani, t. 9, 1967, p. 1-26 ; B. ROSENWEIN, « The Family Politics of Berengar I, King of Italy (888-924) », Speculum, 71 (1996), p. 247-289 ; EAD., « Friends and Family, Politics and Privilege in the Kingship of Berengar I », in S. K. COHEN and S. A. EPSTEIN (ed.), Portraits of Medieval and Renaissance Living. Essays in Memory of David Herlihy, Ann Arbor/Mich., 1996, p. 91-106. 46. Lothar whose father Hugh was going to replace Rudolph II in the Regnum Italiae used the circumscription « + LOTHARIUS GRATIA DEI PIVS REX », too. He – like his father had done before – adopted likewise the crown in his seal image, and he and his father – who had a shared seal showing both of them – added a sceptre. Lothar maintained the royal attributes in his own seal, which did not show any more a mere bust, but a huger part of the torso and an extended arm (L. SCHIAPARELLI, I diplomi di Ugo e di Lotario, di Berengario II e di Adalberto, Rome, 1924, p. X ; for an illustration, cf. P. E. SCHRAMM, Die deutschen Kaiser…, op. cit., p. 329, n° 72-73). 47. For Conrad’s seal, cf. T. SCHIEFFER, « Historisch-diplomatische… », op. cit., p. 86 ; for an illustration, cf. appendix, fig. 6 ; E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund…, op. cit., table 5, fig. 3 (for a description, p. 20) ; cf. A. STEYERT, Nouvelle histoire de Lyon…, op. cit., t. 2, p. 209, fig. 195 ; A. J. BERNARD and A. BRUEL , Recueil des Chartes de Cluny…, op. cit., t. 1, table 2, n° 4 (gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k28908j/f907.image [17-07-2017]) ; G. DEMAY, Inventaire des sceaux de l’Artois et de la Picardie recueillis dans les dépôts d’archives, musées et collections particulières des départements du Pas-de-Calais, de l’Oise, de la Somme et de l’Aisne, Paris, 1875 [Reprint Munich, 1980], table 5, n° 342 ; A. COULON, Inventaire des sceaux de Bourgogne recueillis dans les dépots d’archives, musées et collections particulières des départements de la Côte-d’Or, de Saône-et-Loire et de l’Yonne, Paris, 1912 [Reprint Munich, 1980], table 2, n° 5 ; G. HIEBAUM, Gemmensiegel und andere in Steinschnitt hergestellte Siegel des Mittelalters, Graz et al., 1931, p. 27, n° 39. 48. T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 27, 30 and 31. 49. H. KAMP, Burgund. Geschichte und Kultur, Munich, 2007 [²2016], p. 38. 50. For the Ottonian seals, cf. H. KELLER, « Ottonische Herrschersiegel. Beobachtungen und Fragen zu Gestalt und Aussage und zur Funktion im historischen Kontext », in K. KRIMM and J. HERWIG (ed.), Bild und Geschichte. Studien zur politischen Ikonographie. Festschrift für Hansmartin Schwarzmaier zum fünfundsechzigsten Geburtstag, Sigmaringen, 1997, p. 3-51 [again in H. KELLER, Ottonische Königsherrschaft. Organisation und Legitimation königlicher Macht, Darmstadt, 2002, p. 131-166 and 275-297]. 51. According to Liudprand’s Antapodosis [Liudprandi Cremonensis Opera omnia, ed. P. CHIESA, Turnhout, 1998 (Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis, 156), III, 48, p. 93] Hugh of Arles had already given omnem terram, quam in Galliam ante regni susceptionem tenuit to Rudolph II who had promised in counterpart not to interfere in the Regnum Italiae ; cf. H. ZIELINSKI, J. F. Böhmer, Regesta Imperii, I : Die Regesten des Kaiserreichs unter den Karolingern 751-918 (926), vol. 3 : Die Regesten des Regnum Italiae und der burgundischen Regna, part 4 : Die burgundischen Regna (855-1032), fasc. 1 : Niederburgund bis zur Vereinigung mit Hochburgund (855-940er Jahre), Vienna et al., 2013, n° 3014. 52. T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 27. 53. Ibid., n° 30.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 109

54. Unfortunately, Boso’s seal seems to be a forgery (Recueil des actes des Rois de Provence…, op. cit., table 2, n° 2). 55. They date from the 17th century (T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 43). 56. Ibid., p. 163 k’’. 57. Ibid. 58. For the Ottonian seals, cf. H. KELLER, « Ottonische Herrschersiegel… », op. cit. ; M. RUPRECHT, « Die Siegel der Ottonen, Spiegelbilder der Macht », in R. JENDYSCHIK, G. SCHLENKER and R. WERNER (ed.), Auf den Spuren der Ottonen III. Protokoll des Kolloquiums am 22. Juni 2001 in Walbeck/Hettstedt, Halle a. d. Saale, 2002, p. 61-69. 59. For an illustration, cf. appendix, fig. 7. 60. M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit., n° 46, p. 123 ; B. SCHNEIDMÜLLER, Karolingische Tradition und frühes französisches Königtum. Untersuchungen zur Herrschaftslegitimation der westfränkisch- französischen Monarchie im 10. Jahrhundert, Wiesbaden, 1979, p. 98 sq. ; ID., « Ottonische Familienpolitik und französische Nationsbildung im Zeitalter der Theophanu », in A. VON EUW and P. SCHREINER (ed.), Kaiserin Theophanu. Begegnungen des Ostens und des Westens um die Wende des ersten Jahrtausends. Gedenkschrift des Kölner Schnütgen-Museums zum 1000. Todesjahr der Kaiserin, Cologne, 1991, t. 2, p. 345-359, here p. 350 sq. 61. The copy of the cartulary of Saint-André-le-Bas burnt in 1854. 62. T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 53, p. 186 w. Schieffer underlines that this description should not be understood as the announcement of an earlier form of the throne seal which became popular only in the eleventh century, but that one had to imagine « den mit allen Herrscherenblemen ausgestatteten König auf dem Throne sitzend (…), ohne daß dieser Thron darum sichtbar wäre » (T. SCHIEFFER, « Historisch-diplomatische… », op. cit., p. 86). It is not sure whether the seal which is now lost, but which was mounted on a forged charter which Conrad was supposed to have issued on the 8th of April 861 in favour of Payerne (T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 54) was a forgery. It is possible it was not genuine. Another the seal of Conrad’s mother Bertha which was placed on a charter dating from the 1st April 961 and pretending to be the donation thanks to which Payerne could be founded is a fake (T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 55, esp. p. 192). A likely seal with the circumscription « BERTA DEI GRACIA HVMILIS REGINA » with a seal imagine presenting the queen with a crown with three spikes, holding a book in the left hand and a sceptre in the right hand was not in use at that time, but only much later. For women’s seals, cf. A. STIELDORF, « Die Siegel der Herrscherinnen. Siegelführung und Siegelbild der “deutschen” Kaiserinnen und Königinnen », Rheinische Vierteljahrsblätter, 64 (2000), p. 1-44. 63. M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit., n° 59, p. 135 ; cf. P.-A. MARIAUX, « Brèves considérations sur le sceau de Rodolphe III (993-1032) », Revue historique neuchâteloise, 150 (2013), p. 265-269 ; M. TRIPET, « Le sceau de Rodolphe III et les armes de Bourgogne », Archivum heraldicum, 6 (1892), p. 59-60. For the Ottonian model, cf. R.-H. BAUTIER, « Échanges d’influences dans les chancelleries souveraines du Moyen Âge, d’après les types des sceaux de Majesté », Comptes rendus. Académie des inscriptions et belles-lettres, 2 (1968), p. 192-220 [again in ID., Chartes, sceaux et chancelleries…, op. cit., t. 2, p. 563-591]. 64. T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 99 ; the seal was to be found in n° 98, 102, 114 and 122, too ; for an illustration, cf. E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund…, op. cit., table 5, n° 4, p. 20. 65. T. SCHIEFFER, MGH DD Burg…, op. cit., n° 112 ; for an illustration, cf. appendix, fig. 8 ; E. A. STÜCKELBERG, Denkmäler des Königreichs Hochburgund…, op. cit., table 5, fig. 4 and 5 (for a description, p. 20 sq.) ; É. ANTOINE-KÖNIG (ed.), Le Trésor de l’abbaye de Saint-Maurice d’Agaune, Paris, 2014, p. 70 sq. ; B. ANDENMATTEN et al., Écrire et conserver. Album paléographique et diplomatique de l’abbaye de Saint- Maurice d’Agaune VIe-XIe siècle, Chambéry/Lausanne/Saint-Maurice, 2010, p. 23-25 and table 3. The

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 110

second seal is found in a charter from 996, too, in which Rudolph III assigns the county of Tarentaise to the archbishop Amizo. This charter which is kept in the Archives départementales de la Savoie (cote AD 073 – SA 176) can be consulted online [http://www.savoie-archives.fr/1630- la-charte-de-rodolphe-iii-10e-s-.htm]. For a slightly divergent seal cf. http:// gilles.maillet.free.fr/histoire/recit_bourgogne/recit_bourgogne_transjurane.htm [15-11-2017]. 66. According to the scepters Schieffer wrote : « Lilienszepter in der rechten, schräg gehaltenes Kugelszepter in der linken Hand » (T. SCHIEFFER, « Historisch-diplomatische… », op. cit., p. 87). 67. H. KELLER, « Ottonische Herrschersiegel… », op. cit., p. 6, n. 11. 68. The version of the chancellery of Saint-Maurice shows pearls on the spikes of the crown. However, the differences are that marginal that they might be the mere result of an old and decrepit mould, too. 69. M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit., n° 61, p. 140. For Robert’s seals, cf. H. PINOTEAU, « Les sceaux de Robert le Pieux », in O. GUYOTJEANNIN et al. (ed.), Pratiques de l’écrit documentaire au XIe siècle, Paris, 1997, p. 235-245. For Hugh Capet’s lost seal, which we only know from a draft of Mabillon and according to whom the seal was showing a hand of justice, cf. M. DALAS, Corpus des sceaux…, op. cit. ; O. GUYOTJEANNIN, « Nouveaux témoins du sceau perdu de Hugues Capet », Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France (1993), p. 122-134 ; for an explanation of the hand of justice, cf. H. PINOTEAU, « La main de justice des rois de France : essai d’explication », Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France (1978-1979), p. 262-265 ; ID., « Les insignes du roi vers l’an Mil », in M. PARISSE and X. BARRAL ALTET (ed.), Le roi de France et son royaume autour de l’an Mil, Paris, 1992, p. 73-88. 70. When Otto III introduced in 997/998 the aforementioned throne seal, a seal in which the king is sitting full-face, bearded and crowned, holding a fleur-de-lis sceptre and an orb and, swathed with a full length tunic and a mantle on his backless throne, his legs wide apart and his feet pointed outwards, Henry I, who was enthroned king of the Francia occidentalis in 1031, copied and maintained the chief features of the seal, but in his seal the king held a fleuron and wore a fleur- de-lis crown. Rudolph III, on the other hand, who had not any male children and who might have felt the end of his line as his own soon death which occurred in 1032 did not seem to have changed and adapted his seals any more. For these seals, cf. H. KELLER, « Die Siegel und Bullen Ottos III », in A. WIECZOREK and H. HINZ (ed.), Europas Mitte um 1000, Stuttgart, 2000, t. 2, p. 763-773 ; B. M. BEDOS-REZAK, « Suger and the Symbolism… », op. cit., p. 95. 71. Apes in inventionibus imitandas, que flores, non quales acceperint, referunt, sed ceras ac mella mirifica quadam permixtione conficiunt (FRANCESCO PETRARCA, Epistole familiares, I, 8, II [http:// www.mlat.uzh.ch/MLS/xfromcc.php? tabelle=Francesco_Petrarca_cps6&rumpfid=Francesco_Petrarca_cps6,%20Epistole%20familiares, %20%20%201,%20%20%208&id=Francesco_Petrarca_cps6,%20Epistole%20familiares, %20%20%201,%20%20%208&level=&corpus=6¤t_title=LIBER%20I (16-06-17)].

ABSTRACTS

Les grandes étapes de l’histoire du royaume de Bourgogne ainsi que les transformations que ce royaume subit pendant près de cent vingt ans se reflètent dans plusieurs sources, notamment dans les sceaux. Ces derniers permettent, en autres, d’en comprendre l’orientation politique. C’est le cas, par exemple, de Rodolphe Ier qui tient énormément à s’inscrire dans la continuité des

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 111

Carolingiens de la Francia orientalis pour renforcer sa légitimité et consolider son règne. Par ailleurs, de nombreuses évolutions se lisent dans les sceaux, oscillants entre traditions et innovations, comme lorsque Rodolphe II tente d’agrandir le royaume en focalisant son attention sur la Souabe et sur le regnum Italiae, puis lors de la fusion de la Transjurane et du royaume de Provence sous Conrad et, enfin, au moment où les Ottoniens étendent leur emprise sur Rodolphe III.

INDEX

Keywords: seals, kingship, tradition, renewal, symbolic language, communication Mots-clés: sceaux, royauté, tradition, renouvellement, langage symbolique, communication

AUTHOR

JESSIKA NOWAK Researcher and Lecturer at the University of Basel

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 112

Recherche active

La Bourgogne au premier Moyen Âge (VIe‑Xe s.) : approches spatiales et institutionnelles – 1re livraison

Dossier cartographique

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 113

Chantiers

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 114

Saint-Martin de Blanquefort (Gironde) : apport d’une fouille de faible ampleur à la connaissance d’un cimetière paroissial

Juliette Masson, Hélène Réveillas et Mikaël Rouzic

NOTE DE L'AUTEUR

Avec la collaboration de Valérie Marache, céramologue gestionnaire du mobilier, Centre d’archéologie préventive de Bordeaux métropole.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 115

1 Blanquefort est une des vingt-huit communes du territoire métropolitain de Bordeaux (Gironde). De nombreux indices d’une occupation dans ce secteur, dès l’Antiquité, sont mentionnés dans la Carte Archéologique de la Gaule relative à la Gironde1. Située au nord de Bordeaux, cette commune est connue localement pour le château de Blanquefort, dont les vestiges les plus anciens sont attribuables au XIe siècle. Dès le XIXe siècle, des fragments de tegulae utilisés en remploi sont remarqués dans les murs du château et des monnaies romaines ainsi que de la céramique protohistorique sont mises au jour à l’occasion d’une fouille sur le site castral.

2 Un diagnostic a été réalisé par l’Inrap en 2012, dans le cadre du réaménagement de la place de l’église paroissiale Saint-Martin de Blanquefort2. Il a révélé une occupation funéraire illustrée par une inhumation en pleine terre avec une logette céphalique, des sépultures sans architecture en pierre, mais ayant pu avoir un couvercle en matériau périssable, des sépultures aménagées dans un coffrage en pierre avec logette céphalique et des sarcophages trapézoïdaux. Il est mentionné également une construction rectangulaire à quatre compartiments, réalisée dans l’enceinte du cimetière, et qui pourrait être un caveau ou un pourrissoir.

3 Ces résultats ont amené à la prescription d’une fouille réalisée à l’automne 2014. Le projet consistait en la mise en place d’une fontaine nécessitant l’aménagement d’une cuve et de deux chambres techniques. Placée à une dizaine de mètres au sud de l’église, la surface affectée était réduite : l’emprise de la fouille représentait seulement 9 m2, pour une profondeur maximum de 1,30 m.

État des connaissances

Une église romane en grande partie disparue

4 L’église paroissiale Saint-Martin de Blanquefort, orientée nord-ouest - sud-est, résulte du profond remaniement d’un édifice médiéval : seule une abside romane subsiste pour les anciennes parties orientales. D’après les dernières études menées par les associations historiques locales, l’église des XIe-XIIe siècles aurait été détruite par un incendie et reconstruite dans le style gothique aux XVe et XVIe siècles, avant une restauration complète dans un style néoclassique au cours du XIXe siècle (fig. 1 et 2).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 116

Fig. 1 – Localisation de l’église paroissiale Saint-Martin de Blanquefort et signalisation de la zone fouillée en 2014

DAO Bordeaux Métropole

Fig. 2 – Saint-Martin de Blanquefort : élévation nord, façade de l’église paroissiale, reconstruite au XIXe siècle dans le style néoclassique

Cl. J. Masson

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 117

5 La plus ancienne mention de la paroisse, alors située en milieu rural, date du XIIe siècle. Elle est en effet signalée en 1165 dans le cartulaire de Sainte-Croix parmi les possessions de l’abbaye suburbaine.

6 Un ancien plan de l’église, non daté, permet d’observer un état disparu de l’édifice (fig. 3).

Fig. 3 – Saint-Martin de Blanquefort : plan ancien de l’église et du cimetière

Plan fourni par M. Henri Bret (Cercle historique de Blanquefort), Archives de la ville de Bordeaux. Cote et date non communiquées.

7 On peut distinguer la profonde abside du chevet cantonnée de deux absidioles. La nef paraît très large, aussi large que les parties orientales, et des contreforts semblent rythmer l’élévation extérieure de l’édifice, sauf la façade occidentale. Deux annexes, ou chapelles, flanquent la nef au sud. Une porte ouvre à l’ouest et une autre ouverture est ménagée au nord dans la travée occidentale de la nef, amenant vers le cimetière. Ce dernier est signalé autour de l’église par un trait symbolisant une clôture, où des ouvertures sont figurées. Cette clôture accuse un angle au sud-ouest, car elle suit le tracé de la voirie, contrairement au nord et à l’est, où elle souligne un espace aux contours arrondis ou à pans coupés, donnant ainsi l’impression que cet espace était plus grand et fut tronqué par l’aménagement des rues. L’église apparaît dans la moitié sud de la zone ainsi délimitée, mais elle a pu être plus centrale auparavant. L’accès au cimetière est signalé à trois endroits avec deux ouvertures à l’ouest, dont l’une est face à la porte de l’église, et une autre au nord.

8 Les textes renseignent peu sur l’église ancienne, mais quelques indices peuvent toutefois être glanés au gré des comptes rendus de visite. Un texte daté de 1734 décrit une église bâtie de pierres, de chaux et de sable. La longueur donnée est de 60 pieds, pour une largeur de 46 pieds et 27 pieds de hauteur. L’église est plafonnée et carrelée, « les murailles en sont bonnes, blanchies au-dedans et non recrépies par dehors, les fenêtres sont vitrées garnies de barres de fer avec des châssis de fil d’archal ; les portes

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 118

sont en bon état et ferment à clef ». Est encore mentionné « un clocher en forme de tour carrée qui est au-dessus de la chapelle saint George couvert d’ardoises, les murs en sont bons, l’escalier en bon état et fermé à clef, il y a deux cloches ». Le même texte évoque le cimetière, qui « environne l’église, est entouré de murailles, ne ferme point à clef, assez fermé d’ailleurs, il n’y a point de grillages aux entrées, il y a une grande croix de pierre au milieu, il n’y a point d’endroit séparé pour les enfants baptisés, on ne porte point les enfants décédés sans baptême, on a soin de faucher l’herbe qui vient dans le cimetière, il n’y a point de marché ni chemin public »3.

9 Le clocher mentionné dans cette visite ne se détecte pas sur le plan précédent (cf. fig. 3), mais peut-être est-ce celui qui apparaît sur le cadastre de 1843 (fig. 4), établi à une date où une église de style néoclassique a remplacé la précédente. Étant mentionné au-dessus d’une chapelle et sans croisée visible sur le plan ancien, ce clocher pourrait être lié à d’hypothétiques aménagements gothiques des XVe-XVIe siècles, mais il indique probablement que la reconstruction néoclassique est antérieure à 1734.

Fig. 4 – Extrait du cadastre daté de 1843

On distingue l’absidiole d’origine romane conservée au sud de l’édifice néoclassique. Archives départementales de la Gironde, cote 3 P 056/063.

Des indices d’une occupation funéraire pour le haut Moyen Âge

10 Une fouille réalisée dans l’église en 1984 par B. Fayolle-Lussac a mis au jour deux sarcophages mérovingiens, dont un est entreposé dans l’actuel cimetière de la commune (fig. 5)4.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 119

Fig. 5 – Sarcophage découvert dans l’église Saint-Martin, conservé dans le cimetière actuel de Blanquefort

Cl. J. Masson

11 Ce sarcophage, indice d’une occupation du site pour la période mérovingienne, comporte une cuve longue de 1,97 m et large de 0,68 m à la tête et de 0,17 m au pied – mesures prises en partie haute – pour une profondeur de 0,37 m et des parois épaisses de 6 à 8 cm. Le couvercle, en bâtière et sans décor ni strie visible, est long de 1,98 m, large de 0,64 m côté tête et de 0,33 m côté pieds, pour une épaisseur de 0,13-0,23 m comprenant un chanfrein de 6 cm. L’ensemble est exposé à l’air libre dans l’actuel cimetière paroissial. Ce sarcophage est du même type qu’un exemplaire mis au jour lors de la fouille en 2013 du cimetière paroissial de Villenave-d’Ornon (Gironde). Deux autres furent découverts lors de la fouille du cimetière paroissial de Bruges (Gironde) en 2014, dont un était semblable à celui de Blanquefort et l’autre était différent par son décor soigné de stries régulières sur l’ensemble du couvercle5. Celui de Blanquefort, confectionné dans un calcaire local, jaune et à astéries, est légèrement plus grand que celui de Villenave-d’Ornon, un peu plus petit que celui décoré de Bruges et très proche de celui du même site dépourvu de décor. Cet exemple du site de Blanquefort complète ainsi le bilan régional élaboré récemment par Guillaume Rougé, Christian Scuiller et Yves Gleize6.

12 Hormis les indications fournies par les textes et cadastres évoqués précédemment, aucun autre indice ne permet de mieux appréhender l’emprise du cimetière et son évolution. Les textes indiquent que le cimetière de l’église Saint-Martin aurait accueilli des sépultures jusqu’en 1853, malgré un abandon officiel en 1809 pour cause d’insalubrité7. L’espace funéraire est transformé en place au cours du XIXe siècle après le déplacement effectif du cimetière.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 120

Apports de la fouille archéologique menée en 2014

La population inhumée

13 Au total, dix-neuf sépultures d’individus en position primaire ont été observées, illustrant les phases médiévale et moderne de l’occupation funéraire autour de l’église, avec une même représentation en sujets adultes (9) et immatures (10).

14 En termes de stratigraphie, les sépultures modernes et contemporaines se situent entre l’unité stratigraphique 1005 (encaissant) et l’unité 1004 (abandon du cimetière). Les sépultures médiévales apparaissant dans deux unités stratigraphiques successives ; la plus profonde, située ici directement sur le substrat, a livré à la fouille des tessons de céramique carolingienne. Ces niveaux d’inhumations médiévales ne peuvent être différenciés précisément, tous deux ayant livré des architectures funéraires similaires.

15 Parmi les sépultures mises au jour, quatorze sont attribuables au second Moyen Âge, les plus anciennes ayant pu être datées des XIe-XIIe siècles (fig. 6).

Fig. 6 – Saint-Martin de Blanquefort : plan des vestiges mis au jour

Les traits longs, bleus et verts, signalent les squelettes. Topographie M.-P. Valleix, infographie J. Masson.

16 Parmi ces quatorze sujets, huit sont des individus adultes – un homme, une femme, six de sexe indéterminé – et six sont des individus immatures. L’échantillon est trop faible pour discuter du recrutement, toutefois nous pouvons remarquer que les classes d’âge les plus jeunes (0 et 1-4 ans) sont représentées tout comme celle des adolescents (10-14 ans).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 121

17 Tous les sujets ont été déposés sur le dos, treize selon une orientation ouest-est la tête à l’ouest, et deux sont axés nord-ouest - sud-est, la tête au nord-ouest.

18 Pour l’état sanitaire des défunts, il est intéressant de souligner, que, au sein de l’échantillon de Blanquefort, les valeurs d’hypoplasies dentaires sont supérieures à ce qui a été observé sur les sites voisins contemporains de Villenave-d’Ornon et de Bruges8, traduisant des stress dans la vie de ces individus.

19 L’étude des assemblages céramiques issus de la fouille a mis en évidence un niveau qui se distingue des autres par son homogénéité chronologique et qui appartiendrait à la période carolingienne. C’est dans cette unité stratigraphique qu’ont été installées plusieurs sépultures, dont trois ont pu être datées des XIe et XIIe siècles par une analyse radiocarbone. Les indices évoquant l’époque carolingienne restent trop peu nombreux et sur un espace trop restreint pour évoquer un habitat distinct d’un espace funéraire, contemporain ou pas, ou un cimetière habité, etc. S’il y a bien continuité d’occupation de cet espace, on ne peut affirmer, pour autant et dans l’état actuel des connaissances, une continuité dans la fonction funéraire du site.

20 Des monnaies datées des XIVe-XVe siècles et des XVe-XVIe siècles ont été prélevées dans le comblement d’une sépulture moderne et dans celui de fosses médiévales et modernes. Elles témoignent des remaniements fréquents au sein de l’espace funéraire, tout en s’accordant avec les datations des structures mises au jour.

Différentes architectures funéraires

21 Les architectures funéraires sont en pierre, en bois ou mixtes (pierre, bois, mortier) pour la période médiévale et en bois pour la période moderne. Le faible échantillon de Blanquefort ne permet pas de déceler une sélection typologique de ces architectures par âge ou par sexe.

22 Plusieurs coffrages en pierre (calcaire) ont été observés, mais le couvercle n’était pas conservé dans la majorité des cas et des sépultures postérieures étaient installées directement au-dessus. Une seule sépulture en coffrage en pierre était couverte par une dalle calcaire scellée à l’argile, aménageant un espace vide et clos (fig. 7).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 122

Fig. 7 – Sépulture en coffrage de pierre (calcaire blanc) aménagé avec une logette céphalique et couvert d’une dalle monolithe (calcaire jaune) scellé à l’argile orange

Cl. M. Rouzic

23 Un autre coffrage en pierre, destiné à un sujet immature, était en grande partie recouvert de mortier, où des négatifs de planches en bois étaient visibles : des éléments en bois semblent avoir été utilisés pour servir de couvercle ou installés pour soutenir un couvercle d’une autre nature, non retrouvé en fouille (fig. 8).

Fig. 8 – Sépulture en coffrage de pierre recouvert de mortier de chaux conservant des traces d’éléments en bois

Cl. M. Hautin

24 Une cuve de sarcophage en calcaire avec logette céphalique trapézoïdale a également été mise au jour (fig. 9), avec trois périodes successives d’utilisation.

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 123

Fig. 9 – Sépulture en sarcophage de plan trapézoïdal avec une logette céphalique en queue d’aronde

Ce sarcophage a été rouvert pour y aménager un coffrage et inhumer un sujet immature. Cl. M. Rouzic

25 Un premier sujet adulte y avait été déposé, puis cette sépulture avait été ouverte à nouveau pour y aménager un coffrage en pierre partant de la logette céphalique et réduisant l’espace intérieur de moitié, pour y installer un sujet immature, le tout étant refermé par le couvercle initial du sarcophage. Celui-ci a ensuite été recreusé de manière à abriter la fosse d’un troisième sujet, immature également (fig. 10).

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 124

Fig. 10 – Sujet immature (1116) inhumé dans le sarcophage d’un premier défunt adulte (1119) et sépulture d’un sujet immature (1086) aménagée sur le couvercle du sarcophage

L’usage du mortier a été observé pour le fond et le coffrage du sujet immature présent dans le sarcophage, de même pour le sujet immature installé sur le couvercle, qui, lui, a en outre reçu une couverture de mortier – éléments en bois à envisager, mais non perçus à la fouille. Infographie L. Maccanin, mises en couleur et en page J. Masson.

26 Le mortier de chaux était fréquemment utilisé dans l’aménagement des sépultures, en fond de fosse et dans certains cas aussi pour former des bords, voire une couverture, probablement en association avec des éléments en bois, qui n’ont pas pu être reconnus à la fouille. Enfin, des contenants en bois ont été observés dans les niveaux attribués à l’occupation moderne.

Conclusion

27 Les résultats issus de la fouille sur le cimetière de Saint-Martin de Blanquefort révèlent le potentiel de ce type d’intervention de petite envergure. Malgré une fenêtre d’observation assez réduite, ils sont tout à fait représentatifs des différentes problématiques développées dans la recherche la plus actuelle en archéologie funéraire médiévale. Ils seront intégrés dans une étude de synthèse, regroupant les résultats des opérations menées sur les cimetières paroissiaux des communes du même territoire métropolitain – Villenave-d’Ornon, Bruges, Gradignan et Mérignac –, afin d’avancer sur les questions liées à l’implantation des lieux de culte, à la continuité de l’occupation funéraire attenante, à la typologie de l’architecture funéraire, tout en prenant soin de toujours lier, quand le site s’y prête, étude de l’espace funéraire et analyse de l’édifice associé. Reçu : 10 août 2017 – Accepté : 27 novembre 2017

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 125

NOTES

1. C. DOULAN avec la collaboration de X. CHARPENTIER, Carte archéologique de la Gaule, t. 33/2 (Bordeaux), Paris, 2013. 2. V. ELIZAGOYEN, Rapport de diagnostic, Blanquefort place de l’église (Gironde), rapport final d’opération de fouille, Inrap/ministère de la Culture/SRA Aquitaine, Bordeaux, 2013. 3. Archives départementales de la Gironde, G 652, fol. 66-75. 4. V. ELIZAGOYEN, Rapport de diagnostic…, op. cit. et H. BRET, La vie religieuse à Blanquefort au XXe siècle, Blanquefort, 2006. 5. H. RÉVEILLAS, Villenave-d’Ornon, place de l’église Saint-Martin, rapport final d’opération de fouille, Service d’archéologie préventive de Bordeaux métropole/ministère de la Culture/SRA Aquitaine, Bordeaux, 2014, US 2255 ; J. MASSON, Place de l’église Saint-Pierre à Bruges (Gironde), Rapport final d’opération de fouille, Bordeaux, Centre d’archéologie préventive de Bordeaux métropole/ministère de la Culture/SRA Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, Bordeaux, 2017, US 1732 et US 1756. 6. G. ROUGÉ, C. SCUILLER et Y. GLEIZE, « Cartographie des sites à sarcophages en Aquitaine », in I. CARTRON, F. HENRION et C. SCUILLER (éd.), Les sarcophages de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge : fabrication, utilisation, diffusion (éd. Aquitania, suppl. 34), Bordeaux, 2015, p. 149-154. 7. G. DABADIE, Blanquefort et sa région à travers les siècles, Bordeaux, 1952, p. 117. 8. H. RÉVEILLAS, Villenave-d’Ornon…, op. cit. ; J. MASSON, Place de l’église Saint-Pierre à Bruges…, op. cit.

INDEX

Mots-clés : haut Moyen Âge, Moyen Âge central, église paroissiale, cimetière, sépulture, sarcophage, coffrage

AUTEURS

JULIETTE MASSON Archéologue responsable d’opérations Moyen Âge-époque moderne, Centre d’archéologie préventive de Bordeaux métropole/UMR 5607-AUSONIUS université Bordeaux Montaigne

HÉLÈNE RÉVEILLAS Archéo-anthropologue responsable d’opérations, Centre d’archéologie préventive de Bordeaux métropole/UMR 5199-PACEA université de Bordeaux

MIKAËL ROUZIC Archéo-anthropologue contractuel, Centre d’archéologie préventive de Bordeaux métropole/ UMR 5199-PACEA université de Bordeaux

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 126

Parutions récentes

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 127

Le temps long de Clairvaux. Nouvelles recherches, nouvelles perspectives (XIIe-XXIe siècle)

RÉFÉRENCE

Arnaud Baudin, Alexis Grélois (éd.) Paris, Somogy, 2016 Broché avec rabats, 16 x 24 cm, 408 p. ISBN : 978-2-7572-1083-3 30 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 128

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 129

Les pratiques de l’écrit dans les abbayes cisterciennes (XIIe-milieu du XVIe siècle). Produire, échanger, contrôler, conserver

RÉFÉRENCE

Arnaud Baudin, Laurent Morelle (éd.) Paris, Somogy, 2016 Broché avec rabats, 16 x 24 cm, 376 p. ISBN : 978-2-7572-1136-6 28 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 130

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 131

Ruling the Script in the Middle Ages. Formal Aspects of Written Communication (Books, Charters, and Inscriptions)

RÉFÉRENCE

Sébastien Barret, Dominique Stutzmann, Georg Vogeler (eds.) Turnhout, Brepols, 2016 (Utrecht Studies in Medieval Literacy, 35) 553 p. ISBN : 978-2-503-56743-3

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 132

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 133

Les spectres du Bon Gouvernement

RÉFÉRENCE

Rosa Maria Dessì Paris, PUF, 2017 15 x 21,7 cm, 448 p. ISBN : 978-2-13-063214-6 29 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 134

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 135

L’arbre et la colonne

RÉFÉRENCE

Isabelle Marchesin Paris, Picard, 2017 Relié, 24 x 32,5 cm, 232 p., 198 illustrations ISBN : 978-2-7084-1033-6 65 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 136

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 137

Le fou dansant et le mundus inversus

RÉFÉRENCE

Martine Clouzot, Marie-José Gasse-Grandjean Berne, Infoclio, 2017 (Living books about history) ISBN : 978-3-906817-11-8 DOI : 10.13098/infoclio.ch-lb-0007

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 138

Table des matières et accès au texte intégral

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 139

Pour les siècles des siècles. La civilisation chrétienne de l’Occident médiéval

RÉFÉRENCE

Oleg Voskoboynikov Paris, Vendémiaire, 2017 (Retour au Moyen Âge) 360 p. + 12 p. de cahier central ISBN : 978-2-36358-293-5 26,50 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 140

Présentation

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 141

Les saints face aux barbares au haut Moyen Âge. Réalités et légendes

RÉFÉRENCE

Edina Bozoky (dir.) Rennes, PUR, 2017 15,5 x 24 cm, 208 p. ISBN : 978-2-7535-5394-1 20 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 142

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 143

Les marchands du temple. La société chrétienne et le cercle vertueux de la richesse du Moyen Âge à l’époque moderne

RÉFÉRENCE

Giacomo Todeschini Paris, Albin Michel, 2017 Broché, 14,5 x 22,5 cm ISBN : 978-2-226-32419-1 27 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 144

Extrait

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 145

Saint-Étienne de Sens. La métropole sénonaise : la première cathédrale gothique dans son contexte. Actes du colloque international en l’honneur du 850e anniversaire de la consécration de la cathédrale Saint- Étienne de Sens, Sens 10, 11, 12 octobre 2014

RÉFÉRENCE

Textes réunis et présentés par Jean-Luc Dauphin, Claire Pernuit-Farou, Lydwine Saulnier-Pernuit Sens-Paris, Société archéologique de Sens-Picard, 2017 Relié, 416 p. ISBN : 978-2-7084-1029-9 42 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 146

Description

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 147

La malédiction des sept péchés. Une énigme iconographique dans la Bretagne ducale

RÉFÉRENCE

Laurent Guitton Rennes, PUR, 2017 17 x 24,5 cm, 288 p. ISBN : 978-2-7535-5015-5 28 €

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017 148

Table des matières

Bulletin du centre d’études médiévales d’Auxerre | BUCEMA, 21.2 | 2017